18.056 Message sur la modification de la loi sur les forces hydrauliques du 23 mai 2018

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi sur les forces hydrauliques, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2014

M 14.3668

Réglementation de la redevance hydraulique après 2019 (N 9.12.2014, Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie CN; E 3.12.15; N 2.3.16).

Veuillez agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

23 mai 2018

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Alain Berset Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2016-3047

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Condensé La modification proposée de la loi vise à régler la redevance hydraulique maximale à partir de 2019, pour les 5 années à venir. Il est par ailleurs prévu de déléguer au Conseil fédéral la compétence de conclure des conventions internationales dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique de cours d'eau situés à la frontière et de préciser les compétences du DETEC.

Contexte Le droit exclusif d'utiliser, sur un site donné, la force hydraulique d'un cours d'eau public est octroyé au moyen d'une concession. En contrepartie, le concessionnaire doit s'aquitter d'une redevance annuelle (redevance hydraulique) auprès de la communauté concédante (p. ex: canton, district, commune). La redevance hydraulique est fixée par les cantons dans les limites posées par le droit fédéral (art. 76, al. 4, de la Constitution). Le droit fédéral prévoit aujourd'hui uniquement un montant maximum comme limite.

Le Parlement a augmenté plusieurs fois la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral depuis l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1916 sur les forces hydrauliques (LFH). Elle se monte à 110 francs par kilowatt théorique (fr./kWth) pour la période allant de 2015 à fin 2019 (art. 49, al. 1, LFH). L'art. 49, al. 1bis, LFH prévoit que le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale un projet d'acte fixant le taux maximal de la redevance hydraulique applicable à partir du 1er janvier 2020.

Le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) travaille actuellement à une révision partielle de la loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité. Afin de permettre un examen global, il est dans un premier temps opportun d'attendre avant d'entreprendre une refonte en profondeur du régime de redevance hydraulique.

Contenu du projet La redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral en vigueur depuis le 1er janvier 2015 de 110 fr./kWth est maintenue jusqu'à la fin 2024. Pendant les dix premières années d'exploitation, les aménagements hydro-électriques qui bénéficient de contributions d'investissement en vertu de l'art. 26 de la loi sur l'énergie sont exonérés de redevance hydraulique sur la force hydraulique nouvellement utilisée, soit sur la puissance théorique supplémentaire.

La compétence de conclure des
conventions internationales dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique de cours d'eau situés à la frontière est déléguée au Conseil fédéral. L'appareil normatif, jusqu'ici lacunaire, définissant les compétences du DETEC en matière d'aménagements hydro-électriques situés à la frontière est en outre complété et centralisé.

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FF 2018

Message 1

Présentation du projet

1.1

Contexte

Conformément à l'art. 76, al. 4, de la Constitution (Cst)1, les cantons disposent des ressources en eau. La législation cantonale détermine la communauté (canton, district, commune ou corporation) à laquelle appartient le droit de disposer de la force des cours d'eau publics (art. 2, al. 1, de la loi du 22 décembre 1916 sur les forces hydrauliques [LFH]2). La communauté qui dispose de la force d'un cours d'eau peut l'utiliser elle-même ou en concéder l'utilisation à des tiers (art. 3, al. 1, LFH). Si elle concède le droit à un tiers, elle peut prélever une taxe pour l'utilisation de l'eau dans les limites prévues par la législation fédérale. La redevance hydraulique est la rémunération que le concessionnaire doit verser chaque année à la communauté concédante pour la cession du droit d'usage particulier.

Jusqu'à présent, le législateur fédéral a fait usage de sa compétence de poser des limites qui lui est accordée par la Cst. (art. 76, al. 4, Cst.) en fixant un montant maximum par kilowatt théorique pour la redevance hydraulique (redevance hydraulique maximale prévue par le droit fédéral). Les cantons sont libres d'édicter leurs propres dispositions au sein de ce cadre défini par le droit fédéral. Ils peuvent ainsi aussi prévoir une redevance hydraulique inférieure à la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral. Lors de l'octroi de la concession, il faut en outre respecter le principe selon lequel la totalité des prestations et des conditions imposées au concessionnaire, telles que taxes, redevance annuelle, livraison d'eau ou d'énergie, durée de la concession, normes des tarifs électriques, participation de la communauté au bénéfice, droit de retour et rachat, ne doit pas grever sensiblement l'utilisation de la force (art. 48, al. 1 et 2, LFH). En vertu de l'art. 49, al. 2, LFH, les cantons qui ont introduit un impôt cantonal spécial sur l'utilisation de la force hydraulique doivent réduire la redevance hydraulique de manière à ce que les deux taxes réunies n'excèdent pas la redevance hydraulique maximale prévue par le droit fédéral.

Le législateur a révisé six fois la redevance hydraulique maximale prévue par le droit fédéral depuis son introduction. En 1918, le maximum était de 6 francs par cheval-vapeur théorique (fr./CVth), ce qui équivaut à un maximum de 8 francs et 16
centimes par kilowatt théorique (kWth). Lors de la dernière révision de l'art. 49 LFH en 2010, la redevance hydraulique maximale a d'abord été relevée au 1 er janvier 2011 de 80 fr./kWth à 100 fr./kWth et au 1er janvier 2015 à 110 fr./kWth (cf.

figure 1).

Conformément à l'art. 49, al. 1 et 4, LFH, la commune qui dispose de la force d'un cours d'eau peut percevoir une redevance hydraulique maximale de 110 fr./kWth sur les aménagements hydro-électriques d'une puissance théorique supérieure à 1 2

RS 101 RS 721.80

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2000 kW. Pour les puissances théoriques comprises entre 1000 et 2000 kW, une progression linéaire allant jusqu'au maximum alors applicable est tout au plus autorisée. Les aménagements hydro-électriques d'une puissance théorique inférieure à 1000 kW ne paient pas de redevance hydraulique.

Figure 1 Evolution du taux nominal maximal de la redevance hydraulique de 1908 à 2019

La plupart des cantons appliquent la redevance hydraulique maximale prévue par le droit fédéral. Seuls les cantons de Berne, du Jura, de Zoug et de Vaud appliquent aujourd'hui un taux plus bas. Les redevances hydrauliques perçues chaque année totalisent actuellement près de 550 millions de francs. Une grande partie est prélevée par les cantons de montagne que sont le Valais, les Grisons, le Tessin et Uri ainsi que par les cantons de Berne et d'Argovie (cf. figure 2).

Les recettes provenant de l'utilisation de la force hydraulique revêtent une grande importance, en particulier dans les cantons des Grisons, d'Uri et du Valais. La part des recettes provenant de la redevance hydraulique dans les rentrées fiscales, y compris les recettes provenant de régales et de concessions, se situe dans ces cantons entre 13 et 23 %. Si l'on se réfère au total des recettes avec incidences financières, la part de la redevance hydraulique est encore comprise entre 5 et 7 %. Dans certaines communes des Grisons et du Valais, la part de la redevance hydraulique dans les recettes avec incidences financières est toutefois nettement plus élevée.

Dans la plupart des cantons, la redevance hydraulique revient intégralement à ces derniers. Le canton des Grisons partage pour moitié avec les communes les recettes provenant de la redevance hydraulique (redevance hydraulique et impôt sur les forces hydrauliques). Dans le canton du Valais, le canton encaisse toutes les redevances hydrauliques perçues sur le Rhône. Les recettes provenant de la redevance hydraulique perçue sur les cours d'eau latéraux sont allouées à 40 % aux communautés habilitées à percevoir la redevance hydraulique. Dans le canton d'Uri, les corporations d'Uri et d'Ursern perçoivent 10 % de la redevance hydraulique. En

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moyenne, plus de 70 % des recettes provenant de la redevance hydraulique vont aux cantons, le solde revient aux communes.

Figure 2 Recettes approximatives provenant de la force hydraulique par canton en 2016

La dernière adaptation du maximum avait été proposée par l'initiative parlementaire 08.445 «Pour une redevance hydraulique équitable» que la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des Etats a transmise à son conseil le 10 février 2009. La nécessité de relever la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral avait alors été motivée par l'augmentation du prix de l'énergie de pointe et de réglage, par la hausse de la valeur de l'énergie d'accumulation et par la compensation du renchérissement. Pour déterminer le montant du nouveau maximum, les auteurs de l'initiative étaient principalement partis de l'hypothèse d'une évolution linéaire jusqu'en 2019 fondée sur le renchérissement moyen de 1997 à 2008. Ils prévoyaient en outre une augmentation générale non seulement du coût de la construction, mais aussi de la valeur des ressources hydrauliques. La réglementation avait été limitée à 2019 afin de donner la possibilité de prendre en compte dans une réglementation ultérieure les retombées alors prévisibles de la libéralisation du marché de l'électricité, dont une première étape partielle a été réalisée en 2009, ainsi que l'impact de la rétribution à prix coûtant du courant injecté3. Dans le même temps, le Conseil fédéral avait été chargé de soumettre à l'Assemblée fédérale en temps utile, avant l'échéance de la réglementation, un projet d'acte pour la période à partir du 1 er janvier 2020 (art. 49, al. 1bis, LFH).

3

FF 2009 1019, ici 1031

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Lors des délibérations sur la nouvelle loi sur l'énergie, le Parlement a transmis la motion 14.3668 «Réglementation de la redevance hydraulique après 2019» qui avait été déposée par la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national le 26 août 2014. Le Parlement a ainsi chargé le Conseil fédéral de se pencher rapidement, en collaboration avec les cantons, les entreprises de la branche énergétique et les autres milieux intéressés, sur la réglementation relative à la redevance hydraulique.

Au vu des défis à relever sur le marché actuel et conscient qu'un changement de système n'est pas encore susceptible d'obtenir une majorité dans le contexte actuel, le Conseil fédéral a proposé en consultation (22 juin 2017 au 13 octobre 2017) de fixer la redevance hydraulique maximale à 80 fr./kWth durant une période transitoire de trois ans. Parallèlement, le rapport explicatif a esquissé un modèle flexible de la redevance hydraulique qui pourrait s'appliquer après la période transitoire. Il a également mis en discussion une redevance hydraulique maximale différenciée avec un taux maximal de 80 fr./kWth pour les seuls aménagements hydro-électriques qui sont nettement déficitaires et l'actuel taux maximal de 110 fr./kWth pour tous les autres.

1.2

Dispositif proposé

La révision proposée de la LFH définit la redevance hydraulique maximale applicable du 1er janvier 2020 à la fin 2024. Elle reconduit pour une période de 5 ans la redevance hydraulique maximale de 110 fr./kWth fixée par le droit fédéral en vigueur depuis le 1er janvier 2015. Parallèlement, il y a lieu de renoncer à mentionner à l'art. 49 LFH la nécessité d'un accord sur la redevance hydraulique si les rapports internationaux sont touchés. Avec cette proposition, le Conseil fédéral remplit son mandat de soumettre un projet d'acte applicable au terme de la réglementation actuelle. La nouvelle réglementation assure la sécurité du droit. En effet, les conséquences de l'absence d'une définition de la redevance hydraulique maximale dans le droit fédéral seraient difficiles à évaluer, d'autant plus que les dispositions légales de différents cantons relatives à la redevance hydraulique cantonale renvoient au maximum prévu dans le droit fédéral.

En ce qui concerne les aménagements hydro-électriques pour la construction desquels le concessionnaire reçoit une contribution d'investissement en vertu de l'art. 26 de la loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie (LEne)4, aucune redevance hydraulique ne peut être perçue pendant le délai accordé pour la construction et pendant les dix ans qui suivent la mise en service. Les exploitants d'installations existantes qui reçoivent une contribution d'investissement pour des agrandissements ou des rénovations notables sont exemptés de la redevance hydraulique pendant dix ans à partir de la mise en service de l'installation agrandie ou rénovée pour la part pour laquelle ils reçoivent une contribution d'investissement en vertu de l'art. 26 LEne. Les réductions s'appliquent aussi aux impôts spéciaux mentionnés à l'art. 49, al. 2, LFH.

4

RS 730.0

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Outre l'art. 49, l'actuel art. 7 LFH est aussi remanié afin de préciser et de centraliser dans la loi la compétence du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique pour les procédures relatives aux cours d'eau situés à la frontière. Par ailleurs, la compétence de mener des procédures d'assainissement pour les aménagements hydro-électriques situés à la frontière, qui relève du DETEC dans la pratique actuelle, mais qui ne lui est pas encore explicitement attribuée dans la loi, y est inscrite. Le Conseil fédéral est en outre habilité à régler seul dans le cadre d'accords internationaux toutes les questions relatives aux aménagements hydroélectriques situés à la frontière. On entend par là accorder les droits d'utilisation, autoriser la communauté qui dispose de la force d'un cours d'eau international à l'utiliser elle-même, fixer les prestations et conditions imposées au concessionnaire lors de l'octroi du droit d'utilisation et ordonner des mesures d'assainissement et des mesures relatives à l'exploitation. A cette fin, la compétence de conclure des conventions internationales dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique de cours d'eau situés à la frontière est déléguée au Conseil fédéral.

1.3

Motifs et appréciation de la solution retenue

Le résultat de la consultation5 montre que la proposition d'un maximum de 80 fr./kWth limité à trois ans ne réunit pas de majorité. La flexibilisation de la redevance hydraulique esquissée dans le rapport explicatif est certes saluée dans les grandes lignes, mais considérée comme prématurée notamment par le PDC, l'UDC et le PLR. La majorité des cantons et des communes est d'avis que ce n'est pas la redevance hydraulique, mais plutôt de mauvaises décisions politiques et entrepreneuriales qui sont responsables, le cas échéant, des déficits des exploitants et qu'une baisse de la redevance hydraulique ne contribuerait pas à remédier aux distorsions sur le marché suisse de l'électricité. La plupart des acteurs de la branche de l'électricité sont d'avis que si l'on ne fait que réduire la redevance hydraulique maximale tout en maintenant le financement prévu par les producteurs, on prolongerait de plusieurs années la défaillance du système résultant du fait que tous les exploitants n'ont pas la possibilité de répercuter la redevance hydraulique sur les clients finals captifs. Ils considèrent en outre que maintenir une taxe fixe alors que les prix fluctuent sur le marché est étranger au système. La branche soutient en revanche l'introduction immédiate d'une réglementation flexible de la redevance hydraulique. Elle refuse largement la variante esquissée dans le rapport explicatif d'une redevance hydraulique maximale différenciée avec un maximum de 80 fr./kWth pour les seuls aménagements hydro-électriques déficitaires et de 110 fr./kWth pour tous les autres, d'autant plus qu'elle présente plusieurs inconvénients. La mise en oeuvre d'un taux maximum différencié serait en particulier discriminatoire, complexe et coûteuse.

5

Rapport sur les résultats de la consultation sur la révision de la loi sur les forces hydrauliques. Peut être téléchargé sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2017 > DETEC

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Face aux résultats contrastés de la consultation, le Conseil fédéral propose de maintenir pour 5 ans supplémentaires la redevance hydraulique maximale actuelle de 110 fr./kWth. Ceci devrait permettre d'avoir, après la prochaine révision partielle de la loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité6 (LApEl), une vision d'ensemble des différents thèmes actuels que sont l'accord sur l'électricité avec l'UE, l'ouverture complète du marché, l'élaboration d'un modèle proche du marché, la sécurité de l'approvisionnement et le système de redevance hydraulique. Le Conseil fédéral regrette toutefois que la branche et les cantons n'aient pas fait un pas les uns vers les autres, ni dans les discussions avec les autorités fédérales, ni dans le cadre de la consultation. Il est d'avis qu'il reste nécessaire d'agir en ce qui concerne la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral.

Selon le message du 16 août 1995 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l'utilisation des forces hydrauliques7, la compétence d'accorder des droits d'utilisation a déjà été transférée, le 1er janvier 1994, du Conseil fédéral à l'ancien Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie (DFTCE). Par analogie, il est tout naturel de déléguer au Conseil fédéral la compétence de conclure des conventions internationales relatives aux forces hydrauliques situées à la frontière. Comparé avec l'importance des objets que le Parlement doit d'ordinaire adopter, l'utilisation de la force hydraulique de cours d'eau situés à la frontière est de moindre importance, même s'il ne s'agit a priori pas de traités internationaux de portée mineure au sens de l'art 7a, al. 2, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA) 8 (cf. à ce sujet la Convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche au sujet de l'utilisation de la force hydraulique de l'Inn et de ses affluents dans la région frontalière9, et la Convention entre la Confédération suisse et la République française au sujet de l'aménagement hydroélectrique d'Emosson10). En habilitant le Conseil fédéral, le Parlement peut être déchargé de petits objets en grande partie techniques et plutôt rares. Le Conseil fédéral peut en outre déléguer la compétence pour conclure des traités
internationaux qui lui sera conférée par l'art. 7 al. 2 au DETEC, respectivement à l'OFEN pour les traités de portée mineure (art. 48a, al. 1 LOGA). La compétence pour d'autres contacts avec les autorités étrangères nécessaires pour procéder en accord avec les états voisins peut également être réglée par le Conseil fédéral (art.

8, al. 1 ainsi que art. 47, al. 1 et 2 LOGA).

1.4

Amélioration de la compétitivité de la force hydraulique

Lors de la dernière révision de la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral, on ne se souciait pas de la compétitivité de la force hydraulique. Les prix sur le marché de gros de l'électricité battaient des records, les coûts de revient de la grande hydraulique étaient inférieurs aux prix sur le marché. La situation et les 6 7 8 9 10

RS 734.7 FF 1995 IV 964, ici 980 RS 172.010 RS 0.721.809.163.1 RS 0.721.809.349.1

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prévisions étaient si bonnes que les projets hydrauliques étaient nombreux; une partie d'entre eux sont aujourd'hui réalisés ou sont en phase finale de construction.

Dans le contexte actuel, de nouveaux projets ne semblent être possibles qu'avec un encouragement par des contributions d'investissement et la rentabilité de l'hydraulique existante est remise en question, ceci pour les raisons suivantes:

11

­

Le marché de gros européen de l'électricité, qui est aussi déterminant pour le marché de gros suisse de l'électricité, n'a pas évolué comme prévu. Les prix de l'électricité ont culminé en 2008 avec une valeur annuelle moyenne du prix sur le marché Spot SWISSIX de 118 francs par Mégawatheure (fr./MWh), puis ont reculé jusqu'en 2016 à un niveau de 41 fr./MWh (cf. figure 3). En 2017, les prix de l'électricité sont pour la première fois remontés par rapport à l'année précédente. Les raisons à la base de cette augmentation de prix de l'ordre de 25% sont notamment l'évolution économique, l'augmentation des prix du CO2 ainsi que la réduction de surcapacités de production dans nos pays voisins. A l'évolution des prix à la bourse européenne de l'électricité s'est ajoutée en Suisse l'appréciation du franc suisse qui a eu un impact direct significatif sur le résultat des ventes d'électricité à la bourse.

­

La baisse des prix sur le marché de gros de l'électricité a conduit un pourcentage toujours plus important de clients éligibles, notamment des gestionnaires de réseau de distribution sans production propre, à faire usage du libre accès au marché. Pour 2018, la Commission fédérale de l'électricité (ElCom) chiffre leur part à 66 %, alors qu'ils consomment 80 % de la quantité d'énergie brute qui peut être achetée librement 11. Voilà pourquoi toujours moins de producteurs hydrauliques peuvent vendre leur électricité au coût de revient à des clients dans l'approvisionnement de base. L'Elcom estime qu'encore 50 % de l'électricité hydraulique peut être vendue aujourd'hui dans l'approvisionnement de base en couvrant les coûts.

Communiqué de presse de l'ElCom du 17 novembre 2017. Peut être téléchargé sous: www.elcom.admin.ch > Documentation > Communiqués de presse > Sécurité de l'approvisionnement garantie à court terme ­ à certaines conditions

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Figure 3 Evolution des prix Swissix de 2006 à 2017

­

L'ouverture partielle du marché engendre des distorsions du marché, car les entreprises d'approvisionnement en énergie sans clients finals captifs peuvent tirer d'autres recettes d'un aménagement hydro-électrique que les entreprises d'approvisionnement en énergie qui ont des clients finals captifs.

La diversification et la répercussion des coûts de revient ont permis à ces dernières de réaliser pour la plupart des résultats et un chiffre d'affaires stables en dépit du recul des prix sur le marché de gros. C'est ce que montre aussi une étude commandée par l'OFEN en 201712, qui décrit les résultats commerciaux de différents types d'entreprises d'approvisionnement en énergie de 2007 à 2016.

Afin d'étudier la rentabilité de la force hydraulique, le Centre for Energy Policy and Economics de l'EPF Zurich a réalisé en 2014 une étude13 qui compile les coûts de revient de 60 aménagements hydro-électriques suisses et qui évalue l'efficacité

12

13

Ernst & Young AG (2017), Wirtschaftliche Situation von Schweizer Energieversorgungsunternehmen im Zeitverlauf (disponible en allemand avec résumé en français, traduction littérale: Situation économique des entreprises suisses d'approvisionnement en énergie au fil du temps) Peut être téléchargé sous www.ofen.admin.ch >Documentation >Publications > Base de données Publications générales > Wirtschaftliche Situation von Schweizer Energieversorgungsunternehmen im Zeitverlauf Filippini & Geissmann (2014), Kostenstruktur und Kosteneffizienz der Schweizer Wasserkraft (disponible seulement en allemand, traduction littérale: Structure des coûts et efficacité des coûts de la force hydraulique suisse). Peut être téléchargé sous www.ofen.admin.ch > Documentation > Publications > Base de données Publications générales > Kostenstruktur und Kosteneffizienz der Schweizer Wasserkraft

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des coûts des centrales. L'étude a été actualisée en 201714. Les coûts de revient effectifs moyens pondérés par la production se sont élevés de 2000 à 2016 en moyenne à 4,9 ct./kWh, les centrales au fil de l'eau à basse pression présentant, avec 3,5 ct./kWh, les coûts de revient les plus bas et les centrales à accumulation par pompage, avec 6,2 ct./kWh, les coûts de revient les plus élevés (cf. figure 4).

Comme le montre la figure, les coûts de revient se répartissent en différentes composantes de coûts dont la redevance hydraulique, qui représente en moyenne 1 ct./kWh, soit environ 20 % des coûts de revient, de 2000 à 2016. En raison de la hausse à 110 fr./kWth, la redevance hydraulique représente en moyenne 1,5 ct./kWh depuis 2015. Selon l'étude, les coûts de revient pondérés par la production se sont élevés en moyenne à 5,9 ct./kW en 2016. Si on les compare avec les prix sur le marché indiqués dans la figure 3 afin d'évaluer le potentiel de gains, on voit que les coûts de revient sont supérieurs en moyenne aux prix sur le marché en 2016 et que les centrales étudiées n'ont en moyenne pas réussi à couvrir leurs coûts. Les augmentations de prix enregistrées en 2017 débloquent en partie la situation.

Figure 4 Coûts de revient financiers moyens pondérés des quatre types de production, valeurs moyennes de l'an 2000 à 2016 (corrigées de l'inflation sur la base de 2015)

Source: Filippini & Geissmann (2017) 14

Filippini & Geissmann (2018), Kostenstruktur und Kosteneffizienz der Schweizer Wasserkraft ­ Mise à jour en 2017 (disponible seulement en allemand). Peut être téléchargé sous www.ofen.admin.ch > Documentation > Publications > Base de données Publications générales > Kostenstruktur der Schweizer Wasserkraft.

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Le Parlement a déjà agi à ce sujet: ­

La LEne entièrement révisée entrée en vigueur le 1er janvier 2018 prévoit pour la période allant de 2018 à 2022 une prime de marché d'au maximum 1 ct./kWh destinée à l'électricité produite par la grande hydraulique (installations d'une puissance supérieure à 10 MW) qui doit être vendue de manière non rentable sur le marché. L'instrument permet aux producteurs hydrauliques de vendre à leurs clients finals captifs l'électricité issue de la grande hydraulique qui n'est pas rentable en tenant compte dans leur tarif du coût de revient (art. 31, al. 3, LEne). Afin de soutenir la réalisation de nouveaux grands aménagements hydro-électriques ainsi que les agrandissements ou les rénovations notables d'installations existantes d'une puissance d'au moins 300 kW, la LEne prévoit en outre la possibilité d'octroyer des contributions d'investissement. Lors des délibérations sur la nouvelle LEne, le Parlement a déjà étudié et rejeté d'autres mesures de soutien ou d'encouragement possibles, entre autres parce qu'elles interviendraient trop sur le marché ou qu'elles seraient délicates d'un point de vue juridique15.

­

Le 15 décembre 2017, le Parlement a adopté en vote final la loi fédérale sur la transformation et l'extension des réseaux électriques16 (Modification de la loi sur les installations électriques et de la loi sur l'approvisionnement en électricité ­ Stratégie Réseaux électriques). Elle introduit à l'art. 6 al. 5 bis, LApEl deux nouveautés pour l'électricité issue d'énergies renouvelables provenant d'installations de production indigènes. D'une part, un gestionnaire de réseau actif dans l'approvisionnement de base peut prendre en compte dans son tarif le coût de revient de cette électricité, déduction faite des mesures de soutien éventuelles, indépendamment du fait qu'il s'agisse de production propre ou d'électricité achetée sur le marché. D'autre part, il n'a pas à appliquer la méthode du prix moyen dans le calcul des coûts de cette électricité dans son tarif. Il peut être fait usage de ces deux nouveautés jusqu'à l'expiration du modèle de prime de marché.

Les interventions relevant de l'économie d'entreprise visant à améliorer la situation momentanée de la force hydraulique suisse sont de la compétence des exploitants de centrales et de leurs propriétaires. Elles portent par exemple sur le rééchelonnement des dettes à des taux plus favorables ou sur la négociation de contributions dans les contrats de concession. Il conviendrait en outre d'examiner s'il n'est pas possible dans certains cas d'augmenter encore l'efficacité des coûts.

La force hydraulique suisse doit pouvoir rester sur le marché à long terme et, par conséquent, être concurrentielle par rapport aux autres technologies de production d'électricité. Pour augmenter si possible la compétitivité de la force hydraulique, il convient de prendre en compte à la fois les coûts et les possibilités de recettes. Les interventions étatiques devraient être évitées autant que possible, sauf en cas de défaillance du marché.

15

16

OFEN (2015), Centrales hydrauliques existantes: Les variantes de soutien et leurs effets.

Peut être téléchargé sous www.ofen.admin.ch >Documentation > Publications > Base de données Publications générales > Centrales hydrauliques existantes: Les variantes de soutien et leurs effets FF 2017 7485

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L'OFEN est en train d'élaborer une nouvelle conception du marché de l'électricité, qui a pour objectif d'assurer à long terme la sécurité d'approvisionnement de la Suisse. A cette fin, il a fait réaliser une étude17 sur la sécurité d'approvisionnement à l'horizon 2035. Par de nombreuses modélisations du parc de production de la Suisse et des pays voisins ainsi que du réseau de transport, l'étude arrive à la conclusion qu'en partant des hypothèses sous-tendant la Stratégie énergétique 2050, la sécurité d'approvisionnement peut être considérée comme non critique jusqu'en 2035. La sécurité d'approvisionnement est élevée en raison non seulement de la grande puissance installée du parc hydraulique suisse, mais également de la bonne intégration dans le réseau européen d'approvisionnement. Le Conseil fédéral estime judicieuse une réserve stratégique comme élément de sécurité supplémentaire afin d'assurer la disponibilité de l'énergie même dans des situations extrêmes. L'accord sur l'électricité avec l'UE demeure une condition importante qui faciliterait l'accès aux marchés européens de l'électricité et des capacités et qui permettrait à l'électricité issue de la force hydraulique suisse d'être plus concurrentielle.

1.5

Développement à long terme de la redevance hydraulique

Dès son origine, le taux maximal de la redevance hydraulique a été vu comme un moyen de créer un équilibre entre l'encouragement à l'utilisation de la force hydraulique indigène et à la production d'électricité à un prix avantageux, d'une part, et la protection des intérêts des collectivités publiques, d'autre part. Si l'on étudie l'introduction et l'évolution du taux maximal de la redevance hydraulique, on constate que, lors de chaque modification de la réglementation relative à la redevance hydraulique, une solution politique de compromis a dû être trouvée.18

17

18

Centre de recherche «Réseaux énergétiques» de l'EPFZ et centre de recherche «Approvisionnement durable en énergie et en eau» de l'Université de Bâle (2017), Modellierung der System Adequacy in der Schweiz im Bereich Strom (étude disponible en allemand avec résumé en français: traduction littérale: Modélisation de l'adéquation du système électrique en Suisse. Peut être téléchargé sous www.bfe.admin.ch > Documentation > Publication > Base de données Publications générales > Modellierung der System Adequacy in der Schweiz im Bereich Strom FF 1995 IV 964, ici 971

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Figure 5 Système flexible de redevance hydraulique en deux parties

Le Conseil fédéral considère que le système actuel de redevance hydraulique avec un maximum fixe est un modèle qui n'est pas tenable sur le long terme, car il ne permet pas de prendre en compte de manière équilibrée les intérêts des communautés qui disposent de la force d'un cours d'eau et ceux des exploitants d'aménagements hydro-électriques dans des conditions-cadres en mutation. Pour lui, il est primordial que le futur système de redevance hydraulique puisse s'adapter aux variations des conditions du marché. Pour ce faire, les pistes suivantes devront notamment être examinées: 1)

La flexibilisation de la redevance hydraulique aurait l'avantage de pouvoir mieux prendre en considération la valeur de la ressource hydraulique. Pour les modalités, différents concepts sont envisageables, tels qu'un impôt spécifique basé sur la quantité ou la valeur. Dans le concept de l'impôt spécifique basé sur la quantité, la redevance hydraulique est calculée proportionnellement à la quantité de production. Il se rapproche du système actuel de redevance hydraulique dans lequel le calcul repose sur la puissance théorique et donc sur les débits exploitables. Le concept de l'impôt basé sur la valeur se fonde sur le chiffre d'affaires et en prélève une partie. Le modèle flexible esquissé dans le rapport explicatif de la procédure de consultation (figure 5) combine les deux concepts.

2)

La taxe sur la rente des ressources est un cas particulier de la flexibilisation; le bénéfice qui doit être taxé dans ce contexte est calculé comme la différence entre les revenus tirés d'une ressource naturelle et les coûts engendrés par la transformation de la ressource naturelle en un bien correspondant. Ce concept est le plus différencié, mais aussi le plus complexe à mettre en oeuvre pour les cantons. Il convient de considérer chaque installation comme un cas particulier pour lequel il faut établir une redevance hydraulique spéci-

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fique. Pour simplifier, on peut aussi définir des catégories (centrales au fil de l'eau ou centrales par accumulation, p. ex.).

3)

Le maximum prévu dans le droit fédéral peut être défini sans montant plafonné. Sans modifier la Constitution, il est possible de définir une limite dans le droit fédéral qui ne consisterait pas en un montant plafonné, contrairement à la redevance hydraulique maximale actuelle. Le droit fédéral devrait définir de manière générale les critères de limitation de la redevance hydraulique, par exemple sur la base du principe d'équivalence.

4)

La question de savoir si la Confédération pourrait, dans le cadre constitutionnel actuel, renoncer totalement à poser des limites mériterait également d'être examinée. La compétence de réglementer la redevance hydraulique serait ainsi laissée intégralement aux cantons. Il en résulterait jusqu'à 26 réglementations cantonales19, qui pourraient se faire concurrence.

5)

Le financement de la redevance hydraulique indépendamment des concessionnaires a été évoqué dans le cadre de la consultation, notamment par les acteurs de la branche. Un financement solidaire de la redevance hydraulique ou d'éléments de celle-ci, par exemple par l'intermédiaire du supplément réseau, constituerait un changement radical du système de la concession dans la mesure où la taxe que le détenteur de la concession payait pour son droit d'utilisation serait alors à la charge du consommateur.

6)

L'intégration dans la péréquation financière nationale (PFN) est régulièrement avancée en lien avec la réglementation de la redevance hydraulique. Il serait contraire à l'esprit du système d'intégrer dans la PFN l'utilisation de droits souverains spécifiques à des tâches comme la redevance hydraulique.

Aussi cette option a-t-elle été régulièrement rejetée dans le passé. La première fois que la redevance serait prise en compte ne soulagerait d'ailleurs pas les cantons riches d'un point de vue hydraulique. Au contraire, le potentiel de ressources serait plus élevé avec l'intégration dans la PFN, et les cantons riches d'un point de vue hydraulique verraient leur situation péjorée dans la PFN.

Pour le choix d'une future solution, il sera décisif que la redevance hydraulique n'entrave pas trop les forces du marché et qu'elle ne rende pas les investissements impossibles. Elle ne devrait pas diminuer les incitations à réduire les coûts et à augmenter la production tout en indemnisant correctement l'utilisation des ressources en eau.

1.6

Comparaison avec le droit étranger

Le Land du Bade-Wurtemberg connaît la rémunération dite de l'utilisation de l'eau comme contre-prestation pour l'utilisation de la force hydraulique des cours d'eau publics. La rémunération est fonction de la puissance de la force hydraulique brute moyenne mise à la disposition du concessionnaire; elle correspond à la puissance 19

FF 1995 IV 964, ici 973

3553

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théorique en Suisse. Le taux de rémunération de l'utilisation de l'eau dans le Land du Bade-Wurtemberg, fixé à 15 /kWth, est plus bas qu'en Suisse et n'est perçu que pour les aménagements hydro-électriques situés sur les grands cours d'eau.

Les concessionnaires doivent également payer une redevance hydraulique en France.

Un pourcentage fixe des recettes sera prélevé sous forme de redevance hydraulique avec l'introduction d'un nouveau régime de concession. L'Italie connaît différentes taxes correspondant à la redevance hydraulique, qui doivent être payées en partie de manière cumulative. L'Autriche ne prélève aucune redevance hydraulique.

La Norvège connaît le système de la rente de ressources. Elle prélève une partie de cette rente de ressources en prenant en considération au cas par cas la production d'une centrale et ses coûts. La Suède en revanche n'a pas de redevance hydraulique.

1.7

Mise en oeuvre

La nouvelle réglementation reconduit la redevance hydraulique maximale actuelle pour 5 ans de plus. Ne soulevant aucune question de mise en oeuvre, elle peut dès lors être mise en vigueur sans dispositions d'exécution.

Il n'a pas encore été décidé si le Conseil fédéral préciserait par voie d'ordonnance les compétences des autorités fédérales pour procéder en accord avec les Etats voisins au cas où le Parlement déléguerait au Conseil fédéral, comme proposé, la compétence pour conclure seul des conventions internationales relatives à l'utilisation de la force hydraulique de cours d'eau situés à la frontière (cf. art. 48a, al. 1, LOGA).

1.8

Classement d'interventions parlementaires

Le Conseil fédéral propose de classer l'intervention parlementaire suivante: 2014

M 14.3668

Réglementation de la redevance hydraulique après 2019 (N 9.12.2014, Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie CN; E 3.12.15; N 2.3.16).

Dans cette motion, le Parlement a chargé le Conseil fédéral de se pencher rapidement, en collaboration avec les cantons, les entreprises de la branche énergétique et les autres milieux intéressés, sur la réglementation relative à la redevance hydraulique qui devra entrer en vigueur après 2019. Avec le présent message, le Conseil fédéral répond à la motion.

3554

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2

Commentaires des dispositions

Modification du préambule Le préambule renvoie encore à la Constitution du 29 mai 1874 (aCst.). C'est pourquoi il est adapté aux dispositions de la Constitution du 18 avril 1999 (Cst.). Les art. 23 et 24bis aCst. correspondent aux art. 76 et 81 de la Cst. en vigueur.

Art. 7

Cours d'eau internationaux

L'actuel art. 7 est remanié dans le cadre de la révision de l'art. 49 afin de clarifier les compétences dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique sur les sections internationales de cours d'eau. La compétence pour conclure seul des conventions internationales en matière de droit des eaux est déléguée au Conseil fédéral (al. 2).

Cette compétence permet au Conseil fédéral de régler de manière autonome toutes les questions qui se posent en lien avec l'utilisation de la force hydraulique des cours d'eau situés à la frontière notamment par le biais de conventions internationales. Des dispositions de portée similaire figurent par exemple aux art. 24 LApEl et 54 LEne.

Rien ne change en ce qui concerne la compétence du DETEC d'accorder les droits d'utilisation (al. 1, let. a) et d'autoriser la communauté qui dispose de la force d'un cours d'eau international à l'utiliser elle-même (al. 1, let. b). Par souci de cohérence, les normes relatives aux compétences dispersées dans la LFH ainsi que les tâches du DETEC prévues aux art. 48 et 62 sont clairement regroupées en un seul endroit. En octroyant la concession, le DETEC rend toutes les autorisations requises par le droit fédéral, si bien que les autorisations et les plans cantonaux ne sont plus nécessaires (al. 1, let. d). La fixation des prestations et conditions porte en particulier, mais pas seulement, sur la réglementation relative à la redevance hydraulique pour les aménagements hydro-électriques situés à la frontière (al. 1, let. c). L'organisation des compétences prévue à l'art. 7 est complétée par une disposition sur l'obligation d'ordonner des mesures d'assainissement et des mesures relatives à l'exploitation, qui incombe en pratique déjà aujourd'hui au DETEC en tant qu'autorité compétente pour les aménagements hydro-électriques situés à la frontière (al. 1, let. e). On entend par là en particulier les décisions relatives à l'assainissement des débits résiduels et à l'assainissement de la force hydraulique (rétablissement de la migration piscicole, assainissement du régime de charriage et suppression des impacts négatifs des éclusées sur les cours d'eau). Le DETEC peut habiliter le canton à ordonner les mesures nécessaires en délégant soit certains objets, soit des domaines thématiques entiers. L'habilitation implique l'accord du
canton avec la délégation de la tâche.

Les communautés qui disposent de la force d'un cours d'eau et les cantons doivent être associés au processus de décision (al. 3) dans tous les domaines mentionnés aux al. 1 et 2. C'est ce qui découle déjà de l'art. 76, al. 5 et 6, Cst. et prévaut par conséquent également dans l'application des autres dispositions de la LFH sans que ces normes ne soient expressément reformulées en ce sens. La position particulière des communautés qui disposent de la force d'un cours d'eau se justifie par le fait que le droit de disposition ­ et donc la souveraineté sur les eaux ­ appartient toujours à la communauté désignée par le droit cantonal (art. 2, al. 1, LFH). Même lorsque l'octroi de concessions et d'autorisations dans le cadre de relations internationales 3555

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relève de la Confédération en raison de sa compétence en politique étrangère (art. 54 Cst.), la souveraineté ne lui est pas transférée20. La précision apportée à l'art. 7, al. 3, clarifie aussi dans la LFH la position des communautés qui disposent de la force d'un cours d'eau.

Art. 49, al. 1, 1bis et 2, première phrase Al. 1: la redevance hydraulique maximale fixée par le droit fédéral reste au niveau des années 2015 à 2019, soit 110 fr./kWth. La réglementation est limitée à 5 ans, jusqu'à la fin 2024. Les cantons peuvent instaurer leurs propres réglementations relatives à la redevance hydraulique dans les limites posées par le droit fédéral, notamment prévoir un montant maximal plus bas. Le règlement du 12 février 2018 concernant le calcul des redevances en matière de droits d'eau (RDE) 21 reste valable.

La réglementation qui habilite la Confédération à prélever un pourcentage de la redevance hydraulique afin qu'elle puisse financer les montants compensatoires alloués aux cantons et aux communes en vue de combler le manque à gagner résultant d'une restriction considérable de l'utilisation de forces hydrauliques prévus à l'art. 22, al. 3 à 5, LFH demeure inchangée, à l'exception d'une modification purement linguistique par laquelle le terme «assurer» est remplacé par le terme «financer», qui est plus pertinent. Avec le verbe «financer», la loi précise que la Confédération peut exiger un pourcentage de la redevance hydraulique aux cantons qui la perçoivent, afin de le reverser sous forme de montants compensatoires aux cantons et aux communes.

L'obligation de la Confédération, si les rapports internationaux sont touchés, de veiller à ce que chaque modification du taux maximal de la redevance hydraulique fasse l'objet d'un accord international est radiée purement et simplement. La raison de cette suppression est, d'une part, que les compétences relatives aux aménagements hydro-électriques situés à la frontière sont définies de manière centralisée à l'art. 7. Le DETEC y est également déclaré compétent pour fixer les prestations et conditions (al. 1, let. c), qui comprennent aussi la redevance hydraulique. Cette disposition apporte une clarification concernant la compétence, qui fait défaut dans l'ancienne formulation «la Confédération» et qui a engendré des difficultés dans la pratique. D'autre part,
les règles du droit international coutumier de l'équité entre les Etats concernés ainsi que l'obligation d'information et de consultation22 demeurent.

Elles requièrent au minimum que les Etats concernés par un cours d'eau s'informent entre eux. Il est possible de procéder en accord avec les Etats voisins sans conclure de traité international23.

Al. 1bis: la disposition en vigueur oblige le Conseil fédéral à soumettre en temps utile un projet d'acte applicable au terme de la réglementation limitée à la fin 2019. Le 20

21 22 23

Marti Arnold (2014): art. 76, ch. marg. 26, 29 in: Ehrenzeller/Schindler/Schweizer/Vallender (éd.), Die schweizerisches Bundesverfassung, St. Galler Kommentar [Commentaire saint-gallois de la Constitution fédérale], 3e édition, Dike/Schulthess RS 721.831 ATF 129 II 114 ss, consid. 4.1 Cf. ATF 129 II 114 ss, consid. 3.3

3556

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mandat est rempli avec la réglementation proposée. Du fait de la nouvelle limitation dans le temps, le Conseil fédéral devra à nouveau soumettre en temps utile un projet d'acte à l'Assemblée fédérale. La disposition est adaptée dans ce sens.

Al. 2: le terme «usine » est actuellement utilisé dans la version française de la disposition. Du point de vue linguistique, le concept «aménagement hydro-électrique», qui est déjà utilisé à l'al. 4, est plus correct. On entend par là l'installation dans son ensemble et non pas seulement la centrale. C'est la raison pour laquelle la terminologie est harmonisée au sein de l'art. 49 dans le cadre de la présente révision.

Art. 50a

Réduction en cas d'octroi de contributions d'investissements

Al. 1, let. a: si une contribution d'investissement au sens de l'art. 26 LEne est allouée au concessionnaire d'un aménagement hydro-électrique, les cantons n'ont pas le droit de percevoir de redevance hydraulique pendant le délai accordé pour la construction ni d'impôts cantonaux spéciaux au sens de l'art. 49, al. 2. Le délai court, dans la mesure où la concession ne prévoit rien d'autre, à partir de l'entrée en force de l'autorisation de construire ou de l'approbation des plans et prend fin au terme du délai prévu dans l'autorisation. Les cantons doivent respecter d'office cette disposition.

Afin de réduire davantage les coûts liés au début de l'exploitation d'un nouvel aménagement hydro-électrique au bénéfice de contributions d'investissement, les cantons sont obligés de l'exempter de redevance hydraulique sur la puissance théorique totale pendant les dix ans qui suivent sa mise en service. Pendant cette période, les cantons ne peuvent pas non plus percevoir d'impôts cantonaux spéciaux au sens de l'art. 49, al. 2. Les cantons doivent respecter d'office cette disposition.

Al. 1, let. b: les concessionnaires d'aménagements hydro-électriques existants qui ont bénéficié de contributions d'investissement pour la réalisation d'agrandissements ou de rénovations notables de l'installation ont droit à l'exemption de la redevance hydraulique pendant les dix ans qui suivent la mise en service sur la puissance théorique moyenne supplémentaire (art. 51, al. 1). La redevance continue à être due sur l'ancien débit utilisable consigné dans la concession. Les cantons doivent respecter d'office cette disposition.

Al. 2: les réductions s'appliquent aussi aux impôts spéciaux prévus à l'art. 49, al. 2.

Les cantons ne peuvent dès lors pas prévoir des impôts cantonaux qui remplaceraient la redevance hydraulique qui n'est pas due.

Art. 51 Titre marginal et al. 1 Suite à la présente révision, le titre marginal est adapté. Le principe de calcul indiqué permet de calculer la puissance théorique déterminante pour fixer la redevance maximale. Le principe de calcul n'est pas modifié.

Al. 1: le terme «puissance» n'est utilisé dans la LFH actuelle qu'à l'art. 51, al. 1. Or, l'art. 49 al. 1, se réfère à la puissance théorique, calculée d'après les hauteurs de chute et les débits utilisables, en tant que base pour la fixation de la redevance hydraulique. Par souci d'harmonisation, le terme «puissance» est remplacé par «puissance théorique».

3557

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3

Effets

3.1

Conséquences pour la Confédération

Le maintien de l'actuelle redevance hydraulique maximale n'a aucune conséquence financière sur le budget ni sur l'état du personnel de la Confédération.

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

La proposition du Conseil fédéral de reconduire la redevance hydraulique maximale actuelle n'a aucune conséquence financière pour les cantons et les communes.

L'exemption de redevance hydraulique pour les constructions d'aménagements hydro-électriques et la réduction de la redevance pour les aménagements hydroélectriques notablement agrandis ou rénovés qui sont au bénéfice de contributions d'investissement, conduit d'une part à une réduction des futures recettes provenant de la redevance hydraulique pour les collectivités publiques habilitées à les percevoir. Ces collectivités bénéficient d'autre part à court terme du fait que les investissements permettent de conserver des emplois ou d'en créer. A long terme, elles peuvent escompter une hausse des recettes provenant de la redevance hydraulique.

En cas de réalisation d'une augmentation de capacité de 750 GWh à l'aide de contributions d'investissement, les montants de redevance qui ne doivent pas être payés se monteraient annuellement, sur toute la période d'exonération, pour cette quantité d'énergie et avec une redevance hydraulique fixée à 110 fr./kW th, à 11 millions de francs environ ou 2 pourcents des recettes totales de la redevance hydraulique. Au vu des effets positifs à long terme et étant donné que les contributions d'investissement contribuent dans une large mesure à la réalisation de nouveaux projets hydrauliques, une exonération ou une réduction limitée dans le temps est raisonnable. Lors du calcul des contributions d'investissement, l'évaluation tient compte de la réduction de la redevance hydraulique.

3.3

Conséquences économiques

L'utilisation de la force hydraulique crée directement ou indirectement un grand nombre d'emplois, surtout dans les régions de montagne. Outre l'exploitation des aménagements hydro-électriques, les dépenses annuelles d'entretien ainsi que les investissements dans la rénovation et dans la construction représentent des volumes de mandats considérables pour les entreprises actives dans la région et en Suisse. La force hydraulique est ainsi un pilier important de l'économie, surtout dans les régions de montagne.

3558

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3.4

Conséquences sociales

Les recettes provenant de la redevance hydraulique engendrent dans les communes de montagne des rentrées considérables, qui sont nécessaires par exemple pour proposer un habitat fiscalement favorable et attrayant et éviter l'exode régional.

3.5

Conséquences environnementales

Dans certains cantons, notamment dans les cantons de Berne et du Valais, une partie des recettes provenant de la redevance hydraulique sont affectées à des mesures en faveur de l'environnement, par exemple dans le cadre de la revitalisation des cours d'eau. Ces recettes restent inchangées dans un premier temps.

3.6

Autres conséquences

Aucune autre conséquence notable n'est attendue.

4

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral

4.1

Relation avec le programme de la législature

Le projet est annoncé dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201924. Le message définit comme objectif 7, entre autres, que la Suisse garantit un approvisionnement énergétique durable.

4.2

Relation avec les stratégies du Conseil fédéral

Avec la Stratégie énergétique 2050, le Conseil fédéral veut entre autres diminuer la consommation d'énergie et d'électricité par personne, augmenter la part des énergies renouvelables et réduire les émissions de CO2 liées à l'énergie. L'art. 2, al. 2, LEne vise un développement de la force hydraulique indigène permettant d'atteindre au moins 37,4 TWh en 2035. L'exonération de redevance hydraulique pendant dix ans pour les nouveaux aménagements, les agrandissements ou les rénovations notables au bénéfice de contributions d'investissement soutient des projets qui ne sont aujourd'hui pas rentables et qui ne seraient pas réalisés.

24

FF 2016 981, ici 1101

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5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

La LFH trouve sa principale base constitutionnelle à l'art. 76, al. 2, Cst. La Confédération a, dans le domaine de l'utilisation de l'eau pour la production d'énergie, une compétence législative limitée aux principes. Elle peut notamment fixer des limites dans le cadre desquelles les cantons peuvent prélever une taxe d'utilisation de l'eau (art. 76, al. 4, Cst.). Il en résulte que la Confédération a le droit de définir la charge financière maximale que les cantons peuvent imposer, sous forme de taxe, aux exploitants d'aménagements hydro-électriques pour l'utilisation de l'eau.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Aucun engagement international de la Suisse ne s'oppose au projet. La réglementation prévue n'entre en particulier pas en conflit avec le droit européen en vigueur ni avec la législation européenne en cours d'élaboration.

5.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit, qui, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst., doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

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