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FEUILLE FÉDÉRALE 80e année

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Berne, le 14 novembre 1928

Volume II

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui du projet de loi fédérale sur la formation professionnelle.

(Du 9 novembre 1928.)

À. Aperçu historique.

I. Les premiers efforts tentés en vue de relever le niveau de la formation professionnelle.

Lorsque les corporations de métiers eurent disparu en Suisse, la formation professionnelle y resta en maints endroits très négligée. D'un «ôté, le chef d'établissement ne voyait souvent dans la personne de.

l'apprenti qu'une main-d'oeuvre meilleur marché dont il fallait tirer tout le parti possible; les apprentis étaient des manoeuvres que l'on traitait à bien plaire. De l'autre côté, les parents ne poussaient pas, la plupart du temps, leurs enfants à faire un apprentissage sérieux; pour eux, l'essentiel était que les jeunes geais pussent leur rapporter aussitôt que possible un salaire élevé. Il est évident que la formation professionnelle ne pouvait que pâtir de l'opposition d'intérêts personnels aussi bornés.

On rencontrait certes de louables exceptions. Bon nombre d'artisans mettaient, comme par le passé, tous leurs soins et tout leur coeur à instruire complètement l'apprenti dans tous les travaux de la profession; c'était spécialement le cas à la campagne, où le maître touchait de plus près aux parents de l'apprenti. De leur côté, leg associations de métiers s'efforçaient aussi de relever le niveau de l'apprentissage.

Il en était de même dans le commerce et l'industrie. En créant des ateliers d'apprentissage, quelques grands établissements de l'industrie des machines ont rendu un service signalé à la cause de la formation professionnelle. L'apprentissage rencontre de sérieuses difficultés dans les grands établissements qui pratiquent à l'extrême la division du travail. Dans les petits établissements, la nature même Feuille fédérale. 80e année. Vol. II.

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de l'exploitation permet à l'apprenti de s'exercer dans tous les domaines de la profession. Dans les grands établissements, par contre, des.

mesures doivent être prises pour que l'apprenti ne demeure pas confiné dans une seule spécialité. Pour être méthodique, l'enseignement doit alors prévoir que l'apprenti sera placé sous la direction d'un maître spécial, qu'il passera la première période de som apprentissage dans un atelier spécialement affecté aux apprentis et parcourra ensuite, par étapes successives, les différentes divisions de l'établissement. En 1870 déjà, la maison Sulzer créa un atelier pour les apprentis serruriers; elle l'étendit, en 1874, aux fomdeurs. Les usines métallurgiques von. Roll suivirent l'exemple et ouvrirent à Olten, en 1897, un atelier d'apprentissage pour fondeurs. En 1905, la maison Sulzer organisa, à Winterthour, le premier atelier pour apprentis tourneurs. Par la suite, la maison Brown-Boweri & Oie. à Baden, la société des usines métallurgique von Boll à Choindez, Glus et Kondez, la fabrique de machines Oerlikon S. A., les « Eisen- und Stahlwerke, vorm. G. Fischer » à Schaffhouse et la maison E. Dubied S. A. à Couvet instituèrent également des ateliers pour apprentis serruriers, fondeurs et tourneurs. Dans la plupart des cas, des écoles spéciales furent jointes; à ces ateliers d'apprentissage en vue de compléter l'enseignement pratique par das cours théoriques.

Certaines écoles professionnelles sont encore plus anciennes que les ateliers d'apprentissage rattachés aux établissements industriels.

En 1824, une école d'horlogerie fut fondée à Genève. En 1828b Berne créa une école des arts et métiers (Handwerkerschule, actuellement Gewerbeschule) et Aarau en fit autant en 1842 (Handwerkerschule, actuellement Gewerbemuseum). Pendant les trente années gui suivirent* des écoles d'horlogerie furent instituées à La Chaux-de-Fonds, à Fleurier, à St-Imier, au Locle et à Neuchâtel, différentes écoles de perfectionnement professionnel furent fondées par la société suisse des commerçants et, enfin, l'éoole polytechnique fédérale, établissement d'enseignement professionnel supérieur, s'installa à Zurich. En 1874, le premier technicum s'ouvrit à Winterthour. Au début des années 1880» furent créées une école de tissage à Wattwil, une école pour le tissage de la soie à Zurich et une
école de sculpteurs sur bois à Brienz.

Toutefois, l'instruction donnée dans l'établissement même demeurait, comme par le passé, le mode d'apprentissage le plus1 répandu et, sous ce rapport, la situation laissait toujours à désirer. Il est vrai qu'on avait tenté d'y remédier et que de louables efforts avaient été faits dans ce dessein par la société suisse d'utilité publique, par l'union suisse des arts et métiers fondée en 1879, par différentes sociétés de patronage de l'apprentissage dès 1890 et, enfin, ces dernières années, par l'association suisse de conseils d'apprentissage et de protection desapprentis. Les examens de fin d'apprentissage, institués en premier

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lieu par l'union suisse des arts et métiers, étaient apparus,, en particulier, comme un précieux stimulant de la formation professionnelle. Mais, d'une manière générale, la situation demeura critique jusqu'à la fin du siècle dernier. Petit à petit l'on finit cependant par se convaincre qu'en laissant uniquement au droit privé le soin de réglementer l'apprentissage, on aboutirait, dans la plupart des cas, à sacrifier le but de ^apprentissage au profit de certains intérêts particuliers et l'on réclama de nouveau l'élaboration de normes imperatives de droit public.

La Suisse occidentale fut la première à entrer dans cette ivoie.

Le 21 novembre 1890, le canton de Neuchâtel édicta une loi d'apprentissage. Au cours des dix années qui suivirent, les cantons de Fribourg, Vaud et Genève se conformèrent à cet exemple et, en 1920, presque tous les autres cantons possédaient des lois sur l'apiprentissage.

Entre temps, on s'était efforcé aussi de faire intervenir la Confédération en faveur du développement de la formation professionnelle. L'union suisse des arts et métiers appuya chaleureupl3tmen,t ce mouvement. En vertu de l'arrêté fédéral du 27 juin 1884 concernant l'enseignement professionnel1), une subvention fédérale fut accordée chaque année dès 1884 aux établissements d'enseignement professionnel des arts et métiers et de l'industrie. En vertu do deux autres arrêtés fédéraux2) pris en 1891 et 1895, des subventions fédérales furent également allouées à l'enseignement commercial, à l'enseignement de l'économie domestique et à l'instruction professionnelle à donner à la femme.

Mais il importait encore de développer, à côté de l'enseignement théorique, la formation pratique de l'apprenti. En 1892, l'assemblée des délégués de l'union suisse des arts et métiers demanda que les examens de fin d'apprentissage fussent rendus obligatoires et que la Confédération soutînt énergiquement les ateliers d'apprentissage dans l'accomplissement de leur tâche. Mais, à ce moment,- la Confédération n'avait pas la compétence de légiférer dans ce domaine.

II. Compétence législative de la Confédération.

Vers la même époque, les efforts tendaient déjà à introduire dans la constitution fédérale un article 34ter donnant à la Confédération le droit de «statuer des prescriptions uniformes dans le domaine des arts et métiers». Soumis une première fois1 à la votation 1) 2 RO 7, 554.

) AP du 15 avril 1891 concernant l'encouragement de l'enseignement commercial (RO 12, 135) et AF du 20 décembre 1895 concernant l'enseignement de l'économie domestique et l'instruction professionnelle à donner à la femme (RO 15, 461).

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populaire, le projet fut rejeté; légèrement modifié, il passa le 5 juillet 1908, à la forte majorité de 232.Ì457 voix contre 92,561 et de tous les Etats, sauf un demi-canton.

L'article 34ter prévoit d'une manière toute générale que «la Confédération a le droit de statuer des prescriptions uniformes dans le domaine des arts et métiers». Le développement de l'apprentissage et de l'enseignement professionnel figurait au premier rang des voeux que la revision constitutionnelle devait permettre de réaliser et le programme législatif établi, le 30 novembre 1908,, par les représentants des grandes associations économiques mettait, à nouveau, au premier plan des matières à traiter par la nouvelle législation: l'apprentissage et la formation professionnelle complémentaire.

III. Etude d'une loi fédérale et élaboration d'un avant-projet par l'office fédéral du travail.

L'ancien département fédéral de l'industrie invita alors les associations économiques à lui communiquer leurs voeux et désirs au sujet du programme ,qui avait été établi lors de la conférence du 30 novembre 1908. Parmi les mémoires qui lui furent présentés, il y a lieu de relever, au sujet de la formation professionnelle: le projet de loi de la fédération ouvrière suisse concernant «le contrat d'apprentissage des mineurs», renfermé dans un texte imprimé du 6 juin 1911 relatif «à la concurrence déloyale et à la réglementation de l'apprentissage» ainsi que les adjonctions imprimées qui furent apportées, au mois de juin 1913, par l'union syndicale suisse; les chapitres VI à VIII des « postulats » formulés, au cours de l'automne 1911, par la société suisse des commerçants « à l'endroit de la, législation fédérale sur les arts et métiers»; plusieurs mémoires émanant du «Verband Schweizerischer Zeichen- und Gewerbeschullehrer»; de nombreux avis de ses sections réunis par le Vorort de l'union suisse du commerce et de l'industrie sous lettre B de son mémoire du 5 août 1909; et, tout spécialement, le projet du 9 juin 1918 de l'union suisse des arts et métiers «sur l'apprentissage et l'instruction professionnelle». Ce projet, rédigé par M. Krebs, alors secrétaire de l'union, et publié dans le fascicule 28 des Gewerblichen Zeitfrugen constituait une solide base de discussion. Le département fédéral de l'économie publique convoqua une commission d'experts qui fut chargée d'examiner le projet. Cette commission, composée des représentants de toutes les parties du pays et des délégués de tous les grands groupements économiques, aboutit à une rare unité de vues sur toutes les questions importantes. Elle reconnut à l'unanimité l'impérieux besoin d'une réglementation fédérale de l'apprentissage et trancha par l'affirmative la question de savoir si la loi devait englober également l'en-

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seignement professionnel. Elle fut unanimement d'accord de rendre obligatoires, pour les apprentis, les examens de fin d'apprentissage et l'instruction professionnelle. Une forte majorité fut même d'avis de décréter l'instruction professionnelle obligatoire pour toutes, les personnes de moins de 18 ans occupées dans un établissement soumis à la loi. Les travaux de la commission d'experts furent terminés au mois de mars 1921. Il ne resta plus alors qu'à passer à l'élaboration d'un projet de loi, en s'inspirant Ses opinions de la commission let des expériences faites sous l'empire des lois cantonales sur l'apprentissage. M. le professeur L. R. von Salis, chargé primitivement de l'étude des différentes lois, dut malheureusement remettre d'année en année les travaux dont il était chargé puis, finalement renoncer complètement à la mission qui lui avait été confiée. L'office fédéral du travail, auquel la tâche incombait désormais, s'y consacra Sitôt que le chômage, qui lui imposait une très grande augmentation de travail, eut perdu de son intensité. Terminé au début de l'automne 1923, Favant-projet fut soumis à une commissàon de quatre experts qui se réunit les 5 et 6 novembre sous la présidence du directeur de l'office fédéral du travail; cette commission approuva l'avant-projet dans toutes ses dispositions importantes. Après avoir tenu compte des voeux exprimés par la commission sur certains points de détail, l'avant-projet fut publié, avec un exposé détaillé des mot(ifs, au début de l'année 1924 par l'office fédéral du travail sous le tiitre « Avant-projet et exposé des motifs d'une loi fédérale sur la formation professionnelle ».

IV. Accueil fait à l'avant-projet.

Avant d'être soumis au département et au Conseil fédéral, l'avamtprojet de loi fut communiqué aux gouvernement« cantonaux, aux associations et écoles professionnelles et aux divers milieux intéressés, poui- leur permettre d'exprimer leur avis et de formuler leurs proposition».

Les mémoires affluèrent en grand nombre. Ceux des associations centrales des employeurs et des travailleurs et de quelques cantons démontrèrent, tant au fqnid qu'à la forme, l'importance de principe qu'ils attribuaient à l'avant-projet.

En ce qui concerne les gouvernements ou départements cantonaux, Zurich, Baie-Ville, Argovie, Neuchâtel et Genève se déclarèrent
d'accord en principe sur le projet; les mémoires de la plupart des autres cantons se bornèrent à formuler des propositions à, l'égard de certains articles; on en peut donc conclure qu'ils se ralliaient en principe au projet d'une réglementation par la voie de la législation, fédérale. Des réserves tenant à des considérations d'ordre fédéraliste ont été faites par les cantons de Fribourg et de Vaud. Certains des

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mémoires cantonaux étaient particulièrement bien étudiés et furent d'un précieux secours pour l'examen du problème.

Au nombre des associations professionnelles qui s'occupèrent de la question, il faut citer en premier lieu l'union suisse des arts et métiers. Dans une résolution votée par l'assemblée annuelle de 1924, l'union déclara que l'avant-projet d'une loi fédérale sur la formation professionnelle pouvait servir de base à l'élaboration de cette partie de la législation. Bien que l'idée eût été tout d'abord de ne pas discuter l'avant-projet avant que les deux autres parties de cette législation ne fussent également parvenues à l'état de projet, le comité central et l'assemblée annuelle de 1925 finirent cependant par décider de passer à la discussion de l'avant-projet et d'inviter l'office fédéral du travail à poursuivre et à mener à chef l'étude de la première partie de cette législation. A la suite de la discussion qui s'ouvrit alors, l'union élabora un nouveau projet qui, tant au point de vue du fond que de la forme, correspondait dans une large mesure à l'avant-projet de l'office fédéral. Au sein de l'union suisse du commerce et de l'industrie et de l'union centrale des associations patronales suisses, la majorité se montra hostile à l'avant-projet, contrairement à la minorité, composée entre autres des chambres de commerce de Fribourg, de Soleure et du Tessin, qui s'y déclara acquise. Les associations centrales des travailleurs se sont déclarées entièrement d'accord pour la promulgation d'une loi fédérale sur le modèle de l'avant-projet. Toutefois la société suisse des commerçants, ainsi que l'union syndicale et l'union ouvrière chétienne-sociale, déclarèrent regretter qu'aucune disposition concernant la protection de l'apprenti ne fût comprise dans l'avant-projet, et les deux premières de ces associations firent des réserves à ce propos. Toutes les associations ouvrières semblent néanmoins estimer qu'une loi fédérale sur la formation professionnelle répond à un besoin urgent, et toutes donnèrent leur adhésion de principe à l'avant-projet.

Q faut encore mentionner l'attitude prise par l'association suisse de conseils d'apprentissage et de protection des apprentis, la plus importante association d'utilité publique existant dans ce domaine.

Elle adopta, lors de son assemblèe annuelle de
1924 à Lausanne» la résolution suivante: «L'association suisse de conseils d'apprentissage et de protection des apprentis, réunie en assemblée annuelle, prend connaissance avec satisfaction du projet de loi fédérale relative à la formation professionnelle. Elle l'envisage comme une oeuvre qui sera admirablement qualifiée pour augmenter le rendement matériel et moral du peuple suisse et lui faciliter, dans une large mesure, ses efforts sur le marché international du travail. Toutefois, l'assemblée annuelle envisage comme une lacune le fait que les organes, les ;rouages et les exploitations de la Confédération, des cantons et des coin-

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munes ne soient pas soumis à la loi en question. Pour diverses raisons, il est indispensable que ces branches de l'activité officielle soient également comprises au nombre de celles qui seront soumises aux dispositions de la loi. En outre, l'assemblée constate à regret que déjà, dans différents milieux industriels et commerciaux^ des voix se soient élevées, demandant que la future loi ne concerne que les arts et métiers au sens étroit du terme. L'assemblée estime qu'il y a dans ces arguments aine méconnaissance des idées fondamentales du projet de loi, dont devront bénéficier toutes les sphères de la population. Elle espère que le Conseil fédéral fera en sorte que la présente loi reçoive la plus grande étendue possible. »

V. Remaniement de l'avant-projet.

Les milieux intéressés ayant eu largement le temps de définir leur attitude à l'égard de l'avant-projet et des questions de principe en rapport avec la future législation, l'office fédéral du travail, comme le relève le rapport de gestion de 1926, fut chargé d'élaborer pendant l'année 1927 un nouveau projet de loi sur la formation professionnelle. La conviction que cette loi était une nécessité avait gagné des milieux de plus en plus étendus et avait été signalée, oralement et par écrit, au département de l'économiie publique.

L'importante et précieuse documentation, recueillie au cours do la consultation entreprise à propos de l'avant-projet, fut soumise à un examen minutieux. Le projet ac-tuel modifie et complète le précédent. Sont nouveaux notamment les chapitres relatifs à la formation professionnelle sans apprentissage régulier, aux cours de préapprentissage et aux examens professionnels supérieurs, ainsi que quelques dispositions sur l'enseignement professionnel.

Le présent pr'ojet de loi constitue le premier pas vers l'élaboration de la législation sur les arts et métiers. Mais on n'en restera pas là, et le Conseil fédéral a l'intention d'élaborfer le plus tôt possible les autres parties de cette législation, qui porteront sur la protection.

des travailleurs ainsi que sur la protection et le développement des arts et métiers. Sur la proposition du département de l'économie publique, le Conseil fédéral a décidé que l'étude des autres parties de cette législation devait être poursuivie et terminée le plus rapidement possible.

B. De la nécessité d'une loi fédérale.

Il ressort d'articles de journaux et d'autres publications parus au moment où l'article 34ter fut inséré dans la constitution fédérale qu'à cette époque les divers groupements professionnels et les différentes parties du pays étaient unanimes à reconnaître le besoin fr'une

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loi fédérale réglementant la formation professionnelle. Les cantons ne constituant plus des entités économiques indépendantes les unes desautres, les initiatives qu'ils pouvaient prendre isolément dans ce domaine se heurtaient à de nombreuses difficultés. Dans bien des cantons il n'existait pas alors de loi sur l'apprentissage; et chez ceux qui en avaient élaboré une, de nombreux doutes surgissaient quant au champ d'application de la loi cantonale, d'une pao-t, de la loi fédérale sur le travail dans les fabriques et du code fédéral des obligations, d'autre part.

Y a-t-il aujourd'hui une raison qui impose un revirement dans l'attitude .adoptée voici quelque vingt ans? Il est vrai que quelquesnouvelles lois cantonales ont été promulguées depuis la revision constitutionnelle. Mais tous les cantons romands et les plus grands de la Suisse allemande, Berne et Zurich, ainsi que Lucerne et Baie-Ville, en possédaient déjà à cette époque. Les raisons qu'on invoquait alors pour préférer une loi fédérale à une réglementation cantonale sont devenues encore plus impérieuses, notamment en ce qui concerne l'interdépendance économique des cantons. La crise de chômage del'après-guerre a révélé plus que jamais les inconvénients d'ordre économique qu'entraîné le manque de formation professionnelle. Tandis que des ouvriers étrangers qualifiés devaient être autorisés à entrer en Suisse, de nombreux ouvriers indigènes non qualifiés devaient être assistés aux frais de la communauté. D'ailleurs, la grande commission d'experts, appelée au cours de l'année 1921 à se prononcer sur la question, avait été, en g-énéral, d'avis qu'il fallait élaborer une loi fédérale sur la formation professionnelle.

On entend souvent 'dire, de nos jours, que les progrès faits pa-r la rationalisation permettront de se contenter, de plus en plus, d'ouvriers formés à leur travail sans avoir passé par un apprentissage régulier. Mais il a été abondamment démontré, ces derniers temps* que ce jugement était erroné, tout au moins en, ce qui concerne l'économie européenne. D'ailleurs, même dans l'industrie américaine, où la rationalisation a atteint son développement le plus complet dans · le domaine de la technique comme de l'organisation du travail, les ouvriers qualifiés sont aussi recherchés qu'autrefois; et l'Amérique est peut-être le pays qui,
au point de vue de la rémunération, fait la plus forte distinction entre ouvriers qualifiés et ouvriers sans apprentissage régulier. La rationalisation, qui n'est en somme pas nouvelle pour la Suisse, puisqu'on s'y est toujours efforcé d'organiser la production aussi économiquement que possible, modifiera peutêtre dans une certaine mesure la composition de la tmain-d'oeuvre.

Les ouvriers qualifiés et spécialisés seront demandés en plus grand nombre, et la formation professionnelle devra tenir compte de cet

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accroissement des besoins. La grande industrie sera peut-être appelée plus fortement qu'autrefois à satisfaire elle-même ces besoins et à former ses recrues dans ses propres ateliers d'apprentissage. Il faudra également tenir compte, dans une plus large 'mesure, de la formation professionnelle acquise sans apprentissage régulier. Mais aucune raison ne permet d'affirmer que la rationalisation éliminera l'ouvrier qualifié. Elle permettra au contraire de se passer de nombreux manoeuvres et ouvriers auxiliaires. Le réseau d'assemblage -- appareil de transmission transportant automatiquement d'un ouvrier à l'autre l'objet soumis aux opérations successives de la production -- permettra notamment de se passer des ouvriers hons qualifiés chargés du service des transports. Il importe, en outre,, de relever que la production en masse, qui est le meilleur moyen de réduire le nombre des ouvriers qualifiés, n'entre pour ainsi dire pas en ligne |de compte chez nous comme but de la rationalisation. A ce point de vue, les tarifs douaniers élevés qui sont appliqués actuellement placent dans une situation privilégiée les pays possédant un important marché intérieur. D'ailleurs, les conditions d'existence sont telles dans notre pays que, même à la faveur d'une rationalisation poussée à ses extrêmes limites et d'une amélioration des débouchés étrangers, la fabrication en masse et à bon marché suffirait à peine à assurer une rémunération suffisante à la production. De plus, si l'industrie suisse venait à se consacrer à la production en masse, notre économie nationale serait privée du profit que représentent une expérience acquise au cours d'une longue activité et l'emploi d'urne main-d'oeuvre, instruite et hautement qualifiée. Or, ce n'est qu'en tirant parti de ces avantages que nous pourrons espérer obtenir tout le bénéfice de notre travail.

Aujourd'hui comme autrefois, tout concourt donc à subordonner laprospérité économique de notre pays à la qualité de son travail1. L'expérience démontre d'ailleurs que, malgré les barrières douanières et les frais de production élevés, la qualité de nos produits nous assure notre place sur les marchés étrangers et nous permet de balancer nos importations de denrées alimentaires et de matières1 premières. C'est donc une question vitale pour notre pays de maintenir et de développer
le travail de qualité.

Mais ce travail de qualité ne peut s'obtenir que pai une fO|nnation professionnelle appropriée. Or, chez nous, le développement de la formation professionnelle ne répond plus, en maints endroits, aux exigences actuelles. Convaincus de l'importance de cette question, certains pays ont fait, avant la guerre déjà et surtout depuis lors, de grands efforts dans ce domaine et sont en voie de nous dépasser. Ainsi la France a promulgué, en 1919, la loi Astier, qui a donné un important essor à la formation professionnelle. L'Allemagne qui, depuis longtemps, fait de grands sacrifices pour la formation professionnelle

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«t qui en a retiré des avantages certains, s'est encore remise plus intensivement à l'oeuvre ces dernières années afin de recouvrer sa prospérité économique d'antan. D'autres pays du continent s'occupent) également de ce 'problème; plusieurs d'entre eux, en particulier le Danemark, la Hongrie, la Finlande, la Bulgarie et la Po,logn©, ont élaboré des dispositions légales. En ce qui concerne l'Italie, il faut mentionner le décret de 1923 au sujet de la réorganisation de l'enseignement professionnel. L'administration du ministère allemand du travail a publié, l'année dernière, un projet de loi très étendu sur la formation professionnelle et, en France, une loi relative à l'organisation de l'apprentissage a été adoptée, le 20 mars 1928, en complément de la loi Astier (v. aussi l'article 25 de la loi de finance du 13 juillet 1925). Si nous ne voulons pas aller au-devant d'échecs dans la lutte économique de ces prochaines années, nous devons donc prendre sans tarder les mesures nécessaiz-es au développement de l'habileté professionnelle de 'nos jeunes générations. Il est indispensable de coordonner les efforts et d'arriver ainsi à élever le niveau de la formation professionnelle. Nous ne méconnaissons nullement les heureuses tentatives fa.ites dans ce s&ns par certains établissements, par des associations d'utilité publique et par des organisations professionnelles. Certains cantons ont également fait oeuvre importante dans ce domaine, et la Confédération s'est efforcée d'y collaborer tpar ses subventions en faveur de l'enseignement professionnel et des examens de fin d'apprentissage. Mais, faute de cohésion, to.utps les mesures prises ne réussirent pas, bien souvent, à sortir pleinement leur effet. Coordonner et diriger logiquement tous les efforts tentés en faveur d,u développement de la formation professionnelle, telle est la tâche à laquelle la Confédération ne peut se soustraire dans les circonstances présentes.

L'habileté professionnelle développe la confiance en soi, le ferme espoir de percer dans la, vie par ses propres forces plutôt qjie pas faveurs ou par intrigues. La période de chômage que nous avons traversée ces dernières années a démontré une fois de plus que l'ouvrier qualifié était le dernier licencié et le premier rengagé. La formation professionnelle contribue donc à la lutte contre
le chômage et profite par conséquent à l'ensemble du pays.

Presque to.us les cantons possèdent actuellement des lois sur l"apprentissage, dont certaines dispositions concernent le développement de la formation professionnelle. Nous reconnaissons entièrement les heureuses initiatives dues à ces lois, mais il n'en demeure pas moins que certaines d'entre elles ont besoin d'une revision. La plupart ·visent la protection 'plutôt que le développement professionnel de l'apprenti et en restent par conséquent au premier stade de la forma-

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tion professionnelle. Il est évident qu'une loi qui se borne à déterminer les droits et les obligations du maître et de l'apprenti et qui comprend peut-être quelques dispositions sur la formation professionnelle ne répond plus aux exigences modernes. Elle doit encore renfermer des dispositions plus précises- sur le droit de prendre des apprentis, empêcher que les apprentis ne soient exploités et que le contrat d'apprentissage ne soit éludé. Il faut en outre que l'apprenti mette à profit tout le temps dont il dispose et acquière l'a formation professionnelle la plus étendue; or, cela n'est possible que si, dès le début, le maître s'attache à l'initier aux choses de sa profession au lieu de l'employer comme manoeuvre. De plus, l'apprenti complétera son apprentissage en suivant des cours professionnels donnlés par des personnes compétentes. Quant au certificat de capacité décerné à la suite des examens de fin d'apprentissage, il faut qu'il jouisse de l'estime générale, qu'il soit protégé par la loi et qu'il prouve l'habileté professionnelle du porteur. Le mémoire de l'union suisse des arts et métiers relève avec raison que le manque d'uniformité qui règne au sujet des programmes d'examens paralyse et rend illusoires les efforts tentés par certains cantons et associations en faveur du développement de la formation professionnelle. Les examens de fin d'apprentissage seront également accessibles aux bons ouvriers formés à un métier sans apprentissage régulier et désire.ux d'améliorer leur situation, ce qui les incitera à suivre les cours professionnels complémentaires. Aux examens de fin d'apprentissage, qui ne sont en somme que l'achèvement du premier stade de la formation professionnelle, succéderont des cours destinés aux maîtres et aux ouvriers. Des cours professionnels supérieurs, portant également sur quelques branches spéciales, seront organisés pour les employés des professions commerciales; malgré le fort excédent des demandes d'emploi constaté dans cette branche d'activité, on y manquait cependant souvent d'employés spécialistes qualifiés, de sorte qu'il fallait avoir recours à la main-d'oeuvre étrangère.

Il serait évidemment possible que les cantons revisent leurs lois ou en édictsnt de nouvelles et comblent ainsi les lacunes existantes.

Mais leurs tentatives se heurteraient à de nombreux
obstacles, notamment pour des raisons de concurrence. Les cantons ne constituent .pas des entités économiques indépendantes les unes des autres. Les mesures qu'ils prendraient, chacun pour son compte, pourraient donc aggraver les conditions 3.e la concurrença pour certains des établissements situés sur leur territoire. De plus, ces cantons supporteraient entièrement tous les sacrifices financiers, alors que, par le fait de la liberté d'établissement, les bénéfices d'une amélioration de la formation professionnelle ne profiteraient pas aux seules entreprises du canton. Ces différentes considérations paralysent toute initiative.

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II faut encore relever que la législation cantonale, envisagée en soî et indépendamment des difficultés qu'elle comporte, n'est pas à sa place lorsqu'on a affaire à des entreprises ayant des établissements dans plusieurs cantons. Et ceci est le cas non seulement de quelques entreprises industrielles, mais encore et avant tout de nombreuses maisons de commerce de la Suisse entière. Enfin, il faut aussi mentionner que les initiatives des cantons se heurtent au droit fédéral (loi sur les fabriques, code des obligations) et qu'il peut en, résulter des difficultés de nature à compromettre les réformes nécessaires (v. E. Savoy, L'apprentissage en Suisse, p. 118).

Une meilleure formation professionnelle n'est pas seulement d© l'intérêt de l'ouvrier et de sa famille, mais encore et surtout de celui de la profession. Le maître ne pourra fort souvent pas garder comme ouvrier l'apprenti qu'il aura formé; une autre entreprise l'engagera et recueillera les fruits des peines du maître d'apprentissage..

Il se crée ainsi une solidarité d'intérêts qui n'a pas échappé aux associations professionnelles et les a engagées à développer la formation professionnelle. Mais1, de même que les régions économiques, la plupart des associations professionnelles débordent aussi les limites cantonales. Elles sont donc pareillement paralysées dans leurs initiatives par l'obligation de s'entendre avec de nombreux gouvernements cantonaux. C'est pourquoi les associations professionnelles ont réclamé avec toujours plus d'insistance, ces derniers temps, l'élaboration d'une loi fédérale sur la formation professionnelle. Une réglementation du problème par les autorités cantonales entraînerait inévitablement des retards et des compromis. Toutefois, la collaboration des association» professionnelles est particulièrement précieuse dans ce domaine, voiremême indispensable. Les conditions inhérentes à chaque profession sont si diverses qu'il est impossible d'établir, abstraction faite de quelques principes, une réglementation uniforme pour toutes les professions. Les associations professionnelles seront souvent mieux à même d'élaborer les dispositions relatives à chaque métier, tout en observant les limites générales fixées par la loi et sous réserve de l'approbation de l'autorité compétente. Quant à l'application de ces dispositions, il y
aura lieu également de faire appel aux associations. Or, cette collaboration serait rendue beaucoup plus difficile, pour ne pas dire impossible, si la réglementation restait affaire des cantons.

La réglementation fédérale permettra non seulement de coordonner les forces actives du moment et d'en mettre en réserve pour développer les résultats déjà acquis, mais encore de poursuivre, sans retard et rationnellement, ce développement de la législation. Même avec la meilleure volonté, les cantons ne sont pas en mesure d'atteindre

ce but en revisant et complétant leur législation sur la matière. Dans ces conditions, la Confédération ne peut pas se refuser à se charger de la tâche.

Il résulte de tout ce qui précède que l'élaboration d'une loi fédérale sur la formation professionnelle est devenue une nécessité, et c'est la raison pour laquelle on a demandé de -différents côtés, ces des> nières années, que cette loi voie le jour aussi rapidement que possiate:.

C. Base constitutionnelle.

La base constitutionnelle d'une loi fédérale sur la formation professionnelle se trouve dans l'article 34ter de la constitution fédérale. Ainsi que l'a déjà relevé le rapport de gestion de 1924 (p. 696), on s'est demandé quelle était la portée de cet article. Il découle de sa genèse et de la ratio legis que la Confédération, doit .avoir le droit de légiférer dans les domaines de l'artisanat, de l'industrie et du commerce. Ce n'est qu'à cette condition que l'on peut concevoir la réalisation du programme législatif établi en 1908.

Le texte allemand de l'article 34ter correspond à cette conception,.

Il donne, en effet, le droit à la Confédération d'édicter des dispositions uniformes dans le « Gewerbewesen ». Les textes français et italien de la constitution rendent ce terme « Gewerbewesen » par « arts et métiers » et « arti e mestieri », expressions dont le sens est beaucoup plus étroit. Cette divergence entre les textes ayant soulevé, comme il a été dit, des doutes sur la portée de l'article 34ter, il importe d'examiner ici la question de plus près.

En Suisse, l'expression « Gewerbe » s'emploie aussi, il est vrai, en langage courant, dans un sens étroit qui ne va guère au delà de l'artisanat, tout en comprenant peut-être encore le petit commerce.

Mais il est incontestable qu'au point de vue de la scienco et de la '.technique législative, sa signification est beaucoup plus étendue. Et c'est bien dans ee sens qu'il se trouve employé dans de nombreux textes législatifs suisses. Ainsi dans la constitution fédérale: articles 31 et 34, dans le code civil: articles 61, 167, 191, 207, 220, 296, 350, 362, 403, 412, 421, dans le code des obligations : articles 61, 100, 101, 552, 865. Dans tous ces articles, le mot « Gewerbe » est rendu en français par « industrie » et non par « arts et métiers ». Il en est de même dans les lois spéciales et, par exemple, à l'article 1er, chiffre 2, de la loi fédérale sur la protection des marques de fabrique et de commerce. De plus, 1'« industriel » des conventions internationales est régulièrement traduit en allemand par « gewerblich ». Le code des obligations, dans Bon article 459 qui a trait aux fondés de procuration, emploie en allemand le terme « Gewerbe » et en français simplement celui de « commerce >:

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qui, étant donnée la matière visée, suffit amplement. On trouve taussi dans certains textes français, comme synonyme de «Gewerbe»,, les termes « profession », « établissement », ou « affaires » qui ont un senstout à fait général (art. 97 et 108 Cst., art. 458, 462, 464 et 590 CO).

Quant aux expressions « arts et métiers » et « arti e mestieri »,. il importe de relever que l'article 34ter de la constitution fédérale et l'articLe correspondant du code revisé des obligations (art. 362) sont les seuls textes qui les emploient dans le sens de « Gewerbe ». Or, pour ceux; qui ne connaissent ou ne prennent en considération que le texte allemand, il n'y a aucune raison de restreindre tout 'd'un coup la signit fication du terme «Gewerbe». Et, en fait, personne ne releva le sens plus étroit du texte français. Au contraire, tous les voeux qui furent émis à l'endroit ds la future législation basée sur l'article 34tcr dépassèrent le cadre étroit des «arts et métiers». Il n'y avait donc aucun motif d'adopter une interprétation restrictive et il y avait d'ailleurs d'autant moins de raisons de le faire que le droit cantonal et le droit étranger emploient également le terme «Gewerbe» dans son sens largs. C'est ainsi que la loi bernoise «sur l'industrie» (,,über das Gewerbewesen") définit comme il suit son champ d'application: « Sont régies par la présente loi toutes les industries et professionis qui n'ont pas uniquement pour objet l'économie rurale ».

Les textes en présence sont donc plus étroits en français et en italien qu'en allemand. On a avancé que le texte allemand était l'original, tandis que les textes français et italien n'en étaient qu'une traduction défectueuse. C'est certainement exact au point de vue historique, mais, au point de vue juridique, on peut faire valoir^ par contre* que les trois textes font foi chacun au même titre. On ne peut pas davantage invoquer le fait que, même en comptant comme rejetante tous les votes donnés en faveur de l'article constitutionnel dans les parties de langue française ou italienne du pays (Fribourg, Grisons,: Tessin, Vaud, Valais, Neuchâtel, Genève et Jura bernois), on obtiendrait néanmoins une majorité acceptante d'Etats et de votes. Tout au plus pourrait-on voir là un argument d'ordre psychologique ne présentant, par contre, aucune valeur au point de vue
juridique. D'autre part, il serait tout aussi faux de vouloir invoquer les paroles prononcées occasionnellement par un membre du parlement et se rapprochant peut-être de l'interprétation restrictive. Car, tout en faisant abstraction du fait que, dans aucun des cas mentionnés, ces paroles ne se rapportaient directement à la question et qu'il y avait d'ailleurs été répondu dans la discussion," la doctrine et le Tribunal fédéral posent actuellement comme principe qu'il n'est pas admissible d'attribuer une importance décisive à de telles paroles (v., en particulier,, ATF 34, II, 826). Ce qu'il importe, par contre, de relever, c'est

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qu'au cours des débats parlementaires et de la campagne qui précéda la votation populaire, on enregistra, sans aucune protestation, de nombreuses manifestations visant à attribuer à la future législation des domaines en totalité ou en grande partie étrangers aux « arts et métiers » ; en outre, on ne pourrait limiter la législation à ces derniers sans aboutir à des contradictions et, en fait, les lois qui ont déjà été adoptées sur la base de cet article dépassent le cadre des arts efc métiers. C'est pourquoi deux études parues récemment sur la question arrivent à la conclusion qu'en raison de la divergence des textes, la préférence doit être donnée à l'interprétation qui tient le mieux compte des faits exposés ci-dessus, soit à l'interprétation la plus large. La première, due à M. le professeur Grermann, traite, dans la Revue de la société des juristes bernois (année 1924, p. 409 s.), du droit de légiférer conféré à la Confédération par l'article 34ter de la constitution fédérale. L'autre est de M. le professeur Burckhardt; adressée, au mois de mars 1925, à l'association suisse de politique sociale (dénommée autrefois: association suisse pour le développement de la protection internationale des travailleurs), elle examine la question de l'interprétation et de la revision dudit article.

Dans son commentaire de la constitution fédérale (2e édition, 1914, p. 314 s.), le professeur Burckhaidt relève déjà que les dispositions de l'article 34ter (Gewerbegesetzgebung) «seraient bien souvent dénuées de sens et d'effet si elles ne pouvaient pas s'appliquer aux établissements exploités sous forme de fabrique ». Ce serait le cas, par exemple, de celles qui concernent la concurrence déloyale et les associations professionnelles. Et «en fait», continue le commentaire, «on ne peut pas avoir voulu cette délimitation. La fabrique ne constitue pas une branche industrielle spéciale qui puisse être réglementée pour elle seule; elle apparaît, au contraire, comme un établissement caractérisé par son étendue et par l'intensité du travail qui s'y accomplit. Logiquement, la fabrique ne peut pas être opposée au «G-e·werbe»; elle n'est qu'un aspect particulier de l'établissement industriel. D'ailleurs, lorsque le besoin se fait sentir d'édieter des dispositions sur la concurrence déloyale, l'apprentissage, le placement ou
la conciliation des conflits du travail, il n'en est pas moins granjd parce que l'établissement occupe cinq ouvriers au lieu de quatre ou emploie des machines en lieu et place du travail manuel». «Il n'est pas douteux », ajoute encore le professeur Burckhardt, que la compétence législative conférée à la Confédération par l'article 34ter s'étend également au commerce; il en est de même (étude de 1925, p. 3) pour les transports, l'industrie hôtelière, la distillation des fruits, le placement, les industries du blanchissage et du bâtiment et l'industrie minière. Le professeur Grermann .signale, de son côté, qu'il

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serait parfaitement contradictoire de refuser à la Confédération, en ce qui concerne la grande industrie, le commerça efc les transports, le droit de légiférer sur des. matières où elle est autorisée à le faire pour l'artisanat. En effet, si la Confédération s'est vu attribuer, par l'article 34ter, un droit plus étendu que celui que lui conférait l'article 34, c'est que l'on s'était rendu compte que les eïfets de la concurrence se faisaient de plus en plus sentir au delà des limites cantonales (v. Scheidegger, Das Recht der Gesetzgebwng über das Gewerbewesen, p. 5, 20, 23 s.) et qu'il importait d'en équilibrer les conditions. Or, cette raison est encore plus impérieuse dans la grande industrie, le commerce et les transports que dans les arts et métiers.

L'union suisse 'des arts et métiers relève, dans un mémoire du 13 août 1925, que tous les efforts déployés par elle en vue de la législation sur les arts et métiers n'ont jamais eu d'autre Trat et que., dès les débuts, la ratio legis devait dicter une large interprétation (de même dans le procès-verbal de l'assemblée annuelle de Baden de 1925, p. 15). Il est de fait d'ailleurs que la plupart des voeux qui ont conduit à insérer l'article 34ter dans la constitution fédérale se rapportent à des matières qui ne relèvent pas de l'artisanat (Germann, loc, cj.t.

p. 413 et suiv., Burckhardt, étude de 1925, p. 2, La Suisse économique et sociale, vol. I, p. 444*). Il en est ainsi pour le règlement et la prévention des conflits du travail, pour la répression de la concurrence déloyale, pour la restriction des liquidations et du colportage. Voir, à ce sujet, les publications de l'union suisse des arts et métiers et de ses dirigeants, MM. Scheidegger et Boos-Jeghex, les messages du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le droit de légiférer en matière d'arts et métiers du 25 novembre 1892 x) et du 3 novembre 2 1905 ), les articles parus dans la presse avant la votation de 1908, le programme des mesures législatives à prendre, arrêté, le 30 novembre 1908, sous la présidence du chef de la division de l'industrie du département fédéral du commerce, de l'industrie et de l'agriculture, par les représentants de l'union suisse des arts et métiers, de l'union suisse du commerce et de l'industrie, de la société suisse des commerçants, de la fédération
ouvrière et de l'union suisse des paysans.

D'après tout ce qui précède, le texte allemand est donc celui qui se conforme le plus fidèlement à la 'signification et à l'étendue du droit conféré à la Confédération par l'article 34fcer. Le Conseil fédéral et l'Assemblée fédérale n'ont d'ailleurs jamais hésité à interpréter et à appliquer l'article 34ter dans son sens large. C'est ainsi qu'il ressortait déjà nettement du message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 6 mai 1910, relatif à 'la revision de la loi fédérale sur le 1) FF 1892, V, 721.

2) FF 1905, VI, 26.

77!)

travail dans les fabriques1) que la future législation fédérale sur l'apprentissage devait comprendre non seulement l'artisanat, mais encore l'industrie dans son acception la plus étendue. Et c'est dans ce sens que l'article 77 de l'a loi sur les fabriques du 18 juin 19142) mentionne la future loi fédérale sur l'apprentissage. Au sein de l'Assemblée fédérale aucun avis différent ne s'est fait entendre. De plus., dans son message du 11 avril 1919 concernant la réglementation des conditions du travail, le Conseil fédéral a 'examiné la question en détail et déclaré expressément que le commerce et l'industrie rentraient dans le champ d'application de l'article 34ter U?ewlle fédérale 1919, vol. II, p. 31 à 36). En passant à la discussion des articles du projet de loi, l'Assemblée fédérale a sanctionné l'opinion défendue par le Conseil fédéral et, par la suite, l'a adoptée à l'unanimité. H est vrai que la loi ne trouva pas grâce devant le peuple et que, le 21 mars 1920, elle fut rejetée à la faible majorité de 1946 voix. Mais les raisons de cet échec ne doivent pas être recherchées dans des motifs d'ordre constitutionnel. Toutefois, si ce rejet devait être invoqué pour refuser toute valeur au précédent invoqué ci-dessus, on. pourrait citer deux autres lois fédérales, édictées en vertu de l'article 34ter et actuellement en vigueur, dont le champ d'application n'est pas limité aux arts et métiers. Ce sont la loi du 31 mars 1922 sur l'emploi des jeunes gens et des femmes3) et la loi du 17 octobre 1924 concernant l'allocation de subventions pour l'assurance-chômage*). Enfin, on peut encore mentionner la loi du 16 octobre 1924 restreignant la construction et l'agrandissement d'hôtels5) qui, bien que ne visant pas l'artisanat proprement dit, déclare cependant s'appuyer sur l'article 34ter.

En adoptant l'interprétation étroite, on aboutirait à rendre irréalisables presque tous les voeux qui ont conduit à inscrire l'article 34tl!r dans la constitution fédérale. Il faudrait donc renoncer non seulement à légiférer sur la protection des employés de commerce, mais encore à développer la protection ouvrière en général, à prendre des mesures, dans l'industrie, ipour éviter les conflits du travail et y mettre fin, l'article 34 de la constitution fédérale n'y suffisant "pas, et, enfin, à réaliser la plupart des voeux
émis par l'union des arts et métiers à l'endroit de l'application de l'article 34ter. Bref, ce serait priver une partie importante de notre population du fruit de longs efforts qu'elle pouvait croire, en toute bonne foi, consacrés défini1) FF 1910, VI, 113.

2) RO 30, 539.

s) RO 39, 240.

4) RO 41, 239.

5) RO 41, 50.

Feuille fédérale. 80e année. Vol. II.

62

780 tivement par la constitution. On risquerait d'aboutir ainsi à une tension politique et sociale qui peut être évitée si, conformément à la ratio legis, l'article 34ter est également déclaré applicable à l'industrie et au commerce.

D. Principes directeurs.

I. Délimitation de la matière.

Le but de la loi est de fournir aux diverses professions des recrues bien préparées. A la différence des lois cantonales, elle n'a donc pas à se préoccuper de la protection des apprentis. ^Nbn pas que des dispositions de ce genre ne se justifient pas, mais elles, n'ont pas leur plaee ici. Elles relèvent d'une loi sur la protection des travailleurs qui, comme le font, par exemple, les articles 30 et suivants de la loi genevoise « sur le travail des mineurs », doit au moins englober non seulement les apprentis, mais encore les autres mineurs. Car on ne ·voit pas pourquoi les apprentis bénéficieraient seuls1 des dispositions sur l'hygiène, la durée du travail, etc. De plus, lorsque le champ d'application de ces dispositions s'étend à tous les mineurs occupés dans les mêmes catégories professionnelles et dans des établissements de même genre, le chef d'établissement est beaucoup moins tenté de dissimuler l'apprentissage sous l'apparence d'un louage de services.

En ce qui concerne l'apprentissage et, en particulier, l'a protection des apprentis, le projet de loi est donc plus restreint que les lois cantonales. Sous d'autres rapports, il va par contre beaucoup1 plus loin que celles-ci. C'est ainsi qu'il ne s'applique pas uniquement aux apprentis proprement dits, mais encore aux personnes qui ont appris une profession sans avoir fait d'apprentissage régulier. De plus, fidèle à son programme de développer la formation professionnelle à tous les degrés, il renferme des dispositions sur le préapprentissage, d'une part,, et, d'autre part, sur les cours de perfectionnement, de maîtrise et autres cours supérieurs semblables qui suivent l'examen de fin d'apprentissage et se terminent, eux-mêmes par des examens de maîtrise et autres examens professionnels supérieurs reconnus par l'Etat. Pour ce qui est du détail, il compte, même dans le domaine de l'apprentissage proprement dit, des dispositions de portée plus étendue que celles des lois cantonales. Il entend notamment que, dans; les établissements où se fait l'apprentissage,
dans les cours professionnels et dans les cours complémentaires, l'instruction soit convenablement donnée par des maîtres compétents. Il estime qu'en fixant le minimum de connaissances exigées du candidat à l'examen de fin d'apprentissage, on amènera peu à peu le niveau de la formation professionnelle à un certain degré et donnera une valeur généralement reconnue au certi-

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ficat de capacité décerné à la suite de cet examen. Au fond, celuici doit constituer, en quelque sorte, le pivot de la formation professionnelle: d'une part, c'est, pour l'apprenti et, dans une certaine mesure, pour le maître aussi, la pierre de touche des connaissances acquises et Adonnées; d'autre part, le certificat de capacité est la condition dont dépend le droit de porter le titre d'ouvrier ou employé qualifié et de pouvoir suivre un. enseignement supérieur, conduisant soit aux examens de maîtrise soit à quelque autre examen supérieur de même genre. Les autres innovations et réformes introduites par la loi ont déjà été signalées dans le chapitre B. L'orientation professionnelle qui joue un rôle d'une importance indiscutable pour la formation professionnelle ne Soit pas être négligée lors de l'allocation des subventions fédérales.

il. Tâche des cantons.

Dans ce domaine de. la formation professionnelle, la collaboration des cantons, notamment en ce qui concerne l'application de la loi, est tout aussi nécessaire que l'élaboration de la loi elle-même. Il faut absolument éviter d'avoir à créer un corps spécial de fonctionnaires fédéraux. Or, les autorités cantonales, les commissions d'apprentissage, etc. qui étaient chargées jusqu'à maintenant de l'exécution des lois cantonales ont déjà fait de précieuses expériences sur lesquelles on pourra tabler à l'avenir. La Confédération pourra donc se borner à poser les principes essentiels et en laissera l'application aux cantons. L'élaboration des dispositions d'exécution doit également être confiée aux cantons. La Confédération n'unifiera les dispositions d'exécution que dans les domaines où cela sera nécessaire. C'est également à l'autorité cantonale compétente qu'il appartiendra, de par la nature même des choses, de prendre les décisions prévues par la loi, notamment en ce qui concerne l'assujettissement à la loi, la déchéance du droit de prendre des apprentis, l'approbation du contrat d'apprentissage, les demandes de dispense des cours professionnels, etc. Afin d'éviter tout malentendu, il importe de relever dès maintenant que les cantons pourront désigner comme autorité compétente des commissions d'apprentissage ou autres commissions d'experts. Les cantons auront encore, comme autres tâches, à organiser l'enseignement professionnel et les examens de fin d'apprentissage -- pour ces derniers, dans la mesure où les associations professionnelles ne se chargeront pas de leur organisation -- et à poursuivre les infractions à la loi. Il suffit de réserver au Conseil fédéral un droit de haute surveillance sur l'application de la loi.

En général, il ne sera pas pris de dispositions fédérales sans que les cantons aient eu l'occasion de donner leur avis. Cette colla-

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boration contribuera entre autre à écarter les conflits qui pourraient naître de l'application de la loi.

III. Collaboration des associations professionnelles.

Ainsi que l'a déjà relevé le chapitre B, il est fort important de pouvoir compter aussi sur la collaboration des associations professionnelles. Les corporations considéraient déjà, qu'une de leurs tâches essentielles était de former de bonnes recrues pour la profession et, dans ce domaine, elles ont rendu des services incontestables.

Leur disparition eut pour conséquence un recul inquiétant dans la formation professionnelle jusqu'au moment où, à la fin du siècle dernier, les associations des arts et métiers et d'autres organisations professionnelles s'intéressèrent do nouveau à la question et cherchèrent à développer la formation professionnelle de concert avec l'Etat.

Il saute aux yeux que les mesures prises par lés pouvoirs publics n'atteindraient pas leur but sans la collaboration avisée des associations professionnelles.

Celles-ci se sont déclarées disposées à assurer leur concours. Lora de la discussion de l'avant-projet par l'assemblée annuelle de l'union suisse des arts et métiers tenue à Baden en 1925, les représentants de l'artisanat notamment ont exprimé, à nouveau, leur volonté de coopérer à l'élaboration et à l'application de dispositions en cette matière. L'union des arts et métiers a fait sienne cette manière de voir et ne s'est pas bornée à approuver, dans son mémoire relatif à l'avantprojet de l'office fédéral du travail, l'élaboration des dispositions prévues par ce dernier, mais a encore présenté des propositions plus étendues. Du côté ouvriers et employés, les appuis n'ont pas non plus fait défaut (mémoires de l'union syndicale, de l'union ouvrière chrétienne-sociale et de l'union Heîvstia; v. aussi le n° du 20 février 1925 du Joiurnol suisse des commerçants).

En particulier, on pourra souvent abandonner l'organisation des examens aux associations professionnelles, à la double condition que l'association se déclare prête à assumer cette tâche et que les examens organisés par elle offrent toute garantie aux points de vue de la technique et de l'impartialité. De plus, les associations professionnelles doivent être consultées préalablement à toute mesure importante relative à la profession qu'elles représentent. Il sera
même indiqué de leur réserver, dans certains cas, un droit d'initiative, ayant pour effet de subordonner à une demande de leur part l'élaboration de dispositions complémentaires applicables à leur profession. Ce sera le cas, par exemple, pour la limitation du nombre maximum d'apprentis qu'un établissement peut prendre simultanément, pour l'institution d'examens intermédiaires, pour la fixation de la durée nor-

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male de l'apprentissage, etc. Enfin,- les associations professionnelles auront encore à établir les plans d'études et à déterminer les connaissances dont doivent faire preuve les candidats aux examens.

Les associations professionnelles dont il est question ici comprennent aussi les organisations auxquelles sont affiliés les établissements occupant les travailleurs de différentes professions connexes. Ainsi, l'association de l'industrie des machines devra être consultée non seulement pour les mécaniciens et les serruriers, mais encore pour les fondeurs et les tourneurs. De plus, le terme d'association professionnelle englobe les organisations des employeurs et les organisations des travailleurs. Jusqu'à maintenant, les examens de fin d'apprentissage étaient en général organisés, dans l'artisanat, par les associations patronales et, dans le commerce, par les associations d'employés.

La loi prévoit que les ordonnances complémentaires devront s'ins1pirer, en toute première ligne, des règlements établis par des associations communes d'employeurs et de travailleurs, par des contrats collectifs de travail ou par d'autres accords conclus entre associations patronales et ouvrières distinctes. Lorsqu'il n'exista pas d'association commune, le droit de formuler des propositions n'est pas subordonné à l'accord des associations distinctes, mais toutes les organisations intéressées doivent avoir l'occasion de faire valoir leur avis avant l'élaboration d'une ordonnance. Pour le surplus, il est indiqué de laisser aux ordonnances le soia de régler les conditions dont dépend le droit de formuler des propositions et la procedura applicable à leur approbation.

IV. FteSaton emtre la loi et le droit existant.

La loi règle d'une manière exclusive les matières tvaitét's par elle; le droit cantonal ne peut subsister à ses côtés que dans la :rnesii;'ü où il y est réservé expressément. Ce sera très souvent le cas, la loi se bornant à prévoir les dispositions de principe et abandonnant aux cantons l'élaboration des dispositions d'exécution.

La loi n'abrogera quo les dispositions cantonales visant les matières traitées par elle. Les dispositions du droit cantonal sur la protection des apprentis, par exemple, resteront par conséquent en vigueur jusqu'à l'élaboration de la loi fédérale sur la protection des travailleurs
prévue au programme de la législation sur les arts et métiers. Dans le domaine qui lui est assigné, la loi, du resta, loin d;> supprimer, développe au contraire ce qui a déjà été accompli. C'est ainsi que les cantons pourront maintenir, dans le cadre de la loi fédérale, les dispositions et institutions qui ont fait leurs preuves.

En ce qui concerne la loi fédérale sur l'emploi des jeunes gens et des femmes dans les arts et métiers et, en particulier, ses dispositions

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relatives à l'âge minimum d'admission au travail, la Confédération est liée en cette matière par un engagement international; ce t'ait seul empêche la loi nouvelle d'y apporter aucune dérogation ou limitation.

Par contre, l'article 77 de la loi sur les fabriques devient sans objet et doit être abrogé. De même, les arrêtés fédéraux concernant l'encouragement de la formation professionnelle peuvent être remplacés par des dispositions correspondantes de la nouvelle loi. Ceci pour deux motifs. Ces arrêtés poursuivant le même but que la loi, il est normal do les absorber dans cette dernière. En outre, il faut saisir l'occasion, désirée de divers côtés, d'instituer une base légale unique.

En effet, ces arrêtés ne sont pas seulement différents quant à la forme, ce qui complique la tâche de celui qui les consulte, mais encore quant a,u fond, sans que les divergences soient dues à autre chose qu'à des raisons historiques.

La loi crée des dispositions de droit public auxquelles doivent faire place des dispositions de droit privé. Toutefois, en matière d'apprentissage, le codo des obligations demeure applicable dans la mesure où la présente loi n'en dispose pas autrement. Ce sera non.

seulement le cas des dispositions générales sur la conclusion du contrat, la nullité, les vices du consentement, la réparation du dommage., etc., niais encore des dispositions spéciales au contrat d'apprentjissage. Il suffit donc d'insérer dans la loi une disposition prévoyant » l'application subsidiaire du code des obligations pour pouvoir se passer do quelques dispositions qui figuraient encore dans F avant-projet, à savoir: l'article 14 concernant le certificat délivré par le maître, auquel correspond l'article 342 du code des obligations; l'alinéa 2 de l'article 19 qui, de môme que l'article 352 du code des obligations» excluait des justes motifs de résiliation l'a maladie dont l'employé est atteint sans sa faute, lorsqu'elle est de durée relativement courte,, et le service militaire obligatoire à teneur de la législation fédérale; enfin l'article 11, alinéa 2, qui ne fait que commenter les articles 99 et 328 du code des obligations. En ce qui concerne les dispositions de droit public, la loi n'en édicté, par principe, que dans la mesure où elles sont commandées par l'intérêt général de la formation professionnelle. C'est
pourquoi l'article 6, alinéa 2, prévoyant la nullité de la clause prohibitive de concurrence, peut aussi être retranché de l'avant-projcît. Car, si désirable que puisse être une disposition de ce genre, elle n'exerce aucune influence directe ou indirects sur la formation professionnelle.

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E. Remarques relatives aux différents chapitres du projet.

!. Champ d'application (art. 1).

La grande commission d'experts, dont les décisions furent consignées dans l'avant-projet de l'office fédéral du travail, fut unanimement d'avis que le champ d'application de la loi devait être aussi étendu que possible, et la plupart des mémoires relatifs à cet avantprojet s'exprimèrent dans le même sens. Il n'est pas besoin d'ajouter que la loi devait naturellement rester dans les limites de la constitution fédérale. L'avant-projet comprit donc l'artisanat, l'industrie, le commerce et les transports et laissa de côté les professions scientifiques et artistiques, l'agriculture et l'économie domestique, qui sortent du cadre de l'article 34ter de la constitution. Il n'est en effet pas possible, en l'absence de toute disposition constitutionnelle, de donner suite aux demandes tendant à englober dans la loi l'agriculture et l'économie domestique; les cantons demeurent naturellement libres de le faire. Rien n'empêche, par contre, de soumettre à la loi non seulement l'artisanat, mais encore l'industrie, le commerce et les transports. On tiendra compte ainsi de la majorité des mémoires reçus, des besoins ressentis et des dispositions constitutionnelles (v. chapitres B et G). Afin d'être parfaitement clair, il convient encore de mentionner, ainsi que le proposa l'union centrale des associations! patronales, l'industrie hôtelière et le travail à domicile. Quant à l'établissement, il est indifférent qu'il "soit de nature privée ou relève, par exemple, d'un canton ou d'une commune. Ainsi, dans les usines à gaz ou électriques exploitées par une commune, les apprentis mécaniciens sont assujettis à la loi, tout comme sont soumis à la loi fédérale sur les fabriques les établissements cantonaux ou communaux, tels qu'usines à gaz, usines électriques, établissements servant à la combustion des ordures ménagères, soieries des services forestiers, etc. Dans l'un et l'autre cas, l'élément déterminant n'est donc pas la nature juridique de l'établissement, mais le genre de là profession qui fait l'objet de l'apprentissage. L'artisanat, ainsi que les professions industrielles et ·commerciales, rentrent dans la catégorie des professions soumises à la loi, tandis que les services administratifs proprement dits échappent à la
compétence législative conférée à la Confédération par l'article 34ter.

Les mêmes principes s'appliquent aux établis sementa fédéraux et aux entreprises de transport au bénéfice d'une concession fédérale.

Ces établissements et entreprises sont soumis à la loi sur la formation professionnelle dans la mesure où ils le sont à la loi sur les fabriquée.

Toutefois, certaines des dispositions de la loi, notamment celles réser-

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vant la compétence des cantons, ne leur sont pas applicables. Il appartiendra aux règlements d'exécution de prévoir des dispositions plus détaillées. Quant au reste du personnel fédéral et des entreprises de transport, il n'est pas assujetti sans autre à la loi. La formation professionnelle des fonctionnaires des postes et des télégraphes, ainsi que celle des apprentis dans les stations des entreprises de transport, par exemple, sont réglementées par des prescriptions spéciales qui ont fait leurs preuves. Ce sont là des fonctions dont la nature particulière doit être prise en considération par la formation professionnelle. Par contre, il serait bon de donner la possibilité de soumettre à la loi les différentes catégories de personnel qui ne se trouvent pas dans ces conditions spéciales. Mais il s'agit là de questions dont les détails ne peuvent pas être réglés par la loi. Il convient donc de laisser au Conseil fédéral le soin d'en décider.

En cas de doute, l'autorité cantonale compétente décide de l'assujettissement à la loi. Le projet établi, en 1918, par l'union des arts et métiers conférait cette compétence au Conseil fédéral, qui devait prendre l'avis du gouvernement cantonal. L'avant-projet de l'office fédéral du travail l'attribuait au gouvernement cantonal, tout en réservant le droit de recours au Conseil fédéral. L'opportunité de ce droit de recours a été contestée de différents côtés. Aussi le nouveau projet s'en remet-il uniquement à la décision de l'autorité cantonale.

Mais il faut alors une disposition prévoyant que le champ d'application pourra être délimité d'une façon plus précise par voie d'ordonnance. On évitera donc que la loi ne soit appliquée par trop inégalement. La Confédération ne peut donc fixer que les règles générales; mais celles-ci peuvent être complétées suivant les besoins. C'est ainsi qu'il sera nécessaire de tracer la ligne de démarcation entra les professions soumises à la présente loi, d'une part, et l'agriculture et les professions libérales, d'autre part (jardiniers, fromagers, mécaniciensdentistes, droguistes, etc.). Des doutes pourront aussi surgir en ce qui concerne les administrations privées, les études de notaire, etc.

Ici encore, la délimitation se fera en considération de la profession et non du genre de l'établissement.

Les dispositions de la loi et
autres prescriptions relatives à l'apprentissage sont applicables par analogie aux ateliers d'apprentissage et écoles professionnelles, dans la mesure où ces établissements contribuent à former les candidats aux professions soumises à la loi. Voir à ce propos l'article 22.

Il va sans dire que toutes les dispositions de la loi s'appliquent indistinctement aux hommes et aux femmes, comme l'établit notamment la rédaction de l'article 38.

787

li. Apprentissage (art. 2 à 22).

Ce chapitre de la loi débute par une définition de l'apprenti. Les anciennes lois cantonales ne contenaient aucune disposition à ce sujet, et cette lacune n'avait pas manqué de se faire sentir. De même QUO les définitions qui en sont données en Suisse ou à l'étranger, l'article 2 retient, comme élément essentiel de l'apprentissage, l'emploi dans un établissement en vue d'apprendre une profession déterminée. Ne rentrent pas dans cette définition les personnes qui ne désirent pas être initiées à tous les travaux de la profession afin de pouvoir ensuite y être employées indifféremment, mais qui veulent simplement se préparer une situation, et celles qui, ayant déjà acquis des connaissances professionnelles, entendent les éprouver en pratique et le?

compléter.

Il est difficile de tracer la ligne de démarcation entre les professions qui s'apprennent systématiquement et celles qui s'acquièrent pairoutine, qui n'exigent qu'une certaine habileté et ne donnant lieu qu'à une instruction rudimentaire, basée uniquement sur les conditions particulières de l'établissement. On trouve bien des critères de fait qui permettent cette délimitation, mais il n'en reste pas moins qua, dans certains cas, la limite sera difficile à établir. Malgré ces difficultés ou, plutôt, en raison même de ces difficultés, il est tout spécialement désirable que la loi renferme une disposition à ce sujet. Mais cette disposition n'aura une certaine valeur que si l'on arrive à trouver un critère simple et clair. Et ce critère paraît devoir être recherché dans la notion du temps nécessaire pour acquérir les connaissances voulues. De cette manière on arrivera à distinguer certaines situations de fait qui, tout en offrant peut-être le caractère d'un apprentissage, ne justifieraient pas l'application des dispositions légales relatives aux formalités accompagnant la conclusion du contrat d'apprentissage, aux visites d'experts, à l'obligation de suivre l'enseignement professionnel, eto. En bien des endroits, notamment en Suisse orientale, la coutume est de fixer la durée minimum de l'apprentissage à six mois; ce laps de temps est même prévu expressément par la loi bernoise, qui ne l'applique cependant qu'à l'obligation de se présenter à l'examen do fin d'apprentissage. Sur le désir unanime de la petite commission,
l'avantprojet de l'office fédéral du travail adopta le délai de trois mois, liais la plupart des mémoires reçus élevèrent certains doutes à ce sujet.

On réclama, de divers côtés et notamment du côté de l'union des arts et métiers, la durée de six mois. L'industrie, représentée avant tout par l'union centrale des associations patronales, déclara même qu'un an ne serait encore que le strict minimum. En parcourant la liste insérée dans la formule du contrat d'apprentissage établie par l'union des arts et métiers, on peut remarquer que la durée de l'ap-

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prentissage n'est inférieure à un an que pour les sabotiers, profession qui pourrait fort bien ne pas être soumise aux dispositions légales. Il est évident qu'on ne peut pas laisser aux parties toute latitude pour fixer, à leur guise, la durée de l'apprentissage et par là se soumettre ou se soustraire à l'application de la loi. Au contraire, la durée do l'apprentissage doit se déterminer d'après le temps que l'on s'accorde à juger indispensable pour acquérir les connaissances professionnelles.

Il y a lieu de mentionner ici que des dispositions fixant la durée normale de l'apprentissage dans les différentes professions pourront être édictées par voie d'ordonnance (art. 15).

Autrefois, la prestation fournie par l'apprenti en échange de l'instruction donnée consistait le plus souvent en un dénier d'apprentissage.

Actuellement cette coutume tend de plus en plus à disparaître, et la seule contreprestation de l'apprenti est dès lors représentée par le travail qu'il fournit au maître. Dans bien des cas, ce travail est même rémunéré par un modeste salaire. Le projet laisse les parties régler librement cette question (art. 7, lettre /).

De même que les lois cantonales et l'article 325 du code des obligations, l'article 6 prévoit que l'apprentissage doit faire l'objet d'un contrat écrit. En vertu de l'article 7, le contrat doit porter la signature du chef d'établissement, d'une part, et du mineur et du détenteur de la puissance paternelle ou du tuteur, d'autre part. La seule exception concerne le cas où l'apprenti fait son apprentissage chez ses père et mère ou son tuteur. L'obligation de donner au contrat la forme écrite ne doit cependant pas avoir pour effet d'amener les parties à se soustraire à la loi en ne se conformant pas à cette prescription. La même observation s'applique à l'obligation de donner avis de l'apprentissage, stipulée aux articles 7 et 8. Aussi l'article 9 prévoit-il, en vue de ces deux éventualités, que les dispositions de la loi demeurent applicables si les conditions posées par l'article 2 sont remplies en fait.

La loi argovienne (§ 2^>) renferme une disposition analogie. Il résulte de ce qui précède que la conclusion d'un contrat en bonne et due forme et la communication de l'apprentissage à l'autorité compétente constituent des obligations strictes des parties ot que leur
inobservation, par le chef d'établissement, peut entraîner les sanctions pénales prévues par la loi (article 55, lettre a). Le risque n'en subsiste pas moins de voir s'implanter certaines pratiques qui permettraient d'échapper à la loi sans qu'elle soit vraiment tournée au sens de l'article 8. C'est pourquoi l'alinéa 3 de l'article 2 prévoit que la loi pourra être déclarée applicable à des mineurs qui ne réunissent peut-être pas entièrement les conditions fixées par le premier alinéa. Il va de soi qu'il ne s'agit pas là des mineurs qui ont déjà accompli leur apprentissage, que ce soit chez un maître d'apprentissage» dans

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un atelier d'apprentissage ou une école professionnelle. Cette extension de la loi ne peut, cependant,, être prononcée que sur la proposition des associations professionnelles intéressées, et les cantons doivent être consultés au préalable. On aboutit ainsi à une solution qui tient à peu près le juste milieu entre l'attituda négative de nombreuses associations patronales et les revendications très étendues qui ont été formulées d'autre part. On tient compte aussi des propositions qui se retrouvent, à peu près sous la même forme, dans les mémoires du canton de Baie-Campagne, do l'union cantonale bernoise du commerce et de l'industrie, de la société des maîtresimprimeurs, de la chambre cantonale neuchâteloise du commerce, tìe l'industrie et du travail, et de l'opinion exprimée par la conférence des offices cantonaux d'apprentissage de la Suisse romande et du Tessin, qui a été communiquée par le canton de Neuchâtel. La isociété suisse des commerçants avait demandé que tout mineur occupé dans une profession soumise à la loi fût, en principe, considéré comme apprenti, s'il ne pouvait produire un certificat de fin d'apprentissage. Un régime analogue existe déjà dans le canton de Genove, où la loi sur le travail des mineurs peut être appliquée (art. 30) à tous les mineurs employés à un travail industriel ou commercial.

L'idée d'instituer l'apprentissage obligatoire a même été envisagée occasionnellement par quelques magistrats. Il est évidemment do toute importance de faire apprendre une profession au plus grand nombre possible de jeunes gens. Mais l'institution de l'apprentissage obligatoire serait contraire aux intérêts de l'ordre économique; moderne, qui a besoin de travailleurs non qualifiés, et aurait des répercussions financières dont l'Etat ne pourrait pas actuellement assumer la charge.

L'article 3 de l'avant-projet prévoyait que, sur la proposition des associations professionnelles intéressées, l'entrée en apprentissage pouvait être subordonnée à la preuve d'une certaine instruction scolaire ou à la production d'un certificat d'aptitudes. La société des commerçants de Bàio déclara que cette disposition était très utile et très opportune; la chambre genevoise du commerce la trouva parfaitement justifiée, mais désira réserver la compétence do l'autorité cantonale; d'autres associations l'approuvèrent
tacitement. Par contre, sa suppression fut réclamée par l'union des arts et métiers, l'union centrale des associations patronales, l'association des banquiers et toute une série de chambres de commerce. Certains de cos opposants firent notamment valoir qu'il pourrait y avoir là une atteints portée au principe de la liberté de commerce et d'industrie. La commission schaff housoise des apprentissages se prononça également pour la suppression, en invoquant les raisons suivantes: «Beaucoup d'associations professionnelles tendent déjà à faire dépendre l'entrée dans la profession

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de conditions qui dépassent la mesure du nécessaire et découlent d'uno certaine présomption. La loi n'a pas à susciter et. à encourager de pareilles exagérations, qui ne peuvent que nuire à l'économie nationale; les associations resteront alors dans des limites raisonnables. Nous proposons dono de biffer non seulement cette disposition, mais encore toutes celles qui sont de nature à favoriser les apparences au détriment d'une formation professionnelle convenable et sérieuse. » Quelle que soit la part d'inexactitude que renferment ces arguments, la disposition en cause n'est cependant pas d'une importance telle que l'on doive risquer le sort de l'ensemble du projet pour le seul motif de la conserver. Elle a donc été abandonnée.

Par contre, les dispositions concernant le droit de recevoir des apprentis sont d'une grande portée pratique, et les dispositions que l'avant-projet lui consacrait ont encore été étendues (art. 3 à 5). La formation professionnelle de l'apprenti dépend en première ligne de la personnalité du maître. L'expression de «maître» ayant provoqué parfois des confusions, il importe de préciser que, du côté employeur, l'apprentissage ne crée de rapports juridiques directs qu'à l'égard du chef d'établissement, alors même que celui-ci n'aurait, comme c'est régulièrement le cas dans les grands établissements, rien à faire personnellement avec l'instruction professionnelle de l'apprenti et n3 posséderait peut-être même pas les connaissances nécessaires pour la lui donner. Quant à l'employé qui est chao-gé de former l'apprenti et qui est au fond lo véritable maître, il n'est responsable que vis-à-vis dw chef d'établissement et non vis-à-vis de l'apprenti et de ses parents.

C'est pourquoi le projet n'a pas suivi la, terminologie de i'avant-projei.

(«maître») et de l'article 337 du code des obligations («employeur»). Jl emploie l'expression « chef d'établissement ». Mais cela n'empêche pas de faire dépendre le droit de recevoir des apprentis des qualités de celui qui est effectivement maître d'apprentissage, de telle sorte que ce droit puisse être retiré à un établissement où le maître d'apprentissage ne réunit pas les qualités personnelles et professionnelles requises (art. 3, 2e al.). Dans les professions où sont organisés des examens de maîtrise ou autres examens professionnels supérieurs
légalement reconnus, le droit de recevoir des apprentis peut, sur la proposition des associations professionnelles intéressées, être restreint, par voie d'ordonnance, aux établissements dont le chef ou l'employé chargé de l'instruction des apprentis a passé l'examen; demeurent toutefois réservées les exceptions nécessitées par des circonstances particulières (art. 4). La condition primordiale d'une bonne instruction professionnelle est que le maître soit lui-même entièrement au courant des travaux de la profession. A l'heure actuelle, on trouve encore souvent des maîtres d'apprentissage qui n'ont pas même fait

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eux-mêmes d'apprentissage ou, bien plus, qui ne se signalent pas précisément par leurs qualités professionnelles.

La plupart des lois cantonales interdisent d© prendre des apprentis à quiconque ne jouit pas, en vertu d'un jugement pénal, de la plénitude de ises droits. Cette disposition aurait pu fair© croire que l'absence d'un casier judiciaire est la seule garantie de moralité exigée du maître. Le projet la remplace par une disposition toute générale interdisant l'apprentissage dans les établissements où l'instruction ne se ferait pas sans péril pour la santé ou la moralité des élèves; il est d'ailleurs indifférent que cette crainte soit fondée sur une faute personnelle ou non (art. 3).

Le même article 3 exige encore que le g-enre et l'organisation de l'établissement permettent de donner à l'apprenti une instruction systématique et répondant à tous égards aux besoins de la profession.

Enfin, il arrive souvent que l'instruction ait à souffrir du trop grand nombre d'apprentis employés simultanément dans l'établissement. Différentes lois cantonales et étrangères se défendent contro cette sorte d'exploitation de l'apprentissage où l'idée de se procurer de la main-d'oeuvre à bon marché joue le rôle principal. Les projets de loi fédérale sur l'apprentissage présentés par la fédération ouvrière et l'union des arts et métiers et l'avant-projet de l'office fédéral du travail prévoyaient également des dispositions à cet effet. Leur suppression a été réclamée par l'union centrale des associations patronales, l'association des banquiers et un certain nombre de chambres de commerce. Par contre, leur maintien a été approuvé, en principe, non seulement par les associations ouvrières, mais entre autres encora par l'union cantonale bernoise du commerce et de l'industrie et l'union suisse des arts et métiers. Gommo le fait le paragraphe 8 de la loi lucsrnoise, le nombre maximum d'apprentis doit être déterminé proportionnellement au nombre des travailleurs qualifiés occupés par l'établissement, chef d'établissement y compris. L'exemple des autres est, en effet, un précieux adjuvant de la formation professionnielle.

D'autre part, il faut aussi tenir compte du fait que dans les petits établissements le chef est mieux à même de s'occuper personnellement de ses apprentis et que, dans ces conditions, la présence
simultanée de deux apprentis a donné souvent de bons résultats. La limitation du nombre des apprentis ne peut être introduite que sur la proposition des associations professionnelles intéressées. Pour donner suite à une revendication du département de l'intérieur du canton de liâlo"Ville, le projet stipule, en outre, que, dans les professions où un nombre maximum d'apprentis n'est pas fixé par la Confédération, le canton demeure libre d'en prévoir un, tout en se conformant aux prescriptions de la loi.

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Les articles 13 et suivants définissent les obligations du chef d'établissement. La question la plus controversée est celle du travail aux pièces. La chambre neuchâteloise du commerce, de l'industrie et du travail et l'union syndicale suisse désireraient l'interdire complètement, tandis que les organisations patronales estiment que Favantprojet de l'office fédéral du travail1 allait déjà trop loin. Celui-ci partait de l'idée que le travail aux pièces doit être autorisé dans la mesure où il ne porte pas préjudice à l'apprentissage. L'exposé des motifs renfermait les observations suivantes: «La formation professionnelle a pour but primordial de rendre l'apprenti capable d'exécuter de façon irréprochable les travaux de sa profession. Ce qui est à considérer en premier lieu, c'est la qualité et non pas la quantité du travail fourni...... Mais «une prohibition totale ne se justifie pas, car le travail aux pièces a aussi une vertu éducative: il apprend à intensifier l'effort. H y a des branches de l'industrie où cette qualité est indispensable. Aussi l'article 5 de la loi zurichoise, qui prohibe le travail aux pièces pendant toute la durée de l'apprentissage, n'a-t-il pas pu être appliqué à la grande industrie. Même en n'autorisant le travail aux pièces que durant le dernier quart de l'apprentissage, comme le fait la loi thurgovienne et comme le prévoit le projet de 1918 de l'union suisse des arts et métiers, on dépasse encore, nooie paraît-il, la juste mesure ». En fait, l'interdiction complète du travail aux pièces serait contraire aux intérêts de l'apprenti. Celui-ci doit tout d'abord apprendre à travailler exactement, mais, une fois qu'il aura acquis les connaissances et l'habileté requises, le travail aux pièces sera un excellent moyen de l'habituer à employer tout son temps, et il n'en retirera que des avantages au cours de sa carrièno.

De plus, dans certaines divisions de fabriques, l'organisation du travail dépend à un tel point du travail aux pièces qu'en l'interdisant aux apprentis, on aboutirait à les exclure complètement de l'exécution de certains ouvrages et à restreindre ainsi leur formation professionnelle (v. à ce sujet, Bernet, Lehrlingsausbildung und Lehrlingsfürsorge, p. 40).

Mais même dans l'industrie, les apprentis ne sont en général employés aux pièces que pendant la seconde moitié
de leur apprentissage. L'avantprojet se conformait à cette pratique. Toutefois, les conditions varient dans une telle mesure d'une profession à l'autre qu'il a paru préférable de ne pas s'arrêter à une disposition trop stricte et de conférer plutôt aux associations professionnelles le droit de demander que des dispositions détaillées régissent la matière dans la profession qu'elles représentent.

L'instruction doit porter sur tous les travaux qui sont indispensables à l'exercice de la profession. L'apprenti doit y être initié méthodiquement, c'est-à-dire suivant un plan procédant du simple au compliqué. Il y a lieu toutefois de prendre en considération les travaux

courants que doit -effectuer l'établissement. Ces dernières année«, différentes professions ont été dotées, par les associations professionnelles, de programmes d'apprentissage et autres instructions1 analogues établis en vue d'imprimer aux apprentissages un développement méthodique et conforme aux exigences de la profession. Ces programmes pourront être soumis à l'approbation de l'autorité fédérale compétente et, une fois approuvés, serviront de lignes directrices dans l'instruction de l'apprenti. IL ne pourra y être dérogé sans de justes motifs, ceux-ci pouvant consister, par exemple, dans le manque de travail convenant au stade atteint par l'instruction.

Le projet a pour unique but de développer la formation professionnelle. La formation du caractère de l'apprenti joue évidemment un grand rôle, comme le relève très justement le mémoire de l'union ouvrière chrétienne-sociale. Aussi l'article 3 en tient-il compta en stipulant que seul est autorisé à recevoir des apprentis le chef d'établissement qui offre la garantie qu'ils seront instruits sans que leur moralité soit mise en péril. Par contre, des dispositions plus spéciales sur la formation du caractère de l'apprenti ne rentrent pas1 dans le cadre de cette loi.

En vertu de l'article 14, le chef d'établissement doit astreindre l'apprenti à suivre les cours professionnels et lui accorder, à cet effet, le temps nécessaire. Cette disposition est conforme à l'article 337, 2e alinéa, du code des obligations. L'avant-projet, suivant en cela la loi sur les fabriques, avait fixé à cinq heures par semaine le temps libre auquel l'apprenti a droit. Mais les conditions sont si diverses et peuvent encore varier dans une telle proportion qu'il n'est pas possible actuellement d'établir des règles uniformes. Le projet renonce donc à toute disposition précise à ce sujet et laisse, pour le moment, aux cantons, chargés déjà par l'article 27 d'organiser l'enseignement professionnel, le soin de veiller à l'application de la prescription générale de l'article 3. Conformément à l'article 31, 2e alinéa, l'horaire des cours doit tenir compte des besoins des établissements.

Le chef d'établissement qui viole ses obligations légales est passible d'une amende (art. 55). Il est, en outre, civilement responsable des suites de l'inexécution de ses obligations conformément
aux articles 97 et suivants du code des obligations. L'article 15 contient une disposition spéciale qui sera examinée en même temps que la question de la réparation du dommage.

Les dispositions relatives aux obligations de l'apprenti peuvent être très brèves (art. 11 et 12). L'apprenti doit obtempérer aux ordres du chef d'établissement ou de l'employé chargé de son instruction.

Presque tout le reste découle de ce principe. L'apprenti répond également, conformément au code des obligations, du dommage qu'il cause

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(v. spécialement les art. 99 et 328 CO). Afin de garantir au chef d'établissement le paiement des dommages-intérêts qui pourraient lui être dus par l'apprenti, l'avant-projet autorisait le maître à demander que le cinquième au maximum du salaire fût déposé dans une caisse d'épargne dont le carnet demeurerait entre ses mains. Cette disposition fut attaquée non seulement par les organisations des travailleurs, mais notamment encore par les chambres lucernoise et fribourgeoise du commerce, par les offices centraux des apprentissages des cantons de la Suisse romande et par le canton de Zurich. Elle a donc été biffée. Les dispositions pénales applicables à l'apprenti sont insérées dans les articles 55 et suivants.

Le projet ne contient lui-même aucune disposition sur la durée de l'apprentissage. Par contre, son article 16 prévoit que, sur la proposition des associations professionnelles intéressées, des dispositions générales fixant la durée normale de l'apprentissage pourront être édictées par voie d'ordonnance. La durée de l'apprentissage dépend du but à atteindre. Elle varie donc de profession à profession et dépend encore, dans une même profession, des progrès réalisés au point de vue technique et scientifique, soit qu'ils simplifient les méthodes de travail ou améliorent les méthodes d'instruction, soit qu'ils exigent l'extension du programme d'apprentissage, afin de faire face notamment à des travaux nouveaux. Il serait donc faux de chercher à fixer, dans la loi, la durée de l'apprentissage, et cette conclusion n'a pas été critiquée. Par contre, les opinions divergent sur le point de savoir si et sous quelles conditions il est indiqué de réglementer la question par voie d'ordonnance. Les avis les plus divers ont été exprimés, allant du refus pur et simple de toute réglementation à la proposition de faire fixer impérativement, par le Conseil fédéral,, la durée de l'apprentissage dans toutes les professions. Il suffit cependant de prévoir la possibilité d'édicter, pour certaines professions, les dispositions qui paraîtront nécessaires et de laisser aux associations professionnelles l'initiative de les réclamer. D'ailleurs, de nombreuses associations professionnelles ont déjà inséré des dispositions de cette nature dans leurs instructions relatives à l'apprentissage. On en trouve aussi dans les
contrats collectifs de travail et dans les règlements professionnels. On peut donc considérer que la question fait déjà, en grande partie, l'objet de règles solidement établies. D'un autre côté, il ne serait pas indiqué non plus d'adopter une réglementation stricte dont on ne pourrait s'écarter en aucun cas. Il peut se faire notamment qu'au cours de son apprentissage, le jeune homme choisisse une autre profession apparentée à la première. Devra-t-il alors refaire l'apprentissage dans son entier? En l'exigeant de lui, on risquerait peut-être de l'inciter à ne pas faire d'apprentissage sérieux, et ce résultat ne

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serait certainement pas conforme au but poursuivi par la présente loi.

On pourrait citer encore d'autres cas semblables.

En déterminant, d'une part, les qualités et connaissances dont doit faire preuve le candidat aux examens de fin d'apprentissage et en fixant, d'autre part, la durée normale de l'apprentissage, on tracera nettement la voie à suivre par la formation professionnelle. Les ordonnances élargiront encore cette base et permettront d'exercer une influence déterminante sur l'organisation de l'apprentissage dans les catégories professionnelles les plus importantes.

Un apprentissage manqué peut avoir de telles conséquences qu'il faut insérer dans la loi une disposition concernant le temps d'essai.

Alors même que le choix de la profession est parfaitement judicieux, ce n'est, en effet, qu'après le début de l'instruction que le marbre et l'apprenti peuvent se rendre compte s'ils sont faits pour se comprendre. Le contrat d'apprentissage doit donc prévoir un temps d'essai pendant lequel les parties peuvent se départir du contrat, moyennant un avertissement donné peu de jours à l'avance. Le projet fixe à quatre semaines la durée minimum de ce temps d'essai et admet qu'elle peut être prolongée jusqu'à trois mois par le contrat d'apprentissage ou le contrat-type d'apprentissage. D'après l'article 324 du «ode des obligations, le contrat-type n'est appliqué qu'à titre subsidiaire; le contrat d'apprentissage peut donc y déroger. Si donc le contrat[-type prévoit un temps d'essai de six semaines, les parties peuvent néanmoins convenir d'une durée plus longue ou plus courte, tout en observant les limites tracées par la loi. Lorsque l'apprentissage se fait chez le père ou le tuteur,, quatre semaines d'essai suffisent amplement. On peut en effet présumer que l'essai ne porte pas sur la mutuelle compréhension, des parties, mais uniquement sur les aptitudes de l'apprenti. L'avant-projet fixait une durée maximum de huit semaines et se conformait ainsi aux lois cantonales qui contiennent des dispositions sur la matière. L'extension à trois mois a été réclamée non seulement par les patrons, mais notamment encore par la direction de l'intérieur du canton d'Argovie, par la commission des apprentissages de Schaffhouse, par la commission cantonale bernoise d'orientation professionnelle et par la fédération des
sociétés suisses d'employés de l'industrie des machines. Lea remarques qui accompagnaient le projet de l'union des arts et métiers signalaient déjà la nécessité de fixer un maximum légal et invoquaient à son appui les abus constatés, par exemplei, en Autriche, « où il n'était pas rare de voir le temps d'essai porté de six à huit mois et même au delà d'une année ». Le maximum de trois mois correspond aux propositions de l'union centrale des associations patronales. Il pourra évidemment arriver que les trois mois ne suffisent pas à éclaircir la situation et qu'au terme de ce délai on soit encore Feuille fédérale. 80e année. Vol. II.

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dans l'incertitude sur les chances de succès de l'apprentissage; une rupture survenant à ce moment-là entre maître et apprenti pourrait être une erreur. Aussi paraît-il indiqué d'autoriser les parties à prolonger, à titre extraordinaire, la durée du temps d'essai et de subordonner cette prolongation à l'assentiment de l'autorité cantonale compétente, ainsi que le réclament le gouvernement du canton de BaieVille et, dans une mesure à peu près pareille, le canton de Zurich, Le temps d'essai doit être considéré comme faisant partie de l'apprentissage; les dispositions légales relatives aux obligations de l'apprenti et du chef d'établissement lui sont donc applicables. Toutefois, pendant la durée du temps d'essai, chacune des parties peut dénoncer l'apprentissage moyennant un avertissement de trois jours donné par écrit.

Ce délai, qui est conforme à l'article 350 du code des obligations:, empêchera notamment que l'apprenti ne soit jeté sur le pavé d'une heure à l'autre.

En fait de surveillance de l'apprentissage, l'avant-projet prévoyait que l'autorité cantonale compétente devait, après le temps d'essai et en tout cas dans la première moitié de l'apprentissage, s'assurer sur place que l'instruction était donnée intelligemment et conformément aux besoins de la profession et que les résultats obtenus répondaient à ceux que l'on peut attendre. Les patrons réclamèrent la suppression de cette disposition qui impliquait, à leurs yeux, une idée de méfianceà l'égard des chefs d'établissement. L'exposé des motifs avait déjà réfuté à l'avance cette objection. Le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil du canton de Neuchâtel, en date du 7 mai 1894, donne des renseignements intéressants sur la nécessité d'instituer une surveillance de l'apprentissage et sur les méthodes à employer. Voir également Horand, Zur Lehrling sgesetzremsicm, livraison 14 des Richtlinien zur Angestélltenpolitïk, page 15. Quant à l'usage qui a été fait de cette institution dans différents cantons, voir l'ouvrage déjà cité de M. Savoy, député au Conseil des- Etats: L'appr^enfussage en Suisse f pages 256 s., 262 et 275 s.

L'union des arts et métiers proposa de remplacer les visites d'inspection par des examens intermédiaires. Des propositions semblable» avaient déjà été formulées dans la grande commission d'experts. Mais il faut noter
que seuls trois cantons prévoient ce genre d'examens, et encore pour des cas spéciaux seulement. Néanmoins, l'avant-p
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prise et de chaque apprenti. En outre, la question des examens intermédiaires est d'ordre financier... ». Des objections de même nature ont été soulevées dans les mémoires de la société des commerçants, de la fédération des sociétés suisses d'employés de l'industrie des machines, de la fabrique de machines d'Oerlikon, de la chambre cantonale bernoise du commerce et de l'industrie et de l'inspectorat des écoles du canton de Glaris. La préférence va aux visites d'experts. C'est pourquoi le nouveau projet prévoit simplement que, dans les professions qui ont institué des examens intermédiaires, ces examens peuvent, sur la proposition des associations professionnelles intéressées, être prescrits en lieu et place des visites d'experts.

Il est indispensable d'exercer, sous une forme ou sous un© autre, un contrôle sérieux dans les établissements qui ne sont pas connus pour donner à leurs apprentis une instruction en tous points suffisante.

Sans ce contrôle la loi resterait lettre morte. Malheureusement, il arrive fréquemment que les jeunes apprentis soient employés comme manoeuvres pendant une année et plus. Non seulement ils n'apprennent rien alors, mais ils risquent de perdre le goût de leur métier, ce qui peut avoir de graves conséquences à cette époque critique do leur existence. Dans ce domaine, les membres du comité des associations patronales ne devraient pas penser uniquement à leur propre établissement. On peut admettre que les chefs d'établissement qui font partie du comité de l'association sont généralement capables de donner à leurs apprentis une instruction convenable. Mais il ne faut pas oublier que, dans notre pays, tout ouvrier ou employé que son travail défectueux a fait licencier et qui, peut-être, n'a même pas fait d'apprentissage, peut, encore maintenant, s'établir à son compte, porter le titre de maître et recevoir des apprentis. Sans parler du discrédit qui en rejaillit sur la profession, un apprentissage fait sous l'égide de tels maîtres peut entraîner la perte de beaucoup de jeunes gens partis pleins d'espérance. Il importe donc grandement de faire à temps un contrôle serré. Pax contre, on doit pouvoir en dispenser les établissements dont il est démontré par les examens de fin d'apprentissage qu'ils instruisent convenablement leurs apprentis. Il ressort du rapport sur les examens
d'apprentissage commercial en 1926 que le diplôme a été décerné à 89 % environ des candidats, et le rapport sur l'appnemtissage industriel établit que 4 °/o seulement des candidats ont échoué à l'examen. On peut donc admettre que la plupart des établissements pourront être dispensés de la visite d'experts prévue. Aussi a-t-on proposé d'intervertir les termes de la formule adoptée par l'article 18 et de dire que l'inspection n'aurait lieu que dans les établissements dont il est démontré par les examens de fin d'apprentissage que l'instruction y est donnée d'une manière insuffisante. Mais cette proposition

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n'est pas recommandable. Il ne faut pas oublier, en effet, que souvent l'apprenti qui échoue à l'examen n'a qu'à s'en prendre à lui-même. De plus, on n'atteindrait pas ainsi ces maîtres occasionnels qui, n'ayant jamais eu d'apprentis, causent, en l'absence de tout contrôle, la perte idu premier qu'ils prennent et qui pourraient encore faire subir le même sort à un second, après avoir résilié « pour de justes motifs », avant la fin de l'apprentissage, le contrat passé avec le premier.

L'esprit qui préside aux visites d'experts a une importance primordiale. Il ne conviendrait pas, notamment, de confier cette tâche à une personne qui, pour convaincre l'autorité de la nécessité de sa fonction, s'attacherait, dans un apprentissage correctement compris, à un petit détail sur lequel on peut, en toute bonne foi, différer d'avis. La tâche évidemment ne sera pas toujours facile. Elle exigera beaucoup de tact et des connaissances professionnelles étendues. Mais, bien comprise, elle rendra des services signalés à la formation professionnelle.

Elle sera confiée, en g-énéral, à des experts capables de juger sanp parti-pris et de donner des avis bien intentionnés, lorsqu'ils estimeront que l'apprentissage pourrait être conduit différemment. Ces avis pourront être donnés de vive-voix ou adressés par écrit au chef d'établissement. Le tout, suivant les circonstances et le genre d'établissement et, toujours, avec la préoccupation de ne pas gêner le travail de l'établissement. C'est seulement en cas d'abus manifestes ou de divergences fondamentales d'opinions que les organes institués par les pouvoirs publics seront mis en mouvement. De plus, le contrôle me doit pas s'exercer uniquement à l'endroit du chef d'établissement; il doit aussi porter sur les aptitudes et le travail de l'apprenti, de façon qu'on puisse en tenir compte si des difficultés venaient à surgir. Ceci est particulièrement important pour l'application de l'article 15. Les échecs subis aux examens de fin d'apprentissage sont dus souvent à un défaut d'application et d'aptitudes de l'apprenti. Il est vrai que le chef d'établissement peut, au moment de l'engagement, refuser le?

apprentis inaptes. Il peut encore licencier, pendant le temps d'essai, l'apprenti qui manque d'aptitudes ou d'application. Enfin, il peut renvoyer, après l'expiration du temps
d'essai, l'apprenti qui ne réunit pas les conditions physiques ou intellectuelles indispensables à l'exercice de la profession. Cependant, il peut arriver malgré tout que le chef d'établissement espère encore mener l'apprentissage à bonne fin et ne renvoie pas l'apprenti. Cet espoir peut d'autant mieux se justifier que -- comme le relève très justement le Dr Bernet dans son ouvrage Lehrlingsausbildimg -- beaucoup de jeunes gens se trouvent, pendant les deux premières années d'apprentissage, en pleine erise èd'adolescence et ne peuvent pas donner leur pleine mesure, comme ce sera le cas dès la troisième ou la quatrième année. Ces considération«

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peuvent donc engager le chef d'établissement à désirer que le contrôle s'étende à son établissement, alors même qu'il en serait dispensé par le résultat des examens de ses apprentis. L'intérêt même de l'institution exigeant que le contrôle soit exercé par des gens de la partie, il importe de les obliger à respecter strictement le secret des affaires.

On devra même prendre soin de ne pas choisir les experts parmi les concurrents de l'établissement qu'ils auront à inspecter. Ce sera facile pour les métiers et le petit commerce, qui ont avant tout affaire à la.

clientèle locale. Pai- contre, si les experts ne peuvent se trouver que parmi des concurrents, on devra aviser à un autre mode d'inspection.

L'article 19 relatif à la fin de l'apprentissage ne donne lieu qu'à quelques observations. L'avant-projet mentionnait le décès du maître a,u nombre des causes entraînant la fin de l'apprentissage. Celui-ci est, en effet, conclu essentiellement en considération de la personne du maître . (CO art. 355, 2e al.). Cependant, comme ce n'est souvent pas le cas dans les grands établissements, il vaut mieux ne retenir comme cause que la fermeture de l'établissement. Par contre, le décès du chef d'établissement ou de l'employé chargé de l'instruction des apprentis peut constituer un des justes moi/ifs prévus par l'article 20, notamment lorsque, par ce fait, l'apprentissage ne pourra être «poursuivi que dans des conditions essentiellement différentes de celles du début ». L'énumération des justes motifs qui peuvent entraîner, conformément à l'article 20, la résiliation de l'apprentissage, n'est pas limitative. Elle ne comprend que les raisons dictées par l'intérêt de là formation professionnelle; or il peut s'en présenter d'autres de nature purement personnelle. Conformément à l'article 352 du code des obligations, le contrat peut être résilié par chacune des deux parties, le recours au juge demeurant réservé. Il peut évidemment arriver qu'un maître dont la patience n'est pas la qualité dominante ou qu'un apprenti susceptible voient, dans le moindre incident, un désaccord irrémédiable et veuillent rompre l'apprentissage bien que celui-ei promette les meilleurs résultats. C'est pourquoi l'avant-projet réservait à l'autorité compétente le droit de résilier pour de justes motifs et suivait ainsi l'exemple des lois
cantonales de Pribourg, Vaud et St-G-all.

L'exposé des motifs donnait, en détail, les raisons de cette disposition.

Sa suppression n'en a pas moins été réclamée par les sphères patronales, en particulier, et par le canton de Zurich, qui contesta J'utilité de cette dérogation aux règles du code des obligations. Le projet l'a par conséquent abandonnée, et il autorise simplement les cantons à prescrire une tentative officielle de conciliation. En plus des parties, l'autorité cantonale compétente doit également avoir le droit de résilier, lorsque le résultat de l'apprentissage paraît compromis. Et cela se justifie notamment dans le cas où le maître manque des aptitudes

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nécessaires. En général, l'apprenti ne saurait s'en rendre compte luimême; son représentant légal peut ne pas en avoir l'occasion ou la capacité. L'autorité compétente, qui est renseignée par les rapports d'inspection de ses experts, est alors ssule en état de juger s'il est indiqué de continuer l'apprentissage chez le même maître.

Comme on l'a vu plus haut à propos des rapports entre la nouvelle loi et le code des obligations, les dispositions générales de ce dernier et ses règles sur le contrat d'apprentissage demeurent applicables partout où l'intérêt public n'exige pas des dispositions spéciales en faveur de la formation professionnelle. Ce principe, qui entraîne déjà l'abandon de l'alinéa 2 de l'article 19 de l'avant-projet, s'applique également en matière de dommages-intérêts. Les conséquences pécuniaires de la résiliation de l'apprentissage se déterminent donc d'après les articles 97 et suivants du code des obligations, et le juge tranche les cas litigieux. En cette matière, le projet ne renferme qu'une disposition spéciale, prévue déjà dans le premier projet de l'union des arts et métiers et dans une proposition jointe par l'union syndicale au projet de la fédération ouvrière. Aux termes de l'article 15, le chef d'établissement est tenu de réparer le dommage lorsqu'il ressort de l'examen que l'instruction donnée à l'apprenti est incomplète, à charge pour lui de prouver qu'aucune faute ne lui est imputable. L'adoption de cette disposition, sur laquelle l'union syndicale a insisté jusque dans ses derniers mémoires, se justifie d'autant mieux qu'elfe est conforme au but poursuivi par la loi et que la détermination du dommage poui-ra se faire sur une base solide, en prenant en considération, comme le prévoit le projet, le temps que l'apprenti devra consacrer à parfaire son apprentissage au lieu de pouvoir gagner sa vie. En principe, dit un arrêt fortement motivé du tribunal civil de Baie-Ville en date du 14 février 1920, le montant de la réparation doit se déterminer d'après le manque à gagner encouru au cours des mois pendant lesquels l'apprentissage a dû être prolongé (.Revue suisse de jurisprudence, 16° année, p. 357). Les propositions de l'union syndicale et de la chambre neuchâteloise du commerce, de l'industrie et du travail contiennent une disposition analogue.

Comme on l'a vu au
chapitre Ier, les dispositions sur l'apprentissage s'appliquent par analogie aux ateMers d'apprentissage et écoles professionnelles. Il faut en outre que des dispositions spéciales puissent être édictées, par voie d'ordonnance, pour les écoles professionnelles qui exercent une activité industrielle. Des plaintes se sont souvent élevées à l'égard de quelques-unes de ces écoles. On leur a reproché notamment de n'inculquer à leurs élèves qu'une certaine habileté et certaines connaissances, sans leur donner une instruction complète, et, tout en les abusant, de causer ainsi du tort à la fois aux élève® et

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aux chefs d'établissement qui les engagent. Que ces plaintes- soient entièrement fondées ou non, l'intérêt de la formation professionnelle exige certainement que les mesures nécessaires puissent être prises en cas de besoin. Bien entendu, les dispositions fédérales de cet ordre ne s'appliqueront qu'aux écoles qui préparent leurs élèves aux professions soumises à la loji.

III. Formation professionnelle acquise sans apprentissage régulier (art. 23).

Il est certain que, de nos jours, la formation professionnelle acquise sans apprentissage régulier joue un rôle important (v. à ce sujet l'article de Baumann dans la brochure publiée à l'occasion du 25e anniversaire de l'association suisse de conseus d'apprentissage et de protection des apprentis). Une M nouvelle sur la formation professionnelle doit donc tenir compte de cette manière d'apprendre une profession. Il ne s'agit pas ici d'une instruction dirigée systématiquement; le but poursuivi n'est pas, en soi, d'acquérir les connaissances et l'habileté requises pour l'exercice de la profession; celles-ci ne s'acquièrent au contraire qu'occasionnellement, au fur et à mesure qtue s'y prêtent les circonstances et les conditions de travail de l'établissement. Il n'est donc pas possible d'inscrire dans la loi des dispositions embrassant la généralité des cas. Par contre, la loi doit permettre de reconnaître comme travailleurs qualifiés des jeunes gens capables qui, pour certaines raisons -- d'ordre financier en particulier -- n'ont pas pu faire d'apprentissage, mais se sont astreints à acquérir, au cours des années, les connaissances et l'habileté requises. Le projet leur ouvre donc la porte des examens de fin d'apprentissage et les admet, par la suite, aux examens de maîtrise. Or, comme il n/existe d'examens que dans les professions qui exigent, en règle generalo, un apprentissage systématique et prolongé, cette disposition du projet ne profite qu'aux jeunes gens qui, comme les serruriers auxiliairesy ont appris le métier à la longue, en l'exerçant. Mais elle ne s'applique pas aux travailleurs des professions dont l'exercice n'exige pas un apprentissage proprement dit, tels les fileurs, les emballeurs, etc. Le critère réside dans le fait d'acquérir sans suite et sans méthode les connaissances et l'habileté qui caractérisent les professions relevant de
l'article 2.

H ne faut naturellement pas que cette proposition serve à éluder les obligations de l'apprentissage. C'est pourquoi l'article 23 exige que le temps consacré à la formation professionnelle acquise ainsi représente le double de celui imposé ou estimé nécessaire à l'apprentissage de la profession. Le droit de se présenter, à l'examen n'est, en outre, reconnu que lorsque les circonstances le justifient et, notamment,! lorsqu'il s'agit de bons ouvriers qui n'ont pu faire un apprentissage pen-

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dant leur minorité. Enfin, en ce qui concerne les tentatives de tourner les dispositions légales sur l'apprentissage, il faut rappeler encore la disposition de l'article 8 et la possibilité donnée par l'article 2, 3e alinéa.

Les conditions variant considérablement d'un métier à l'autre, le projet prévoit encore que des dispositions détaillées sur l'admission aux examens peuvent être édictées par voie d'ordonnance. Il sera donc possible de tenir compte aussi des particularités techniques, organiqueset économiques des différentes formes d'établissements. Au préalable, les associations professionnelles intéressées devront être invitées à donner leur avis.

L'article 27 contient encore une disposition relative à la formation professionnelle acquise sans apprentissage régulier. Aux termes de cet article les personnes qui ont été formées, pendant au moins une année, à l'une des professions relevant de l'article 2 doivent être admises à suivre l'enseignement professionnel au même titre que les apprentis (pour plus de détails v. sous chiffre V ci-dessous). L'article 23 dispose d'ailleurs que ces personnes ne peuvent se présenter à l'examen que si elles ont suivi l'enseignement professionnel ou établissent avoir acquis, de quelque autre manière, les connaissances; requises.

IV. Cours de préapprentissage (art. 24 et 25).

Une autre innovation du projet consiste dans les dispositions sur les cours de préapprentissage. Il s'agit là d'une institution qui, bien qu'encore nouvelle, s'est déjà fortement implantée en différents endroits et a donné de bons résultats.

L'école des métiers de Baie a organisé, en 1922, des classes de préapprentissage pourvues d'ateliers pour le travail du bois et des.

métaux. Ces classes étaient ouvertes avant tout aux jeunes gens licenciés des écoles qui n'avaient pas encore fait le choix d'une profession, ou n'étaient pas encore sûrs de leur choix ou n'avaient pas encore trouvé à se placer comme apprentis. Us y furent systématiquement initiés, pendant environ six mois, aux éléments des différents métiers ou groupes de métiers. Par la même occasion, on chercha à se rendre compte de leurs aptitudes. Ces classes de préapprentissage, qui ont été maintenues dès lors, poursuivent donc un double but. D'une part, elles complètent pratiquement et vérifient les résultats de l'orientation professionnelle et, plus spécialement, des examens d'aptitudes psychotechniques. D'autre part, elles constituent un premier début de la formation professionnelle, ce qui a fait suggérer l'idée d'imputer sur l'apprentissage le temps consacré au préapprentissagre. Cette idée a été

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approuvée par l'association bâloise des maîtres-menuisiers et, sous certaines réserves, par l'industrie des machines.

Le cours d'apprentissage de maçons institué, au printemps 1927, par l'école des métiers de Berne sur l'initiative et avec le concours de l'association des entrepreneurs, avait clairement pour but d'initier aussi des jeunes gens à la pratique d'un métier (Schweizer. Gewerbezeitung du 14 mai 1927). Ce cours dura six mois et fut dirigé systématiquement par un psychotechnicien qui eut à établir scientifiquement la méthode d'enseignement la plus rapide et la plus sûre.

Les résultats furent également très satisfaisants. Le cours fut considéré comme temps d'essai et imputé, par conséquent, sur la durée de l'apprentissage. Ce premier cours fut suivi, au printemps 1928, d'autres cours qui eurent lieu à Berne et ailleurs; il y eut notamment un cours de préapprentissage pour les manoeuvres du bâtiment. On envisage encore pour l'avenir l'organisation de cours semblables.

Les cours de préapprentissage ont donc fait leurs preuves. Ils offrent, au moins pour la période critique que représente la première partie de la formation professionnelle, des avantages analogues à ceux des ateliers d'apprentissage, sans toutefois supprimer l'apprentissage, fait à l'atelier, qui est également d'un grand profit pour l'apprenti. I] est dono indiqué que la loi encourage, dans la mesure du possible, les cours de préapprentissage placés sous la conduite de personnes exportas.

Elle peut le faire d'une part en prévoyant l'introduction de cette institution dans certains métiers et en l'imputant sur la durée de l'apprentissage, d'autre part en la faisant figurer parmi les cours susceptibles de subvention (art. 48, lettre a).

V. Enseignement professionnel (art. 26 à 31).

Personne n'ignore que l'instruction pratique doit être suivie d'un enseignement complémentaire donné dans des écoles ou cours spéciaux.

Dans cet ordre d'idées, certains établissements privés ont pïis l'initiative de compléter les ateliers d'apprentissage par das écoles spéciales. De leur côté, les lois cantonales sur l'apprentissage se sont également préoccupées de cette question. La loi fédérale doit donc contenir des dispositions sur la matièi'S. Toutefois, ces dispositions doivent se limiter strictement à l'enseignement professionnel, l'instruction générale à tous degrés demeurant réservée aux cantons.

L'article 26 astreint les apprentis à suivre l'enseignement professionnel. Seule la chambre de commerce de Baie a combattu cette prescription, qui est pourtant prévue par la plupart des lois cantonales.

L'avant-projet de l'office fédéral du travail allait plus loin et, conformément aux décisions de la commission d'experts, étendait l'obli-

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gation de suivre les cours « aux jeunes gens de moins de dix-huit ans qui sont employés dans un établissement soumis à la loi». Cette extension correspondait à une vieille revendication des associations industrielles et commerciales. Depuis quelques années, la France (art. 38 de la loi Astier du 25 juillet 1919) et l'Italie (art. 20 du décret du 31 octobre 1923 sur la réorganisation de l'enseignement professionnel) possèdent une disposition analogue. L'exposé des motifs de l'avant-projet émettait cependant certains doutes sur l'opportunité d'une pareille prescription en faisant remarquer notamment que l'on risquait par là d'abaisser le rendement moyen des écoles. La plupart des observations présentées au sujet de l'avant-projet relevèrent que cette extension allait trop loin. Aussi le projet actuel y a-t-il renoncé, estimant qu'il pouvait d'autant mieux le faire que son premier but est de développer la formation professionnelle pratique et qu'il ne convient pas, par conséquent, d'exposer son sort par une disposition de ce genre. D'ailleurs, celle-ci ne soulève pas seulement l'opposition de l'union centrale des associations patronales, de l'union des arts et métiers et d'un certain nombre de sections de l'union du commerce et de l'industrie, mais elle provoque encore les objections de la société des commerçants et de quelques gouvernements cantonaux, dont plusieurs relèvent les inconvénients signalés déjà dans l'exposé des motifs de l'avant-projet. Le département de l'intérieur du canton d'Argovie déclara notamment que, pour son canton, c'était là une «revendication idéale» actuellement irréalisable en raison des frais qu'elle entraînerait et du manque de personnel enseignant et de locaux appropriés. Le Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel avança également des objections d'ordre financier.

La commission des apprentissages du canton de Schaffhouse souligna la nécessité de l'enseignement professionnel et d'une plus grande spécialisation de cet enseignement, mais ajouta immédiatement qu'on en compromettrait les résultats en le rendant obligatoire pour les jeunes employés et ouvriers auxiliaires.

L'obligation de suivre l'enseignement professionnel ne doit dono s'appliquer qu'aux seuls apprentis. Toutefois, l'article 28 accorde le dffoit de swvre les cours à quiconque a été formé,, pendant un an au
moins, à l'une des professions relevant de l'article 2. De plus', la direction de l'école ou des cours peut librement ou sur les instructions de l'autorité cantonale chargée par l'article 27 de l'organisation de l'enseignement, agréer d'autres demandes d'admission. Eien ne l'empêche par exemple de recevoir, comme élèves, des jeunes gens capables, fraîchement sortis de l'école, alors même qu'ils sont simples manoeuvres.

En général, les jeunes gens qui s'inscrivent volontairement comme élèves ne gênent pas les cours. -- L'article 50, 3e alinéa, ouvre les cours aux élèves venant d'autres communes.

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Tandis que l'apprentissage à l'atelier sacrifie souvent l'instruction systématique aux besoins économiques, l'enseignement professionnel ne tient pas toujours suffisamment compte des réalités pratiques.

Il n'est pas rare, en particulier, que l'enseignement donné dans les écoles professionnelles complémentaires constitue une simple répétition de l'enseignement scolaire, sans aucune préoccupation de la formation professionnelle proprement dite. Il importe maintenant de réagir énergiquement contre ces défauts. Le projet ne se borne donc pas à prévoir que les subventions fédérales sont allouées exclusivement en faveur de l'enseignement professionnel (art. 50), mais il précise encore que l'enseignement obligatoire doit être consacré avant tout à la formation professionnelle, qu'il doit être donné par des maîtres compétente (art. 29), que les élèves doivent être groupés par profession (art. 27, 3e al.) et que les programmes d'études doivent être adaptés aux différentes professions (art. 30). En outre, le projet tend à favoriser la concentration de l'enseignement dans des cours spéciaux destinés aux travailleurs de la même profession. Ces cours doivent avoir lieu, si possible, pendant la morte-saison, de manière à profiter des meilleurs maîtres disponibles. Sur la proposition des associations professionnelles intéressées, ils peuvent être rendus obligatoires en lieu et place de llécole professionnelle (art. 26, 3e al.; v. aussi les propositions de l'union des arts et métiers relatives à l'art. 29), et l'accès en est facilité par ^allocation d'indemnités de voyage et d'entretien personnel (art. 27, 2e al., et art. 48, lettre d). ; C'est pour la même raison qu'a été abandonnée la disposition de l' avant-projet d'après laquelle les communes où travaillent au moins trente personnes astreintes à suivre les cours professionnels devraient instituer une école professionnelle complémentaire. Il importe, au contraire, de laisser aux cantons toute latitude d'organiser, comme ils l'entendent, l'enseignement prévu par la loi et de renoncer, par exemple^, à avoir leurs propres écoles pour les remplacer par des cours ambulants ou des mesures spéciales facilitant à leurs apprentis la fréquentation des écoles et cours du dehors' (art. 27, 1er et 2e al.)°. Ce système sera particulièrement avantageux lorsqu\m ne disposera
pas, sur place,.de maîtres qualifiés pour les différentes professions, ou lorsque le petit nombre d'élèves ne justifiera pas l'organisation spéciale d'une école ou d'un cours.

Dans l'enseignement professionnel, le corps enseignant joue un rôle important. Aussi l'article 29 exige-t-il qu'il soit composé de personnes compétentes; de même, les articles 3 et suivants contiennent, en matière d'apprentissage fait à l'atelier, des dispositions strictes sur le droit de prendre des apprentis et l'article 24 prévoit que les cours de préapprentissage doivent être placés sous une direction experte. Jusqu'à maintenant, l'enseignement professionnel était donné surtout par des

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insti tuteurs primaires et secondaires qui faisaient leurs cours à côté de leur enseignement ordinaire. Malgré tout le sérieux quvils apportaient à leur tâche, il ne leur était, la plupart du temps, pas possible d'iacquérir la préparation et les connaissances professionnelles nécessaires.

Il est vrai qu'en bien des endroits de la Suisse, les moyens de formar le corps enseignant font défaut. C^est donc à cette lacune qu'il faudra .aviser en premier lieu. Des dispositions ont bailleurs été prises déjà en certains endroits, et récemment le «postulat» Wirz a attiré l'attention de l'Assemblée fédérale sur ce point. Ce n'est pas le lieu de décider ici des moyens à envisager, mais la Confédération devra en tout cas s'occuper de la question (v. aussi les remarques du chapitre VIII: subventions fédérales). En tout état de cause, on emploiera uniquement, les maîtres possédant les connaissances professionnelles requises, qu'us soient recrutés parmi les gens du métier ou parmi les instituteurs primaires ou autres. Des dispositions précisant les conditions à remplir par le corps enseignant doivent pouvoir être.édictées par voie d'ordonnance. Le mémoire du canton de Zurich proposait aussi de détei'fminer le minimum de préparation requis du corps enseignant.

En ce qui concerne l'horaire des leçons, l'article 31, 2e alinéa, prescrit quïl doit tenir compte des besoins des établissements. Le premier alinéa prescrit que les leçons obligatoires ne doivent avoir lieu ni après huit heures du soir, ni le dimanche, ni les jours fériés. On comprend sans peine que le travail du dimanche ne doit pas être imposé sans .nécessité. Par contre, la disposition concernant les cours du soir provoquera peut-être quelque opposition. Elle se justifie cependant à la fois au point de vue de la protection des apprentis et de la formation professionnelle. L'expérience a démontré, en effet, que les cours du soir se donnent devant un auditoire fatigué qui ne peut pas en profiter. Et qu'on ne vienne pas prétendre que les établissements ne sont pas en mesure de supporter la réduction de la durée du travail qui en résultera pour l'apprenti! Ce serait dire que le rendement d'un établissement dépend du travail de l'apprenti. D'ailleurs, l'intervalle de six à huit heures du soir et le samedi après-midi restent.

disponibles. De plus, le projet
prescrit que l'horaire des leçons doit prendre en considération les besoins des établissements, ce qui peut avoir lieu, par exemple, en concentrant l'enseignement sur la saison morte. Comme on l'a vu plus haut, les chefs d'établissements saisissent parfaitement toute l'importance de l'enseignement professionnel; ce qui les indispose, par contre, à son égard, c'est de voir que l'horaire, établi sans tenir aucun compte des besoins des établissements, n'aboutit encore, bien souvent, à aucun développement appréciable de la formation professionnelle des apprentis. En Allemagne, renseignement se donne, beaucoup plus que chez nous, pendant la journée, et le profit

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qui en est résulté a complètement désarmé l'opposition des patrons.

Enfin, il faut noter que la limite de huit heures du soir fixée par le projet ne s'applique qu'aux branches obligatoires. Il n'a pas paru nécessaire de l'étendre aux leçons facultatives car, chez celui qui las suit, l'intérêt sera plus fort que la fatigue et les résultats pourront êto-e satisfaisants malgré l'heure tardive des leçons.

VI. Examen de fin d'apprentissage (art. 32 à 38).

Au point de vue de la terminologie, il importe de relever tout d'abord que le projet adopte l'expression «examen de fin d'apprentissage » afin de bien distinguer les examens qui se passent après l'apprentissage de ceux qui ont lieu au cours de l'apprentissage:. En outre, le terme allemand « Lehrbrief » qui figurait dans l'avant-projet avait été rendu en français par « diplôme ». Différentes raisons ayant fait préférer en allemand le terme de « Fahig-keitsausweis », le projet parle maintenant de « certificat de capacité ».

La perspective de l'examen de fin d'apprentissage incite fortement le maître et l'apprenti à mettre convenablement, à profit le temps dont ils disposent. On s'en était rendu compte sitôt après l'abolition des règlements des anciennes corporations, mais c'est dans la seconde moitié seulement du siècle passé que l'on parvint à rétablir cet examen.

L'union des arts et métiers de Baie fut la première à organiser, en 1877, un examen de ce genre et à décerner un diplôme aux apprentis qui avaient confectionné, dans l'atelier de leur maître, un ouvrage d'épreuve et étaient capables d'en calculer le prix de revient. Des examens analogues ne tardèrent pas à s'instituer en d'autres endroits.

L'union suisse des arts et métiers ne leur ménagea pas son appui et chercha à les rendre aussi fructueux que possible. En 1888, elle rédigea le premier règlement qui vint unifier la matière. Aux termes de ce règlement, les examens ne consistaient plus seulement à confectionner un ouvrage d'épreuve, mais encore à établir les connaissances et aptitudes professionnelles du candidat. Le règlement fut revisé en 1896; l'ouvrage d'épreuve fut alors rendu facultatif pour les examens ide l'union des arts et métiers et remplacé par un examen obligatoire passé, sous surveillance, à l'atelier. Dans le commerce, l'institution des examens de fin d'apprentissage est
due à la société suisse des commerçants. Il leur fut adjoint, par la suite, des examens organisés par les pouvoirs publics.

L'article 12 du projet déclare les examens de fin d'apprentissage obligatoires pour les apprentis. Cette disposition est conforme à une décision unanime de la commission d'experts et figurait déjà dans l'avant-projet. Elle n'a été combattue, comme celle relative à l'en-

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geignement professionnel obligatoire pour les apprentis, que par la chambre de commerce de Baie. Actuellement déjà, presque toutes les lois cantonales rendent obligatoires les examens de fin d^apprentissage.

En vertu du projet, les apprentis doivent se présenter à l'examen vers la fin de l'apprentissage ou à la première occasion qui s'offro après la fin de l'apprentissage. L'examen est, en outre, ouvert à quiconque a été formé à une profession pendant une période représentant au moins le double du temps imposé ou consacré habituellement à l'apprentissage de la profession et justifie des connaissances professionnelles requises. L'examen de fin d'apprentissage ne doit pas constituer simplement une obligation à laquelle on se soumet parce qu'on y est contraint, mais ce doit être le but vers lequel convergeront tous les efforts de la formation professionnelle. En vertu de l'article 38, le certificat de capacité décerné à la suite de l'examen confère le droit au titre -- protégé par la loi -- de « menuisier qualifié, serrurier qualifié », etc. Le certificat de capacité est, en outre, une des conditions d'admission aux examens de maîtrise (art. 41). Enfin, le résultat des examens de fin d'apprentissage permet, sous plusieurs rapports, de juger des aptitudes du maître à former des apprentis et de la méthode qu'il y applique (art. 3, 2e al., 5, 15 et 18). Ces examens servent dono en quelque sorte de pierre de touche de la formation professionnelle dans son enisemble.

Il faut par conséquent que le projet donne la faculté de fixer le mvmrmim de connaissances exigées du candidat (art. 36), ce qui permettra notamment d'élever jusqu'à un certain niveau la formation professionnelle en général. Quant au certificat de capacité décerné sans examen préalable, il importe de ne l'accorder qu'avec la plus grande prudence si l'on ne veut pas lui enlever de sa valeur. Même en présence d'un empêchement sérieux, l'autorité devra encore se borner aux cas (p. ex.

grave et longue maladie survenue à la fin d'un apprentissage [particulièrement brillant) où l'obligation de passer l'examen conformément à l'article 12, 28 alinéa, constituerait une injustice manifeste (art. 38, 3e al.).

Jusqu'à maintenant, l'organisation des examens était assumée, en partie, par les cantons et, en partie, par les associations professionnelles. L'avant-projet
en chargeait, en principe, les cantons, tout en admettant que le Conseil fédéral pouvait accorder l'équivalence aux examens institués par les associations professionnelles. Il n'y eut que la conférence des offices cantonaux d'apprentissage de la Suisse romande et du Tessin qui proposa de supprimer cette faculté; elle craignait qu'on ne conférât ainsi trop de pouvoir aux associations professionnelles. Par contre, le Conseil d'Etat de Baie-Campagne, l'union des arts et métiers et la société des commerçants1 recommandèrent de confier l'organisation des examens aux associations. L'union des aria et métiers insista particulièrement sur ce point. Elle proposa que

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tous les apprentis de la profession fussent adressés par les cantons à l'association professionnelle autorisée, par le Conseil fédéral, à organiser et à faire subir les examens (art. 22bis du projet de 1925). En cette matière, le projet de loi prévoit la réglementation suivante. L'organisation des examens de fin d'apprentissage incombe, en principe, aux cantons (art. 32). Toutefois, une association professionnelle peut, sur sa demande, être autorisée par le Conseil fédéral à les organiser et, comme le réclame l'union des .arts et métiers!, ces examens sont alors obligatoires pour tous les apprentis de la profession. Dans ce domaine, l'association professionnelle reçoit ainsi des attributions de droit public, comme c'est le cas des chambres des métiers allemandes et autrichiennes. Comme contre-partie, la loi doit exiger que les examens organisés par l'association offrent toute garantie au point de vue de l'impartialité et des connaissances professionnelles. A cet effet, l'association doit établir le règlement d'examens et le soumettre à l'approbation du Conseil fédéral; celui-ci, ainsi que le canton où a lieu l'examen, peuvent se faire représenter, chacun par un expert, dans la commission d'examen afin de se rendre compte directement comment les choses se passent en pratique. L'organisation des examens peut être confiée tant aux associations des employeurs qu'aux associations des travailleurs, les unes et les autres ayant d'ailleurs fait leur preuve dans ce domaine (ainsi l'association des maîtres-bouchers, l'association des maîtres-confiseurs, d'une part, et la société des commerçants!, d'autre part). D'une manière générale, les associations mixtes se prêteront tout particulièrement à l'accomplissement de cette tâche.

Pour le cas où plusieurs associations se mettraient en même tempe sur les rangs, la préférence devrait être accordée à celle qui offre le plus de garanties quant au but à atteindre. L'article 34 prévoit que les examens finaux des ateliers d'apprentissage ou des écoles professionnelles peuvent être 'déclarés équivalents. Les examens organisés par les cantons et les communes subsisteront toutefois pour les autres apprentis de la profession. L'équivalence n'est accordée que BUT la proposition de l'autorité cantonale compétenteVil. Examens professionnels supérieurs (art. 39 à 47).
On peut admettre 'que quiconque a passé son examen de fin d'apprentissage a atteint ' un degré de formation professionnelle lui permettant d'exécuter les travaux courants de son métier. Cela ne veut pas dire que celui qui a terminé son apprentissage n'ait plue rien à apprendre'de son métier. Sans parler de l'expérience qui seule, dans son activité 'professionnelle, lui donnera la sûreté nécessaire et le sens des affaires, il est désirable qu'il suive des cours spéciaux pour se former à certains travaux particuliers de son métier qui ne

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furent pas compris dans l'apprentissage, soit qu'ils n'aient pas encore été introduits alors par la technique, soit que le temps disponible) n'ait pas permis de les faire rentrer dans le programme de l'apprentissage.

Il est également désirable qu'il se prépare à l'exercice indépendant de sa profession en suivant des cours de maîtrise ou d'autres cours professionnels supérieurs. Comme par le passé, l'organisation et la fréquentation de ces cours de formation professionnelle supérieure qui suivent l'examen de fin d'apprentissage doivent avoir un caractère absolument facultatif. Aussi la loi ne renferme-t-elle aucune disposition imperative à leur sujet bien que, de par le but qu'ils poursuivent, ces cours rentrent nettement dans son champ d'application.

Par contre, ils bénéficient également des subventions (art. 48, lettre a).

Les conditions auxquelles sera subordonnée l'allocation des subventions permettront au besoin de régler en détail (v. art 50) ce qui a trait à l'admission des élèves, au personnel enseignant, etc.

S'il n'a donc pas paru nécessaire d'insérer dans la loi des prescriptions concernant le perfectionnement de la formation professionnelle, on a jugé désirable, par contre, d'y inscrire des dispositions eur les examens de maîtrise. Il est vrai que, contrairement aux examens de fin d'apprentissage, ces épreuves ne doivent avoir aucun caractère obligatoire et ne seront pas, en règle générale, organisées par l'Etat.

Mais-, afin d'en rehausser la valeur, on a demandé que leurs diplômes fussent protégés par la loi et que l'Etat collaborât dans une certaine mesure aux examens. De plus, la loi doit permettre de subordonner le droit de recevoir des apprentis à la condition que le maître chargé de leur formation professionnelle ait prouvé ses aptitudes professionnelles en passant l'examen de maîtrise ou quelque autre examen (professionnel supérieur (art. 4).

La disparition des corporations supprima pour longtemps les examens de maîtrise. Ce n'est que dans les dix dernières années du siècle passé que l'on souleva sérieusement la question de leur réintroduction à titre facultatif. Le mouvement partit surtout de l'union des arts et métiers qui, par la suite, s'y consacra activement- Ses iasisemblées annuelles de 1918 et 1919 élaborèrent les Statuts et le règlement-type des examens. Au mois de
février 1922, l'association des maîtres-tailleurs fit passer les premiers examens. La même année, les associations professionnelles des couvreurs, des potiers, des coiffeurs et des tapissiers suivirent cet exemple. Depuis lors, différentes associations ont fait de même. Mais ces examens facultatifs ne réunissent encore qu'une faible proportion de candidats. Il leur manque le stimulant que la protection légale leur a donné en Allemagne et en Aoitriche.

C'est pourquoi l'union des arts et métiers comprit la protection du titre de maître parmi les « matières » qu'elle proposa de soumettre à

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la législation fédérale, et c'est précisément cette question que le mémoire du professeur Grermann, expert de l'office fédéral du travail pour les questions législatives, recommanda de réglementer sur le terrain fédéral à côté de la lutte contre la concurrence déloyale.

Depuis quelques années, des examens "professionnels supérieurs ont également été introduits en dehors de l'artisanat comme épreuves facultatives. C'est ainsi que depuis 1910 la société suisse des commerçants organise des examens de comptabilité; elle a préparé également des examens de correspondants. En outre, depuis 1925, la chambre suisse pour expertises comptables, à laquelle appartiennent l'associatioa suisse des réviseurs-comptables, les sociétés fiduciaires et les banques locales, a organisé des examens de réviseurs de comptes,, en collaboration avec l'union du commerce et de l'industrie, la société des commerçants, l'union des banquiers, la société pour l'instruction commerciale, etc.

Il était donc tentant d'insérer, dans le projet de loi sur la formation professionnelle, les dispositions relatives aux examens de maîtrise comprises dans l'avant-projet de loi joint au mémoire Germann, auquel la presse professionnelle presque unanime fit un excellent accueil.

Mais il fallait encore prendre au préalable l'avis des associations professionnelles intéressées. L'office fédéral du travail adressa donc aux associations centrales des employeurs et des travailleurs et aux organismes de caractère neutre une circulaire les invitant à se prononcer sur le point de savoir s'il y avait lieu d'inscrire, dans la loi, des dispositions relatives aux examens de maîtrise et à d'autres examens professionnels supérieurs. Il joignit à cette circulaire un projet des dispositions qui, le cas échéant, pourraient être prises en considération.

Afin de ne pas retarder la mise au point du projet de loi, le délai fixé aux associations fut de très courte durée.

Ces associations furent loin d'être unanimes dans leurs réponses.

Selon sa lettre du 10 janvier 1928, la direction de l'union suisse des a,rts et métiers « a examiné à fond le principe même de la question » et elle est «résolument» d'avis de compléter le projet de loi sur la formation professionnelle par des dispositions réglant la protection du titre de maître. Elle justifie sa proposition en la
présentant comme «le développement naturel de l'idée d'une bonne formation des jeunes artisans». Elle ajoute que «l'octroi du diplôme de maître présuppose une formation professionnelle complète et, inversement, que la capacité reconnue du maître est la meilleure garantie d'une bonne formation professionnelle de l'apprenti». L'union centrale des associations patronales et le vorort de l'union suisse du commerce et de l'industrie voudraient que les examens de maîtrise fussent limités aux artisans et désireraient que le titre de maître, que les chefs d'entreFeuille fédérale. 80e année. Vol. II.

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prise décernent souvent aux chefs de division dans l'industrie, continuât à être indépendant de tout examen spécial. Du côté ouvrier, l'union syndicale, l'association des ouvriers et employés évangéliques, la fédération des sociétés d'employés et l'union ouvrière chrétienne-sociale répondirent à la circulaire. A l'exception de cette dernière association, qui accepte les suggestions de la circulaire, les trois autres demandent que le projet ne soit pas alourdi par des dispositions concernant les examens de maîtrise. Toutefois les sociétés d'employés approuveraiené l'appui donné aux cours et examens facultatifs du degré supérieur organisés par les associations professionnelles. L'union syndicale souligne avant tout qu'il n'est pas possible, dans tous les cas, de faire dépendre d'examens de maîtrise le droit de recevoir des apprentis. L'association des ouvriers et employés évangéliques relève que la protection du diplôme de maîtrise ne tendrait pas seulement à développer la formation professionnelle, mais poursuivrait un but plus général qui, à son avis, ne saurait être atteint. Elle craint, en outre, que des dispositions de ce genre ne soient contestées et ne retardent par conséquent l'entrée en vigueur de la loi qui, d'après elle, est urgente. Enfin, il y a lieu de mentionner l'opinion de l'office suisse pour les professions féminines et dû l'association suisse de conseils d'apprentissage et de protection des apprentis qui, tous deux,; se prononcent en faveur d'une réglementation. L'association suissedé conseils d'apprentissage signale, en outre, l'influence décisive qu'exercé la valeur -professionnelle du maître sur la formation de l'apprenti.

Comme on vient de le voir, les opinions varient dans une assez forte mesure. Il faut noter cependant que les associations de caractère neutre, en particulier l'association de conseils d'apprentissage et de protection des apprentis, se déclarent favorables à l'insertion de dispositions sur la matière. Il est à remarquer, d'ailleurs, que le délai accordé aux associations fut très bref et qu'on ne saurait par conséquent attacher une importance excessive aux opinions émises dans ces conditions. Un examen plus approfondi de la question démontrera d'ailleurs que ces objections ne peuvent guère être maintenues. On peut répondre aux sociétés d'employés que ces
dispositions ne poursuivent pas d'autre but que de permettre à la Confédération d'encourager les associations à organiser des examens facultatifs et que les mesures prises par la Confédération profiteront non seulement à l'artisanat, mais en particulier aussi aux professions commerciales. A l'encontre des craintes manifestées par l'association des ouvriers et employés évangéliques, il y a lieu de relever que, si un retard doit se produire du fait de l'adoption, dans le projet de loi, de dispositions sur les examens de maîtrise, ce retard, sera certainement bien moins fort que la perte de temps qui pourrait.

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résulter d'un renvoi, pour complément, de l'ensemble du projet. En ce qui concerne enfin les objections de l'union syndicale, il est exact qu'il n'est pas possible, dans tous les cas, de faire dépendre d'un!

examen de maîtrise le droit de recevoir des apprentis. Mais ce n'est pas non plus ce que le projet prévoit. Quant à la proposition de remplacer cette condition par une disposition instituant la responsabilité du maître en raison d'une formation insuffisante de l'apprenti, il en a été tenu compte lors de la mise au point du projet (v. le chapitre relatif à l'apprentissage). Oe qui est décisif, c'est que les dispositions sur les examens de maîtrise forment le complément naturel de la loi sur la formation professionnelle et que, sans ce complément, la loi n'atteindrait peut-être pas entièrement son îrat. On se décida donc, après avoir discuté encore une fois de la question avec les jprin·cipaux milieux intéressés, à insérer ces dispositions dans la loi, et cela fut d'autant plus facile qu'elles n'ont aucun caractère impératif.

La protection légale du diplôme de maître (art. 46) correspond à celle accordée par le projet aux certificats de capacité décernés à la suite des examens de fin d'apprentissage (v. art. 38). De plus, les noms des maîtres diplômés seront publiés et inscrits dans un registre qui pourra être librement consulté (art. 47). Les privilèges qui, d'après l'avant-projet Germann et les voeux exprimés par l'union des arts et métiers, devraient être rattachés, en outre, à l'obtention du diplôme dépassent le cadre de la loi et ne peuvent par coniséquent y être prévus. Cela est particulièrement vrai des adjudications de travaux.

En règle générale, les examens seront organisés par les associations professionnelles elles-mêmes (art. 39). Elles devront toutefois obtenir l'approbation du Conseil fédéral et lui soumettre, à cet effet, un règlement renfermant toutes dispositions utiles sur les capacités pratiques et les connaissances professionnelles exigées du candidat, sur les droits d'examen, la composition de la commission d'examen, l'appréciation des résultats de l'épreuve, l'époque et le lieu de celle-ci, eto.

Les autres personnes appartenant à la profession doivent avoir l'occasion de former opposition. Les conditions requises pour l'approbation, seront précisées par voie d'ordonnance
(art. 40; voir avant-projet Germann: art. là5). Afin de faciliter l'approbation, il sera peut-être indiqué qu'avant toute décision définitive, le comité de l'association qui entend organiser des examens se mette en rapport avec le service fédéral chargé d'examiner le projet de règlement et d'en rapporter au Conseil fédéral. Si plusieurs associations se mettent en même temps sur les rangs pour l'organisation des examens, on cherchera tout d'abord à les mettre d'accord entre elles; si ce n'est pas possible, la préférence sera donnée à celle des propositions qui répondra le mieux au

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(but poursuivi. Le règlement de l'association professionnelle peut aussi prévoir que les ateliers d'apprentissage ou les écoles professionnelles collaboreront à ses examens. Les ateliers d'apprentissage et Iles écoles professionnelles qui entendent organiser eux-mêmes des examens de maîtrise pourront demander l'autorisation au Conseil fédéral; mais celle-ci ne leur sera octroyée qu'avec l'accord des associations professionnelles intéressées (art. 44).

Les examens doivent être organisés de manière à remplir leur office. Ils doivent servir de preuve certaine des qualités professionnelles du candidat; cette preuve aura d'autant plus de valeur qu'on exigera davantage du candidat et que l'octroi du diplôme dépendra exclusivement de la réussite d'un examen conduit en toute impartiailité. C'est pour cette raison, que les milieux de l'union des arte et métiers eux-mêmes préconisent la surveillance et la collaboration de l'Etat, afin de conférer en quelque sorte aux examens l'autorité d'une garantie officielle (v. le mémoire Grermann, p. 203 et 223 et suiv.).

L'article 42 prévoit donc la délégation d'experts officiels aux examens, et l'article 45 dispose que ces experts ont le droit et le devoir de s'opposer à la remise du diplôme lorsque le résultat de l'examen ne répond pas aux capacités et connaissances que l'on exige du candidat. Les propositions de l'union des arts et métiers prévoyaient iméme que le nombre de ces experts pouvait s'élever jusqu'à la moitié de celui des membres de la commission d'examen.

En vertu de l'article 43, les qualités requises du candidat seront déterminées en détail par le règlement et soumises à l'approbation du Conseil fédéral. Afin d'amener les examens de maîtrise à un niveau uniforme, l'article 43, 2e alinéa, stipule que ces examens sont destinés à établir si le candidat posisède les capacités et connaissances requises pour exercer sa profession d'une façon indépendante.

Il conviendra de veiller tout particulièrement à l'examen pratique, car c'est par les travaux pratiques du maître diplômé que la clientèle jugera de la valeur du diplôme et lui réservera la considération, qu'il mérite. L'examen portera également sur les connaissances indispensables à l'exercice indépendant d'une profession; l'article 43 mentionne expressément le calcul du prix de revient, la comptabilité
et la connaissance générale de la profession. Il importe également que les conditions d'admission à l'épreuve n'altèrent pas le caractère strictement professionnel de l'examen. Contrairement à la décision prise par l'union des arts et métiers en ce qui concerne l'organisation de ses examens facultatifs de maîtrise, les examens sont ouverte non seulement aux membres de l'association professionnelle, mais encore à toute personne possédant le certificat de capacité (v. art. 37 ©t 38), jouissant de la plénitude de ses droite et ayant exercé sa profession durant au moins trois ans depuis la fin de son apprentissage.

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La circulaire de l'office du travail aux associations intéressées demandait s'il y avait lieu de protéger, dans l'artisanat, le simple titre de «.maître diplômé», ainsi que le proposaient l'union des arts et métiers dans son « Exposé des matières » et l'avant-projet Germann, ou, comme le fait la législation allemande, le titre de maître complété par la désignation d'une profession: par exemple, maître-menuisier., maître-serrurier, etc. On a relevé à ce sujet les difficultés auxquelles se heurterait chez nous l'application du système allemand. Or, dans le langage courant, on entend généralement par « maître-menuisier », « maître-serrurier », etc., le menuisier ou le serrurier établi à son compte, le chef d'entreprise. Parmi les mémoires qui parvinrent à l'office du travail, seul, tout d'abord, celui de l'union centrale des associations patronales prit expressément position à l'égard de la question. Il exprima le voeu que le titre de « maître » demeurât également libre à l'avenir, de façon que le chef d'établissement puisse encore le décerner librement dans l'industrie, comme c'était le cas jusqu'ici. Par la suite, l'union des arts et métiers, après une délibération approfondie de son comité central et de ses sections, insista vivement pour que la protection légale n'allât pas au titre de maître diplômé, mais au titre de maître complété par la désignation d'une profession, comme maîtremenuisier, maître-tailleur, etc. Mais comme le titre de maître n'est pas usuel dans bon nombre de professions, notamment dans les professions féminines et chez les appareilleurs, on s'arrêta à la solution suivante, qui présente plus de souplesse: le titre mis au bénéfice de la protection légale devra être prévu par le règlement, qui sera soumis lui-même à l'approbation du Conseil fédéral. Enfin, il fut tenu compte des observations formulées par l'industrie au moyen d'uno réserve insérée dans la loi et en vertu de laquelle le port à l'intérieur d'un établissement des titres décernés par la direction demeure autorisé comme par le passé; par contre, les titres décernés par l'établissement et ne représentant pas le résultat d'un examen reconnu par l'Etat ne pourront pas être portés dans les relations avec l'extérieur et, en particulier, ne pourront être utilisés dans un but de concurrence.

Des examens professionnels
supérieurs, semblables aux examens de maîtrise de l'artisanat, peuvent aussi être organisés par les associations dans d'autres professions soumises à la loi et être mis au bénéfice de la protection légale. Les conditions de ces épreuves correspondent en général à celles établies pour les examens de maîtrise.

C'est le cas notamment pour l'organisation et la procédure. Toutefois, les conditions d'admission peuvent être réglées différemment, dans le cadre des considérations purement professionnelles; elle» s?ront ·déterminées par un règlement soumis à l'approbation du Conseil fédéral. Le règlement désignera également le titre qui sora protégé

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par la loi conformément à l'article 46 (par exemple le titre de «comptable diplômé»).

L'organisation des examens n'est nullement un privilège des associations patrionales. Aux termes de l'article 54, 2e alinéa, sont considérées comme associations professionnelles les associations intéressées des employeurs et des travailleurs. Et jusqu'à maintenant les associations d'employés de commerce ont org-anjisé d'excellents examens dans les professions commerciales.

L'institution d'un titre protégé ne doit pas porter atteinte à la liberté de commerce et d'industrie. Comme par le passé, les personnes non-diplômées pourront donc exécuter les travaux professionnels. Tout ce qu'on exigera d'elles c'est qu'elles ne s'arrogent pas le titre protégé par la loi.

VIII. Subventions fédérales (articles 48 à 51).

Les subventions versées jusqu'à présent par la Confédération en vue d'encourager la formation professionnelle ont été allouées en vertu des arrêtés fédéraux du 27 juin 18841), du 15 avril 18912) et du 20 dé3 cembre 1895 ). Elles permirent de subventionner les genres les plus divers de cours et écoles professionnels, de collections d'échantillons, de modèles et de matériel enseignant, de musées industriels, etc. et d'accorder, dans certains cas, des bourses destinées à faciliter la fréquentation de cours professionnels. Des subventions furent enfin allouées, par la vois budgétaire, en faveur des examens de fin d'apprentissage. La nouvelle loi est appelée à donner à toutes ces subventions uns base légale uniforme et à établir entre «Iles un juste équilibre.

L'article 48 du projet de loi détermine les établissements, cours et autres institutions appelés à bénéficier des subventions fédérales; l'article 49 fixe le montant des subventions; l'article 50 indique les conditions auxquelles est subordonnée l'allocation de ces subventions; l'ar[ticle 51, enfin, contient une disposition complémentaire relative à l'enseignement ménager.

Par rapport au droit existant, l'article 48 n'innove pas sensiblement en ce qui concerne les bénéficiaires des subventions.

Letfàes a et b. Les établissements et cours qui contribuent à la formation professionnelle visée par la loi, ainsi que les c'ours destinés *)2 Arrêté fédéral concernant l'enseignement professionnel (RO 7, 554).

) Arrêté fédéral concernant l'encouragement de l'enseignement commercial (RU 12, 135).

3 ) Arrêté fédéral concernant l'enseignement de l'économie domestique et l'instruction professionnelle à donner à la femme (RO 15, 461).

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·au corps enseignant de ces établissements pouvaient déjà être mis au bénéfice de subventions fédérales en vertu des arrêtés fédéraux mentionnés ci-dessus. Le nouvel article y ajoute expressément les cours de préapprentissage et de rééducation professionnelle, les cours de maîtrise et les autres cours supérieurs semblables. Mais cette innovation n'est qu'apparente, ces différents cours recevant déjà des allo·eations spéciales de la Confédération. On subventionne, en vertu des arrêtés fédéraux, les cours de maîtrise et les autres COUTS professionnels supérieurs, ainsi que les cours de préapprentissage organisés par l'école des arts et métiers de Baie (allocations calculées sur la base du montant des dépenses entrant en ligne de compte). Quant aux cours de rééducation professionnelle, ils ont été subventionnés en vertu des arrêtés du Conseil fédéral concernant l'assistance aux chômeurs (v. le message du Conseil fédéral du 1er septembre 1922 concernant de nouveaux crédits pour venir en aide aux chômeurs,1).

Ces cours permettent, d'une part, de diminuer l'effectif ouvrier des métiers encombrés et facilitent, d'autre part, le recrutement des travailleurs dans les métiers manquant de main-d'oeuvre ; ils contribuent ainsi à la réduction du chômage et remplissent une tâche économique importante, ce qui justifie le maintien des subventions qui leur on* été allouées jusqu'à présent.

Lettre c. Examens. Pour la première fois, en 1888, des subventions ont été accordées, par la voie budgétaire, en faveur des examens de fin d'apprentissage («Examens d'apprentjs »). Elles furent limitées tout d'abord à l'artisanat, mais s'étendirent par la suite aux professions commerciales. Dès 1922, le budget permit également de subventionner des examens intermédiaires.

Lettre d. Les contributions aux indemnités de voyage accordées aux participants à des cours professionnels firent l'objet de subventions allouées, dans chaque cas, en vertu des arrêtés fédéraux. Ces subventions se justifient par le fait qu'elles permettent d'éliminer maints cours et écoles organisés à grands frais dans des localités où le nombre d'élèves est insuffisant. En outre, une certaine concentration ne pourra qu'être profitable à l'enseignement, qui disposera ainsi d'un corps enseignant plus qualifié. L'article 3 de l'arrêté fédéral du 15 avril 189l1)
prévoit expressément l'allocation de bourses en faveur d'élèves se vouant au commerce, mais cette disposition n'a pas été appliquée depuis 1914. Depuis deux ans des bourses sont cependant allouées, par la voie budgétaire, à de jeunes commerçants désireux d'augmenter leurs connaissances à l'étranger. L'avant-projet préi) FF 1922, III, 108--110.

i) RO 12, 135.

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voyait d'une façon toute générale que la Confédération participerait aux bourses allouées aux apprentis indigents par les gouvernements cantonaux. Il est vrai que l'exposé des motifs se demandait déjà si cette disposition pourrait être maintenue. Bien que certains mémoires aient applaudi à cette disposition et aient même cherché à en étendre la portée, l'état actuel des finances fédérales n'a malheureusement pas permis de la conserver. La Confédération allouera des bourses uniquement aux apprentis des professions où il y a pénurie de maind'oeuvre. Le fait d'encourager le recrutement dans les professions qui manquent de personnel a été considéré à maintes reprises et de 'différents côtés comme une nécessité d'ordre économique; le moment est sans doute venu de saisir l'occasion qu'offre la nouvelle réglementation des subventions fédérales et de faire passer cette idée dans la pratique. Depuis 1889, des subsides ont été accordés, par la voie budgétaire, aux revues professionnelles publiées par les associations professionnelles.

A Genève, on a proposé de verser des subsides fédéraux aux chefs d'établissement qui engagent des apprentis. Il est certain quo les chefs d'entreprise qui remplissent consciencieusement leurs devoirs envers leurs apprentis rendent de précieux services à la cause de la formation professionnelle et que l'allocation de subventions aux chefs d'établissement faciliterait grandement l'engagement d'apprentis.

Toutefois, malgré les affirmations et les pronostics pessimistes auxquels a donné lieu la mise en vigueur des lois cantonales sur l'apprentissage, le nombre des apprentis engagés pendant ces dernières années non seulement n'a pas diminué, mais au contraire, s'est accru d'une manière assez sensible, de sorte que le besoin de stimuler l'engagement des apprentis par des mesures spéciales ne se fait pas autrement eentir.

Par sa revision du 4 février 1925 (article 9bis de la loi d'apprentissage), le canton de Vaud a même imposé aux chefs d'établissement ayant des apprentis l'obligation de participer financièrement aux frais occasionnés par l'organisation des cours professionnels.

Lettì'e e. Les subventions prévues en faveur des institutions d'orientation -professionnelle ont été allouées depuis 1920 par la voie budgétaire. L'union suisse des arts et métiers et les offices cantonaux
d'apprentissage de la Suisse romande et du Tessin ont demandé qu'ellesfussent consacrées légalement et incorporées dans une loi sur la formation professionnelle. Cette proposition se justifie par l'importance que le choix judicieux d'un métier revêt pour la formation professionnelle. Par la même occasion, il sera possible de donner satisfaction aux voeux exprimés par le postulat Eugster-Zust du 16 décembre 1925.

i) RO 15, 461.

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L'article 51 prévoit que la Confédération continuera à allouer à l'enseignement ménager les subventions versées jusqu'à maintenant en vertu de l'arrêté fédéral du 20 décembre 1895 concernant l'enseignement de l'économie domestique et l'instruction professionnelle à donner à la femme1). L'article 34ter de la constitution fédérale ne s'étendant pas à l'économie domestique, des objections d'ordre constitutionnel ont été soulevées à l'endroit de ces subventions. Comme le relève l'exposé des motifs de l'avant-projet, la Confédération n'est en effeb pas autorisée à édicter des dispositions imperatives dans ce domaine. Mais des subventions ont déjà été versées, jusqu'à maintenant, en l'absence de toute base constitutionnelle bien déterminée, par exemple à des écoles d'agriculture. D'autre part, personne ne songe actuellement à retirer aux écoles et cours d'enseignement ménager les subventions qui leur sont allouées depuis 1895, bien que l'arrêté n'ait pas non plus une base constitutionnelle bien déterminée. Il s'agit donc uniquement de savoir si l'arrêté fédéral de 1895 doit être maintenu ou remplacé par une disposition équivalente dans le projet de loi. Dans ces conditions, il y a lieu de prendre surtout en considération le côté pratique du problème. Or, l'arrêté fédéral prévoit l'allocation de subventions aussi bien en faveur de l'enseignement de l'économie domestique que de l'enseignement professionnel de la femme, et ces deux enseignements sont fort souvent donnés dans la même institution subventionnée par la Confédération. Si, en matière de subventions, l'on soumettait maintenant l'enseignement professionnel et l'enseignement de l'économie domestique à des réglementations distinctes découlant de lois différentes, on aboutirait à des complications qui peuvent être évitées par une simple disposition insérée dans la nouvelle loi.

D'après l'article 49 du projet, le montant des subventions fédérales sera fixé, comme sous le régime des arrêtés fédéraux, par le Conseil fédéral dans les limites des crédits annuels votés par l'Assemblée fédérale. Le montant maximum de ces subventions doit toutefois être fixé par la loi. De cette façon, les sommes consacrées ,au développement de la formation professionnelle pourront toujours êtreadaptées aux conditions du moment et à l'état des finances fédérales.

De plus,
on établit ainsi des prescriptions uniformes pour les différentes catégories professionnelles et réalise entre elles un juste équilibre. Il faut relever ici l'importance que présente en particulier le principe posé par l'article 50, suivant lequel les subsides de la Confédération sont destinés à encourager non pas l'enseignement général, mais exclusivement l'enseignement professionnel; il en est de même de la disposition qui prévoit que seul l'enseignement donné par des maîtres compétents donne droit aux subventions, ainsi que de la prescription stipulant qu'il ne sera pas alloué de subventions aux établissements.

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dont l'existence ne répond pas à un besoin. Les sommes qui seront rendues disponibles de ce fait trouveront un meilleur emploi dans les autres établissements.

Afin de donner une idée de la 'portée financière des dispositions de la nouvelle loi, nous rappellerons tout d'ajbord les dépenses que la Confédération faisait jusqu'à maintenant en faveur de l'enseignement professionnel et de l'enseignement ménager. Le budget de 1928 ouvrait un crédit de 7,375,000 francs qui se répartissait de la manière suivante: enseignement industriel 3,101,000 francs, enseignement (commercial 2,744,000 francs et enseignement ménager 1,530,000 francs. Pour l'année prochaine, nous envisageons une dépense de 7,400,000 francs en chiffre rond.

Jusqu'en 1915, les subventions fédérales accordées aux établissements et cours de formation professionnelle, -- à l'exception des écoles de la société des commerçants -- s'élevèrent à 50 pour cent du montant des subventions versées d'autre part, c'est-à-dire au taux maximum prévu par les arrêtés fédéraux. Dès lors ce taux a dû être réduit ©t a été fixé, ces dernières années, à 40 pour cent des subventions versées d'autre part, et, pour les écoles de la société des commerçants, à 50 pour cent des dépenses entrant en ligne de compte. L'état actuel des finances fédérales ne permet pas encore de songer à revenir aux taux maxima d'autrefois, qui entraîneraient une dépensa supplémentaire de 1,700JOOO francs. On peut espérer néanmoins réaliser quelques économies, en apportant à l'organisation existante certaines modifications et en écartant toutes les institutions qui contribuent plutôt à l'enseignement général qu'à l'enseignement professionnel proprement dit. On arrivera ainsi à répondre également daiis la mesura du possible aux voeux exprimés par le « postulat » Berthoud.

En vertu de l'ordonnance du Conseil fédéral du 7 juin 1928 la subvention fédérale se détermine sur la base des dépenses faites pour le matériel collectif d'enseignement et la rétribution du personnel enseignant. La subvention fédérale se calculait auparavant sur la base des subsides versés d'autre part. D'après le projet les subventions aux établissements et aux cours de formation professionnelle ne doivent, pas excéder la moitié des dépenses représentées par les traitements et le matériel général d'enseignement. Ce mode
de calcul n'est pas nouveau. Dès le début, les subventions fédérales allouées aux écoles d'agriculture ont été calculées de cette façon, et les résultats obtenus ont été concluants. L'introduction dans la loi de ce mode de calcul permettra d'obtenir l'unification désirée depuis longtemps pour la fixation des subventions qui seront versées à tous les établissements de formation professionnelle. Il faut remarquer que si l'on voulait appliquer par la suite le taux maximum, il en résulterait pour la Confédé-

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ration un sensible accroissement des dépenses. D'après les comptes des établissements et cours subventionnés jusqu'à présent, on constate, que les dépenses relatives aux traitements du corps enseignant et à l'achat du matériel d'enseignement dépassent de 25 pour cent les allocations versées par les cantons, les communes, les corporations et les particuliers. Mais comme il ne peut être question actuellement d'accorder aux établissements de formation professionnelle des subventions calculées d'après le taux maximum, il n'y a rien là qui doive nous inquiéter. Au contraire, la nossibilité d'augmenter à l'avenir, au moment où la situation se sera modifiée, le taux des subventions sans procéder à une revision de la loi est en somme un fait réjouissant.

Au début, il faut compter que la subvention fédérale subira une augmentation de 2 °/o par rapport aux subsides versés jusqu'à maintenant, ce qui représentera une somme ne dépassant pas les limites normales.

De plus grands efforts devront être faits dorénavant dans le domaine de VinstruGüon du corps enseignant. Cette question a été à maintes reprises discutée aux chambres fédérales et dans les rapports de gestion. Le 8 décembre 1927, M. Wirz, conseiller national, a déposé, un «postulat» ainsi conçu: «Le Conseil fédéral est invité à présenter un rapport sur la question de savoir comment la Confédération pourrait organiser la formation de maîtres capables pour les écoles des arts et métiers». Aussi longtemps que les établissements de formation professionnelle ne posséderont pas un corps enseignant de valeur, les dépenses faites dans ce domaine ne donneront pas les avantages escomptés. Ce «postulat» se justifie donc entièrement, et le projet de loi sur la formation professionnelle doit lui donner satisfaction.

Tandis qu'en matière d'enseignement commercial et d'enseignement ménager, 3 °/o des dépenses de la Confédération peuvent êtrs consacrés à l'instruction du corps enseignant, cette proportion n'atteint pas même 1 °/o dans le domaine de l'enseignement industriel. L'écart était encore plus sensible autrefois. Une série d'institutions de l'enseignement supérieur forment depuis quelques années des maîtres destinés à enseigner les branches commerciales. De même plusieurs établissements cantonaux forment des institutrices appelées à enseigner l'économie
domestique et les travaux manuels dans les institutions d'enseignement ménager. Une importante lacune, qu'il importe de combler, existe donc dans le domaine de la formation projfessionnelle industrielle. En 1908, le département fédéral de l'économie publique adressa aux gouvernements cantonaux une circulaire dans laquelle il attirait leur attention sur cette question, sans qu'il en soit résulté d'ailleurs un progrès appréciable. Le nombre des maîtres nécessaires à l'enseignement industriel est trop peu important pour qu'il soit possible aux cantons d'organiser, en raison des grands frais qui

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en découlent, des cours spéciaux. Si l'on veut réaliser des progrès dans ce domaine, la Confédération doit collaborer à l'oeuvre entreprise.

L'augmentation des dépenses qui en résultera doit être estimée, au début, à 100,000 francs au moins.

D'après les comptes établis par l'union suisse des arts et métiers et la société suisse des commerçants, les examens de fin d'apprentissage coûtent environ 500,000 francs. En outre, la Confédération contribue par une subvention de 26,000 francs aux dépenses occasionnées par les épreuves intermédiaires des apprentis maréchaux ferrants. A ces dépenses s'ajouteront à l'avenir celles provoquées par les visites d'inspection et par les examens professionnels supérieurs. Si dès le début la Confédération prend à sa charge la moitié de ces dépenses, un moins de celles occasionnées par les examens de fin d'apprentissage, il faudra compter avec une subvention d'un peu plus de 300,000 francs, dont 150,000 francs de dépenses nouvelles.

Les subventions fédérales -prévues par la lettre d, qui ne seront du reste accordées que dans certains cas spéciaux, n'entraîneront pas pour la Confédération une forte augmentation des dépenses. Il est prudent néanmoins de prévoir un supplément de 50,000 francs.

Il reste encore à établir le budget des subventions qui seront accordées aux 'institutions d'orientation professionnelle et de carrière, Ce budget dépend avant tout de la question de savoir si et dans quelle mesure les offices locaux d'orientation professionnelle doivent être subventionnés. L'association suisse de conseils d'apprentissage et de protection des apprentis et les signataires du «postulat» Eug-ster-Zust réclament pour ces institutions l'aide des pouvoirs publics. Le département fédéral de l'économie publique a adressé, le 3 octobre 1927, une circulaire aux gouvernements cantonaux, les invitant à faire remplir par les offices d'orientation professionnelle jusqu'à la fin de l'année 1927 les questionnaires qui leur étaient envoyés. D'autres questions ont été posées en même temps aux autorités cantonales. Les réponses n'ont pas apporté les éclaircissements désirés. Il y aura donc lieu de poursusivre la recherche des principes d'après lesquels se déterminerai l'appui à accorder aux institutions d'orientation professionnelle et de carrière, et cette question devra être
résolue par l'ordonnance d'exécution. Quant à la loi, il suffit qu'elle dispose que la Confédération, pourra subventionner ces institutions. Nous envisageons ici qu'el'augmentation des dépenses sera à peu près égale à celle prévue pour l'instruction du corps enseignant.

En résumé, on peut dire que la loi entraînera pour la Confiédération une augmentation de 600,000 francs sur les dépenses effectuées jusqu'à maintenant.

Les indications qui précèdent ne donnent évidemment qu'une idée

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approximative des subventions qui seront allouées en vertu de la loi fédérale. Il se peut, bien entendu, que l'une ou l'autre d'entre elles subisse des modifications. Le résultat dépend du développement que prendront les différentes institutions subventionnées. Le montant des subventions sera fixé par le Conseil fédéral dans les limites des crédits votés chaque année par l'Assemblée fédérale. Le montant maximum est toutefois déterminé par le projet de loi.

IX. Exécution (art. 52 à 54).

Comme on l'a relevé et motivé plus haut (lettre D), l'exécution de la loi incombe aux cantons (art. 52). La tâche de la Confédération se borne à ©dicter les dispositions générales et, en matière d'exécution, les dispositions qu'il importe d'unifier (art. 53). Toutes les autres dispositions d'exécution seront prises par les cantons (art. 52, 2e alinéa).

L'abandon de cette compétence aux cantons évitera de créer un nouveau service administratif de la Confédération. La plupart des cantons pourront s'adapter aux prescriptions de la nouvelle loi sans avoir à modifier leurs services administratifs, tout en demeurant libres d'apporter les changements ou compléments qu'ils jugeront nécessaires pour assurer une plus grande efficacité à la loi. Il sera indiqué, dans de nombreux cas, d'user de la faculté donnée par l'article 52, 2e alinéa, et de désigner comme autorité compétente les commissions d'apprentissage et autres commissions semblables, telles qu'en possèdent déjà la plupart des cantons.

Dans les domaines où la Confédération se réserve le droit d'édieter des dispositions uniformes, les associations professionnelles seront appelées, comme représentantes des intéressés, à collaborer dans une large mesure à leur préparation. Le projet prévoit equ'elles seront au moins consultées dans chaque cas (p. ex. art. 22, 2 al., 23, 2e al.., e e 26. 2 al.. 29, 2 al., 34). Il va même plus loin et stipule que certaines ordonnances ne pourront être rendues que sur la proposition des assoe er e ciations professionnelles (p.

ex.

art.

2, 3 al., 4, 5, 13, 1 et 3 al., 16, 18, 3e al., 24, 2e al., 26, 3e al.). De plus, les articles 33 et 39 et suivants permettent de confier aux associations qui en font la demande l'organisation des examens protégés par la loi. Enfin, l'article 54 renferme une disposition de portée générale prévoyant
que les associations professionnelles doivent être consultées lorsqu'il s'agit de prendre des mesures importantes. Quant au sens dans lequel la loi «emploie le terme d'association professionnelle, voir les autres dispositions de l'article 54 et les explications données sous lettre D, chiffre III.

8?4

X. Dispositions pénales (art. 55 à 57).

En cette matière, les dispositions de l'avant-projet corretepondaient aux articles 88 de la loi sur les fabriques et 11 de la loi sur l'emploi des jeunes gens et des femmes dans les arts et métiers. Par contre, la peine de l'emprisonnement ne pouvait être prononcée qu'en cas de récidive, ce qui n'empêcha pas moins de nombreux mémoires de s'élever contre toute peine privative de liberté. Le projet y a donc renoncé et ne prévoit plus, comme sanction pénale, que l'amende jusqu'à cinq cents francs.

Comme il s'agit d'infractions à des prescriptions d'ordre administratif, la négligence 'est également punissable, conformément, au reste, à l'opinion du Tribunal fédéral (ATP 31, I, 700; 42, I, 39.7; 47, I, 350). Mais il faut le dire expressément lorsque la loi, comme c'est le cas ici, se réfère à la partie générale du code pénal fédéral qui, sauf disposition contraire de la partie spéciale, ne punit que l'acte ou l'omission intentionnel. Quant à la peine, il est de principe constant en droit pénal qu'elle soit plus légère en cas de négligence.

Le maximum de l'amende est donc ramené à cent francs (art. 55, 2o al.).

Dans les cas de peu de gravité, la réprimande peut être substituée à l'amende. Aux termes de l'article 57, la complicité relève des dispositions générales du code pénal fédéral. Les dispositions sur la prescription qui sont contenues à l'article 58 correspondent à celles des lois fédérales semblables. La poursuite et le jugement des infractions incombent aux cantons. En vertu de l'article 155 de la loi du 22 mars 1893 sur l'organisation judiciaire fédérale1), le Conseil fédéral peut ordonner que, durant la période du début, tous les jugements lui soient communiqués. Conformément aux articles 160 et suivants de la même loi, les jugements au fond rendus par les tribunaux cantonaux sont susceptibles de recours en cassation au Tribunal fédéral.

. ' i l , l iv XI. Entrée en vigueur. Abrogation de dispositions antérieures (art. 58 et 59).

On a vu plus haut (D. IV) quels principes sont applicables à la relation entre la nouvelle loi et le droit antérieur et à l'abrogation de dispositions existantes.

L'article 325 du code des obligations ne peut être abrogé. Il doit, au contraire, demeurer applicable aux contrats d'apprentissage conclus dans les professions qui ne sont pas assujetties à la loi (art. 1), De plus, les dispositions du code des obligations s'appliqueront, commei) RO, 13, 457.

825

par le passé, aux contrats passés par des majeurs entrant en apprentissage dans les professions soumises à la loi.

Quant aux lois cantonales sur l'apprentissage, elles demeureront en vigueur, pour le moment, dans la mesure où elles règlent des matières qui ne sont pas traitées par la loi fédérale. Il en sera notamment ainsi des dispositions relatives à la protection des apprentis et des travailleurs. Ces dispositions ne seront abrogées que par l'entrée en vigueur d'une loi fédérale sur la matière, prévue comme troisième partie de la législation sur les arts et métiers.

La loi réglemente, à propos des examens, le droit de porter un titre professionnel dans les professions qui lui sont soumises. Par contre, elle ne pose aucune condition pour l'exercice d'une profession.

Les dispositions de ce genre édictées par les cantons (p. ex. pour les patentes des guides de montagne) demeurent donc en vigueur et il pourra en être établi de nouvelles à la condition qu'elles ne renferment rien de contraire à la liberté du commerce et de l'industrie.

L'entrée en vigueur de la loi fédérale sera fixée de manière à permettre aux cantons de s'adapter aux nouvelles prescriptions. Les dispositions transitoires pourront remettre à plus tard l'entrée en ivigueur de certaines prescriptions. En outre, l'article 58, 2e alinéa, [prévoit expressément que /le Conseil fédéral pourra accorder des dérogations si des circonstances spéciales l'exigent. Il lui sera possible ainsi de retarder, pour certains cantons, l'entrée en vigueur de dispositions données et l'abrogation des dispositions cantonales.

Nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation le projet de loi ci-après.

Berne, le 9 novembre 1928.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, SCHULTHESS.

Le vice-chancelier, LEIMGRUBER.

826

(Projet.)

Loi fédérale sur

la formation professionnelle.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA CONFEDERATO SUISSE, vu l'article 34ter de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 9 novembre 1928,

i

arrête : I. Champ d'application.

Article premier!.

Les dispositions de la présente loi s'appliquent à l'artisanat, au travail à domicile, à l'industrie, à l'industrie hôtelière, au commerce et aux transports. Le champ d'application de la loi peut être délimité d'une façon plus précise par voie d'ordonnance (art. 53). En cas de doute, l'autorité cantonale compétente décide de l'assujettissement à la présente loi (art. 52, 2e al.).

Sauf pour les dispositions réservant la compétence des cantons, la présente loi s'applique également aux établissements fédéraux soumis à la loi fédérale sur le travail dans les fabriques et aux entreprises de transport bénéficiant d'une concession. Le Conseil fédéral est autorisé à assujettir à la présente loi d'autres catégories du personnel fédéral et des entreprises de transport bénéficiant d'une concession.

II. Apprentissage.

Art. 2.

A. Nature del'apEst réputé apprenti au sens de la présente loi et sous réprentissage.

serve des dispositions légales relatives à l'âge minimum d'admission au travail, tout mineur, libéré des écoles primaires, travaillant dans un établissement public ou privé en vue d'apprendre une des professions visées par. la présente loi.

Il n'y a pas apprentissage au sens de la présente loi lorsque le temps consacré à la formation professionnelle ne dépasse pas unie année.

Sur la proposition des associations professionnelles intéressées (art. 54, 2e al. s.), il peut être prescrit, pour certaines professions, que d'autres mineurs, libérés de l'école primaire et occupés régulièrement aux travaux de l'une des professions

827

soumises à la présente loi, seront également considérés comme apprentis s'ils ne prouvent avoir déjà accompli leur apprentissage. Les cantons doivent être consultés au préalable.

Les dispositions de la présente loi demeurent applicables jusqu'à la un de l'apprentissage au mineur devenu majeur, en cours d'apprentissage.

Art. 3.

Droit de receEst seul capable de recevoir des apprentis le chef d'établis- B.voir des apprensement dont on peut être sûr qu'il leur donnera ou fera donner, tis.

1. En général.

dans son établissement, une formation professionnelle suffisante, sans compromettre leur santé ou leur moralité.

L'autorité cantonale compétente (art. 52, 2e al.) déclare incapable de recevoir des apprentis le chef d'établissement qui ne remiplit pas cette condition; l'incapacité est temporaire ou définitive. L'incapacité doit notamment être prononcée lorsque le chef d'établissement ou l'employé chargé de former les apprentis ne possèdent pas les qualités ou les aptitudes professionnelles requises, lorsque les examens de fin d'apprentissage ont démontré que la formation professionnelle donnée aux apprentis de l'établissement était incomplète ou lorsque le chef d'établissement a gravement contrevenu à ses obligations légales.

Art. 4.

Dans les professions où sont organisés des examens de maî- 2. oùProfessions sont orgades exatrise ou autres examens professionnels supérieurs (art. 39 à 47), nises mens de. maîle droit de recevoir des apprentis peut, sur la proposition des trise ou d'auexamens associations professionnelles intéressées, être subordonné, par tres professionnels supévoie d'ordonnance^ à la condition que le chef d'établissement ou rieurs.

remployé chargé de la formation des apprentis ait subi l'examen. Il sera toutefois tenu compte des conditions particulières à certains établissements (fabriques pourvues d'un personnel technique, ateliers d'apprentissage, écoles professionnelles). En outre, l'autorité cantonale compétente peut être autorisée à accorder le droit de recevoir des apprentis dans certains cas, lorsqu'une formation professionnelle suffisante est garantie de quelque autre manière; ce sera notamment le cas pour les établissements qui ne peuvent satisfaire momentanément aux prescriptions de l'ordonnance.

L'ordonnance contiendra les dispositions transitoires nécessaires.

Art. 5.
Limitation Sur la proposition des associations professionnelles intéres- 3. du nombre d'apprentis sées, le nombre maximum d'apprentis qu'un chef d'établissement par établis" sèment.

Feuille fédérale. 80e année. Vol. II.

65

828

est en droit d'avoir simultanément peut être prescrit, par voie d'ordonnance, pour certaines professions. Il s'établit alors proportionnellement au nombre des travailleurs qualifiés occupésdans l'établissement (chef d'établissement, ouvriers et autres employés qui ont obtenu le certificat de capacité prévu par l'article 38).

Dans les professions où la Confédération n'a pas fait usage de cette faculté, le canton peut fixer, en observant les mêmes conditions, le nomère maximum d'apprentis.

Art. 6.

L'apprentissage doit faire l'objet d'un contrat écrit, à moins que l'apprenti ne soit sous la puissance paternelle ou la tutelle du chef d'établissement.

Art. 7.

Le contrat d'apprentissage doit mentionner : a. le nom et la date de naissance de l'apprenti, ainsi que le nom, le domicile et l'adresse de son représentant légal; b. le nom, le domicile et le lieu die travail du chef d'établissement; c. la profession qui fait l'objet de l'apprentissage; d. le commencement et la durée de l'apprentissage et du tempsd'essai; e. la durée du travail, à moins qu'elle ne soit fixée par un règlement de travail approuvé par l'autorité (règlement de fabrique, p. ex.); f. les prestations réciproques des parties (denier d'apprentissage, entretien, salaire, gratification, primes d'assurance, etc.)..

Le contrat d'apprentissage est signé par le chef d'établissement, l'apprenti et le détenteur de la puissance paternelle ou le tuteur avec l'approbation de l'autorité tutélaire. Il est dressé en trois exemplaires au moins; chacune des parties contractantes en conserve un', et le troisième est remis par le chef d'établissement à l'autorité cantonale compétente dans un délai de quatorze jours à compter dé l'expiration du temps d'essai. L'autorité vérifie si le contrat est conforme aux dispositions légales.

C. Conclusion de l'apprentissage.

1. Contrat écrit.

2. Autres modes de conclusion.

a} En raison des rapports personnels.

Art. 8.

Lorsque le chef d'établissement est détenteur de la puissance paternelle ou tuteur, il doit, dans les six semaines qui suivent le commencement de l'apprentissage, donner avis écrit de l'apprentissage à l'autorité cantonale compétente.

829

Art. 9.

Lorsque les conditions prescrites pour, l'apprentissage par l'article 2 sont remplies en fait, l'absence d'un contrat en bonne et due forme ou de l'avis à l'autorité ne dispense pas de l'observation de la présente loi.

6) Violation des prescriptions de forme.

Axt. 10.

des lies dispositions des articles 7 à 9 relatives à l'obligation 8. Portée prescriptions de forme.

de donner avis de l'apprentissage à l'autorité s'appliquent par analogie aux modifications apportées à l'apprentissage. L'obligation d'aviser l'autorité subsiste pendant toute la durée de l'apprentissage.

Art. 11.

Obligations de L'apprenti est tenu d'exécuter les ordres du chef d'établis- D.l'apprenti.

sement ou de l'employé chargé de sa formation professionnelle 1. Pendant l'apet d'accomplir avec zèle et diligence les travaux qui lui sont prentissage.

confiés. .

Il est tenu de suivre les cours professionnels conformément aux dispositions sur la matière (art. 26 s.).

Art. 12.

Vers le terme de l'apprentissage ou à la première occasion après ce terme, l'apprenti doit se présenter aux examens de fin d'apprentissage (art. 32 s.).

En cas d'empêchement, il doit se présenter à l'examen dans le délai d'un an à compter de la cessation de l'empêchement.

Dans des cas spéciaux, l'autorité cantonale compétente peut accorder les exceptions qui lui paraissent équitables.

2. Obligation de se présenter aux examens de fin d'apprentissage.

Aut. 13.

Obligations du Le chef oYétablissement doit faire en sorte que l'apprenti E.chef d'établissement.

soit convenablement formé à tous les travaux essentiels de la 1. Instruction a profession et que les différents stades die l'instruction se suc- donner dans cèdent, autant que possible, dans l'ordre imposé par le but de l'établissement.

l'apprentissage. Les programmes d'apprentissage établis par les associations professionnelles et approuvés par le Conseil fédéral (art. 53, 2e al.) servent de principes directeurs et il ne peut y être dérogé sans de justes motifs.

L'apprenti ne peut être employé à des travaux étrangers à la profession, à moins qu'ils ne soient en corrélation avec l'exercice de la profession et qu'us ne portent pas préjudice à sa formation professionnelle.

830

L'apprenti ne peut être occupé aux pièces que s'il n'en résulte aucun préjudice pour l'apprentissage. Sur la proposition des associations professionnelles intéressées, le travail aux pièces peut, dans certaines professions déterminées, être interdit, par voie d'ordonnance, pendant tout ou partie de l'apprentissage.

Le chef d'établissement qui confie la formation professionnelle de l'apprenti à un tiers est garant que ce tiers possède les qualités professionnelles et personnelles requises et qu'il instruit l'apprenti de la façon prescrite.

L'apprenti ne peut être employé chez un autre chef d'établissement qu'avec l'assentiment de son représentant légal.

Art. 14.

'i. Obligations concernant les cours professionnels et les examens de fin d'apprentissage.

Le chef d'établissement doit astreindre l'apprenti à suivre les cours professionnels et lui accorder, à cet effet, le temps nécessaire.

Il doit inscrire l'apprenti aux examens prescrits par la loi, lui donner le temps de s'y présenter et, dans la mesure du possible, mettre à sa disposition, contre remboursement du prix de revient, le matériel, les outils et le local nécessaires aux travaux d'épreuve.

Art. 15.

3. Responsabilité en raison d'instruction incomplète.

Si l'examen démontre que l'instruction donnée au cours de l'apprentissage était incomplète, le chef d'établissement est tenu de réparer le dommage, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable.

Le montant des dommages-intérêts est fixé par la commission d'examen d'après la durée du complément d'apprentissage nécessaire; le recours au juge demeure réservé.

L'obligation de réparer le dommage subsiste même si l'apprenti ne fait pas d'apprentissage complémentaire.

Art. 16.

F. Durée de l'apSur la proposition des associations professionnelles intéresprentissage.

sées, des dispositions générales peuvent être édictées, par voie d'ordonnance, au sujet de la durée normale de l'apprentissage dians une profession. Il y a lieu de tenir compte des conditions particulières à certains établissements et des connaissances préliminaires possédées par l'apprenti. Le canton doit être consulté au préalable.

831

Art. 17.

Les anatre premières semaines de l'apprentissage sont considérées comme un temps d'essai pendant lequel chacune des parties peut se dégager moyennant un avertissement de trois jours au moins.

La durée du temps d'essai peut être prolongée jusqu'à trois mois par le contrat d'apprentissage ou par un contrat-type d'apprentissage (CO, art. 324).

Elle peut, avec l'assentiment de l'autorité cantonale compétente, être prolongée avant d'arriver à terme. Toutefois, la durée totale du temps d'essai ne peut, en aucun cas, excéder six mois.

Art. 18.

G. Temps d'essai.

Surveillance de L'autorité cantonale compétente doit convenablement s'as- H.l'apprentissage.

surer, au moyen d'experts visiteurs, que l'instruction est donnée d'une manière judicieuse et conforme aux exigences techniques, que l'apprenti fait preuve des aptitudes requises et que le résultat obtenu répond à l'attente; cette inspection doit avoir lieu après l'expiration du temps d'essai, en règle générale six mois au plus tôt après le commencement de l'apprentissage, mais, si possible, dans la première moitié. L'autorité compétente peut y renoncer lorsque les examens de fin d'apprentissage ont démontré que l'établissement offrait toute garantie quant à l'instruction de ses apprentis.

Le secret des affaires doit être respecté tout particulièremeint.

Dans les professions qui ont institué des examens intermédiaires, ces examens peuvent, sur la proposition des associations professionnelles intéressées, être prescrits, par voie d'ordonnance, en lieu et place des visites d'experts.

Art. 19.

J. Fin de l'apprenL'apprentissage prend fin : tissage.

1. Extinction.

a. à l'expiration de sa durée légale ou contractuelle; b. paï la réalisation d'une condition résolutoire prévue par le contrat; c. par la mort de l'apprenti; d. par la fermeture de l'établissement; e. par une manifestation concordante de volonté des deux parties, moyennant observation des conditions de forme prescrites pour la conclusion diu contrat.

832

Art. 20.

2. Résiliation pour de justes motifs.

K. Dispositions complémentaires.

L. Apprentissage fait dans les »teli ers d'aprentissage et la écoles professionnelles.

R

En outre, le chef d'établissement ou l'apprenti, dûment autorisé par son représentant légal ou l'autorité cantonale compétente, peuvent, pour de justes motifs, résilier l'apprentissage, immédiatement ou dans les quatre semaines, moyennant un avertissement donné par écrit. Le canton peut prescrire une tentative officielle de conciliation précédant la résiliation de l'apprentissage.

Sont considérées, en particulier, comme de justes motifs les circonstances suivantes : a. pour le chef d'établissement : lorsque l'apprenti manque des dispositions physiques ou intellectuelles indispensables à l'exercice de la profession, ou lorsqu'il viole gravement ou à réitérées reprises ses obligations légales ou contractuelles; b. pour l'apprenti et son représentant légal : lorsqu'il n'existe aucune garantie que l'instruction soit donnée intelligemment et conformément aux exigences de la profession, lorsque le chef d'établissement viole gravement ou à réitérées reprises ses obligations légales ou contractuelles, lorsque se réalise une des conditions qui pourraient entraîner la déchéance du droit de prendre des apprentis, lorsque, par suite de faillite, de cessation imminente des affaires ou pour d'autres motifs, l'établissement n'est pas en état de m'ener l'apprentissage à chef, lorsque l'apprentissage doit être interrompu pour un temps prolongé ou ne peut être poursuivi que dans des conditions essentiellement différentes de celles du début; c. pour l'autorité compétente : lorsqu'il apparaît que le résultat de l'apprentissage sera compromis par l'une des circonstances mentionnées sous lettres a et b ci-dessus.

Art. 21.

Les dispositions relatives au contrat d'apprentissage et les dispositions générales du code des obligations sont applicables en l'absence de dispositions contraires de la présente loi.

Ar;t. 22.

Les dispositions des articles 2 à 21 s'appliquent par analogie à l'apprentissage fait dans les ateliers d'apprentissage et les écoles professionnelles.

833

Des dispositions spéciales concernant les écoles professionnelles qui déploient une activité industrielle peuvent être édictées par vole d'ordonnance. Les cantons et les associations professionnelles intéressées doivent être consultés au préalable.

III. Formation professionnelle acquise sans apprentissage régulier.

Art. 23.

Quiconque a été formé aux travaux de l'une des professions relevant de l'article 2 pendant une période représentant au moins le double du temps imposé ou consacré habituellement à l'apprentissage de la profession, et a suivi l'enseignement professionnel conformément aux dispositions applicables aux apprentis de la profession, ou établit avoir acquis, de quelque autre manière, les connaissances nécessaires à l'exercice de la profession, doit, si les circonstances le justifient, être admis à se présenter aux examens de fin d'apprentissage au même titre que les apprentis. Entrent spécialement en ligne de compte les bons ouvriers et employés qui n'ont pu faire un apprentissage pendant leur: minorité.

Des dispositions plus détaillées sur l'admission1 aux examens peuvent être édictées, par voie d'ordonnance, pour certaines professions. Les associations professionnelles intéressées doivent être consultées au préalable.

IV. Cours de préapprentissage.

Art. 24.

Des cours de préapprentissage peuvent être institués pour A ·servir d'introduction à certaines professions ou certains groupes de professions. Ces cours doivent être placés sous une direction experte.

Sur; la proposition des associations professionnelles intéressées, la fréquentation des cours de préapprentissage peut, par voie d'ordonnance, être déclarée obligatoire pour les apprentis de la profession ou tous autres mineurs qui y sont employés. Il sera tenu compte des conditions particulières des endroits reculés, soit par l'octroi de facilités spéciales, telles que remboursement des frais de voyage et d'entretien personnel, organisation die cours ambulants, etc., soit sous la forme de dispense des cours.

Organisation.

834

B. Imputation sur le temps d'apprentissage.

A. Enseignement obligatoire.

!. Organisation de l'enseignement.

Art. 25.

En règle générale, le cours de préapprentissage doit être imputé sur le temps d'apprentissage.

Lorsque l'apprenti suit le cours de préapprentissage avant de commencer l'apprentissage dans l'établissement, la durée du cours et les quatre semaines qui le suivent sont considérées comme temps d'essai. Celui-ci peut être prolongé conformément à l'article 17, 2e et 3B alinéas, sans toutefois que soient dépassées les limites fixées par ledit article, y compris le cours de préapprentissage.

V. Enseignement professionnel.

Art. 26.

Tout mineur faisant l'apprentissage d'une des professions soumises à la présente loi est tenu de fréquenter régulièrement une école professionnelle conformément au programme d'études établi pour sa profession.

Le nombre annuel des heures consacrées à l'étudié des branches obligatoires d'une profession peut être fixé d'une manière uniform© par voie d'ordonnance. Les associations professionnelles intéressées doivent être consultées au préalable.

Sur la proposition de ces associations, certains cours spéciaux peuvent, par voie d'ordonnance, être déclarés obligatoires en lieu et place de l'école professionnelle.

L'autorité cantonale compétente dispense de suivre l'enseignement obligatoire : a. quiconque suit les cours d'une école équivalente ou supérieure; 6. quiconque justifie de connaissances professionnelles équivalentes ou supérieures; c. quiconque se trouve trop éloigné de l'endroit où se donne l'enseignement pour pouvoir être astreint à Le suivre, à moins que des mesures spéciales ne lui en facilitent l'accès; d. quiconque est hors d'état de suivre l'enseignement par suite d'une infirmité physique ou d'inintelligence.

Art. 27.

L'organisation de l'enseignement professionnel dans le cadre de la présente loi incombe aux cantons.

Les cantons doivent faire en sorte que les apprentis des établissements sis sur leur territoire puissent suivre l'ensei-

835

gnement, obligatoire et, à cet effet, instituer des écoles et des cours professionnels ou faciliter la fréquentation des écoles et cours du dehors. Ils ne sont pas tenus de prendre des mesures qui entraîneraient des frais disproportionnés.

Les élèves doivent être groupés par professions. Les classes peuvent être réunies pour l'enseignement des branches communes.

Art. 28.

Obligation de Outre les apprentis mentionnés à l'article 26, quiconque a 'C.recevoir les élèves.

été formé (art. 23), pendant un an au moins, à l'une des professions relevant de l'article 2, doit être admis à l'enseignement.

Art. 29.

L'enseignement obligatoire doit être donné par des maîtres compétents.

Des dispositions spéciales déterminant les qualités requises du corps enseignant peuvent être édictées par voie d'ordonnance. Les cantons et les associations professionnelles intéïessées doivent être consultés au préalable.

Art. 30.

Les programmes d'études doivent être adaptés aux différentes professions et approuvés par l'autorité cantonale compétente.

Les programmes des cours professionnels in ter cantonaux sont soumis à l'approbation du Conseil fédéral.

D. Corps enseignant.

E. Programmes d'études.

Art. 31.

Horaires L'enseignement obligatoire ne doit être donné ni le diman- F.leçons.

che et autres jours fériés, ni après 20 heures.

L'horaire des leçons doit tenir compte des besoins des établissements.

des

TI. Examen de fin d'apprentissage.

Atf. 32.

Sous réserve des dispositions qui suivent, l'organisation des examens de fin d'apprentissage incombe aux cantons.

A. Organisation par les cantons

Art. 33.

Toute association professionnelle peut être autorisée, à sa demande, par le Conseil fédéral à organiser des examens de fin d'apprentissage pour les apprentis qui la concernent.

B. Organisation par les associations professionnelles.

836

L'association doit en, établir le règlement et le soumettre à l'approbation' du Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral et l'autorité compétente du canton où a lieu l'examen peuvent se faire représenter, chacun par un expert, dans la commission d'examen.

Art. 34.

C. Examens finaux des ateliers d'apprentissage et des écoles professionnelles.

Le Conseil fédéral peut accorder l'équivalence aux examens finaux d'un atelier d'apprentissage ou d'une école professionnelle si la proposition en est faite par l'autorité compétente du canton où l'établissement a son siège. Les associations professionnelles intéressées doivent être consultées au préalable.

Art. 35.

D. Admission aux examens.

Outre les apprentis (art. 12), les personnes formées à une profession conformément à l'article 23 doivent être admises à l'examen de fin d'apprentissage.

Les candidats sont admis à l'examen au lieu où ils travaillent- ou, s'ils ne travaillent pas, à leur domicile.

Il n'est perçu aucun droit d'examen. A moins qu'il n'e soit défrayé par le canton, le candidat supporte lui-même ses dépenses personnelles.

Art. 36.

E. Qualités requises.

L'examen de fin d'apprentissage est destiné à établir si le candidat possède les capacités et connaissances nécessaires à l'exercice de sa profession.

Des dispositions uniformes fixant le minimum exigé pour les diverses professions peuvent être édictées par voie d'ordonnance. Les associations professionnelles intéressées doivent être invitées à présenter leurs propositions. A moins qu'il ne s'agisse d'examens institués par l'association professionnelle conformément à l'article 33, ces propositions doivent être soumises à l'avis des cantons.

F. Certificat de capacité.

Art. 37.

Le candidat qui a passé avec succès l'examen de fin d'apprentissage reçoit un certificat de capacité. Celui-ci est délivré par l'autorité cantonale compétente. Si le candidat n'a pas encore terminé son apprentissage, le certificat ne lui est remis qu'à la fin de celui-ci.

837

L'apprenti qui a obtenu un certificat de capacité peut toujours réclamer au chef d'établissement le certificat prévu par l'article 342 du code des obligations.

Le candidat qui échoue peut réclamer à la commission d'examen un certificat portant sur les résultats obtenus dans les différentes branches. Il est en droit de se présenter à un second examen six mois au plus tôt après le premier.

Art. 38.

Protection du Le certificat de capacité confère le titre d'ouvrier ou em- G.certificat de ployé qualifié (mécanicien qualifié, serrurier qualifié, menuisier capacité.

qualifié, tailleur qualifié, couturière qualifiée, employé de commerce qualifié, etc.). Quiconque s'intitule ouvrier ou employé qualifié sans avoir un certificat de capacité est punissable et ïépond, en vertu des règles du code des obligations, de tout dommiage pouvant en résulter pour autrui.

Les dispositions transitoires seront édictées par voie d'ordonnance.

Demeure réservé le droit de l'autorité cantonale compétente de délivrer un certificat de capacité dans les cas prévus par l'article 12, 2e alinéa, dernière phrase.

Le Conseil fédéral peut assimiler au certificat de capacité prévu par la présente loi une attestation de capacité délivrée à l'étranger.

YII. Examens professionnels supérieurs.

Art. 39.

Organisation Les associations professionnelles peuvent organiser, sous A.par les associations réserve des conditions suivantes, des examens de maîtrise léga- sionnelles.profeslement reconnus ou d'autres examens professionnels supérieurs.

Art. 40.

L'association qui entend organiser ces examens pour sa pro- B. Approbation.

fession doit en établir le règlement et le soumettre à l'approbation du Conseil fédéral.

Les autres personnes appartenant à la profession devront avoir l'occasion de donner leur avis avant que l'approbation ne soit donnée. Les conditions requises pour l'approbation seront déterminées par voie d'ordonnance.

Les dispositions du présent article s'appliquent par analogie aux modifications du règlement. La proposition d'abroger le

838

règlement peut aussi émaner de personnes appartenant à la profession mais ne faisant pas partie de l'association.

Art. 41.

r. Admission Peut être admis aux examens tout citoyen suisse jouissant aux examens.

de la plénitude de ses droits, porteur du certificat de capacité ou d'une attestation reconnue équivalente (art. 37 et 38) et ayant exercé la profession durant au moins trois ans depuis la fin de son apprentissage.

Les étrangers jouissent de l'égalité de traitement, à moins que l'Etat auquel ils ressortissent' n'accorde pas la même protection aux citoyens suisses. Des dispositions plus détaillées pourront être édictées par voie d'ordonnance.

Des dérogations aux dispositions ci-dessus peuvent être prévues par1 le règlement si'elles se justifient par la nature de l'examen .

Art. 42.

î). Commission Le règlement doit contenir toutes dispositions utiles sur la d'examen.

cccmiposition de la commission d'examen.

Le Conseil fédéral délègue à l'examen des experts choisis, en règle générale, dans les milieux appartenant à la profession intéressée ou parmi les spécialistes des questions professionnelles.

Art. 43.

K. Qualités reLe règlement doit contenir toutes dispositions utiles sur les quises du candidat.

qualités requises du candidat.

L'examen de maîtrise est destiné à établir si le candidat possède les capacités et connaissances requises pour exercer sa, profession d'une façon indépendante. L'examen porte en première ligne sur les capacités pratiques. Il s'étend en outre au calcul du prix de revient, à la comptabilité et à la connaissance de la profession.

Art. 44.

F. Organisation Le Conseil fédéral peut, avec l'accord des associations prodes examens par les ateliers fessionnelles intéressées, autoriser des ateliers d'apprentissage d'apprentissage et les écoles ou des écoles professionnelles à organiser des examens profesprofessionsionnels supérieurs conformément aux articles 40 à 43.

nelles.

ï. Diplôme.

Art. 45.

Le candidat qui a subi l'examen avec succès reçoit un diplôme signé par le président de la commission d'examen et par, l'expert fédéral. Celui-ci a le droit et le devoir' de s'opposer à

839

la remise du diplôme lorsque les travaux du candidat ne garantissent pas qu'il possède les capacités et connaissances prévues par le régleraient.

La form;e du diplôme est réglée'par voie d'ordonnance.

En cas de réclamation, le Conseil fédéral ou le service désigné par lui décide en dernier ressort.

Art. 46.

Protection du Sur la proposition de l'association professionnelle, le droit H.diplôme.

de porter; un t'itre peut être réservé au diplômé. Le titre doit 1. Protection du être spécifié dans le règlement soumis à l'approbation du Con- titre.

seil fédéral conformément à l'article 40. Il peut consister en particulier dans la mention de « diplômé » ajoutée à la désignation de la profession (comptable diplômé, appareilleur diplômé, etc.) ou, lorsque les cqtiditions de l'article 43, 2e alinéa, sont remplies, dans le terme de « maître » précédant la désignation' de la profession (maître menuisier, maître tailleur, etc.).

Quiconque porte le titre sans être en possession du diplôme est punissable et répond, en vertu des règles du code des obligations, de tout dommage pouvant en résulter pour autrui. Le règlement prévoira les dispositions transitoires utiles.

Demeure autorisé le port de titres à l'intérieur d'un établissement et sur instruction de la direction.

Le Conseil fédéral peut assimiler au diplôme une attestation de capacité délivrée à l'étranger.

Art. 47.

Les noms des maîtres diplômés soïnt publiés et classés par profession dans un registre qui peut être librement consulté.

Les dispositions relatives à la tenue du registre seront édictées par voie d'ordonnance.

2. Publication et enregistrement.

VICE. Subventions fédérales.

Art. 48.

La Confédération encourage la formation professionnelle en A.

allouant des subventions : a. aux établissements et cours publics ou d'utilité publique qui contribuent à la formation professionnelle visée par la présente loi, y compris les cours de préapprentissage, les cours de fééducatio'n professionnelle, les cours de maîtrise et autres cours professionnels supérieurs;

Bénéficiaires.

840

b. aux cours destinés au corps enseignant de ces établissements et cours; c. aux examens institués conformément aux prescriptions légales; d. dans certains cas spéciaux, à d'autres mesures prises en faveur de la formation professionnelle, par exemple : indemnités de voyage et d'entretien personnel versées aux élèves de cours professionnels donnant aux participants une formation qu'ils ne pourraient pas' acquérir d'une autre façon', bourses allouées aux ressortissants suisses entrés en apprentissage dans les professions où il y a pénurie d'apprentis et aux participants aux cours de rééducation professionnelle, subsides accordés à la publication' de revues professionnelles par les associations professionnelles; e. aux institutions d'orientation professionnelle et de carrière.

Art. 49.

B. Montant des subventions.

Le Conseil fédéral fixe le montant des subventions dans les limites suivantes : a. Les subventions allouées aux établissements de formation professionnelle et aux cours ne doivent pas excéder la moitié des dépenses représentées par les traitements et le matériel général d'enseignement. Il sera tenu spécialement compte, dans cette limite, des cours relatifs aux professions où il y a pénurie d'apprentis.

b. Les subventions allouées en) faveur de l'instruction du personnel enseignant et de son perfectionnement peuvent être égales au montant intégral des dépenses qui ne sont pas couvertes par d'autres ressources.

c. Les subventions allouées en faveur des examens peuvent atteindre la moitié des dépenses qu'ils entraînent.

d. Les subventions consistant en participation aux indemnités de voyage et d'entretien personnel et aux bourses allouées aux apprentis ne doivent pas excéder le tiers du montant représenté par ces indemnités et bourses; les subventions accordées aux revues professionnelles peuvent atteindre la moitié des dépenses non couvertes par d'autres contributions et celles allouées en faveur d'autres mesures le tiers dje ces dépenses.

e. Les subventions allouées aux institutions d'orientation professionnelle et de carrière peuvent s'élever au tiers des dépenses qui ne sont pas couvertes par les droits perçus et lèsrecettes d'exploitation.

841

Art. 50.

Les conditions auxquelles est subordonnée l'allocation des C. Conditions.

subventions seront déterminées par. voie d'ordonnance.

L'ordonnance s'inspirera du principe que les subsides de la Confédération ne sont pas destinés à encourager l'instruction générale, mais la formation professionnelle donnée par des maîtres compétents.

Les établissements et cours prévus par l'article 48, lettre a, ne doivent être mis au bénéfice des subventions que s'ils reçoivent, moyennant une indemnité équitable, les élèves des autres cantons et communes aux mêmes conditions que ceux de la localité.

Il ne sera pas alloué de subvention à ces établissements si leur existence ne répond pas à un besoin.

Le Conseil fédéral exerce la haute surveillance sur les institutions subventionnées par la Confédération.

Art. 51.

Subventions à, La Confédération alloue également des subventions en fa- D.l'enseignement ménager.

veur de l'enseignement ménager; les articles 49 et 50 leur sont applicables.

IX. Exécution.

Art. 52.

par Les cantons sont chargés de l'exécution de la présente loi A.lesExécution cantons.

dans le cadre des dispositions fédérales.

Ils édictent les dispositions d'exécution1 et désignent les autorités compétentes. Peuvent être désignées comme autorités cantonales compétentes les commissions d'apprentissage ou autres commissions analogues qui, en règle générale, doivent comprendre, à côté d'employeurs et de travailleurs en activité, des représentants de l'orientation; et de l'enseignement professionnels.

Art. 53.

Tâches de la Le Conseil fédéral exerce la haute surveillance sur l'exécu- B.Confédération.

tion de la loi. Il édicté, au besoin, des dispositions uniformes d'exécution, ainsi que les ordonnances prévues par la présente loi.

Il peut consulter des experts et déléguer certaines de ses attributions à des services officiels ou à des commissions spéciales comprenant en règle générale, à côté d'employeurs et de travailleurs en activité, des représentants de l'orientation et de l'enseignement professionnels.

842

C. Collaboration des associations professionnelles.

A. Peines et actes punissables.

Art.'54.

Lorsqu'il s'agit de mesures importantes, les associations professionnelles intéressées doivent être entendues au préalable.

Sont considérées comme associations professionnelles au sens de la présente loi des associations intéressées des employeurs et des travailleurs.

Les dispositions sur la formation professionnelle prévues par des règlements professionnels d'associations communes, ou adoptées, d'un commun accord, par les associations des employeurs et des travailleurs, seront applicables, en première ligne, pour l'élaboration des ordonnances prévues par la présente loi.

Lorsqu'il existe des associations distinctes d'employeurs et de travailleurs, le droit de proposition reconnu par la présente loi n^èst pas subordonné, en principe, à leur accord commun.

Cependant, toutes les associations intéressées doivent être, chaque fois, consultées avant l'adoption de l'ordonnance.

Lorsqu'il n'existe pas d'association ouverte aux personnes appartenant à une profession donnée, le droit de proposition!

appartient individuellement à chacune d'elles.

Les conditions relatives à l'exercice du droit de proposition et la procédure applicable à l'approbation des propositions sejpont déterminées par voie d'ordonnance.

X. Dispositions pénales.

Art. 55.

Est passible d'une amende de cinq à cinq cents francs : a. le chef d'établissement qui reçoit indûment des apprentis (art. 3 à 5), qui ne remet pas à l'autorité compétente un contrat d'apprentissage établi en bonne et due forme ou ne lui donne pas avis de l'apprentissage (art. 6 à 10); b. l'apprenti qui n'obtempère pas aux ordres du chef d'établissement ou de l'employé chargé de sa formation professionnelle, ou qui, bien qu'averti par l'autorité scolaire ou le directeur du cours, continue à manquer, sans excuse, renseignement obligatoire, ou qui trouble les leçons intentionnellement et à réitérées reprises, ou qui, sans excuse valable, n'e se présente pas aux examens (art. 11 et 12); c. le chef d'établissement qui ne remplit pas ses obligations légales ou n'accorde pas à l'apprenti le temps nécessaire pour suivre l'enseignemient obligatoire et se présenter aux etxam'ens (art. 13 et 14);

843

d. quiconque s'intitule ouvrier ou employé qualifié sans être porteur, du certificat de capacité (art. 38); e. quiconque s'intitule maître diplômé sans être porteur du diplôme de maître ou porte indûment quelque autre titre protégé par. la loi (art. 46).

Si le délinquant a agi par négligence, l'amende sera de cent francs au Maximum.

Dans les cas de peu de gravité, la réprimande peut être substituée à l'amende.

Art. 56.

Les contraventions se prescrivent par six mois. Toutefois, s'il s'agit d'un acte punissable soumis par le droit pénal cantonal à une prescription de plus lonigue durée, cette prescription s'applique aux contraventions à la présente loi.

La peine se prescrit par un an à .ootnlpter du jour où le jugement a été rendu.

B. Prescription.

Art. 57.

Au surplus, les dispositions générales du code pénal fédéral sont applicables.

La poursuite des contraventions incombe aux cantons.

C. Dispositions complémentaires.

XI. Entrée en Yigueur, abrogation de dispositions antérieures.

Art. 58.

Le Conseil fédéral fixera la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Il peut accorder, par la voie des dispositions transitoires, des dérogations si des circonstances spéciales l'exigent et même retarder, d'une manière générale, l'entrée en vigueur de certaines dispositions.

A.. Entrée en vigueur et dispositions transitoires.

Art. 59.

Sont abrogés à partir de l'entrée en vigueur de la présente loi ou des dispositions correspondantes de la présente loi : l'arFeuille fédérale. 80e année. Vol. II.

66

B. Abrogation.

844

ticle 77 de la loi fédérale du 18 juin 19141) sur le travail dans les fabriques, les arrêtés fédéraux du 27 juin 18842) concernant l'enseignement professionnel, du 15 avril 1891 3) concernant l'encouragement de l'enseignement commercial et du 20 décembre 18954)concernatt l'enseignement de l'économie domestique et l'instruction professionnelle à donner à la femme, ainsi que les dispositions du droit cantonal sur les matières visées par la présente loi.

!) Voir RO 30, 539.

A ) > > 7, 554.

3 ) » » 12, 135.

4 ) » » 15, 461.

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui du projet de loi fédérale sur la formation professionnelle. (Du 9 novembre 1928.)

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Foglio federale

Jahr

1928

Année Anno Band

2

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46

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2345

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

14.11.1928

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