16.402 / 16.425 / 16.426 Initiatives parlementaires Programme de la législature. Suppression des coûts inutiles liés aux activités parlementaires / Programme de la législature.

Modification de la procédure / Mention des projets qui sont en cours de traitement au Parlement dans le programme de la législature Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 24 mai 2018

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification de la loi sur le Parlement, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

24 mai 2018

Pour la commission: Le président, Kurt Fluri

2018-1685

4301

Condensé A ce jour, les Chambres fédérales ont examiné à quatre reprises le programme de la législature sous la forme d'un arrêté fédéral simple. Elles ont donc pu y apporter des modifications. A chaque fois, des propositions ont été formulées pour rendre la procédure plus efficace et différentes initiatives parlementaires ont été déposées à cette fin en 2004, 2008 et 2012.

En 2016, trois initiatives parlementaires ont été déposées au Conseil national dans le cadre de l'examen de l'arrêté fédéral sur le programme de la législature 2015­ 2019. Deux d'entre elles visent à ce que le Conseil fédéral présente le programme de la législature sous la forme d'un rapport et que l'Assemblée fédérale soit chargée d'en prendre acte (16.402 et 16.425). La troisième prévoit que les projets qui sont en cours de traitement aux Chambres fédérales et qui contribuent à atteindre les objectifs de la législature soient également mentionnés dans le programme de la législature (16.426).

La Commission des institutions politiques du Conseil national (CIP-N) a donné suite à ces trois initiatives et, avec l'approbation de son homologue du Conseil des Etats (CIP-E), a élaboré un projet de modification de la procédure applicable au programme de la législature. La CIP-N partage le point de vue des auteurs des initiatives quant à la nécessité de diminuer la charge de travail induite par l'examen du programme de la législature et de simplifier la procédure. Parallèlement, elle rappelle qu'il est important que l'Assemblée fédérale puisse continuer de participer aux planifications importantes des activités de l'Etat en ayant la possibilité de confier au Conseil fédéral des mandats visant à modifier le programme.

La Constitution (art. 173, al. 1, let. g) impose que l'Assemblée fédérale participe aux planifications importantes, car celles-ci entraînent la prise de décisions préliminaires majeures et déterminantes pour la législation ­ le domaine de compétences du Parlement par excellence. Une majorité du Parlement doit pouvoir influer efficacement sur ces décisions préliminaires, qui n'ont certes pas d'effets juridiques contraignants, mais qui peuvent avoir des conséquences notables.

Parallèlement, la commission souhaite simplifier la procédure et réduire sensiblement la charge de travail. Selon le projet, le Conseil fédéral ne
présente plus son programme sous la forme d'un projet d'arrêté fédéral contenant des propositions sur tous les domaines politiques, lesquelles sont examinées par les commissions et les conseils et donnent lieu à un programme global de la législature établi par le Parlement: il soumet son programme à l'Assemblée fédérale uniquement pour que celle-ci en prenne acte, et ce, sous la forme d'un arrêté fédéral. Cette forme permet au Parlement de compléter l'arrêté fédéral par des mandats visant à modifier le programme de la législature. Ainsi, l'objet des débats n'est plus l'ensemble de la planification de la législature, mais uniquement les thèmes sur lesquels des majorités ou minorités de commission se seront expressément penchées.

4302

Cette solution est d'autant plus judicieuse que le législateur avait choisi, en 2014, de soumettre l'examen du plan financier à cette même procédure; depuis, celle-ci a été appliquée deux fois et a fait ses preuves.

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Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement

Selon la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl), «[a]u début de chaque législature, le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale un message sur le programme de la législature, accompagné d'un projet d'arrêté fédéral simple» (art. 146, al. 1). L'examen parlementaire de ce projet d'acte permet aux députés de modifier et de compléter les objectifs proposés par le Conseil fédéral et la liste des actes de l'Assemblée fédérale prévus pour atteindre ces objectifs.

Avant l'entrée en vigueur de la LParl, le Conseil fédéral soumettait à l'Assemblée fédérale, «pour qu'elle en prenne acte, un rapport sur les Grandes lignes de la politique gouvernementale» (art. 45bis de la loi sur les rapports entre les conseils).

L'Assemblée fédérale pouvait alors déposer des motions concernant le rapport afin de modifier ou de compléter les prévisions établies.

Lors de l'élaboration de la LParl, cette disposition de l'ancien droit a été jugée insatisfaisante, car elle impliquait une procédure nécessitant beaucoup de travail et manquant de clarté et d'efficacité.

1.2

Modification de la loi sur le Parlement du 22 juin 2007

En 2004, certaines carences sont apparues durant l'examen du programme de la législature, qui ont amené le Parlement à revoir entièrement la nouvelle procédure (iv. pa. 04.438/04.449 Programme de la législature. Rapport de la CIP-N du 3.11.2005, FF 2006 1825 ss). Ensuite de quoi la CIP-N a proposé la modification du 22 juin 2007 de la LParl et du règlement du Conseil national (RCN) [RO 2007 3773 ss, 5231 s.], dans le cadre de laquelle la décision a été prise de: ­

maintenir la forme de l'arrêté fédéral simple pour la prise de décision;

­

modifier la procédure de telle sorte qu'il ne soit plus possible de rejeter l'ensemble de l'arrêté fédéral;

­

considérer comme un objet soumis à délibération non seulement les objectifs généraux, mais encore le programme législatif concret;

­

désigner la conférence de conciliation après la première lecture par les deux conseils;

­

restreindre le droit de proposition à la commission et aux minorités de la commission, s'agissant du Conseil national.

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1.3

Initiatives parlementaires liées au programme de la législature 2011­2015

A l'issue de l'examen du programme de la législature 2011­2015, trois initiatives parlementaires ont été déposées au premier semestre 2012. Elles visaient à ce que les Chambres fédérales ne doivent plus examiner ni adopter le projet du Conseil fédéral concernant l'arrêté fédéral simple relatif au programme de la législature, mais prennent uniquement acte du rapport du Conseil fédéral sur le programme en question (12.427, 12.432 et 12.433). Les deux Commissions des institutions politiques ont donné suite aux trois initiatives, respectivement à l'automne 2012 et au printemps 2013; la CIP-N a ensuite été chargée d'élaborer un projet visant à mettre en oeuvre ces initiatives.

Dans son projet du 12 août 2014, la CIP-N a proposé de modifier plusieurs aspects de la procédure d'examen du programme de la législature. L'objectif était double: augmenter l'efficacité des décisions prises en la matière par le Parlement tout en réduisant la charge de travail de ce dernier (cf. FF 2014 6227 pour les détails). A la session d'automne 2014, des voix se sont élevées de part et d'autre, au Conseil national, pour critiquer les propositions formulées par la CIP-N. La commission a donc élaboré, le 30 octobre 2014, de nouvelles propositions dans lesquelles elle a davantage insisté sur la réduction de la charge de travail liée à l'examen du programme de la législature. Elle a toutefois maintenu que l'Assemblée fédérale devait pouvoir participer aux planifications importantes des activités de l'Etat (art. 173, al. 1, let. g, Cst.) en étant habilitée à soumettre au Conseil fédéral, sous la forme d'un arrêté fédéral simple, des propositions de modifications ou d'ajouts. Le Parlement pourrait ainsi, lors de la discussion par article, ajouter des dispositions chargeant le Conseil fédéral de revoir ses intentions en matière de planification. Cette solution correspondait à la réglementation qui venait d'être adoptée, le 26 septembre 2014, au sujet de l'examen du plan financier (13.092 Nouveau modèle de gestion de l'administration fédérale). Le 10 décembre 2014, le Conseil national a adhéré aux propositions de la commission relatives à la procédure applicable au programme de la législature (BO 2014 N 2289).

Le Conseil des Etats n'a pas soutenu cette solution proposée par la CIP-N à titre de compromis. Elle a décidé que le
Parlement ne pourrait prendre aucune décision matérielle sur le programme de la législature, programme dont il devait se borner à prendre acte. En d'autres termes, le Conseil des Etats a prôné l'abandon de l'arrêté fédéral sur le programme de la législature (BO 2014 E 82).

En deuxième lecture, le Conseil national et le Conseil des Etats ont maintenu leurs décisions respectives concernant la LParl (BO 2015 N 874, BO 2015 E 499). En troisième lecture, le Conseil national s'est rallié, avec la voix prépondérante de son président, au point de vue du Conseil des Etats.

Aux votes finaux du 19 juin 2015, le Conseil des Etats a adopté la modification de la LParl; le Conseil national a pour sa part rejeté cette révision, par 96 voix contre 92.

La majorité de la Chambre basse a en effet considéré que, dès lors que le compromis proposé par la CIP-N n'entrait plus en ligne de compte, le statu quo était une meilleure solution ou, du moins, un «moindre mal» par rapport à la solution radicale du Conseil des Etats.

4305

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1.4

Initiatives parlementaires 16.402, 16.425 et 16.426

Les 29 février et 5 avril 2016, les trois initiatives parlementaires ci-après ont été déposées au Conseil national dans le cadre de l'examen du programme de la législature 2015­2019: 16.402 Iv. pa. Groupe RL. Programme de la législature. Suppression des coûts inutiles liés aux activités parlementaires Le rapport du Conseil fédéral sur le programme de la législature ne devra être soumis au Parlement que pour que celui-ci en prenne acte et non plus sous la forme d'un arrêté fédéral simple. Ceci permettra de réduire les coûts tout en simplifiant la procédure. Le Parlement pourra encore débattre du rapport sur le programme de la législature et donner en tout temps des mandats contraignants au Conseil fédéral.

16.425 Iv. pa. Commission 16.016-CN. Programme de la législature. Modification de la procédure La loi sur le Parlement est modifiée de la manière suivante: 1.

Le programme de la législature ne peut plus faire l'objet d'amendements.

2.

Il fait l'objet d'un débat et l'Assemblée fédérale en prend acte.

16.426 Iv. pa. Commission 16.016-CN. Mention des projets qui sont en cours de traitement au Parlement dans le programme de la législature Les projets qui sont en cours de traitement aux Chambres fédérales et qui contribuent à atteindre les objectifs de la législature seront également traités dans le message sur le programme de la législature.

Les deux dernières initiatives ont été déposées par la Commission chargée de l'examen du programme de la législature du Conseil national, laquelle a approuvé les textes par 11 voix contre 10 (16.425) et par 12 voix contre 5 et 3 abstentions (16.426).

1.5

Délibérations et travaux de la CIP-N

La CIP-N a procédé à l'examen préalable des trois initiatives le 1 er septembre 2016.

Elle a donné suite aux deux premières par 12 voix contre 11 et 1 abstention. Le 30 mars 2017, son homologue du Conseil des Etats s'est ralliée à cette décision, par 5 voix contre 4. La CIP-N a également donné suite à la troisième initiative (16.426), à l'unanimité; la CIP-E a adhéré à cette décision par 6 voix contre 3.

Par la suite, le secrétariat a soumis trois options à la CIP-N en vue de l'aider à prendre une décision de principe. L'option A prévoit que le Conseil fédéral soumette le programme de la législature sous la forme d'un rapport dont l'Assemblée fédérale devrait simplement prendre acte; il s'agit là d'une interprétation stricte des iv. pa.

16.402 et 16.425 et correspond à la décision prise par le Conseil des Etats à la session de printemps 2015 concernant les iv. pa. 12.427 et 12.432. L'option B prévoit 4306

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que le Conseil fédéral soumette à l'Assemblée fédérale, pour qu'elle en prenne acte, le programme de la législature sous la forme d'un arrêté fédéral simple et que l'Assemblée fédérale puisse compléter cet arrêté par des mandats visant à modifier le programme de la législature; cette option correspond à la proposition de la CIP-N du 30 octobre 2014 relative à la mise en oeuvre des iv. pa. 12.427 et 12.432. Enfin, l'option C a été proposée en raison de la courte majorité lors de l'examen préalable et prévoit le maintien du statu quo; choisir cette option entraînerait le classement des initiatives.

La CIP-N s'est penchée sur ces trois options à sa séance du 1 er février 2018. Elle a décidé de mettre en oeuvre les initiatives concernées (16.402 et 16.425) sur le modèle de l'option B et a chargé le secrétariat de lui soumettre un avant-projet. En outre, elle a décidé que l'iv. pa. 16.426 (Mention des projets qui sont en cours de traitement au Parlement dans le programme de la législature) devait elle aussi être mise en oeuvre dans ce cadre.

2

Grandes lignes du projet

2.1

Amélioration de l'efficacité en limitant l'objet de l'arrêté fédéral simple

La commission a repris un point central des deux iv. pa. 16.402 et 16.425, à savoir que le Conseil fédéral soumet désormais le programme de la législature à l'Assemblée fédérale uniquement pour que celle-ci en prenne acte. Le Conseil fédéral ne présente plus son programme sous la forme d'un projet complet d'arrêté fédéral contenant des propositions sur tous les domaines politiques, lesquelles sont examinées par les commissions et les conseils et donnent lieu à un programme de la législature établi par le Parlement.

Afin de respecter les exigences de la Constitution (cf. ch. 2.3), la commission s'écarte toutefois de la proposition des deux initiatives sur un point: elle propose que l'Assemblée fédérale prenne acte du programme de la législature que le Conseil fédéral lui soumet sous la forme d'un arrêté fédéral. Cette forme permet au Parlement, lors de la discussion par article, d'ajouter à l'arrêté fédéral des articles chargeant le Conseil fédéral de modifier son programme.

Ainsi, les commissions et les conseils n'examineront plus point par point chacun des domaines politiques contenus dans un projet relatif à l'ensemble du programme de la législature élaboré par le Conseil fédéral; le programme établi ne relèvera donc plus d'une décision du Parlement. Au lieu de cela, le Parlement ne se prononcera plus que de manière ponctuelle sur certaines parties dudit programme. En conséquence, l'arrêté fédéral relatif au programme de la législature ne comportera plus que quelques articles, et non plus une vingtaine, comme celui de la législature 2015­2019.

Les débats parlementaires se limiteront aux thèmes que les différentes majorités ou minorités des commissions décident d'aborder de leur propre chef. Les discussions par article qui ont eu lieu jusqu'à présent sur les lignes directrices de l'ensemble du programme de la législature ont suscité des propositions et des débats qui disparaî4307

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tront sous la nouvelle procédure. La procédure proposée ressemble fortement à celle qui était appliquée jusqu'en 2000: à l'époque, le Parlement ne faisait que prendre acte des «Grandes lignes de la politique gouvernementale», mais pouvait adopter des «motions sur les grandes lignes» pour soumettre au Conseil fédéral des mandats visant à modifier son programme.

Cette solution relative à l'examen du programme de la législature, qui avait déjà été proposée en 2014 (cf. ch. 1.3), est analogue à la procédure d'examen du plan financier; celle-ci a déjà été appliquée deux fois et a fait ses preuves.

Les autres points de la procédure applicable à l'examen du programme de la législature restent inchangés. Les différentes procédures spéciales développées en 2007 pour améliorer l'efficacité (cf. ch. 1.2) subsistent elles aussi.

2.2

L'arrêté fédéral simple, forme la plus appropriée à la participation du Parlement à l'élaboration du programme de la législature

Les effets juridiques de l'arrêté fédéral sur le programme de la législature sont définis à l'art. 28, al. 2 et 4, LParl: Les arrêtés de principe et de planification sont des décisions préliminaires qui fixent les objectifs à atteindre, les principes ou critères à respecter ou les mesures à prévoir.

2

Si le Conseil fédéral s'écarte [...] d'un arrêté de principe et de planification, il doit en exposer les motifs.

4

Les effets juridiques d'une disposition d'un arrêté de principe et de planification ayant la forme d'un arrêté fédéral simple ne se distinguent pas de ceux d'une motion qui a été adoptée.

Dans son rapport du 22 janvier 2009 relatif à l'iv. pa. 08.435, la CIP-N a défini la participation du Parlement aux planifications en ces termes: «[...] si les arrêtés de planification ne peuvent avoir la même force obligatoire que la législation, dans la mesure où les circonstances peuvent changer entre le moment de la planification et celui de sa réalisation, ils n'en sont pas moins importants et nécessaires pour fixer des priorités et poser des jalons qui influeront de manière déterminante sur le résultat du travail législatif. Si la planification relevait uniquement du gouvernement, le Parlement serait souvent placé devant le fait accompli et ne pourrait exercer pleinement sa mission de législateur.

Il faut rappeler que, dans la démocratie dite «de concordance», telle qu'elle existe en Suisse, le gouvernement ne peut s'appuyer sur une majorité stable au Parlement afin de mettre en oeuvre le programme d'une coalition gouvernementale. Et c'est justement parce que les majorités parlementaires changent suivant les dossiers qu'elles doivent pouvoir indiquer au gouvernement les projets de loi qu'il doit traiter et ceux auxquels il doit renoncer.

L'examen par article de l'arrêté sur le programme de la législature est la 4308

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procédure la mieux adaptée pour permettre au Parlement de participer à la planification.»

2.3

Le Parlement doit participer aux planifications en vertu de la Constitution

La CIP-N relève que la Constitution fédérale du 18 avril 1999 attribue la compétence de planification conjointement au gouvernement et au Parlement: Art. 180, al. 1, Cst.

Le Conseil fédéral détermine les buts et les moyens de sa politique gouvernementale. Il planifie et coordonne les activités de l'Etat.

Art. 173, al. 1, let. g, Cst.

L'Assemblée fédérale a en outre les tâches et les compétences suivantes: g.

elle participe aux planifications importantes des activités de l'Etat;

La compétence du Parlement de participer à l'élaboration du programme de la législature résulte également du fait que celui-ci porte principalement sur la planification de l'activité législative. Or, l'organe qui est compétent en matière d'activité législative doit aussi pouvoir exercer une influence sur la planification de cette dernière. Les travaux législatifs du Parlement viennent clore un long processus de formation de l'opinion et de décision, jalonné de changements de cap et de décisions préliminaires, chacune des étapes intermédiaires jouant un rôle capital pour le résultat final. En tant qu'organe législatif, le Parlement a légitimement intérêt à exercer une réelle influence sur la phase de préparation du processus législatif.

Même si cette activité n'est généralement pas considérée comme particulièrement essentielle dans le système politique suisse, la planification demeure indispensable; et s'il est une planification que l'on peut qualifier à juste titre d'importante, c'est bien la planification de la législature.

L'art. 28, al. 1bis, let. a, LParl prévoit, à titre de participation minimale, que le Parlement peut uniquement prendre connaissance des planifications importantes. Des formes de participation plus élaborées consistent à charger le Conseil fédéral (par la voie de motions) «de modifier les priorités d'une planification» (al. 1bis, let. b) ou «de prendre des décisions de principe ou de planification» (par la voie d'arrêtés fédéraux simples; al. 1bis, let. c).

Appliquer la forme de participation minimale précisément à la planification des activités de l'Etat la plus importante va manifestement à l'encontre de la volonté du constituant et du législateur.

Il est vrai que le Parlement peut en tout temps, y compris en dehors du processus de planification de la législature, confier des mandats au Conseil fédéral ayant les traits de décisions de principe et de planifications. Toutefois, la CIP-N estime judicieux 4309

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que le Parlement ait une vue d'ensemble des planifications du Conseil fédéral au début d'une législature et, dans ce cadre, puisse examiner systématiquement les points sur lesquels elle souhaite apporter des modifications.

2.4

Minorités

La minorité I (Pfister Gerhard, Campell, Glättli, Humbel, Moser, Romano, Streiff) de la commission propose de ne pas entrer en matière sur le projet. Elle considère qu'il n'est pas nécessaire de faire du zèle législatif en entamant une énième fois des discussions sur la procédure applicable au programme de la législature. A l'instar de la majorité, elle estime que, eu égard à la disposition constitutionnelle enjoignant à l'Assemblée fédérale de participer aux planifications importantes, il est hors de question de renoncer à la possibilité de confier au Conseil fédéral des mandats visant à modifier le programme de la législature. Selon elle, la réforme de 2007 a déjà réduit la charge de travail à un niveau raisonnable et les modifications proposées dans le présent projet n'apporteraient qu'une plus-value incertaine.

La minorité II (Schneeberger, Brunner, Campell, Jauslin, Piller Carrard) estime que le programme de la législature est de la compétence exclusive du Conseil fédéral. Elle propose que le Parlement se contente de prendre acte du programme établi par le Conseil fédéral sans prendre de décision à ce sujet; partant, il n'y aurait plus d'examen préalable par des commissions. Les conseils mèneraient une discussion générale et les groupes parlementaires auraient alors l'occasion de prendre position.

Cette minorité estime que le Parlement dispose de suffisamment d'instruments pour confier des mandats au Conseil fédéral et n'a donc pas besoin de prendre des décisions sur le programme de la législature. Selon elle, la charge de travail liée à l'examen chronophage du programme n'est pas justifiée; de plus, la minorité souligne que sa solution permettrait de réaliser des économies considérables.

3

Commentaire par article

3.1

Loi sur le Parlement (LParl)

Art. 75, al. 4 D'après l'art. 75, al. 1, les conseils sont habilités à renvoyer un projet d'acte au Conseil fédéral ou à la commission chargée de l'examen préalable. Dans le cas du programme de la législature, l'application de cette disposition paraît peu judicieuse: une grande partie de la période visée par le programme serait déjà écoulée au moment de la réalisation du mandat lié au renvoi.

Ce constat est encore plus évident en ce qui concerne le plan financier annuel, qui doit désormais également être présenté sous la forme d'un arrêté fédéral simple, en vertu de la modification apportée le 26 septembre 2014 à l'art. 143 LParl (13.092 Nouveau modèle de gestion de l'administration fédérale [NMG]).

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Art. 146, al. 1, 2, 2bis et 5 L'objet du projet d'arrêté fédéral relatif au programme de la législature n'est plus la planification de la législature par l'Assemblée fédérale, mais uniquement la prise de connaissance par l'Assemblée fédérale du programme établi par le Conseil fédéral et développé dans le message (al. 1). L'Assemblée fédérale peut compléter l'arrêté fédéral simple par des mandats (al. 5 [nouveau]). L'arrêté pourrait être rédigé sur le modèle du projet d'arrêté fédéral concernant le plan financier pour les années 2019 à 2021: Art. 1

Plan financier 2019­2021

Il est pris acte du plan financier de la Confédération suisse pour les années 2019 à 2021.

Art. 2

Mandats visant à modifier le budget 2019 assorti d'un plan intégré des tâches et des finances 2020­2022

Les mandats suivants visant à modifier le plan financier sont confiés au Conseil fédéral: a.

...

b.

...

Ce n'est plus l'arrêté fédéral simple, mais le message qui définit les lignes directrices de la politique et les objectifs du programme de la législature du Conseil fédéral et qui indique, pour chaque objectif, les actes de l'Assemblée fédérale prévus ainsi que les autres mesures qui sont nécessaires pour atteindre ces objectifs (al. 2).

Conformément à la demande formulée dans l'iv. pa. 16.426, le message mentionne également les projets d'acte qui sont pendants devant les Chambres fédérales et contribuent à atteindre les objectifs du programme de la législature (al. 2bis).

L'objectif étant de parvenir à un programme qui soit clair et complet, seuls les projets importants doivent être repris dans le message.

Le rapport explicatif sur le programme de la législature continue d'être qualifié de «message» et non de «rapport», car «lorsqu'il soumet un projet d'acte à l'Assemblée fédérale, le Conseil fédéral y joint un message» (art. 141, al. 1, LParl)».

Commentaire sur les propositions de la minorité II: Les propositions de la majorité et de la minorité II constituent deux approches cohérentes qui doivent globalement être opposées l'une à l'autre.

La différence fondamentale entre ces deux approches réside dans l'art. 146, al. 1 et 5: selon la proposition de la minorité II, le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale non plus un message accompagné d'un projet d'arrêté fédéral, mais un rapport (sans arrêté fédéral). L'Assemblée fédérale n'a donc plus la possibilité de compléter l'arrêté fédéral par des mandats confiés au Conseil fédéral ­ partant, l'al. 5 du projet de la majorité devient caduc.

Par conséquent, les règles relatives au programme de la législature doivent être supprimées des dispositions générales sur la procédure applicable au traitement des projets d'acte (art. 74, al. 3 et art. 94a). Les dispositions de procédure contenues à 4311

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l'art. 147 deviennent elles aussi superflues; en particulier, il n'y a plus aucune raison de prévoir que les conseils examinent le programme de la législature au cours de deux sessions successives (al. 1), car un examen au cours de la même session est alors possible.

Par contre, la proposition de la majorité relative à l'impossibilité de renvoi reste judicieuse dans la proposition de la minorité II, s'agissant du plan financier (art. 75, al. 4; cf. explications supra).

Si le Conseil national opte pour la proposition de la minorité II, il faudra également modifier le RCN, dont les dispositions sur l'examen de l'arrêté fédéral devront être abrogées (titre précédant l'art. 33a et art. 33b et 33c). Dans le cadre de l'examen de cette modification du RCN, il s'agira aussi de décider si le programme de la législature doit être préalablement examiné par une commission (si tel n'est pas le cas, la liste des exceptions visées à l'art. 21, al. 1, RCN doit être complétée en conséquence) et si la Commission chargée de l'examen du programme de la législature doit être maintenue ou supprimée (dans le second cas, il faut abroger l'art. 13 RCN).

Charger une commission spéciale de procéder à l'examen préalable d'un rapport dont les conseils ne doivent que prendre acte formellement serait pour le moins excessif. Il est peu judicieux qu'une commission se livre à l'examen préalable des directives générales du Conseil fédéral pour sa politique gouvernementale si elle ne peut ensuite soumettre aucune proposition à son conseil.

4

Conséquences financières et effet sur l'état du personnel

Les propositions de modification de la LParl n'entraînent ni conséquences financières évaluables, ni effet prévisible sur l'état du personnel. La CIP-N part du principe que la charge de travail du Parlement diminuera, tandis que celle du Conseil fédéral et de l'administration fédérale restera globalement la même.

5

Bases légales

Selon l'art. 164, al. 1, let. g, Cst., les dispositions fondamentales relatives à l'organisation et à la procédure des autorités fédérales doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. La participation de l'Assemblée fédérale aux «planifications importantes des activités de l'Etat» se fonde sur l'art. 173, al. 1, let. g, Cst.

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