18.050 Message relatif à la modification de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (Déduction fiscale des frais de garde des enfants par des tiers) du 9 mai 2018

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, le projet d'une modification de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

9 mai 2018

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Alain Berset Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2018-0092

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Condensé La loi qui fait l'objet du présent message a pour but de lutter contre la pénurie de personnel qualifié indigène et d'améliorer la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale. Ce but doit être atteint par une meilleure prise en compte des frais de garde des enfants dans le droit fiscal. Le projet propose que, dans le cadre de l'impôt fédéral direct, les parents puissent déduire de leur revenu jusqu'à 25 000 francs par enfant et par an au titre des frais de garde de leurs enfants par des tiers.

Contexte Dans le cadre de l'impôt fédéral direct, une déduction maximale de 10 100 francs par enfant et par an est actuellement admise au titre des frais documentés de garde des enfants par des tiers. Dans le cadre des impôts cantonaux, le montant de la déduction varie entre 3000 et 20 400 francs par enfant et par an. Dans un canton, il est même possible de déduire la totalité des frais documentés de garde des enfants par des tiers.

Lorsque la déduction des frais de garde des enfants par des tiers est plafonnée, il arrive que les frais encourus ne soient que partiellement pris en compte sur le plan fiscal, soit parce qu'ils dépassent déjà le montant maximal de la déduction avec le taux d'occupation actuel des parents, soit parce qu'ils le dépasseraient si les parents augmentaient leur taux d'occupation. Plus le plafond fixé est bas, plus le nombre de contribuables qui ne peuvent que partiellement déduire leurs frais de garde des enfants par des tiers est élevé.

La limitation de la déduction actuelle touche avant tout les ménages à hauts revenus dans lesquels les deux parents ont un temps de travail important. Dans les cas de ce genre, les frais de garde sont élevés, car les places d'accueil ne sont que faiblement subventionnées ou ne le sont pas du tout.

Contenu du projet Le présent projet découle de l'initiative du Conseil fédéral visant à combattre la pénurie de personnel qualifié («Fachkräfteinitiative», FKI), laquelle a notamment pour objectif de limiter les effets dissuasifs du système fiscal sur l'exercice d'une activité lucrative. Pour faire face à la pénurie de personnel qualifié indigène et améliorer la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale, les déductions pour frais de garde des enfants par des tiers devront à l'avenir être plus élevées.
Le projet propose que la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct prévoie pour les parents la possibilité de déduire de leur revenu jusqu'à 25 000 francs par enfant et par an au titre des frais de garde de leurs enfants par des tiers. La déduction des frais de garde des enfants par des tiers doit conserver la forme d'une déduction anorganique. Les déductions anorganiques ne sont pas en rapport direct avec l'acquisition du revenu. Elles trouvent leur justification dans le fait que les dépenses

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sur lesquelles elles portent diminuent la capacité économique du contribuable et qu'il est donc souhaitable qu'elles puissent être déduites pour des raisons de politique sociale. Ainsi, la déduction reste possible, comme aujourd'hui, non seulement pour les actifs mais aussi pour les personnes en formation et en incapacité de gain.

Les autres conditions de ce droit doivent également être maintenues.

Au vu des résultats de la consultation, il faut renoncer à prescrire un plafond minimal aux cantons dans la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID). Les cantons doivent pouvoir continuer de décider dans quelle mesure ils autorisent la déduction des frais de garde des enfants.

Conséquences financières À court terme, la réforme entraînerait une diminution annuelle des recettes de l'impôt fédéral direct estimée à environ 10 millions de francs. À plus long terme, il faut cependant s'attendre à ce que la hausse de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers, grâce à l'impulsion positive qu'elle exercera sur l'emploi, soit compensée sur le plan fiscal, voire crée de nouvelles recettes pour le fisc et les assurances sociales.

Conséquences économiques Grâce à la baisse des frais de garde découlant du relèvement de la déduction fiscale, la participation au marché du travail et par conséquent la demande d'offres d'accueil devraient augmenter. En raison de la qualification plutôt élevée des groupes cibles, cela devrait conduire à une meilleure exploitation du potentiel de personnel qualifié, à la redynamisation du marché du travail et, enfin, à l'augmentation de l'ensemble de la productivité économique. À plus long terme, cela aura aussi des retombées positives sur les recettes fiscales. Les incitations à l'exercice d'une activité lucrative, en particulier pour les mères qui ont de bonnes qualifications professionnelles, tendront à augmenter.

À court ou moyen terme, il faut s'attendre à la création de près de 2500 postes à plein temps. Cette estimation repose cependant sur de nombreuses hypothèses et comporte une grande part d'incertitude.

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Message 1

Grandes lignes du projet

1.1

Contexte

1.1.1

Mandat défini dans le cadre de l'initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié

Au vu de l'évolution démographique et du besoin croissant de main-d'oeuvre qualifiée en Suisse, le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) a lancé en 2011 l'initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié (Fackkräfteinitiative, FKI). Cette initiative a pour objectif de mieux exploiter le potentiel de main-d'oeuvre indigène qualifiée au moyen de mesures touchant au marché du travail et à la formation. Suite à l'acceptation, le 9 février 2014, de l'initiative populaire contre l'immigration de masse, la FKI a encore gagné en importance.

Les frais d'accueil extra-familial des enfants et leur traitement fiscal peuvent avoir un effet sur l'activité des parents, en particulier des mères. Le 19 juin 2015, dans le cadre de la FKI, le Conseil fédéral a par conséquent chargé le Département fédéral des finances (DFF) d'examiner le traitement fiscal des frais de garde des enfants par des tiers.

Lors de l'examen des mesures fiscales propres à réduire l'effet dissuasif sur l'exercice d'une activité lucrative, le DFF devait notamment déterminer si les frais de garde des enfants par des tiers doivent être considérés comme des frais d'acquisition du revenu déductibles sans restriction ou si le montant maximal de la déduction actuelle doit être relevé. Le 30 septembre 2016, après avoir pris acte du rapport de l'Administration fédérale des contributions (AFC), le Conseil fédéral a décidé que les frais de garde des enfants par des tiers seraient à l'avenir mieux pris en compte sur le plan fiscal1.

1.1.2

Statistique

Ces dernières années, la demande en matière d'accueil extra-familial des enfants a augmenté en raison des modifications de la structure du marché de l'emploi et de l'évolution démographique. L'augmentation des besoins s'explique notamment par la hausse du nombre de divorces et par l'augmentation de la participation des femmes au marché de l'emploi.

1

Cf. à ce sujet le rapport de l'AFC concernant le traitement fiscal des frais de garde des enfants par des tiers, disponible (uniquement en allemand) à l'adresse: www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Rapports > 2016.

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1.1.3

Droit en vigueur

Aujourd'hui, la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers est conçue sous la forme d'une déduction anorganique. Les déductions anorganiques ne sont pas en rapport direct avec l'acquisition du revenu. Elles trouvent leur justification dans le fait que les dépenses sur lesquelles elles portent diminuent la capacité économique du contribuable et qu'il semble donc souhaitable qu'elles puissent être déduites pour des raisons de politique sociale (déductions générales), ou dans le fait qu'elles permettent de prendre en compte un statut social défini (déduction sociale).

Cette déduction est limitée à un montant maximal par enfant et par an. En vertu de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD)2, les frais documentés de garde des enfants par des tiers peuvent être déduits jusqu'à concurrence d'un montant maximal de 10 100 francs par année pour chaque enfant n'ayant pas encore atteint l'âge de quatorze ans. Les frais de garde doivent avoir un lien de causalité direct avec l'activité lucrative, la formation ou l'incapacité de gain du contribuable (art. 33, al. 3, LIFD). La déduction pour frais de garde des enfants par des tiers est entrée en vigueur le 1er janvier 2011.

En vertu de l'art. 9, al. 2, let. m, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)3, les cantons sont également tenus d'admettre en déduction des frais de garde des enfants par des tiers sous la forme d'une déduction anorganique. Les conditions d'octroi sont définies de la même manière que pour l'impôt fédéral direct. Les cantons fixent euxmêmes le montant maximal de cette déduction. Selon les cantons, la déduction est comprise entre 3000 et 20 400 francs par enfant (état 2017). Dans le canton d'Uri, la totalité des frais documentés de garde des enfants par des tiers peut même être déduite du revenu. En plus, certains cantons (LU, NW, ZG, VS) prévoient une déduction pour la garde des enfants par les parents eux-mêmes.

2 3

RS 642.11 RS 642.14

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1.1.4

Étendue actuelle de la déduction fiscale des frais de garde des enfants par des tiers

Pour la plupart des ménages, la déduction prévue par la LIFD en vigueur couvre les frais effectifs de garde des enfants par des tiers4. D'après les données d'une enquête effectuée en 20135, les parents paient en moyenne 825 francs par enfant et par mois pour une place en structure d'accueil collectif de jour. En revanche, les parents qui recourent à des structures d'accueil extra-scolaire ne paient en moyenne que 314 francs par enfant et par mois. Cependant, les moyennes ne sont pas nécessairement appropriées pour élucider si la déduction actuelle est suffisante. Selon des relevés de l'AFC, les frais d'accueil extra-familial des enfants diffèrent beaucoup, surtout pour les enfants en bas âge, en fonction du revenu des parents et de la forme d'accueil6.

La déduction maximale actuellement accordée dans le cadre de l'impôt fédéral direct couvre approximativement le coût de deux journées hebdomadaires de garde dans une structure non subventionnée d'accueil collectif de jour. L'accueil non subventionné d'un enfant dans une structure d'accueil collectif de jour pendant cinq jours par semaine coûte dans la plupart des cantons entre 2200 et 2700 francs par mois.

Pour deux journées hebdomadaires de garde, le coût annuel est compris entre 10 500 et 13 000 francs. Étant donné que, dans divers cantons, les tarifs des crèches dépendent du revenu imposable, les ménages qui supportent des frais de garde élevés sont affectés à double titre: d'une part, ils ne peuvent déduire de leur revenu imposable qu'une partie des frais de garde de leurs enfants par des tiers et ils ont de ce fait une charge fiscale plus lourde; d'autre part, leur revenu imposable augmente également, raison pour laquelle ils doivent acquitter un tarif de crèche plus élevé.

Des données fiscales du canton de Berne concernant l'année 2012 montrent que les frais effectifs de garde des enfants ont été déduits pour 29 % des enfants. Dans 1,47 % des cas, les frais effectifs de garde des enfants par des tiers étaient supérieurs ou égaux à 10 100 francs. Les frais effectifs moyens de garde des enfants par des tiers pour lesquels la déduction maximale a été revendiquée étaient estimés à environ 16 800 francs par an7.

Dans l'ensemble, les données montrent que, la plupart du temps, les frais de garde des enfants par des tiers n'excèdent le montant
maximal de la déduction accordée dans le cadre de l'impôt fédéral direct, soit 10 100 francs, que pour les enfants en bas âge. En revanche, lors de l'entrée de l'enfant à l'école enfantine, le plafonnement de la déduction ne semble en règle générale plus constituer une réelle limita4

5 6

7

Cf. à ce sujet l'avis du Conseil fédéral concernant la motion 11.3801 du groupe libéralradical («Augmentation de la déduction pour les frais de garde des enfants par des tiers à 24 000 francs»).

Rapport d'évaluation «Anstossfinanzierung» de l'OFAS, 2013 (en allemand, avec avantpropos et résumé en français).

Cf. «Kinderdrittbetreuungskosten und steuerliche Abzugsfähigkeit, Erkenntnisse aus den Steuerdaten der Kantone Aargau und Bern». Rapport de l'AFC du 11.5.2015 disponible uniquement (en allemand) à l'adresse www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Rapports > 2015.

Cf. rapport de l'AFC mentionné dans la note 6.

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tion. Ce sont donc avant tout les parents d'enfants en bas âge qui bénéficieraient d'allégements si le plafond de la déduction était supprimé ou relevé dans le cadre de l'impôt fédéral direct.

Les chiffres mentionnés ne permettent cependant pas de déduire que le relèvement du montant maximal de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers ne bénéficierait qu'à 1,47 % des parents. L'extension de cette déduction peut influencer la décision d'exercer ou de développer une activité lucrative (cf. ch. 3.3).

1.2

Nouvelle réglementation proposée

La nouvelle réglementation proposée prévoit une nette augmentation de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers en ce qui concerne l'impôt fédéral direct. Au lieu de 10 100 francs, ce sont désormais 25 000 francs au plus par enfant et par an qui devraient pouvoir être déduits du revenu imposable.

La déduction des frais de garde des enfants par des tiers peut être conçue comme une déduction anorganique ou comme une déduction des frais d'acquisition du revenu.

Contrairement aux déductions pour frais d'acquisition du revenu, les déductions anorganiques ne sont pas en rapport direct avec l'obtention du revenu. Elles trouvent leur justification dans le fait que les dépenses sur lesquelles elles portent diminuent la capacité économique du contribuable et qu'il semble donc souhaitable qu'elles puissent être déduites pour des raisons de politique sociale (déductions générales), ou dans le fait qu'elles permettent de prendre en compte un statut social défini (déduction sociale). À l'opposé, les frais d'acquisition du revenu sont les dépenses directement consenties pour l'obtention du revenu.

Dans la nouvelle réglementation proposée, la déduction des frais de garde des enfants par des tiers doit conserver la forme d'une déduction anorganique; en d'autres termes, elle ne doit pas être soumise à la condition d'exercer une activité lucrative, mais peut au contraire aussi être revendiquée par les contribuables qui suivent une formation ou sont en incapacité de gain. Les autres conditions de ce droit doivent également être maintenues. Ainsi, seuls les contribuables qui vivent dans le même ménage que les enfants gardés par des tiers et qui pourvoient à leur entretien peuvent faire valoir le droit à la déduction. Par ailleurs, la déduction ne peut être demandée que pour les enfants qui n'ont pas encore quatorze ans révolus8 .

Comme jusqu'à présent, les frais effectifs et documentés de garde des enfants par des tiers ne peuvent être déduits par le contribuable que s'il existe un lien de causalité direct entre l'activité lucrative, la formation ou l'incapacité de gain du contribuable et l'impossibilité dans laquelle il se trouve d'assurer lui-même cette garde9.

La déduction des frais effectifs de garde des enfants par des tiers jusqu'à concurrence du montant maximal est admise même si ces frais dépassent le revenu du conjoint exerçant l'activité lucrative secondaire. Ce principe s'applique également 8 9

Cf. à ce sujet la circulaire no 30 de l'AFC du 21 décembre 2010 «Imposition des époux et de la famille selon la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD)».

Cf. à ce sujet le message du 20 mai 2009 sur la loi fédérale sur le dégrèvement des familles avec enfants, FF 2009 4237 4271.

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aux personnes assumant une charge monoparentale qui paient des frais de garde plus élevés que le revenu de leur activité lucrative mais disposent encore d'autres revenus.

Les frais de garde des enfants par des tiers en dehors du temps de travail ou du temps de formation des parents, tels que les frais de baby-sitting le soir ou pendant les loisirs des parents (cours de tennis, de peinture, etc.), restent non déductibles.

Ces frais qui sont liés aux loisirs des parents doivent être considérés comme des frais non déductibles liés au train de vie.

1.3

Justification et évaluation de la solution proposée

1.3.1

Consultation

Le 5 avril 2017, le Conseil fédéral a chargé le DFF d'ouvrir auprès des cantons, des partis politiques et des associations faîtières de l'économie une procédure de consultation sur la prise en compte fiscale des frais de garde des enfants par des tiers. Cette procédure s'est terminée le 12 juillet 2017. Les avis sont exposés et évalués ci-après10.

1.3.2

Solution proposée

Si, en Suisse, la proportion de femmes qui travaillent est élevée en comparaison internationale, le nombre d'heures de travail effectuées reste très faible en raison du caractère très répandu du temps partiel. Selon une étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le taux élevé de personnes qui travaillent à temps partiel s'explique notamment par le développement insuffisant et les coûts trop élevés du système d'accueil extra-familial des enfants11. En parallèle, la situation familiale, le revenu de l'activité lucrative du conjoint ou partenaire, ainsi que les valeurs en matière de modèle familial peuvent aussi influencer les parents dans le choix du taux d'occupation.

L'accueil non subventionné d'un enfant dans une structure d'accueil collectif de jour pendant cinq jours par semaine coûte dans la plupart des cantons entre 2200 et 2700 francs par mois. Les frais de garde des enfants par des tiers à plein temps dans des structures d'accueil collectif de jour peuvent donc atteindre environ 32 000 francs par enfant et par an. Ils peuvent donc parfois dépasser nettement le montant maximal actuel de la déduction. Dans ces cas, l'effet dissuasif que les frais de garde élevés ont sur l'exercice d'une activité lucrative est encore accentué par le système fiscal.

Cette situation concerne des contribuables dont le taux d'occupation est élevé et qui

10

11

Cf. à ce sujet le rapport sur les résultats de la procédure de consultation relative à la prise en compte fiscale des frais de garde des enfants par des tiers, www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2017 > DFF.

OCDE (2013), Étude économique de la Suisse 2013. Paris, éditions de l'OCDE, novembre 2013.

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touchent des revenus moyens ou de hauts revenus et donc, d'une manière générale, des spécialistes particulièrement bien formés.

Ces personnes, en particulier les femmes, présentent un potentiel considérable de compensation quantitative de la pénurie de personnel qualifié indigène, soit par la reprise de leur activité lucrative, soit par l'augmentation de leur taux d'activité actuel. Pour mieux exploiter ce potentiel et améliorer la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale, il faut que les frais de garde des enfants par des tiers soient mieux pris en compte sur le plan fiscal.

Une déduction plus élevée des frais de garde des enfants par des tiers nécessaires à l'exercice de la profession constitue pour la main-d'oeuvre indigène une incitation à travailler davantage. Lors de la procédure de consultation, l'augmentation de cette déduction dans le cadre de la LIFD a reçu le soutien de la majorité des cantons et des organisations. Selon ces participants à la consultation, l'élimination d'un effet dissuasif du système fiscal peut contribuer de façon décisive à ce qu'un plus grand nombre de personnes augmentent leur taux d'occupation. Les partis se sont par contre montrés divisés. Quatre partis ont été favorables à l'augmentation de la déduction dans le cadre de la LIFD (PBD, PDC, PLR, PVL). Quatre partis ont rejeté cette mesure en alléguant que les familles à bas revenu n'en profiteraient pas (UDF, PES, PSS, UDC) ou que la garde par des tiers serait favorisée par rapport à la garde assumée par les parents eux-mêmes (UDC).

Pour atteindre entièrement les objectifs de la FKI, il faudrait que la déduction des frais de garde des enfants par des tiers soit augmentée non seulement dans le cadre de l'impôt fédéral direct, mais aussi en ce qui concerne les impôts cantonaux. Le projet soumis à la consultation proposait par conséquent que la LHID prescrive aux cantons de prévoir un plafond pour la déduction des frais de garde des enfants par des tiers qui ne soit pas inférieur à 10 000 francs par enfant et par an.

La grande majorité des cantons ainsi que la CDF ont fermement rejeté l'inscription d'un montant minimal du plafond dans la LHID, qualifiant cette mesure d'atteinte à l'autonomie des cantons. Sa constitutionnalité a même parfois été mise en doute.

D'après ces participants, cette
mesure obligerait à ajuster les barèmes fiscaux ou les déductions thématiquement apparentées afin que l'équilibre délicat existant actuellement entre les charges des différentes catégories de contribuables ne soit pas compromis. Dans de nombreux cantons, elle provoquerait en outre une baisse considérable des recettes et une augmentation de la charge administrative.

Quatre partis (PDC, UDF, PLR, UDC) ont également qualifié l'inscription d'un montant minimal du plafond dans la LHID d'atteinte illicite à l'autonomie des cantons. Trois partis (PBD, PVL, PSS) ont en revanche approuvé cette proposition.

Pour le PSS et le PVL, on parviendrait ainsi à une certaine harmonisation de la politique fiscale dans les cantons. En outre, cette mesure renforcerait les groupes à faible et moyen revenu.

La proposition a été approuvée par la grande majorité des organisations féminines et familiales, certaines d'entre elles ayant même exprimé le désir que le montant minimal du plafond soit plus élevé. Les associations économiques étaient par contre divisées à ce sujet.

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Du point de vue du Conseil fédéral, l'inscription d'un plafond minimal dans la LHID, telle qu'elle a été proposée dans le cadre de la consultation, ne porte pas atteinte à l'autonomie des cantons garantie par la Constitution (Cst.)12. Dans la doctrine, on rencontre parfois l'opinion selon laquelle la compétence d'harmonisation de la Confédération autoriserait même cette dernière à fixer le montant des déductions générales dans la LHID13. C'est par souci de respecter le fédéralisme que le Conseil fédéral se serait limité à inscrire un plafond minimal. De plus, la LHID prescrit aujourd'hui déjà que les frais provoqués par la maladie et les accidents du contribuable ainsi que les frais liés au handicap du contribuable doivent être admis en déduction de manière illimitée pour autant qu'ils excèdent la franchise fixée par le canton. Cette disposition de la LHID n'a jusqu'à ce jour pas été qualifiée d'atteinte à l'autonomie des cantons.

Cependant, au vu de la grande résistance des cantons, le Conseil fédéral estime qu'il faut respecter le souci de fédéralisme et renoncer à fixer un plafond minimal dans la LHID. Les cantons conserveront donc la compétence de fixer l'étendue des frais dont ils autorisent la déduction.

En plus des frais de garde des enfants par des tiers nécessaires à l'exercice de la profession, ceux qui sont dus à une formation ou à une incapacité de gain continueront d'être pris en compte fiscalement. C'est pourquoi la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers ne doit pas être conçue comme une déduction des frais d'acquisition du revenu, mais comme une déduction anorganique, comme c'est le cas aujourd'hui. Les cantons et les partis étaient d'accord sur ce point lors de la consultation. À leur avis, la formule de la déduction anorganique a fait ses preuves.

Ils estiment qu'un passage au système de la déduction des frais d'acquisition du revenu ne serait pas judicieux. Les organisations étaient en revanche divisées à ce sujet. Tandis qu'une partie d'entre elles était favorable à une déduction anorganique, l'autre partie s'est exprimée avec force en faveur d'une déduction des frais d'acquisition du revenu, alléguant que les dépenses pour la garde des enfants par des tiers sont tout simplement nécessaires pour pouvoir obtenir un revenu (imposable) de l'activité lucrative
(cf. à ce sujet ch. 1.3.3.2).

Les frais nécessaires effectifs de garde des enfants par des tiers qui incombent aux parents pendant la durée de l'activité lucrative, de la formation ou de l'incapacité de gain les empêchant d'exercer la garde des enfants peuvent être déduits jusqu'à concurrence du montant maximal. Pour les contribuables exerçant une activité lucrative à temps partiel, seuls les frais encourus pendant le temps de travail peuvent être pris en considération, mais jusqu'à concurrence du montant maximal, comme pour les activités lucratives à plein temps. La déduction des frais de garde des enfants encourus en dehors du temps de travail ou de formation des parents doit rester impossible.

Le relèvement de la déduction pour frais de garde des enfants dans la LIFD peut aussi être justifié par le fait que la réforme pourrait se financer elle-même à moyen 12 13

RS 101 Cf. par exemple Markus Reich in: Kommentar zum Schweizerischen Steuerrecht, volume I/1 Bundesgesetz über die Harmonisierung der direkten Steuern der Kantone und Gemeinden (StHG), 2e édition, Bâle 2002, art. 9 LHID no 28, avec d'autres renvois.

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et long terme; autrement dit, d'un point de vue dynamique, elle générera plutôt une augmentation qu'une baisse des recettes (cf. à ce sujet ch. 3.1.1).

1.3.3

Autres solutions examinées et rejetées

1.3.3.1

Déduction anorganique illimitée

La solution proposée par le Conseil fédéral part du principe que les frais encourus pour la garde des enfants par des tiers peuvent être déduits jusqu'à concurrence d'un montant maximal. Afin d'éliminer entièrement l'effet dissuasif sur l'exercice d'une activité lucrative au sens de la FKI, les frais effectifs de garde des enfants par des tiers devraient être intégralement admis en déduction. Cependant, dans ce cas également, seuls les frais nécessaires encourus pour la garde des enfants par des tiers qui ne constituent ni des dépenses liées au train de vie ni des dépenses de luxe devraient pouvoir être déduits.

Sont considérées comme dépenses de luxe les dépenses qui dépassent le cadre des frais usuels et nécessaires de garde des enfants par des tiers et qui, par exemple, ne sont effectuées que pour des raisons de prestige ou de statut social personnel et sont par conséquent très coûteuses (crèche ou nurse de luxe, etc.).

En pratique, la distinction entre les frais effectivement nécessaires de garde des enfants par des tiers et les dépenses liées au train de vie ou les dépenses de luxe pourrait comporter des difficultés. Un plafond permet de limiter les difficultés de délimitation et les complications administratives qui en découlent. Il est ainsi possible d'éviter la complication du droit fiscal à ce sujet.

La part des contribuables qui dépassent le plafond de la déduction est aujourd'hui déjà plutôt faible. Le plafond de 25 000 francs par enfant et par an proposé dans le cadre de l'impôt fédéral direct devrait par conséquent déjà permettre d'éliminer dans la plupart des cas les effets dissuasifs du système fiscal sur l'exercice d'une activité lucrative. Eu égard au fait qu'une part considérable des couples mariés qui ont des enfants ne doivent de toute façon pas payer d'impôt fédéral direct, ce sont avant tout des parents gagnant bien leur vie qui bénéficieront de cette déduction. C'est surtout dans l'éventualité d'un relèvement des limites cantonales de déduction que les groupes à faibles et moyens revenus bénéficieraient d'un allégement. Un plafond garantit de façon forfaitaire qu'il ne sera pas fait un usage disproportionné de la possibilité de déduction.

Si la déduction des frais de garde des enfants par des tiers était conçue comme une déduction anorganique illimitée dans le cadre de
l'impôt fédéral direct, afin que les contribuables en formation ou en incapacité de gain puissent également en bénéficier, il faudrait logiquement aussi prescrire aux cantons d'admettre désormais sans plafond la déduction des frais de garde des enfants par des tiers. Dans le cas contraire, il y aurait disharmonie entre le droit fédéral et le droit cantonal. Cependant, la Confédération a jusqu'ici fait preuve d'une grande retenue quant à l'inscription de montants de déduction dans la LHID. Interdire aux cantons de prévoir le plafonnement d'une déduction anorganique pourrait être considéré par ces derniers comme une atteinte à leur souveraineté fiscale (cf. à ce sujet aussi ch. 1.3.2).

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1.3.3.2

Reconnaissance des frais de garde des enfants par des tiers en tant que frais d'acquisition du revenu (dépenses professionnelles)

La possibilité de qualifier à l'avenir les frais de garde des enfants par des tiers de frais d'acquisition du revenu (dépenses professionnelles) a également été examinée.

Dans cette approche, les frais de garde des enfants par des tiers seraient entièrement déductibles pour autant qu'ils soient directement liés à l'exercice une activité lucrative.

Pour les parents exerçant une activité lucrative qui ont des enfants dont l'âge nécessite qu'ils soient gardés, le recours à un accueil extra-familial institutionnel ou non est indispensable. D'un point de vue économique, les frais de garde des enfants par des tiers constituent par conséquent des dépenses nécessaires à l'exercice de la profession. Dans la mesure où l'objectif est d'éliminer intégralement les effets dissuasifs du droit fiscal sur l'exercice d'une activité lucrative, les frais de garde des enfants par des tiers nécessaires à l'exercice de la profession devraient donc être admis en déduction de manière illimitée.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui a pris forme déjà avant l'introduction de la déduction anorganique actuelle et a été confirmée en 2017, les frais afférents à la garde des enfants par des tiers ne doivent pas être considérés comme des frais professionnels déductibles, même s'ils peuvent être étroitement liés à l'obtention du revenu. Selon le Tribunal fédéral, les frais de garde des enfants par des tiers sont des dépenses effectuées non pas pour réaliser un revenu bien déterminé, mais pour atteindre ou maintenir la capacité de gain en général14. Du point de vue de la systématique fiscale, ce sont donc typiquement des dépenses considérées comme dépendant avant tout de la situation personnelle du contribuable. Ils sont considérés comme des frais fixes encourus indépendamment d'une activité lucrative concrète exercée en un lieu défini.

Si la déduction était conçue comme une déduction des frais d'acquisition du revenu, seuls les frais de garde des enfants par des tiers nécessaires à l'exercice de la profession seraient pris en compte. Si, comme dans le droit en vigueur, une déduction doit aussi être accordée aux personnes en formation ou en incapacité de gain, la forme d'une déduction pour frais d'acquisition du revenu n'est pas appropriée, faute d'exercice d'une activité lucrative et d'un revenu de l'activité
lucrative. Du point de vue du Conseil fédéral, il n'y a aucune raison de ne pas s'en tenir à la décision politique initiale concernant le droit à la déduction des frais de garde des enfants par des tiers. À cela s'ajoute le fait que l'octroi de la déduction en cas de formation poursuit également les objectifs de la FKI.

14

Cf. ATF 2C_1047/2016 du 31.7.2017, ATF 124 II 29, consid. 3d avec d'autres renvois.

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1.4

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

1.4.1

Union européenne

Dans l'Union européenne, l'imposition de la famille ne fait l'objet d'aucune directive. Les mesures proposées en ce qui concerne l'allégement fiscal en faveur des familles dont les enfants sont gardés par des tiers sont donc compatibles avec le droit européen. Les lignes qui suivent exposent les réglementations en vigueur dans quatre pays qui ont adopté des modèles d'imposition de la famille différents (Allemagne: droit d'option en matière de taxation; Suède: imposition individuelle pure; France: imposition commune avec quotient familial; Autriche: imposition individuelle modifiée).

1.4.2

Allemagne

En Allemagne, la Kinderförderungsgesetz (loi sur l'aide aux familles) de 2008 a introduit un droit à la mise à disposition d'une place d'accueil pour les enfants âgés d'un à trois ans et a prévu, pour la période comprise entre l'entrée en vigueur de la loi et le 1er août 2013, une extension de l'offre de places d'accueil permettant de satisfaire à ce droit pour tous les enfants concernés15.

Les personnes assujetties de manière illimitée à l'impôt en Allemagne peuvent demander la déduction des frais de garde d'un enfant qui vit dans leur ménage, à condition d'avoir assumé cette charge. Les frais de garde des enfants sont déductibles à partir de leur naissance jusqu'à l'âge de quatorze ans révolus. Pour les enfants handicapés qui sont hors d'état de subvenir à leur entretien en raison de leur handicap, les frais de garde des enfants sont déductibles sans limite d'âge pour autant que le handicap ait été constaté avant l'âge de 25 ans révolus (§ 10, al. 1, no 5, de la loi relative à l'impôt sur le revenu [EStG]). Il n'y a pas de conditions d'octroi particulières. Peu importe que les parents exercent ou non une activité lucrative, qu'ils suivent une formation, qu'ils soient handicapés ou atteints d'une maladie de longue durée16.

Sont déductibles les deux tiers des frais documentés de garde des enfants d'un montant maximal de 6000 euros. La déduction maximale pouvant être prise en compte est donc de 4000 euros par enfant. La déduction n'est accordée que si le contribuable a reçu une facture pour la garde de l'enfant et que si le paiement sur le compte de la personne qui a assuré la garde de l'enfant a bien été effectué. La facture et le justificatif du virement bancaire (extrait de compte, décompte en ligne) constituent des preuves suffisantes.

15

16

Cf. à ce sujet la loi du 10 décembre 2008 sur l'aide aux enfants de moins de trois ans dans les garderies et les services d'aide à la petite enfance, ou loi sur l'aide aux familles (Gesetz vom 10. Dezember 2008 zur Förderung von Kindern unter drei Jahren in Tageseinrichtungen und in Kindertagespflege; Kinderförderungsgesetz; KiföG).

Tipke Klaus/Lang Joachim, Steuerrecht, 22e édition, Cologne, 2015, § 8, ch. 713.

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Les frais ne peuvent être pris en compte fiscalement que s'ils ont été engendrés par la garde de l'enfant. Sont par exemple déductibles les frais: ­

d'hébergement d'enfants dans des écoles enfantines, des structures d'accueil collectif de jour, des garderies d'enfants, des homes d'enfants, des crèches, ainsi que chez des assistantes parentales et dans d'autres institutions de garde à la journée,

­

de recours à des puériculteurs et à des éducateurs (hommes ou femmes),

­

de recours à des aides familiales pour garder les enfants et surveiller leurs devoirs.

Dans la mesure où ce sont des proches parents qui gardent l'enfant, les frais ne sont déductibles fiscalement que si la garde fait l'objet d'un contrat clair et explicite17.

1.4.3

Suède

En Suède, le système public de garde des enfants est très développé. Chaque enfant a droit à une place dans une structure publique d'accueil collectif de jour. En 2009, par exemple, 77 % de tous les enfants âgés d'un à trois ans et 97 % de tous les enfants âgés de quatre à cinq ans étaient hébergés dans une structure d'accueil collectif de jour18.

Le système fiscal suédois est fondé sur l'imposition individuelle pure19. Il n'y a pas de classes d'impôt ni de barèmes différents. Pour chaque contribuable, seul est imposé le revenu qui lui revient indépendamment de l'état civil et sans correctifs.

Par exemple, le nombre de personnes qui doivent vivre de ce revenu n'est pas pris en considération. Aucune mesure d'allégement n'est par exemple prévue pour les couples mariés et les couples de concubins lorsque l'un des partenaires n'a pas de revenu. Le droit fiscal ne tient pas compte non plus du coût des enfants. Aucune déduction pour enfants n'est par conséquent prévue dans le système fiscal suédois.

1.4.4

France

En France, les frais de garde des enfants peuvent être déduits de l'impôt sur le revenu. Lorsque les enfants sont gardés au domicile des parents par une assistante parentale, il est possible de déduire du montant de l'impôt 50 % des frais de garde effectifs jusqu'à concurrence d'un montant maximal par enfant et par an. Cette 17 18

19

Cf. à ce sujet www.steuern.de > Steuerfachwissen-Arbeitnehmer > Kinderbetreuungskosten absetzen in der Steuererklärung.

Berlin-Institut für Bevölkerung und Entwicklung, Vorbildliche Familienpolitik: das schwedische Doppelverdiener-Modell, 2011, disponible à l'adresse www.berlin-institut.org > Newsletter > Ausgabe 110.

Cf. «Conséquences de l'introduction d'une imposition individuelle», rapport en réponse au postulat de la Commission des finances du Conseil national «Conséquences économiques et fiscales des différents modèles d'imposition individuelle» (14.3005), disponible à l'adresse www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Rapports > 2015.

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déduction devient un crédit d'impôt si, en raison d'un bas revenu, elle est partiellement ou intégralement sans effet.

Lorsque les enfants sont gardés en dehors du domicile des parents par une assistante parentale ou dans une crèche, il est également possible de déduire 50 % des frais de garde effectifs, jusqu'à concurrence d'un montant maximal par enfant et par an.

Pour les faibles revenus, l'administration fiscale verse également un crédit d'impôt20.

1.4.5

Autriche

En Autriche, les dépenses pour la garde des enfants n'excédant pas 2300 euros par enfant et par année civile sont considérées comme des dépenses extraordinaires et peuvent être déduites de la base de calcul de l'impôt à condition que, au début de l'année civile, l'enfant n'ait pas encore dix ans révolus ou seize ans révolus en cas de versement d'allocations familiales majorées pour enfants lourdement handicapés21. La garde doit être assurée par une garderie publique ou privée ou par un pédagogue qualifié, mais pas par un proche appartenant au ménage22.

1.5

Mise en oeuvre

La taxation et la perception de l'impôt fédéral direct sont effectuées par les cantons, sous la surveillance de la Confédération. Pour les cantons, le relèvement du montant maximal de la déduction pour les frais de garde des enfants par des tiers en ce qui concerne l'impôt fédéral direct occasionnerait des frais uniques d'adaptation informatique.

Lors de la consultation, divers cantons ont en outre signalé que le net relèvement de la déduction entraînerait une charge administrative plus élevée en ce qui concerne l'impôt fédéral direct.

Les cantons estiment en particulier que, dans l'exécution pratique, la charge administrative nécessaire à la délimitation entre les frais déductibles de garde par des tiers et les frais non déductibles pour les repas, les loisirs ou la «garde de luxe» pourrait augmenter. Ils observent que les factures des structures d'accueil (structures d'accueil collectif de jour, écoles à horaire continu, etc.) contiennent souvent aussi, dans un prix global, des frais non déductibles qui ne sont pas mentionnés séparément. Le contrôle de l'activité lucrative des deux conjoints pendant les heures de 20

21 22

Cf. à ce sujet l'étude de faisabilité «Passage du principe de l'imposition selon la capacité économique subjective au principe de l'imposition selon la capacité économique objective en ce qui concerne les frais liés aux enfants», rapport en réponse au postulat 14.3292 de la CER-N du 7 avril 2014, disponible à l'adresse www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Rapports > 2015. Cf. également www.impots.gouv.fr.

§ 8, al. 4, de la loi sur la compensation des charges familiales (Familienlastenausgleichsgesetz) de 1967.

§ 34, al. 9, EStG

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garde pourrait aussi gagner en complexité lorsque des montants élevés sont en jeu, surtout pour les personnes travaillant à temps partiel.

Un délai suffisant doit être accordé aux cantons pour préparer l'application des nouvelles dispositions tant pour la formation du personnel que pour les adaptations informatiques.

2

Commentaire de la disposition modifiée

Art. 33, al. 3, LIFD Le montant maximal de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers dans le cadre de l'impôt fédéral direct doit être relevé. Au lieu de 10 100 francs, ce sont dorénavant 25 000 francs au plus par enfant et par an qui pourront être déduits du revenu imposable. En revanche, les conditions du droit à la déduction demeurent inchangées. Seuls les frais effectifs documentés de garde des enfants par des tiers peuvent être déduits.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

3.1.1

Conséquences financières

Le relèvement du plafond de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers à 25 000 francs par enfant et par an entraînerait à court terme une diminution des recettes fiscales annuelles d'environ 10 millions de francs pour la Confédération.

À plus long terme, il faut s'attendre à ce que la hausse de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers, grâce à l'impulsion positive qu'elle exercera sur l'emploi, se finance elle-même ou crée même ­ du moins d'un point de vue global ­ de nouvelles recettes fiscales et de nouvelles recettes des assurances sociales.

3.1.2

Conséquences sur le personnel et l'informatique

Étant donné que l'impôt fédéral direct est taxé et encaissé par les cantons, la mesure proposée n'a en ce qui concerne cet impôt de conséquences ni sur le personnel ni sur l'informatique de la Confédération.

3161

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3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

3.2.1

Conséquences financières

La diminution du produit de l'impôt fédéral direct est estimée à 10 millions de francs. Sur cette diminution, c'est 1,7 million de francs (17 %) qui est à la charge des cantons selon le droit en vigueur (part cantonale au produit de l'impôt fédéral direct). Dans le cadre du Projet fiscal 17, ladite part cantonale passerait à 21,2 %. Ce sont alors 2,1 millions de francs qui seraient à la charge des cantons.

Étant donné que la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers ne sera relevée que pour l'impôt fédéral direct, les cantons et les communes ne subiront pas de conséquences financières directes en ce qui concerne les impôts cantonaux et communaux. D'un point de vue dynamique, il faut s'attendre à une augmentation des recettes de l'impôt sur le revenu.

3.2.2

Conséquences sur l'état du personnel et sur l'informatique

Pour les autorités de taxation des cantons, le relèvement de la déduction pour frais de garde des enfants en ce qui concerne l'impôt fédéral direct provoquera une certaine augmentation de la charge administrative (cf. à ce sujet ch. 1.5), mais elle devrait rester maîtrisable. Il faut cependant prévoir des investissements dans l'informatique.

3.3

Conséquences économiques

Un rapport élaboré par l'AFC dans le cadre de la FKI23 a révélé ce qui suit: ­

23

La plupart du temps, les frais de garde des enfants par des tiers ne dépassent le montant maximal de 10 100 francs admis par la Confédération que pour les enfants en bas âge et restent alors en partie sans effet sur le plan fiscal.

En revanche, lors de l'entrée de l'enfant à l'école enfantine, le plafonnement de la déduction ne semble en règle générale plus constituer une réelle limitation. Ce sont donc avant tout les parents d'enfants en bas âge qui seraient incités à augmenter leur activité par le relèvement des limites de la déduction. C'est dans ce domaine que le plus fort potentiel existe; en effet, le nombre de mères d'enfants en bas âge qui ont un taux d'activité nul ou faible est supérieur à la moyenne et, selon les résultats de diverses études, ces mères réagissent relativement fortement aux incitations (fiscales ou non) à exercer une activité lucrative.

Discrimination des couples mariés par rapport aux concubins dans le cadre de l'impôt fédéral direct et imposition des frais de garde des enfants par des tiers; rapport de l'AFC dans le cadre de l'examen de l'initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié, 12.6.2015; disponible à l'adresse www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Rapports > 2015.

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­

La limitation de la déduction fiscale actuelle touche surtout les ménages à hauts revenus dans lesquels les deux parents ont un temps de travail important. Dans les cas de ce genre, les frais de garde sont élevés, car les places d'accueil sont faiblement subventionnées ou ne le sont pas du tout. En raison de la progressivité de l'impôt, les ménages à hauts revenus bénéficieraient d'allégements plus importants que ceux à revenus plus faibles. L'augmentation de la déduction bénéficierait ainsi de manière ciblée aux personnes qui, en raison de frais de garde et d'impôts élevés, s'abstiennent actuellement d'augmenter leur taux d'activité.

Grâce à la baisse des frais de garde découlant du relèvement de la déduction fiscale, la participation au marché du travail et par conséquent la demande d'offres d'accueil devraient augmenter. En raison de la qualification plutôt élevée des groupes cibles, cela conduirait à une meilleure exploitation du potentiel de personnel qualifié, à la redynamisation du marché du travail et, enfin, à l'augmentation de l'ensemble de la productivité économique. À plus long terme, cela aurait aussi des conséquences favorables sur les recettes fiscales. L'incitation à l'exercice d'une activité lucrative tendrait à être renforcée, en particulier pour les mères qui ont de bonnes qualifications professionnelles.

Un document de travail élaboré par l'AFC24 a montré que, si les frais de garde des enfants par des tiers étaient reconnus, tant sur le plan fédéral que sur le plan cantonal, comme frais d'acquisition du revenu entièrement déductibles de ce dernier, on pourrait s'attendre à court ou moyen terme à une hausse du volume de l'emploi estimée à quelque 5000 postes à plein temps.

La consultation ne proposait pas une déduction complète au niveau des impôts cantonaux, mais simplement l'obligation pour les cantons d'introduire un montant minimal de 10 000 francs pour le plafond de la déduction. On estime que cette solution comportant un relèvement du plafond aux niveaux de la Confédération et des cantons aurait permis d'exploiter la moitié du potentiel de 5000 postes à plein temps supplémentaires évoqué plus haut.

Au vu des réactions majoritairement négatives recueillies lors de la consultation, l'idée d'introduire dans la LHID un montant minimal de 10 000 francs pour le plafond de la déduction a été abandonnée, si bien que l'on se contente de relever à 25 000 francs la déduction applicable en matière d'impôt fédéral direct. Étant donné que les cantons restent libres de déterminer le montant de la déduction, la baisse de la charge fiscale est moins nette que si une exigence minimale leur avait été prescrite. Avec la réglementation proposée, le nombre de postes à plein temps supplémentaires est estimé à près de 2500.

24

Document de travail de l'AFC du 17 décembre 2015: «Welche Beschäftigungseffekte lösen steuerliche Entlastungen für Ehepaare und Eltern aus? Erkenntnisse aus der internationalen Literatur mit einer Anwendung auf mögliche Steuerreformen in der Schweiz» («Quels sont les effets sur l'emploi de certains allégements fiscaux en faveur des couples mariés et des parents? Connaissances tirées de publications scientifiques internationales et appliquées à de possibles réformes fiscales en Suisse»), disponible en allemand uniquement (avec condensé en français) à l'adresse www.estv.admin.ch > Politique fiscale / Statistiques fiscales / Informations fiscales > Politique fiscale > Informations spécialisées > Votations > Imposition du couple et de la famille.

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Il faut noter que l'estimation concernant les conséquences sur le volume de l'emploi repose sur de nombreuses hypothèses et comporte donc un grand nombre d'incertitudes. Celles-ci concernent la taille du groupe cible pertinent, l'ampleur de l'économie fiscale, qui dépend pour sa part du revenu du groupe cible, ainsi que l'élasticité en matière d'offre de travail, c'est-à-dire la réaction du groupe cible à la suite de la baisse d'impôt. L'estimation ne peut donc pas servir de grandeur exacte pour une réforme fiscale. Elle ne fait que donner une idée générale du potentiel des allégements fiscaux pour les parents.

Les légères adaptations que l'estimation a subies par rapport au projet mis en consultation s'expliquent par deux facteurs: d'une part, les incertitudes évoquées plus haut ont plus de poids que l'abandon d'une exigence minimale à l'égard des cantons; d'autre part, la restriction serait de toute façon restée sans effet dans certains cantons très peuplés ainsi que dans ceux qui présentent une demande potentielle élevée, sachant que par exemple des cantons comme Bâle-Ville et Zurich accordent une déduction de 10 000 et 10 100 francs respectivement. En outre, le canton de Berne a dans l'intervalle relevé sa déduction pour frais de garde des enfants par des tiers de 3100 à 8000 francs; autrement dit, un canton très peuplé supplémentaire a introduit une déduction proche de l'exigence minimale qui avait été proposée dans le cadre de la consultation. Au vu de l'ajustement déjà effectué dans le canton de Berne, l'effet sur le potentiel de main-d'oeuvre de l'inscription d'une exigence minimale à l'égard des cantons aurait encore été plus faible.

À long terme, on pourrait s'attendre à des effets encore plus positifs sur l'emploi, en particulier si le net relèvement de la déduction dans la LIFD envoyait un signal à d'autres cantons et poussait ces derniers à relever eux aussi sensiblement le montant de la déduction pour frais de garde des enfants.

3.4

Conséquences sur l'égalité entre femmes et hommes

Du point de vue de la politique d'égalité, il est souhaitable d'inciter, dans les couples avec enfants d'âge préscolaire, le conjoint exerçant l'activité lucrative secondaire (le plus souvent la mère) à augmenter son temps de travail. Cette évolution favorise l'indépendance financière mutuelle des parents, augmente l'égalité des chances sur le marché du travail pour les deux parents et diminue les répercussions négatives pour les assurances sociales, en particulier en cas de séparation ou de divorce ainsi que pendant la retraite. Un net relèvement de la déduction dans la LIFD permettra de mieux atteindre cet objectif. En considérant exclusivement le point de vue de la politique d'égalité, il serait même souhaitable de viser à une déduction illimitée des frais effectifs de garde des enfants par des tiers pour empêcher encore plus systématiquement que la décision d'exercer ou de conserver une activité lucrative ne soit influencée par des considérations fiscales.

3164

FF 2018

4

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

4.1

Relation avec le programme de législature

Le projet n'a été annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201925, ni dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 201926.

Le relèvement de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers est néanmoins judicieux. La mesure proposée élimine un effet dissuasif du système fiscal sur l'exercice d'une activité lucrative. L'on répond ainsi aux objectifs de la FKI, qui sont d'améliorer la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale et de faire face à la pénurie de personnel qualifié indigène.

4.2

Relation avec les stratégies du Conseil fédéral

La mesure proposée est effectuée dans le cadre de la FKI (cf. ch. 1.1.1). La conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale constitue l'un des champs d'action de la FKI. La suppression d'incitations financières négatives dans le système fiscal est une condition préalable importante pour que des personnes sans activité lucrative intègrent ou réintègrent le marché du travail ou que des personnes travaillant à temps partiel augmentent leur temps de travail, de telle façon que le potentiel de main-d'oeuvre indigène puisse être mieux exploité.

5

Aspects juridiques

5.1

Compétences

En vertu de l'art. 128 Cst., il appartient à la Confédération de régler l'impôt fédéral direct.

5.2

Constitutionnalité

La mesure d'allégement fiscal en faveur des parents recourant à l'accueil extrafamilial des enfants doit avant tout être examinée quant à sa conformité au principe de l'imposition selon la capacité économique (art. 127, al. 2, Cst.).

Le principe de la capacité économique veut que les contribuables soient imposés de façon uniforme proportionnellement aux moyens financiers qu'ils ont à disposition et que la charge fiscale de chaque contribuable soit adaptée aux biens économiques à sa disposition et à sa situation personnelle27. Il faut en particulier que les contri25 26 27

FF 2016 981 FF 2016 4999 Cf. ATF 122 I 101, 120 Ia 329

3165

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buables se trouvant dans des situations économiques semblables soient traités de manière semblable (équité fiscale horizontale) et que les contribuables se trouvant dans des situations économiques différentes soient traités de manière différente (équité fiscale verticale)28. D'après le Tribunal fédéral, l'équité fiscale horizontale peut s'accommoder de compromis pour des raisons pratiques, pour les besoins de la taxation forfaitaire ou pour des raisons de schématisation. La réglementation légale ne doit cependant pas entraîner une imposition nettement plus lourde ou une discrimination systématique de certains groupes de contribuables29.

Du fait du relèvement de la déduction pour frais de garde des enfants dans la LIFD, les coûts assumés par les parents faisant appel à des structures d'accueil extrafamilial seront mieux pris en compte. Ce changement permettra d'améliorer l'équité fiscale horizontale parmi les contribuables faisant garder leurs enfants par des tiers et de mieux tenir compte du principe de l'imposition selon la capacité économique.

5.3

Compatibilité avec les engagements internationaux de la Suisse

Le relèvement de la déduction pour frais de garde des enfants par des tiers correspond aux mesures exigées par la Convention du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes30. En vertu de l'art. 5 de cette convention, la Suisse est tenue de prendre les mesures appropriées pour lutter contre les «pratiques (...) qui sont fondés sur l'idée (...) d'un rôle stéréotypé des hommes et des femmes». La mesure proposée offrira aux parents, en particulier aux femmes, de meilleures conditions pour exercer ou reprendre une activité lucrative ou pour augmenter leur temps de travail et participer ainsi de façon accrue à la vie active.

28 29 30

Cf. à ce sujet. ATF 133 I 206 ATF 126 I 79 RS 0.108

3166