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Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'adhésion de la Suisse au traité de renonciation à la guerre conclu à Paris le 27 août 1928.

(Du 17 décembre 1928.)

Avant d'aborder le fond du traité que nous soumettons aujourd'hui à l'approbation des chambres fédérales, il convient de rappeler sommairement les différentes étapes de la négociation qui s'était engagée entre les principaux Etats signataires. Il est peu d'accords internationaux dont la teneur soit plus brève; mais il en est peu aussi qui aient plus besoin d'être éclairés par les déclarations interprétatives des négociateurs.

En juin 1927, le gouvernement français propose au gouvernement des Etats-Unis d'Amérique de conclure entre les deux pays un « pacte d'amitié perpétuelle », aux termes duquel les parties contractantes condamneraient le recours à la guerre et y renonceraient « comme instrument de leur politique nationale réciproque », tout en s'engageant, d'autre part, à ne rechercher, que par des procédés pacifiques « le régleraient ou la solution de toutes contestations ou conflits, de quelque nature ou de quelque origine que ce soit, qui viendraient à s'élever entre la France et les Etats-Unis d'Amérique».

Le gouvernement des Etats-Unis fait observer qu'au lieu de se borner à un acte bilatéral, les deux gouvernements «contribueraient davantage à la paix du monde en joignant leurs efforts pour obtenir l'adhésion de toutes les principales puissances du monde à une déclaration de renonciation à la guerre comme instrument de leur politique nationale ». Le gouvernement français acquiesce à cette idée en préconisant la conclusion entre les deux pays d'un traité qui serait proposé ensuite « à l'agrément de toutes les nations ». A cette suggestion, M. Kellogg, secrétaire d'Etat des Etats-Unis, oppose l'inconvénient et le danger qu'il y aurait à négocier à deux un acte qui, dans la pensée des initiateurs, serait destiné à devenir universel. Le gou-

118» vernement français n'insiste pas et, tout en arguant de ce que sa première proposition] « avait été rédigée en tenant compte des relations séculaires de la France et des Etats-Unis », se montre disposé à prêter, les mains à la conclusion d'un accord multipartite, étant entendu que 1° l'accord projeté ne pourrait « produire ses effets à l'égard d'une puissance qui y serait partie que si les autres Etats, en situation d'avoir des conflits graves avec de tels contractants, en étaient également signataires»; 2° « si l'un des Etats signataires venait à manquer à sa promesse, les autres signataires seraient eux-mêmes, vis-à-vis du contrevenant, dégagés de leur propre engagement»; 3° « la renonciation à la guerre ainsi proclamée n'excluerait pas pour les signataires le droit de légitime défense»; 4° « les obligations du nouveau pacte ne doivent se substituer en rien ni porter aucune atteinte aux obligations antérieures d'actes internationaux comme le pacte de la Société des Nations, les accords de Locamo ou les traités de garanties de neutralité... »1).

Le département d'Etat ne conteste pas la légitimité de ces réserves; il préférerait, toutefois, ne pas les incorporer au traité, estimant que sa valeur! dépend dans une large mesure de sa simplicité.

Il adresse alors aux ministères des affaires étrangères d'Allemagne, de Grande-Bretagne, d'Italie et du Japojn une note-circulaire par laquelle il leur communique, pour examen, la correspondance échangée entre Paris et Washington, ainsi qu'un1 projet de traité « pratiquement identique » au premier projet élaboré par le gouvernement français. Le quai d'Orsay, de son côté, saisit les mêmes puissances d'un projet de traité remanié qui fait expressément état des réserves dont il s'est prévalu à Washington. On sait le reste. Ces réserves, les gouvernements consultés en revendiquent également le bénéfice, mais considèrent avec le gouvernement américain qu'il n'y a pas nécessité d'en faire mention dans le texte même du traité.2) Ils insistent, notamment, sur l'impossibilité dans laquelle ils «e trouveraient de signer un accord qui ne laisserait pas intacts les engagements découlant du pacte de la Société des Natio'ns.

Aux quatre réserves indiquées, le gouvernement britannique en ajoute une cinquième, qui n'est pas plus discutée que les autres, en !) Lettre
de l'ambassadeur de France à Washington au secrétaire d'Etat des 2Etats-Unis en date du 30 mars 1928.

) La réponse italienne, publiée avec IPS autres réponses parles soins du gouvernement des Etats-Unis, ne se réfère nas expressément aux dites réserves, le gouvernement italien ayant proposé, à cette phase de la négociation, de soumettre le texte du traité projeté à l'examen d'experts juridiques.

1190 appelant l'attention sur le fait qu'il existe, dans le monde, certaines régions dont la prospérité et l'intégrité sont d'un intérêt particulier et vital pour la paix et la sécurité de l'empire. Il relève à cet égard ,ce qui suit : « Le gouvernement de Sa Majesté a pris grand soin d'établir nettement, dans le passé, qu'aucune intervention concernant ces régions ne saurait être tolérée. La protection de ces régions contre toute attaque constitue, pour l'empire britannique, une mesure de légitime défense. Il doit être clairement établi que le gouvernement de Sa Majesté accepte le nouveau traité, étant nettement entendu que ledit traité ne porte aucun préjudice à sa liberté d'action' en cette matière. Le gouvernement des EtatsUnis possède des intérêts comparables, au sujet desquels il a déclaré qu'une puissance étrangère qui ne tiendrait pas compte desdits intérêts serait considérée par lui comme agissant d'une manière inamicale. Le gouvernement de Sa Majesté estime donc qu'en définissant sa situation, il exprime l'intention et la pensée du gouvernement des Etats-Unis. » *) Le gouvernement britannique expo'se, en même temps, qu'il ne pourrait guère participer à un traité de cette nature que conjointement avec les gouvernements des Dominions (Australie, Canada, Etat libre d'Irlande, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud) et le gouvernement de l'Inde et qu'il serait désirable, par conséquent, d'inviter o3s derniers à .participer à la conclusion de l'accord. Le département d'Etat américain tient compte de ce désir et soumet le projet de traité aux dits gouvernements, lesquels répondent, de leur côté, qu'ils sont prêts à le signer sous la forme et aux conditions envisagées. Il est convenu ensuite que la Belgique, la Pologne et la Tchécoslovaquie seront également invitées à signer le traité en tant que parties aux accords de Locamo. Sur ces entrefaites, le gouvernement américain adresse, le 24 juin 1928, aux quatorze gouvernements entrant en ligne de compte une note-circulaire par laquelle il leur soumet un texte amendé du traité à conclure en exposant ses vues sur certaines des réserves formulées. Le projet remanié est identique au projet primitif, à part les trois premiers alinéas du préambule, où il a été précisé, en particulier, que « toute Puissance signataire qui chercherait désormais à développer
ses intérêts nationaux en recourant à la guerre devra être privée du bénéfice du présent traité r Quant au contenu du traité même, le gouvernement américain constate qu'aucun des gouvernements consultés n'a proposé de modifications de l ) Traduction de la réponse britannique dans le document de la Société des Nations n° 0. 380. M. 121. 1928.

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droit matériel; il n'estime pas non plus qu'il soit besoin d'eu apporter « polir sauvegarder les intérêts légitimes de toute nation ». Il est d'avis, en effet, gué le droit de légitime défense est implicitement contenu clans tout traité et qu'il n'est pas nécessaire ni désirable de se référer expressément à cet « attribut inaliénable de la souvefcaineté ». Il n'est pas moins évident, à son sentiment, que le recours à la guerre par l'une des parties contractantes en violation du traité ·délierait les autres parties de leurs engagements vis-à-vis du contrevenant. En ce qui concerne les obligations découlant du pacte de la Société des Nations, sa manière de voir est peut-être exprimée avec moins de précision; mais, comine il ne fait aucun'e objection aux déclarations précises des gouvernements consultés sur la façon dont ils envisagent leurs engagements au titre de membres de la Société des Nations, il ne paraît pas douteux que le pacte contre la guerre ne saurait se trouver en opposition avec l'application éventuelle des -sanctions prévues par le pacte de la Société des Nations.

Les quatorze gouvernements font connaître qu'ils sont d'accord ·de conclure le traité sous le bénéfice des réserves formulées au cours de la négociation, et le 27 août 1928 est signé, à Paris, le pacte portant condamnation de la guerre comme instrument de politique na-tionale.

Le même jour, le ministre des Etats-Unis à Berne nous communiqua, par une lettre qui a été publiée intégralement dans la presse, le texte de l'accord en nous priant d'examiner la possibilité pour la Suisse d'y adhérer. Après un premier examen du traité, nous chargeâmes le département politique de répondre à la légation des EtatsUnis d'Amérique, en date du 30 août, qu'«un traité collectif, comme le pacte Kellogg, qui condamne le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et la proscrit formellement comme instrument de politique n'ationale, utì traité qui fait, au surplus, un ·devoir aux Etats contractants de rechercher par des voies pacifiques le règlement de tous les différends, de quelque nature qu'ils soient, était assuré de rencontrer l'accueil le plus favorable auprès du gouvernement et du peuple suisses ». Notre note ajoutait : « La renonciation à la guerre comme instrument de politique nationale est en ·pleine
harmonie avec la politique traditionnelle de la Suisse et se trouve effectivement consacrée par cette maximie d'Etat fondamentale qu'est pour elle la tìeutralité permanente. L'idée que tous les différends doivent être réglés ou résolus par des moyens pacifiques répond aussi pleinement aux conceptions que la Suisse, pour sa part, Feuille fédérale. 80e année. Vol. II-

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1192 s'efforce de réaliser, par la politique qu'elle poursuit dans le domaine de l'arbitrage international. Le Conseil fédéral est persuadé, dès lors, que l'étude attentive à laquelle il doit soumettre la question l'amènera sans doute à proposer aux chambres fédérales de l'autoriser à faire acte d'accession au nouveau traité. » Le pacte de renonciation à la guerre ne comprend que trois articleB. Les deux premiers, qui en forment toute la substance, sont ainsi conçus : Art. 1er. -- Les hautes parties contractantes déclarent solennellement au nom de leurs peuples respectifs qu'elles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles.

Art. 2. -- Les hautes parties contractantes reconnaissent que le règlement ou ^a solution de tous les différends ou conflits, de quelque nature ou de quelque origine qu'ils puissent être, qui pourront surgir entre elles, ne devra jamais être recherché que par des moyens pacifiques.

Comme nous l'avons observé en relatant brièvement les différentes phases de la négociation et comme il appert, d'ailleurs, de l'article premier ci-dessus, les initiateurs du pacte n'ont pas eu en' vue une renonciation absolue à la guerre. Ce qui est « mis hors la loi », c'est la guerre « en tant qu'instrument de politique nationale ».

Quel est le sens de ces derniers m'ots 1 -- Si le pacte n'est pas explicite sur ce point, les déclarations faites au cours des négociations et au moment de la signature fournissent à cet égard certaines indications. Les termes « instrument de politique nationale » ayant été empruntés au projet de traité bilatéral proposé d'abord par la France aux Etats-Unis d'Amérique, nul mieux que le quai d'Orsay ne semblait en mesure d'en définir le sens. Or, la note française au département d'Etat à Washington du 30 mars 1928 relevait que, pour les puissances contractantes, condamner la guerre comme instrument de leur politique nationale, ce serait la condamner comme « moyen d'action de leur politique personnelle, spontanée et indépendante ». D'autre part, dans le discours qu'il a prononcé lors de la cérémonie de la signature, le ministre des affaires étrangères de France, M. Briand, déclarait que « pour la première fois la guerre est répudiée sans réserves en1 tant qu'instrument de politique nationale, c'est-à-dire dans sa forme la plus spécifique et la plus redoutable : la guerre egoiste et volontaire ».

1193 Le pacte de Paris a donc pour but de condamner, les guerres de conquête, d'intérêts ou d'hégémonie, toutes ces guerres que l'on range bous le terme générique de guerres d'agression. Il suit de là que la guerre de légitime défense n'est pas, elle, proscrite.

Mais quand un pays sera-t-il en état de légitime défense et quand ne le sera-t-il pas Ì -- On n'a pas trouvé, on a même renoncé à chercher, sur le plan international, une définition de la légitime défense ou de l'agression. Il y a là une faiblesse évidente du traité contre la guerre. Kien non plus dans son texte qui nous sorte d'incertitude sur la portée des obligations qu'il prévoit. Il s'en remet aux parties contractantes pour apprécier, dans chaque cas particulier, si la guerre est licite ou non au sens des engagements contractés. Le critère de la guerre instrument de politique nationale étant ainsi, dans une certaine mesure, d'ordre subjectif, la valeur du nouveau pacte dépend beaucoup de l'interprétation qui lui sera donnée par les Etats contractants; elle sera plus ou moins grande selon que cette interprétation sera plus ou moins stricte. S'il est sans doute exagéré d'affirmer avec certains juristes que la portée du traité est nulle au point de vue du droit positif, il faut du moins reconnaître qu'elle est incertaine.

L'Etat qui recourrait à la guerre en violation de ses obligations ne verrait pas nécessairement se dresser devant lui une coalition pour lui demander raison de sa félonie. Il n'y a pas ici d'autorité placée au-dessus des parties pour 'rechercher et constater les manquements à l'engagement pris; il n'y a pas de sanctions prévues à l'encontre de l'Etat en rupture de pacte. Entre le régime découlant d'un pacte comme celui de la Société des Nations et celui qu'inauguré le pacte de Paris, la différence, très sensible, est toute en faveur du premier.

Ce que nous avons déjà dit du traité nous dispense de nous arrêter longuement aux réserves dont il s'est trouvé grevé dès sa naissance. Elles apparaissent moins comme des exceptions à une norme générale que comme des règles d'interprétation. Entre l'idée qu'elles expriment respectivement et le principe fondamental de la condamnation de la guerre en tant qu'instrument de politique nationale, il n'y a, en effet, rien d'antinomique. N'eût-elle pas été formulée que la réserve de
la légitime défense se serait déduite d'elle-même du traité.

La « réserve britannique », dont on a beaucoup parlé et qui n'en est, semble-t-il, qu'une application, fixe d'avance l'interprétation qui lui sera donnée par l'empire britannique dans un domaine plus ou moins déterminé.

Evidente par elle-même est la réserve selon laquelle les Etats

1194 contractants sont déliés de leurs engagements conventionnels vis-àvis de l'Etat qui viole les siens. Mais on comprend qu'on ait voulu ne laisser planer aucune équivoque sur le principe, la seule perspective de voir les parties contractantes reprendre leur liberté d'action pouvant agir salutairement sur la volonté de l'Etat défaillant.

Quant à la réserve relative à la Société des Nations, on peut se réjouir qu'il se soit manifesté, parmi les Etats signataires membres de la Société,, une volonté bien arrêtée de maintenir, dans leur plénitude, les principes du covenant. Mais, rédigé tel qu'il est, le pacte de Paris pouvait-il se trouver en opposition avec le pacte de Genève 1 -- Comment imaginer qu'un Etat qui participerait à une guerre collective en application de l'article 16 du pacte de la Société des Nations pût jamais être atteint par le reproche d'avoir recouru à la guerre en tant qu'instrument de politique nationale 1 -- Inversement, l'Etat en rupture de pacte ne verrait guère se tourner contre lui les armes d'une communauté d'Etats que si son attitude mettait sérieusement en péril les intérêts de la Société des Nations et de ses membres; mais, dans cette hypothèse, ceux-ci se trouveraient, sous le régime même du pacte Kellogg, en état de légitime défense : de ce côté-là aussi, le ïecours aux armes leur serait donc permis.

L'article premier du pacte Kellogg paraît condamner la guerre, non seulement conime instrument de politique nationale, mais encore et même en premier lieu comme moyen de résoudre les différends internationaux. L'interdiction de recourir à la guerre pour résoudre des litiges internationaux n'a, à vrai dire, que la portée d'une déclaration de principe. Elle n'ajoute juridiquement rien au principe inscrit à l'article premier et qui constitue à lui seul la substance du pacte Kellogg, à savoir que les guerres utilisées comme instrument de politique nationale sont et demeurent prohibées. Urie guerre entreprise aux seules fins de régler une contestation internationale, c'està-dire une guerre où un Etat chercherait à imposer sa volonté par la violence serait, en effet, une guerre d'agression et cette guerre se trouverait déjà -condamnée en tant qu'instrument de politique nationale.

Si, sous les réserves que nous venons de faire, le recours aux armes pour le règlement de
différends internationaux est interdit, il convenait logiquement d'indiquer par. quoi la guerre doit être remplacée pour mettre fin aux conflits d'intérêts ou de prestige entre Etats. Si la guerre est un mal qu'il faut à tout prix éviter, un litige qui persiste en est un autre, assez pernicieux pour gangrener à la

1195 longue et dans certains cas toute la vie intex.natio.nale. C'est ainsi que l'article 2 du traité de Paris stipule que le règlement de tous les différends «ne devra jamais être recherché que par des moyens pacifiques ». Toute latitude est ainsi laissée aux Etats contractants quant au choix de ces moyens. Négociations directes, médiation, conciliation', arbitrage, règlement judiciaire, les ressources de règlement ne leur manqueront pas. Il est à noter cependant que, seule, une procédure arbitrale ou judiciaire est de nature à assurer, dans n'importe quel cas, la solution définitive de litiges internationaux. Or, cojmm'd le pacte Kellogg n'oblige pas les parties à recourir à ce mode de règlement plutôt qu'à un autre, il ne contient pas la garantie que les différends entre Etats contractants pourront être définitivement apaisés.

C'est une autre lacune qu'on peut lui reprocher, parce que, s'il est essentiel d'interdire la guerre, il est essentiel aussi d'empêcher que l'impossibilité juridique de la faire engendre finalement des situations plus voisines de la .guerre que de la paix. Si l'on veut proscrire les solutions de force, il importe qu'on accepte les solutions de droit, et il n'est guère qu'un1 moyen d'aboutir effectivement à ce résultat : l'acceptation, sur une base aussi large que possible, du principe de l'arbitrage obligatoire.

Le pacte Kellogg, avec ses restrictions et lacunes, ajoutera-t-il et, le cas échéant, dans quelle mesure aux garanties créées par la Société des Nations dans le domaine de la prévention des guerres1?

On sait que le pacte de la Société des Nations autorise la guerre dans le cas où la .procédure d'enquête-examen introduite en conformité de l'article 15 ne s'achève pas sur un rapport adopté à l'unanimité par le conseil. Ce qu'on a appelé la fissure du pacte, on a essayé, à plusieurs reprises, de la combler; sans revenir sur le protocole de Genève, il suffira de rappeler que rassemblée de la Société des Nations a adopté, le 24 septembre 1927, une résolution qui, abstraction faite de son préambule, a la teneur suivante :

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« L'assemblée déclare : 1. Toute guerre d'agression est et demeure interdite; 2. tous les moyens pacifiques doivent être employés pour le règlement de différends, de quelque nature qu'ils soient, qui viendraient à s'élever entre les Etats.

L'assemblée déclare qu'il y a obligation, pour les Etats membres de la Société des Nations, de se conforme? à ces deux principes. »

1196 On remarquera l'analogie et la symétrie frappantes qui existent entre cette résolution et le pacte Kellogg. Il y a même entre ces deux instruments identité sur le fond, puisque, comme nous l'avons vu, la guerre proscrite par, le pacte de Paris est, en somme, la guerre d'agression et que, d'autre part, le principe consacré par le chiffre 2 de la résolution^ correspond à l'article 2 du traité de renonciation à la guerre. Il existe cependant entre les deux actes une différence que, pratiquement, on' a faite et qu'il faut faire. La résolution du 24 septembre 1927 déclare bien qu'il y a obligation pour les Etats membres de la Société d'en respecter les principes; mais, comme on l'a fait remarquer à la tribune même de l'assemblée, ce n'est qu'une résolution. On peut disserter sur la valeur juridique d'une décision unanime de l'assemblée d« la Société des Nations; le fait est qu'on a considéré, à Genève, que la résolution précitée « ne constitue pas un instrument juridique proprement dit ... et se süffisant à luimême».1) Il faut admettre qu'il en est bien ainsi; car, si la résolution de l'assemblée, qui ne contient rien' de plus ni rien de moins que le -pacte Kellogg, avait toute la force d'un engagement international, le traité du 27 août dernier se fût avéré superflu ou presque. 2) L.e mérite du pacte de Paris, qui, lui, est un véritable engagement juridique, est donc d'avoir fait passer de l'ordre moral dans l'ordre juridique le principe de ]a condamnation des guerres d'agi'ession.

Appliqué au régime de la Société des Nations, ce principe comporterait des conséquences dont on saisit d'emblée l'importance. Il viendrait rétrécir la fissure qui subsiste dans le pacte de Genève, fissure par où peut s'échapper la guerre. Un membre de la Société ne recouvrerait plus le droit de recourir à la force du seul fait que, dans un litige déterminé, la procédure conciliatrice introduite en vertu de l'article 15 du pacte n'aurait pas trouvé sa conclusion dans des recommandations unanimes du conseil; il faudrait encore qu'il fût en état de légitime défense. Si cette dernière condition n'était pas remplie, le recours aux armes, qui eût été licite d'après le covenant, deviendrait illicite d'après le pacte Kellogg. Mais, entre l'obstacle dFessé devant la guerre par le pacte de la Société des Nations et l'obstacle
que viendrait y ajouter le pacte de Paris, il y aurait une différence : le second serait plus fragile que le premier, puisque la !) Déclaration de M. Sokal, rapporteur de la IIIe commission à l'assemblée, Journal officiel de la S. d. N., actes de l'assemblée, 1927, p. 155.

2 ) La résolution de l'assemblée ne lie que les Etats membres de la Société, alors que le pacte Kellogg offre cet autre avantage d'être ouvert à l'adhésion de tous les Etats sans exception.

1197 guerre entreprise contrairement au covenant exposerait son auteur aux sanctions de l'article 16, alors que le pacte Kellogg ne prévoit rien qui puisse faire échec aux visées de l'agresseur. Un traité démuni de sanctions précises peut néanmoins entraîner des conséquences telles que sa valeur, pratique ne saurait cependant être contestée.

Aussi n'est-il pas douteux que le pacte Kellogg augmenterait les garanties de paix contenues dans le pacte de la Société des Nations.

Grâce à lui, la porte entr'ouverte sur la guerre se refermerait davantage. Elle se refermerait même d'autant plus que, la guerre « égoïste et volontaire » étant solennellement prohibée sous toutes ses f orales, le conseil trouverait plus facilement dans son sein, en cas de conflit, les conditions d'accord qui lui permettraient d'opposer le veto de son unanimité aux premiers symptômes d'une tentative d'agression. Le pacte Kellogg aurait dono un double effet dans le sens d'un renforcement du système de prévention des guerres institué par la Société des Nations : en droit, il augmenterait le nombre des cas de guerre illicite; en fait, il diminuerait les possibilités de guerre que comporte l'article 15 du pacte en réduisant les risques de mésintelligence dans le conseil. Il pourrait rendre, à ce double titre, un signalé service à la cause de la paix.

Aux termes de son troisième et dernier article, le pacte de renonciation à la guerre prendra effet après dépôt, à Washington, des ratifications des quinze Etats signataires et restera ouvert à l'adhésion de tous les autres Etats sans exception. Le gouvernement des Etats-Unis nous ayant invité, au nom des Etats signataires, à examiner la possibilité d'y adhérer, quelle réponse définitive convient-il de lui donner ?

Cette réponse ne fait, pour nous, l'objet d'aucun doute. Nous croyoris que les chambres fédérales et, avec elles, le peuple suisse accueilleront avec sympathie un acte dont le but est de dresser un obstacle de plus sur le chemin qui conduit à la guerre. Le pacte conclu à Paris n'a certes pas de quoi satisfaire pleinement le jurisconsulte.

S'il est incontestable que les obligations qu'il renferme se voilent, à l'examen, d'imprécision et d'incertitude, il faut néanmoins reconnaître sa haute portée morale. Faire de la guerre d'agression' une chose juridiquement illicite et
criminelle, l'attaquer, comme on l'a dit à Paris, dans son essence propre, la flétrir comme on flétrit la piraterie et le brigandage, ce n'est certes pas encore la supprimer. Mais, pour la supprimer, n'est-ce pas par là qu'il faut CSrnmencer1?

Le principe fondamental du pacte contre la guerre, la Suisse y

1198 a. depuis longtemps donné sa pleine adhésion. Depuis longtemps, il est entré dans nos moeurs politiques, dans nos traditions; il est à la base même de notre neutralité. Nous l'avions en quelque sorte fait nôtre avant qu'il prît forme et substance sur le plan international.

Comment la Suisse hésiterait-elle, dès lors, à participer à un acte international qui condamne ce que, pour sa part, elle a depuis longtemps condamné ?

On pourrait se demander s'il ne conviendrait pas de différer notre décision jusqu'au jour où le pacte1 sera effectivement entré en vigueur, puisque l'absence de ratification de la part de quelque Etat signataire n'est pas encore exclue de l'ordre des possibilités et que, d'uu autre côté, un Etat pourrait lier sa ratification à des réserves dont il est impossible aujourd'hui de prévoir le sens et la portée. Si l'accord dont il s'agit comportait une obligation active, une obligation de faire, nous n'hésiterions guère à répondre par l'affirmative. Mais: le pacte Kello-gg ne nous impose aucune obligation que nous n'ayons déjà assumée de nous-mêmes. Il ne nous prescrit qu'une abstention et il se trouve que cette abstention, la renonciation à la guerre comme instrument de politique nationale, est, en Suisse, chose faite sans traité. On nous demande d'adhérer formellement à un' principe qui répond, chez nous, à de profondes convictions et forme l'essence même du statut politique que nous nous sommes volontairement donné.

Hésiterions-nous, sous couleur que d'autres n'ont pas encore reconnu ce principe en bonne et due forme ? -- Nous1 estimons, au contraire, que la Suisse a intérêt à manifester, par son empresseraient même à faire acte d'adhésion, la sympathie toute naturelle qu'elle éprouve pour l'idée de paix et de justice qui fut l'inspiratrice du pacte contre la guerre.

Le pacte a d'ailleurs beaucoup plus de chances d'entrer en vigueur que de demeurer juridiquement lettre morte. Or, lorsqu'il s'agit d'un traité d'un genre aussi spécial, d'un traité qui n'appelle aucun nouvel engagement de notre part, le parti le plus sage, nous; semble-t-il, est encore d'envisager l'éventualité la plus probable. Si, contre toutes prévisions, le pacte ne franchissait pas le stade de la signature, nous n'aurions pas moins fait un geste en faveur d'une bonne cause.

Quant aux réserves qui peuvent
être formulées au momjent des ratifications, il convient de ne pas en exagérer l'importance. Le pacte conclu, les Etats signataires n'ont pas plus que les Etats adhérent» le droit de formuler des réserves incompatibles avec la lettre et l'es-

1199 prit du traité/ Tous les Etats participants sont placés, au contraire,, sur. un pied d'égalité. Si donc nous ne voulions nous engager qu'en, toute connaissance de cause, après examen de toutes les réserves qui pourront accompagner les instruments de ratification ou d'adhésion,, nous n'aurions plus guère qu'un parti à prendre : attendre que tous les Etats du monde aient ratifié ou adhéré. Mais une attitude aussi circonspecte n'aurait pas sa raisojn d'être, étant donné qu'à part lèsréserves énoncées au cours de la négociation et que nous connaissons, celles qui seront éventuellement formulées dans la suite n'engageront que la responsabilité de leurs auteurs. Il est à remarquer d'ailleurs que même les premières réserves ne font pas intrinsèquemient partie du traité. Rien n'empêcherait, en effet, les Etats qui les ;ont formulées de les retirer ultérieurement. Il n'y a, en réalité, dans le pacte Kellogg, qu'un élément vraiment stable, permanent : c'est le principe de l'interdiction de la guerre comme instrument de politique nationale. Ce principe, comme tout principe juridique, peut être plus ou moins largement interprété et, à supposer que l'interprétation qu'on lui donne aujourd'hui soit quelque peu restrictive, rien ne nous dit qu'avec le temps elle ne devienne extensive au point d'exclure toute réserve qui ne découlerait pas logiquement et directement de la teneur même du traité.

Ajoutons que le pacte Kellogg appartient, à notre avis, à la catégorie des traités internationaux non dénonçables. La dénonciation d'un tiiaité qui fait un' crime de la guerre d'agression ne pourrait qu'être attentatoire à la morale internationale. Etant de durée illimitée, le traité est, d'après notre droit constitutionnel, sujet à referendum, de sorte que notre adhésion ne pourrait intervenir utilement qu'à l'expiration du délai référendaire de trois mois à compter de l'approbation parlementaire. C'est une raison de plus de ne pas différer plus longtemps notre décision, si tant est que nous voulons nous placer, pour les motifs susindiqués, sous le bénéfice moral d'une adhésion quasi-spontanée.

Si l'autorisatio'n parlementaire obtenue et le délai référendaire expiré, il s'avérait, contre toute attente, que le pacte Kellogg n'a guère de chances d'entrer en vigueur, il resterait encore la possibilité de surseoir à
notre adhésion définitive. Il suffirait que les chambres laissassent au Conseil fédéral -- et cette précaution serait toute naturelle -- la faculté de ne signifier à Washington l'adhésion de la Suisse qu'au moment où il le jugerait opportun.

Vu les considérations qui précèdent, nous vous prions d'approuver le traité de renonciation à la guerre en faisant vôtre le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

1200 Veuillez agréer, Monsieur le président et Messieurs, l'assurance
Berne, le 17 décembre 1928.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, SCHULTHESS.

Le chancelier de la Confédération, KAESLIN.

{Projet.)

Arrêté fédéral concernant

l'adhésion de la Suisse au traité de renonciation à la guerre conclu, à Paris, le 27 août 1928.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE, TU le (message du Conseil fédéral du 17 décembre 1928, arrête : Article premier.

Le traité de renonciation à la guerre conclu, à Paris, le 27 août 1928, est approuvé.

Art. 2.

Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution du présent arrêté; il fera la déclaration d'adhésion au moment qu'il jugera opportun.

Art. 3.

Le présent arrêté est soumis aux dispositions de l'article 89, 3e alinéa, de la constitution fédérale concernant le referendum en matière de traités internationaux.

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Texte du traité de renonciation à la guerre conclu à Paris le 27 août 1928.

Le président du R«ich allemand, le président des Etats-Unis d'Amérique, Sa Majesté le roi des Belges, le président de la république Française, Sa Majesté le "roi de Grande-Bretagne, d'Irlande et des territoires britanniques au delà des mer«, empereur des Indes, Sa Majesté le roi d'Italie, Sa Majesté l'empereur du Japon, le président de la république de Pologne, le président de la république Tchécoslovaque, Ayant le sentiment profond du devoir solennel qui leur incombe de développer le bien-être de l'humanité; Persuadés que le montent est venu de procéder à une franche renonciation' à la guerre comme instrument de politique nationale afin que les relations pacifiques et amicales existant actuellement entre leurs peuples puissent être perpétuées; Convaincus que tous changements dans leurs relations mutuelles ne doivent être recherchés que par des procédés pacifiques et être réalisés dans l'ordre et dans la paix, et que toute puissance signataire qui chercherait désormais à développer ses intérêts nationaux en recourant à la guerre devra être privée du bénéfice du présent traité; Espérant que, encouragées par leur exemple, toutes les autres nations du monde se joindront à ces efforts hum'anitaires et, en adhérant au présent traité dès qu'il entrera en vigueur, mettront leurs peuples à même de profiter de ses bienfaisantes stipulations, unissant ainsi les rïations civilisées du monde dans une renonciation commune à la guerre comme instrument de leur politique nationale; Ont décidé de conclure un' traité et à cette fin ont désigné comme leurs plénipotentiaires respectifs, savoir : Le président du Reich allemand : M. le Docteur Gustav Stresemann, ministre des affaires étrangères; Le président des Etats-Unis d'Amérique : L'honorable Frank B. Kellogg, secrétaire d'Etat;

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Sa Majesté le roi des Belges : M. Paul Hymans, ministre des affaires étrangères, ministre d'Etat; Le président de la république Ffßncaise : M. Aristide Briand, ministre des affaires étrangères; S'a Majesté le roi de Grande-Bretagne, d'Irlande et des territoires britanniques au delà des mers, empereur des Indes : Pour la Grande-Bretagne et l'Irlande du Nord et toutes les parties de l'empire britannique qui ne sont pas individuellement membres de la Société des Nations : Le très honorable lord Cushendun, chancelier du duché de Lancastre, secrétaire d'Etat pour les affaires étrangères par intérim; Pour le dominion du Canada : Le très honorable William Lyon Mackensie King, premier ministre et ministre des affaires extérieures; Pour le commonwealth d'Australie : L'honorable Alexander John McLachlan, membre du conseil exécutif fédéral; Pour le dominion de Nouvelle-Zélande : L'honorable Sir Christopher James Parr, haut-commissaire de la.

Nouvelle-Zélande en Grande-Bretagne; Pour l'union de l'Afrique du Sud : L'honorable Jacobus Stephanus Smit, haut-commissaire de l'union de l'Afrique du Sud en Grande-Bretagne; Pour l'Etat libre d'Irlande : M. William; Thomas Cosgrave, président du conseil exécutif; Pour l'Inde : Le très honorable lord Cushendun, chancelier du duché de Lancastre, secrétaire d'Etat pour les affaires étrangères par intérim; Sa Majesté le roi d'Italie : Le comte Gaetano Monsoni, son ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire à Paris; Sa Majesté l'empereur du Japon : Tue comte Uchida, conseiller privé;

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Le président de la république de Pologne : M. A. Zaleski, ministre des affaires étrangères; Le président de la république Tchécoslovaque : M. le Docteur Eduard Benes, ministre des affaires étrangères; qui, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, reconnus en bonne et due forme, sont tombés d'accord sur les articles suivants : Article I.

Les hautes parties contractantes déclarent solennellement au noni de leurs peuples respectifs qu'elles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux, et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles.

Article II.

Les hautes parties contractantes ou la solution de tous les différends ou de quelque origine qu'ils puissent «Iles, ne devra jamais être recherché

reconnaissent que le règlement ou conflits, de quelque nature être, qui pourront surgir entre que par des moyens pacifiques.

Article III.

Le présent traité sera ratifié1 par les hautes parties contractantes désignées dans le préambule, conformément aux exigences de leurs constitutions respectives, et il prendra effet entre elles dès que tous les instruments de ratification auront été déposés à Washington.

Le présent traité, lorsqu'il aura été mis en vigueur, ainsi qu'il est prévu au paragraphe précédent, restera ouvert aussi longtemps qu'il sera nécessaire pour l'adhésion de toutes les autres puissances du monde. Chaque instrument établissant l'adhésion d'une puissance sera déposé à Washington et le traité, immédiatement après ce dépôt, entrera en vigueur entre la puissance donnant ainsi son adhésion et les autres puissances contractantes.

Il appartiendra au gouvernement des Etats-Unis de fournin à chaque gouvernement désigné dans le préambule et à tout gouvernement qui adhérera ultérieurement au présent traité une copie certifiée conforme dudit traité et de chacun des instruments de ratification ou d'adhésion. Il appartiendra également au gouvernement des Etats-Unis de notifier télégraphiqueïoent auxdits gouvernements

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chaque instrument de ratification ou d'adhésion immédiatement après dépôt.

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent traité établi eu langue française et en langue anglaise, les deux textes ayant force égale, et y ont apposé leurs cachets.

Fait à Paris, le vingt-sept août mil neuf cent vingt-huit.

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Gustav Stresemanu Frank B. Kellogg Paul Hymans Aristide Briand Cushendun W. I. Maekenzie King A. J. McLachlan C. J. Parr J. S. Smit William T. Cosgrare Cushendun G. Manzoni Uchida Auguste Zaleski D' Eduard Benes.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'adhésion de la Suisse au traité de renonciation à la guerre conclu à Paris le 27 août 1928. (Du 17 décembre 1928.)

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