126

# S T #

6513

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé (Du 14 septembre 1953)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, le projet d'une loi concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé.

La Suisse fait partie dès l'origine de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), dont vous avez approuvé la constitution par arrêté fédéral du 19 décembre 1946 (RO 1948, 1001).

Le 17 juillet 1948, la première assemblée mondiale de la santé vota à l'unanimité, avec la participation de la Suisse, une résolution par laquelle elle adoptait, comme emblème de l'Organisation mondiale de la santé, l'emblème des Nations Unies coupé verticalement par le caducée (bâton d'Esculape avec serpent) en or. La résolution de l'assemblée contenait en outre les recommandations suivantes: a. Toutes mesures appropriées devront être prises afin d'empêcher l'emploi, sauf autorisation du directeur général de l'Organisation mondiale de eanté, de l'emblème, du sceau officiel et du nom de l'Organisation mondiale de la santé, ainsi que de l'abréviation de ce nom en lettres initiales, notamment à des fins commerciales sous forme de marques de fabrique ou de commerce ; 6. L'interdiction prendra effet aussitôt que possible et, de toute façon, au plus tard dans un délai de deux ans à dater de l'adoption de la présente recommandation par l'assemblée de la santé, et c. Chacun des Membres de l'Organisation mondiale de la santé, en attendant que pareille interdiction soit mise en vigueur dans ses territoires, devra s'efforcer d'empêcher, sauf autorisation du directeur général de l'Organisation mondiale de la santé, toute utilisation de l'emblème, du nom ou des initiales de l'Organisation mondiale de la Santé, notamment à des fins commerciales sous forme de marques de fabrique ou de commerce.

127

Le présent projet doit permettre de tenir les engagements que la Suisse a assumés en adoptant la résolution rappelée ci-dessus. Notre pays se doit d'autant plus d'assurer à l'Organisation mondiale de la santé la protection qu'elle recherche que cet organisme a son siège en Suisse.

Selon la recommandation b reproduite ci-dessus, les mesures de protection en faveur de l'Organisation mondiale de la santé auraient dû prendre effet à partir de juillet 1950. Dès le début cependant, la protection recherchée par l'Organisation mondiale de la santé lui a été assurée dans une certaine mesure, en Suisse, par les dispositions du code civil sur la protection de la personnalité (art. 28 et 29). C'est pourquoi nous avons cru pouvoir attendre, avant de vous présenter le présent projet, d'être en mesure de vous en soumettre en même temps un autre, dont l'objet est assez semblable. Il s'agit de la révision, rendue nécessaire par suite de la ratification des nouvelles conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes de la guerre, de la loi du 14 avril 1910 concernant la protection de l'emblème et du nom de la Croix-Bouge. Comme nous le disons dans le message concernant le projet de loi susmentionné, les deux projets de loi tendent à empêcher que des tiers n'abusent à des fins privées de l'emblème et de la dénomination d'ime institution internationale. Dans le même message, nous avons examiné s'il ne serait pas recommandable, du point de vue de la technique législative, de fondre les deux projets en un seul.

Nous sommes arrivés à la conclusion qu'il convenait de rejeter une telle solution et de faire deux lois distinctes. Pour les motifs, nous renvoyons au message en question (FF 1953, III, 110).

II

Les différentes dispositions du projet donnent heu aux remarques suivantes : Article premier Conformément à la résolution a adoptée par la première assemblée mondiale de la santé (cf. chiffre I ci-dessus), il appartient au directeur général de l'Organisation mondiale de la santé d'autoriser l'emploi de l'emblème et du nom qu'il s'agit de protéger. On peut admettre que cette autorisation ne sera accordée qu'aux organes de l'Organisation mondiale de la santé ou à des personnes ou institutions en relation avec cette organisation.

Art. 2 II ne saurait être question d'interdire l'emploi des initiales de l'Organisation mondiale de la santé dans n'importe quelle langue. L'interdiction devra se limiter aux initiales dans les langues officielles suisses et, selon le désir exprimé par l'Organisation mondiale de la santé, en anglais.

Aucune limitation semblable n'est prévue, en revanche, concernant l'emploi

128

du nom de l'Organisation mondiale de la santé en toutes lettres. Cette organisation peut avoir un intérêt à ce que l'emploi de son nom, même dans une autre langue, puisse être poursuivi en Suisse ; ainsi, par exemple, si une telle désignation en langue étrangère est apposée en Suisse sur des marchandises destinées à l'exportation.

Art. 3 La législation actuelle (art. 14, 1er al., ch. 2, de la loi sur les marques de fabrique et de commerce et art. 17, 2e al. de la loi sur ; les dessins et modèles industriels) prévoit déjà le refus de l'enregistrement ou du dépôt des marques de fabrique et de commerce et des dessins ou modèles industriels contraires à des dispositions de la législation fédérale. Le présent article 3 n'est donc pas indispensable. Nous avons cependant jugé utile de reprendre cette disposition dans le projet, pour des raisons d'ordre pratique, notamment pour permettre au lecteur de se renseigner immédiatement, et aussi complètement que possible, sur la portée de l'interdiction prononcée par la loi.

Art. 4 En principe, les droits acquis doivent être respectés lors de l'entrée en vigueur d'une loi nouvelle. Cependant, si la Suisse veut tenir les engagements qu'elle a pris envers l'Organisation mondiale de la santé, ces droits ne pourront pas être maintenus de façon absolue, mais seulement dans la mesure où ils ne porteront pas préjudice à cette organisation; tel sera le cas par exemple si les signes et dénominations visés par la loi sont employés dans un domaine étranger à celui de l'Organisation mondiale de la santé.

D'autre part, les tiers qui auront fait l'emploi des signes ou dénominations dont il s'agit depuis une date postérieure au 17 juillet 1948 seulement ne seront pas mis au bénéfice d'un droit acquis. Cette date a été choisie comme étant celle à laquelle ont été votées les recommandations rappelées plus haut et à partir de laquelle la Suisse s'est engagée, conformément aux recommandations a et c, à prendre en faveur de l'Organisation mondiale de la santé des mesures de protection. On peut admettre aussi qu'à partir de cette date l'Organisation mondiale de la santé, son emblème et son nom étaient connus du publie; à ce moment déjà, les tiers étaient tenus de respecter le droit de ladite organisation à l'usage exclusif de son emblème et de son nom.

Art. 5 Sera passible de poursuites, outre l'emploi non autorisé des signes et dénominations protégés, l'emploi de tout signe ou dénomination pouvant prêter à confusion. Cette disposition n'empêchera pas les tiers d'employer, comme par le passé, certains éléments isolés de l'emblème protégé. Le motif du serpent, par exemple, combiné ou non avec le bâton d'Esculape, est généralement employé dans le domaine de la médecine et de la pharmacie ;

129

il entre fréquemment, en particulier, dans la composition de marques de fabrique et de commerce, pour des produits pharmaceutiques, instruments de chirurgie ou autres produits semblables. De même, le globe terrestre figure assez souvent dans des marques de fabrique et de commerce. L'emploi de ces éléments isolés restera licite tant qu'il n'y aura pas de confusion possible avec l'emblème de l'Organisation mondiale de la santé pris dans son ensemble.

Art. 6 er e Cette disposition (1 et 2 al.) est conforme aux articles 172 et 326 du. code pénal suisse; le 3e alinéa a été repris de l'article 15 de la loi fédérale du 30 septembre 1943 sur la concurrence déloyale.

Art. 7 Pas d'observations.

Art, 8 Des dispositions analogues sont contenues dans les lois sur les brevets d'invention (art. 43 et 44), sur les marques de fabrique et de commerce (art. 31 et 32), sur les dessins et modèles industriels (art. 28 et 29), ainsi que dans la loi pour la protection des armoiries publiques et d'autres signes publics (art. 16). Le 2e alinéa s'inspire de l'article 58 du code pénal suisse.

Art. 9 II n'est pas exclu que d'autres organisations intergouvernementales demandent par la suite une protection analogue de leur nom et dé leur emblème. C'est pourquoi, pour ne pas avoir à créer chaque fois une loi spéciale, nous avons prévu la possibilité d'étendre, par un arrêté du Conseil fédéral, à d'autres organisations intergouvemementales la protection assurée par la future loi. Xous n'avons pas pris en considération les organisations internationales clé caractère privé ; les dispositions du droit commun, notamment l'article 28 du code civil relatif à la protection de la personnalité et la loi sur la concurrence déloyale, nous semblent leur accorder une protection suffisante.

III Au vu de ce qui précède, nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet de loi ci-amiexé et saisissons cette occasion pour vous assurer, Monsieur le Président et Messieurs, de notre haute considération.

Berne, le 14 septembre 1953.

9818

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le, président de la Confédération, Etter Le chancelier de la Confédération, Oli. Oser

130

(Projet)

LOI FÉDÉRALE concernant

la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les recommandations contenues dans la résolution du 17 juillet 1948 adoptée par la première assemblée mondiale de la santé; TU les articles 64 et 64Ws de la constitution; vu. le message du Conseil fédéral du 14 septembre 1953, arrête : Article premier L'emploi de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé, ou de tout autre signe ou dénomination pouvant prêter à confusion, est interdit, sauf autorisation du directeur général de l'Organisation mondiale de la santé.

2 L'emblème de l'Organisation mondiale de la santé est formé de l'emblème des Nations Unies, coupé verticalement par le caducée (bâton d'Esculape avec serpent) en or, l'emblème des Nations Unies étant défini de la façon suivante: Une carte du inonde figurée en projection azimutale equidistante, le pôle nord servant de centre; autour de la carte, une couronne de branches d'olivier stylisées et croisées; le tout en or sur champ gris-bleu, les mers en blanc. La projection atteint le 60e degré de latitude sud et comprend 5 cercles concentriques.

1

Art. 2 L'interdiction prévue à l'article premier s'applique également à l'emploi des initiales de l'Organisation mondiale de la santé dans l'une des langues officielles suisses et en anglais, soit OMS (Organisation mondiale de la santé, Organisazione mondiale della sanità); WGO (Weltgesundheitsorganisation) ; WHO (World Health Organization).

131

Art. 3 Les raisons de commerce dont l'usage est interdit aux termes de la présente loi ne pourront pas être inscrites au registre du commerce.

2 De même, seront exclus du dépôt les marques de fabrique et de commerce et les dessins et modèles industriels contraires à la présente loi.

1

Art. 4 Celui qui, depuis une date antérieure au 17 juillet 1948, aura fait usage des signes ou dénominations visés par la présente loi pourra continuer à en faire le même usage, s'il n'en résulte aucun préjudice pour l'Organisation mondiale de la santé.

Art. 5 Celui qui, intentionnellement et contrairement aux dispositions de la présente loi, aura fait usage de l'emblème, du nom ou des initiales de l'Organisation mondiale de la santé, ou de tout autre signe ou dénomination pouvant prêter à confusion, celui notamment qui les aura fait figurer sur des enseignes, des annonces, des prospectus ou des papiers de commerce, ou les aura apposés sur des marchandises ou sur leur emballage, ou aura vendu, mis en vente ou mis en circulation d'une autre manière des marchandises ainsi marquées, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende jusqu'à dix mille francs; dans les cas de peu de gravité, ou si l'auteur a agi par négligence, le juge prononcera les arrêts ou l'amende jusqu'à mille francs.

2 Les dispositions générales du code pénal suisse sont applicables aux infractions prévues par la présente loi; sont d'autre part réservées les dispositions plus rigoureuses de la partie spéciale dudit code.

1

Art. 6 Si l'une des infractions prévues à l'article 5 est commise dans la gestion d'une personne morale, la peine sera appliquée aux directeurs, fondés de pouvoir, membres de l'administration ou d'un organe de contrôle ou liquidateurs qui auront commis l'infraction.

2 Si l'une de ces infractions est commise dans la gestion d'une société en nom collectif, d'une société en commandite ou d'une société a responsabilité limitée, la peine sera appliquée aux sociétaires, directeurs, fondés de pouvoir ou liquidateurs qui auront commis l'infraction.

3 La personne morale ou la société sera toutefois tenue solidairement de l'amende et des frais.

1

132

Art. 7 1

La poursuite et le jugement des infractions incombent aux cantons.

Les jugements, prononcés administratifs ayant un caractère pénal et ordonnances de non-Lieu doivent être communiqués immédiatement et sans frais en expédition complète au ministère public de la Confédération.

2

Art. 8 L'autorité compétente prend les mesures conservatoires nécessaires ; elle peut en particulier ordonner la saisie des marchandises et des emballages marqués contrairement à la présente loi.

z Alors même qu'aucune personne déterminée ne peut être poursuivie ou condamnée, le juge ordonnera l'enlèvement des signes illégaux de même que la confiscation et la vente ou la destruction des instruments et appareils servant exclusivement à l'apposition de ces signes.

3 Une fois les signes enlevés, les marchandises et emballages saisis seront restitutés à leur propriétaire, contre paiement de l'amende éventuelle et des frais.

Art. 9 Le Conseil fédéral est autorisé à déclarer les dispositions de la présente loi applicables par analogie aux signes ou dénominations d'autres organisations intergouvernementales.

1

Art. 10 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

sais

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé (Du 14 septembre 1953)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1953

Année Anno Band

3

Volume Volume Heft

37

Cahier Numero Geschäftsnummer

6513

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

17.09.1953

Date Data Seite

126-132

Page Pagina Ref. No

10 093 253

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.