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FEUILLE FÉDÉRALE 109e année

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Berne, le 28 février 1957

Volume I

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblèe fédérale concernant de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération (Du 1er février 1907)

Monsieur le Président et Messieurs, L'Assemblée fédérale est appelée à établir un nouveau régime financier destiné à remplacer celai qui est en vigueur depuis 1955 et arrive à échéance le 31 décembre 1958, Comme l'indiquaient des messages précédents, U s'agit d'assurer constitutionnellement à la Confédération les ressources dont elle a besoin pour l'accomplissement de ses tâches. Invité à se prononcer sur de précédents projets établie dans ce sens, le peuple avait rendu une décision négative les 4 juin 1950 et 6 décembre 1953.

Le message du Conseil fédéral du 22 janvier 1948 exposait en détail la question des finances de la Confédération telle qu'elle se présentait durant et après la guerre, jusqu'au moment où l'on essaya d'instaurer un régime financier durable. Par conséquent, nous n'examinerons que l'évolution qui s'est produite depuis 1948 et nous nous bornerons à donner un aperçu des tentatives faites jusqu'ici pour doter la Confédération d'un régime durable.

PREMIÈRE PARTIE La situation initiale A. HISTORIQUE I. Les arrêtés fédéraux de 1950 et de 1953 C'est le 22 janvier 1948 (FF 1948,1, 329) que le Conseil fédéral soumit à l'Assemblée fédérale son premier projet d'arrêté concernant le nouveau régime financier de la Confédération. Le projet contenait des propositions sur les principaux points suivants: Feuille fédérale. 109e aimée. Vol. I.

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o. Nouvelle réglementation des attributions de la Confédération, en matière fiscale; en particulier, insertion dans la constitution de dispositions permettant de percevoir l'impôt anticipé, l'impôt sur le chiffre d'affaires et un impôt direct pour l'amortissement et le service des intérêts de la dette de guerre (cet impôt devait remplacer l'impôt pour la défense nationale); b. Suppression du droit des cantons à participer au produit de la taxe d'exemption du service militaire, à celui des droits de timbre et à l'excédent du bénéfice net de la banque nationale ; c. Attribution aux cantons d'une part du produit des droits d'entrée sur les carburants et augmentation des subventions aux cantons ayant des routes alpestres internationales; d. Etablissement de principes pour l'amortissement, l'octroi des subventions fédérales et la limitation des dépenses; e. Promulgation de prescriptions contre l'octroi d'avantages fiscaux injustifiés.

D'une manière générale, les propositions du Conseil fédéral furent approuvées par les chambres avec quelques modifications. Seul l'impôt d'amortissement donna lieu à des divergences de vues irréductibles. Une conférence de conciliation des deux chambres fut convoquée, à la suite de laquelle fut adopté, le 21 mars 1950, un arrêté fédéral (FF 1950,1, 700) prévoyant des contingents cantonaux et l'imposition des personnes morales par la Confédération. Le 4 juin 1950, le peuple et les cantons rejetèrent ce ' projet à une grande majorité. On put alors constater que cette décision négative était due avant tout à la proposition du parlement de prévoir des contingents cantonaux.

Afin de maintenir le budget en équilibre, les chambres prirent, le 21 décembre 1949 (RO 1949, 1913), un arrêté urgent prolongeant jusqu'à fin 1951 le régime financier en vigueur. Le 29 septembre 1950, l'Assemblée fédérale vota un arrêté fédéral (FF 1950, III, 33) concernant le régime des finances pour les années 1951 à 1954, qui fut accepté par le peuple et les cantons le 3 décembre 1950. L'ancien régime des finances, légèrement modifié, resta ainsi en vigueur pour une nouvelle période de quatre ans pendant laquelle un régime constitutionnel durable devait être institué.

Par un message du 20 janvier 1953 (FF 1953,1, 101), le Conseil fédéral soumit à nouveau un projet à l'Assemblée fédérale.

n prévoyait:
a. La continuation de l'impôt pour la défense nationale pendant 20 ans, soit de 1955 à 1974. La même limitation dans le temps devait s'appliquer à l'impôt sur le chiffre d'affaires. En outre, des lignes directrices insérées dans la constitution devaient fixer les taux maximums de ces impôts de durée limitée.

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b. Une disposition constitutionnelle accordant aux cantons 20 pour cent du produit des droits de timbre. Bien ne devait être changé en ce qui concerne la répartition de l'excédent du bénéfice net de la banque nationale. Le produit net de la taxe d'exemption du service militaire devait revenir entièrement à la Confédération, mais une provision de perception de 20 pour cent au maximum devait être accordée aux cantone.

c. Le droit des cantons à 50 pour cent du produit des droits d'entrée sur les carburants.

d. Les principes à appliquer pour l'amortissement, l'octroi de subventions fédérales et la limitation des dépenses, en partie définis autrement que dans le projet de 1950. Une disposition était en outre introduite, aux termes de laquelle la Confédération devait encourager la péréquation financière entre les cantons.

e. L'interdiction de conclure des arrangements fiscaux (comme en 1950).

Les autres dispositions qui n'avaient pas été combattues dans le projet antérieur furent en général reprises. L'Assemblée fédérale réduisit de 20 à 12 ans la durée de perception de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires. L'arrêté fut voté avec quelques modifications de caractère secondaire et sans discussion sur les principes (AF du 25 septembre 1953; FF 1953, III, 235).

Le 6 décembre 1953, le peuple rejeta également ce second projet par 488 232 voix contre 354 149. La participation au scrutin fut de 60 pour cent; 19 des 22 cantons se prononcèrent négativement; seuls Zurich, Uri et Grisons acceptèrent le projet. Ainsi, tous les cantons financièrement faibles, à l'exception d'Uri et des Grisons, le repoussèrent, de même que tous les cantons romands. La majorité négative la plus forte fut enregistrée à Genève où la proportion des non par rapport aux oui fut de 6 contre 1.

Cette décision semble due en grande partie à la politique pratiquée par la Confédération en matière de dépenses et de subventions. Un mécontentement évident se donna libre cours de cette manière-là.

H n'est pas possible de tirer du résultat de la votation des conclusions au sujet des diverses parties du projet. Constatons, cependant, comme le résultat des votations de 1950 et de 1953 l'a prouvé, qu'aucun parti politique n'est suffisamment fort pour faire adopter un projet s'inspirant principalement de ses
voeux. Par conséquent, seul un projet représentant un véritable compromis, qui soit acceptable, a des chances d'aboutir, H. Le régime financier de 1955 à 1958 Le peuple et les cantons ayant rejeté, le 6 décembre 1953, l'arrêté fédéral du 25 septembre de la même année, la Confédération se voyait privée de la

528 garantie de disposer durablement de ressources suffisantes. En outre, elle était menacée de perdre, à la fin de 1954, une grande partie de ses recettes -- le produit des impôts de la période de 1951 à 1954 -- si elle ne réussissait pas à trouver une autre source de revenus.

Nous constatâmes d'emblée qu'il était impossible d'instaurer dans ce délai un régime financier «définitif». La votation du 6 décembre 1953 et les critiques adressées au projet ne donnaient pas d'indications sur ce qu'un tel régime devait prévoir pour être accepté par le peuple. Partant de l'idée que la situation ne pouvait être éclairoie que par des pourparlers engagés entre des gens représentant de nombreux milieux et convaincu de la nécessité d'une entente, le Conseil fédéral proposa aux chambres dans son message du 12 février 1954 (FF 1954,I, 322) de proroger simplement de quatre ans, soit de 1955 à 1958, le régime financier de 1951 à 1954. Ce nouveau régime transitoire devait permettre de poursuivre les tentatives en vue de doter la Confédération d'un régime financier durable; il devait aussi lui assurer pendant ce temps les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses tâches. La prorogation pure et simple des dispositions en vigueur était indispensable parce que les délais ne permettaient guère une autre solution et qu'il ne fallait en aucune manière préjuger le nouveau régime. Les conseils législatifs se rallièrent à l'opinion du Conseil fédéral. Dans la votation populaire du 24 octobre 1954, l'arrêté fédéral du 25 juin 1954 prorogeant les dispositions du régime de 1951 à 1954 jusqu'à la fin de 1958 (RO 1954, 1347) fut adopté par 457 527 voix contre 196 188 et par 21 cantons contre 1.

III. La situation après l'adoption du régime de 1955 à 1958 En acceptant le régime des finances de 1955 à 1958, le peuple et les cantons avaient sanctionné en quelque sorte un armistice politique per-mettant à l'administration, au Conseil fédéral et au parlement de poser, pour la troisième fois depuis la fin de la guerre, les principes d'une réglementation durable des finances de la Confédération et de prendre des dispositions en conséquence. Malheureusement, le temps nécessaire à une mûre réflexion et à un examen objectif avait été compté d'une manière trop juste.

Déjà au cours de la session de juin 1955, des motions demandant
d'importants allégements dans le domaine de l'impôt pour la défense nationale dû pour la période de 1955 à 1958 et de l'impôt sur le chiffre d'affaires dû dès le 1er janvier 1956 furent présentées dans les deux chambres et adoptées. Conformément au mandat précis qui nous avait été donné et nous fondant sur l'article 5 de l'arrêté sur le régime de 1951 à 1954, nous proposâmes aux chambres dans notre message du 1er novembre 1955 (FF 1955, II, 1012) de réduire l'impôt pour la défense nationale et l'impôt sur le chiure d'affaires. Les conseils législatifs entérinèrent ces deux propo-

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sitions avec quelques modifications. L'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 (RO 1955, 1210) prévoyait une réduction de 10 pour cent, avec effet rétroactif au 1er janvier 1955, de l'impôt pour la défense nationale, et même de 10 à 40 pour cent pour les personnes physiques, ainsi qu'une réduction de 10 pour cent de l'impôt sur le chiffre d'affaires à partir du 1er janvier 1956.

Les chambres accordaient ainsi par anticipation aux contribuables les dégrèvements considérables que le Conseil fédéral avait l'intention d'inclure dans ses propositions de régime définitif. Elles ont de ce fait limité grandement la possibilité de faire des concessions importantes pour accroître les chances d'acceptation du projet en votation populaire.

En novembre et eiï décembre 1955, deux initiatives populaires tendant à la réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires furent déposées: celle de Lucerne (FF 1955, II, 1293) et celle du parti socialiste suisse (FF 1956, I, 17). Toutes deux tendaient à des allégements -- mais partiellement contradictoires -- en ce qui concerne les deux principaux impôts prévus dans le régime financier de 1955 à 1958. Elles visaient en outre à la prolongation de ce régime jusqu'en 1964 (initiative lucernoise) ou 1960 (initiative socialiste). En tous les cas, ces deux initiatives n'ont ni maintenu l'armistice politique auquel tendait le régime financier de 1955 à 1958, ni contribué à éclaircir la question des grands buts du régime financier; elles ont, au contraire, accru les difficultés existantes.

B. LA SITUATION INITIALE CONSIDÉRÉE SOUS L'ANGLE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER I. Le développement de l'économie suisse depuis la fin de la guerre Le développement de l'économie européenne au cours des dix dernières années est caractérisé par la reconstruction consécutive à la seconde guerre mondiale. Cette oeuvre de reconstruction s'accomplit dans des conditions entièrement nouvelles sur le marché international et sous la pression des tensions constantes entre l'est et l'ouest. Dans son ensemble, la reconstruction a fortement vivifié l'économie.

Le développement de l'économie suisse depuis la fin de la seconde guerre mondiale est caractérisé par une expansion constante, qui ne fut interrompue que passagèrement en 1949. La valeur des exportations passa de 3435 à
5622 millions de francs de 1948 à 1955. Durant la même période, le volume de la construction passa de 2115 à 3860 millions de francs. Toujours durant cette période, le nombre des ouvriers soumis à la loi sur les fabriques s'accrut de 56 695 unités soit de 11 pour cent. En 1948, 129 385 étrangers reçurent, pour la première fois, l'autorisation de travailler en Suisse. Sept ans plus tard, c'est-à-dire en 1955, le nombre des autorisations se montait à 220867. Durant le même laps de temps, le revenu nominal

530 par tête de population passa de 3990 à 4910 francs, c'est-à-dire qu'il augmenta de 23 pour cent, cependant que le revenu réel haussait de 17 pour cent.

Cette évolution est d'autant plus remarquable que la Suisse ne compte pas parmi les nombreux pays qui ont dévalué leur monnaie en automne 1949 et n'a ainsi pas créé, par une mesure monétaire, des conditions favorables aux exportations. En dépit de troubles passagers, la prospérité dont bénéficie notre pays depuis la fin de la guerre mondiale s'est révélée peu vulnérable. Il n'y a pour l'instant pas de signes annonciateurs d'un prochain changement.

Certes, la prospérité ne règne pas d'une manière égale dans toutes les parties de l'économie. Elle a aussi ses ombres. Les prix et les salaires tendaient nettement, ces derniers temps, à monter. Le renchérissement est stimulé par une demande en excédent dans quelques secteurs-clés, II. L'évolution de la situation financière de la Confédération A la fin de la seconde guerre mondiale, la principale tâche qui s'imposait à la Confédération dans le domaine de la politique financière, était de liquider le découvert du bilan, qui était monté de 1,5 à 8,5 milliards de francs dans les années de guerre. Les autorités fédérales cherchèrent à atteindre ce but en réduisant aussi rapidement que possible les mesures que la période de service actif et d'approvisionnements déficitaires avait imposées à l'Etat et en exerçant un contrôle rigoureux des dépenses, combiné avec le maintien des impôts instaurés pendant la guerre.

Pendant les périodes de prospérité et de grande prospérité constituées par les années de 1946 à 1955, les comptes de la Confédération se soldèrent trois fois -- en 1946, 1952 et 1953 -- par des découverts de 228 millions de francs au total. Dans les sept autres années de cette période, il y eut en revanche un boni de 1124 millions au total. Pour les dix premières années d'après-guerre, on enregistra ainsi un boni de 896 millions.

Le chiffre des recettes de la Confédération pendant les premières années d'après-guerre provenait en grande partie des rendements, encore très élevés, du sacrifice et de l'impôt pour la défense nationale.

Si l'on ajoute la dernière tranche (100 millions) du versement opéré par prélèvement sur le fonds d'égalisation des changes créé en 1936, et les recettes susmentionnées
des années 1946 à 1948, on obtient un total de près de 900 millions.

Les recettes, abstraction faite des investissements et des recettes supplémentaires des années 1946 à 1948, dépendaient largement de la situation économique. Compte tenu des périodes de deux ans de l'impôt pour la défense nationale, on constate qu'elles suivent la même courbe que la situation économique. De 1946 à 1954, elles ont passé de 1358 à 2271 millions de francs, ce qui représente un accroissement de près de 70 pour cent.

531 Dans les années où l'économie est prospère et n'exige pas de mesures coûteuses pour modifier son cours, les dépenses de la Confédération sont soumises à d'autres influences. Durant les dix dernières années, l'évolution des dépenses fédérales était commandée par les dépenses pour la défense nationale, le renchérissement, ainsi que par les mesures en faveur de l'agriculture et de la politique sociale.

L'évolution enregistrée depuis la fin de la guerre a été telle qu'on a réussi, malgré le développement de la défense nationale et de la politique sociale, à réduire de 8,5 à 7,6 milliards le découvert du bilan de la Confédération entre la fin de 1945 et la fin de 1955. D convient cependant de noter que la Confédération a encaissé durant ce même laps de temps 900 millions au titre du sacrifice pour la défense nationale et de l'impôt sur les bénéfices de guerre. Sans ces recettes spéciales, le découvert du bilan à fin 1955 n'aurait pu être réduit depuis 1946, malgré la prospérité économique.

III. Les mesures prises par la Confédération pour agir sur les périodes économiques Dans un Etat organisé selon le principe de liberté, les mesures prises par les autorités ne peuvent parer qu'assez partiellement aux dangers engendrés par une activité économique très grande, voire excessive. Les organes de la Confédération ne sont toutefois pas restés inactifs.

Après la guerre, l'exportation fut favorisée par l'octroi de crédits à l'étranger; ce fut là une importante mesure prise pour surmonter les difficultés nées du passage de l'économie de guerre à celle du temps de paix.

Plus tard, on pratiqua à dessein une politique libérale en matière d'importations. Cela permit, dans le secteur des marchandises, de combattre avec succès les tendances inflationnistes. De bons résultats furent également obtenus par l'accord de stabilisation des salaires et des prix conclu en automne 1947 pour une année par les grandes associations économiques, accord qui fut prorogé par la suite pour une nouvelle année. Il avait pour objet d'empêcher des hausses générales des prix et des salaires. Parmi les mesures qui contribuèrent aussi à freiner une expansion malsaine, nous mentionnons l'octroi très large d'autorisations d'engager de la main-d'oeuvre étrangère, le genUemen's agreement intervenu entre les institutions de crédit au sujet
du financement des constructions, la constitution volontaire d'avoirs minimums auprès de la banque nationale, la retenue manifestée par la Confédération dans l'établissement de ses programmes de constructions et l'autorisation de constituer des réserves fiscalement privilégiées en vue de la création de futures possibilités de travail. La Suisse collabora en outre activement à l'Organisation européenne de coopération économique (OECE); elle adhéra également à l'Union européenne de paiements (UEP), créée au milieu de l'année 1950.

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Les finances publiques constituant une partie appréciable de l'ensemble de l'économie, la politique financière de l'Etat est aussi un moyen d'atténuer les fluctuations économiques, même si ses effets.sont limités.

Les dépenses de la Confédération, des caontons et des communes se sont élevées en 1954 -- déduction faite des chiffres comptés deux fois -- à un bon cinquième du revenu national. Dans les dépenses publiques, la part de la Confédération ne s'élève qu'au tiers approximativement, ce qui montre l'importance de la politique financière des cantons et des communes.

Si Fon veut obtenir un certain équilibre des périodes économiques par la politique financière de l'Etat, il faut donc que les cantons et les communes soient acquis aux principes d'une gestion financière appropriée à la situation économique.

En temps de dépression, cela implique pour la collectivité publique l'obligation de ne pas compenser la moins-value des recettes par des. augmentations d'impôts, mais d'accepter de faire des déficits. En période d'expansion ou de surexpansion économique, elle doit en revanche, malgré des recettes accrues, renoncer à des diminutions d'impôts et à des augmentations de dépenses. Elle doit au contraire obtenir des excédents de recettes.

Si l'Etat veut contribuer à assurer un degré de production et d'occupation élevé et aussi stable que possible, il ne peut mener sa politique financière uniquement d'après des considérations fiscales. Il doit au contraire s'efforcer d'atténuer, par un aménagement judicieux de ses finances, les fluctuations de l'offre et de la demande d»n® l'économie privée.

Considérant que le problème d'une politique financière appropriée à la situation économique joue UBI rôle important dajis l'élaboration du nouveau régime financier de la Confédération, le département des finances et dee douanes institua une commission chargée d'étudier cette question (1).

Nous faisons nôtre, sur les points essentiels, ravis exprimé par cette commission et signalons en même temps que de nombreux voeux ont déjà été réalisés ces dernières années. La politique financière de la Confédération doit continuer à exercer une influence régulatrice sur l'économie, sans toutefois que soient négligés d'autres aspects de la question.

La commission signale qu'il est avantageux que l'action modératrice exercée
par les finances publiques sur la situation économique s'exerce d'Une manière aussi automatique que possible. Les rendements de diverses recettes de la Confédération, telles que les droits de douane et l'impôt sur le chiffre d'affaires, sont très sensibles aux fluctuations économiques ; ainsi, même si les dépenses varient peu, les oscillations du chiffre d'affaires et du revenu national ont toujours, sur le compte d'Etat, l'effet qui est désirable du point de vue de l'action modératrice dont nous venons de parler.

En dehors de la politique financière, il convient encore de prêter attention à la préparation d'ouvrages propres à assurer des possibilités de travail.

(!) Publications concernant la réforme des finances fédérales,, brochure n° 5.

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On ne doit toutefois pas oublier qu'il n'entre pas dans les attributions de l'Etat d'assurer une activité particulièrement intense.

Les facteurs qui exercent un effet déterminant sur la conjoncture résident dans l'économie privée et à l'étranger. H est donc important que l'économie privée, elle aussi, se comporte d'une manière appropriée à la situation économique efc soutienne les efforts entrepris par les pouvoirs publics pour prévenir de fortes fluctuations.

IV. Appréciation de la situation initiale Au moment des délibérations parlementaires relatives au message du 22 janvier 1948 (FF 1948, I, 329) concernant la réforme constitutionnelle des finances de la Confédération, le souvenir de la deuxième guerre mondiale était encore présent à tous les esprits. Grâce à la prospérité économique des années précédentes, la situation financière de la Confédération s'était développée de façon satisfaisante.

Le projet du 20 janvier 1953 (FF 19.33, I, 101) dut partir de prémisses tout à fait différentes. Le souvenir de la seconde guerre mondiale s'était estompé. L'économie avait passé par une période de dépression et ne se remettait, en partie, que lentement. Malgré les mesures d'économies, la situation financière était ainsi tendue, surtout à cause des dépenses exigées par la défense nationale.

Aujourd'hui, les choses ont de nouveau changé. Les années de grande prospérité ont encore une fois exercé une influence favorable sur les finances de la Confédération. La situation financière des cantons s'est développée d'une façon tout aussi satisfaisante.

Le revenu national s'est accru de 55 pour cent de 1946 à 1955, soit eu moyenne de 6 pour cent par an. Les recettes de la Confédération, sans le sacrifice pour la défense nationale, l'impôt sur les bénéfices de guerre et les recettes provenant de la liquidation d'investissements -- recettes qui n'ont présenté quelque importance que pendant les premières années de l'aprèsguerre -- ont augmenté pendant le même temps de 50 pour cent. Ce parallélisme n'est pas fortuit, car le revenu national et les recettes de l'Etat dépendent tous deux, dans une large mesure, de la capacité de production de l'économie publique. Quand bien même l'expansion économique de ces prochaines années ne pourra guère se poursuivre à la même allure, on peut compter durablement sur un accroissement
moyen annuel du revenu national de 2 à 3 pour cent.

Les tensions entre l'est et l'ouest, visibles aux yeux de chacun, obligent encore d'envisager la possibilité d'un conflit armé. Il faudra par conséquent compter à bref délai avec un accroissement des dépenses consacrées à la défense nationale. Pour s'acquitter de diverses tâches de nature sociale et résoudre des problèmes urgents dans le domaine des communications, il

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faudra faire des mises de fonds importantes. Aussi longtemps que dure la situation économique favorable, il sera indispensable d'affecter des sommes supplémentaires au désendettement de la Confédération. Toutefois, si dans les prochaines années de nouvelles tâches s'ajoutent à celles qui incombent déjà à la Confédération et exigent des ressources plus considérables, les conditions économiques et financières requises pour un nouveau régime des finances fédérales sont plus favorables que jamais grâce à une prospérité sans pareille. II devrait être possible, même en couvrant des dépenses accrues, de réduire encore le découvert du bilan et d'assurer en même temps des allégements fiscaux.

C. LA PRÉPARATION DU NOUVEAU PROJET I. La délimitation de la tâche Depuis le jour où le peuple rejeta le dernier projet concernant de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération, en 1953, on enregistra diverses interventions et décisions qui ont exercé une influence sur les travaux préparatoires d'un nouveau projet.

1. Les initiatives pour la réduction des dépenses Lors des débats sur le projet de 1953, on reprocha, dans le public, aux propositions du Conseil fédéral de tendre trop unilatéralement à couvrir les besoins financiers de la Confédération, sans rien indiquer qui pût contribuer à limiter ces besoins.

Un comité d'initiative pour la réduction et le contrôle par le peuple des dépenses fédérales déposa le 23 septembre 1953 à la chancellerie fédérale les deux initiatives populaires concernant le vote des dépenses par l'Assemblée fédérale et pour un contrôle de l'administration fédérale (FF 1953, III, 435).

a. Le. vote, des dépenses

La première de ces initiatives se proposait de rendre plus difficile le vote de dépenses par l'Assemblée fédérale en lui interdisant de dépasser le total des dépenses inscrites au budget par le Conseil fédéral sans prévoir concurremment la couverture de ce dépassement. De plus, la mesure connue sous le nom de frein aux dépenses, qui figure à l'article 8 de l'arrêté sur le régime financier de 1951 à 1954 (majorité qualifiée pour certaines dépenses soustraites au vote du peuple), devait être rendue plus sévère et incorporée au droit constitutionnel ordinaire. Enfin, l'initiative prévoyait le referendum facultatif, voire le referendum obligatoire dans le cas des très grandes dépenses.

Cette initiative a, par la suite, été retirée en faveur du contre-projet de l'Assemblée fédérale (FF 1956, I, 1352). Celui-ci prévoyait d'une part,

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sans grand changement, la reprise du frein aux dépenses actuel, d'autre part le referendum financier facultatif pour les dépenses uniques de plus de 10 millions de francs ou les dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs.

Ce contre-projet a été rejeté très nettement par le peuple et les cantons dans la votation populaire du 30 septembre 1956.

Il est donc tout à fait clair que des dispositions prévoyant un frein aux dépenses ou une extension des droits populaires en matière financière ne sont pas désirées par le souverain. H y a lieu, par conséquent, de renoncer à remettre ces questions en discussion à propos d'un nouveau projet de régime financier.

b. Le contrôle de l'administration La seconde initiative tendait à la création d'un organe de contrôle indépendant de l'administration et chargé d'étudier continuellement toutes les possibilités d'économies réalisables dans l'emploi des ressources de la Confédération.

Pour l'essentiel, cette initiative a été réalisée par la loi fédérale du 6 octobre 1954 sur la centrale pour les questions d'organisation de l'administration fédérale (RO 1956, 271) ; elle fut retirée en faveur de cette loi, qui put entrer en vigueur le 1er mars 1955 sans que le referendum eût été demandé.

La nouvelle centrale a donné jusqu'ici de bons résultats, et sa participation aux mesures de rationalisation et d'organisation est appréciée.

Outre les avis qu'elle donne, elle entreprend aussi de grandes enquêtes sur des domaines déterminés de l'administration fédérale. Elle est devenue un organe précieux pour réaliser des économies dans la gestion financière de la Confédération. Cela étant, il n'est plus nécessaire d'aborder de nouveau la question du contrôle de l'administration à propos delà revision du régime financier de la Confédération.

2. Les mesures d'économie de la Confédération En ce qui concerne les économies à réaliser, la Confédération n'est pas demeurée inactive, malgré le rejet des précédents projets de nouvelle réglementation des finances fédérales. Après avoir pris connaissance d'un message du Conseil fédéral du 19 mai 1953 (FF 1953, II, 469), l'Assemblée fédérale adopta le 23 décembre de la même année une loi instituant des mesures spéciales propres à réduire les dépenses de la Confédération (RO 1954, 573), et le 24 mars 1954 un arrêté fédéral (RO 1954,
578) qui n'est pas de portée générale et concerne la même matière. Ces deux actes législatifs entrèrent en vigueur pour une partie le 1« janvier 1954 et pour le reste le 1er janvier 1955. Il en résulte l'abrogation ou la réduction de subventions fédérales prévues dans 18 lois ou arrêtés fédéraux, y compris la libération de la Confédération de l'obligation de verser des intérêts à certains

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fonds spéciaux et réserves. Le compte de la Confédération fut déchargé de cette manière d'un montant de l'ordre de 40 millions de francs par an.

La tâche d'adapter les bases juridiques des dépenses de l'Etat aux exigences du temps présent put être ainsi considérée comme accomplie dans une large mesure.

Les organes responsables de la Confédération continuèrent de diriger surtout leur attention vers les mesures d'économies et de simplification de l'organisation administrative qui pourraient être adoptées. Ces efforts pour une administration efficace et peu coûteuse furent intensifiés grâce à la collaboration de la centrale pour les questions d'organisation. Le département des finances et des douanes chargea, au cours de l'été 1956, une commission spéciale d'études prise en dehors de l'administration d'examiner la possibilité de nouvelles mesures d'économies. Cette commission s'occupa en particulier des questions suivantes : utilité des expertises dans l'administration, activité de la centrale pour les questions d'organisation et ses rapports avec le contrôle des finances, la centrale des imprimés et du matériel, les services de caisse et de comptabilité et l'office du personnel. La commission aboutit à la conclusion que l'on ne pouvait plus rien attendre de nouvelles expertises générales faites par des spécialistes du dehors, mais que seuls les examens de questions spéciales bien définies concernant les diverses branches de l'administration, permettraient d'obtenir des résultats tangibles. La commission fut aussi d'avis qu'en créant la centrale pour les questions d'organisation de l'administration fédérale, la Confédération s'était donné l'instrument le plus propre à lui assurer des succès dans le domaine des mesures d'économie et de rationalisation. Au reste, le rapport de cette commission contient en particulier des propositions en vue de la collaboration de la centrale avec les départements et les autres divisions de l'administration centrale de la Confédération. Avec la commission, nous pensons que de nouveaux progrès peuvent être réalisés dans cette voie.

Cela étant, il est superflu de combiner la question des mesures d'économies avec la matière du présent projet, 3. Leg initiatives populaires pour la réduction des impôts Le 3 novembre 1955, un comité d'initiative, de Lucerne, a déposé à la
chancellerie fédérale une initiative pour la réduction des impôts fédéraux, appuyée par 138 975 signatures valables (FF 1955, II, 1293). Cette initiative, qui se présente sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces et contient une clause de retrait en faveur d'un contre-projet de l'Assemblée fédérale, se propose de modifier les dispositions du régime financier de 1955 à 1958 et de les proroger jusqu'au 31 décembre 196Ï. Le 16/22 décembre 1955, les chambres nous ont invités à présenter un rapport a ce sujet.

Ensuite, le 14 décembre 1955, le parti socialiste suisse a déposé à la chancellerie fédérale une initiative en faveur de la réduction de l'impôt

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pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires, appuyée par 181 896 signatures valables (FF 1956, I, 17). Cette initiative aussi se présente sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces; elle contient une clause de retrait et se propose également de modifier les dispositions du régime financier en vigueur et de les proroger jusqu'au 31 décembre 1960. Le 13/16 mars 1956, les chambres nous ont invités à présenter un rapport à ce sujet.

Les deux initiatives tendent à modifier les dispositions du régime financier de 1955 à 1958, puisque toutes deux se réfèrent à l'impôt pour la défense nationale et à l'impôt sur le chiffre d'affaires. Elles ne sont pas, l'une à l'égard de l'autre, dans un rapport de dépendance ; la seconde n'est pas telle qu'elle ne prendrait un sens que si la première était acceptée par le peuple. Ces initiatives se situent au contraire sur le même plan; elles veulent ordonner la même matière, mais de façon différente. Elles s'opposent ainsi l'une à l'autre et sont incompatibles; leurs contenus ne pourraient coexister en tant que dispositions de droit constitutionnel. Si la seconde initiative était acceptée, la première s'en trouverait abrogée, et ce serait sans doute l'affaire de l'Assemblée fédérale d'arrêter des dispositions spéciales de transition.

Pour le cas où plusieurs initiatives concernant la même matière sont déposées, la loi fédérale du 27 janvier 1892/5 octobre 1950 sur le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution fédérale (RS 1, 158; RO 1951, 17) dispose que l'Assemblée fédérale doit d'abord traiter et soumettre à la votation populaire celle qui a été déposée en premier lieu. La date du dépôt à la chancellerie fédérale est déterminante. L'initiative lucernoise ayant été déposée le 3 novembre 1955 et l'initiative socialiste le 14 décembre 1955, c'est la première qui doit donc être traitée par l'Assemblée fédérale, puis soumise à la votation populaire, dans le délai de trois ans, c'est-à-dire jusqu'au 2 novembre 1958. L'initiative socialiste sera traitée ensuite.

L'Assemblée fédérale ne doit ainsi la traiter quant au fond que lorsqu'une votation populaire aura eu lieu sur l'initiative lucernoise et, le cas échéant, sur un contre-projet.

L'initiative lucernoise tend à
proroger pour une durée limitée le régime financier en vigueur pour la période de 1955 à 1958, mais avec des modifications concernant l'impôt pour la défense nationale et l'impôt sur le chiffre d'affaires. Cette initiative populaire diffère donc fondamentalement du présent projet, qui a pour objet une réorganisation générale des dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération.

Nous sommes d'avis que la revision du régime financier est tellement plus importante que le but des deux initiatives qu'elle doit être traitée avant l'initiative déposée la première. Si, comme nous l'espérons, la réforme des finances fédérales peut être menée à bien, on est en droit d'espérer que ces deux initiatives seront retirées. Dans le cas contraire, il restera encore

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assez de temps, si le présent projet est discuté avec la célérité nécessaire et soumis à la votation populaire au printemps de 1958, pour traiter l'initiative lucernoise jusqu'au 2 novembre 1958. Si l'on considère combien un régime financier durable est important, ce serait techniquement une faute que de lui donner le caractère d'un contre-projet opposé à l'initiative lucernoise.

C'est pourquoi nous avons l'intention de ne vous présenter nos propositions concernant le traitement des deux initiatives, dans l'ordre de succession imposé par la loi, qu'après la votation populaire sur le présent projet.

II. L'ensemble des problèmes et les travaux préliminaires 1. Les intentions initiales Le département des finances et des douanes essaya tout d'abord de résoudre le problème de la revision constitutionnelle du régime financier de la Confédération en faisant porter la discussion sur un plus grand nombre de points que lors des deux tentatives précédentes. Il se demanda par conséquent en premier lieu si le partage des tâches entre la Confédération et les cantons, tel qu'il est prévu par la constitution, répond encore aux besoins du temps présent et convient encore aujourd'hui. Il fallait considérer la possibilité de modifier le régime de telle sorte que l'on revînt à une répartition plus claire des attributions conforme à l'intention primitive de la constitution fédérale.

La question la plus urgente était sans doute celle d'une délimitation plus précise des compétences fiscales. Comme la conjugaison de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale devait être maintenue, il fut proposé d'attribuer à la Confédération, outre l'impôt sur le chiffre d'affaires, la compétence exclusive de percevoir des impôts sur les personnes morales, l'imposition des personnes physiques étant en revanche abandonnée entièrement aux cantons et aux communes.

Toujours dans le sens d'une délimitation plus claire des attributions des différentes souverainetés, on se demanda si la part des cantons au rendement des impôts fédéraux ne devait pas être réduite à une commission de perception. On essaya en outre de réaliser de façon plus parfaite que dans les projets précédents les principes relatifs à l'amortissement et à la recherche de l'équilibre du budget.

C'est à partir de ces considérations que le département des finances et des douanes entreprit les travaux préparatoires d'une troisième tentative de revision du régime des finances fédérales.

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2. Les commissions d'études pour les questions spéciales D'accord avec le Conseil fédéral, le département des finances et des douanes chargea plusieurs petites commissions d'examiner diverses questions de principe. Certains experts faisant partie de ces commissions ont en outre été chargés d'étudier plus en détail des matières spéciales se rapportant à la tâche de leur commission.

Les rapports des commissions d'études et les consultations ont été publiés par le département des finances et des douanes chez l'éditeur «Verlag für Recht und Gesellschaft S. A.» à Baie,sous le titre Publications concernant la réforme des finances fédérales, qui comprennent les brochures suivantes : 1. Bases et projet d'un impôt fédéral dû par les personnes morales.

2. L'aménagement de l'impôt sur le chiffre d'affaires.

2a. «Die Frage der Berechtigung einer Warenumsatzsteuer». Consultation (non traduite) du professeur Th. Keller, Saint-Gall.

3. L'aménagement des droits de timbre et de l'impôt anticipé.

4. L'amortissement.

4o. «Schuldentilgung und Kapitalmarkt». Consultation (non traduite) du professeur Jürg Niehans, Zurich.

5. Les problèmes que pose une politique financière appropriée à la conjoncture économique.

6. Les questions touchant aux chemins de fer privés dans le nouveau régime des finances fédérales.

Une autre commission d'études a examiné la question des routes. Le rapport de cette commission n'a été remis jusqu'à présent qu'aux gouvernements cantonaux et associations intéressées, n n'a pas été publié pour ne pas gêner les travaux de la grande commission pour la planification routière.

Le rapport pourra être publié, lui aussi, en temps voulu.

Une commission chargée d'examiner dans ses détails la question de la péréquation financière entre les cantons ne pourra, comme l'a constaté un groupe de travail présidé par M. Max Weber, conseiller national, entreprendre sa tâche avec quelque chance de succès pratique qu'après les délibérations parlementaires sur le présent projet. Les résultats de ces travaux de commissions seront utilisés pour la rédaction des lois et règlements d'exécution.

3. Les « Considérations de principe » du 18 juillet 1956 Le département des finances et des douanes a publié le 18 juillet 1956 une brochure intitulée « Considérations de principe concernant le régime financier de la Confédération». Cet écrit résumait les travaux préparatoires anté-

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rieurs et soumettait à la discussion publique l'ensemble des questions posées.

Voici les principaux problèmes abordés: a. Le remplacement de l'impôt pour la défense nationale par le droit exclusif de la Confédération d'imposer les personnes morales ; 6. La suppression des parts des cantons aux recettes fédérales ; c. Le financement du programme de construction de routes après que les droits sur les carburants auront été laissés entièrement à la Confédération; d. Les dépenses supplémentaires de la Confédération pour la solution des problèmes ferroviaires; e. La question de l'amortissement.

A ce programme d« discussion étaient jointes des propositions de projet d'article constitutionnel reposant sur les considérations exprimées.

Les «Considérations de principe» furent communiquées aux cantons, aux partis politiques et aux associations économiques avec prière d'exprimer leur avis. Le délai imparti pour cela allait jusqu'à la mi-septembre en ce qui concerne l'imposition des personnes morales et jusqu'à la mi-octobre 1956 pour les autres problèmes. Vu la demande unanime de voir prolonger et unifier ces délais, le département des finances et des douanes, d'accord avec le Conseil fédéral et après avoir entendu les présidents des groupes parlementaires, consentit à prolonger le délai de réponse uniformément jusqu'à la fin d'octobre.

L'analyse des réponses montre que presque tout le monde rejetait l'idée d'un impôt fédéral dû par les personnes morales. Mais c'était bien là le seul avis concordant qui eût été exprimé. Sur les autres solutions suggérées, les réponses recueillies montraient toutes les nuances, de l'adhésion convaincue au refus catégorique, 4. L'avant-projet du 3 décembre 1956 De l'écho qu'avaient éveillé les «Considérations de principe», le département des finances et des douanes tira la conclusion qu'il était indispensable de limiter les buts tout d'abord envisagés, si l'on voulait qu'un nouveau régime financier devînt une réalité. Il dut reconnaître que le temps n'était pas encore venu de proposer une nouvelle répartition fondamentale des compétences entre la Confédération et les cantons. II en vint donc à proposer au Conseil fédéral, le 3 décembre 1956, un avant-projet de disposition constitutionnelle contenant les principes suivants: a. Maintenir le régime actuel de transition concernant
les droits de douane sur les carburants, jusqu'à ce que la Confédération ait établi de nouvelles dispositions concernant le développement du réseau des routes principales.

b. Attribuer un caractère permanent aux droits de timbre fédéraux et à l'impôt anticipé.

541

c. Maintenir sans limite de temps l'impôt sur le chiffre d'affaires et un impôt fédéral direct. Limiter les taux maximums d'impôt jusqu'à l'adoption des lois d'exécution.

d. Réserver la possibilité de percevoir un impôt sur les bénéfices de guerre aux époques de danger.

e. Adopter le principe que la Confédération doit amortir ses dettes, mais en tenant compte de la situation de l'économie.

/. Instituer pour la Confédération l'obligation d'encourager la péréquation financière.

g. Interdire les arrangements fiscaux (comme en 1950 et en 1953).

h. Réduire à 20 pour cent la part des cantons aux impôts fédéraux directs.

Le Conseil fédéral autorisa le département des finances et des douanes à discuter ce projet avec les personnalités dirigeantes des partis politiques, les directeurs cantonaux des finances et les principales associations économiques. Il se révéla cependant impossible de restreindre la discussion à un cercle aussi étroit; la presse fut donc également mise au courant. De nouveau, l'accueil fut très mélangé et, dans l'ensemble, plutôt négatif.

Lorsqu'on avait l'occasion d'expliquer le projet de plus près, on rencontrait, il est vrai, un jugement plus compréhensif et notablement moins défavorable.

.

De divers côtés, nous vîmes en particulier repousser l'idée de donner à l'impôt fédéral direct un caractère permanent reconnu par la constitution.

On demanda qu'un terme fût fixé pour la perception de cet impôt, s'il n'était pas possible d'y renoncer d'emblée entièrement. Puis il fut exigé que des garanties fussent inscrites dans la constitution concernant les taux maximums de cet impôt. Les cantons, eux, s'opposèrent surtout à la réduction de leur part à l'impôt pour la défense nationale.

Dans le domaine de l'impôt sur le chiffre d'affaires, on critiqua la réduction envisagée des taux; d'autre part, les partisans et les adversaires d'un élargissement de la liste des marchandises exemptes d'impôt s'affrontèrent. On déclara aussi qu'il était nécessaire d'insérer cette liste d'exemptions dans la constitution. Ce fut avant tout l'unification projetée des taux de l'impôt sur le chiffre d'affaires qui provoqua des discussions, parce que cette mesure chargerait l'industrie du bâtiment plu« lourdement que jusqu'ici.

L'insertion de dispositions concernant les impôts à prévoir en vue du temps
de crise fut également repoussée, pour la raison qu'en cas de guerre les inévitables pouvoirs extraordinaires offriraient un fondement juridique suffisant pour de telles mesures exceptionnelles.

Les opinions exprimées à propos de l'avant-projet du 3 décembre incitèrent le département des finances et des douanes à resserrer quelque peu Feuille fédérale. 109e année. Vol. I.

38

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ses buts encore une fois; le Conseil fédéral, de son côté, considéra également comme indispensable d'aller plus loin dans cette direction. C'est dans ces conditions que naquit le présent projet, qui s'écarte beaucoup des intentions premières du département des finances et des douanes. On constata qu'il était nécessaire de réduire à l'indispensable les modifications des dispositions constitutionnelles sur le nouveau régime des finances fédérales.

Le but à atteindre est d'établir un projet qui ait des chances d'être accepté.

Les plans plus ambitieux doivent, bon gré mal gré, être sacrifiés à ce but.

DEUXIÈME PARTIE

Le projet du Conseil fédéral A. TÂCHES DE LA CONFÉDÉRATION ET BESOINS FINANCIERS Toutes les fois que le droit impose une tâche à la Confédération, celle-ci doit s'en acquitter d'une manière aussi judicieuse et rationnelle que possible. Il faut compter la dépense requise parmi les besoins financiers.

Si l'on veut obtenir des indices nécessaires quant aux ressources financières qui devront être assurées à la Confédération, il est indispensable de se faire une idée de l'ensemble des besoins financiers, c'est-à-dire des dépenses probables. Tant de questions restent cependant ouvertes que des estimations n'ont qu'une valeur relative. Nous nous contenterons d'évaluer les dépenses pour les 5 premières années, à dater de l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions, soit de 1959 à 1963. Comme les variations de ces dépenses d'une année à l'autre sont fort incertaines, nous nous bornerons à donner des chiffres moyens pour ces cinq années.

La Confédération ne cesse de se trouver devant des tâches nouvelles.

Elle ne doit toutefois se charger que des tâches qu'elle peut accomplir plus aisément que les cantons. Il est ainsi possible que des tâches doivent être rendues aux cantons lorsque certaines circonstances ont changé.

Ce qu'il faut surtout constater, c'est que la Confédération se voit sans cesse confier des tâches nouvelles. Il en ira de même à l'avenir. Un plan qu'il faudra appliquer pendant une certaine durée doit déjà tenir compte des besoins financiers nécessaires aux tâches que la Confédération se verra très probablement imposer, quand bien même il n'existe encore aucune prescription à ce sujet. Nous y reviendrons dans les prochains chapitres, lorsqu'il s'agira en particulier de la politique sociale et de la politique des transports et communications. Il faut considérer comme besoins financiers présumables de la Confédération l'ensemble des dépenses calculées sur la base des tâches présentes et à venir, y compris l'obligation de procéder au désendettement en temps favorable.

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I. Lee dépenses générales 1, Lo service des intérêts Au cours de la seconde guerre mondiale, les dépenses annuelles de la Confédération pour le service des intérêts ont passé de 100 environ à plus de 250 millions de francs. Depuis 1950, elles se sont maintenues à peu près à ce niveau.

Cette augmentation des dépenses pour le service des intérêts de la dette et le rapport entre cette dépense et l'ensemble des dépenses générales de la Confédération apparaît dans le tableau suivant : Dépenses générales et service des intérêts Dépenses de la Confédération en millions de francs

Exercices

1938 1939 1940 1945 1950 1952 1954 1955

604 964 1807 2323

. . .

. . .

1956 Budget 1957 Budget

. . .

. . .

1637 2162 1959 1949 1969 2007

Intérêts bruts

Intérêts neta H

en millioAs en pourfent en millions en pour-cent de franca des dépenses de francs des dépenses

88 95 110 252 253 259 262 249 254 247

14,6 .9,9 6,1 10,9 15,5 12,0 13,4 12,8 12,9 12,3

64 70 85 209 214 212 189 174 161 134

10,6 7,3 4,7 9,0 13,1 M 9,6 8,9 8,2 6,7

(') Dépenses brutes au titre d'intérêts, déduction faite du produit des fonds placés.

Les dépenses brutes au titre des intérêts atteignent, dans le budget de 1957, 247 millions de francs ou 12,3 pour cent de l'ensemble des dépenses.

Les dépenses nettes s'élèvent encore à 134 millions de francs ou 6)7 pour cent de l'ensemble des dépenses.

L'évaluation de la charge future des intérêts est problématique. Si, dans l'après-guerre, les dépenses nettes sont descendues de 50 millions de francs environ, cela est dû au remboursement de la dette d'un volume de 622 millions de francs, à l'augmentation des placements à intérêts et à la conversion d'emprunts à des conditions plus favorables. On ne peut prédire si le marché des capitaux évoluera d'une manière permettant des remboursements ou des conversions favorables. L'influence des facteurs non économiques sur les dépenses et recettes, ainsi que sur les résultats annuels, est encore plus difficile à estimer, Nos évaluations pour les années 1959 à 1963 prévoient, pour autant que la situation demeure favorable, des excédents annuels de 200 à 300

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millions de francs. Si l'on admet que les excédents de recettes serviront au remboursement de dettes et que les taux de l'intérêt ne changeront pas sensiblement, il faudra compter pour les intérêts, en moyenne annuelle, une dépense brute de 230 millions de francs en chiffre rond, alors que la dépense nette atteindra encore 125 millions de francs environ. Si l'on devait continuer à observer une certaine réserve dans le remboursement des dettes, le dégrèvement comparé à ce qu'il est aujourd'hui serait moins considérable, les disponibilités ne pouvant être placées qu'à un taux plus faible que les charges d'intérêts elles-i^ 3mes pour les prêts, rescriptions et dettes en compte.

2. Autorités et personnel Les dépenses pour les autorités-- indemnités aux membres de l'Assemblée fédérale, traitements des conseillers fédéraux, du chancelier de la Confédération, des juges fédéraux et des membres du Tribunal fédéral des assurances -- atteignirent en 1955 4,2 millions, somme, supérieure d'environ y3 à celle de 1946.

L'administration centrale occupait 26131 agents en 1946. C'était l'effectif le plus élevé après la guerre. Il diminua graduellement pour atteindre 20 888 unités en 1950. A la fin de 1955, l'administration centrale comptait 20 908 agents, dont 10 571 -- soit un peu plus de la moitié -- pour le département militaire, les autres étant occupés dans les départements civils, à la chancellerie fédérale et dans les tribunaux.

La diminution de l'effectif du département militaire, relativement forte dans les premières années d'après-guerre, ne se maintint pas très longtemps. Les réductions de personnel effectuées depuis 1950 dans les autres départements ont été plus que compensées par les augmentations au département militaire. De 1946 à 1954, l'effectif des départements civils a été en baisse constante.

L'administration occupait en 1955 5223 agents de moins qu'en 1946, ce qui représente une diminution de 20 pour cent.

A cause des allocations de renchérissement, une certaine confusion régnait après la guerre dans le domaine des traitements. La loi du 24 juin 1949 (*) modifiant celle du 30 juin 1927 sur le statut des fonctionnaires remédia à cette situation peu satisfaisante. L'augmentation du coût de la vie dès 1951 nécessita cependant l'octroi d'allocations de renchérissement supplémentaires. Celles-ci,
qui se montaient au début à 4 pour cent du traitement, atteignirent déjà en 1956 7 pour cent; pour 1957, l'Assemblée fédérale par arrêté du 18 décembre 1956 (2) les fixa à 9 pour cent.

(i) KO 1949, 1823.

(*) RO 1956, 1756.

545 En outre, un arrêté fédéral du 21 mars 1956 f 1 ) soumis au referendum augmenta, à partir du 1er janvier 1956, de 5 pour cent les traitements réels; par la même occasion, on releva les salaires de début et réduisit le nombre des échelons dans les diverses classes de traitement.

La révision de la loi et l'octroi d'allocations de renchérissement compensèrent l'élévation des prix et assurèrent au personnel un traitement réel légèrement augmenté. Depuis 1948, le gain réel des classes les plus inférieures a constamment haussé; en 1956, cette augmentation dépassait 10 pour cent, alors que, pour les classes moyennes de traitement, elle atteignait en chiffre rond 7 pour cent. Le gain réel des classes supérieures fut légèrement augmenté en 1950 seulement, mais déjà en 1951 le bénéfice de cette mesure était à nouveau compensé pour quelques classes par l'augmentation du coût de la vie. Ce n'est qu'après 1956 que les fonctionnaires de toutes les classes supérieures reçurent une augmentation réelle de traitement, qui cependant ne dépassa pas 5 pour cent.

Saufen 1949, les traitements du personnel ont constamment augmenté depuis la fin de la guerre. Ils représentaient en 1948 une dépense totale de 206 millions et en 1955 de 248 millions, bien que l'effectif ait été considérablement réduit. Cette augmentation d'un cinquième, malgré la diminution d'un cinquième également de l'effectif, est due principalement au renchérissement de la vie et, dans une proportion moindre, aux dépenses supplémentaires qu'impliquèrent la loi revisée de 1949 et la nouvelle classification des fonctions de 1953. A ces traitements s'ajoute la contribution d'employeur à l'assurance-vieillesse et survivants. Les dépenses totales pour le personnel ont passé de 211 millions en 1948 à 254 raillions en 1955.

Les traitements des agents du département militaire sont compris dans ces chiffres; ils atteignaient en 1955 111 millions, alors que ceux du personnel des départements civils étaient de 143 millions.

C'est en premier lieu l'effectif qui détermine les dépenses du personnel, et cet effectif est influencé, en particulier en ce qui concerne le département militaire, par la situation internationale. L'évolution économique à l'intérieur du pays et le coût de la vie sont également d'importance primordiale pour le développement des dépenses
du personnel.

Les conditions restant à peu près inchangées, les dépenses pour les autorités et le personnel ont été évaluées, dans le budget de 1957, à 295 millions, dont 127 millions pour le département militaire et 168 pour les autorités et le personnel des autres départements.

On prévoit généralement que les frais pour le personnel civil tendront plutôt à augmenter. Nous avons calculé qu'ils atteindront pour la période de 1959 à 1963 en moyenne 180 millions par année. Cette somme représente une augmentation de 2 à 3 pour cent par année, qui correspond à l'augmentation supputée du revenu national.

(»fììO 1056, 829.

546

3. Dépenses générales de caractère civil Les dépenses générales de caractère civil comprennent les dépenses de l'administration, celles que nécessitent l'achat et l'entretien des immeubles, les dépenses et déficits d'exploitation, les loyers et fermages, les dépenses résultant d'obligations générales et de prestations contractuelles fixes de tous les départements hormis le département militaire et les oeuvres d'entraide internationale. Durant les années 1947 et 1948, les dépenses générales de caractère civil, sans compter les dépenses extraordinaires pour le service d'affrètement et les paiements exécutés dans le cadre de l'accord de Washington, se sont élevées à 135 et 88 millions de francs. Elles ont augmenté à nouveau en 1951 jusqu'à 142 millions de francs pour se stabiliser ensuite entre 120 et 130 millions.

Le développement des divers groupes est le suivant: Les dépenses pour l'achat d'immeubles et la construction de bâtiments sont pratiquement les mêmes que depuis 1951. Elles s'élèvent de 23 à 25 millions par an. Une retenue voulue de l'activité de la Confédération dans la construction en est la cause. Cette retenue s'imposait pour ne pas favoriser encore les tendances à la hausse des prix. C'est pour ces raisons aussi que les dépenses pour l'entretien des bâtiments ont été à peu près les mêmes depuis 1951; elles n'ont passé que de 13 à 15 millions.

En 1946, 1947 et 1950, la Confédération a pris à sa charge 84 millions de francs du déficit d'exploitation des chemins de fer fédéraux. Pendant la même période, il a fallu couvrir également les déficits de la caisse fédérale d'assurance pour un montant de 16 millions.

La Confédération a versé chaque année de 1946 à 1955 entre 3 et 13 millions à des institutions et oeuvres de secours internationales. Il s'agit avant tout d'aide aux réfugiés et de cotisations à des institutions internationales.

Les dépenses générales de caractère civil ont évolué comme il suit durant les dernières années (en millions de francs) :

Frais de bureau et de matériel . . . .

Constructions et mobilier . . . . . .

...

Engagements divers Total

1954 Compte d'Etat

1955 Compte d'Etat

65 41 26 132

56 45 26 127

1966

1957

Budget

Budget

65 60 22

68 61 27

147

156

Tant que les prix montent et qu'il ne faut pas s'attendre à la réduction des effectifs du personnel, il paraît indiqué de calculer de manière suffisamment large les estimations. D'autre part le résultat de l'exercice de 1956 laisse entrevoir cette fois encore que les dépenses générales se maintiendront à quelque 10 millions au-dessous du montant qui figure dans le budget. C'est

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pourquoi nous inscrivons comme estimations pour les années à compter de 1959 une moyenne de 145 millions de francs pour les dépenses générales de caractère civil.

II. La politique sociale 1. Généralités On ne peut concevoir un nouveau régime financier de la Confédération qui ne prévoie pas de sommes suffisantes pour les oeuvres sociales et leur développement raisonnable. La détermination des dépenses découlant des dispositions législatives en vigueur ne soulève aucune difficulté. Mais dès qu'on envisage d'améliorer ou de compléter ces dispositions, on se trouve en face d'inconnues dont l'importance et l'évolution ne peut faire l'objet que d'hypothèses.

Jusqu'à la fin de la deuxième gueire mondiale, les dépenses de la Confédération à des fins sociales se eont limitées, pour l'essentiel, aux contributions à l'assurance-maladie et accidents. D'autres oeuvres sociales étaient soutenues par des subventions. Depuis lors, les oeuvres privées et publiques de notre pays se sont considérablement développées. Des institutions dont les prestations sont nettement définies se sont substituées aux oeuvres qui accordaient leur aide selon des principes dont elles étaient seules juges. Ces nouvelles institutions s'occupent des milieux les plus larges de la population et entreprennent des tâches qui exigent une participation active des pouvoirs publics. Dans quelques cas, cette collaboration s'est limitée à l'exécution du travail social proprement dit, le financement étant laissé à l'économie privée ; la plupart du temps cependant, les pouvoirs publics versent également des fonds. L'activité sociale s'est développée à l'étranger d'une manière semblable. Presque tous les Etats européens ont créé, ces dernières années, des oeuvres sociales nationales qui accordent à toute la population une protection contre les conséquences de la vieillesse, de l'invalidité, de la maladie, etc.

2. Assurance-vieillesse et survivants Notre oeuvre sociale la plus importante du point de vue financier est l'assurance-vieillesse et survivants. Elle a débuté en 1948 et englobe toute la population. Les contributions des pouvoirs publics sont fixées par l'article 103 de la loi du 20 décembre 1946 (1) sur l'assurance-vieillesse et survivants. Les pouvoirs publics devront verser pendant les vingt premières années d'existence de l'assurance,
soit de 1948 à 1967,160 millions annuellement, pendant les dix années suivantes, soit de 1908 à 1977, 280 millions et, à partir de 1978, 350 millions annuellement. La loi ne fixe que pour les vingt premières années la fraction que paieront la Confédération et les cantons: la Confédération a pris à sa charge pour cette période deux tiers (i) RS 8, «l.

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des frais, soit 107 millions par année, tandis que les cantons en ont pris un tiers. Compte tenu des versements supplémentaires aux cantons financièrement faibles et des subventions pour les cas spéciaux, la charge de la Confédération est annuellement d'environ 120 millions. Cette somme devra également être versée à l'avenir.

Les articles 104, 111 et 112 de la loi règlent la façon générale dont la Confédération réunira les fonds nécessaires. La part du produit de l'imposition du tabac et des eaux-de-vie qui lui revient est versée à un fonds spécial pour l'assurance-vieillesse et survivants. Pendant les 20 premières années, les 107 millions de francs que doit verser la Confédération sont prélevés sur ce fonds.

Le montant des subventions fédérales à l'assurance-vieillesse et survivants a aussi une influence sur le développement du fonds de compensation et exerce par conséquent un certain effet sur la politique en matière de placements. La Confédération a de ce fait un intérêt à la façon dont se développera le fonds de compensation. Jusqu'en 1956, celui-ci a augmenté annuellement de 400 à 500 millions de francs. Il atteignait, à la fin de l'an passé, 4,2 milliards. La quatrième revision de la loi, celle du 21 décembre 1956 (*), a refréné sensiblement l'augmentation future, et il faut s'attendre que les montants placés annuellement diminueront rapidement et atteindront bientôt moins de 300 et même moins de 200 millions. A partir de 1968 déjà, le placement annuel des sommes ne jouera plus de rôle important. Le fonds se montera vraisemblablement à 6,5 milliards. Par la suite, il descendra jusqu'à une somme inférieure à 6 milliards.

3. Assurance-invalidité Les travaux préparatoires en vue de l'assurance-invalidité ne sont pas encore assez avancés pour qu'on puisse se faire une idée définitive des répercussions de cette assurance sur les finances de la Confédération et des cantons. Nous évaluons à 140 millions de francs annuellement les frais de l'assurance-invalidité. Par analogie à l'assurance-vieillesse et survivants, le financement devrait, semble-t-il, se faire moitié par les assurés et moitié par les pouvoirs publics. SÌ la Confédération supportait la moitié des dépenses publiques (l'autre moitié étant à la charge des cantons), sa contribution se monterait à environ 35 millions de francs par
année. Nous insérons cette somme dans le plan des dépenses annuelles.

4. Allocations aux militaires pour perte de gain Les allocations aux militaires pour perte de gain sont réglées par la loi fédérale du 25 septembre 1952 (*). D'après les articles 26 et 28 de cette (') PF 19S6, II, 1025.

(*) RO 1962, 1046.

549

loi, la provision «allocations aux militaires pour perte de gain», constituée pendant la seconde guerre mondiale au moyen des contributions des employés et des employeurs, couvrira les prestations accordées en vertu de là loi jusqu'à ce qu'elle soit réduite à 100 millions. Comme cette provision s'élevait encore à 250 millions à la fin de 1956, ni l'économie privée, ni la Confédération ne doivent présentement l'alimenter. D'après nos évaluations, c'est à la fin de 1959 qu'elle sera réduite à 100 millions. Conformément à l'article 28 de la loi, les cotisations seront ensuite prélevées sous la forme de suppléments en pour-cent des cotisations de l'assurance-vieillesse et survivants. H en résulte que cette réglementation des allocations aux militaires pour perte de gain n'influe pas sur notre plan des dépenses.

5. Assurance-maladie et accidents Les prestations de la Confédération à l'assurance-maladie et tuberculose reposent actuellement sur un système de subventions calculées par assuré et par année. L'arrêté fédéral du 25 juin 1954 (l) a complété pour les années 1953 à 1956, par des prestations supplémentaires aux caissesmaladie reconnues, les versements de la Confédération prévus par la loi du 13 juin 1911 ( 2 ) sur l'assurance-maladie et accidents.

Le montant des subventions fédérales n'a pas été fixé uniquement d'après des taux par tête, mais dépend dans une grande mesure de l'effectif des assurés. Celui-ci a passé de 360 000 en 1914 à environ 3 500 000. Etant donné que le nombre des assurés continuera à s'accroître, le montant des prestations fédérales augmentera également. Pour les premiers temps du nouveau régime financier, il faut donc prévoir environ 40 millions de dépenses à ce titre, mais, plus tard, ce chiffre atteindra 45 millions.

Les efforts faits en vue de reviser l'assurance-maladie et d'instaurer une assurance-maternité ont été l'objet d'un rapport et d'un avant-projet de loi fédérale portant la date du 3 février 1954. Cet avant-projet prévoit en particulier une augmentation des prestations de l'assurance-maladie et la prolongation de leur durée. En outre, les versements faits jusqu'ici aux femmes en couches devront être transformés en une véritable assurancematernité. Pour couvrir les frais supplémentaires qui en résulteront, les primes seront augmentées, de même que les subventions
de la Confédération.

La commission d'experts a évalué à 36 millions la charge supplémentaire qui incombera aux pouvoirs publics. Sur cette somme 25 millions serviront au développement de l'assurance-maladie et 11 millions à l'assurancematernité. Nous avons toutefois fait des réserves expresses quant au financement de cette assurance lorsque nous avons décidé, le 27 avril 1954, que le rapport serait envoyé aux cantons et aux associations économiques pour avis. Nous insérons provisoirement dans le plan une dépense annuelle de 35 millions en moyenne.

(i) RO 1954, 1091.

(») RS 8, 283.

550

Les prestations légales de la Confédération à l'assurance-accidents comprennent, outre un versement unique à la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents à Lucerne (capital d'exploitation de 5 millions de francs et paiement des frais de première installation) trois catégories de prestations régulières: 1. Participation aux frais d'administration de la caisse nationale; conformément à l'article 51, 1er alinéa, de la loi sur l'assurance-maladie et accidents, cette participation se monte à un quart des frais totaux d'administration ; 2. Contributions au paiement des primes de l'assurance des accidents non professionnels; conformément à l'article 108, 2e alinéa, de la loi sur l'assurance-maladie et accidents, ces contributions atteignent un quart du total des primes; 3. Contributions aux allocations de renchérissement; conformément à l'article premier, 2e alinéa, de l'arrêté fédéral du 27 mars 1953 sur les allocations de renchérissement aux rentiers de la caisse nationale (*), cette dernière paie la moitié de ces allocations, l'autre moitié étant versée par la Confédération.

Les subventions versées actuellement à la caisse nationale s'écartent cependant considérablement des sommes prévues par la loi. Depuis 1934, la participation aux frais d'administration a été suspendue, conformément à l'arrêté fédéral du 13 octobre 1933 sur les mesures extraordinaires et temporaires destinées à rétablir l'équilibre des finances fédérales et par les régimes financiers subséquents (î). La participation aux primes de l'assurance contre les accidents non professionnels a également été abaissée en 1933 et n'a plus été versée de 1938 à 1945. En vertu de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1945 (3), elle se monte depuis 1946 à 1 million de francs.

La Confédération économise ainsi 20 millions de francs en chiffre rond.

Elle a dépensé ces dernières années pour les allocations de renchérissement aux rentiers de la caisse nationale 2 millions de francs par an. Cette somme atteindra 3 millions dès le 1er janvier 1957 du fait de la nouvelle réglementation des allocations. Si les dispositions prises à l'égard de la caisse nationale en vertu de l'arrêté sur le régime actuel des finances fédérales ne sont pas modifiées, la charge annuelle de la Confédération sera portée à 4 millions de francs environ. Nous avons cependant
l'intention d'examiner à fond les relations entre la Confédération et la caisse nationale.

Nous ne pouvons dire quel sera le résultat de cet examen, mais si ces relations ne sont pas modifiées par une loi jusqu'à l'entrée en vigueur du nouveau régime financier, la réglementation actuelle continuera en vertu des^dispositions transitoires du projet soumis avec le présent message.

H BO 1958, 561.

( a ) BS 6, 39.

(") ES 6, 50.

551 6. Allocations familiales Les allocations familiales aus travailleurs agricoles et aux paysans de la montagne sont l'objet de la loi fédérale du 20 juin 1952 (*). Aux termes de cette loi, la Confédération et les cantons supportent les frais des allocations, en tant qu'ils ne peuvent être couverts par les prestations de l'employeur. En 1955, 5,4 millions de francs ont été payés au titre des allocations familiales et des allocations pour enfanta versées aux travailleurs agricoles. Déduction faite des contributions des employeurs (2,3 millions), il restait 1,55 million à la charge de la Confédération et autant à la charge des cantons. Les frais des allocations (5,8 millions) versées en 1955 aux paysans de la montagne ont été exclusivement supportés par les pouvoirs publics. La Confédération a versé 2,9 millions. Ses dépenses totales ont donc été en chiffre rond de 5 millions de francs. H a été proposé dans les chambres de commencer les travaux préparatoires en vue d'une loi sur la constitution de caisses de compensation pour les familles. Les conséquences financières d'une telle loi ne peuvent pas du tout être prévues actuellement.

Toutefois, nous devons admettre que la dépense de la Confédération au titre des allocations familiales augmentera.

Dans le compte d'Etat, les dépenses de la Confédération au titre des allocations familiales sont incluses dans les subventions à l'agriculture. Far conséquent, nous en tenons compte sous cette rubrique dans l'évaluation des besoins futurs.

7. Récapitulation Vu ce qui précède, nous considérons qu'il est nécessaire de prévoir dans les évaluations des besoins financiers pour 1959 et les années suivantes les prestations indiquées ci-dessous au titre des oeuvres sociales: 1955

Assurance-vieillesse et survivants . . .

Assurance-invalidité Assurance-maladie et accidents . . . .

Total

En miUlons de francs 1959 et années suivantes

121 -- 38 _159

120 35 75--80 230--235

III. Routes et communications 1. Construction de routes La motorisation a pria dans notre pays comme ailleurs un développement inattendu dans les années d'après-guerre. En 1938, il y avait en Suisse au total 124 195 véhicules à moteur. Ce chiffre diminua quelque peu durant la guerre, mais en 1947 il avait passé à 153 359, pour atteindre, en 1955, (!) RO 1952, 843.

552

544 331. Si la situation économique continue à être favorable, nous sommes encore loin du maximum. En outre, les touristes étrangers venant dans notre pays en véhicules à moteur sont plus nombreux chaque année. Il en résulte que les routes, et en particulier celles de grande communication, ne suffisent plus à assurer le trafic. De tous les côtés, on demande que notre réseau de routes principales soit rapidement aménagé. La discussion publique porte surtout sur les points suivants: 1. L'initiative constitutionnelle de la fédération routière suisse du 6 février 1956 f1).

2. Les travaux de la commission créée par le département fédéral de l'intérieur en vue de la planification du réseau des routes principales.

3. Les «Considérations de principe concernant le régime financier de la Confédération» contenues dans un exposé du département des finances et des douanes du 18 juillet 1956.

Pour que nous puissions aménager notre réseau routier de telle manière qu'il satisfasse au trafic sans cesse croissant, il est nécessaire d'accorder à la Confédération un droit de regard plus étendu sur l'aménagement de nos routes principales. C'est dans ce sens que s'expriment aussi bien les propositions de la fédération routière suisse que celles du département des finances et des douanes et de la commission de planification.

Les trois solutions indiquées se distinguent moins par la mesure dans laquelle elles envisagent un transfert d'attributions cantonales à la Confédération que par la manière dont elles conçoivent le financement des grands travaux de routes.

H n'y a pas lieu de régler dans le présent projet la question des attributions à transférer à la Confédération, ni celle de la façon la plus appropriée de financer la construction de routes. Le peuple et les cantons n'auront à voter à ce sujet que lorsque les études seront terminées, que les différents projets pourront être comparés et que les chambres se seront prononcées sur les propositions du Conseil fédéral. En revanche, il est indispensable d'inclure déjà aujourd'hui dans le plan des dépenses certaines sommes qui seront nécessaires à ces fins. Lorsque le régime provisoire de 1955 à 1958 aura pris fin, la Confédération ne pourrait certainement pas revenir au droit en vigueur de 1928 à 1949, c'est-à-dire ne laisser aux cantons que la moitié des droits
supplémentaires sur les carburants pour moteurs. Les cantons ne toucheraient plus dès lors que 5 francs par 100 kg de benzine importée au lieu des 13 fr. 25 qu'ils ont reçus dès 1950. Autrement dit, les fonds à disposition pour subventionner la construction de routes passeraient de la moitié à un cinquième environ des recettes douanières.

Si c'était le cas, l'amélioration de notre réseau de routes principales serait compromise, peut-être même rendue impossible.

(i) FF 1956, I, 697.

553

Ni les travaux de la commission de planification, ni l'examen des idées du département des finances et des douanes ne sont assez avancés pour qu'on puisse mettre en vigueur avant 1960 non seulement le futur article constitutionnel qui est indispensable, mais encore la législation d'exécution. Pour qu'il n'y ait pas de solution de continuité dans la construction des routes, il faudrait que le régime transitoire soit par conséquent prolongé au moins jusqu'à fin 1959. Cela signifie que les cantons continueront de recevoir la moitié du produit des droits sur les carburants, produit évalué à 210 millions pour 1959. Pour les années 1960 à 1963, la nouvelle réglementation sera peut-être en vigueur. D'après les projets du département des finances et des douanes, la Confédération devrait verser annuellement quelque 115 millions pour les routes. En revanche, si l'on maintient le mode de financement actuel et que les cantons continuent à recevoir 50 pour cent du produit des droits d'entrée sur les carburants, les sommes à affecter aux besoins financiers dépendront uniquement de l'importance des recettes douanières. Comme nous l'avons déjà dit, nous évaluons celles-ci à 210 millions pour 1959. En admettant une augmentation annuelle de 10 millions, on arriverait à 250 millions en 1963. Cela représente une moyenne annuelle de 230 millions. Sur ces 230 millions, 115 reviendraient aux cantons comme contribution de la Confédération aux frais que leur occasionnent les routes, si l'on continue à diviser en deux parts égales le produit des droits d'entrée sur les carburants.

2. Chemins de fer D'après l'article 26 de la constitution, la législation sur la construction et l'exploitation des chemins de fer est du domaine de la Confédération.

Il n'est donc pas nécessaire d'élaborer de nouvelles dispositions constitutionnelles pour résoudre, en connexion avec le présent projet, les questions de chemin de fer encore pendantes. Ici aussi il ne s'agît que d'évaluer les besoins financiers résultant des mesures qui feront l'objet de la future législation d'exécution et de chiffrer approximativement les sommes dont la Confédération aura besoin.

Différents gouvernements cantonaux -- comme d'ailleurs diverses compagnies -- demandent que les chemins de fer privés soient repris par la Confédération. Ils espèrent que5 si leurs
cantons sont mis sur un pied d'égalité avec ceux qui sont desservis par les chemins de fer fédéraux, leurs charges financières diminueront et que leur économie s'améliorera considérablement lorsqu'elle ne subira plus la contrainte que représentent les tarife des chemins de fer privés, beaucoup plus élevés que ceux des chemins de fer fédéraux.

Des voix se sont cependant aussi élevées contre l'idée d'un rachat par la Confédération. On allègue que les chemins de fer pourraient plus facile-

554

ment soutenir la concurrence avec les transporteurs routiers si la Confédération supportait les charges qui n'ont pas de rapport direct avec les chemins de fer et celles qui sont imposées dans l'intérêt général, H est permis de penser qu'une adaptation des tarifs des chemins de fer privés à ceux des chemins de fer fédéraux serait réclamée en faveur des usagers en sua de ces allégements qui ne profiteraient qu'aux chemins de fer.

La commission d'études créée par le département des finances et des douanes pour examiner cette question dans le cadre du nouveau régime financier a constaté (*) que les principes émis en 1952 par la commission fédérale d'experts chargée d'étudier les questions de rachat de chemins de fer ont aujourd'hui encore toute leur valeur. Elle recommande que de nouveaux chemins de fer soient repris par la Confédération. Il s'agirait tout d'abord du rachat de 15 compagnies. D'après les estimations, le coût de l'opération serait annuellement de 45 millions de francs. Cette somme comprendrait aussi une aide en vue de l'égalisation partielle des tarifs des autres chemins de fer privés avec ceux des chemins de fer fédéraux, ainsi que les frais d'autres mesures d'aide à prendre en vertu de la nouvelle loi sur les chemins de fer, dont le projet est en discussion devant les chambres ( 2 ), Les prix de rachat devant être fixés d'entente entre la Confédération, les cantons et les chemins de fer privés, cette somme ne peut pas être considérée comme définitive. Il y aura lieu de prévoir éventuellement encore un certain montant pour les indemnités à payer pour des charges qui n'ont pas un rapport direct avec les chemins de fer et pour des obligations imposées par l'intérêt général.

La commission d'études n'avait pas pour tâche principale de donner son avis sur la question du rachat de nouveaux chemins de fer privés. Tout en éclaircissant les problèmes en rapport avec le nouveau régime financier et ses répercussions sur les finances cantonales, elle devait déterminer si le rachat complété, le cas échéant, par une aide supplémentaire aux chemins de fer privés favoriserait la péréquation financière entre les cantons. La commission est arrivée à la conclusion que le rachat de 15 nouveaux chemins de fer ne dégrèverait directement les cantons intéressés que d'une manière modeste. Les avantages
indirects seraient en revanche plus grands, bien qu'on ne puisse en avoir une idée d'ensemble. La commission est d'avis que les effets généraux du rachat envisagé ne favoriseraient pas considérablement la péréquation financière entre les cantons.

Que la Confédération rachète certaines lignes et établisse un programme d'aide complémentaire ou qu'elle verse une indemnité pour les charges extraferroviaires et élabore également un programme d'aide com(!) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 6, p. 29, (') FF 1956, I, 205.

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plémentaire, l'aide aux chemins de fer et à leurs usagers est avant tout une question pratique, qui dépend aussi des possibilités politiques. Les milieux consultés ont, en général, jugé qu'il était indiqué d'inclure dès 1960 un montant de 45 millions dans l'estimation des besoins futurs. Nous avons par conséquent considéré qu'il y avait lieu de procéder de la sorte.

IV. Les subventions fédérales La plupart des subventions fédérales, même si l'on fait abstraction de celles qui concernent les routes et les communications, ainsi que la politique sociale, ont tendance à augmenter. Elles atteignent en chiffre rond 300 millions, soit environ un sixième des dépenses totales.

1. Agriculture L'ancienne loi de 1893 sur l'agriculture ( x ) et la loi de 1917 sur les mesures à prendre pour combattre les épizooties (2) se limitaient à accorder des subventions aux cantons pour améliorer la production et la productivité de l'agriculture. La nécessité d'assurer les prix et l'écoulement de certains produits se fit sentir entre les deux guerres. Les mesures à prendre à cet effet constituaient la pièce maîtresse de la loi de 1951 sur l'agriculture (s). Après la guerre, un troisième groupe de subventions -- celui des subventions pour la politique sociale en faveur des agriculteurs -- se développa fortement.

Les multiples subventions servant à encourager la production et la productivité de l'agriculture concernent surtout les améliorations foncières et autres (regroupements parcellaires, chemins de desserte, drainages, irrigations, défrichages, installations de vignes, nouvelles colonies, granges isolées, logements de domestiques, assainissements de fermes et d'étables; en outre, dans les régions de montagne: téléphériques, adduction d'eau potable et d'électricité, installations pour les engrais, conduites à purin, installations d'enclos, conduites pour le lait, chalets alpestres et de pâturage, fromageries villageoises). Ces subventions atteignent actuellement environ 13 millions, y compris. celles (2 millions) pour l'amélioration des plaines de la Linth et du Ehm. Nous comptons cependant qu'il y aura une très forte augmentation et que les subventions atteindront plus de 20 millions par année, étant donné que les normes des subventions, notamment pour les régions de montagne, ont été augmentées et que nous avons encore de très lourdes tâches à accomplir dans le domaine des regroupements parcellaires.

(i) ES 9, 3.

(») RS 9, 257.

(>) RO 1968, 1095.

556

D'autres subventions sont versées pour la production et le placement des semences, l'assurance contre la grêle, la lutte contre les parasites, le renouvellement périodique des vignobles et la transformation des vignobles de raisin blanc en raisin rouge. Les subventions de 3 millions versées pour les régions de montagnes au titre de l'encouragement de l'élevage et en vue d'améliorer la productivité laitière seront encore augmentées. Celles qui concernent les épizooties ont atteint le niveau fort élevé de 13 millions. Du fait qu'aujourd'hui déjà 90 pour cent du bétail n'est plus tuberculeux, on peut prévoir que ces subventions diminueront quand bien même des sommes plus importantes devront dorénavant être consacrées à la lutte contre l'avortement épizootique des bovidés.

Les subventions du deuxième groupe, qui tendent à assurer les .prix et l'écoulement des produits agricoles, jouent un rôle primordial. En 1955, la Confédération a affecté en chiffre rond 30 millions à l'utilisation du colza, des pommes de terre, des tomates, des fruits de table, du raisin et du vin, ainsi qu'aux primes pour céréales fourragères et a dépensé 26 millions en faveur du bétail d'élevage et de boucherie, des oeufs et du beurre. Pour le beurre seul, il a été dépensé 22 millions. Exception faite d'une partie des subventions versées pour l'utilisation des pommes de terre, ces dépenses sont couvertes par des recettes à affectation spéciale : suppléments de prix sur les denrées fourragères, suppléments de prix des huiles et des graisses comestibles, taxes compensatoires prélevées par la «Butyra» sur le beurre importé, redevances compensatoires sur les oeufs et taxes d'importation sur les pommes de terre et sur le vin en fûts. En 1955, cela représentait 48 millions de francs.

A l'avenir, les subventions fédérales destinées à assurer le placement et le prix des produits agricoles devront être évaluées à un chiffre plus élevé parce que le prix du lait ne pourra probablement plus être soutenu uniquement par des mesures portant sur le beurre et que des subventions pour le placement du fromage devront être versées.

Le troisième groupe de subventions comprend les allocations familiales et les allocations pour enfants versées aux agriculteurs de la montagne et aux ouvriers agricoles. Cela représente au total une somme de H millions,
qui augmentera encore vraisemblablement. En regard de ces dépenses apparaissent 4 millions de subventions des cantons et 2 millions de versements des employeurs. Le même groupe comprend les subventions fédérales aux caisses cantonales qui accordent des crédits aux agriculteurs dans la détresse. Etant donné que les fonds pour le désendettement des domaines agricoles n'ont été utilisés que dans une faible mesure, on peut supposer que l'aide sous forme de crédits reprendra de l'importance.

557

Subventions à l'agriculture en 1955

D'après le compte d'Etat En millions de francs.

Améliorations foncières. .

Encouragement à la production végétale . .

Amélioration du cheptel Lutte contre les épizooties . . " Primes de culture .

Utilisation des produits végétaux .

Ecoulement du beurre Utilisation d'autres produits animaux Politique sociale en faveur de l'agriculture Autres subventions

13 3 3 13 9 20 22 4 11 1 Total 99 Ces chiffres ne comprennent pas les subventions pour la formation professionnelle des agriculteurs, les subventions de l'administration des blés pour les céréales indigènes et les primes de mouture, les subventions de la régie des alcools pour les fruits et les pommes de terre, ainsi que les prestations prélevées sur le fonds de soutien des prix constitué par les importateurs en vue du placement du bétail de boucherie. Si l'on ne tient pas compte de ces subventions, les dépenses pour l'agriculture atteignent presque 100 millions. Vu l'évolution qui se manifeste et les efforts faits en vue d'étendre la surface cultivée, il est probable que les subventions pour les années 1959 à 1963 atteindront en moyenne 110 millions.

3. L'approvisionnement en blé La réglementation constitutionnelle d'avant-guerre mettait à la charge de la Confédération tous les frais résultant du fait que des blés indigènes étaient vendus aux meuniers au prix du marché alors que l'administration des blés les achetait aux agriculteurs à un prix supérieur.

La dépense annuelle à ce titre atteignait 30 millions en chiffre rond. Durant la guerre, la Confédération fut obligée d'importer elle-même les blés et de vendre aux meuniers le blé étranger comme le blé indigène à un prix permettant de maintenir le prix du pain au niveau fixé par le Conseil fédéral.

Durant les premières années d'après-guerre, le prix de vente des céréales panifiables fut notablement inférieur au prix de revient en Suisse comme à l'étranger. Le prix du pain fut donc considérablement diminué grâce aux subventions de la Confédération. Ultérieurement, les prix à l'importation ont fléchi, pour atteindre le niveau le plus bas en 1950. Le prix du blé indigène payé au moment de la prise en charge a cependant continué d'augmenter, si bien que le déficit de l'administration des blés provient maintenant de nouveau du seul blé indigène. Le moment semble donc venu de supprimer ce qui reste du régime de l'économie de guerre et de revenir à une réglementation normale.

Feuille fédérale. 109« année. Vol. I.

39

558

Les fraie supplémentaires pour le blé indigène sont actuellement deux fois plus élevés qu'avant la guerre, parce que la culture indigène s'est considérablement étendue et que les différences de prix se sont accrues.

Au lieu de 30 millions de francs, il faudra verser annuellement en moyenne 60 millions de 1959 à 1963. Les pertes sur les blés indigènes varient considérablement d'une année à l'autre ; par conséquent, le chiffre de 60 millions doit être considéré comme la moyenne des fonds annuellement nécessaires pour l'ensemble de la période. En 1955, par exemple, la récolte a été très forte et la perte sur le blé indigène a atteint 76 millions. A cette somme s'ajoutent d'autres subventions .mentionnées dans le tableau suivant : Subventions versées en 1955 pour l'approvisionnement du pays en céréales panifiables En millions de francs

Céréales indigènes Prime de mouture Réduction du prix du blé de semence.

Contributions aux frais de transport Subventions pour céréales germées Total

76 9 1 2 3 ^"9ÎT

Les comptes des blés pour 1956 ne sont pas encore clos. Les subventions pour cette année-là seront considérablement inférieures à 60 millions. Ces 60 millions doivent être considérés comme la somme approximative qui serait nécessaire en moyenne pour faire face à nos besoins en pain au cas où l'importation de blé deviendrait difficile.

3. Autres subventions Les subventions destinées à réduire le coût de la vie en général sont apparentées à celles qui sont versées pour l'agriculture et pour la culture des céréales panifiables. Dans ce domaine, des modifications importantes se sont produites. Encore en 1948, le prix de tout le lait mis dans le commerce était diminué grâce à des subventions qui atteignirent 54 millions.

La Confédération versa aussi 137 millions pour abaisser le prix des céréales panifiables étrangères et 12 millions pour diminuer celui des pommes de terre et autres produits. A ces sommes s'ajoutent les 54 millions qui ont servi à diminuer le prix des constructions locatives, ainsi que les versements faits à diverses caisses de compensation. En 1955, il ne subsistait plus que la subvention versée pour le lait consommé dans les villes et les centres plus petits (13 millions). La.caisse de compensation pour le lait et les produits laitiers a continué à verser aux laitiers, sur des recettes spécialement destinées à cet effet, des allocations de telle manière que l'augmentation de leur marge de prix, justifiée par la hausse générale, ne soit pas

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supportée par le consommateur. Dans les circonstances actuelles, la caisse de compensation des prix continuera à procéder ainsi pendant encore un certain temps après l'entrée en vigueur du nouveau régime financier, de sorte que nous devons admettre qu'à l'avenir 13 millions de francs devront être déboursés à ce titre.

Parmi les autres subventions d'utilité publique, le compte d'Etat de 1955 mentionne 2 millions pour l'assainissement de logements dans les régions de montagne, 2 millions pour les installations privées de protection aérienne, 6 millions pour les Suisses de l'étranger, 2 millions pour les oeuvres d'entraide internationales, sans compter 8 millions pour les organisations internationales qui sont compris dans les dépenses générales.

Les subventions de la Confédération aux caisses d'assurance-chômage et aux bureaux de placement ont considérablement diminué, du fait de la prospérité ; elles atteignent cependant encore 5 millions de francs par année versés à l'assurance-chômage en grande partie pour couvrir les pertes de gain dues aux intempéries. Si la situation économique devait changer, ces subventions augmenteraient considérablement.

Dans le domaine de l'hygiène publique, les subventions pour la lutte contre la tuberculose ont passé en 10 ans de é à 8 millions de francs (non compris les subventions pour l'assurance-tuberculose). Le développement des sanatoriums étant, dans l'ensemble, terminé, nous comptons que les subventions à cette fin disparaîtront. D'autre part, il est possible que certaines sommes doivent être versées à l'avenir pour la lutte contre le rhumatisme et contre la paralysie infantile.

En 1955, 7 millions dé francs ont été versés pour l'aménagement et la correction de cours d'eau. A l'avenir, ces subventions augmenteront considérablement et atteindront plus de 20 millions, parce que 30 torrents devront encore être aménagés pour empêcher l'arrivée de matériaux dans le Rhin et pour la seconde correction des eaux du Jura. Si les circonstances l'exigent, de nouvelles subventions devront aussi être allouées en vertu de la loi fédérale du 16 mars 1955 sur la protection des eaux contre la pollution (!).

En 1955, la Confédération a. versé 6 millions de francs pour des installations de protection contre les avalanches, des reboisements et d'autres mesures de même caractère. Ces
dépenses augmenteront également, car les travaux de protection contre les avalanches que les cantons ont l'intention d'entreprendre ces prochaines aimées exigeront environ 60 millions de la part de la Confédération, En ce qui concerne le trafic et les communications, il y a lieu de compter non seulement les subventions que la Confédération verse pour la construction de routes sur le produit des droits d'entrée sur les carburants, mais t1) RO 1958, 1635.

560 -aussi les subventions pour les routes alpestres, celles aux chemins de fer privés et celles pour la navigation aérienne qui atteignaient également 7 millions de francs. Dans ce groupe sont encore compris les 2 millions de subventions pour les camions qui remplissent les exigences imposées par l'armée.

La subvention annuelle de 3 millions à l'office suisse du tourisme, qui assure notre propagande à l'étranger, sera encore complétée par divers subsides, cependant que celle à l'office suisse d'expansion commerciale sera vraisemblablement maintenue à 1,5 million par année.

Les subventions pour l'instruction augmentent continuellement. En 1955, elles atteignaient 21 millions, dont 4 millions pour les écoles primaires et 17 millions pour la formation professionnelle. Les subventions à des fins culturelles se développent encore davantage: elles ont triplé en 10 ans et atteignaient 9 millions en 1955. Parmi ces subventions, citons la contribution annuelle de 4 millions de francs au fonds national suisse pour la recherche scientifique.

Le tableau ci-dessous résume les autres subventions accordées en 1955, y compris celles de moindre importance qui n'ont pas été mentionnées précédemment.

Autres subventions accordées en 1955 En millions de lianes

Subventions destinées à réduire le coût de la vie OEuvres d'utilité publique Assurance-chômage, etc Santé publique Sylviculture et recherches hydrauliques Trafic et communications (sans les subventions pour les routes, prélevées sur les droits d'entrée sur les carburants) . . . .

Commerce, arts et métiers Ecoles Subventions à des fins culturelles et pour la science Total

13 14 5 9 13 9 5 21 9 98

Nous évaluons à 115 millions les dépenses qui devront être faites en moyenne de 1959 à 1963, étant donné que diverses subventions mentionnées devront encore être augmentées et qu'il s'y en ajoutera vraisemblablement de nouvelles, par exemple pour les recherches dans le domaine de l'énergie atomique.

Y. La défense nationale Les sommes versées pour la défense nationale représentent la dépense la plus importante du budget, n est donc compréhensible qu'elles soient discutées d'une manière approfondie lorsque l'on évalue les besoins financiers.

561 1. Le développement des dépenses militaires Le tableau ci-dessous montre comment les dépenses militaires se sont développées depuis 1948: Années

En millions de francs

1948 1949 1950 1951 1952 . . ' . . · 1953 ."....

1954 1950

418 478 505 666 880 775 688 749

1956 budget 1957 budget

673 706

II ressort de ce tableau que les dépenses militaires se sont considérablement accrues après la guerre. Dans son message du 22 janvier 1948, le Conseil fédéral, se fondant sur les données à disposition, les évaluait pour la moyenne des années postérieures à 1950, à 400 millions de francs, dont 95 millions pour le renforcement de la défense nationale. La situation politique mondiale ayant empiré, il fut nécessaire d'augmenter la force défensive de notre armée, si bien qu'en 1949 les dépenses militaires atteignaient déjà 478 millions et qu'il fallut en 1951, en plus des dépenses courantes, établir un programme d'armement d'un montant de 1,5 milliard.

Dans le plan financier pour les années 1955 et suivantes qui accompagnait le projet de 1953, il fut tenu compte de l'évolution intervenue jusque-là.

Les dépenses courantes furent fixées à 500 millions de francs, mais le Conseil fédéral fit des réserves expresses quant à l'avenir. En fait, les dites dépenses, y compris les dépenses d'armement, atteignirent 565 millions en 1955 et, en moyenne, 710 millions de 1950 à 1955.

Il est compréhensible que cette évolution donne des soucis et qu'on se demande pourquoi l'entretien de l'armée coûte aujourd'hui beaucoup plus que précédemment. Comme le Conseil fédéral l'a exposé dans ses messages de 1948 et de 1953, cette évolution répond à des raisons pertinentes.

Nous renonçons à entrer dans tous les détails, nous contentant d'énumérer les différentes causes de cette situation.

Un facteur important de la hausse des dépenses est l'augmentation des prix et des salaires. Dans le domaine militaire, elle ne peut pas être évitée comme c'est le cas en partie dans d'autres secteurs. En outre, le matériel de guerre a dû être augmenté considérablement ces dernières années, ce qui influe en particulier sur les dépenses d'instruction et d'entretien. La mécanisation de l'armée joue cependant un rôle primordial.

L'entreposage et l'entretien des engins de guerre modernes exigent des

562

installations coûteuses et l'engagement de spécialistes. Les organes responsables doivent constamment s'efforcer de rationaliser l'exploitation et, partant, de maintenir cet accroissement d'installations dans des limites supportables.

2. L'importance de la défense nationale Si grand que soit le désir de ne pas augmenter nos dépenses militaires au delà d'un certain niveau, n'oublions pas cependant l'importance de notre défense nationale dans le cadre dea autres tâches de l'Etat, Notre armée, comme toujours jusqu'ici, n'a qu'un but: assurer notre indépendance. Ainsi que l'histoire nous l'a enseigné, l'armée peut éloigner la guerre de nos frontières par le simple fait qu'elle existe et qu'elle est apte à se battre. En cas d'agression, elle doit opposer une défense efficace, Notre neutralité nous oblige à compter sur nos propres forces et nos propres moyens; nous ne pouvons pas faire dépendre la défense de notre territoire d'une aide étrangère. Si l'on veut que l'armée soit à même d'accomplir sa tâche, son armement et son équipement doivent être adaptés aux besoins.

Cela ne signifie pas qu'on puisse acquérir tout ce qui serait souhaitable ou tout ce qui pourrait servir au renforcement de la défense nationale.

Nous sommes pleinement conscients du fait que notre petit pays sera toujours, à cet égard, dans une position désavantageuse par rapport aux grandes puissances et qu'il lui sera impossible d'acquérir toutes les nouveautés de la technique de guerre. Il ne pourra jamais s'agir -- et ce n'est pas non plus notre intention -- d'imiter les armées des grandes puissances.

Nous sommes au contraire tenus de choisir parmi les engins ceux qui sont adaptés à notre situation.

Mais même en nous limitant aux mesures nécessaires pour que notre armée soit toujours suffisamment préparée, nous ne pouvons éviter des augmentations de dépenses dans les prochaines années. Notre peuple et ses autorités sont certes pacifiques, mais, aussi longtemps que la paix du monde ne peut pas être considérée comme assurée, nous devons rester vigilants.

Nous avons déjà relevé précédemment que notre force de résistance ne pouvait pas être assurée uniquement par des mesures militaires. D'autres facteurs sont décisifs. Une politique étrangère sage et à longue vue, une économie saine, une monnaie stable et un développement judicieux
de la politique sociale sont d'aussi grande importance que l'armement pour l'existence de notre Etat.

3. Le montant des îutures dépenses militaires L'évaluation inscrite au titre des dépenses militaires dans le projet ne doit pas être considérée comme un plafond. Il s'agit uniquement d'une

563

estimation des besoins moyens pendant une série d'années. Ce pronostic concerne une période qui ne débutera que dans deux ans et qui porte sur les années 1959 à 1963. Il a été de ce fait beaucoup plus difficile de l'établir et il est grevé d'un plus grand nombre de facteurs d'incertitude que les budgets annuels.

Nos évaluations ne préjugent évidemment pas les budgets futurs.

Comme par le passé, les crédits de défense nationale seront fixés par les chambres au moment où elles adopteront le budget ou dans des arrêtés spéciaux concernant de nouvelles acquisitions.

Les dépenses militaires se divisent en deux groupes: les dépenses courantes, qui reviennent chaque année et sont nécessaires pour maintenir l'armée au niveau qu'elle a atteint, et les dépenses extraordinaires, qualifiées de dépenses d'armement et qui servent à moderniser l'armée. Cette distinction est faite depuis plusieurs années; pour pouvoir établir des comparaisons avec les données et les chiffres précédents, nous partirons de la même base. Nous devons cependant nous réserver d'examiner plus tard si cette distinction est encore justifiée aujourd'hui et si eDe ne doit pas être modifiée.

a. Les dépenses courantes

Les dépenses courantes se sont développées comme il suit au cours des ans (en millions de francs) : Budgets

Comptes d'Etat

Groupes de dépenses Administration Instruction Service technique militaire Constructions et installaAcquisition et entretien de chevaux . . . .

Entretien et utilisation des installations militaires .

Instruction avant et hors

Total

1955

195«

1957

15,3 131,5 222,3

15,8 135,0 206,7

17,2 140,5 218,1

9,6

8,0

5,8

9,3

7,6

7,8

7,6

7,9

8,3

141,2

126,0

120,8

122,0

129,3

132,4

10,3 37,3

11,1 49,5

11,0 46,2

11,5 46,6

11,1 47,0

11,3 48,7

13,2 51,5

462,0

041,9

491,6

538,$

564,8

560,5

590,5

1951

1952

13,8 115,7 147,0

14,6 136,9 166,7

12,2

13,9

9,9

8,0

8,0

117,7

1953

1954

14,3 14,3 122,3 127,1 154,3 201,1

Ce tableau montre que les dépenses pour l'instruction, celles qui sont groupées sous le titre de service technique militaire, celles d'entretien et de remplacement du matériel, ainsi que celles pour l'entretien des installations militaires, ont considérablement augmenté ces dernières années.

564 Du fait de l'accroissement du matériel et des installations, les dépenses, principalement celles d'entretien et d'exploitation, augmenteront encore.

L'instruction exigera aussi plus de fonds du fait que l'on continue à introduire dans l'armée des .engins de guerre compliqués.

Dans quelques années les annuités pour le renouvellement du parc d'avions seront aussi considérablement plus élevées que maintenant. On peut admettre que les dépenses militaires courantes atteindront en moyenne 600 millions de francs pour les années 1959 et suivantes.

Dans son rapport final du 29 novembre 1954, la commission chargée d'examiner les dépenses militaires est arrivée toutefois à la conclusion quei si l'on faisait certaines économies et limitait le plus possible les dépenses courantes, un montant de 560 millions suffirait. Ce rapport a été établi sur la base des données des années 1953 et 1954. D est clair que ces dépenses ne pourront pas être stabilisées jusqu'en 1959 au chiffre de 560 millions, si l'on veut maintenir la puissance défensive de notre armée. Déjà dans le budget de 1957, les dépenses courantes sont évaluées à 590 millions. Remarquons en outre que la commission en question a proposé diverses économies, comme la réduction de la durée des cours de répétition, dont nous ne pourrions plus prendre la responsabilité dans la situation actuelle.

b. Les dépenses d'armement Le programme d'armement (1) ne sera pas encore entièrement exécuté au moment de l'entrée en vigueur du nouveau régime financier. Jusqu'à fin 1958 nous aurons probablement utilisé 1540 millions sur un total de 1684 millions qui a été approuvé. Par conséquent, les comptes des années 1959 et suivantes devront encore être grevés, au minimum, de 140 millions au total. En 1960 ou 1961, l'exécution de ce programme sera vraisemblablement presque terminée.

Avant même que ce soit le cas, et indépendamment des décisions qui devront être prises au sujet d'une réorganisation de l'armée, il y aura lieu encore d'améliorer d'urgence notre armement et notre équipement et d'adapter notre puissance défensive au développement de la technique de la guerre. Par conséquent, des projets prévoyant de nouvelles mesures pour renforcer l'armée seront soumis aux chambres. Celles-ci ont déjà approuvé, au cours de la session de décembre 1956, les premières mesures
sous forme d'un programme d'acquisition immédiate de matériel de guerre ( a ). Ces nouvelles dépenses d'armement sont nécessitées par l'introduction d'un fusil automatique, le renforcement de la défense antichars et antiaérienne, l'augmentation des réserves de munitions, l'acquisition de nouveaux blindés et de nouvelles séries d'avions, de nouvelles installations (*) AF sur le programme d'armement du 12 avril 1951, RO 1951, 36,5.

(") AF du 21 décembre 1956, FF 1956, II, 1058,

565 importantes pour l'aviation, la création de magasins et entrepôts, l'agrandissement de citernes, etc. Quelques-unes de ces mesures étaient primitivement comprises dans le programme d'armement, mais n'ont pu être prises parce que certains crédits avaient été épuisés du fait que d'autres achats avaient coûté plus que prévu.

Une partie des nouvelles dépenses d'armement devront déjà être faites en 1957 et en 1958. Diverses questions devant encore être élucidées, il est extrêmement difficile de dire aujourd'hui quels seront les besoins financiers pour les années 1959 à 1963, pour lesquelles des évaluations sont faites.

Il faut compter qu'en moyenne 200 millions de francs seront nécessaires par année de 1959 à 1963 jusqu'à ce que le programme d'armement et les nouvelles mesures urgentes susmentionnées soient exécutées.

c. Les dépenses futures Pour 1959 et les années suivantes, les dépenses totales du département militaire seront donc en moyenne: En millions de lianes

Dépenses courantes Dépenses du programme d'armement Total

600 200 800

Durant les premières années du nouveau régime, les dépenses militaires ne dépasseront probablement que de peu leur niveau actuel, mise à part une augmentation temporaire résultant du fait que de nouvelles dépenses chevaucheront sur celles du programme d'armement. En revanche, pour une période s'étendant à peu près sur les années 1961 et 1962, l'augmentation sera considérablement plus élevée.

N'étant pas en possession de tous les éléments d'appréciation nécessaires, nous n'avons pas pris en considération les répercussions financières de la réorganisation de l'armée et de la forte augmentation, en 1961, de l'eifectif des recrues. Au moment où les arrêtés concernant la modification de l'organisation des troupes seront adoptés, il y aura lieu de décider les mesures financières qui devront être prises si les recettes ne couvrent pas les dépenses qu'impliqué une telle modification.

Nous nous rendons compte que les dépenses que commande la défense nationale jouent un rôle très important dans l'ensemble du budget. Mais nous sommes persuadés que le peuple suisse est prêt à consentir les sacrifices qu'exigé le maintien de l'indépendance et de la neutralité du pays.

Nous nous efforcerons, à l'avenir aussi, d'utiliser judicieusement et économiquement les fonds considérables que nous demanderons et de remplir avec le minimum de frais les grandes tâches qui s'imposent.

566

VI. L'amortissement 1. La notion de l'amortissement Les questions d'amortissement jouent un grand rôle dans le nouveau régime des finances fédérales.

Le bilan reflète la situation de fortune de la Confédération. Lorsqu'il y a, comme aujourd'hui, un endettement, cette situation s'exprime au bilan par un découvert. Pour éviter tout malentendu lors des discussions sur l'amortissement, précisons d'emblée qu'il faut distinguer nettement deux notions: le désendettement et le remboursement des dettes. Pour la diminution du découvert du bilan résultant du boni d'un exercice, nous emploierons, ainsi que la commission d'études l'a fait dans son rapport (1), le mot «désendettement». Le terme «remboursement de dettes» s'appliquera en revanche à la diminution des dettes résultant du remboursement d'obligations, de dettes inscrites au livre de la dette et de rescriptions échues.

L'expression «amortissement» est donc un terme général, qui comprend l'une et l'autre des deux notions. C'est l'amortissement dans le sens de désendettement qui est important du point de vue de la politique financière.

3. Le découvert du bilan Au début de la première guerre mondiale, la Confédération disposait d'une fortune nette de 102 millions de francs. A la fin, elle avait au bilan un découvert d'environ 1 milliard. Ce découvert augmenta encore au cours de la deuxième guerre mondiale, pour atteindre 8,5 milliards à la fin de 1946.

Bénéficiant d'une situation économique favorable, la Confédération put, dans les années qui suivirent, opérer un désendettement remarquable.

Suivant les prévisions budgétaires, son découvert de l'année 1946, de 8479 millions de francs, se réduira à 7232 millions à fin 1956. Si le découvert du bilan se réduisit dans cette période de 1247 millions, la dette, en revanche, ne diminua que d'environ 800 millions. Cette différence provient du fait que la Confédération fit preuve d'uno certaine réserve dans le remboursement de ses dettes pour ne pas accroître la fluidité du marché de l'argent et des capitaux et ne pas accentuer les tendances à la hausse qui auraient pu en résulter. Nous reviendrons ultérieurement sur ce problème.

Le tableau suivant indique le montant du désendettement au cours de la période écoulée.

f 1 ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 4, p. 5.

567 _, ,, .

31 décembre

1946 1948 1950 .

1952 .

1954 1955 1956 budget

Découvert da bilan ,,^^^ de lranca

en

8479 7982 7809 7981 7795 7580 7232

3. Le désendettement est-il désirable?

Bien des auteurs modernes affirment que l'endettement d'un Etat n'a pratiquement pas de limites. Avec la commission d'études qui s'est occupée de ce problème, nous pensons, quant à nous, qu'il ne peut pas dépasser certaines limites sans qu'il s'ensuive des conséquences graves.

Ces limites ne peuvent pas être exactement définies. Elles sont, comme l'expose le rapport de la commission, psychologiques, sociales, financières et économiques.

Nous pouvons constater ici que l'endettement de la Confédération n'a pas atteint la limite de ce que la nation peut supporter. Pour juger si l'endettement est supportable, on ne doit cependant pas se fonder uniquement sur les années de prospérité économique. Il faut aussi tenir compte du fait que le revenu national et, par conséquent, les recettes de la Confédération, peuvent à un moment ou à un autre diminuer. H n'est ainsi pas exclu que l'endettement actuel de la Confédération apparaisse dans l'avenir comme très lourd. Nous sommes par conséquent fermement décidés d'accorder, à l'avenir, toute notre attention au désendettement.

L'amortissement se justifie tout d'abord par des considérations relatives aux finances publiques, étant donné que le service des intérêts représente des charges importantes. Bien que les placements aient considérablement augmenté après la guerre et qu'on ait pu ainsi accroître les intérêts actifs, il nous semble, comme à la commission, que l'on doit s'efforcer de diminuer encore les charges nettes résultant du service des intérêts. Mais il est aussi recommandable, pour-des raisons politiques et sociales, de procéder à l'amortissement, car cela donne une plus grande mobilité et une plus grande facilité d'adaptation dans la gestion financière de l'Etat. Si, pendant les bonnes années, on a procédé à un amortissement systématique, on peut prendre plus facilement la responsabilité d'un nouvel endettement au cas où des événements imprévisibles obligeraient d'augmenter sensiblement les dépenses. L'Etat, comme l'économie privée, doit, en période de grande prospérité, s'efforcer de se rendre financièrement indépendant et prendre les mesures lui permettant de faire face à toute crise éventuelle.

Enfin, la Confédération ne doit pas rester sourde à l'avis de larges milieux qui estiment qu'un Etat bien gouverné doit se désendetter.

568

Pour ces raisons, nous estimons qu'il faut insérer dans la constitution, à l'occasion du nouveau régime des financée, un article sur le désendettement.

Cet article ne devrait cependant énoncer que le principe et la règle générale selon laquelle il faut tenir compte de la situation économique du moment. Nous proposons par conséquent le texte suivant: Article 42bis: La Confédération doit amortir le découvert de son bilan. Elle procède à cet amortissement en tenant compte de la situation économique.

Les remarques suivantes montrent comment cette disposition constitutionnelle devrait être appliquée, 4. Le remboursement des dettes et le marché de l'argent et des capitaux Conformément à l'article constitutionnel envisagé, la Confédération devra tenir compte, dans sa politique d'amortissement, de la situation économique générale. Elle pourra contribuer à freiner l'expansion économique ou, au contraire, à la stimuler en cherchant, dans un cas, à obtenir des excédents de recettes, dans l'autre des excédents de dépenses.

La mesure dans laquelle les excédents de recettes ont un effet restrictif en période de grande prospérité dépend cependant aussi de leur affectation. L'Etat peut accentuer cet effet en n'affectant pas ces excédents au remboursement de dettes, mais en constituant temporairement des réserves. Certaines sommes sont retirées du marché de l'argent et des capitaux et ne peuvent ainsi servir à financer des investissements privés. Si des dettes sont en revanche remboursées, la demande de crédit peut être satisfaite dans une plus large mesure, ce qui donne une nouvelle impulsion aux investissements et, en conséquence, accentue la surexpansion économique.

Durant les années passées, le marché suisse de l'argent et des capitaux a été caractérisé par une grande fluidité, qui, en grande partie, provenait des excédents de notre balance des revenus avec l'étranger. Pour ne pas augmenter la liquidité du marché et limiter le crédit, c'est-à-dire pour contribuer à freiner l'expansion économique, la Confédération -- d'entente avec la banque nationale -- observa une certaine retenue dans le remboursement de ses dettes. L'expansion allant croissant, la politique de la Confédération fut complétée, avec succès, en 1955 par des accords en vertu desquels les banques et compagnies d'assurances s'engageaient envers la banque nationale à maintenir leur encaisse à un certain minimum.

Cette retenue dans le remboursement des dettes de la Confédération en période de grande prospérité est taxée d'appropriée dans les rapports sur l'amortissement (*) et sur la politique financière basée sur la conjoncf 1 ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 4, p. 29/30.

569

ture (l). Une telle façon de procèder entraîne cependant une perte d'intérêts et un accroissement des réserves et souffre ainsi certaines limites, avant tout de caractère politique. Nous n'avons cependant pas poursuivi une politique rigide au cours de ces dernières années. En tant que le marché le permettait, nous avons opéré certains remboursements, comme par exemple 170 millions en 1955 et 126 millions en 1956. Pour empêcher un raidissement indésirable du taux de l'intérêt, nous avons, au début de cette année, remboursé 200 millions au fonds de l'assurance-vieillesse et survivants en vue de leur attribution aux établissements de lettres de gage. Au cours de 1957, il y aura encore d'autres remboursements d'emprunts ou de rescriptions. Tant qu'une activité économique très intense et la tendance à la hausse des prix se maintiendront, la Confédération devra cependant continuer d'observer de la retenue dans le remboursement de ses dettes. Dès que la conjoncture et le marché de l'argent et des capitaux le permettront, les excédents de recettes serviront en premier lieu au remboursement de la dette, ce qui est normal.

5. Les méthodes d'amortissement Le désendettement apparaît clairement dans le compte d'Etat du fait de la réduction du découvert du bilan. Différentes méthodes peuvent être appliquées pour procéder au désendettement désiré en tenant compte de la conjoncture (2). Relevons que, dans chaque cas, le désendettement effectif équivaut nécessairement au boni du compte général, tel qu'il apparaît avant la soustraction d'une annuité d'amortissement. Par conséquent, des considérations de caractère politique et psychologique jouent seules un rôle dans l'examen des diverses méthodes d'amortissement. La question du choix de la meilleure méthode se pose exclusivement pour le désendettement. Celle du remboursement des dettes ne peut être résolue que selon les conditions particulières de chaque cas, suivant les indications données, à ce moment-là, par la situation économique et le marché des capitaux.

Ces dernières années, la Confédération a procédé à un amortissement libre, c'est-à-dire renoncé à insérer dans le budget et dans le compte d'Etat une somme déterminée pour le désendettement. Cette manière de faire a cependant, comme l'expérience l'a montré, l'inconvénient suivant: la nécessité du désendettement
ne ressort pas expressément du budget et du compte d'Etat, de sorte que l'obligation d'obtenir des bonis paraît moins évidente.

(!) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 5, p. 6/7 et 66/67.

( s ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 4, p. 32 et suivantes.

570

Pour ces raisons, nous avons examiné avec soin la question de l'adoption d'un plan d'amortissement. D'emblée, l'idée d'un plan rigide ne tenant pas compte de la situation économique a été écartée. Un tel plan, notamment lors de régressions économiques, empêche de pratiquer une politique adaptée à la conjoncture. Appliqué entre les deux guerres, ce plan ne s'est pas non plus révélé judicieux.

Nous avons donc porté notre attention sur l'amortissement variable, c'est-à-dire sur la méthode qui prévoit d'avance la façon dont l'annuité d'amortissement doit être calculée et qui permet de fixer celle-ci chaque fois en fonction de la situation économique. Ce faisant, nous nous sommes fondés sur les études de la commission qui avait examiné la question d'une manière approfondie et avait fait des propositions concrètes sans cependant formuler de conclusions définitives. L'avantage de ce procédé consiste avant tout dans l'influence favorable qu'il exerce en matière de politique financière et le fait qu'il n'a pas les inconvénients que comporte l'application d'un plan d'amortissement rigide.

L'amortissement souple nous paraît être ainsi le plus approprié.

Des difficultés se produisent lorsqu'il s'agit de trouver le barème qui convient le mieux. Pour y parer, nous avons l'intention de fixer chaque année le montant de l'amortissement et de le porter aux charges, aussi bien dans le budget que dans le compte d'Etat.

L'Assemblée fédérale, qui sera liée par le principe constitutionnel de l'amortissement, pourra donc chaque année, au moment où elle approuvera le budget, fixer l'ampleur du désendettement, à la lumière des conditions économiques du moment. En période de grande prospérité, le désendettement devrait se monter à environ 200 ou 300 millions. S'il y a fléchissement de la prospérité, voire une dépression proprement dite, l'annuité pourra être réduite ou même supprimée. Ce procédé a l'avantage de permettre d'adapter rapidement et aisément les annuités aux exigences du moment.

VIL Evaluation de l'ensemble des besoins financiers Les considérations contenues dans les chapitres précédents montrent combien il est difficile d'évaluer pour l'avenir, avec une certaine précision, les besoins financiers de la Confédération. Ce qui a été dit permet cependant de le tenter. Rappelons à ce propos que les chiffres
comparatifs inscrits pour les cinq années 1959 à 1963 se fondent sur le fait que le rerenu national augmentera de 2 à 3 pour cent en moyenne par an durant cette période, ce qui sera bien entendu le cas seulement si la prospérité économique se maintient. L'augmentation portera aussi bien sur les dépenses que sur les recettes.

Quant aux chiffres mentionnés dans lea différents groupes, nous renvoyons aux explications données ci-dessus.

571

Le tableau suivant montre que, d'après nos évaluations concernant la future évolution des dépenses brutes de la Confédération, y compris les parts des cantons aux recettes fédérales, mais sans l'annuité d'amortissement, on peut envisager une somme de 2150 millions de francs par an.

Ces évaluations, comme nous l'avons dit, étant faites dans l'idée que la situation économique favorable se maintiendra, il est indispensable, d'après les considérations énoncées au sujet de l'amortissement, de porter aussi en compte une importante annuité à cet effet. Par un désendettement de 250 millions de francs par an, la Confédération pourra convenablement s'acquitter de son devoir de réduire le découvert du bilan durant les bonnes années. Ainsi, la totalité des dettes annuelles, y compris l'amortissement, serait de quelque 2400 millions de francs pour la période de 1959 à 1963.

Evaluation des besoins financiers de la Confédération pour les années 1959 à 1963 En millions de francs Groupes de dépends

Compte

Evaluation 1959-1963

Budget

1954

1955

1956

1957

Moyenne

AVS e t assurance-invalidité. . . . .

1000 260 143 132 122

1041 247 147 127 121

1045 252 154 147 121

1112 245 169 156 120

1230 230 180 145 155

Subventions fédérales: Ports aux droits d'entrée sur les carbxirants pour les travaux routiers

59

73

81

112

84 65 36 99 688

99 91 38 98 749

98 49 40 103 673

103 54 41 112 706

115 45 110 60 75 115 800

(sans l'amortissement).

1688

1790

1718

1818

2030

175 48 48

108 4 47

193 8 50

113 7 50

117

Investissements Allocations pour perte de gain . . .

Dépenses comptables

1959

1949

1969

1988

2147

361

296

463

304

250

Dépenses comptables, plus amortissement

2320

2245

2432

2292

2397

Agriculture Approvisionnement eu céréales. . .

Assurance -maladie et accidents . .

Dépenses effectives Plue:

572

B. LA REVISION DES DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES CONCERNANT LES RECETTES I. Point de départ et buts de la révision 1. Le point de départ Entre les dépenses que causent à la Confédération les tâches qui lu sont confiées de façon permanente par la constitution et les recettes que celle-ci lui accorde sans limitation de temps, il y a une disproportion manifeste. En vertu du droit constitutionnel en vigueur pour une durée illimitée, la Confédération dispose des recettes permanentes suivantes: -- le produit de la fortune fédérale et des exploitations en régie (PTT, régale des poudres); -- le produit des douanes; -- la part fédérale au produit de la taxe militaire; -- la part fédérale au produit des droits de timbre et de l'imposition des boissons distillées, ainsi que le produit de l'imposition du tabac; -- la part fédérale aux recettes des jeux et au bénéfice net de la banque nationale; -- le produit des émoluments et les autres recettes prévues par la législation ; -- les contingents d'argent des cantons.

L'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958 accorde à la Confédération les sources de recettes suivantes, limitées à la fin de 1958: -- les droits de timbre extraordinaires ; -- l'impôt sur la bière ; -- l'impôt pour la défense nationale ; -- l'impôt sur le chiffre d'affaires ; -- l'impôt sur le luxe ; -- l'impôt anticipé ; -- l'impôt retenu sur les prestations d'assurance sur la vie (impôt de garantie).

Dans le total des recettes effectives, qui s'est élevé en moyenne à 1859 millions pour les années 1951 à 1955, les recettes fiscales de durée limitée (y compris les impôts en liquidation) comptent pour 860 millions, ou 46 pour cent.

Le tableau suivant donne un aperçu des diverses recettes de la Confédération de 1951 à 1955:

573 Recettes de la Confédération En millions de francs

Comptes

1951

1952

1958

1954

1956

Moyenne 1951 à 1955

1890

1627

1504

1589

633

716

1798 784

1733

650

864

729

335 100 118

305 105 119

328 121 124

369 139 123

417 164 127

351 126 122

31 59 7

33 64

71 65 7

68 77 8

62 86 8

53 70 7-

713 23 157 74 426 20 13

875 24 270 90 457 20 14

906 27 329 105 498 23 14

27

39

769 25 148 88 473 21 14 19

13

865 27 165 97 541 19 16 4

844 25 214 91 479 21 14 16

206

249

259

304

334

270

46 60 100 1596

50 88 111 1776 145 28 1

54 76 129

1763

79 99 156 2067 108 70 0

61 84 125 1859

1950

1975

77 96 131 2097 175 48 0 2820

Recettes

Recettesfiscales(part fédérale)

. . .

a. Recettesfiscalespermanentes . . .

Droits d'entrée (sans les droits sur les carburants et le tabac) . . .

Droits sur les carburants . . . .

Charge frappant le tabac . . . .

Droits supplémentaires et autres contributions . . . . .

Droits de timbre Taxe militaire

7

6. Recettes fiscales limitées dans le Droits de timbre extraordinaires .

Impôt pour la défense nationale .

Impôt anticipé Impôt sur le chiffre d'affaires . . .

Impôt sur le luxe Impôt sur la bière Autres recettes Produit de la fortune . . ; . , .

Parte et excédents . . . . . . . .

Recettes diverses . . . . .

Recettes effectives Parts cantonales lTlYfiS*Ìfa*aflT"PTlts

Réserves, provisions, eto. . . . .

Recettes comptables

93 67 1 1757

94 117 1

2245

123 66 1 2049

C1) Sacritice pour la défense nationale, impôt sur les bén éfices d s guerre , Impôt compensatoire.

3. Les buts La révision des dispositions sur les recettes de la Confédération se propose trois buts: a. Le premier est d'assurer à la Confédération les ressources dont elle a besoin pour accomplir ses tâches constitutionnelles d'intérêt général ou limité. A cet effet, nous proposons: Feuille fédérale. 109e année. Vol. I.

40

574

-- de maintenir, en principe sans changements, les recettes inscrites jusqu'ici dans la constitution (produit de la fortune fédérale et des exploitations en régie, taxe militaire, droits de timbre, droits de douane, impôt sur le tabac, monopole de l'alcool, part fédérale aux recettes des jeux et au bénéfice net de la banque nationale, émoluments et autres recettes prévues par la législation), en renonçant aux contingents d'argent des cantons; -- d'inscrire à titre durable dans la constitution des recettes jusqu'ici de durée limitée (impôt anticipé, impôt retenu sur les prestations d'assurances sur la vie), ainsi que la faculté d'instituer des impôts de rétorsion pour parer aux mesures fiscales que pourraient prendre des Etats étrangers; -- de prévoir, pour 12 ans, c'est-à-dire de 1959 à 1970, la faculté de percevoir un impôt sur le chiffre d'affaires et un impôt pour la défense nationale ; -- de maintenir les dispositions qui, dans l'arrêté sur le régime financier "de 1955 à 1958, concernent la perception des droits de timbre, de l'impôt anticipé, de l'impôt retenu sur les prestations d'assurances sur la vie, ainsi que de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale. Ce maintien devra avoir effet jusqu'à l'entrée en vigueur de chacune des lois d'exécution à édicter en vertu des nouvelles dispositions constitutionnelles.

6. Le deuxième but est d'éviter que les finances cantonales ne soient trop profondément affectées par la revision du régime des finances fédérales.

Les sources fiscales propres aux cantons et leurs parts actuelles aux recettes fédérales ne doivent pas être réduites au point que tous les cantons soient contraints de reviser leurs lois d'impôt. A cette fin, nous envisageons : -- de limiter l'impôt pour la défense nationale à un impôt modéré sur le revenu des personnes physiques, ainsi que. sur. le bénéfice net et le capital propre des personnes morales, en renonçant à réserver exclusivement à la Confédération une imposition directe des personnes morales; -- de maintenir la participation cantonale actuelle au produit des droits de timbre, au bénéfice net de la banque nationale et à l'impôt fédéral direct. Seule la part cantonale actuelle de 50 pour cent à la taxe militaire doit être supprimée, tandis que la commission de perception serait portée de 8 à
20 pour cent.

c. Notre troisième but est de répartir la charge fiscale, en tenant compte des données politiques, d'une manière aussi égale que possible sur l'ensemble des contribuables, sans désavantager ou favoriser certains groupes d'entre eux. Pour cela, nous proposons:

575

-- d'accorder, tant en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires qu'en matière d'impôt pour la défense nationale, des allégements appropriés déjà à partir du 1er janvier 1959, c'est-à-dire déjà avant l'entrée en vigueur des nouvelles lois d'exécution; ·-- de renoncer aux impôts sur le luxe et sur la bière à partir du 1er janvier 1959; -- de réaliser, au moyen de la législation d'exécution, divers desiderata ressortissant à la politique fiscale (réduction du taux du droit de timbre sur les coupons; assujettissement uniforme du bénéfice net des personnes morales à l'impôt pour la défense nationale; modifications en matière de taxe militaire, etc.).

Nous sommes convaincus que les mesures qui sont proposées pour atteindre ces trois buts et qui seront motivées ci-après en détail sont propres à établir, entre la Confédération et les cantons, une répartition des attributions qui soit objectivement défendable dans la situation politique actuelle.

Au surplus, si nous croyons que l'inscription de l'impôt sur le chiffre d'affaires dans la constitution exige, pour des raisons de politique financière et fiscale, le maintien d'un impôt fédéral direct modéré, nous espérons que notre avis pourra être partagé même par les adversaires actuels de l'impôt fédéral direct et que la limitation prévue de ces deux impôts à 12 ans entraînera aussi l'adhésion de ceux auxquels ils répugnent.

II. Maintien intégral de recettes inscrites dans la constitution 1. Lo produit de la fortune L'article 42 de la constitution mentionne le produit de la fortune fédérale, en premier lieu, parmi les ressources servant à couvrir les dépenses de la Confédération, En 1946, ce produit ne s'élevait guère à plus d'un pour cent des dépenses ; d'après le budget, il en représentera environ 5 pour cent en 1957, Le produit de la fortune fédérale comprend : le produit des capitaux, les intérêts des prêts aux chemins de fer fédéraux et du capital de dotation des chemins de fer fédéraux, le produit des immeubles.

576

Développement du produit de la fortune de 1951 à 1957 En millions de francs Produit de U fortune

Frets aus: chemins de fer fédéraux. .

Capital de dotation des chemins de fpTf i S H A r a m r. .

Compte 1954

Compte 1955

Budget 1958

51

52 23

51

61

O4 £iA

27

33

4

12 3

16

3 77

79

93

113

. . . . . .

Total

Budget 1957

3

Il est extrêmement difficile d'évaluer pour l'avenir le développement du produit de la fortune. Pour ce qui est du produit des capitaux, nous partons de l'idée, indiquée plus haut, que l'on ne placera plus les excédents éventuels des comptes, mais qu'on les affectera à l'amortissement des dettes.

Us représenteront donc une diminution des intérêts passifs, et non plus une nouvelle augmentation du produit des capitaux. On ne peut dire dans quelle mesure des liquidités pourraient être aujourd'hui placées à intérêt et contribuer à accroître le produit des capitaux. Si cette possibilité existe, les effets pourraient en être compensés par une diminution éventuelle des avoirs et rendements provenant des accords de paiement internationaux.

La forte augmentation du produit des prêts aux chemins de fer fédéraux provient des intérêts des prêts consentis à la France par l'intermédiaire de nos chemins de fer d'Etat. Pendant les prochaines années, on ne doit guère s'attendre à des changements, mais il est sans doute indiqué de compter pour cette période que l'intérêt du capital de dotation sera un peu moins élevé qu'il n'est prévu pour 1957, On peut donc estimer le produit de la fortune à 105 millions de francs par an de 1959 à 1963.

2. L'excédent de l'administration des postes, télégraphes et téléphones D'après l'article 36 de la constitution, le produit des postes et des télégraphes appartient à la caisse fédérale. L'article 42 de la constitution dispose que ce produit doit aussi être utilisé à couvrir les dépenses de la Confédération. Il est ainsi évident que le bénéfice net de l'administration des postes, télégraphes et téléphones fait partie des recettes ordinaires que la constitution accorde à la Confédération. Ce qui a été parfois contesté, c'est seulement le montant de cette contribution. Les postes, télégraphes et téléphones ayant toujours versé, de 1937 à 1947, à l'exception d'une année, 25 millions par an à la caisse fédérale, la commission d'experts consultée par le Conseil fédéral avant l'élaboration de son message du 22 janvier 1948

577

conseilla d'estimer le produit moyen à 75 millions de francs à partir de 1950. Le Conseil fédéral n'inscrivit cependant que 50 millions dans le plan financier et se contenta également de reprendre le même montant dans le message du 20 janvier 1953. Effectivement, le produit versé en 1950 a atteint 50 millions et il est même passé à 70 millions en 1955.

Ce qui est d'une importance essentielle pour les versements ultérieurs du produit des postes, télégraphes et téléphones, c'est qu'il s'agit d'une exploitation n'ayant jamais cessé de suivre le progrès technique, n'ayant pas d'amortissements arriérés à opérer et parfaitement saine du point de vue économique.

Si nous comptons sur un versement des postes, télégraphes et téléphones de 70 millions à partir de 1958, ce n'est pas que nous entendions exploiter fiscalement la régale des postes. Les nombres suivants prouvent que notre estimation plus élevée ne fait que suivre le développement effectif: En millions de franc»

Années d'exploitation

1947 1952 1956 1957

(compte) (compte) (budget) (budget)

Frais d'exploitation

479

. . .

582 714 774

Immobilisations, stocke et participations Valeur d'établissement

943 1592 2067

Valeur comptable

108 595 827

Pour une entreprise exonérée des impôts, qui possède des installations valant 2 milliards et dont les frais d'exploitation s'élèvent à trois quarts de milliard, un versement de 70 millions sur le bénéfice net peut être considéré comme modéré. Par rapport aux 50 millions du plan financier de 1948, l'augmentation à 70 millions ne paraît aucunement exagérée, étant donné que la valeur d'établissement a doublé depuis lors.

Le compte des postes s'est clos en déficit de façon ininterrompue depuis 1946. Dans les budgets de 1956 et 1957, ces déficits absorbent près de la moitié des excédents des comptes des téléphones et télégraphes.

Dans ces conditions, il serait en principe possible d'augmenter notablement les excédents totaux en revisant les taxes postales. Nous ne pensons cependant pas qu'il soit indiqué d'épuiser cette réserve à l'occasion de la revision des dispositions constitutionnelles sur les finances fédérales. Comme il faut s'attendre qu'une augmentation éventuelle des taxes postales serait accompagnée d'une réduction des taxes téléphoniques, on ne peut savoir dans quelle mesure cette réserve existe en fait.

578 3. Les parts aux produits a. Régie des alcools

L'article SZbis de la constitution dispose que la moitié des recettes nettes retirées par la Confédération de l'imposition des boissons distillées est répartie entre les cantons, alors que l'autre moitié restant à la Confédération doit être affectée à l'assurance-vieillesse et survivants. Dans le compte de la Confédération, cette dernière moitié seulement figure parmi les recettes.

Le total des recettes nettes est inscrit dans le compte de la régie des alcools, qui, en tant que personne morale, tient sa propre comptabilité.

Les recettes de la régie sont déterminées principalement par le montant de l'imposition des boissons distillées, alors que ses dépenses sont influencées surtout par les frais très variables en vue d'encourager l'utilisation à d'autres buts des matières brutes pour la distillation, notamment dés pommes de terre. Ces variations sont atténuées du fait que la caisse fédérale prend à sa charge une partie des frais pour l'utilisation des pommes de terre. Le développement [de ces dernières années se présente comme il suit : Imposition des boissons distillées En millions de Ir&uos Années comptables

Excédent des recettes

Produit net répart!

1949/1950 1950/1951 1951/1952 1952/1953 1953/1954 1954/1955 1955/1956

22,1 19,3 24,9 25,5 25,6 17,4 29,3

20,4 17,9 21,7 24,5 24,5 17,0 27,3

Dont % à la Confedera tioa (AVS)

10,2 9,0 10,8 12,3 12,3 8,5 13,7

Les récoltes de pommes de terre tendant à s'accroître, on ne peut guère s'attendre que les frais d'utilisation diminueront. En supposant qu'il n'y aura pas de modification fondamentale des quantités de matières brutes utilisées sans distillation et que le montant de l'imposition des boissons distillées demeurera le même, on peut mettre en compte, comme moitié restant à la Confédération pour être affectée à l'assurance-vieillesse et survivants, la somme moyenne de ces dernières années, savoir 12 millions de francs.

b. Banque nationale Le bénéfice net de la banque nationale, déduction faite d'un dividende équitable servi au capital-actions et après prélèvement dés versements à opérer au fonds de réserve, revient au moins pour les deux tiers aux can-

579

tons (art. 39, 4e al., Cst.). D'après l'article 27 de la loi du 23 décembre 1953 sur la banque nationale suisse (1), il est fait d'abord en faveur du fonds de réserve, sur le bénéfice net accusé par le compte de profita et pertes, un premier prélèvement qui ne doit pas dépasser 2 pour cent du capital social de 50 millions de francs. Il est ensuite payé un dividende qui ne peut dépasser 6 pour cent du capital social versé (25 millions). De l'excédent, les cantons reçoivent d'abord une indemnité de 80 centimes par tête de la population ; si le bénéfice net ne suffit pas pour cela, la somme non versée doit être payée dans les cinq années suivantes, dans la mesure où les résultats des comptes de la banque le permettent. Le surplus, s'il y en a un, revient pour un tiers à la Confédération et pour deux tiers aux cantons.

Le bénéfice net de la banque nationale a aussi été fixé pendant les dix dernières années de manière que le surplus restant après déduction du versement à la réserve et du dividende (6%) corresponde exactement au montant à répartir entre les cantons. Sur la base du recensement de 1941, ces versements aux cantons se sont élevés à 3,41 millions environ jusqu'en 1950 et, selon la population déterminée à nouveau en 1950, à 3,77 millions environ à partir de 1951. Pendant l'après-guerre également, la Confédération n'a donc pas participé au bénéfice de la banque nationale.

Il n'y a cependant pas lieu de modifier en quoi que ce soit les parts actuelles des cantons au bénéfice net de la banque nationale.

c. Jeux dans les kursaal« L'article 35 de la constitution interdit d'ouvrir et d'exploiter des maisons de jeu et ne permet que les jeux d'agrément en usage dans les kursaals, avec une mise maximum de 2 francs (2). Le quart des recettes brutes des jeux doit être versé à la Confédération, qui l'affecte, sans égard à ses propres prestations, aux victimes des dévastations naturelles, ainsi qu'à des oeuvres d'utilité publique (art. 35, 5e al., Cst.). La part fédérale aux recettes des jeux s'est élevée à environ 700 000 francs en 1955.

On étudie actuellement s'il ne serait pas possible d'élever la mise maximum de 2 francs. Dans ce cas, les recettes à buts spéciaux qui découlent pour la Confédération de sa part au produit des jeux s'élèveraient automatiquement. Pour le moment, on ne peut pas du tout
dire si et quand se produira ce changement.

4. Les droits d'entrée a. L'influence de la situation économique sur les recettes douanières Jusqu'à la première guerre mondiale, les ressources de la Confédération provenaient presque exclusivement des recettes douanières, qui couvraient f 1a) KO 1954, 613, 620.

( ) LF du 5 octobre 1929 sur les maisons de jeu (BS 10, 270); ordonnance du 1« mars 1929 concernant l'exploitation des jeux dans les kursaals (RS 10, 273).

580

environ 80 pour cent des dépenses, alors qu'elles n'en couvraient plus que 33 pour cent en 1955. Le tarif d'usage, qui fut modifié provisoirement le 8 juin 1921 (*) et est encore en vigueur à part quelques exceptions, augmenta sensiblement les taux et par conséquent les recettes douanières. Bien que la revision de 1921 n'eût pas en premier lieu des buts fiscaux, elle aida la Confédération à obtenir davantage de recettes; lorsque ces dernières ne suffirent plus, on institua plus tard quelques droits fiscaux.

La revision du tarif de 1921 avait pour but de rétablir la charge douanière d'avant-gueire sur la valeur d'importation, qui était tombée à moins de la moitié de la charge primitive par suite des fortes augmentations des prix jusqu'en 1918. Elle tendait aussi à accorder à l'agriculture une modeste protection douanière. Après la chute des prix qui commença en 1921, il se révéla cependant que les nouveaux taux entraînaient une charge plus élevée que celle d'avant-guerre. Pendant la crise économique des années «trente», cette charge s'accrut encore davantage, en raison de la nouvelle baisse des prix et de l'adjonction de quelques droits fiscaux, sans toutefois atteindre le niveau de la charge douanière dans d'autres Etats.

Charge douanière en pour-cent de la valeur d'importation Sans les carburants et le tabac

Années

1913 1918 1925 1930 1935 1938 1945 1950 1955 . .

.

4,2 1,6 6,9 9,2 16,1 12,5 6,5 7,6 7,0

Y compris les carburants et le tabac

4,4 1,7 8,1 11,3 22,2 16,9 8,5 10,5 10,1

Notre système actuel de droits calculés d'après le poids tient compte de la valeur de la marchandise en ce sens que pour une valeur accrue par 100 kg les taux augmentent aussi ordinairement. L'effet protectionniste des droits de douane est relativement plus fort dans les prix bas que dans les prix élevés. En ce sens, les droits calculés d'après le poids ont des effets appropriés à la situation économique, contrairement aux droits calculés selon la valeur, qui montent en même temps que les prix et qui s'abaissent avec eux, ce qui contribue à augmenter l'amplitude des fluctuations économiques. Les recettes douanières reflètent plus ou moins exactement l'évolution quantitative du commerce suisse d'importation; il faut toutefois (!) LF du 10 octobre 1902 sur le tarif des douanes (ES 6, 705); ACF du 8 juin 1921 concernant la modification du tarif douanier (BS 6, 710).

581

considérer aussi les modifications de quelques taux douaniers et de la composition des importations. Si nous donnons à l'année 1938 l'indice 100, les recettes douanières ont atteint en 1955 l'indice 235, et l'indice 214 sans les droits sur les carburants et le tabac, alors que la quantité des importations s'élevait à l'indice 222.

Les recettes douanières de 1925 à 1957 En millions de francs Années

Importations l )

Carburants

Tabac

Droits supplémentaires

Total (2-5)

1

2

3

4

5

178

14 35 55.

56 1 39

20 25 28 21 26 38

e 212

58 66

42 47 44 47 46 47 49 48 48 48 48

1925 1930 1935 1938 1945 1946 1947 1948 1949^ 1950 1951 1952

1953 1954 1955 1956 (') 1957 (*)

1

228 202 195 75 211 319

309 256

323 336 305 329 369 417 400 460

74 95 100 105 121 139 164 160 190

--

5 5 3 2 5 18 12 14 13 11 16 15 11 16 13 14

293 290 275 104 293 437 434 388 478 493 473 514 567 645 621 712

(!) Sans les carburants et le tabac.

(') Budget.

Comme les recettes douanières sont à peu près parallèles aux quantités importées, que ces dernières tendent à évoluer dans la même direction que les quantités exportées et que le chiffre des exportations constitue la pierre de touche de la situation économique de notre pays, cette situation ressort aussi des recettes douanières. Cette relation s'exprime clairement par exemple dans l'évolution caractérisée par l'essor économique des années «cinquante».

582

Développement des recettes douanières et du commerce extérieur depuis 1949 Indices (1949 = 100) Années

1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955

Beoettee douanières

100 123 128 122 133 146 167

Importations

Exportations

Quantités

Valeur

Quantités

Valeur

100 131 144 126 130 150 170

100 120

100 113

100

156

138 133 147 154 170

137 134 147 169

113 136 137 149 153 164

On voit ainsi que la caisse fédérale a pu bénéficier de la prospérité économique grâce aux droits de dottane calculés selon le poids. Il serait cependant imprévoyant d'oublier les leçons du passé et de ne pas songer qu'une évolution contraire de la situation économique amènerait le résultat inverse.

Si séduisante que puisse être aujourd'hui l'idée de résoudre en bonne partie à l'aide des droits de douane le problème de la réorganisation des finances fédérales, il y a lieu de s'y opposer fermement. Les inconvénients qu'offrirait la liaison des recettes douanières avec la situation économique en période de dépression sautent aux yeux. Ainsi que l'apprennent les expériences du passé, des finances publiques qui reposeraient trop sur les recettes douanières et que l'on croirait ainsi suffisamment assurées lorsque la situation est bonne seraient déjà en danger lors du retour de circonstances normales.

Les droits de douane, qui constituent la plus ancienne et encore la plus importante des recettes de la Confédération, demandent un complément, tel qu'on l'a trouvé dans l'impôt sur le chiffre d'affaires. Par rapport aux droits de douane, cet impôt a l'avantage de produire des recettes beaucoup plus équilibrées, parce qu'il porte aussi sur les transactions à l'intérieur du pays et qu'il ne frappe pas les exportations. Il a encore cet avantage de suivre de près les modifications des prix et de la valeur de l'argent.

Les recettes douanières obtenues en 1955 (sans les droits sur les carburants et sur le tabac et sans les droits supplémentaires) ont été extraordinairement élevées, avec environ 420 millions de francs. Nous croyons cependant pouvoir prendre ce montant pour point de départ. Vu le développement attendu de l'économie, nous pensons ainsi pouvoir compter pour les années 1959 à 1963 que les droits d'entrée produiront de 460 à 500 millions de francs.

583

b. La revision du tarif douanier La Suisse n'a jamais eu de politique douanière hautement protectionniste. Sauf pour quelques rubriques fiscales, elle n'a perçu en général que des droits de douane modérés. Ces droits ont été encore en partie réduits dans des tractations avec d'autres Etats, de sorte qu'il n'y a aujourd'hui pour ainsi dire aucune rubrique qui puisse servir de monnaie d'échange pour l'obtention de concessions de la part d'autres Etats. Les taux calculés selon le poids grèvent en général beaucoup moins qu'autrefois les prix d'importation, qui ont haussé, et ils ne suffisent plus dans beaucoup de cas. C'est pourquoi, comme après la première guerre mondiale, on a de nouveau exprimé le désir de voir revaloriser notamment les droits protecteurs. Nos intérêts en matière de politique commerciale et de négociations militaient donc aussi pour une revision du tarif douanier. Cette revision est en cours; bien qu'elle ne se fonde sur aucun motif d'ordre fiscal, elle apportera nécessairement une certaine majoration des taux pour bien des rubriques. Il ne faut cependant pas s'attendre à un accroissement essentiel de l'ensemble des recettes douanières. Tout d'abord, la révision n'est pas terminée. En outre, les droits effectivement perçus se déterminent non pas uniquement d'après le tarif, mais aussi dans les négociations avec les autres pays. Notons ici que l'on discute actuellement de l'établissement d'une zone européenne de libre échange, où seraient supprimés graduellement tous les droits de douane grevant le commerce européen. Rappelons aussi que les droits fiscaux sur les carburants pour moteurs, les automobiles, le tabac, le sucre, le vin en fûts, les fruits du Midi et le café brut forment à eux seuls plus de 60 pour cent du total des recettes douanières et qu'une diminution minime de ces droits peu développés peut déjà faire plus que compenser l'augmentation des nombreux droits protecteurs. En évaluant ce que seront les recettes douanières après la mise en vigueur du nouveau tarif, il faut donc, croyons-nous, se montrer modérément optimiste.

c. Suppléments de prix et autres contributions Les droits supplémentaires à affectation déterminée, qui sont perçus sur le beurre, les pommes de terre et le vin en fûts et qui servent à financer des mesures en faveur de l'agriculture du pays, ainsi
qu'à réduire les prix des produits agricoles, constituent déjà un phénomène extraordinaire en raison même du but qui leur est fixé. Juridiquement, ce sont cependant des droits de douane, perçus au moment ou la marchandise passe la frontière. Il en est autrement des suppléments de prix. Ceux-ci sont perçus non pas à la frontière, mais à l'intérieur de la ligne des douanes, sur les céréales et matières fourragères, les graisses et huiles comestibles, ainsi que sur leurs produits bruts et mi-fabriques. La perception est opérée par la «société coopérative suisse des céréales et matières fourragères», société de droit public constituée par les milieux du commerce, qui achète

584

les marchandises des importateurs et les revend en Suisse grevées du supplément de prix fixé par le Conseil fédéral. Le produit des suppléments de prix sur les matières fourragères sert aux buts prescrits dans la loi sur l'agriculture: encourager la culture des champs au moyen de primes de culture, soutenir les prix, abaisser ceux du colza et autres produits des champs et, dans la mesure où il reste un excédent, encourager le placement et l'exportation. Le produit des suppléments de prix sur les graisses alimentaires est utilisé pour soutenir le prix du lait, c'est-à-dire abaisser les prix du beurre du pays et éventuellement d'autres produits laitiers. En 1955, ces deux suppléments de prix ont atteint 26 et 4 millions.

Comme les graisses comestibles, le beurre importé est frappé, aux mêmes fins, d'une taxe qui est fonction de l'écart entre le prix de revient sur lequel le droit de douane a été payé et le prix de vente du beurre du pays abaissé à l'aide de subsides. Cette taxe de compensation des prix qui frappe le. beurre importé est perçue par la société coopérative de droit public «Butyra», investie du monopole de l'importation du beurre. Elle a produit 5 millions de francs en 1955.

Le «centime de crise», qui est prélevé sur le lait de consommation vendu et qui a été institué pendant les années «trente», s'est réduit depuis lors à un demi-centime par litre et a produit 3,8 millions en 1955. Avec la taxe sur la crème de consommation, instituée pendant la guerre, qui a produit 2,8 millions, et avec le droit de douane supplémentaire sur le beurre, ü sert à financer la caisse de compensation des prix du lait, qui fournit des subsides pour maintenir la marge commerciale du lait de consommation, afin de garantir que les prix restent bas, notamment dans les villes.

Enfin, il faut mentionner une taxe perçue sur les oeufs importés, dont le produit s'élève à environ 3 millions de francs et qui revient à la caisse de compensation du prix des oeufs, laquelle couvre les frais du ramassage des oeufs du pays pris en charge par les importateurs.

Le produit total de ces suppléments de prix et taxes analogues s'est élevé en 1955 à 62 millions de francs. La tendance générale étant de diminuer la charge imposée au consommateur plutôt que de l'augmenter, nous fixons ces recettes, dans les évaluations pour 1959
à 1963, au montant annuel moyen de 00 millions.

5. Les droits de douane sur les carburants Le nombre des véhicules à moteur (à quatre et à deux roues) s'est élevé de 121 000 en 1946 à 544 000 en 1955, En 1946, il y avait un véhicule à moteur pour 37 habitants, neuf années plus tard déjà, un pour 9 habitants.

Comme notre pays importe la plus grande partie des véhicules à moteur et tous les carburants, l'accroissement de la motorisation a augmenté en proportion les recettes douanières correspondantes, bien que les taux fussent restés les mêmes.

585 *

Les carburants pour moteurs sont frappés, sans changement depuis 1936, d'un droit de base s'élevant par 100 kg brut à 16 fr. 50 pour la benzine et à 6 francs pour l'huile Diesel. E s'y ajoute un droit supplémentaire de 10 francs par 100 kg brut pour les deux sortes dé carburants, de sorte que la charge totale par litre atteint environ 22,5 et 16,5 centimes. Pendant la durée du régime financier actuel, c'est-à-dire jusqu'à la fin de 1958, la moitié du produit doit être versée aux cantons. Durant cette période, sont suspendus les effets de l'arrêté fédéral du 21 septembre 1928 allouant des subventions aux cantons pour les routes ouvertes aux automobiles (1), qui assure aux cantons des subventions s'élevant à environ un cinquième du produit total des droits sur les carburants.

Les recettes provenant des droits sur les carburants ont augmenté d'une manière imprévue depuis la fin de la seconde guerre mondiale. De 1946 à 1955, elles sont devenues 3,8 fois plus grandes et ont passé à 164 millions de francs. Elles se sont ainsi accrues à peu près dans la même proportion que le chiffre des véhicules à moteur en circulation. Même si les petites voitures prennent toujours plus d'importance par rapport aux grosses voitures, on peut s'attendre, pour les années 1959 à 1963, que les droits sur les carburants continueront à augmenter annuellement de 5 pour cent ou 10 millions de francs. Pour ces cinq années, nous estimons, en moyenne, sur la base d'un produit de 210 millions en 1959, que les recettes d'alors s'élèveront à 230 millions.

Rappelons aussi, à cette occasion, les droits de douane sur les véhicules à moteur. Ha ont produit 42 millions en 1946 et 68 millions en 1955, c'està-dire 60 pour cent de plus. Mais, pendant la même période, le produit par unité a baissé de 1500 francs à un peu pins de 1000 francs. Ce fait est dû à l'accroissement des importations de voitures légères, qui paient en outre les droits à un taux moins élevé. Comme la tendance à acheter de préférence des voitures légères continue à se faire sentir, nous estimons le produit moyen des droits sur les véhicules à moteur, pour les années 1959 à 1963, à 80 millions de francs. Dans ce nombre sont comprises les recettes douanières provenant des pièces détachées et pneus, ainsi que de l'importation de cycles à moteur, qui atteignent selon
l'expérience environ un dixième des droits sur les automobiles.

6. L'imposition du tabac Le tabac est grevé d'un droit fiscal à l'importation, puis, à l'intérieur du pays, de l'impôt sur le tabac perçu sous la forme d'une taxe de fabrication, qui frappe aussi le tabac cultivé en Suisse, Cet impôt a été réorganisé dans les articles 113 à 153 de la loi du 20 décembre 1946 sur l'assurancevieillesse et survivants (2). En effet, selon l'article 34yuoter de la constiti BS 4, 1090.

(«) RS 8, 451, 490.

586

tution, la Confédération affecte à la grande oeuvre sociale de l'assurancevieillesse et survivants, outre sa part aux recettes provenant de l'imposition des eaux-de-vie, le produit total de l'imposition du tabac. Les produits du droit de douane et de l'impôt sur le tabac ont évolué comme il suit ces dernières années: Imposition du tabac 1949-1957 En millions de francs Années

1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 (») 1957 f1)

Droit de douane sur le tabac

44 47

46 47 49 48 48 48 48

Impôt sur le tabac

Total

63

107 116 118 119 124

69 72

72 75 75 79 75 79

123 127 123 127

f 1 ) Budget.

Ce tableau montre que l'imposition du tabac produit des recettes remarquablement constantes. Nous inscrivons à ce titre un total de 130 millions dans le plan des recettes, dont 50 millions pour le droit de douane et 80 millions pour l'impôt.

7. Les émoluments et les antres recettes La constitution ne contient pas de disposition qui autorise expressément la Confédération à percevoir des émoluments de ceux qui mettent à contribution les institutions publiques. Cependant, diverses lois, qui imposent à la Confédération des tâches spéciales, telles que la surveillance des agences d'émigration et des entreprises d'assurance privées, la protection de la propriété intellectuelle, la justice, etc., fixent des émoluments.

On considère en effet que, si le droit de légiférer dans un domaine particulier est accordé à la Confédération, elle doit pouvoir aussi instituer, pour les fonctions exercées dans ce domaine par les autorités fédérales, la perception de dédommagements gradués selon les frais qu'entraîné le travail des autorités, par exemple des émoluments d'entrée et de sortie, de chancellerie, de recherches.

Les émoluments et autres recettes ont atteint ces dernières années les montants suivants:

587 Compte 1954

Commissions de perception des douanes Emolument pour frais de participation à l'Union européenne de paiements Autres contributions aux frais . . .

Timbre BUT les quittances de douane .

Droit de statistique Autres émoluments Produits de ventes . . . . . . . .

Total

Budget Compte 1955 1966 Dû uiillioas de francs

Budget 1957

15

16

15

17

23 17 16 14 28 18 131

25 21 19 16 30 29 156

20 18 19 14 26 17 129

11 28 21 14 29 17 137

Si le service des paiements redevient libre, les émoluments pour frais de participation à l'Union européenne de paiements disparaîtront. En revanche, les recettes accessoires des douanes croissent parallèlement aux recettes douanières. Tout compte fait, on peut sans doute compter, pour les années à venir, que les «autres recettes» seront de l'ordre de 150 millions de francs.

III. Nouvelle délimitation constitutionnelle de recettes déjà inscrites de façon permanente dans la constitution 1. La taxe d'exemption du service militaire La taxe d'exemption du service militaire n'est pas un impôt prélevé en vertu de la souveraineté fiscale; c'est une contribution de remplacement fondée sur la souveraineté en matière militaire. L'assujettissement existe lorsque et dans la mesure où les obligations militaires ne sont pas remplies sous forme de service personnel.

La constitution actuelle réglemente la taxe militaire dans les articles 18, 4e alinéa, et 42, lettre e. La première disposition oblige la Confédération à édicter des prescriptions uniformes sur la taxe d'exemption du service militaire (l). L'article 42, lettre e, attribue à la Confédération «la moitié du produit brut de la taxe sur les exemptions militaires perçues par les cantons». D'après la législation d'exécution, on doit d'abord donner aux cantons, à titre de commission de perception, 8 pour cent du produit brut.

Des 92 pour cent qui restent, les cantons reçoivent la moitié, c'est-à-dire 46 pour cent; en fait, leur part au produit brut de la taxe s'élève donc à 54 pour cent ( 2 ).

(1) LF du 28 juin 1878 sur la taxe d'exemption du service militaire (RS 5, 156); règlement d'exécution du 26 juin 1934 (RS 5, 162); LF du 1er avril 1949 modifiant l'organisation militaire, article 2 (RO 1949, 1595).

( a ) Article 166 de l'organisation militaire (RS 5, 3); articles 113, 114 et 115 du règlement d'exécution du 26 juin 1934.

588

Cette réglementation est dépassée par l'évolution des choses. Il est évident aujourd'hui que le domaine militaire est du ressort de la Confédération ; c'est elle qui supporte la charge principale constituée par le financement de la défense militaire du pays. L'obligation de faire le service militaire existe en premier lieu envers la Confédération. C'est pourquoi la taxe remplaçant le service militaire doit revenir entièrement à la Confédération.

On accordera aux cantons, qui seront chargés comme jusqu'ici de percevoir la taxe, une commission de perception équitable d'un cinquième. Le partage actuel par moitiés a perdu sa justification intrinsèque. La réorganisation des finances fédérales est l'occasion propice pour adapter à la situation les articles de la constitution concernant la taxe militaire.

Nous avons l'intention de soumettre aux chambres cette année encore un message et un projet de loi sur la taxe d'exemption du service militaire.

La taxe doit être mise en accord avec les modifications survenues depuis 1878 dans le domaine militaire et adaptée aux circonstances sociales et économiques actuelles. Dans les messages du 22 janvier 1948 et du 20 janvier 1953 t1), nous avions encore soutenu l'opinion que la taxe militaire pourrait être développée et rapporter à l'avenir de notables recettes supplémentaires. Or, la réaction de l'opinion publique aux travaux préparatoires entrepris depuis lors pour la revision de la taxe a révélé que les nouvelles dispositions devront entraîner non pas une augmentation, mais une diminution de son produit.

H n'est pas facile de dire si les taux non modifiés depuis 1878 doivent être majorés en raison de la dépréciation de l'argent et du fait que la durée totale des services d'instruction imposés aux soldats a triplé depuis lors.

Pour en juger, il faut considérer que le service militaire, depuis qu'il y a compensation des pertes de gain, n'entraîne plus les mêmes sacrifices pécuniaires qu'avant 1939. Depuis la fin de la guerre, on n'a plus imposé de nouvelles obligations de service ayant quelque importance. Depuis qu'environ 125 000 hommes des services complémentaires (environ 30% des assujettis à la taxe) ont été équipés et appelés à des services d'instruction en partie considérables, il n'est pas admissible de continuer d'autre part à assimiler quant à la
taxe ces hommes et ceux qui sont impropres au service.

L'opinion publique réclame avec insistance un dégrèvement en faveur des citoyens suisses établis à l'étranger, la suppression de ^imposition des expectatives» et une meilleure mise en compte des services accomplis par tous les hommes assujettis à la taxe. Pour toutes ces raisons, il faut s'attendre à une diminution du produit à l'avenir.

On ne peut donc compter, après la revision législative en cours, sur un produit brut de la taxe supérieur à 15 millions. Déduction faite de la commission de perception cantonale d'un cinquième, il resterait à la Confédération un produit net de 12 millions de francs.

t1) FF 1948, I, 521 (tirage à part, 193); FF 1953, I, 140 (tirage à part, 40).

589 3. Los droits de timbre a. Le, régime en vigueur L'article ilbis, inséré dans la constitution en 1917, autorise la Confédération à percevoir des droits de timbre sur titres, quittances de primes d'assurance, effets de change et effets analogues, documents en usage dans les transports et sur d'autres documents concernant des opérations commerciales. La loi d'exécution (*) est entrée en vigueur le 1er octobre 1918, à l'exception des dispositions concernant .le droit de timbre sur les documents en usage dans les transporta, qui n'ont été applicables qu'à partir du l«r janvier 1922. En 1921 fut institué le droit de timbre sur les coupons ( 2 ).

La revision de 1927 (*) majora divers taux, limita les exonérations et prit certaines mesures pour empêcher que les droits ne soient éludés. En 1937, la législation en matière de droits de timbre dut être adaptée au code des obligations revisé (4). Les programmes financiers adoptés à partir des années «trente» (5) utilisèrent à fond les sources fiscales existantes dans le domaine des droits de timbre et en ouvrirent de nouvelles (majoration des taux du droit de timbre sur les coupons, institution d'un droit de timbre sur les participations en commandite, assujettissement des documents concernant des droits de copropriété sur créances hypothécaires et titres étrangers). Lorsque le taux de l'impôt anticipé fut porté de 15 à 25 pour cent à partir du 1er janvier 1945, on institua pour le droit de timbre sur les coupons, au lieu des taux jusqu'alors différenciés (actions: 6%; obligations: 4%), un taux uniforme de 5 pour cent et l'on majora à 2 pour cent le taux de 1,8 pour cent à l'émission des actions (s), Les droits de timbre fédéraux constituent, à l'exception du droit sur les documents en usage dans les transports, un impôt indirect sur la possession. D'après leur nature juridique, ce sont des impôts sur les transactions se rapportant à certaines opérations juridiques et économiques.

On est maintenant bien habitué aux droits de timbre et personne ne met en question leur maintien. Il n'y a guère contestation que pour le droit de timbre sur les coupons, au sujet duquel on demande soit son abolition, (*) LF du 4 octobre 1917 sur les droits de timbre (RS 6, 103).

(') LF du 25 juin 1921 concernant le droit de timbre sur les coupons (RS 6, 129).

(") LF du 22
décembre 1927 (RS 6, 133).

( 4 ) LF du 24 juin 1937 complétant et modifiant la législation fédérale sur les droits de timbre (RS 6, 168).

(s) AF du 13 octobre 1933 (RO 49, 859); AF du 31 janvier 1936 (régime financier de 1936; RO 52, 17); AF du 22 décembre 1038 (régime financier de 1939-1941, art. 34 à 40; RS 6, 39), prorogé par les ACF du 30 avril 1940 (art. 8; RO 66, 430) et du 31 octobre 1944 (art. 20; RS 6, 340), ainsi que par les AF du 21 décembre 1945 (régime financier de 1946-1949; RS 6, 50), du 21 décembre 1949 (régime financier de 1950 et 1951; RO 1949, 1913), du 29 septembre 1950 (régime financier de 1951-1954; RO 1960, 1507) et du 25 juin 1954 (régime financier de 1955-1958; RO 1954, 1347).

(') Articles 18 et 19 de l'ACF du 1« septembre 1943/31 octobre 1944 (RS 6, 329).

Feuille fédérale. 109e année. Vol. I.

41

590 soit au moins la réduction de son taux et certains adoucissements (privilège holding, privilège en faveur des petits rentiers).

Le produit des droits de timbre a été ces dernières années en constante augmentation. Dans le produit brut de 1955, qui s'élevait à 141 millions, le droit de timbre sur les coupons est compris pour 69,6 millions et, dans celui de 1956, qui s'élevait à 148 millions, pour 73,6 millions, ce qui fait pour chacune des deux années environ 50 pour cent.

b. Demandes présentées en vue de la révision constitutionnelle, La commission d'études pour les droits de timbre et l'impôt anticipé conclut dans son rapport (*) que les droits de timbre doivent en principe continuer à être perçus dans la même mesure et d'après la même procédure que jusqu'ici. Elle recommande, d'une part, d'instituer un nouveau droit de timbre sur les gains faits dans les loteries et, d'autre part, de supprimer le droit sur les documents en usage dans les transports, ou tout au moins d'en suspendre la perception jusqu'à ce que les transports de marchandises par terre (rail et route), par eau et par air soient imposés dans leur ensemble.

La revision des dispositions constitutionnelles sur les recettes de la Confédération donne l'occasion d'adapter à ces voeux, dans la mesure nécessaire, l'article 416is en vigueur. Nous proposons de spécifier, dans la disposition sur les droits de timbre, que la Confédération peut aussi prélever de tels droits sur les billets de loterie et sur les documents pour le transport de choses. En revanche, il convient de maintenir telle quelle la participation des cantons, actuellement de 20 pour cent, au produit net des droits de timbre (2). Le produit net restant à la Confédération pourrait s'élever en moyenne, pour les années 1959 à 1963, à 110 millions.

D'après la réglementation actuelle, les lots en espèces dépassant le montant de 50 francs qui échoient à l'occasion de loteries ou d'institutions analogues sont bien soumis à l'impôt anticipé, mais non à un droit de timbre fédéral. Ces lots en espèces sont des bénéfices provenant de participations à une institution importante, organisée en vue d'un bénéfice; leur assimilation aux intérêts d'obligations et aux dividendes d'actions est justifiée. Nous prévoyons donc d'instituer un droit de timbre sur les lots en espèces dépassant
50 francs qui échoient à l'occasion de loteries, etc.

H serait perçu au taux du droit sur les coupons et, comme ce dernier, retenu sur le montant versé au bénéficiaire (produit annuel présumé: 700 000 fr.). Cet impôt n'occasionnera aucune difficulté technique ni de nouvelles dépenses, car il peut être prélevé" en même temps que l'impôt anticipé maintenu sans modification. Nous n'envisageons pas de frapper d'un droit de timbre les billets de loterie à leur émission déjà.

(!) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 3, p. 59.

( 2 ) Voir chiffre VIII, ci-après.

591

Le droit de timbre perçu actuellement sur les documents en usage dans les transports est limité aux documents établis pour le transport des marchandises sur les lignes des chemins de fer fédéraux et des entreprises concessionnaires de chemin de fer et de navigation. Depuis l'institution du droit de timbre sur documents en usage dans les transports, la situation en ce domaine s'est modifiée de manière fondamentale. Le monopole du chemin de fer pour le transport des marchandises a été éliminé par l'automobile. Ainsi se pose la question de savoir si ce droit de timbre, qui ne grève que les transports par chemin de fer, doit être maintenu, aboli, ou étendu à tous les modes de transport de choses.

Dans un mémoire adressé le 31 mars 1950 au Conseil fédéral, le conseil d'administration des chemins de fer fédéraux a demandé de suspendre le droit de timbre sur les documents en usage dans les transports jusqu'à l'institution d'un impôt analogue sur le transport professionnel par véhicules à moteur et remorques. Le 22 juin 1954, le Conseil national a accepté un postulat qui invite le Conseil fédéral à examiner s'il n'y aurait pas lieu de supprimer le droit de timbre en question ou, le cas échéant, d'affecter son produit à des fins intéressant les chemins de fer. La commission pour les droits de timbre et l'impôt anticipé propose d'abolir le droit de timbre sur les documents en usage dans les transports, ou du moins de le suspendre jusqu'à ce qu'on ait trouvé une solution satisfaisante pour le moderniser.

Elle voit une possibilité de le faire en instituant un impôt sur les transports f1).

La demande d'établir la parité fiscale entre le rail et la route est justifiée. L'inégalité actuelle manque de fondement intrinsèque. On peut l'éliminer de deux manières, soit en supprimant le droit de timbre sur documents en usage dans les transports, de sorte que les transports par chemin de fer ne soient plus grevés d'aucun droit, soit en étendant l'imposition aux transports par route.

En enlevant à la Confédération la compétence qui lui appartient dans le domaine en question, l'abolition du droit de timbre fédéral sur les documents en usage dans les transports aurait pour conséquence que les cantons recouvreraient leur faculté antérieure de percevoir des droits de timbre sur les lettres de voiture (*). Avant l'institution
des droits de timbre fédéraux, 9 cantons frappaient d'un droit de timbre les documents de transport, y compris ceux des chemins de fer fédéraux. La suppression de la compétence fédérale constituerait donc un recul, qu'il faut éviter. En conséquence, l'extension du droit est la seule façon d'assurer la parité fiscale entre le rail et la route, ainsi que l'exclusivité de la compétence fédérale en la matière.

(*) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 3, p. 35s. et 56.

(") Voir l'article 416is, 1er alinéa, 2e phrase, de la constitution en vigueur et le chapitre Ier, article 41Ϋ«, 2e alinéa, du projet d'arrêté.

592 Mais il n'y a aujourd'hui aucune nécessité d'instituer un nouvel impôt du genre d'un impôt sur les transports. H reste donc à examiner si la perception du droit de timbre sur les documents en usage dans les transports ne devrait pas être suspendue jusqu'à nouvel ordre. Cette question, qui touche aussi les problèmes concernant la politique en matière de chemins de fer, devra être traitée en dehors de la revision des dispositions constitutionnelles concernant les finances fédérales.

c. Le droit de timbre sur les coupons II appartiendra aussi à la législation d'exécution de régler, en liaison avec une augmentation du taux de l'impôt anticipé, la réduction du droit de timbre sur les coupons qui frappe les titres suisses. Dans les critiques faites publiquement au droit de timbre sur les coupons, on allègue que la fortune placée en titres et le rendement qui en provient sont tellement imposés en Suisse que la charge spéciale du droit sur les coupons ne se Justine plus à une époque où l'intérêt baisse d'une manière générale. On relève que la situation a radicalement changé depuis l'institution de ce droit et que les revenus de capitaux frappés par lui ont perdu leur importance comme rente privilégiée. On dit aussi que le droit sur les coupons, en tant que moyen d'atteindre le revenu et la fortune soustraits au fisc, est dépassé par l'impôt anticipé, beaucoup plus efficace, et par l'amélioration de la procédure de taxation en matière d'impôts directs. Pour ces motifs, on trouve nécessaire de supprimer le droit sur les coupons ou du moins d'en réduire sensiblement le taux.

La commission d'études a exprimé l'opinion que le droit sur les coupons ne devrait être maintenu que si la Confédération ne perçoit pas d'impôt général sur le revenu ou si, malgré un tel impôt, elle ne peut se passer du produit du droit sur les coupons; le taux du droit, qui est actuellement 5 pour cent, devrait être fixé dans le premier cas à 3 pour cent et, dans le second, à 2 pour cent au plus (1).

Les objections faites au droit de 5 pour cent qui frappe les coupons de titres suisses ne manquent pas d'une certaine pertinence. Le taux de 5 pour cent, relevé considérablement au-dessus des taux primitifs par les programmes financiers, fait effectivement apparaître le droit sur les coupons moins comme un droit de timbre que comme
un impôt sur les revenus de capitaux. Mais ce fait n'oblige pas à conclure que le droit sur les coupons doit absolument être supprimé; il exige seulement que l'on en fasse de nouveau un impôt sur les transactions juridiques en en réduisant le taux de façon appropriée. Primitivement, le droit frappait d'un taux de 2 pour cent les coupons d'obligations et de 3 pour cent ceux des actions. Aujourd'hui, un taux uniforme de 3 pour cent paraît justifié. L'uniformisation des taux (!) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 3, p. 12, 15, 59.

593 applicables aux coupons des obligations et à ceux des actions est actuellement équitable, car le droit à l'émission pour les actions a été majoré depuis 1921 de 1,5 à 2 pour cent, tandis que, pour les obligations, il n'a passé que de 1,0 à 1,2 pour cent.

Le droit de timbre sur les coupons de titres étrangers (c'est-à-dire sur les coupons dont les débiteurs n'ont pas en Suisse leur siège ou leur domicile) reste sans changement, savoir 2 pour cent s'il s'agit d'obligations et 3 pour cent s'il s'agit d'actions. Il n'est pas question de réduire ce droit.

Sur la base du produit actuel du droit sur les coupons, qui s'élève à 70 millions de francs, il faudrait, si le taux du droit sur les coupons de titres suisses était réduit à 3 pour cent, s'attendre à une perte de recettes de 26 millions, dont 21 pour la Confédération et 5 environ pour les cantons.

La suppression complète du droit sur les coupons n'entre pas en ligne de compte, pour des motifs d'ordre ûscal et de politique fiscale. Elle aurait pour effet une perte de recettes d'environ 70 millions de francs, qu'il faudrait trouver ailleurs. La disparition du droit sur les coupons, à côté de la suppression envisagée de l'impôt complémentaire sur la fortune des personnes physiques en matière d'impôt pour la défense nationale, dégrèverait de plus de 100 millions de francs les possesseurs de fortune. Pour ces motifs,.

la proposition de supprimer le droit sur les coupons et de majorer d'autant l'impôt anticipé doit être repoussée. La perte nette de recettes, au cas où le droit sur les coupons serait ainsi inclus dans l'impôt anticipé, atteindrait annuellement 45 à 50 millions de francs.

d. Buts de la législation d'exécution Les changements et compléments apportés à la législation sur le timbre par le droit de nécessité pendant les années de crise et de guerre et dont la validité a été limitée jusqu'à la fin de 1958 par le régime financier de 1955 à 1958, doivent, dans la mesure où ils ont fait leurs preuves, être mis au point et introduits dans les dispositions concernant les droits de timbre ordinaires. On aura ainsi également la possibilité d'éliminer les inconvénients qui se font sentir depuis longtemps en raison de la complexité des nombreuses dispositions relatives aux droits de timbre, souvent modifiées, et l'on pourra réunir toute la matière
en une seule loi. Jusqu'à cette nouvelle loi sur les droits de timbre fédéraux, on maintiendra les dispositions concernant les droits de timbre extraordinaires fondées sur le régime financier de 1955 à 1958.

594 IV. Inscription dans la constitution, à titre permanent, d'impôts jusqu'ici limités quant à leur durée 1. L'impôt anticipé L'impôt anticipé est entré en vigueur le 1er janvier 1944 (1). A partir du 1er janvier 1945, le taux d'impôt, qui était d'abord 15 pour cent, a été porté à 25 pour cent. A la même date, l'impôt à la source pour la défense nationale a été supprimé, tandis qu'était instituée une amnistie fiscale obligatoire pour la Confédération, les cantons et les communes (3).

L'impôt anticipé est, de sa nature, un impôt perçu à la source sur les revenus de capitaux. Les personnes domiciliées en Suisse qui sont considérées du point de vue fiscal comme bénéficiaires de ces revenus ont droit à l'imputation ou au remboursement de l'impôt. Le possesseur de titres suisses qui est domicilié à l'étranger n'a pas droit au remboursement, sous réserve d'arrangements particuliers entre la Confédération et divers Etats étrangers en vue d'éviter les doubles impositions internationales.

Cet impôt est un moyen efficace pour lutter contre la fraude fiscale.

Il s'est introduit plus rapidement et plus aisément que l'on ne s'y attendait tout d'abord. Sa suppression n'est réclamée par personne, mais on a déjà demandé à plusieurs reprises que le taux soit majoré, afin de rendre l'impôt encore plus efficace. En 1955, les rentrées de l'impôt se sont élevées à 402 millions, dont il est resté à la Confédération un produit brut de 97 millions, après remboursement de 305 millions aux contribuables. En 1956, les rentrées brutes ont été de 424 millions, les remboursements de 305 millions et la partie restant à la Confédération de 119 millions.

L'impôt retenu sur les prestations d'assurance sur la vie, qui sert à garantir les droits du fisc en matière d'assurances, est entré en vigueur le 13 février 1945 (3). La réglementation de cet impôt dit de garantie s'écarte de celle de l'impôt anticipé en ce sens que l'assureur a en premier lieu l'obligation de déclarer la prestation imposable et, subsidiairement seulement, celle de retenir et verser l'impôt, dont le bénéficiaire de la prestation peut, à certaines conditions, demander le remboursement à la Confédération.

Comme l'impôt anticipé, l'impôt de garantie est un moyen de lutter contre la fraude fiscale et il est incontesté dans sa fonction et sa structure.

L'impôt de
garantie a rapporté à la Confédération 527 715 francs en 1955.

Ce produit relativement modeste montre clairement que l'impôt développe f 1 ) ACF du 1er septembre J 943/31 octobre 1944 (RS G, 329), prorogé par les AF du 21 décembre 1949 (régime financier de 1950 et 1951 ; RO 1949, 1913), du 29 septembre 1950 (régime financier de 1951 à 19S4; RO 1950, 1507) et du 25 juin 1954 (régime financier de 1955 à 1958; RO 1954, 1347).

(-) ACF du 31 octobre 1944 modifiant celui qui institue l'impôt anticipé, modifiant l'arrêté relatif à l'impôt pour la défense nationale et accordant l'amnistie fiscale à l'occasion, de l'institution de l'impôt anticipé (RO 60, 695, 702, 693).

(3) ACF du 13 février 1945 (RS 6, 347).

595

les effets préventifs qu'on en attendait, puisque la déclaration de la prestation est la règle.

Nous estimons, avec la commission d'études pour les droits de timbre et l'impôt anticipé (*), que la constitution doit être complétée par une disposition permettant de maintenir dans leur forme actuelle l'impôt anticipé et l'impôt retenu sur les prestations d'assurances. La nouvelle législation d'exécution devra tenir compte des expériences faites pendant la perception déjà assez longue de l'impôt ; il faudra de nouveau étudier comment l'on pourrait éventuellement simplifier encore la procédure de perception et de remboursement ; en outre, il y aurait lieu peut-être de revoir le taux d'impôt, en relation avec celui du droit de timbre sur les coupons.

On a réclamé à plusieurs reprises une forte majoration du taux actuel de l'impôt anticipé, qui s'élève à 25 pour cent. D'autre part, on soutient aussi que les taux de l'impôt anticipé et du droit de timbre sur les coupons ne devraient pas dépasser ensemble leur niveau actuel de 30 pour cent. La réduction à 3 pour cent du taux du droit sur les coupons, que nous pensons proposer dans le cadre de la future législation d'exécution, permettrait de majorer de 2 pour cent celui de l'impôt anticipé et de le porter à 27 pour cent. La commission d'études a considéré comme maximum une cbarge totale de 35 pour cent (a). Mais nous sommes d'avis qu'une élévation trop massive du taux d'impôt n'aurait pas pour conséquence l'amélioration espérée de la morale fiscale, ni un accroissement de recettes pour le fisc; il ne serait pas non plus exclu qu'elle entraînât des effets désavantageux pour les placements suisses sur le marché international des capitaux. Nous envisageons donc pour l'instant de maintenir à 30 pour cent la charge totale de l'impôt anticipé et du droit sur les coupons.

En revanche, nous n'envisageons pas d'instituer l'impôt anticipé que la commission d'études propose de prélever, au taux de 15 pour cent, sur les intérêts des obligations étrangères émises en Suisse (s). Lorsqu'il s'agit d'emprunts étrangers, les possibilités d'éluder l'impôt sont beaucoup trop grandes pour que la mesure dont il s'agit, qui occasionnerait des complications notables, puisse réellement être exécutée avec succès.

Comme l'impôt anticipé et l'impôt de garantie ont leur fondement
actuel dans le régime financier de 1955 à 1958, les dispositions en vigueur pour l'un et l'autre doivent être maintenues provisoirement jusqu'à la promulgation d'une nouvelle loi d'exécution.

Nous estimons à 125 millions de francs en moyenne par an les recettes futures provenant de l'impôt anticipé et de l'impôt retenu sur les prestations d'assurances.

(*) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 3, p. 37a. et 57s.

(') Ibidem, p. 38a.

(*) Ibidem, p. 40.

596

2. La compétence pour instituer des impôts de rétorsion Comme les relations de notre économie avec le monde entier deviennent toujours plus étroites, le danger augmente que des contribuables suisses (entreprises ou personnes privées) tombent dans l'orbite de souverainetés fiscales étrangères et se trouvent exposés à des prétentions d'ordre fiscal en contradiction flagrante avec les idées suisses traditionnelles sur les limites locales de la souveraineté dans le domaine des impôts et sur l'appartenance fiscale des personnes, des droits et des choses. Alors que le droit fiscal d'autres Etats montre manifestement des tendances extensives et se signale par une grande variété de règles de rattachement pour l'imposition (domicile, lieu de situation, établissement stable, lieu de travail, source du revenu), le droit fiscal de la Confédération et des cantons observe ordinairement, même envers l'étranger, les règles découlant de l'interdiction de la double imposition intercantonale. Cependant, il est possible de parer aux empiétements fiscaux de l'étranger, si l'on accorde à la Confédération la faculté d'ordonner des mesures fiscales de rétorsion. Il y a lieu d'envisager surtout l'imposition par rétorsion du revenu que des personnes domiciliées à l'étranger reçoivent de la Suisse et celle de la fortune mobilière que des personnes domiciliées à l'étranger possèdent en Suisse.

En vertu de l'article 6 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 (1), la Confédération peut actuellement instituer des impôts spéciaux à la charge de personnes domiciliées à l'étranger, afin de parer à des mesures fiscales prises par les Etats étrangers. Les projets constitutionnels de 1950 ( 2 ) et de 1953 (s) contenaient des dispositions correspondantes, qui n'ont jamais été contestées. Le but des impôts de protection et de rétorsion n'est pas d'ouvrir de nouvelles sources de recettes. Les expériences faites depuis 1951 dans les négociations internationales pour conclure des conventions en vue d'éviter les doubles impositions ont montré clairement que la seule existence d'une disposition constitutionnelle autorisant la perception de tels impôts peut déjà exercer un effet favorable. C'est pourquoi le présent projet reprend aussi une disposition de ce genre. Il est préférable qu'elle eoit rédigée dans le sens de celle que contenait le projet constitutionnel de 1953, plutôt que d'entrer dans les détails comme le fait l'arrêté concernant le régime financier actuel.

(!)

AF du 29 septembre 1950 (RO 1950, 1507); FF 1950, II, 421.

( 2 ) AF du 21 mare 1950 (art. 42M«, 1« al., lettre c, Cst.; FF 1950, I, 566, 700).

8 ( ) AF du 25 septembre 1953 (art. 426ts, 1er al., lettre d, Cst.; FF 1953, I, 101, III, 235).

597 Y. Maintien, pour un tempe limité, de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale 1. La place de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale dans le système fiscal de la Confédération a. Impôt sur le, chiffre

d'affaires

L'impôt sur le chiffre d'affaires doit-il être maintenu dans la future réorganisation constitutionnelle des finances fédérales ? Nous répondons par l'affirmative, comme le fait le mémoire remis le 7 septembre 1956 par le professeur Theo Keller au département des finances et des douanes (1).

L'impôt sur le chiffre d'affaires constitue une source abondante de recettes, au produit de laquelle la Confédération ne peut renoncer. Vu ses taux peu élevés et la manière particulière dont il est perçu, o:n le sent à peine. Il se signale par une résistance relativement grande aux effets des crises, tant qu'il dispose d'une large base. Mais l'impôt sur le chiffre d'affaires ne doit pas être dépouillé de son caractère d'impôt sur la consommation par des extensions trop considérables de la Uste des marchandises exonérées et devenir ainsi un simple impôt sur les biens d'investissement. La liste actuelle a des effets dégressifs en faveur des personnes à petit revenu et des grandes familles. On tient compte ainsi très largement des points de vue sociaux; c'est à la progression en matière d'impôts directs qu'il appartient d'atteindre plus fortement la capacité économique plus considérable des personnes à revenu élevé.

C'est pourquoi l'on peut sans difficulté, du point de vue de la politique financière et sociale, faire une place à l'impôt sur le chiffre d'affaires dans l'ensemble des mesures fiscales de la Confédération, des cantons et des communes, en tenant compte de la structure des impôts sur le revenu et sur la fortune.

6. Impôt pour la défense nationale La concurrence de l'impôt fédéral direct et des impôts cantonaux sur le revenu et sur la fortune existe depuis 40 ans, avec une interruption d'une année (1933). Pendant cette période, la Confédération a perçu les impôts directs suivants: Premier impôt de guerre, 1916/1917; Nouvel impôt de guerre extraordinaire, 1920-1932; Contribution de crise, 1934-1940; Impôt pour la défense nationale, depuis 1941 ; Impôts sur les bénéfices de guerre, 1915-1920 et 1939-1946; Sacrifice pour la défense nationale, 1940 et 1945.

(') Publications concernant la réforme des financée fédérales, brochure n° 2a.

598

Le peuple et les cantons ont approuvé cinq fois la perception d'impôts fédéraux directs de durée limitée. Il s'agissait des deux impôts de guerre (1915 et 1919), de la contribution de crise (1938) et de l'impôt actuel pour la défense nationale (prévu en 1950 et 1954 dans les régimes financiers de 1951-1954 et de 1955-1958).

A la perception d'impôts directs par la Confédération, on a toujours objecté que la constitution de 1874 n'a pas prévu de tels impôts et qu'au contraire, dans son article 3, elle a réservé tacitement aux cantons le domaine de l'imposition directe, n'autorisant ainsi la Confédération qu'à percevoir des impôts indirects (droits de douane, droits de timbre, etc.). Il est exact que, de 1848 à 1915, donc pendant 67 ans, la Confédération s'en est tirée sans impôt direct et qu'elle a pu couvrir à l'aide des impôts indirects les besoins financiers découlant des tâches qui lui étaient confiées de façon permanente par la constitution. Mais il est tout aussi évident que la Confédération a perçu des impôts directs pendant 40 ans et que, de ce fait, ni la structure federative de la Confédération suisse, ni la souveraineté propre des cantons n'ont été victimes de la centralisation. On ne pourrait guère prétendre sérieusement que l'impôt fédéral direct ait sensiblement diminué les recettes que les cantons et les communes tirent de l'impôt sur le revenu et sur la fortune ou qu'il ait influencé défavorablement le développement des réglementations fiscales cantonales.

Mais, dans les circonstances présentes, la question de savoir s'il faut ou non percevoir un impôt fédéral direct est surtout d'ordre politique. Pour tenir compte des objections, le département des finances et des douanes a fait étudier la possibilité de délimiter la compétence entre la Confédération et les cantons dans le domaine des impôts directs et mis en discussion publique, en juillet 1956, le projet ad hoc d'un impôt fédéral dû par les personnes morales (l). La réaction négative des autorités, partis et associations invités à donner leur avis, celle aussi de l'opinion publique, ainsi que les consultations ultérieures, ont cependant montré de toute évidence qu'une solution sans impôt fédéral direct serait aujourd'hui, du point de vue politique, aussi peu réalisable qu'en 1950, lorsqu'une tentative de remplacer par des
contingents d'argent cantonaux l'impôt fédéral direct dû par les personnes physiques échoua en votation populaire. Nous avons donc dû nous décider à proposer de nouveau l'impôt pour la défense nationale à côté de l'impôt sur le chiffre d'affaires. Ainsi donnons-nous suite aux demandes des milieux qui estiment que le peuple et les cantons n'admettraient pas l'impôt sur le chiffre d'affaires si l'on ne percevait pas en même temps un impôt direct.

Comme nous l'avons exposé, les effets néfastes que les adversaires de l'impôt fédéral direct attribuent à ce dernier ne se sont pas produits. Si l'on fait preuve de mesure dans l'établissement de l'impôt pour la défense (l) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n« 1.

599 nationale, notamment du tarif, il pourrait, semble-t-il, être reconnu comme acceptable dans les milieux qui s'y opposent.

2. Limitation de la faculté de percevoir l'impôt sur le chiffre d'affaires et l'impôt pour la déïense nationale Afin de faciliter une entente sur le terrain politique, nous proposons de limiter quant à l'objet et quant au temps la faculté de percevoir l'impôt pour la défense nationale, ainsi que l'impôt sur le chiffre d'affaires.

a. Limitation de la durée à douze, ans Considérant la forte résistance que rencontre l'idée d'un impôt fédéral direct permanent et le fait que des forces politiques importantes subordonnent la perception d'un impôt sur le chiffre d'affaires à celle d'un impôt fédéral direct, nous estimons qu'il faut, dans l'intérêt d'une entente, renoncer à donner à la Confédération une compétence fiscale illimitée dans le domaine de ces deux impôts principaux. C'est pourquoi nous proposons, d'une manière analogue à la solution adoptée par les chambres dans l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (1), que la disposition constitutionnelle donne à la Confédération pour douze ans seulement, c'est-à-dire de 1959 à 1970, la faculté de percevoir un impôt sur le chiffre d'affaires et un impôt pour la défense nationale. Ainsi, le souverain aura la possibilité de se décider de nouveau plus tard s'il veut et, le cas échéant, sous quelle forme, maintenir les deux impôts.

Nous soulignons que cette limitation, singulièrement quant à la durée, ne correspond pas au but que nous nous étions tout d'abord proposé, car une grande partie des dépenses fédérales ne demeurera ainsi couverte que par des recettes de durée limitée. Si cependant nous nous résignons à une limitation, ce n'est qu'avec de sérieuses hésitations et uniquement pour améliorer les chances de réussite du présent projet, 6. Taux maximums Pour les motifs politiques exposés ci-dessus, nous proposons, dans le cas des deux impôts, de prévoir aussi des garanties constitutionnelles quant aux taux maximums et quant aux minimums imposables. Les taux maximums, qui correspondent pour l'essentiel aux taux actuels non réduits de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale, donnent l'assurance que les nouvelles lois d'exécution ne dépasseront pas les charges maximums actuelles de l'impôt sur le chiffre
d'affaires et ne pourront excéder celles de l'impôt pour la défense nationale que dans des limites étroites, fixées d'avance. H faut préciser en outre que ce sont là des charges maximums qui ne doivent être atteintes qu'en cas de nécessité.

f 1 ) FF 1953, III, 235.

600

A cet effet, pendant la période transitoire, c'est-à-dire du 1<*T janvier 1959 jusqu'à l'entrée en vigueur des nouvelles lois d'exécution, on accordera, par rapport à la réglementation actuelle, des allégements consistant à baisser les taux au-dessous des charges maximums admissibles et, en matière d'impôt pour la défense nationale, à établir les minimums exonérés à un niveau en partie plus élevé que ne le prescrit la constitution. Si la situation reste la même, il serait même possible d'envisager plus tard certains autres allégements dans les nouvelles lois d'exécution.

3. L'impôt sur le chiflre d'affaires a. Régime en vigvoeur L'impôt sur le chiffre d'affaires est perçu depuis le 1er octobre 1941 (1).

Etabli du point de vue juridique comme un impôt sur les transactions, il a, économiquement, le caractère d'un impôt sur la consommation qui frappe la consommation de marchandises sur territoire suisse. Il est perçu principalement auprès des commerçants et fabricants assujettis en qualité de grossistes sur leurs livraisons aux détaillants ou aux consommateurs du pays (l'exportation est exonérée). Comme complément, on impose aussi la consommation particulière des grossistes, l'importation des marchandises et l'acquisition de produits naturels du pays par des non-grossistes. Les transactions entre grossistes sont franches d'impôt ; la charge fiscale d'autres transactions antérieures peut être compensée par le grossiste, de sorte que la marchandise, dans son passage jusqu'au consommateur du pays, n'est ordinairement grevée de l'impôt que pour une seule transaction (principe de l'imposition à une phase). En graduant les taux d'impôt pour les livraisons aux revendeurs et les livraisons aux consommateurs proportionnellement à la marge commerciale moyenne, on obtient que le niveau de la charge fiscale pour le consommateur ne dépende pas en général du fait que l'impôt est perçu à l'échelon du gros ou à celui du détail. Le taux normal de l'impôt, depuis le 1er janvier 1943, est de 4 pour cent s'il s'agit de chiffres d'affaires au détail et de 6 pour cent s'il s'agit de chiffres d'affaires en gros, après avoir été fixé, de 1941 à la fin de 1942, à 2 et 3 pour cent. Les boissons non alcooliques, certains savons et poudres à lessive, les combustibles, les plantes vivantes et les fleurs, ainsi que les matières
auxiliaires les plus importantes pour l'agriculture, sont frappés d'un impôt réduit de 2 et 2,5 pour cent. Selon l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 ( 2 ), tous les montants d'impôts calculés d'après les taux ci-dessus sont réduits de 10 pour cent à partir du 1er janvier 1956. Le gaz, l'eau, l'électricité, le pain et les céréales à ense(!) ACF du 29 juillet 1941 (RS 8, 176), modifié par les AF du 20 décembre 1950 (EO 1950, 1511), du 22 décembre 1954 (BO 1954, 1349) et du 21 décembre 1905 (KO 1955, 1210), prorogé par les régimes financiers de 1950 et 1951 (BO 1949, 1913), de 1951 à 1954 (RO 1950, 1507) et de 1955 à 1958 (RO 1954, 1347).

(ä) KO 1955, 1210.

601 mencer, les comestibles et une série d'autres denrées alimentaires, ainsi que les journaux et les revues, sont expressément exonérés de l'impôt.

L'impôt sur le chiffre d'affaires a produit 541 millions en 1955 et 550 millions en 1956.

o. Demandes présentées en vue de la révision constitutionnelle La commission d'études pour l'impôt sur le chiffre d'affaires et d'autres impôts sur la consommation est arrivée à la conclusion que la méthode actuelle de perception (impôt à phase unique selon le système des grossistes) a fait ses preuves. Elle pense que cette méthode, à condition de subir des modifications assez profondes (augmentation importante des recettes, élargissement considérable des exceptions à l'imposition ou adaptation de courte durée des taux d'impôt à de nouveaux besoins financiers), est celle qui est la plus appropriée aux conditions de la Suisse (1). Cette opinion est généralement approuvée.

Sous le régime actuel, le traitement appliqué aux travaux dans la branche de la construction ne peut toutefois encore satisfaire. Les travaux exécutés sur des choses mobilières (meubles au sens du code civil) sont imposables entièrement, quelle que soit la dépense de matériel. Or, pour les travaux exécutés sur des constructions et des immeubles, l'impôt sur le chiffre d'affaires n'est calculé que d'après la valeur du matériel au moment de son incorporation au bâtiment ou au terrain. Il s'en est suivi des difficultés de discrimination et des inégalités de charge, qui ont certes pu être atténuées un peu par les règlements à forfait que l'administration a institués d'entente avec la branche (mise en compte des salaires dits d'incorporation), mais n'ont pu être éliminées. Comme la commission d'études l'a exposé dans son rapport et comme le professeur Keller l'a confirmé dans son mémoire (a), le mieux serait d'assimiler les travaux exécutés sur des constructions et des terrains à ceux qui sont exécutés sur des biens meubles et d'instituer des taux d'impôt uniformes pour tous les chiffres d'affaires non exonérés. Combinée avec la réduction des taux actuels, l'unification des taux aurait, il est vrai, pour conséquence, par rapport à la réduction .générale selon la réglementation en vigueur, d'augmenter la charge dans certains secteurs de la construction, même si elle assurait des dégrèvements un peu
plus grands sur tous les autres chiffres d'affaires. Sans déclencher des conséquences fâcheuses du point de vue social, on ferait ainsi un pas vers la simplification, à laquelle il est particiilièrement nécessaire de tendre en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires. Mais, ici encore, nous nous imposons une certaine réserve, afin de favoriser la conciliation.

(') Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 2, p. 15.

( a ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 2, p. 29 à 33, et brochure n° 2o, p. 16.

602

Les travaux préparatoires ont montré en effet qu'une augmentation partielle de la charge frappant les chiffres d'affaires dans le domaine de la construction ne serait pas du tout comprise ni acceptée par les milieux intéressés, à un moment où le taux normal déjà réduit (4 et 6%, moins un dixième) doit encore être diminué. On approuve cependant les efforts tendant à la simplification et à l'élimination des inégalités dans la branche de la construction, ainsi que la création de la base constitutionnelle nécessaire à cet effet (art. 41 ter, 1er al., lettre a). D'après cette disposition, la Confédération pourra assimiler aux travaux exécutés sur des biens meubles ceux qui sont exécutés sur des constructions et des terrains (à l'exception de la culture du sol aux fins de la production naturelle, qui doit continuer à être exonérée). Il appartiendra à la législation d'exécution de faire usage de cette faculté de manière plus ou moins étendue pour obtenir les simplifications à réaliser dans le domaine de la construction; cependant, ce n'est que d'entente avec les milieux des contribuables intéressés que l'on envisagera d'adapter les charges aux taux usuels pour les biens meubles.

Bien que la structure de l'impôt relève en principe de la législation d'exécution, qui est soumise au referendum facultatif, nous croyons qu'il convient de donner des garanties constitutionnelles au sujet des taux maximums et de la liste des marchandises exonérées (art. 4.1 ter, 2e al.).

Les taux maximums prévus, de 4 et 6 pour cent, correspondent aux taux normaux actuels non réduits. Par rapport aux taux de 3% et 5 pour cent proposés pour le régime transitoire du 1er janvier 1959 jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi d'exécution (art. 7, 2e al, lettre a, des dispositions transitoires), ces taux maximums laissent au législateur une certaine liberté pour adapter l'impôt au cas où les besoins financiers augmenteraient; la possibilité d'une majoration est de 20 pour cent par rapport à la charge prévue pour la période transitoire. Ainsi l'on tient sans doute suffisamment compte, en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, des fluctuations possibles des besoins financiers pendant douze ans.

D'après les principes rappelés par la commission d'études et dans le mémoire du professeur Keller quant à la neutralité en matière
de concurrence et quant à la simplicité de l'impôt sur le chiffre d'affaires, il faut que cet impôt continue à être perçu sur la base la plus large et à des taux autant que possible uniformes et modérés (l). On renoncera donc à graduer davantage les taux, ainsi qu'à élargir la liste des marchandises exonérées, et en tout cas on ne touchera pas à l'imposition uniforme des groupes de marchandises actuellement soumises aux taux de 4 et de 6 pour cent.

La liste dea marchandises franches d'impôt ayant déjà été étendue à tous les comestibles, il serait au surplus faux de penser que l'impôt sur let1) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 2, p. 16, 34s. et 41s,; brochure n° 2a, p. 15e.

603

chiffre d'affaires pourrait être amélioré notablement du point de vue social si l'on exonérait de nouvelles marchandises, par exemple en libérant, comme cela se demande toujours, les livres, les médicaments, les textiles, certaines pièces d'habillement ou ce qu'on appelle les articles indispensables d'usage quotidien. Il est impossible de trouver une définition et délimitation satisfaisante des marchandises indispensables. La situation est tellement différente d'un consommateur à l'autre que la même marchandise peut être indispensable au premier et constituer une dépense de luxe pour le second.

En outre, de nouvelles difficultés de délimitation et inégalités de charge se produisent en raison de la variété des marchandises offertes pour satisfaire à des besoins identiques ou analogues et en raison du fait qu'un matériel identique ou analogue est utilisé aux fins les plus diverses. De telles exonérations en entraîneraient d'autres, par une sorte de réaction en chaîne, à laquelle on ne pourrait mettre fin, parce qu'il s'ensuivrait toujours de nouvelles inégalités. Ce fait s'est déjà produit lorsque la liste des marchandises exonérées, primitivement beaucoup plus restreinte, fut étendue à toutes les denrées alimentaires de première nécessité ( x ). Il s'ensuivit, dans la branche de la boulangerie et de la pâtisserie, des inégalités de charge que l'Assemblée fédérale crut pouvoir éliminer, contre l'avis du Conseil fédéral ( 2 ), en exonérant les boulangers, les pâtissiers et les fabriques de chocolat de l'assujettissement en qualité de grossistes (3). Malgré cela, il fallut étendre la liste, six mois plus tard, à tous les comestibles, sans tenir compte de la mesure dans laquelle ils sont indispensables (4). On devrait s'attendre à une même évolution, allant jusqu'à l'exonération de marchandises ayant un caractère de luxe évident, si par exemple on libérait les objets d'habillement ou les articles dits d'usage quotidien. Les conséquences s'étendraient ici à un domarne beaucoup plus vaste que celui des denrées alimentaires et affaibliraient l'impôt d'une manière extrêmement dangereuse en lui enlevant une substance indispensable à son maintien et à son mode actuel de perception. Plus la base de l'imposition est étroite, plus l'impôt est sensible aux effets des crises; plus aussi doit-on grever fortement
les marchandises non exonérées, afin d'obtenir le même produit, et plus enfin deviennent aigus les problèmes de la délimitation et prononcées les inégalités de charge.

La liste des marchandises franches d'impôt ne doit donc pas être étendue à des articles qui sont soumis actuellement aux taux normaux de 4 et 6 pour cent. Elle ne doit pas non plus être restreinte, mais exonérer comme jusqu'ici le gaz, l'eau, l'électricité, le pain et les céréales pour l'ensemencement, les produits comestibles considérés comme denrées alimentaires, le (!) AF du 21 décembre 1949 (régime financier de 1950 et 1951; RO 1949, 1913) et ordonnance n° 9 du département fédéral des finances et des douanes, du 21 décembre 1948 (RO 1049, 1948).

( 2 ) Message du 21 avril 1950 (FF 1950, I, 908).

(») Arrêté de l'Assemblée fédérale du 22 juin 1950 (RO 1950, 599).

( 4 ) AP du 20 décembre 1950 (RO 1950, 1507).

604

sel de cuisine, le lait, le café, le thé, le cacao, le bétail, la volaille, les poissons, ainsi que les journaux et revues. En revanche, il faut laisser subsister la possibilité d'étendre la liste aux marchandises actuellement frappées des taux spéciaux de 2 et 2,5 pour cent (boissons sans alcool, divers savons et produits pour lessives, combustibles, plantes vivantes et fleurs, ainsi que certaines matières auxiliaires pour l'agriculture). La législation d'exécution décidera si et dans quelle mesure on peut le faire. L'exonération de l'une ou l'autre de ces marchandises ou de quelques groupes d'entre elles, par exemple des matières auxiliaires pour l'agriculture ou des combustibles, pourrait s'opérer, contrairement à la libération de marchandises soumises à l'imposition normale à 4 et 6 pour cent, sans que se posent en tout cas des problèmes spéciaux de délimitation et que se produisent des inégalités dans la situation du point de vue de la concurrence.

Lorsque des marchandises sont soustraites à l'imposition uniforme pour être frappées de taux plus élevés que les taux normaux, il s'ensuit aussi des difficultés de délimitation, un surplus de travail permanent pour les contribuables et des inégalités de charge. C'est pourquoi nous estimons juste de renoncer à maintenir l'impôt sur le luxe (voir chiffre VI, 3, ci-après), mais aussi de ne pas l'inclure dans l'impôt sur le chiffre d'affaires. Les taux maximums prévus interdisent cette charge supplémentaire. C'est en matière d'impôt pour la défense nationale, mieux que dans un impôt sur la consommation, que l'on peut tenir compte du besoin d'adapter davantage les mesures fiscales aux nécessités sociales, en particulier d'imposer une charge relativement plus forte aux revenus élevée.

Pour ces motifs, nous proposons de limiter les taux d'impôt (art. 41 ter, 2e al., lettre a) et de déclarer inchangeable la liste des marchandises exonérées, à laquelle on pourrait au plus ajouter les marchandises actuellement frappées des taux réduits de 2 et 2,5 pour cent (art. 41 ter, 2e al., lettre 6).

c. Réglementation jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi concernant l'impôt sur le chiffre d'affaires Pour des raisons de temps, il ne sera pas possible que la loi d'exécution de la nouvelle disposition constitutionnelle concernant l'impôt sur le chiffre d'affaires
entre en vigueur à l'expiration de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958, c'est-à-dire le 1er janvier 1959. C'est pourquoi l'impôt actuel sur le chiffre d'affaires doit être maintenu en principe jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi d'exécution. C'est là un avantage, en ce sens que l'on ne préjuge pas la législation d'exécution et que l'on évite des discussions oiseuses sur la structure définitive de l'impôt pendant les délibérations concernant le projet constitutionnel.

Le niveau actuel des recettes fédérales permet cependant de justifier et de juger indiquée une certaine réduction du produit de l'impôt sur le

605

chiffre d'affaires déjà pour la période transitoire. D'une part, la Confédération ne doit pas prélever plus d'impôts que ne l'exigent ses besoins financiers ; d'autre part, le produit de l'impôt pour la défense nationale doit aussi être réduit de manière appropriée, par rapport à la réglementation actuelle, à partir du 1er janvier 1959.

En matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, la forme de dégrèvement la plus simple pour lea contribuables, déjà en période transitoire, consiste à réduire encore les taux normaux de 4 pour cent s'il s'agit de livraisons au détail et de 6 pour cent s'il s'agit de livraisons en gros (déjà réduits à 3,6 et 5,4%) en les ramenant à 3% et 5 pour cent. Le changement qui s'ensuit pour les contribuables facilite le calcul de l'impôt par rapport à la réglementation de la réduction actuelle (3%% = 1/30, 5% = 1/ao de la contre-prestation imposable).

On aurait pu aller plus loin dans la réduction des taux d'impôt, si l'on avait adapté en même temps la charge des travaux exécutés sur les constructions à celle des travaux exécutés sur les biens meubles, ce qui semble aujourd'hui impraticable pour les raisons exposées ci-dessus. En revanche, les représentants de la branche de la construction ont accepté que, pendant la période transitoire, les transactions consistant en l'union de marchandises avec des constructions ou des terrains continuent, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi d'exécution, à être grevées des taux actuels réduits. On épargne ainsi aux contribuables de cette branche des changements pendant la période transitoire et l'on n'empêche pas des simplifications ultérieures, Les taux diminués de 2 et 2,5 pour cent, y compris la réduction actuelle (à 1,8 et 2,25%) doivent aussi être maintenus sans changement pendant la période transitoire. Cos charges sont déjà minimes; si l'on accordait encore une réduction supplémentaire proportionnelle à celle des taux normaux, on causerait à ceux qui font le commerce des marchandises en question ou qui les fabriquent des dérangements disproportionnés aux effets de la réduction pour les consommateurs.

La réglementation transitoire prévue pour l'impôt sur le chiffre d'affaires (voir ch. II Aï1; art. 7, 2e al., des dispositions transitoires) aurait en 1959 pour conséquence, par rapport à la réglementation en vigueur sans la réduction
de dix pour cent, une perte de recettes que l'on peut évaluer à 95 millions de francs et, par rapport à la réglementation actuelle avec réduction, à 30 millions de francs. Pour les années 1959 à 1963, nous comptons d'ailleurs que le produit moyen de l'impôt sur le chiffre d'affaires s'élèvera à 585 millions.

Feuille fédérale. 109e année. Vol. I.

42

606 4. L'impôt pour la défense nationale a. Régime en vigueur L'impôt pour la défense nationale (*) a remplacé, à partir du 1er jan.

vier 1941, la contribution de crise ( 2 ) perçue de 1934 à 1940. Il est fixé et perçu par les cantons sous la surveillance de la Confédération et il comprend des impôts sur le revenu et la fortune des personnes physiques, sur le bénéfice net et le capital propre des sociétés anonymes, sociétés en commandite par actions et sociétés à responsabilité limitée, sur le rendement net et la fortune des sociétés coopératives, sur le revenu et la fortune des autres personnes morales, ainsi qu'un impôt spécial sur la partie des ristournes et rabais pour achats de marchandises qui excède 5 pour cent du prix des marchandises. L'arrêté du 21 décembre 1955 (3) a réduit, pour les années 1955 à 1958, de 10 à 40 pour cent les impôts dus par les personnes physiques et de 10 pour cent les impôts dus par les personnes morales, ainsi que l'impôt sur les ristournes et rabais. Le dégrèvement total résultant de cette réduction peut être évalué à 80 millions de francs ; Produit brut de l'impôt pour la défense nationale (Moyenne des années 1053-1954 et 1955-1956) En millions de francs

Impôt sur le

Catégories de contribuables

Personnes physiques Sociétés à base de capitaux . . . .

Sociétés coopératives Autres personnes morales

Impôt BUT les revenu, Impôt sur la le bénéfice net fortune ristournes Total ou le capital et rabais ou le rendement net 1855 1953 1955 1953 1955 1953 1953 1956 et 1954 et 1956l1) et 1954 et!956(1) et 1954 etl956H ot 1954 et 1966l1)

208,2

170,0

45,6

36,0

0,0

10,7

11,6 1,2

0,1 0,8

0,1 0,9

3,2

·--

52,0

0,9

-- 1,0

84,7 3,2

92,1

3,4

1,1

1,3

1,5

Total 297,4 (') Résultats provisoires.

267,0'

2,9 60,3

1

253,8

206,0

95,5 5,1

103,8 5,5

4,7 4,2 358,6 320,0

f 1 ) ACF du 9 décembre 1940/31 octobre 1944/11 octobre 1949 (RS 6, 352, 402; RO 1949, 1532), AF du 20 décembre 1950 (RO 1950, 1511), du 22 décembre 1954 (RO 1954, 1349) et du 21 décembre 1955 (RO 1965, 1210). La durée de validité de l'arrêté concernant l'impôt pour la défense nationale a été prorogée successivement jusqu'à la. fin de 1958 par les régimes financiers de 1950 et 1951 (KO 1949, 1913), de 1951 à 1954 (BO 1950, 1507) et de 1955 à 1958 (RO 1954, 1347).

(*) AF du 13 octobre 1933 (RO 49, 859); ACF du 19 janvier 1934/16 décembre 1938 (RO 50, 49; 54, 839).

( a ) AF du 21 décembre 1955 (RO 1955, 1210) et ACF du 28 décembre 1955 (RO 1965, 1212).

607 les personnes physiques y participent pour 68 millions et les personnes morales pour environ 12 millions. En moyenne, pendant les années fiscales déterminantes de la 7e et de la 8e période de l'impôt, savoir 1953 et 1954, 1955 et 1956, l'impôt pour la défense nationale a rapporté les produits bruts indiqués dans le tableau de la page précédente.

Sur le rendement brut annuel moyen de 358,6 millions en 7e période et de 320,0 millions en 8e période, les cantons ont reçu une part de 30 pour cent, c'est-à-dire environ 108 millions en 7e période et environ 96 millions en 8e période.

b. Possibilités de délimiter la compétence entre la Confédération et les cantons dans le domaine des impôts directs Puisque, pour des raisons de politique financière et fiscale, on ne peut renoncer à percevoir un impôt direct modéré si l'on maintient et inscrit dans la constitution un impôt sur le chiffre d'affaires, il reste à examiner si et comment l'on peut éviter la superposition actuelle des impôts fédéraux, cantonaux et communaux sur le revenu et la remplacer par une délimitation nette des domaines réservés à la compétence de la Confédération et de ceux qui appartiennent aux cantons et aux communes. Cette répartition de la compétence pour percevoir des impôts directs pourrait se faire soit d'après les objets imposables, sous forme d'un impôt fédéral sur les revenus de capitaux, soit d'après les sujets de l'imposition, sous forme d'un impôt fédéral dû par les personnes morales.

Si l'on voulait partager cette compétence d'après les objets imposables, il faudrait attribuer à la Confédération l'imposition des revenus de capitaux mobiliers soumis au droit de timbre fédéral sur les coupons et à l'impôt anticipé (impôt fédéral sur les revenus de capitaux) et laisser aux cantons l'imposition des autres revenus et de la fortune. Comme un tel impôt fédéral sur les revenus de capitaux ne comporterait pas de possibilités d'imputation et de remboursement, il serait simple sans doute, mais injuste et insupportable dans ses effets, comme on l'a déjà exposé dans le message du 22 janvier 1948 (1). Donc, pour remplacer l'impôt fédéral actuel pour la défense nationale, l'impôt sur les revenus de capitaux n'entre pas en ligne de compte et il n'y a pas d'autre forme permettant de répartir d'après les objets imposables la compétence
en matière d'imposition entre la Confédération et les cantons. Dans les discussions qui ont eu lieu jusqu'ici, on n'a d'ailleurs plus présenté de propositions dans ce sens.

Comme la répartition de la compétence entre la Confédération et les cantons dans le domaine des impôts directs est l'un des points principaux que lé législateur fédéral doit avoir à coeur, mais qu'un partage selon les (l) FF 1948, I, 486; tirage à paît, 158.

608

objets imposables n'est pas praticable, le département des finances et des douanes a examiné avec un soin particulier si l'on ne pouvait faire ce partage, d'après les sujets de l'imposition, en attribuant exclusivement à la Confédération l'imposition des personnes morales, avec participation des cantons au produit de l'impôt, en laissant en revanche exclusivement aux cantons et aux communes l'imposition des personnes physiques. La commission d'études qui a été chargée d'examiner le projet d'un impôt fédéral dû par les personnes morales sans considération des autres possibilités de solution (!) estimait, après en avoir pesé les avantages et les inconvénients, que l'idée d'un tel impôt fédéral est en principe acceptable et techniquement réalisable; elle recommandait de la poursuivre dans les travaux préparatoires du département. Elle évaluait le rondement maximum de cet impôt à 140 millions pour la Confédération. Les cantons auraient reçu des centimes additionnels fixes s'élevant à 200 pour cent de la part fédérale, ce qui leur aurait rapporté 280 millions, c'est-à-dire 20 millions de moins que les impôts cantonaux et communaux actuels qui frappent les personnes morales. De ces 280 millions, un dixième, savoir 28 millions de francs, aurait été affecté à la péréquation financière intercantonale.

Sans négliger les inconvénients inhérents à une telle répartition de la compétence entre la Confédération et les cantons, le département des finances et des douanes y voyait toutefois la possibilité d'aboutir à une claire délimitation des pouvoirs en matière d'imposition, à une simplification de la procédure de taxation et à la garantie que l'impôt reste neutre dans la concurrence entre les personnes morales. C'est pourquoi il approuva en principe et mit en discussion publique, dans ses «Considérations de principe» du 18 juillet 1956, l'institution d'un impôt fédéral dû par les personnes morales. Mais, pour la grande majorité des gouvernements cantonaux, partis politiques et associations qui furent appelés à donner leur avis, les inconvénients d'un tel impôt l'emportèrent de beaucoup sur ses avantages. On peut résumer comme il suit les motifs principaux qui ont été avancés contre la répartition de la compétence fiscale entre la Confédération et les cantons d'après les sujets de l'imposition: -- Du point de
vue politique, les adversaires d'un impôt fédéral dû par les personnes morales jugent intolérables l'atteinte ainsi portée par la Confédération à la souveraineté fiscale actuelle des cantons et les modifications fondamentales des lois d'impôt cantonales qu'entraînerait nécessairement cette solution; -- du point de vue financier, on craint que les cantons, à la suite de la fixation des centimes additionnels à l'impôt fédéral par la Confédération, ne soient placés dans une trop grande dépendance de l'Etat central, qu'en outre les bases financières de la Confédération ne se trouvent (i) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 1.

609 elles-mêmes trop étroites et trop peu souples, enfin qu'il ne s'élève de difficiles problèmes de péréquation à l'intérieur des cantons et entre les cantons; -- du point de vue fiscal, on relève surtout comme défauts que les contribuables auraient davantage la possibilité de choisir la souveraineté fiscale qui leur plairait en déterminant leur forme de droit civil, que l'unité économique et fiscale du système de l'impôt sur le revenu serait morcelée artificiellement et que la plupart des cantons devraient majorer les impôts sur le revenu et sur la fortune des personnes physiques, en raison de la perte de leurs parts à l'impôt pour la défense nationale.

Etant données les résistances que rencontre la répartition de la compétence fiscale entre la Confédération et les cantons d'après les sujets de l'imposition, nous avons renoncé à poursuivre l'idée d'un impôt fédéral dû par les personnes morales. Dans ces conditions, nous ne sommes pas non plus en mesure de proposer à l'Assemblée fédérale, pour la réorganisation des impôts fédéraux, une solution avec laquelle on éviterait «de superposer aux impôts cantonaux et communaux directs sur le revenu et sur la fortune un impôt fédéral semblable, qui touche les mêmes sujets et les mêmes objets fiscaux» (1).

c. Utilisation commune de la même source fiscale par la Confédération et les cantons S'il est inévitable que la Confédération et les cantons se trouvent en concurrence dans le domaine des impôts directs, là législation doit en tout cas s'efforcer d'établir l'impôt fédéral direct parallèle de telle manière que l'empiétement de la Confédération dans le domaine fiscal traditionnel des cantons et des communes soit aussi discret que possible. En ce sens, il y avait lieu d'envisager, outre l'impôt pour la défense nationale, les atitres possibilités suivantes: -- Un impôt fédéral dû par les personnes morales, qui se superposerait aux impôts cantonaux et communaux existants sur le revenu et sur la fortune, mais aucune imposition des personnes physiques par la Confédération; -- un impôt fédéral dû par les personnes morales superposé aux impôts cantonaux et communaux, qui serait complété par un impôt sur les gros revenus du travail des personnes physiques; -- des centimes additionnels fédéraux majorant les impôts cantonaux directs (surtaxes); ~

(i) FF 1948, I, 486; tirage à part, 158.

610

---· un impôt général sur le rendement, perçu par la Confédération comme complément des impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur la fortune.

Nous examinerons ci-après les avantages et les inconvénients de ces quatre solutions.

Une des plus graves objections qui soit faite à l'impôt dû par les personnes morales tel que nous l'avons décrit plus haut (lettre b) concerne les effets que l'imposition exclusive des personnes morales par la Confédération aurait forcément sur les finances des cantons et des communes. Ces inconvénients pourraient être éliminés d'une manière toute simple si la Confédération percevait un impôt sur le bénéfice net et le capital propre des personnes morales à côté des impôts cantonaux et communaux existants, mais renonçait à imposer le revenu et la fortune des personnes physiques.

Sous cette forme, un impôt fédéral dû par les personnes morales superposé aux impôts directs des cantons et des communes aurait sans doute l'avantage d'être techniquement simple et d'avoir certaines chances d'être accepté en vötation populaire. Mais il ne peut guère se justifier quant au fond, car on voit mal pourquoi les personnes morales, déjà souvent fortement grevées par les cantons et les communes, devraient seules contribuer au financement des tâches et des charges de la Confédération, Si le domaine subjectif de l'application de cet impôt était élargi par l'institution d'un impôt fédéral sur l'entreprise, qui frapperait toutes les exploitations astreintes à tenir des livres, on atténuerait, mais on n'éliminerait pas la charge unilatérale ainsi imposée à certaines catégories de contribuables. En outre, l'impôt sur l'entreprise présente des défauts économiques et techniques qui l'ont fait déconseiller par la commission d'experts chargée d'étudier les possibilités d'une imposition égale et juste des entreprises, quelle que soit leur forme juridique. Nous renvoyons à ce sujet au rapport de ladite commission du 14 février 1955 (1), comme aussi à celui de la commission d'études pour un impôt fédéral dû par les personnes morales ( 2 ).

L'idée que la Confédération ne devrait plus imposer à l'avenir que les bénéfices et le capital des personnes morales, ainsi que les gros revenus du travail des personnes physiques, a été quelquefois mise en discussion. Cet impôt aurait pour but d'élargir le
projet d'un impôt fédéral dû par les personnes morales et superposé aux impôts directs des cantons et des communes, ou bien il aurait le sens d'une limitation de l'impôt actuel pour la défense nationale à ceux des revenus des personnes physiques qui peuvent supporter, outre la charge fiscale cantonale et communale, une imposition supplémentaire fédérale, sans que les finances et la politique fiscale des (*) Le problème de l'imposition égale et juste des entreprises, Baie 1955, p. 57s., spéc. 65.

( a ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n" 1, p. 22s., spéc. 27s.

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cantons et communes en soient notablement troublées. Les partisans de cette «supertaxe» fédérale oublient trop aisément que les besoins financiers de la Confédération ne permettraient guère de maintenir l'impôt à un niveau assez modéré pour qu'il puisse être considéré comme un simple complément du système cantonal et communal de l'impôt sur le revenu. En outre, il faut observer qu'un «superimpôt» ainsi limité à un cercle de contribuables relativement restreint serait en contradiction avec le principe de la généralité de l'impôt. Si l'on ne peut éviter la perception d'un impôt direct par la Confédération, ni aboutir à une répartition de la compétence fiscale entre la Confédération et les cantons dans le domaine des impôts directs, la Conr fédération devra en principe soumettre à un impôt direct quiconque a une capacité économique personnelle.

Les centimes additionnels fédéraux (surtaxes) aux impôts cantonaux sur le revenu et sur la fortune, qui découlent au fond de l'idée des contingents d'argent (contributions) des cantons, ne peuvent être considérés sérieusement comme une source de recettes convenable pour la Confédération. Ces centimes additionnels devraient être calculés sur des impôts qui sont très différents d'un canton à l'autre, selon les besoins financiers de l'Etat, selon la capacité contributive de la région économique et selon l'état technique de l'appareil de taxation. Comme source fiscale permanente de la Confédération, ils seraient aussi inadéquats que peu équitables. Même en considérant que l'impôt fédéral direct ne doit plus être à l'avenir qu'une source de recettes complétant les autres recettes fiscales, on ne peut accepter les graves défauts de ces centimes additionnels fédéraux.

Dans le message du 20 janvier 1953, on a déjà étudié «s'il ne serait pas possible d'atteindre au moins approximativement le but visé par un impôt fédéral direct à taxation spéciale en n'attribuant à la Confédération qu'un choix d'objets dont l'imposition pourrait se combiner avec la perception de contributions déjà existantes afin d'éviter des complications et des frais spéciaux» (1). On discutait alors le projet d'un système fédéral d'impôts sur le rendement qui eût combiné un impôt sur les revenus de capitaux et distributions de bénéfices soumis au droit de timbre sur les coupons et à l'impôt anticipé,
un impôt sur le produit du travail dépendant et indépendant, à percevoir en même temps que les cotisations à l'assurancevieillesse et survivants, un impôt sur le capital propre des personnes morales et enfin un impôt fédéral sur les masses successorales. Après des enquêtes approfondies ( 2 ), le Conseil fédéral conclut à l'époque que ce système fédéral d'impôt sur le rendement «ne se révélerait ni supérieur quant à ses effets, ni plus simple quant à la procédure» ( 3 ). Les vices de fond que présenterait une telle réglementation d'un impôt fédéral sur le rendement, combinée f 1a) FF 1953, I, 155; tirage à part, 55.

( 3 ) FF 1953, I, 156s.; tirage à part, 56 s.

( ) FF 1953, I, 164; tirage à part, 64.

612 uniquement d'après les techniques de perception, ne nous permettent pas, à nous non plus, d'arriver aujourd'hui à une autre conclusion.

d. Points à considérer pour la revision constitutionnelle Le maintien d'un impôt fédéral direct modéré est indispensable pour des raisons de politique financière et fiscale (voir ch. 1er, lettre b, ci-dessus).

L'idée de remplacer l'actuel impôt fédéral pour la défense nationale par un impôt fédéral direct conçu de manière à limiter la concurrence entre la Confédération, les cantons et les communes dans le domaine des impôts directs (voir lettres b et c, ci-dessus), ne peut se réaliser. A l'avenir non plus, on ne peut donc éviter la perception d'un impôt fédéral direct, réglé d'après ses propres nécessités, à côté des impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur la fortune.

Le futur impôt pour la défense nationale sera perçu sur le revenu des Personnes physiques, ainsi que sur le bénéfice net et le capital propre des personnes morales. On renoncera à l'imposition de la fortune des personnes physiques. En principe, le revenu de la fortune peut supporter, il est vrai, u ne charge plus lourde que le revenu du travail; un impôt complémentaire Sur la fortune est donc justifié objectivement dans un système d'impôt s ur le revenu. Mais il faut observer que les cantons et les communes frappent en général très fortement le revenu de la fortune. Afin d'accorder le futur impôt pour la défense nationale avec les impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur la fortune, il se justifie de renoncer à l'imposition de la fortune au titre de l'impôt pour la défense nationale. Le nouvel impôt pour la défense nationale doit être conçu en outre de manière à maintenir dans des limites supportables la concurrence faite par la Confédération aux cantons et aux communes.

La Confédération doit pouvoir retirer du nouvel impôt pour la défense nationale un produit net de 200 millions de francs. D'après la réglementation actuelle (tarif de 1955, avec réduction de 10 à 40% selon l'AF du 21 décembre 1955), on peut s'attendre pour 1959, en supprimant l'impôt complémentaire sur la fortune des personnes physiques et en maintenant la part des cantons à 30 pour cent, que le produit net restant à la Confédération s'élèvera à environ 240 millions. La Confédération dispose donc de 40
millions pour de nouveaux allégements, dont les contribuables doivent bénéficier déjà à partir du 1er janvier 1959.

Pour des raisons politiques, le texte constitutionnel prévoit des maximums d'impôt pour les personnes physiques et les personnes morales, et en outre des minimums exonérés pour les personnes physiques. L'impôt sur le revenu des personnes physiques doit être calculé selon un tarif progressif, qui ne dépassera pas 10 pour cent du revenu total imposable.

L'assujettissement des personnes physiques commencera au plus tôt avec un revenu de 5000 francs ; pour les personnes mariées, avec un revenu de

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6500 francs. Quant aux personnes morales, l'impôt sur le bénéfice net ne doit en aucun cas excéder 7 pour cent, si l'imposition est proportionnelle, ou 12 pour cent, si l'imposition est progressive; l'impôt sur le capital et les réserves n'excédera pas 1 pour mille. Ces directives, tout en abaissant le maximum de l'impôt et en relevant les minimums exonérés pour les personnes physiques, se rapprochent au surplus des dispositions prévues dans l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (1), mais écartent d'autre part les mesures qui ont sans doute contribué à l'époque au rejet du projet de 1953.

Si les finances fédérales continuent de se développer favorablement, la législation d'exécution pourra fixer des maximums d'impôt inférieurs et des minimums exonérés supérieurs aux limites constitutionnelles.

De divers côtés, il a été demandé que l'on prenne, à l'occasion de la réorganisation constitutionnelle de l'impôt fédéral direct, des mesures pour réaliser une imposition égale et juste des personnes morales selon leur capacité économique et quelle que soit leur forme juridique. Lors de l'examen de cette question, la commission d'experts chargée d'étudier la motion Piller est arrivée à la conclusion ( 2 ) que l'imposition du bénéfice net et du capital propre ne permet pas d'astreindre à des prestations fiscales convenables les entreprises qui ne se proposent pas de faire un bénéfice. Elle en a tiré la conséquence qu'il faudrait prévoir pour toutes les personnes morales un impôt minimum sur le chiffre d'affaires dépassant un certain montant et sur l'ensemble du capital engagé dans l'entreprise; cet impôt minimum devrait être imputé sur l'impôt ordinaire qui frappe le bénéfice et le capital. La commission d'études pour un impôt fédéral dû par les personnes morales a fait sienne cette suggestion et elle a, de son côté, proposé que l'impôt fédéral exclusif sur les personnes morales comporte pour toutes ces personnes un impôt minimum calculé d'après les recettes brutes et l'ensemble de l'actif (3). L'imposition aussi égale que possible de toutes les personnes morales est sans aucun doiite une règle importante de politique fiscale pour la structure de l'impôt fédéral direct et il convient de l'inscrire dans la constitution. En revanche, à notre avis, le législateur ne doit pas se voir prescrire l'institution de
l'impôt minimum. Malgré les travaux préparatoires des deux commissions d'experts, on ne peut encore aujourd'hui reconnaître absolument l'opportunité et la justesse d'un impôt minimum sur les recettes brutes et l'ensemble de l'actif. Surtout, on n'a pas encore trouvé de solution satisfaisante pour les entreprises qui ont sans doute pour but de faire un bénéfice, mais qui travaillent à perte ou qui sont encore en période de constitution. En outre, dans les limites d'un H Article IZquinquiet, 3e alinéa (FF 1953, III, 235).

( a ) Le problème de l'imposition égale ot juste des entreprises, Bàie 195S, 144s.

( a ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n» l, p. 41.

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impôt fédéral sur le revenu notablement réduit, les effets de cet impôt minimum sur la charge totale dont la Confédération, les cantons et les communes grèvent les entreprises qui n'ont pas pour but de faire un bénéfice seraient à peine sensibles. Dans les circonstances présentes, nous estimons qu'il appartiendra à la législation d'exécution de décider comment l'on peut au mieux réaliser l'imposition égale et juste de toutes les personnes morales. Au cours de ces travaux, il faudra aussi élucider le traitement qui devra être appliqué à l'avenir aux ristournes et rabais.

Comme la Confédération doit continuer à percevoir un impôt pour la défense nationale, on ne peut guère exiger des cantons qu'ils acceptent une réduction de leur part actuelle à l'impôt fédéral et qu'ils compensent la perte de recettes en résultant par une majoration de leurs impôts sur le revenu et sur la fortune. Etant donné que le futur impôt pour la défense nationale sera notablement diminué par rapport à l'actuel et que par conséquent la part des cantons baissera déjà fortement, il faut laisser la participation cantonale à 30 pour cent du rendement brut. Toutefois un sixième de cette part de 30 pour cent sera réservé aux fins de la péréquation financière entre les cantons. La législation d'exécution devra établir la clé de répartition.

On a proposé, de divers côtés, de ne prévoir l'impôt fédéral direct dans la constitution qu'à titre de réserve, pour le cas où la Confédération ne pourrait plus, en raison d'un service actif prolongé, de frais extraordinaires d'armement ou d'une crise économique générale, couvrir ses dépenses à l'aide de ses recettes ordinaires. Cette proposition est contraire à la constatation que nous avons faite, savoir que la Confédération, pour des raisons de politique financière et fiscale, ne peut renoncer à la perception d'un impôt direct.

En outre, elle présente d'importants vices de fond. En percevant un impôt fédéral direct par intervalles, on perdrait le bénéfice de la pratique qui s'est affirmée dans le domaine de l'actuel impôt pour la défense nationale. Ainsi serait mise en question la stabilité de la réglementation, à laquelle les contribuables sont intéressés tout autant que les autorités.

L'appareil de perception devrait être reconstitué chaque fois. La continuité disparaîtrait, alors qu'elle
est singulièrement importante pour un impôt perçu par périodes comme l'impôt pour la défense nationale. De nombreuses réalisations de l'impôt actuel pour la défense nationale, telles que la pratique libérale en matière d'amortissements, la constitution exonérée de réserves latentes, ne pourraient être maintenues, ce qui ferait renaître les frictions disparues entre les1; contribuables et le fisc.

Nous aimerions garder au futur impôt fédéral direct le nom d'impôt pour la défense nationale. On y est habitué et il éveille l'idée que son produit est nécessaire et utilisé pour couvrir les frais de la défense du pays. Tant que ces frais, qui sont estimés à 800 millions de francs pour la période

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commençant en 1959, excèdent de plusieurs fois le produit de l'impôt pour la défense nationale et dépassent également le total du produit de cet impôt et de l'impôt sur le chiffre d'affaires, le choix de l'expression «impôt pour la défense nationale» est parfaitement clair. Le nouvel impôt pour la défense nationale, dans des parties essentielles, reproduira les traits de l'ancien.

e. Directives en vue d'une future loi concernant l'impôt pour la défense nationale Le futur impôt pour la défense nationale ne doit atteindre, comme nous l'avons exposé, que le revenu des personnes physiques, ainsi que le bénéfice net et le capital propre des personnes morales.

Pour l'établissement de l'impôt sur le bénéfice et sur le capital et les réserves des personnes morales, on considérera autant que possible les propositions faites par la commission d'études pour un impôt fédéral dû par les personnes morales (1). Ces propositions se fondent largement sur les résultats auxquels est arrivée la commission d'experts pour la motion Piller dans son rapport du 14 février 1955 ( 2 ). Afin de tenir compte des suggestions faites par ces deux commissions d'experts, le projet constitutionnel fixe comme but à la législation d'exécution de prendre les mesures nécessaires pour que toutes les entreprises à but lucratif constituées en personnes morales, quelle que soit leur forme juridique, donc notamment les sociétés à base de capitaux et les sociétés coopératives, soient assimilées les unes aux autres en principe. La diversité de l'imposition des personnes morales qui caractérise le droit régissant actuellement l'impôt pour la défense nationaledoit disparaître. Toutes les personnes morales seront, autant que possible, assujetties à l'impôt pour la défense nationale sur les mêmes objets (bénéfice et capital), selon les mêmes règles de calcul et aux mêmes tarifs; le bénéfice et le capital seront déterminés en conformité de la doctrine et de la jurisprudence suisses dans leur état actuel.

En ce qui concerne le choix des tarifs d'impôt pour les personnes morales, on étudiera en premier lieu si un tarif à deux échelons entre en ligne de compte. Un tarif de ce genre comprendrait vraisemblablement un impôt de base proportionnel à payer par toutes les personnes morales et une surtaxe proportionnelle sur toutes les parties du bénéfice
net excédant un rendement déterminé du capital propre. Sur le capital propre, toutes les personnes morales devraient payer comme aujourd'hui un impôt complémentaire proportionnel.

Quant à l'impôt pour la défense nationale sur le revenu des personnes physiques, il appartiendra à la législation d'exécution de régler le tarif progressif du nouvel impôt fédéral sur le revenu en tenant compte des déf 1 ) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 1.

(*) Le problème de l'imposition égale et juste des entreprises, Baie 1955.

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grèvemente institués par la réduction d'impôt de 1955. Les diminutions possibles de l'impôt doivent profiter à tous les contribuables. Le nouvel impôt SUT le revenu ne doit pas devenir un impôt spécial sur les gros revenus.

Dans les travaux préparatoires en vue de la législation d'exécution, il faudra aussi étudier si et dans quelle mesure on peut majorer certaines déductions sociales,, en particulier les déductions pour enfants. En outre, il y aura lieu d'examiner si et, le cas échéant, dans quelle mesure on peut satisfaire au voeu de ceux qui voudraient que les impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur la fortune puissent être déduits du revenu des personnes physiques qui est soumis à l'impôt fédéral. Nous ne dissimulons pas que nous croyons valables aujourd'hui encore les arguments qui ont amené le Conseil fédéral à repousser cette demande dans ses messages du 22 janvier 1948 et du 20 janvier 1953 (1). La réalisation de ce désir aurait pour conséquence que les taux de l'impôt pour la défense nationale, y compris le taux maximum à inscrire dans la constitution, devraient être fortement majorés, ce que le citoyen ne comprendrait pas. Sans cette mesure, il s'ensuivrait une diminution considérable du produit de l'impôt, inadmissible à côté de celle qui provient des allégements que nous envisageons déjà.

L'effet compensatoire que l'on attribue à la déduction des impôts en faveur des contribuables des cantons à forte chargefiscalen'est pas siimportant qu'il pourrait le sembler. Il n'est aucunement proportionné au surcroît de travail imposé ainsi à tous les contribuables et aux autorités fiscales. Cette mesure favoriserait les bénéficiaires de gros revenus, qui seront en général déjà notablement dégrevés du fait de la suppression de l'impôt complémentaire sur la fortune. En outre, il faut craindre des conséquences fâcheuses pour les cantons, car si l'on permettait, en matière d'impôt pour la défense nationale, de déduire les impôts cantonaux et communaux, on entendrait demander la possibilité de déduire aussi les impôts communaux des impôts cantonaux.

/, Réglementation jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelk loi concernant l'impôt pour Iß défense nationale Pour des raisons de temps, la loi d'exécution de la nouvelle disposition constitutionnelle concernant l'impôt pour la défense nationale
ne peut entrer en vigueur le 1er janvier 1959 déjà; il faut donc maintenir l'impôt actuel pour la défense nationale au-delà du moment où expire l'arrêté concernant le régime financier actuel de 1955 à 1958. Le développement des finances fédérales restant favorable, on peut déjà accorder pour la période transitoire des allégements supplémentaires par rapport à la charge actuelle de l'impôt pour la défense nationale. Toutefois, il ne faut pas préjuger ainsi la réglementation définitive de l'impôt fédéral direct, ni modifier de manière fondamentale le système actuel de l'impôt pour la (!) FF 1948, I, 520; tirage à part, 192. -- FF 1953, I, 171; tirage à part, 71.

617

défense nationale. Il ne peut donc être question, en particulier, de donner une nouvelle structure aux tarifs pour la période transitoire. En revanche, nous estimons que, pour cette période, outre le maintien de la réduction de 1955, on doit opérer la suppression de l'impôt complémentaire sur la fortune des personnes physiques, déjà proposée par le Conseil fédéral dans ses messages du 22 janvier 1948 et du 20 janvier 1953; ainsi, la réduction de 1955 déploiera son plein effet pour l'impôt sur le revenu.

De divers côtés, on demande pour la période transitoire des dégrèvements allant plus loin que l'abolition de l'impôt sur la fortune des personnes physiques et le maintien de la réduction de 1955, On propose en particulier d'autoriser les personnes physiques à déduire les impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur le produit du travail, de supprimer la surtaxe de 50 pour cent instituée en 1943 ou de majorer la déduction générale de 2000 francs.

Le problème complexe de la déduction des impôts cantonaux et communaux sur le revenu et sur le produit du travail à opérer sur le revenu soumis à l'impôt fédéral direct (voir lettre e, ci-dessus) ne peut, à notre avis, être l'objet de la discussion sur le régime transitoire, pas plus que la question de la nouvelle structure des tarifs.

On doit aussi repousser la demande d'en revenir, à partir de 1959, au tarif de 1941. Cette mesure aurait en effet pour conséquence que les personnes ayant un revenu petit ou moyen ne seraient pas ou ne seraient presque pas dégrevées par rapport à la charge actuelle, fortement réduite en 1955, alors que les bénéficiaires de gros revenus, auxquels la suppression de l'impôt sur la fortune apportera déjà en général un allégement considérable, seraient de nouveau grandement avantagés.

En revanche, nous prévoyons pour la période transitoire une majoration de la déduction générale, qui s'élève actuellement à 2000 francs, afin d'atteindre dès à présent les minimums prévus dans le texte constitutionnel, qui sont augmentés par rapport aux limites actuelles et qui sont fixés à 6500 francs pour les personnes mariées et à 5000 francs pour les célibataires. Nous proposons même, pour la période transitoire, de faire commencer l'assujettissement à 7000 francs seulement pour les personnes mariées et de dépasser ainsi le minimum
exonéré qu'établit la disposition constitutionnelle. A cet effet, la déduction générale actuelle de 2000 francs sera portée à 4000 francs pour les personnes mariées et à 3000 francs pour les célibataires.

La majoration des minimums exonérés entraînerait à partir de 1959 une perte supplémentaire de recettes que l'on peut estimer à 60 millions par an, donc à plus de 40 millions pour la caisse fédérale. Le nombre des contribuables diminuerait probablement d'environ 350 000, mais il resterait notablement plus élevé qu'en 1941 lors de l'institution de l'impôt et il

618 atteindrait presque celui de 1951 après l'octroi de la déduction générale de 2000 francs. La majoration de la déduction générale de 2000 francs à 4000 et 3000 francs aurait donc surtout pour effet d'atténuer de nouveau la progression dite «froide», due à l'accroissement du revenu nominal.

Le tableau suivant montre les conséquences de cette proposition pour les contribuables: Impôt pour la défense nationale. Aperçus de la charge Personne mariée, sans enfants Impôt selon la réglementation actuelle Revenu Fr.

Sans réduction selon AF du 21-XII-55 Fr.

Avec réduction selon AF du 21-XII-55 Fr.

Impôt selon le projet du Conseil fédéral (Dispositions d'exécution en vue de la réorganisation des financée fédérales) Fr.

A. Revenu du travail 7.20 15.--

--.

---

49.50 63.--

27.-- 29.70 37.80

7.20 10.50 15.--

9000 10000 15000 20000 25000

84.-- 108.-- 273.-- 513. -- 828.--

50.40 64.80 163.80 309.T5 546. --

27.-- 37.80 118.80 244.80 444.75

30000 50 000 100 000 150 000

1 188.60 3 117.60 G 555. -- 14 430.--

816.45 2430.80 8 224.50 12 612.--

708.90 2 220.75 8 049.-- 12436.50

6000 9000 15000

169.-- 364.-- 945.--

101.40 218.40 633.75

-- 27.-- 118.80

30 000

3 540.60 11 349.60 31 860.--

2 811.50 9 839.60 28 299. --

708.90 3 352.05 12 436.50

5000 6000 7000 7500 8000

12.-- 25.-- 45.--

B. Revenu de la fortune (rendement de 3%)

60000

150 000

619

A la condition, valable pour toutes les considérations émises, que le revenu national s'accroisse annuellement de 2 à 3 pour cent, nous estimons le produit de l'impôt pour la défense nationale restant à la Confédération, pour les années 1959 à 1963, à 200 millions en moyenne par an.

VI. Renonciation au maintien des contingents d'argent des cantons, de l'impôt sur la bière et de l'impôt sur le luxe 1. Les contingents d'argent (contributions) des cantons D'après l'article 42, lettre /, de la constitution qui est actuellement en vigueur, les dépenses de la Confédération sont couvertes en particulier par les contributions des cantons, que la législation fédérale doit régler en tenant compte surtout de leur richesse et de leurs ressources imposables.

L'échelle fédérale des contingents d'argent (1) répartit les cantons en 8 classes (de 10 à 90 centimes par tête de la population totale). D'après l'état actuel de la population (1950), savoir 4,7 millions d'habitants, un contingent simple calculé selon cette échelle donnerait un montant de 2,2 millions de francs.

Jusqu'en 1848, les contingents d'argent cantonaux, dont le montant annuel n'avait jamais dépassé 110 000 francs et était ordinairement beaucoup plus bas, constituaient, à côté d'émoluments très modiques, l'unique source financière de la Confédération. Bien que la première constitution fédérale ait conservé les contingents d'argent, ils ne furent exigés qu'une fois, en 1849, pour un total de 1,4 million, afin de couvrir les frais de l'occupation des frontières au moment des troubles badois. Le projet adopté par les chambres le 21 mars 1950 ( 2 ) et rejeté par le peuple et les cantons le 4 juin 1950 prévoyait des contingents d'argent cantonaux s'élevant annuellement à 70 millions de francs ; les contingents devaient être proportionnels aux sommes payées par les personnes physiques pour 1947, 1948 et 1949 au titre de l'impôt fédéral pour la défense nationale ; cette clé de répartition devait être adaptée tous les trois ans aux modifications de la capacité fiscale, déterminées sur la base des cotisations versées par les assurés et les employeurs au titre de l'assurance-vieillesse et survivants. Cet échec de la tentative de faire revivre les contingents cantonaux a en même temps fourni la preuve que les contingents, vu la grandeur des besoins financiers
actuels de la Confédération, ne sont pas un moyen de financement approprié.

Surtout, la détermination de la capacité contributive des cantons semble problématique. On pourrait la constater au mieux en estimant d'une manière uniforme pour toute la Suisse la capacité fiscale des contribuables de chaque canton. Mais ce procédé ne serait rien d'autre qu'une taxation (') LF du 9 mars 1875 BUI les contingents d'argent (RS G, 3), prorogée par l'AP du 5 avril 1895 (RS 6, 4).

(') Article 42ter; FF 1950, I, 700.

620

en vue d'un impôt fédéral direct, les cantons restant libres de percevoir de chaque contribuable, au bénéfice de la Confédération, la prestation qui lui serait imposée ou de se procurer d'une autre manière le montant du contingent.

H faut donc renoncer à l'avenir à mentionner les contingents d'argent des cantons parmi les sources de recettes fédérales fixées par la constitution.

2. L'impôt sur la bière L'impôt sur la bière, fondé sur le premier programme financier de crise (1), est la seule survivance de l'impôt général sur les boissons ( 2 ) institué le 1er janvier 1935. Après la suppression de ce dernier, le 1er octobre 1937, l'impôt sur la bière a continué d'être perçu comme impôt spécial sur les livraisons des brasseries suisses et sur la bière importée. Le taux d'impôt s'élevait primitivement à 4 centimes, puis à 6 centimes de 1936 à 1941 et à 12 centimes de 1941 à 1944; depuis, le taux est de nouveau 6 centimes par litre, bouteille, crucbon, etc. La bière est imposée en outre par la voie de droits de douane supplémentaires sur l'orge et le malt pour la brasserie. Eu égard à cette imposition spéciale, la bière est frappée de l'impôt sur le chiffre d'affaires au taux de 3 pour cent (au lieu du taux normal de 6%) sur les livraisons en gros des brasseries. D'après l'arrêté du 21 décembre 1955 (3) réduisant l'impôt sur le chiffre d'affaires, la charge effective que supporte la bière du fait de cet impôt ne s'élève plus qu'à 2,7 pour cent depuis le début de 1956. Le produit total de la charge fiscale grevant la bière a été en 1955 de 27 millions (impôt sur la bière: 15,5; droits de douane supplémentaires: 7; impôt sur le chiffre d'affaires: 4, 5).

Il est vrai que l'impôt sur la bière est en butte à moins de critiques que l'impôt sur le luxe. Mais ses adversaires font valoir à juste titre que l'imposition spéciale de la bière est injuste, tant que les autres boissons alcooliques ne sont pas frappées d'une charge supplémentaire. Le peuple et les cantons ayant rejeté, le 6 juillet 1952, un impôt général sur les boissons (4) qui dépassait la limite normale de l'impôt sur le chiffre d'affaires, on ne peut songer en ce moment à instituer un tel impôt. Il faut donc supprimer l'imposition spéciale actuelle sous forme d'impôt sur la bière, c'est-à-dire ne pas proroger au-delà du 31 décembre 1958 la
validité des dispositions concernant cet impôt, mais frapper la bière de l'impôt sur le f 1 ) AF du 13 octobre 1933 (RO 49, 869).

(*) ACF du 4 août 1934 (ES 6, 280). -- AF du 22 décembre 1938 sur le régime financier de 1939 à 1941 (art, 41; RS 0, 39), prorogé successivement jusqu'à la fin de 1958 par l'ACF du 30 avril 1940 (RO SB, 430) et par les arrêtés concernant les régimes financiers de 1946-1949, de 1950/1951, de 1951-1954 et de 1955-1958.

(') RO 1955, 1210.

(4) AF du 28 mars 1952 sur la couverture des dépenses pour l'armement, article 3 (FF 1952, I, 639).

621

chiffre d'affaires au même taux que les autres boissons alcooliques. La disparition de l'impôt sur la bière sera compensée en partie par la majoration de l'impôt sur le chiffre d'affaires en bière.

3. L'impôt sur lo luxe L'impôt sur le luxe, entré en vigueur le 31 octobre 1942, a été institué sur la base des pouvoirs extraordinaires accordés pendant la guerre, comme complément de l'impôt sur le chiffre d'affaires ( l ). H est perçu sur les chiffres d'affaires au détail et l'importation de certaines marchandises (articles de luxe), soit dans une procédure d'immatriculation (relevé trimestriel des contribuables), soit dans une procédure d'estampillage. Sur les disques, gramophones et appareils radiophoniques, l'impôt s'élève à 5 pour cent depuis son institution; le taux primitif de 10 pour cent sur les autres articles de luxe a été réduit, à partir du 1er janvier 1955 (^), à 5 pour cent pour les marchandises imposées dans la procédure d'estampillage (vins mousseux, plaques et films photographiques, parfumeries et cosmétiques) et à 6 pour cent pour les autres articles de luxe (tapis noués à la main, fourrures et pièces d'habillement avec fourrure, perles, gemmes, bijouterie, orfèvrerie or et argent, montres en or, appareils photographiques et de projection).

L'impôt sur le luxe a produit 18,9 millions de francs en 1955.

L'impôt sur le luxe a de notables inconvénients. Son but, qui est de frapper les dépenses d'un train de vie «relevé», ne peut pas être largement atteint; d'une part, les dépenses de ce genre s'expriment souvent en grande partie sous des formes non imposées et, d'autre part, la notion de luxe varie constamment, de sorte que maint article imposé rentre aujourd'hui parmi ceux d'usage courant. En outre, la même marchandise peut être un luxe pour tel consommateur et constituer pour tel autre un moyen nécessaire lui permettant de gagner son pain. Un impôt dont la taxation doit être laissée aux détaillants ne peut tenir compte de telles circonstances que d'une manière insuffisante. Les possibilités de se rabattre sur d'autres formes non imposées de la dépense de luxe, ainsi que la tentation inhérente à un impôt spécial d'éluder ou de soustraire l'impôt, rendent plus difficile au contribuable le transfert au consommateur, de sorte que cet impôt sur la consommation peut devenir et est déjà
largement devenu une vraie taxe professionnelle, ce qu'on n'avait jamais envisagé.

Ce fait est d'autant plus grave que les commerçants en articles de luxe et ceux qui les fabriquent appartiennent en général à des branches très sensibles aux fluctuations économiques. On reproche également, à juste titre, à l'impôt sur le luxe d'établir une discrimination au désavantage de (*) ACF du 13 octobre/29 décembre 1942 (RS 6, 213), prorogé successivement jusqu'à la un de 1958 par les régimes financiers de 1950/1951 (RO 1949, 1913), 1951 à 1954 (RO 1950, 1507) et 1955 à 1958 (RO 1954, 1347).

( a ) AF du 22 décembre 1954, article 3 (RO 1954, 1349).

Fmitte fédérale. 109« année. Vol. I.

43

622 certains produits suisses de qualité et d'avoir dans une grande mesure des effets injustes et nuisibles pour les industries touchées. II n'y a donc pas lieu de s'étonner que l'impôt sur le luxe soit violemment combattu depuis des années. En 1948, une pétition contre l'impôt sur le luxe a recueilli plus de 400000 signatures; dans de nombreux mémoires adressés au Conseil fédéral et dans les critiques faites lors de chaque discussion des différents régimes financiers, on a toujours présenté cette mesure fiscale comme injuste. Du point de vue technique, l'impôt cause de nombreuses difficultés de délimitation et un surcroît de travail permanent pour les contribuables et l'administration. Ces inconvénients n'ont pas été atténués par la réduction de l'impôt à partir du 1er janvier 1955; au contraire, la disproportion entre les frais occasionnés par l'impôt et son produit a même augmenté.

Vu les défauts signalés, la commission d'études pour l'impôt sur le chiffre d'affaires et d'autres impôts sur la consommation, a recommande, à la majorité, de renoncer au maintien de l'impôt sur le luxe, tant que la Confédération n'est pas obligée, pour des raisons fiscales, de recourir à cette recette (1). La majorité des gouvernements cantonaux, partis politiques et associations qui se sont exprimés au sujet de l'impôt sur le luxe est aussi de cet avis. S'il est compréhensible que des associations de salariés, pour des raisons d'ordre politique et psychologique, soient en partie opposées à la suppression de cet impôt, il reste cependant justifié, à cause de ses nombreux défauts, de ne plus maintenir l'impôt sur le luxe après l'expiration du régime financier de 1955 à 1958. Le principe social de l'imposition d'après la capacité contributive, sur lequel se fonde l'idée de l'impôt sur le luxe, n'est pas réalisé, ainsi que nous l'avons montré; il peut en revanche, au moyen d'un impôt direct, être mieux appliqué, sans nuire à certaines branches d'industrie.

VII. Variabilité des impôts fédéraux 1. Le problème A chaque communauté politique se pose continuellement le problème d'équilibrer ses dépenses et ses recettes. Elle s'efforce à cet effet d'établir son système de recettes, en particulier les impôts, de manière que les recettes puissent être augmentées ou diminuées pour s'adapter aux dépenses. Le système est en outre
avantageux s'il permet de compenser par le surplus de recettes de certains impôts les reculs que d'autres subissent en raison des fluctuations économiques.

Le système fiscal actuel de la Confédération comprend surtout des sources de recettes fortement influencées par les fluctuations économiques.

(*) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 2, p, 53-57, 70.

623 En particulier, le produit des droits de douane et des droits de timbre augmente rapidement en période de prospérité, pour décroître aussi rapidement et fortement en période de dépression, alors que les dépenses de la Confédération augmentent. En raison de l'essor économique actuel, le manque de variabilité des impôts fédéraux ne s'est pas manifesté jusqu'ici de manière troublante, car on n'a pas contesté que les excédents des comptes pendant les bonnes années doivent être utilisés à l'amortissement des dettes.

Pour adapter les recettes fiscales aux besoins financiers, les lois cantonales concernant les impôts sur le revenu et sur la fortune prévoient souvent la possibilité d'une modification périodique du taux de l'impôt. Le taux de base est sans doute établi de manière fixe dans les lois d'impôt (tarif d'impôt) ; mais le taux effectif, qui consiste en un multiple ou une fraction du taux de base, est l'objet d'une décision périodique du parlement, soumise au referendum dans de nombreux cantons ; il en est de même dans les communes.

Dans la plupart des Etats étrangers, c'est aussi l'autorité législative qui décide, en sa propre compétence, le niveau des recettes fiscales et le taux de l'impôt, soit en approuvant le budget, soit en édictant des lois financières spéciales.

Pour la réorganisation des finances fédérales, le problème de la variabilité des recettes fiscales de la Confédération se pose à deux points de vue principaux. A longue échéance, la Confédération devra s'efforcer de pouvoir disposer de recettes capables de couvrir aussi un surplus éventuel de besoins. Il est nécessaire à cet effet que le renforcement ou l'atténuation des impôts ne soient pas d'avance rendus difficiles sans nécessité.

De ce problème à longue échéance, il faut distinguer la question de la possibilité d'adapter les recettes provenant des impôts fédéraux aux besoins financiers qui changent pendant de courtes périodes ou même d'année en année (variabilité des impôts au sens étroit du terme). Des adaptations de ce genre devraient, d'une part, empêcher le citoyen d'avoir l'impression que l'Etat exige de lui plus d'impôts qu'il n'en aurait besoin. D'autre part, durant les périodes où les besoins financiers augmentent, il faudrait aussi rendre possible, dans certaines limites, l'augmentation des recettes sans que
l'on soit obligé de modifier et de transformer immédiatement les lois fiscales tout entières. Nous étudierons ci-après si et dans quelle mesure les diverses lois fiscales de la Confédération peuvent répondre à ces exigences.

2. Impôts fédéraux impropres à réaliser le principe de la variabilité

Tous les impôts fédéraux ne sont pas propres à l'institution de la variabilité. Cette institution est d'emblée à rejeter en matière de droits de timbre, d'impôt anticipé et d'impôt sur lé chiffre d'affaires.

624

Les droits de timbre et l'impôt anticipé sont les moins capables de permettre l'adaptation courante de leur rendement, par une manipulation des taux, aux besoins financiers de la Confédération. Pour que les droits de timbre conservent le caractère que leur donne la constitution, leurs taux doivent se maintenir dans des limites fixes et modérées ; ils ne tolèrent donc pas n'importe quelle augmentation de leur produit, mais ne l'admettent que d'une manière insignifiante dans l'ensemble des recettes fiscales de la Confédération. En outre, il faut songer que l'assiette de ces impôts est en principe déterminée par le contribuable lui-même, qui doit les payer spontanément; or ce système de perception simple et rationnel suppose une certaine stabilité de la réglementation et il serait mis fortement en question par la possibilité de modifications fréquentes des taux. Point n'est besoin de démontrer davantage que l'impôt anticipé, dont il faut mûrement peser le taux en tenant compte de multiples conséquences, ne peitt servir a réaliser la variabilité des recettes fédérales.

En matière d'impôt sur le chiffre d'affaires également, l'adaptation à court terme des taux d'impôt aux variations des besoins financiers se heurte à de grandes difficultés d'ordre technique et économique. Le contribuable, pendant une période transitoire plus ou moins longue (s'il s'agit de grandes constructions ou de ventes à tempérament, les paiements s'échelonnent souvent sur plusieurs années) devrait appliquer parallèlement des taux d'impôt différents, ce qui compliquerait extrêmement la comptabilité et les relevés aussi bien que le contrôle fiscal. Le transfert à l'acheteur de nouvelles réductions d'impôt ou de nouvelles majorations suppose chaque fois chez le détaillant de nouveaux calculs et changements de prix, avec l'obligation de réimprimer les listes de prix, les catalogues, les emballages indiquant les prix, etc. L'adaptation aux charges fiscales modifiées nécessite donc un temps suffisant, comme le confirment d'ailleurs les expériences faites lors des diverses extensions de la liste des marchandises exonérées (en 1950 et 1951) et lors de la réduction de l'impôt en vertu de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955. Si donc les modifications de la charge se suivaient à intervalles relativement rapprochés (par ex. toutes les années
ou tous les deux ans), l'économie se trouverait continuellement en période transitoire. En outre, pour éviter des troubles dans la situation en matière de concurrence, il faudrait, à chaque modification essentielle de la charge fiscale, dégrever ou imposer de manière appropriée les stocks des commerçants et fabricants non assujettis au titre de grossistes (selon la réglementation à établir, peut-être plus de 150 000 entreprises). Tous ces embarras et difficultés ne pourraient être évités d'une manière assez large que si l'on adoptait le système de l'impôt dû par les détaillants. Mais on se heurterait à d'autres inconvénients considérables (par ex, le nombre des contribuables passant d'environ 55 000 à environ 250 000), de sorte que l'on doit renoncer, en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, à adapter à court terme les charges fiscales aux variations des besoins financiers, soit

625

en modifiant les taux, soit par des déductions ou surtaxes de quelque nature que ce soit (1). Les charges fiscales devraient pouvoir rester inchangées pendant une période assez longue, savoir pendant au moins 6 ans.

3. La variabilité en matière d'impôt pour la défense nationale Du point de vue de la technique et de la politique fiscales, c'est en matière d'impôt fédéral direct que la variabilité de la perception des impôts peut se réaliser au mieux. Comme dans les solutions adoptées par les cantons, on peut songer à fixer le tarif de base dans la loi d'exécution en autorisant l'Assemblée fédérale à décider, pour une certaine période fiscale, la perception d'un multiple ou d'une fraction précise de l'impôt dû selon le tarif de base. Toutefois, il ne faut pas oublier que, dans l'ensemble des finances fédérales, alors que le volume des recettes dépasse 2 milliards, une majoration ou une réduction, de 10 pour cent par exemple, du futur impôt pour la défense nationale ne ferait qu'une différence de 20 millions de francs, donc seulement 1 pour cent environ des recettes fédérales. C'est que l'impôt pour la défense nationale, contrairement aux impôts directs cantonaux et communaux, n'est pas la principale source de recettes de de la Confédération.

Lorsqu'on établira la législation d'exécution de l'impôt pour la défense nationale, on devra étudier si et de quelle manière pourrait se réaliser pratiquement le système du taux effectif variable. Mais on ne peut guère songer à prévoir la variabilité de l'impôt pour la défense nationale, si une mesure analogue n'est pas applicable en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, comme nous l'avons relevé ci-dessus (chiffre 2).

VIII. Parts cantonales aux recettes de la Confédération 1. Considérations de principe La question de savoir si et dans quelle mesure les cantons doivent participer au produit des recettes de la Confédération a toujours été fortement débattue, surtout lors des tentatives précédentes de réorganisation des finances fédérales. L'une des raisons de cette discussion, et non des moindres, c'est que l'accroissement des recettes fédérales augmente constamment aussi la portée financière des parts cantonales.

Le Conseil fédéral, dans son message du 22 janvier 1948 ( 2 ), a déjà relevé ce fait et exprimé ses craintes devant l'évolution qui s'est produite.
H a énuméré les arguments suivants contre la participation des cantons aux recettes fédérales: (*) Publications concernant la réforme des finances fédérales, brochure n° 2, p. 45 à 50.

(*) FF 1948, I, 547; tirage à part, 219.

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-- Cette participation a atteint un ordre de grandeur qui n'est plus guère conciliable avec le principe de l'autonomie financière des cantons et avec celui de la claire délimitation des attributions fiscales; ·-- elle peut créer une dépendance financière malsaine des cantons à l'égard de la Confédération et conduire les cantons à négliger leurs sources fiscales; -- elle permet aux cantons de se procurer des ressources financières en évitant la décision du peuple, ce qui porte atteinte au droit qu'ont les citoyens d'intervenir en cette matière.

D'un autre côté, on peut aussi trouver de bons motifs en faveur d'une participation des cantons aux recettes fédérales. Historiquement parlant, ces parts ont été accordées aux cantons comme indemnité pour les sources de recettes qu'ils ont dû céder à la Confédération et dont ils ne peuvent donc plus disposer. Ainsi, sous le régime de la constitution de 1848, la Confédération avait à indemniser les cantons pour la cession de la souveraineté douanière et de la régale des postes ; pour les douanes, ces indemnités s'élevaient jusqu'à 52 pour cent du produit brut. Les parts cantonales actuelles aux droits de timbre (art. 4lbis, 2e.al., Cst.) et au bénéfice net de la banque nationale (art. 39, 4« al., Cst.) étaient aussi motivées de la même manière à l'époque. On ne peut nier cependant que cette justification historique ait dans bien des cas notablement perdu de sa force probante.

Les droits de timbre perçus actuellement par la Confédération ne pourraient guère être prélevés de façon correspondante par les cantons isolément. En outre, les parts aux droits de timbre ont atteint un montant annuel, 30 millions, qui est bien supérieur à ce qu'on attendait primitivement. Cependant, les participations des cantons au produit des droits de timbre et au bénéfice net de la banque nationale, parce qu'elles sont réparties d'après la population résidante, ont précisément reçu une nouvelle fonction et partant une justification plus convaincante : elles agissent dans le sens de la péréquation financière. Si ces parts étaient supprimées aujourd'hui, il faudrait envisager et prendre à leur place de nouvelles mesures correspondantes en vue de cette péréquation.

En matière de taxe militaire et d'impôt pour la défense nationale, la taxation et la perception incombent aux cantons. Pour
les frais qui en résultent, les cantons ont droit, en tout cas, à une indemnité équitable. Mais il s'est révélé avantageux, pour que la taxation soit bien faite, que les cantons soient aussi intéressés au résultat de leur travail. C'est pourquoi l'on a accordé jusqu'ici aux cantons une participation proprement dite au produit des contributions fédérales qu'ils fixent et perçoivent eux-mêmes.

En matière d'impôt pour la défense nationale, il faut déjà la maintenir parce que la suppression de leurs parts obligerait les cantons, dans une large mesure, à reviser leurs propres lois d'impôt, ce à quoi la Confédération ne devrait pas donner occasion. En revanche, la renonciation prévue

627

à la participation des cantons en matière de taxe militaire (voir le chiffre 2) n'a pas sous ce rapport autant de poids, car cette participation ne s'est jamais élevée à des sommes considérables.

3. Parts cantonales réparties d'après les montants recouvrés a. Taxe d'exemption du service militaire, Les cantons reçoivent actuellement 54 pour cent du produit brut de la taxe militaire (voir le chiffre III, 1, ci-dessus). Cette participation élevée provient d'un temps où les cantons avaient encore de notables dépenses pour l'habillement et l'équipement de l'armée. Aujourd'hui, cette part ne se justifie plus. La plupart des dépenses faites par les cantons dans le domaine militaire leur sont remboursées par la Confédération. C'est pourquoi, déjà dans les projets de 1948 et de 1953, on proposait de ramener les parts cantonales à une commission de perception convenable. Comme la taxe militaire, en raison de sa nature particulière, occasionne des frais de perception élevés, la commission doit être fixée relativement haut. Avec un cinquième du produit brut, on assure une indemnité appropriée pour le travail des cantons quant à la fixation et à la perception de la taxe. En nombres absolus, la part des cantons à la taxe militaire n'a pas un grand poids. Pendant les années 1954 et 1955, elle s'est élevée en moyenne à 9 millions de francs. Si la participation était ramenée à une commission de perception de 20 pour cent, son montant serait réduit de 6 millions.

Pour faciliter la transition, on laissera encore aux cantons, pour 1959 et 1960, la moitié de 46 pour cent (*), c'est-à-dire 23 pour cent, plus la commission de perception de 8 pour cent, donc au total 31 pour cent du produit brut.

b. Impôt pour la défense nationale Les parts des cantons aux impôts fédéraux directs perçus par eux pour le compte de la Confédération n'ont pas été toujours de même montant.

Celle des deux impôts de guerre s'élevait à 20 pour cent, celle de la contribution de crise à 40 pour cent, celle de l'impôt pour la défense nationale d'abord à 35 puis, à partir de 1942, à 30 pour cent, celle des deux sacrifices pour la défense nationale (1940 et 1945) et celle de la surtaxe spéciale majorant l'impôt pour la défense nationale à 10 pour cent. L'impôt pour la défense nationale, 7e période, a rapporté un produit brut annuel de 359 millions, dont les cantons ont reçu 30 pour cent, c'est-à-dire 108 millions.

Pour la 8e période (années fiscales 1955 et 1956), la réduction ordonnée par l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 aura aussi
comme effet d'abaisser les parts des cantons. Toutefois, la diminution de recettes résultant de cette réduction sera compensée, au moins en partie, par l'accroissement du t1) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chiffre III, 1,

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produit brut en raison de la situation économique. Si l'on compte que l'impôt de la 8e période rapportera un produit brut annuel de 320 millions, il restera aux cantons une part de 96 millions.

L'impôt pour la défense nationale devrait procurer à l'avenir à la Confédération une recette annuelle nette de 200 millions (voir le chiffre V, 4, ci-dessus). Si l'on maintient à 30 pour cent la part des cantons, le tarif doit être fixé de manière que le produit brut atteigne 285 millions. Si l'on abaissait la part cantonale à 20 pour cent, on pourrait se contenter d'un produit brut de 250 millions, ce qui accroîtrait grandement les possibilités de réaliser de nouveaux allégements en matière d'impôt fédéral direct.

Mais les cantons ne recevraient plus que 50 millions, c'est-à-dire 46 millions de moins qu'en 8e période de l'impôt.

Les cantons notamment ont élevé de fortes objections à la diminution des parts cantonales à l'impôt pour la défense nationale. C'est pourquoi, malgré les avantages que nous avons attribués à cette réduction, nous sommes d'avis qu'on devrait maintenir le taux actuel de 30 pour cent comme part cantonale au futur impôt pour la défense nationale. Ces 30 pour cent ne seront toutefois plus répartis entièrement d'après les montants recouvrés. Il faudra en réserver un sixième pour l'affecter à des buts de péréquation financière entre les cantons.

3. Parts cantonales réparties d'après la population de résidence Les cantons reçoivent actuellement une part au bénéfice net de la banque nationale, fixée à 80 centimes par tête de la population, ainsi qu'une part de 20 pour cent au produit des droits de timbre, répartie elle aussi par tête de la population. En 1954 et 1955, les cantons ont reçu en moyenne 3,8 millions comme part au bénéfice net de la banque nationale et 26,7 millions comme part au produit des droits de timbre, donc au total 30,5 millions de francs. Pour certains cantons financièrement faibles, ces parts sont même, en nombre absolu, plus élevées que leurs parts au produit de l'impôt pour la défense nationale, bien que, pour l'ensemble de la Suisse, la participation des cantons à l'impôt pour la défense nationale soit plus de trois fois supérieure au total de leurs participations aux droits de timbre et au bénéfice net de la banque nationale. Si l'on répartit une somme de 30
millions entre les cantons par tête de la population, comme c'est le cas pour les droits de timbre, le canton de Baie-Ville, par exemple, reçoit 1 530 000 francs de moins que si la même somme était répartie d'après les montants encaissés, comme c'est le cas en matière d'impôt pour la défense nationale ; inversement, le canton du Valais recevrait 667 000 francs, celui de Fribourg 677 000 francs et celui de Lucerne 648 000 francs de plus.

Supprimer les parts cantonales au rendement des droits de timbre et au bénéfice net de la banque nationale, ce serait obliger la Confédération à prendre d'autres mesures pour remplacer les effets que ces participations exercent naturellement en matière de péréquation financière. C'est pour.

629

quoi le projet du 25 septembre 1953 (*) renonçait également à supprimer ces parts. Le très grand nombre des mémoires remis au sujet de l'organisation des finances fédérales exprime aussi l'opinion qu'il faut maintenir les parts actuelles des cantons au bénéfice net de la banque nationale et au produit net des droits de timbre. Nous partageons cet avis.

4. Conclusions Pour ne pas reporter simplement sur les cantons les difficultés de la réorganisation des finances fédérales, nous proposons de maintenir toutes les parts cantonales actuelles, à l'exception de celle qui concerne la taxe militaire.

La réduction du futur impôt pour la défense nationale par rapport à l'impôt actuel et le remplacement de la part à la taxe militaire par une commission de perception de 20 pour cent auront encore pour conséquence une perte d'environ 17 millions par an pour les cantons. Ceux-ci peuvent supporter ce sacrifice. Leurs finances se sont développées de façon réjouissante pendant l'après-guerre. De 1946 à 1955, la valeur de la fortune nette qui ressort des bilans figurant dans les comptes d'Etat cantonaux a passé de 47 millions à 410 millions, augmentant ainsi de 363 millions. Si l'on applique des règles uniformes pour comparer les estimations de la fortune et les amortissements qui diffèrent d'un canton à l'autre, il apparaît que la fortune nette des cantons a augmenté de plus de 600 millions pendant la période indiquée ( 2 ). Les recettes fiscales ont été de 519 millions en 1946, mais de 1017 millions en 1955, ce qui correspond à un accroissement annuel moyen de 55 millions. Comme on peut s'attendre que le revenu national augmentera encore, les recettes fiscales des cantons continueront sans doute aussi à s'accroître. La renonciation demandée aux cantons dans le présent projet ne s'élève qu'à un tiers de l'augmentation annuelle moyenne de leurs recettes fiscales pendant les années 1946 à 1954.

IX. Estimation des recettes et équilibre des comptes Sur la base des exposés des chapitres précédents, nous estimons que, pendant les cinq années 1959 à 1963, les recettes de la Confédération s'élèveront en moyenne, si la prospérité économique subsiste, à 2379 millions de francs. On en trouvera le détail dans le tableau suivant.

L'estimation des recettes montre qu'elles atteindront environ 2400 millions en moyenne pendant
les années 1959 à 1963, si les propositions contenues dans notre projet sont réalisées. Si les recettes augmentent plus ou moins fortement, ce qui dépend avant tout de l'évolution ultérieure de la situation économique, l'annuité de 250 millions prévue pour l'amortissement dans l'estimation des dépenses sera proportionnellement plus ou moins élevée.

(ïj~lT 1953, in, 235.

( a ) Voir «Finances et impôts de la Confédération, des cantons et des communes, 1955/1956» dans les «Statistiques de la Suisse» (paraîtra prochainement),

630

Estimation des recottes de la Confédération pour les années 1959-1963 En millions de francs Compte

1964

1956

1956

1957

Estimation Moyenne 1959-1963

1793

1733

1902

1816

1922

Budget

Genres de recettes Recettes fiscales (parts fédérales) * . . .

Droits d'entrée (sans les carburants et le tabac) - .

. . . .

. . .

369 139 123

417 164 127

400 160 123

460 190 127

480 230 130

68

62

56

51

50

548 104 329 105 8

580 113 165 97 8

569 112 364 110 8

583 120 171 105 9

585 110 200 125 12

304

334

306

335

340

77 96 131

79 99 156 2067

93 83 130

113 85 137

105 85 160

Droits supplémentaires et autres contriImpôts sur le chiffre d'affaires» sur le luxe, sur la bière et impôt compensatoire . .

Impôt fédéral direct

. . . *

. . .

Parts aux rendements et excédents . . .

Recettes diverses Recettes effectives

2097

2208

2151

2262 117

2379 232

Plus; investissements

Recettes comptables, total Excédent de recettes (sans amortissement)

193 31

2320

108 70 2245

2432

113 28 2392

361

296

463

304

175 48

C. LA PÉRÉQUATION FINANCIÈRE La force et la cohésion de notre Etat fédéral sont dues en très grande partie au fait que notre pays ne connaît pas ces extrêmes qui se manifestent ailleurs. Néanmoins, il convient que les collectivités publiques -- communes, cantons et Confédération --- s'efforcent de toutes sortes de façons d'assurer une certaine égalité dans les conditions d'existence des citoyens et d'amener chacun à prendre sa part des charges communes en fonction de ses ressources.

I. La péréquation financière générale Depuis des années, on s'efforce, non sans succès d'ailleurs, d'assurer une péréquation ayant pour effet de diminuer les difficultés que rencontrent certains cantons du fait de circonstances diverses, telles que de mauvaises communications ou des conditions topographiques défavorables. Cette père-

631

quation devrait les mettre en mesure de s'acquitter des tâches qui leur incombent en tant qu'Etats souverains. Dans ses messages du 22 janvier 1948 (1) et du 20 janvier 1953 ( 2 ) sur le nouveau régime des finances fédérales, le Conseil fédéral a donné des informations détaillées sur les mesures prises jusqu'alors. Le message de 1948 indiquait des mesures de péréquation dans les domaines suivants: construction et entretien de routes, chemins de fer, correction de cours d'eau et endiguements, aide aux montagnards, écoles primaires, nouvelles mesures sociales et commandes de la Confédération. Pour améliorer encore la péréquation, on envisageait de prendre plus largement en considération les ressources financières des cantons lorsqu'il s'agirait de calculer des subventions fédérales ou de financer des oeuvres sociales communes. La péréquation devait être développée en particulier par de nouvelles dispositions en matière d'assurance-vieillesse et survivants, par une revision des règles applicables à la subvention à l'école primaire publique et par une judicieuse répartition du produit des droits d'entrée sur les carburants pour moteurs. Pour la première fois, on prévoyait des contributions aux charges routières des cantons financièrement faibles. Ces mesures ont été réalisées, malgré le rejet du projet d'arrêté.

Dans son message de 1953, le Conseil fédéral enregistrait déjà les bons effets des efforts supplémentaires entrepris pour améliorer la péréquation.

Nous n'entendons pas répéter ce qui a été dit. Qu'il suffise de constater que la péréquation devra, à l'avenir, être recherchée surtout de deux façons : en mesurant le chiffre des subventions fédérales et parts cantonales aux recettes fédérales selon les ressources des destinataires et en choisissant la manière dont la Confédération couvrira ses besoins. Comme les ressources nécessaires à cet effet sont fournies, sous une forme ou sous une autre, par la population et l'économie privée, la Confédération peut, tout naturellement, créer un certain équilibre entre cantons prospères et cantons .financièrement faibles en s'assurant telle recette plutôt que telle autre.

Le tableau qui suit confronte les parts cantonales aux recettes et subventions fédérales avec le produit net que la Confédération retire des impôts et taxes fédérales, montrant ainsi ce
qu'a été la péréquation indirecte ces dernières années. Les parts cantonales aux recettes et subventions fédérales concernent l'impôt et le sacrifice pour la défense nationale, l'impôt sur les bénéfices de guerre, la taxe d'exemption du service militaire, les droits de timbre, le monopolo de l'alcool, le bénéfice net de la banque nationale, les amendes infligées en application de la législation sur les douanes et l'alcool, ainsi que toutes les subventions fédérales, y compris les subventions prélevées sur le produit des droits d'entrée sur les carburants et les ristournes de la Confédération aux cantons. Dans le produit net que la Confédération retire des impôts et taxes fédérales, il est tenu compte du sacrifice et de l'impôt (!) FF 1948, I, 596; tirage à part, 251.

(») FF 1953, I, 173; tirage à part, 73.

632

pour la défense nationale, de l'impôt sur les bénéfices de guerre et de la taxe d'exemption du service militaire. Comme base de comparaison, le tableau indique les chiffres moyens par tête de la population pour les années 1946 à 1949 et 1952 à 1955.

Comparaison des parts cantonales aux recettes et subventions fédérales avec le rendement net que la Confédération retire des impôts et taxes fédérales, par tête de la population 1952-1956

1946-1949 Cantons

Uri Grisons . . . . ; .

Tessili

Valais . .

TJnterwald-le-Haut .

Schwyz .

. . . .

Appenzoll Bh.-Int. .

Fribourg . . . .

Appenzell Rh.-Ext. , Unterwald-le-Bas , Vaud Thurgovie Saint -G ail Sehaffhouse . . . .

!N"euchâtel Argovie Glaria Soleure Bals-Campagne . .

Zurich , . . . .

Genève Baie-Ville . . . .

Moyenne

Parts cantonales aux recettes fédérales et subventions fédérales J1)

Impôts et taxes fédérales (s)

Différence en faveur duoanton(+) ou de la Confédération ( -- )

Parts Différence en faveur cantonales aux recettes Impôts et du canton (+) taxes fédérales et fédérales (") ou de la subventions Confédérafédérales (i) tion (--)

1

2

3

4

5

6

Fr.

Fr.

Fr.

Fr.

Fr.

Fr.

94.75 88.25 73.50 62.30 62.75 48.55 45.75 53.85 50.35 62.60 67.05 56.25 63.45 54.10 82.50 80.-- 71.20 71.-- 99.75 63.85 64.10 61.05 86.10 61.75 104.20

47.20 37.10 40.50 31.40 27.15 37.80 16.20 26.80 50.05 54.-- 36.75 65.70 65.30 64.90 71.65 122,30 85.90 76.95 00.05 80.35 90.-- 74.60 113.85 105.50 163.75

+ 47.55 + 51.15 + 33.-- + 30.90 + 35.60 + 10.75 + 29.55 + 27.05 + --.30 + 8.60 + 10.30 H .55 -- 1.85 -- 10.80 + 10.85 -- 42.30 -- 14.70 -- 5.95 + 9.70 -- 16.50 -- 25.90 -- 13.55 -- 27.75 -- 43.75 -- 59.55

164.77 139.23 132.25 99.18 85.79 79.82 65.39 64.06 64.04 91.03 54.91 73.26 55.77 57.51 65.45 90.47 57.67 59.96 74.0.1.

56.25 64.54 67.99 66.42 67.43 107.35

31.38 22.42 31.93 17.74 12.61 19.86 8.86 15.72 26.87 63.13 27.63 46.45 29.12 33.21 42.20 68.32 36.45 42.98 69.90 46.38 . 55.59 62.8.1.

70.95 82.12 124.28

+ 133.39 + 116.81 + 100.32 + 81.44 + 73.18 + 59.96 + 56.53 + 48.34 + 37.17 + 27,90 + 27.28 + 26.81 + 26.65 + 24.30 + 23.25 + 22.15 + 21.22 + 16.98 + 14.71 + 9.87 + 8.95 + 5.18 -- 4.53 -- 14.69 -- 16.93

70.80

78.05

-- 7.25

72.51

48.70

+ 23.81

C1) Selon les comptes d'Etat des cantons (voir «Finances et impôts de Ja Confédération, des cantons et des c ommunes»), (s) Impôt pour ] x défense nationale, taxe militaire, soldes du sacrifice pour la défense nationale et de l'uniDot sur les bénéfices de guerre. Parts cantonales inscrites dans les comptes d'Etat (voii· «Finances et impôts de la Confédération, des cantons et des commîmes >)» converties en rendement net pour la Confédération.

633

Pour bien apprécier la signification des chiffres, il y a lieu de se rappeler que le sacrifice pour la défense nationale et l'impôt sur les bénéfices de guerre ont joué un rôle capital dans les années 1946 à 1949. Leur produit net revenant à la Confédération représentait, en moyenne, 40 francs par tête de la population. Il faut attribuer essentiellement à la disparition de ces impôts le fait que les cantons, de 1946 à 1949, ont versé à la Confédération, par tête de la population, 7 fr. 25 de plus que ce qu'ils recevaient d'elle, mais qu'il y eut au contraire, de 1952 à 1955, un solde de 23 fr. 81 en faveur des cantons.

Notre tableau montre aussi que, dans la période de 1952 à 1955, les cantons financièrement faibles -- Uri, Schwyz, Unterwald-le-Haut, Fribourg, Appenzell Rh.-Int. et Rh,-Ext., Grisons, Tessin et Valais -- ont été, par rapport à celle de 1946 à 1949, plus largement favorisés que les autres cantons. Les neuf cantons financièrement faibles sont, sans exception, ceux qui enregistrent les plus grands écarts entre les parts cantonales aux recettes et subventions fédérales et les parts fédérales aux impôts et taxes de la Confédération. Pour les neuf cantons, ces écarts en leur faveur ont augmenté en moyenne de 49 francs par tête de la population. Les 16 autres cantons qui ne sont pas financièrement faibles n'enregistrent qu'un accroissement de 27 francs en chiffre rond. Si, do 1946 à 1949, il y avait encore 11 cantons qui versaient plus à la Confédération qu'ils n'en recevaient, on constate qu'il n'y en avait plus que trois (Baie-Ville, Genève et Zurich) dans la période de 1952 à 1955.

II. La péréquation financière directe Le mode de financement de l'assurance-vieillesse et survivants et l'affectation de 10 pour cent du produit des droits d'entrée sur les carburants à des fins de péréquation contribuèrent à améliorer considérablement la situation des cantons financièrement faibles.

L'article 105 de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants applique le principe de la péréquation financière en faisant dépendre les contributions cantonales des ressources des cantons. De son côté, l'article 106 de la même loi prescrit que la moitié du produit des intérêts d'un fonds de 400 millions de francs est affectée à la réduction des contributions des cantons financièrement faibles.

De 1948 à
1954, 14 cantons ont reçu à ce titre des contributions pour réduire leurs prestations. Pour les années de 1955 à 1958, 12 cantons reçoivent, aux fins de péréquation, des sommes calculées sur le rendement par tête de la population de l'impôt pour la défense nationale (5e et 6e périodes). Ces cantons sont les suivants:

634

Cantons

Contributions pour réduire les prestations cantonales à l'AVS pour li période 1955-1968 conformément à la loi sui l'AVB, art. 106 Fr.

622383 79741 330149 126462 . . . .

826346 111 927 Appenzell Eh -Ext. . . . . .

97044 Appenzell Rh -Int 540578 618844 363777 722252 776 244 Total 5 215 747 Les cantons d'Unterwald-le-Bas (2e période: env. 24000 fr.) et de Vaud (2e période: env. 279 000 fr.) ne reçoivent plus de contributions.

Le second procédé de péréquation directe -- qui consiste à allouer des subventions pour les routes -- est en usage depuis 1950. Le Conseil fédéral avait proposé, primitivement, que les cantons financièrement faibles reçoivent une somme de 6 millions au maximum, en sus de la part générale. On renonça cependant à prévoir une telle limitation. Aussi les sommes fournies par les 10 pour cent prélevés aux fins de péréquation sur le produit des droits d'entrée sur les carburants augmentèrent-elles à mesure que s'accroissait le volume des importations de carburants et passèrent-elles de 9,5 millions en 1950 à 16,3 millions en 1955.

Différents facteurs sont pris en considération pour le calcul des parts cantonales au produit des droite d'entrée sur les carburants. Ces facteurs sont: la longueur des routes, les dépenses pour les routes, la densité de la population et le rendement de l'impôt pour la défense nationale (1). Ce mode de calculer, qui est simple, a donné en général satisfaction, mais il a quelques défauts. Il a ainsi permis au canton du Tessin du fait de son activité intense en matière de routes, de faire monter sa part aux contributions de péréquation d'un peu moins de 2,5 millions en 1950 à plus de 5 millions en 1955. Les fonds à disposition augmentèrent d'environ 70 pour cent, cependant que la part du canton du Tessin haussait de plus de 100 pour cent.

Le tableau suivant montre que, en dépit de quelques défauts, le mode de répartition des parts cantonales au produit des droits d'entrée sur les carburants a été favorable aux cantons financièrement faibles: ~ 1 AF du 21 décembre 1950 (RO 1951, 167).

Uri Schwyz TJnterwald -le-Haut . .

L'incidence des subventions allouées par la Confédération aux cantons pour les routes en 1949 et 1954 1949 Cantons

Zurich Berne

Lucerne Uri

Unterwald-le-Haut .

TJnterwald-le-Bas .

Glaris . . . . . .

Soleure Bàie-Vaie . . . . .

Baie -Campagne . .

Schafihouse . . . .

Appenzell Bh.-Ext.

Appenzell Rh.-Int. .

Saint- Gali Grisons

Vaud Genève . . . . . .

Total des dépenses pour les routes

Subventions fédérais [')

Fr.

Fr.

1 18790000 22 133 000 2 560 000 2 272 000 2 064 000 457 000 406 000 1 174 000 1 423 000 4 813 000 4 376 000 5 677 000 2 025 000 1 129 000 1 362 000 244000 8 274 000 6 603 000 7 198 000 5 099 000 10 187 000 17 269 000 4 879 000 5 562 000 4 436 000

î 1 342 000 2 696 000 269 000 1 599 000 825 000 182000 215 000 670 000 152 000 749 000 406 000 498 000 299 000 186 000 304 000 76000 1 028 000 3 159 000 725 000 732 000 1 803 000 2048000 841 000 710000 414000

Total 140 432 000

1954

Dépenses faites par les cantons en francs (')

21 928 000

Total des par tête dépenses pour les routes en pont- de popueent [») lation Fr.

Fr.

a

4 17447000 92,9 19 437 000 87,8 2 291 000 89,5 29,6 673 000 1 238 000 60,0 276 000 60,3 191 000 47,1 42,9 504 000 1 271 000 89,3 4 065 000 84,4 90,7 3 970 000 5 179 000 91,2 1 726 000 85,2 83,6 943 000 1 058 000 77,6 168 000 68,8 7 246 000 87,6 3444000 52,1 6 473 000 89,9 4 367 000 85,6 8 384 000 82,3 15 222 000 88,1 4 037 000 82,8 4 872 000 87,3 4 022 000 90,7

118504000

84,4

5 22,45 24,24 10,26 23,56 17,42 12,47 9,85 13,37 30,10 25,61 23,28 26,35 16,05 16,40 22,06 12,52 23,44 25,12 21,62 29,16 47,89 40,31 25,36 38,02 19,82

25,13

6 32 160 000 28 162 000 6 029 000 3 357 000 2 993 000 1 028 000 811 000 1 699 000 3 539 000 6 849 000 7 230 000 10421 000 6 666 000 1 357 000 2 260 000 617 000 10 670 000 11 607000 11 130000 7 474 000 13 567 000 24 737 000 14 507 000 5 816 000 5 420 000

Dépenses faites par les cantons Subventions fédérales (') en franca ('} Fr.

7 4 099 000 6 720 000 2 033 000 2 862 000 1 669 000 719 000 275 000 419 000 445 000 1 913 000 1 070 000 1 961 000 1 451 000 236 000 976 000 309 000 3 040 000 8880000 1 479000 1 607 000 8611 000 4 262 000 6 315 000 I 730 000 431 000

220 006 000 63 512 000

8 28 061 000 21 442 000 3 996 000 495 000 1 324 000 309 000 536 000 1 280 000 3 094 000 4 936 000 6 160000 8 460 000 5215000 1 121 000 1 284 000 308 000 7 630 000 2 727 000 9 651 000 5 867 000 4 956 000 20 475 000 8 192 000 4 086 000 4 989 000 156 494 000

par tête en pour - de popueent («) lation Fr, 9 87,3 76,1 66,3 14,7 44,2 30,1 66,1 75,3 87,4 72,1 85,2 81,2 78,2 82,6 56,8 49,9 71,2 23,5 86,7 78,5 36,5 82,8 56,5 70,3 92,0

10 36,11 26,74 17,90 17,33 18,63 13,97 27,64 33,99 73,25 31,10 36,13 43,05 48,49 19,49 26,78 22,93 24,36 19,89 32,09 39,18 28,31 54,23 51,46 31,88 24,59

71,1

33,19

0) Subventic>ns prélevées sur le produit des droits (Te utrée sur les çarburants et aut res subventioas pour les roui es.

O Du 1 otal des dépen es.

(") Y comprLs les subventions payées aux cantons par des conunuites et ptirticuliers.

636 II appert du tableau que le mode de répartition du produit des droits d'entrée a fortement favorisé tous les cantons considérés jusqu'ici comme financièrement faibles. Le fait est particulièrement frappant pour le canton du Tessin, qui, en 1949, devait encore supporter 82,3 pour cent de ses dépenses pour les routes et qui, en 1954, n'avait plus à en supporter que 36,5 pour cent. Pour le canton d'Uri, la conséquence a été qu'il n'a plus eu à supporter que 14,7 pour cent (moins de 0,5 million) dea 3,3 millions dépensés pour les routes en 1954. Le canton des Grisons, qui doit aménager et entretenir un réseau considérable, reçut également une aide efficace.

En 1949, il avait dû prendre à sa charge 3,4 millions sur les 6,6 qu'avaient coûté les routes. En 1954, il put dépenser pour les routes 11,6 millions, dont 2,7 seulement couverts par ses propres ressources. Bien que ses dépenses routières aient augmenté de 5 millions en 1954, il paya de ses deniers 0,7 million de moins qu'en 1949.

Si, comme il faut s'y attendre, la motorisation se développe dans notre pays et que les étrangers ayant leur propre voiture arrivent plus nombreux chez nous, les recettes produites par les droits sur les carburants s'accroîtront également. Le maintien du régime actuel signifierait qu'il y aurait aussi une augmentation proportionnelle des sommes à affecter à la péréquation complémentaire directe dans le domaine des routes. Comme nous l'avons dit, on voulait primitivement réserver à ces fins une somme maximum de 6 millions par an, mais les sommes mises à disposition s'élevèrent déjà à 9,5 millions la première année (1950) et à 16,3 millions en 1955. Dans la moyenne des années 1959 à 1963, nous comptons que les recettes provenant des droits d'entrée sur les carburants atteindront 230 millions. Si le régime en vigueur est maintenu tel quel, il restera ainsi à disposition, pour la péréquation directe en matière de routes, une somme annuelle de 23 millions.

III. Le régime futur H est hors de doute que les mesures directes et indirectes qui ont été prises pour renforcer la péréquation financière entre les cantons ont eu de bons effets pour les cantons financièrement faibles. On ne doit cependant pas négliger les inconvénients découlant du fait qu'une partie importante de la péréquation est liée à des recettes douanières
en continuelle augmentation. Ajoutons que le cercle des cantons qui doivent bénéficier de la péréquation rie peut être tracé que difficilement; Nous ne disposons dans notre pays d'aucun critère d'application générale et universellement reconnu comme moyen de déterminer les ressources financières des cantons. Jusqu'ici, on s'est fondé pour cela sur le rendement de l'impôt pour la défense nationale, calculé par tête de la population. On s'est servi de cette méthode parce que l'impôt en question était le seul impôt qui fut perçu dans l'ensemble du pays selon des règles à peu près uniformes. Mais cette méthode ne permet pas non plus de tenir suffisamment compte de tous les facteurs à considérer.

637

Le grand principe à appliquer en matière de péréquation directe, c'est celui selon lequel la péréquation ne doit s'étendre qu'aux cantons qui ont épuisé toutes les possibilités de se tirer d'affaire d'eux-mêmes. On ne saurait attendre de la Confédération qu'elle mette au bénéfice d'une péréquation renforcée les cantons qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent ou ne veulent pas user de leurs ressources financières dans la même mesure que d'autres. Plus les sommes disponibles pour la péréquation financière directe augmenteront, moina les cantons exclus de la péréquation seront disposés à venir en aide à ceux qui ne tirent pas entièrement parti de leurs ressources.

Pour ces raisons, le département des finances et des douanes a confié à une petite commission présidée par M. Max Weber, conseiller national, le soin d'examiner quels critères pourraient servir à mesurer les ressources financières des cantons, à la place du rendement de l'impôt pour la défense nationale, calculé par tête de la population. Ces experts recommandent de se servir de chiffres tirés de la statistique des rendements des impôts cantonaux et communaux et rendus comparables entre eux au moyen de l'indice de la charge fiscale indiqué par la commission de recherches économiques.

Diverses variantes fondées sur cette base n'ont pas donné des résultats sensiblement différents les uns des autres ni nettement différents des résultats obtenus avec le rendement de l'impôt pour la défense nationale calculé par tête de la population. Les experts jugent que le moment n'est pas encore venu d'adopter définitivement un mode de calcul déterminé. Ils estiment qu'il convient tout d'abord de savoir quels seront les impôts prévus par les nouvelles dispositions sur le régime financier et de quelle manière ils seront aménagés. Avant de choisir de nouveaux critères, on devrait aussi savoir à quel usage ils doivent servir. Les critères seront établis de façon différente selon qu'il s'agira, comme avec le produit de l'impôt pour la défense nationale par tête de la population, de classer sommairement les cantons en financièrement forts, moyennement forts et faibles ou au contraire de les utiliser directement comme clé pour une péréquation financière. Si l'on se contente de constituer quelques groupes de cantons, des critères relativement simples,
accessibles à chacun, sont suffisants. Mais si l'on veut établir une véritable clé de répartition, des calculs compliqués sont nécessaires, dont le public aura plus de peine à saisir le mécanisme. Nous partageons cet avis des experts, ajoutant que même des calculs compliqués ne permettront pas aisément d'arriver à un résultat entièrement satisfaisant. Différents éléments à considérer ne peuvent se traduire en chiffres et sont sujets à des variations constantes.

Pour toutes ces raisons, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il est justifié de vouloir améliorer encore là péréquation financière intercantonale et que, par conséquent, le principe du renforcement de cette pèrequation doit être inscrit dans les dispositions sur le nouveau régime financier.

Nous pensons qu'il conviendra, pour l'avenir aussi, de porter l'accent sur Feuille, fédérale. 109e année. Vol. I.

44

638

le maintien des mesures traditionnelles de péréquation. Aux termes du nouvel article 42 ter de la constitution, la Confédération devra encourager la péréquation financière entre les cantons et, en allouant des subventions, considérer en particulier dans une juste mesure, les ressources financières des cantons et les régions de montagne.

Ainsi que nous l'avons dit, la façon dont le droit en vigueur a réglé la péréquation financière souffre de certains défauts. Il semble indiqué de vouloir chercher à financer les mesures de péréquation de l'avenir au moyen de recettes moins sujettes à variations que le produit des droits d'entrée sur les carburants. C'est pourquoi l'article constitutionnel que nous proposons prévoit que les cantons garderont trois dixièmes du produit brut de l'impôt pour la défense nationale et qu'un sixième de cette part cantonale sera affecté à la péréquation. De cette façon, 14 à 15 millions seront affectés à la péréquation, en sus des 6 millions, en chiffre rond, qui servent à faciliter aux cantons financièrement faibles le versement do leurs contributions à l'assurance-vieillesse et survivants. Selon quel barème ces sommes devront-elles être réparties entre les cantons ? Comment faudra-t-il tracer le cercle des cantons bénéficiaires ? Ce sont là des questions qu'il y aura lieu de régler quand on sera au clair sur le nouveau régime des finances.

C'est à ce moment-là qu'on pourra aussi étudier les idées contenues dans la motion Danioth du 4 octobre 1956. Cette motion demande de modifier le système appliqué pour classer les cantons d'après leur capacité financière et d'avoir égard non seulement au montant de l'impôt pour la défense nationale versé par tête de la population, mais aussi ä la densité de la population dans chaque canton; et, en outre, de prendre en considération les deux facteurs de la capacité financière sur le plan régional et local également.

Qu'ils soient financièrement faibles ou forts, tous les cantons sont intéressés à la façon dont la péréquation financière intercantonale se fera et tout nouveau projet sera envoyé à leurs gouvernements.

Nous proposons pour l'instant de maintenir en vigueur sans changement les dispositions actuelles sur la répartition du produit des droits sur les carburants, et cela jusqu'au moment où les nouvelles règles de droit fédéral
concernant le financement des grands travaux de routes auront été adoptées.

Entre-temps, la législation assurant l'exécution de l'article 41 ter, 3e alinéa, lettre c, de notre projet sera suffisamment avancée pour qu'on puisse se faire une idée d'ensemble du problème d'une péréquation financière aussi équitable que possible.

D. L'INTERDICTION DES ARRANGEMENTS FISCAUX Le 1er mars 1945, le Conseil d'Etat du canton de Zurich, mandaté par le Grand conseil zurichois, a déposé, selon l'article 93 de la constitution fédérale, une initiative ayant la teneur suivante (traduction) :

639 Le Conseil fédéral et l'Assemblée fédérale sont invités, à l'occasion de la réforme des finances fédérales, en tenant compte des différences dans la situation économique et sociale des diverses régions du pays, à prendre des mesures qui permettent une taxation et un assujettissement uniforme des contribuables sur tout le territoire de la Confédération et qui interdisent en particulier les arrangements fiscaux avec des sanctions au cas où cette disposition serait violée.

Par décision du 19/21 mars 1945, les chambres transmirent la demande d'initiative au Conseil fédéral pour rapport.

Dans son message du 22 janvier 1948 concernant la réforme constitutionnelle des finances de la Confédération (1), le Conseil fédéral proposa d'ajouter à l'article 46 de la constitution un 3e alinéa, ainsi conçu: La Confédération peut, par voie législative, prendre des dispositions contre les privilèges injustifiés accordés à des contribuables en particulier.

Le Conseil fédéral considérait que la pratique suivie par certains cantons, qui consiste à imposer certains contribuables sur la base d'arrangements particuliers dérogeant à la réglementation générale de la loi constitue non seulement une violation du principe de l'égalité devant la loi, mais est contraire aussi à un devoir d'amitié confédérale, qui va de soi dans un Etat fédératif, savoir que les cantons sont tenus d'avoir des égards les uns envers les autres et de s'interdire toute concurrence déloyale et marchandage fiscal pour s'attirer une clientèle. Dans son message de 1948, le Conseil fédéral estimait qu'une réglementation fédérale dans ce domaine se justifierait en tout cas si les efforts des cantons pour réprimer par la voie d'un concordat la concurrence déloyale en matière d'impôts ne devaient pas aboutir. Les chambres adoptèrent la disposition proposée par le Conseil fédéral, sans y rien changer, dans l'arrêté fédéral du 21 mars 1950 (2).

Dans l'entre-temps, les efforts de la conférence des directeurs cantonaux des finances ont abouti à la conclusion du concordat entre les cantons de la Confédération suisse sur l'interdiction des arrangements fiscaux, du 10 décembre 1948 (3), Les 12 cantons suivants furent parties au concordat dès le début: Zurich, Berne, Glaris, Fribourg, Baie-Ville, Bâle-Campagne, Sohaffhouse, Appenzell Rhodes-intérieures, Saint-Gall Argovie, Thurgovie et Neuchâtel. Les cantons de Soleure (1949) et d'Uri (1950) y adhérèrent encore après coup (4). Comme 11 cantons n'avaient pas donné leur adhésion et que ceux qui l'ont fait peuvent s'en départir librement -- de sorte que les efforts des cantons pour éliminer de cette manière la concurrence déloyale qu'ils se font entre eux dans le domaine fiscal n'avaient pas eu de succès décisif--l'interdiction des arrangements fiscaux contenue dans le projet constitutionnel rejeté par le peuple et les cantons le 4 juin 1950 fut, (*) FF 1948, I, 621; tirage à part, 293.

(*) Article 2 (FF 1950, I, 700).

(") Approuvé par le Conseil fédéral le 26 septembre 1949 (RO 194», 1459).

(*) RO 1949, 1625; 1950, 1312.

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conformément aux propositions du Conseil fédéral du 20 janvier 1953 (1), reprise sans changement par les chambres dans le projet de révision du 26 septembre 1953 (2). Elle subit cependant le même sort que ce projet dans la votation du 6 décembre 1953.

La Confédération a pris, depuis 1945, diverses «mesures qui permettent une taxation et un assujettissement uniformes des contribuables» (3). Nous mentionnons surtout les efforts pour rendre uniforme la taxation en vue des impôts fédéraux directs (impôt et sacrifice pour la défense nationale), qui exercèrent aussi, de façon détournée, des effets stimulants quant à l'uniformité des taxations en vue des impôts cantonaux. En outre, au début de 1945, le taux de l'impôt anticipé fut porté de 15 pour cent à 25 pour cent, l'impôt retenu sur les prestations d'assurances sur la vie fut institué et une amnistie aplanit les voies menant à l'honnêteté fiscale. En matière d'impôt pour la défense nationale, l'administration fédérale des contributions prêta son concours aux cantons dont l'appareil fiscal était peu développé, en procédant à des examens de comptabilités et en traitant des cas spéciaux difficiles; elle conseilla les autorités de taxation et elle veilla à l'uniformité de l'imposition des personnes exerçant une activité indépendante, en particulier celle des professions libérales (médecins, dentistes, avocats, etc.), dans tous les cantons, en surveillant constamment les taxations et en établissant des coeificients expérimentaux. En outre, l'administration fédérale des contributions, avec la coopération des cantons, édicta des règles pour une estimation aussi uniforme que possible des marchandises, des titres et des immeubles, pour les amortissements, etc. Enfin, on a attribué un grand poids au développement des échanges d'informations et à l'instruction des autorités de taxation dans les questions économiques. H est vrai que ces mesures n'ont eu et n'ont encore que des effets indirects.

Sans une autorisation expresse de la constitution, la Confédération ne peut cependant exercer une influence directe plus considérable sur le droit fiscal cantonal, ainsi que semble le demander l'initiative du canton de Zurich, savoir la promulgation de dispositions obligeant les cantons et les communes à observer, lors de la perception des impôts cantonaux et communaux,
les principes indiqués dans l'initiative. Pour des raisons évidentes, nous nous abstenons de proposer un article constitutionnel donnant une autorisation de ce genre.

En revanche, comme auparavant, il y a de sérieux motifs pour saisir l'occasion de la réorganisation des finances fédérales afin d'inscrire dans la constitution au moins le principe de l'interdiction des arrangements fiscaux.

(i) FF 1953, I, 190, 199; tirage à part, 90, 99.

(*) Article 2 (FF 1953, III, 235).

( a ) Voir aussi à ce sujet la circulaire du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux indiquant des mesures pour améliorer la situation fiscale, du 8 décembre 1944 (FF 1944, I, 14S4).

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Dans un Etat fédératif, la constitution n'a pas seulement comme but de délimiter les attributions entre l'Etat central et les Etats membres, mais aussi de régler les questions fondamentales qui touchent la solidarité et la vie commune des Etats réunis en confédération. II ne peut être indifférent à la Confédération que les cantons réunis dans son sein aient ou non des égards les uns pour les autres dans le domaine des impôts. C'est en ce sens que nous proposons à nouveau aujourd'hui de compléter la constitution par une disposition interdisant les arrangements fiscaux.

Le dépôt d'une initiative selon l'article 93, 2e alinéa, de la constitution oblige les chambres à délibérer quant au fond et à prendre une décision sur l'objet de la demande (1). L'initiative du canton de Zurich, du 1er mars 1945, qui a déjà été traitée quant au fond lors des discussions sur la réorganisation des finances fédérales de 1948 à 1950 et en 1953, peut désormais être radiée dans la liste des objets en délibération devant les chambres.

Une proposition antérieure de radiation déposée par le Conseil fédéral n'a pas été reçue par les chambres, selon décision du 7/19 juin 1956, mais le Conseil fédéral a été invité à proposer la radiation de l'initiative en même temps que le nouveau projet concernant la réforme des finances fédérales.

Nous fondant sur cette décision, nous avons l'honneur de vous faire ici une proposition dans ce sens.

E. LE PROJET D'ARRÊTÉ I. Généralités Le présent projet d'arrêté se propose, comme les projets rejetés en 1950 et en 1953, d'établir de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération. S'il montre une ressemblance extérieure avec l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 ( 2 ), rejeté en votation populaire le 6 décembre 1953, il en diffère sur des points essentiels. Il écarte des solutions qui ont joué contre le projet d'alors devant le peuple ou qui ont été rejetées depuis, comme le referendum financier et ce qu'on a appelé le «frein aux dépenses», dans la votation populaire du 30 septembre 1956 (3).

Il donne, en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires et d'impôt pour la défense nationale, des garanties sur la durée de perception, les taux maximums, la lijäte des marchandises exonérées et les minimums imposables, qui prévoient une charge substantiellement
atténuée par rapport au projet de 1953. En outre, comparativement au régime actuel, il propose des allégements valables dès l'entrée en vigueur de l'arrêté, donc déjà avant la pro(1) Voir Fleiner/Giacometti, Schweizerisches Bundesstaatereeht, Zurich 1949, p. 547 ; Burckhardt, Kommentar der schweizerischen Bundesverfassung, 3e édition, Berne 1931, p. 721.

( s ) FF 1953, HI, 235.

(s) AF du 27 juin 1956 sur l'initiative populaire concernant le vote des dépenses par l'Assemblée fédérale (FF 1956, I, 1352).

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rnulgation des lois d'exécution nécessaires; c'est là ansai une innovation par rapport à 1953. Lors de la préparation du projet d'arrêté, 011 a consulta une petite commission d'experts pour les questions de droit constitutionnel.

II. Les diverses dispositions en particulier Le chiffre Ier du projet d'arrêté contient les modifications qu'il est prévu d'apporter au texte en vigueur de la constitution. Les nouvelles dispositions, dont le nombre a été réduit par rapport aux projets antérieurs, se bornent à l'essentiel et tentent de satisfaire autant que possible an principe qui veut que la constitution se limite à donner les grandes lignes de la législation d'exécution, sans se perdre dans les détails.

Article 18, 4e alinéa. La nouvelle disposition maintient le principe que la taxe d'exemption du service militaire doit être perçue d'après des dispositions de droit fédéral, donc uniformes. Ce qui est nouveau, c'est la précision que les cantons perçoivent la taxe pour le compte de la Confédération, donc que la souveraineté en cette matière appartient à la Confédération. Ce serait une erreur de délimiter cette souveraineté comme on le fait dans les articles qui accordent une compétence (par ex. l'art. 416is), car on pourrait faire croire ainsi que la Confédération reçoit une nouvelle faculté et que le citoyen se voit imposer une obligation qu'il n'avait pas jusqu'ici, alors que l'une et l'autre découlent de la souveraineté en matière militaire et de l'obligation du service militaire.

La commission de perception allouée aux cantons et la réduction par étapes de la participation actuelle des cantons à la taxe militaire sont réglées dans le chiure II, article 6, du projet d'arrêté (*). La future commission de perception, qui s'élèvera à 20 pour cent du produit brut, n'a pas, malgré son importance relative, la signification d'une participation cantonale au produit de la taxe, comme les parts des cantons au produit des droits de timbre et de l'impôt anticipé; c'est seulement une indemnité pour les dérangements et frais de perception occasionnés aux cantons; il ne serait donc pas indiqué, en raison de sa nature, de la mentionner à l'article 18, 4e alinéa.

Article 41 bis et 41 ter. Ces articles, dans leur teneur actuelle, donnent seulement à la Confédération la faculté de percevoir des droits de timbre et
d'imposer le tabac. Ils doivent devenir désormais un catalogue complet des impôts. L'article 41 bis comprend les impôts que la Confédération peut déjà percevoir actuellement sans limitation de durée (droits de timbre, impôt sur le tabac) et ceux qui doivent lui être désormais accordés de façon permanente (impôt anticipé, impôts de rétorsion). L'article 41 ter (1) Voir à ce sujet 2e partie, chapitre B, chiffres III, 1, et VIII, 2, lettre a, cideasus.

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renferme l'impôt sur le chiffre d'affaires et l'impôt pour la défense nationale, que la Confédération est autorisée à percevoir pendant un temps limité et pour l'établissement desquels la constitution doit donner des règles particulières.

Les opinions divergent sur le point de savoir si les articles fiscaux de la constitution doivent contenir seulement l'autorisation de principe pour percevoir les impôts qui y sont mentionnés ou déjà des limites précises en vue de la législation d'exécution. Les articles accordant simplement une compétence correspondent à l'opinion que la constitution ne doit renfermer que des principes et qu'il appartient à la législation d'exécution de faire un usage raisonnable de l'autorisation accordée. Cette opinion peut se fonder sur le modèle de toutes les constitutions cantonales et elle a aussi pour elle la doctrine constitutionnelle dominante et la science financière. H s'y ajoute que les lois fédérales de ce genre sont soumises au referendum facultatif, donc que le citoyen pourra en définitive décider de la loi d'exécution. L'opinion opposée prétend que certaines décisions considérées comme fondamentales au sujet de la structure des impôts devraient être prises dans la constitution et non pas laissées à la législation d'exécution. La constitution devrait définir les limites de l'intervention fiscale, ce qui est singulièrement important lorsque la même matière est imposée par la Confédération et par les cantons. Sans ces garanties, on ne pourrait obtenir l'assentiment du peuple et des cantons.

Nous estimons que l'on peut comme jusqu'ici se contenter d'une simple déclaration de compétence dans la constitution pour les impôts dont la Confédération disposera de façon permanente et dans le domaine desquels elle n'entre d'ailleurs pas en concurrence avec les cantons. Quant à l'impôt sur le chiffre d'affaires et à l'impôt pour la défense nationale, dont la perception, pour des raisons politiques, doit être limitée à la période de 1959 à 1970, nous proposons au contraire d'introduire dans le texte constitutionnel, en vue de la législation d'exécution, certaines règles sur la structure générale de ces impôts, l'établissement de leur tarif, les taux maximums et divers minimums exonérés.

Article 41 bis. Cet article sera à l'avenir la base constitutionnelle pour les droits de
timbre (lettre a) et en outre, ce qui est nouveau, pour l'impôt anticipé (lettre 6), l'impôt sur le tabac (lettre c) et les impôts de rétorsion (lettre d).

7er alinéa, lettre a; droits de timbre. La nouvelle disposition relative aux droits de timbre se rapproche autant que possible du texte de l'article 41 bis actuel, qui a fait ses preuves dans l'ensemble. Ainsi que ce dernier, le nouveau texte déclare objets imposables d'une manière générale les documents concernant les opérations commerciales et excepte de l'imposition fédérale, pour les laisser aux cantons, ceux qui se rapportent aux opérations

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immobilières et hypothécaires. Parmi les documents concernant los opérations commerciales, on cite spécialement, comme jusqu'ici, les titres, y compris les effets de change et effets analogues, ainsi que les quittances de primes d'assurances. On y ajoute désormais, pour les titres, la mention expresse des coupons, afin de préciser que le droit sur les coupons reste comme auparavant un élément des droits de timbre. La participation des cantons pour un cinquième au produit des droits de timbre est maintenue sans changement. La 2e phrase actuelle du 1er alinéa de l'article ilbis, qui concerne les relations avec le droit cantonal en matière de timbre, est remplacée par le 2e alinéa nouveau de ce même article.

La mention des «billets de loterie» et des «documents pour le transport de choses» est une innovation. Ces deux sortes de documents ne sont pas rangées parmi les documents concernant les opérations commerciales, mais assimilées à ces derniers. L'expression «documents pour le transport de choses» remplace l'ancienne expression «documents en usage dans les transports». Cette modification a été proposée pour la première fois dans le projet de 1953 et elle n'a pas été contestée dans la discussion parlementaire (1). La nouvelle teneur de cette disposition et sa disjonction de la notion des «documents concernant les opérations commerciales» devraient empêcher en tout cas que, faute de base constitutionnelle, on ne puisse remplacer plus tard le droit de timbre actuel sur les documents en usage dans les transports par un impôt sur les transports embrassant aussi le trafic par la route. La compétence de la Confédération pour frapper d'un droit de timbre ou déclarer exonérés les documents de transport doit être maintenue expressément; sinon, les cantons pourraient imposer ces documents (y compris les documents de transport des chemins de fer fédéraux) ou réintroduire le droit de timbre cantonal sur les lettres de voiture, abrogé par la loi fédérale sur les droits de timbre ( 2 ).

Bien que l'on ne veuille frapper d'un droit de timbre que les gains faits dans les loteries (*), il ne convient pas de parler, sous la lettre a, de «gains faits dans les loteries». Pour pouvoir frapper ces gains d'un droit de timbre, il faut (au moins du point de vue formel) déclarer objet imposable un document; le document le
plus apparent dans ce cas est celui qui donne qualité pour recevoir le gain, c'est-à-dire le billet de loterie.

Ier alinéa, lettre b; impôt anticipé. Pour l'impôt anticipé, ainsi que pour l'impôt retenu sur les prestations d'assurances sur la vie, il n'existait jusqu'ici aucun article constitutionnel. Les formules proposées et discutées par les chambres depuis 1948 se sont plu à décrire dans leurs grandes (!) Article 42ois, lettre o, du projet (FF 1953, I, 193s. et 208; tirage à part, p. 94e.s et 108); AF du25 septembre 1953, article 42&i«, lettre a (FF 1953, III, 236).

( ) Voir article ilbie, 2e alinéa, du projet d'arrêté et ci-dessus,2« partie, chapitre B, chiffre III, 2, lettre 6.

(S) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chiffre III, 2, lettre 6.

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lignes le mode de perception et la fonction de l'impôt anticipé (1). Le terme «impôt anticipé» est devenu mie notion qui n'a pas besoin d'être définie autrement, car elle évoque clairement comment l'impôt fonctionne et à quel but il tend. On peut donc renoncer à dire expressément dans le texte constitutionnel qu'il s'agit d'un impôt perçu par voie de retenue à la source, que les personnes domiciliées en Suisse et satisfaisant à leurs obligations fiscales peuvent se le faire rembourser ou imputer sur leurs impôts cantonaux et communaux, et enfin que la Confédération rétrocède aux cantons les montants qu'ils ont imputés ou remboursés. La lettre & se borne à accorder à la Confédération la compétence exclusive (voir aussi 2e al.) pour percevoir l'impôt anticipé et à délimiter l'objet de l'impôt. Cette disposition permet de continuer BOUS leur forme actuelle la perception de l'impôt anticipé et de l'impôt retenu sur les prestations d'assurances (a).

1<* alinéa, lettre c; impôt sur le tabac. Cette disposition remplace l'article 41 ter actuel de la constitution, qui déclare: «La Confédération est autorisée à prélever des impôts sur le tabac brut et manufacturé». Cette modification purement technique était aussi prévue dans l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953.

7er alinéa, lettre d; impôts de rétorsion. Une disposition semblable a été déjà proposée en 1953 et reprise telle quelle dans l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (3). Elle a pour but d'inscrire de façon permanente dans la constitution la compétence accordée aujourd'hui à la Confédération par l'article 6 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954. Le but des impôts de rétorsion, qui est de parer aux mesures fiscales prises par les Etats étrangers, permet et commande de ne pas définir de façon plus précise les impôts entrant en ligne de compte; le législateur doit rester libre d'instituer celui qui lui semble opportun (*).

2e alinéa; exclusivité de la souveraineté fiscale fédérale. Quant au fond, la même disposition se trouve déjà à l'article 42&»s, 2e alinéa, des arrêtés fédéraux du 21 mars 1950 et du 25 septembre 1953 (6). Pour les droits de timbre, cette disposition remplace la 2e phrase de l'article 41 ois, 1er alinéa, actuel. Il est indiqué que la réglementation soit étendue à l'impôt anticipé et à l'impôt sur le tabac.
3e alinéa; lois d'exécution. L'exécution des impôts fédéraux désignés er au 1 alinéa relève de la législation ordinaire selon la procédure fixée dans les articles 89 et 89o£s, 1er et 2e alinéas, de la constitution. H en est ainsi t1) Voir FF 1948, I, 627 (tirage à part, 299), 1950, I, 701, 1953, I, 208 (tirage à part, 108) et 1953, HI, 236.

(a2 ) Voir ci-dessus, er2e partie, chapitre B,, chiffre IV, 1.

( ) Article 42&M, 1 alinéa, lettre d, duprojet d'arrêté (FF 1953,1, 208; tirage a part, p. 108) et de l'arrêté fédéral (FF 1953, III, 236).

(*) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chifîre IV, 2.

(*) FF 1950, I, 702; 1953, III, 236.

646

également en particulier pour les impôts de rétorsion (1er al., lettre d), dont les dispositions d'exécution étaient encore réservées à l'Assemblée fédérale (en compétence absolue), ou au Conseil fédéral mandaté par elle, dans l'article 4:2bis, 3e alinéa, de l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (l), qui reprenait la disposition contenue à l'article 6 de l'arrêté sur le régime financier de 1951 à 1954. Aujourd'hui cependant, en raison de l'article SQbis de la constitution, il semble inutile que l'on institue un mode spécial de légiférer en matière d'impôts de rétorsion.

Article dlter. Cet article réglemente l'impôt sur le chiffre d'affaires et l'impôt pour la défense nationale. Dans le texte actuel de la constitution, l'article portant ce numéro accorde à la Confédération la compétence pour imposer le tabac, faculté qui est désormais reportée ·-- sans changement quant au fond -- dans le nouvel article 416«s, 1er alinéa, lettre c. Le nouvel article 4lter est conçu de manière analogue à l'article 42quinquies de l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 ( 3 ); son 1er alinéa est à proprement parler la disposition accordant la compétence en vertu de laquelle la Confédération peut pendant 12 ans (1959 à 1970) percevoir un impôt sur le chiffre d'affaires et un impôt pour la défense nationale ; les 2e et 3e alinéas donnent les directives pour l'établissement de la législation d'exécution.

1er alinéa, lettre a; impôt sur le chiffre d'affaires. La disposition proposée permet de percevoir un impôt sur le chiffre d'affaires au sens de la réglementation actuellement en vigueur ( 3 ). Les faits auxquels la Confédération doit pouvoir rattacher l'imposition sont décrits ci-après. Les plus importants pratiquement sont les «transactions en marchandises», qui comprennent : la livraison de marchandises (par ex. en vertu d'un contrat de vente ou d'entreprise), ce qu'on appelle la consommation particulière et l'acquisition de produits naturels du pays. La faculté d'imposition est limitée aux transactions on marchandises «sur territoire suisse» et elle ne s'étend donc pas aux livraisons de l'exportation. D'autre part, l'importation de marchandises, dans l'intérêt des producteurs, commerçants et artisans suisses, ne doit pas rester exempte d'impôt ; c'est pourquoi l'impôt frappant les transactions en marchandises sur
territoire suisse est complété par un impôt frappant, en sus des droits de douane, l'«importation des marchandises». En précisant que les «travaux professionnels exécutés sur des biens meubles, des constructions et des terrains» peuvent aussi être imposés, on relève d'abord que -- comme dans le droit actuel --- la simple transformation ou le simple mélange de marchandises, exécutés professionnellement, doivent être soumis à l'impôt sur le chiffre d'affaires, même s'il n'est pas livré de matériel à cet effet. De plus, cette précision permet d'assimiler du point de vue fiscal les travaux de construction aux travaux exe(!) Voir FF 1953, I, 198 et 208 (tirage à part, p. 98 et 108); 1953, III, 236.

( as ) FF 1953, III, 237.

( ) Voir 2* partie, chapitre B, chiare V, 3, lettre 6.

647

eûtes sur des biens meubles. La culture du sol aux fins de la production naturelle (agriculture et sylviculture, viticulture et culture maraîchère) est expressément exceptée de l'imposition. On ne peut pas non plus imposer le commerce immobilier en vertu de la disposition proposée.

La 2e phrase statue (comme l'art. 416ts, 2e al., pour les droits de timbre, etc.) l'exclusivité de la souveraineté fiscale fédérale en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, si et dans la mesure où la Confédération impose des chiffres d'affaires ou les déclare exonérés. Les dispositions analogues des projets antérieurs n'ont jamais été contestées.

7er alinéa, lettre b ; impôt pour la défense nationale. Cette disposition constitue la base d'un impôt fédéral direct qui doit être perçu à côté des impôts directs cantonaux et communaux (1). Il s'agit ici également tout d'abord d'un simple article accordant la compétence; les directives pour l'établissement de la loi d'exécution se trouvent au 3e alinéa.

2e et 3e alinéas. Ces dispositions contiennent les directives constitutionnelles en vue de la rédaction des lois d'exécution concernant les impôts sur le chiffre d'affaires et pour la défense nationale qui seront perçus de 1959 à 1970. On ne peut donner dans la constitution des règles rigides concernant les besoins financiers de l'Etat et le cours de l'économie libre, qui entraîne constamment des modifications du pouvoir d'achat, des prix et des salaires ( a ). En conséquence, les articles constitutionnels concernant les impôts doivent tout particulièrement conserver une certaine élasticité. Plus ils entrent dans le détail et plus ils ligotent le législateur, plus est grand aussi le danger que l'on fasse plus tard violence à la constitution par une interprétation extensive, qui relâche le respect devant la loi fondamentale et en ébranle la solidité. Sur la base de ces constatations, on s'abstient de fixer d'une manière immuable, dans les 2e et 3e alinéas, les taux d'impôt et les minimums exonérés; les dispositions proposées contiennent seulement les limites que le législateur ne doit dépasser ni en deçà ni au delà.

Notre idée est que pour le moment la Confédération, à condition que sa situation financière ne se modifie pas essentiellement, n'utilisera pas au maximum les pouvoirs qui lui sont accordés. Cette assurance
est confirmée, à l'article 7, 2e et 3e alinéas, des dispositions d'exécution, par le fait que, pendant la période transitoire, les taux des deux impôts seront manifestement inférieurs aux maximums admissibles en vertu de l'article 41 fer, 2e et 3e alinéas, et que le minimum exonéré en matière d'impôt pour la défense nationale sera, pour les personnes mariées, majoré par rapport aux montants minimums de l'article 41te?-,3e alinéa, lettre a.

Sur ces deux alinéas, on observera encore en particulier ce qui suit.

Le 2e alinéa réglemente l'impôt sur le chiffre d'affaires. Les maximums de l'impôt (lettre a) sont fixés au niveau des taux normaux en vigueur, (1) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chiffre V, 4, lettres d et e.

(') Voir ci-dessus, 1TM partie, chapitre B, et 2e partie, chapitre A, chiÉEre VU.

648

sans tenir compte de la réduction selon l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 (l). Ces taux excluent une charge spéciale au titre de l'impôt sur le chiffre d'affaires pour les marchandises jusqu'ici soumises à l'impôt sur le luxe. La liste des marchandises franches d'impôt (lettre 6) est établie sous forme absolue, en ce sens qu'elle ne peut en tout cas pas être restreinte par rapport à son état à l'expiration du régime financier de 1955 à 1958.

D'autre part, si elle peut être élargie, c'est seulement par rapport aux marchandises qui sont soumises, le 31 décembre 1958, aux taux de 2 et 2,5 pour cent ou (en tenant compte de la réduction selon l'art. 7, 2e al., lettre c, des dispositions d'exécution) de 1,8 et 2,25 pour cent. Ce taux d'impôt réduit est applicable actuellement aux boissons sans alcool, à certains savons et produits pour lessive, aux fourrages et à d'autres matières auxiliaires pour l'agriculture, aux plantes vivantes et aux fleurs coupées (art. 19 de l'arrêté instituant l'impôt sur le chifire d'affaires).

Le 3e alinéa traite de l'impôt pour la défense nationale. La lettre a décrit le tarif de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et les minimums exonérés. La prescription qui ordonne le calcul de l'impôt d'après un tarif progressif garantit que la charge du contribuable sera fixée d'après sa capacité personnelle. La lettre b règle l'impôt sur le bénéfice et sur le capital des personnes morales. On y oblige surtout le législateur à faire en sorte que ces personnes, quelle que soit leur forme juridique, soient imposées selon leur capacité économique d'une manière aussi égale que possible.

Cette maxime de politique législative, qui découle déjà du principe constitutionnel de l'égalité devant la loi (art. 4 Cst.), devra être appliquée dans le cadre de l'imposition du bénéfice et du capital. Les tarifs maximums sont décrits de la même manière qu'à l'article 4:2quinqmes, 3e alinéa, lettre a, de l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 ( 2 ); la seule différence est que le tarif de l'impôt sur le bénéfice net, s'il est progressif, ne doit plus obligatoirement se fonder sur la formule de l'intensité du rendement, et que par conséquent un tarif à deux échelons est aussi admissible. Enfin, la lettre c dispose que la perception de l'impôt incombe comme jusqu'ici aux cantons (sous la
surveillance de la Confédération; voir l'art. 102, ch. 2, Cst.) et que ceux-ci reçoivent une participation de 30 pour cent au produit brut do l'impôt. A partir de l'entrée en vigueur des nouvelles lois d'exécution, un sixième de cette part des cantons devra être affectée à la péréquation financière intercantonale (3).

Article 42. Comme jusqu'ici, cet article donne un aperçu des sources de recettes fédérales. La teneur proposée se distingue de celle qui est en vigueur sur les points suivants. Le catalogue, qui depuis 1874 n'a été complété qu'une seule fois, savoir en 1917, lors de l'institution des droits (i) RO 1955, 1210.

(*) FF 1953, III, 238.

( s ) Voir 2e partie, chapitre B, chiffre VIII, 2, lettre 6, et chapitre C.

649 de timbre fédéraux, où l'on a ajouté la lettre g, est mis au point selon son état actuel. La disposition figurant aujourd'hui à la lettre e, d'après laquelle la Confédération et les cantons se partagent le produit brut de la taxe militaire, est remplacée par un texte qui correspond au nouvel article 18, 4e alinéa. La lettre / actuelle, qui traite des contingents d'argent cantonaux, disparaît (1).

Article 42bis. Cet article contient le principe de l'amortissement.

Nous avons déjà exposé la genèse et la portée de cette disposition ( 2 ). Le projet ne contient pas d'autres prescriptions sur la gestion des finances en général. On renonce en particulier à proposer des dispositions sur le referendum financier, sur la limitation des subventions fédérales périodiques et sur le «frein aux dépenses» (3). Vu le résultat de la votation populaire du 30 septembre 1956 sur l'arrêté fédéral du 27 juin 1956 ( 4 ) concernant le vote des dépenses par l'Assemblée fédérale (referendum financier et «frein aux dépenses»), nous ne nous estimons plus autorisés à remettre en discussion après si peu de temps la revision constitutionnelle rejetée avec évidence. Le présent projet ne doit pas non plus être surchargé de ces questions complexes qui ne sont pas encore mûres sur le plan législatif.

Article 42ter; péréquation financière. Cet article correspond largement, quant à son contenu, à l'article 42quater de l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (8). Il statue également le devoir de la Confédération d'encourager la péréquation financière entre les cantons. Le texte fait entendre que la péréquation financière intercantonale est non seulement une affaire de la Confédération par rapport aux cantons, mais surtout une affaire des cantons entre eux. Dans la mesure où la Confédération collabore à la péréquation financière intercantonale, la 2e phrase de l'article 42ter lui donne les directives nécessaires (9).

Article 42quater; interdiction des arrangements fiscaux. Des prescriptions identiques quant au fond se trouvaient déjà dans les arrêtés fédéraux de 1950 et de 1953 et elles n'ont jamais été contestées (7) ; il est indiqué, aujourd'hui comme auparavant, de compléter la constitution par une disposition qui donne à la Confédération la compétence pour prendre des (*) Voir 2« partie, chapitre B, chiffre VI, 1.

e (>) Voir 2 partie, chapitre A,e chiffre VI.

e

(*) Voir article 42ter, 2 et 3 alinéas, de l'arrêté fédéral du 25 septembre 1953 (FF 1953, in, 237); article 8 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 (RO I960, 1510).

(') FF 1956, I, 1352.

(t) FF 1953, III, 237.

(*) A ce sujet, voir ci-dessus, 28 partie, chapitre C.

(') AF du 21 mars 1950, article 2 (FF 1950, I, 703); AF du 25 septembre 1953, article 2 (FF 1953, HI, 238).

650

mesures contre les arrangements fiscaux (1). Le présent projet s'écarte des précédents sur deux points. D'une part, on a rendu le texte plus clairen le rapprochant de celui du concordat du 10 décembre 1948 sur l'interdiction des arrangements fiscaux (2), notamment en reprenant l'expression «arrangements conclus avec des contribuables». En second lieu, on a prévu une autre place pour cette disposition. Jusqu'ici on l'avait toujours ajoutée à l'article 46 de la constitution, qui traite de la situation en droit civil des personnes établies et qui, à cette occasion, formule l'interdiction de la double imposition. Le fait du concordat de 1948 montre que l'interdiction des arrangements fiscaux statuée par le droit fédéral ne concerne pas en premier lieu les relations entre le citoyen et les pouvoirs publics. Cette interdiction intéresse surtout l'entente confédérale des cantons en matière fiscale. C'est ce qui engage à placer cette disposition à la suite de l'article concernant la péréquation financière.

Le chiffre II du projet d'arrêté réglemente le droit transitoire. Etant donnée l'importance de ces dispositions quant au fond, il est prévu de les inscrire dans les dispositions transitoires de la constitution elle-même.

Les dispositions transitoires ont un caractère naturellement passager.

Celles de la constitution de 1874 qui sont toujours encore en vigueur étaient conçues primitivement comme ayant une portée limitée dans le temps.

De fait, les articles 1er, 3 et 4 sont depuis longtemps sans objet ; seuls les articles 2 et 5 continuent à jouer un rôle dans la pratique constitutionnelle (le droit fédéral prime le droit cantonal; libre exercice de la profession d'avocat). La constitution prévoit expressément qu'elle peut être revisée en tout temps, totalement ou partiellement (art. 118). Il s'ensuit que l'on peut également reviser les dispositions transitoires et en particulier les compléter, lorsqu'une revision partielle rend exceptionnellement nécessaire l'établissement d'un droit transitoire.

Artide 6; taxe, d'exemption du service militaire. La part actuelle des cantons au produit de la taxe militaire doit être supprimée, mais en revanche la commission de perception des cantons augmentée de façon convenable (*)'. Les nouveaux articles 18, 4e alinéa, et 42, lettre c, de la constitution ne disent
rien directement ni de cette modification comme telle, ni des questions transitoires qui s'y rapportent. C'est exact quant au fond.

Mais comme le nouvel article 18,4e alinéa-- selon sa teneur tout au moins --, n'exclut pas une participation des cantons au produit de la taxe, il faut préciser que les dispositions de l'article 14, 2e alinéa, de la loi fédérale sur (!) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre D.

(") KO 1949, 1459.

(") Voir ci-dessus, 2« partie, chapitre B, chiffre III, 1 et chiffre VIII, 2, lettre a, ainsi que les explications du chiffre Ier, article 18, 4e alinéa, du projet d'arrêté.

651

la taxe d'exemption du service militaire (1) et l'article 166 de l'organisation militaire ( 2 ), qui établissent une participation des cantons au produit de la taxe, ne doivent plus avoir effet désormais. Leur invalidation est le but de l'article 6 proposé. Son inscription parmi les dispositions transitoires de la constitution a également pour conséquence que les parts cantonales ne peuvent pas être rétablies simplement par la voie législative. Cette réglementation est conforme au principe qui veut que les rapports mutuels de la Confédération et des cantons soient délimités dans la constitution. Alors que la prescription concernant la réduction par étapes de la participation cantonale actuelle pour les années 1959 et 1960 n'a qu'un caractère transitoire, celle qui remplace la participation par une commission de perception s'élevant à un cinquième du produit brut donne aux cantons et à la Confédération la garantie durable que cette provision ne peut être ni supprimée, ni fixée d'une autre manière par la loi.

Article 7; prorogation du régime financier actuel. La perception de l'impôt anticipé, de l'impôt retenu sur les prestations d'assurances, de l'impôt sur le chiffre d'affaires et de l'impôt pour la défense nationale, ainsi que divers compléments du droit de timbre, se fondent actuellement sur un additif constitutionnel (régime financier de 1951 à 1954) dont la validité a été prorogée jusqu'à fin 1958 (3). Les actes législatifs actuellement en vigueur concernant ces impôts ne peuvent être considérés comme des lois d'exécution des nouveaux articles 41 bis et 41 ter de la constitution et appliqués sans limitation, car ils n'ont pas été arrêtés dans la procédure législative ordinaire. Comme il sera impossible que les nouvelles lois d'exécution entrent en vigueur le 1er janvier 1959, il est indispensable de proroger la validité des actes législatifs fondés sur le régime financier, jusqu'à ce qu'ils puissent être remplacés par les nouvelles lois correspondantes. La question qui se pose est celle de la voie à suivre pour ordonner cette prorogation.

Les projets rejetés dans les votations populaires de 1950 et de 1953 prévoyaient l'un et l'autre une prorogation générale limitée des régimes financiers en vigueur de 1950 et 1951 ou de 1951 à 1954 (4). Nous nous écartons aujourd'hui de cette solution,
et cela pour les raisons suivantes.

La prorogation intégrale du régime financier de 1955 à 1958 n'entre pas en ligne de compte déjà parce que l'impôt sur le luxe et l'impôt sur la bière ne doivent pas être maintenus à partir de 1959 (5) ; le premier se fonde actuellement sur l'article 2, lettre c, de l'arrêté concernant le régime finan(*) BS 5, 156.

(«) RS 5, 1.

( s ) BO 1950, 1507; 1954, 1347.

(*) Article 4 de l'AF du 21 mars 1850 (FF 1950, I, 703); article 4 de l'AF du 25 septembre 1953 (FF 1953, III, 239).

( B ) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chiffre VI, 2 et 3.

652 cier de 1951 à 1954, le second sur l'article 1er, 1er alinéa, du même arrêté, rapproché de l'article 41 de l'arrêté concernant le régime financier de 1939 à 1941 (1). En outre, le maintien tel quel du régime financier n'aurait guère de sens, puisqu'un grand nombre de ses dispositions ou bien sont abrogées, modifiées ou devenues sans objet depuis longtemps, ou bien doivent être remplacées par la nouvelle réglementation proposée. C'est surtout le cas pour le régime financier de 1939 à 1941 ( a ), dont seules doivent continuer a subsister les dispositions concernant les droits de timbre et les rapports avec la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents. Il en est de même pour les articles 3 et 5 de l'arrêté fédéral du 20 juin 1947 instituant des mesures spéciales propres à réduire les dépenses de la Confédération (3) ; l'article 3 de cet arrêté, qui renonce à établir des annuités d'amortissement, n'a plus de justification à côté du nouvel article 42bis, et l'article 5, qui fixe la subvention à l'office suisse d'expansion commerciale, est devenu caduc en raison du chiffre I, 9, de la loi fédérale du 23 décembre 1953 instituant des mesures spéciales propres à réduire les dépenses de la Confédération ( 4 ). Les articles 1er à 6 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 sont remplacés dans la mesure nécessaire par les dispositions du présent projet (5), de sorte que d'emblée leur prorogation n'entre pas en ligne de compte, alors que l'article 7 en revanche, qui concerne les subventions de la Confédération aux cantons pour les routes, doit être expressément maintenu (8). Les articles 8 et 9 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 tombent, le premier («frein aux dépenses») pour les raisons exposées au sujet de l'article 42 bis du projet, et le second parce que les directives qu'il donne n'ont pas besoin d'être inscrites dans une loi (7).

Il est inutile de fixer légalement un terme au régime transitoire. C'est im devoir impératif dans un Etat de droit -- et nous avons en conséquence la ferme intention de nous y conformer -- de remplacer aussi rapidement que possible par des lois d'exécution édictées dans la procédure législative ordinaire les arrêtés du droit fiscal dit de nécessité dont la validité doit être prorogée provisoirement.

La réglementation du
droit transitoire qui est prévue à l'article 7 évite la difficulté que l'on aurait à se faire une idée d'ensemble des dispositions du régime transitoire, si ce régime était prorogé d'une manière

(1) RS 6, 39.

( 2 ) La prorogation des «dispositions du régime financier de 1939 à 1941,.. qui sont encore en vigueur» se fonde actuellement BUT l'article 1er, 1er alinéa, de l'arrêté concernant le régime financier de 1951-1954.

( a ) RS 6, 51; la durée de validité de cet arrêté a été prorogée par l'article 1er, 2e alinéa, de l'arrêté concernant le régime financier de 1951-1954.

(') RO 1954, 573.

( B ) Projet d'arrêté, chiffre Ier, article 416is, 1er alinéa, lettre d, et chiffre II, article 7, 1er, 2e et 3e alinéas.

(·) Projet d'arrêté, chiffre II, article 7, 4e alinéa.

(') Voir FF 1950, II, 443.

653

générale. L'article 7 énumère de façon absolue et nette les éléments du régime financier qui sont prorogés comme mesure de passage et les modifications apportées aux actes législatifs qui doivent être maintenus provisoirement.

Le -7er alinéa assure la perception ininterrompue des impôts qui ont été perçus jusqu'ici sur la base du régime financier et qui doivent être maintenus selon les nouveaux articles 41 Us et 41 ter de la constitution.

En principe, les dispositions qui subsistent provisoirement sont celles qui se trouveront encore en vigueur le 31 décembre 1958, à l'expiration du régime financier de 1955 ä 1958. On n'excepte de la prorogation que les dispositions découlant de l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires (*). Cette exception donne au droit transitoire plus de simplicité et de clarté, car elle permet de décrire de manière complète, dans la réglementation transitoire elle-même (art. 7, 2e et 3e al.), la réduction d'impôt qui est modifiée et élargie.

Les 2e et 3e alinéas réglementent à nouveau la réduction d'impôt, apportent en particulier des allégements supplémentaires et, pour la période transitoire, adaptent déjà autant que possible au régime futur le droit ancien régissant l'impôt sur le chiffre d'affaires et l'impôt pour la défense nationale. Des modifications plus profondes à la structure des impôts exigent encore un examen soigneux et doivent être réservées aux lois d'exécution.

Les modifications apportées aux arrêtés concernant l'impôt sur le chiffre d'affaires et l'impôt pour la défense nationale ont déjà été motivées (2).

Il suffit ici de relever ce qui suit. En matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, la liste des marchandises exonérées et la charge fiscale des travaux de construction, ainsi que celle des groupes de marchandises privilégiées (boissons sans alcool, combustibles, matières auxiliaires pour l'agriculture, etc.), sont maintenues sans changement, telles qu'elles existent aujourd'hui, en tenant compte de la réduction accordée par l'arrêté du 21 décembre 1955; les taux normaux (4 et 6%) sont réduits de 3,6 à 3% et de 5,4 à 5 pour cent. En matière d'impôt pour la défense nationale, les allégements accordés par l'arrêté du 21 décembre 1955 sont maintenus; en outre
la déduction générale (art. 25, 1er al., lettre a, de l'arrêté concernant l'impôt pour la défense nationale) est augmentée, et de plus l'impôt complémentaire sur la fortune est supprimé.

Le 4e alinéa assure le maintien de la participation des cantons au produit des droits de douane sur les carburants, ainsi que celui des indemnités, augmentées par rapport à l'article 30, 3e alinéa, de la constitution, qui sont allouées aux quatre cantons entretenant des routes alpestres, (*) BO 1955, 1210 et 1212.

( a ) Voir ci-dessus, 2e partie, chapitre B, chlore V, 3, lettre c, et 4, lettre /.

Feuille fédérale. 109e année. Vol. I.

45

654

telles que les règle l'article 7 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954.

Le 5e alinéa a le même but que le 4e alinéa. Les dispositions concernant les relations financières entre la Confédération et la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents sous le régime financier actuel (1) doivent aussi être maintenues jusqu'à ce qu'une nouvelle réglementation légale ait été édictée ( 2 ).

Chiffre HI; entrée en vigueur. Ordinairement, les dispositions constitutionnelles entrent en vigueur au moment de leur adoption par le peuple et les cantons. Pour la modification de la constitution que propose le présent projet d'arrêté, on doit s'écarter de cette règle. Les innovations prévues, en particulier dans le domaine de l'impôt pour la défense nationale, ne peuvent être introduites et exécutées sans frictions que si elles entrent en vigueur au début d'une année civile et fiscale. Or la votation populaire sur le projet actuel ne pourra avoir lieu au plus tôt qu'au début de 1958, de sorte que le terme le plus proche pour l'entrée en vigueur des dispositions constitutionnelles revisées ne peut être que le 1er janvier 1959. La nouvelle réglementation succède donc immédiatement au régime financier qui expire à la fin de 1958.

CONSIDÉRATIONS FINALES C'est la troisième fois en l'espace de neuf ans que nous vous soumettons des propositions concernant de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime des finances de la Confédération, et c'est aussi la troisième fois que nous le faisons en étant persuadés que ce sont celles qui conviennent le mieux, étant données les circonstances. Après que le peuple et les cantons eurent rejeté les deux premiers projets, nous avions tout d'abord pensé qu'il fallait envisager une vaste revision constitutionnelle délimitant plus clairement que jusqu'ici les tâches et les attributions de la Confédération et des cantons. Les attributions et les obligations nées pour la Confédération et les cantons du régime des pouvoirs extraordinaires étaient enchevêtrées d'une façon assez inextricable pour justifier un examen approfondi du problème. Cela aurait cependant exigé un grand effort, puisqu'il se serait agi d'une transformation de tout le système des finances de la Suisse. Les nombreux avis exprimés sur les «Considérations de principe» et les discussions
publiques montrèrent clairement qu'on ne pourrait arriver à une solution si générale dans le court laps de temps à disposition. Comme la tâche principale consistait à élaborer finalement un projet que le peuple et les cantons puissent accepter, nous avons dû restreindre encore considérablement nos desseins.

(*) Article 1er, 1er alinéa, de l'arrêté sur le régime financier de 1951-1954, rapproché de l'article 12 de celui qui concerne le régime financier de 1939-1941.

(') Voir ci-dessus, 2« partie, chapitré A, chiöre II, 5.

655

C'est ainsi qu'est né le projet de modification de la constitution qui fait l'objet du présent message et figure dans l'arrêté qui y est annexé.

Il ne diffère fortement ni dans sa structure, ni dans son contenu, des deux projets de 1948 et de 1953. Comme eux, il s'attache, pour l'essentiel, à ce qui existe déjà. Dans les diverses dispositions qu'il contient, nous avons essayé cependant de tenir compte des deux dernières décisions négatives du peuple, autant que le permettaient les nécessités financières.

Les perspectives d'adoption du nouveau régime constitutionnel sont beaucoup plus favorables que précédemment, grâce, pour une bonne part, à la situation économique. Du fait de la prospérité générale, les recettes sont élevées et la situation financière de la Confédération est bonne. Cela permet d'accéder aux demandes du contribuable, bien qu'à la fin de 1955 des allégements considérables aient déjà été accordés.

Nous espérons qu'ainsi notre projet sera mieux accueilli que les précédents et qu'il pourra être mis en vigueur. Après des débats qui ont duré dix ans, on jouirait enfin d'un répit d'une durée à peu près équivalente.

Nous saisissons l'occasion, Monsieur le Président et Messieurs, pour vous prier d'agréer les assurances de notre haute considération.

Berne, le 1er février 1957.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Streuli n«9i

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

656

(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL instituant

de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération

L'Assemblée fédérale de, la Confédération suisse,

vu les articles 85, chiffre 14, 118 et 121, 1er alinéa, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 1er février 1957, arrête:

La constitution fédérale est modifiée et complétée comme il suit : Article 18, 4e alinéa. La taxe d'exemption du service militaire est perçue par les cantons pour le compte de la Confédération selon les dispositions de la législation fédérale.

Article 41 bis. x La Confédération peut percevoir les impôts suivants: a. Des droits de timbre sur titres, y compris les coupons, effets de change et effets analogues, sur quittances de primes d'assurances et sur d'autres documents concernant des opérations commerciales, ainsi que sur les billets de loteries et sur les documents pour le transport de choses ; la perception de ces droits ne s'étend pas aux documents concernant les opérations immobilières et hypothécaires. Un cinquième du produit net des droits de timbre est attribué aux cantons ; b. Un impôt anticipé sur le revenu de capitaux mobiliers, les gains faits dans les loteries et les prestations d'assurances; c. Des impôts sur le tabac brut et manufacturé; d. Des impôts spéciaux à la charge de personnes domiciliées à l'étranger, afin de parer à des mesures fiscales prises par les Etats étrangers.

2 Les objets que la législation soumet à l'un des impôts fédéraux mentionnés au 1er alinéa, lettres a, b et c, ou qu'elle déclare exonérés, sont

657

soustraits à toute charge constituée par des impôts cantonaux et communaux du même genre.

3 La législation fédérale réglera l'exécution du présent article.

Article éltsT. 1 Pendant les années 1959 à 1970, la Confédération peut percevoir les impôts suivants, outre ceux qui sont de sa compétence en vertu de l'article 416£s de la constitution: a. Un impôt sur le chiffre d'affaires frappant les transactions en marchandises sur territoire suisse, l'importation des marchandises, ainsi que les travaux professionnels exécutés sur des biens meubles, des constructions et des terrains, à l'exception de la culture du sol aux fins de la production naturelle. Les chiffres d'affaires que la Confédération frappe d'un impôt ou qu'elle déclare exonérés ne peuvent être soumis par les cantons et les communes à un impôt du même genre; 6. Un impôt pour la défense nationale sur le revenu des personnes physiques, ainsi que sur le bénéfice et le capital des personnes morales.

2

L'impôt sur le chiffre d'affaires sera établi selon les règles suivantes : a. L'impôt peut s'élever au plus, s'il s'agit de livraisons au détail, à 4 pour cent et, s'il s'agit de livraisons en gros, à 6 pour cent de la contreprestation; b. La liste des marchandises faisant l'objet de transactions franches d'impôt ne peut être, par rapport à son état le 31 décembre 1958, ni restreinte, ni étendue à des marchandises faisant l'objet de transactions frappées des taux d'impôt de 4 et 6 pour cent.

3

L'impôt pour la défense nationale sera établi selon les règles suivantes : a. L'impôt sur le revenu des personnes physiques sera calculé d'après un tarif progressif et ne pourra excéder 10 pour cent du total du revenu imposable. L'assujettissement commence au plus tôt lorsque le" revenu net atteint 5000 francs ou, pour les personnes mariées, 6500 francs; 6. Les personnes morales, quelle que soit leur forme juridique, doivent être imposées, selon leur capacité économique, d'une manière aussi égale que possible. L'impôt sur le bénéfice ne pourra excéder 7 pour cent, s'il est calculé proportionnellement, ou 12 pour cent, s'il est calculé progressivement, et l'impôt sur le capital ne pourra dépasser 1 pour mille; c. L'impôt est perçu par les cantons pour le compte de la Confédération.

Trois dixièmes du produit net de l'impôt sont attribués aux cantons; un sixième du montant revenant aux cantons doit être affecté à la péréquation financière intercantonale.

658 4

La législation fédérale réglera l'exécution du présent article.

Artide 42. Pour couvrir ses dépenses, la. Confédération dispose des ressources suivantes: a. Le produit de la fortune fédérale; b. Le produit net de l'administration des postes, des télégraphes et des téléphones (art. 36), ainsi que celui de la régale des poudres (art. 41); c. Le produit net de la taxe d'exemption du service militaire (art. 18, 4e al.); d. Le produit des péages (art. 30) ; e. La part fédérale au produit net de l'imposition des boissons distillées (art. 32bis et Slquater, 7e al.), ainsi que la part fédérale aux recettes brutes des jeux (art. 35, 5e al.); /. La part fédérale au bénéfice net de la banque investie du monopole d'émission des billets de banque (art. 39, 4e al.); : g. Le produit des impôts fédéraux (art. 4tlbis et s.); h. Le .produit des émoluments et les autres recettes prévues par la législation.

Article 42bis (nouveau). La Confédération doit amortir le découvert de son bilan. Elle procède à cet amortissement en tenant compte de la situation économique.

Article 42ter (nouveau). La Confédération encourage la péréquation financière entre les cantons. En particulier, pour accorder des subventions fédérales, la capacité financière des cantons et la situation des régions de montagne doivent être considérées de façon appropriée.

Article 42quater (nouveau). La Confédération peut, par la voie législative, édicter des dispositions contre les arrangements conclus avec des contribuables en vue de leur assurer des avantages fiscaux injustifiés.

II

Les dispositions transitoires de la constitution fédérale sont complétées comme il suit: Article 6 (nouveau). La part actuelle des cantons au produit de la taxe d'exemption du service militaire est réduite de moitié pour les années 1959 et 1960 et, à partir du 1er janvier 1961, elle est remplacée par une commission de perception s'élevant à un cinquième du produit brut. Les dispositions contraires de la législation fédérale cessent d'être en vigueur.

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Article 7 (nouveau). 1Les dispositions actuelles relatives aux impôts suivants, perçus en conformité de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958: a. Les droits de timbre ; b. L'impôt anticipé; C. L'impôt retenu sur les prestations d'assurances sur la vie; d. L'impôt sur le chiffre d'affaires; e. L'impôt pour la défense nationale, à l'exception des dispositions qui concernent la réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires selon l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955, restent valables jusqu'à l'entrée en vigueur de chacune des nouvelles lois d'exécution des articles 41 bis, 1er alinéa, lettres a et b, et 41 ter.

2

L'arrêté du Conseil fédéral instituant un impôt sur le chiffre d'affaires est modifié comme il suit, avec effet dès le 1er janvier 1959: a. L'impôt sur le chiffre d'affaires qui frappe les transactions imposées à 4 pour cent, s'il s'agit de livraisons au détail, et à 6 pour cent, s'il s'agit de livraisons en gros, est réduit à 3% et à 5 pour cent, sous réserve de la lettre b; b. Sur les transactions qui consistent à unir des marchandises à des constructions ou des immeubles, l'impôt est perçu aux taux valables jusqu'au 31 décembre 1958, II est accordé une réduction de 10 pour cent du montant d'impôt; c. Sur l'impôt perçu à 2 pour cent, s'il s'agit de livraisons au détail, et à 2,5 pour cent, s'il s'agit de livraisons en gros, il est accordé une réduction de 10 pour cent, du montant d'impôt.

'L'arrêté du Conseil fédéral concernant la perception d'un impôt pour la défense nationale est modifié comme il suit, pour les années fiscales commençant après le 31 décembre 1958: a. L'impôt complémentaire sur la fortune des personnes physiques est abrogé ; o. En matière d'impôt sur le revenu des personnes physiques, la déduction générale du revenu net est portée de 2000 francs à 4000 francs, pour les célibataires de 2000 francs à 3000 francs, de sorte que l'assujettissement commence à partir d'un revenu net de 7000 francs, pour les célibataires à partir d'un revenu net de 5000 francs. A ces deux derniers montants s'ajoutent encore les déductions pour enfants et pour personnes nécessiteuses;

660

e. Sur l'impôt pour la défense nationale dû pour une année, il est accordé une réduction de 10 pour cent du montant d'impôt. Pour les première 500 francs de l'impôt annuel sur le revenu des personnes physiques, la réduction est portée à 40 pour cent et pour les 1500 francs suivants à 25 pour cent.

4 Jusqu'à ce que le droit fédéral ait organisé l'aménagement du réseau des routes principales, les dispositions de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958 qui concernent les subventions aux cantons pour les dépenses relatives aux routes restent en vigueur même après le 31 décembre 1958.

5

Jusqu'à ce que le droit fédéral ait réglé les relations financières entre la Confédération et la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, les dispositions de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958 qui concernent les subventions fédérales à cet établissement restent en vigueur même après le 31 décembre 1958.

III

Les dispositions constitutionnelles mentionnées dans les chiffres Ier et II entrent en vigueur le 1er janvier 1959.

IV Le présent arrêté sera soumis au vote du peuple et des cantons.

2 Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant de nouvelles dispositions constitutionnelles sur le régime financier de la Confédération (Du 1er février 1957)

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