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Feuille Fédérale Berne, le 26 janvier 1967

119e année

Volume I

N°4 Parait, en règle générale, chaque semaine. Prix: 36 francs par an: 20 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

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9605 Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le projet d'une loi fédérale sur l'imposition du tabac (Du 10 janvier 1967) Monsieur le Président et Messieurs,

Nous avons l'honneur de vous soumettre un message avec projet de loi relatif à l'imposition du tabac. Cette loi est destinée à remplacer le chapitre IV de la IIe partie de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants.

I. INTRODUCTION 1. Réglementation actuelle Aux termes de l'article 34quater de la constitution, la Confédération affecte à Fassurance-vieillesse et survivants le produit total de l'imposition du tabac.

Selon l'article 41 bis, lettre c, de la constitution, elle peut percevoir des impôts sur le.tabac brut et manufacturé. Ainsi, le tabac est désigné expressément comme objet fiscal au profit de l'assurance-vieillesse et survivants.

Jusqu'au 1er novembre 1933, seuls les tabacs bruts et manufacturés, étrangers, faisaient l'objet d'une imposition ; ils étaient imposés au moment de l'importation, sous la forme d'un dédouanement aux taux du tarif des douanes.

Les tabacs manufacturés, fabriqués en Suisse à base de tabac brut étranger, n'étaient grevés que du droit de douane sur cette matière brute; le tabac brut suisse n'était pas imposé.

La situation financière de la Confédération au début de la décennie 19301940 obligea l'autorité fédérale à trouver de nouvelles ressources. Se fondant sur les dispositions extraordinaires en vigueur à l'époque (AF du 13 octobre 1933 concernant les mesures extraordinaires et temporaires destinées à rétablir l'équilibre des finances fédérales, prorogé dans la suite), le Conseil fédéral institua une taxe de fabrication sur les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse (ACF du 27 octobre 1933; RO 49, 887), taxe qui vint s'ajouter aux redevances d'entrée.

Feuille fédérale, 119° année .Vol. I.

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Une réglementation légale proprement dite n'intervint toutefois que par l'institution de l'assurance-vieillesse et survivants (LF du 20 décembre 1946; RS 8, 451). Les anciennes dispositions régissant l'imposition du tabac furent regroupées sous la forme du chapitre IV de la IIe partie («La couverture financière») de ladite loi (cf. les commentaires dans le message du 29 mai 1946, relatif à un projet de loi fédérale concernant le financement, au moyen de fonds publics, de l'assurance-vieillesse et survivants, FF 1946, II, 579, notamment 603 s.). Ces dispositions n'ont pas subi de modification fondamentales jusqu'à ce jour.

L'imposition du tabac consiste donc en la perception des trois redevances suivantes (art. 113 LAVS): a. Le droit d'entrée sur les tabacs bruts et les déchets de tabacs, importés, ainsi que sur les tabacs fabriqués, importés; b. La taxe de fabrication sur tous les tabacs manufacturés en Suisse; c. La taxe sur les cigarettes fabriquées non industriellement en Suisse, sur la base du papier à cigarettes importé ou produit dans le pays, qui a servi à leur fabrication.

Les droits de douane sont énumérés dans une annexe de la loi susmentionnée.

Lors de la revision de 1959 du tarif des douanes, il fut prévu à l'article 11, chiffre I, de la loi du 19 juin 1959 sur le tarif des douanes (RO 1959, 1397) que cette annexe recevrait la teneur du 24e chapitre du tarif général faisant partie intégrante de la loi sur le tarif des douanes. Cela découlait de l'adhésion de la Suisse à la convention du 15 décembre 1950/ 1er juillet 1955 sur la nomenclature pour la classification des marchandises dans les tarifs douaniers (RO 1960, 309), dont le schéma de nomenclature fixe, au chapitre 24, la base pour la classification du tabac. Ce schéma ayant été inséré dans le nouveau tarif des douanes suisses, il a fallu adapter en conséquence le dédouanement du tabac et des tabacs manufacturés. Les taux demeurèrent inchangés. Les droits de douane frappant le tabac brut sont échelonnés suivant l'utilisation du tabac: fabrication de cigares, de tabac pour la pipe, de tabac filé (tabac en rouleaux et tabac à mâcher) et tabac à priser, ainsi que de cigarettes et de tabac à cigarettes. Les tabacs bruts destinés à la fabrication de cigares sont, à leur tour, subdivisés d'après les «sortes», c'est-à-dire que les tabacs
de qualité supérieure servant à la fabrication des «couvertures» sont frappés des taux les plus élevés. En ce qui concerne les tabacs fabriqués, le droit de douane grevant le tabac à cigarettes et le tabac pour la pipe, coupé, ainsi que les cigares et les cigarettes, varie selon qu'il s'agit ou non de produits en emballages pour la vente au détail. En outre, le taux applicable aux cigarettes varie suivant le poids par pièce.

La taxe de fabrication fait l'objet des articles 118 à 127 de la loi sur l'assurance vieillesse et survivants. Pour les cigares, le tabac pour la pipe, le tabac en rouleaux, le tabac à mâcher, le tabac à priser et le tabac à cigarettes, la taxe est calculée d'après le poids effectif de la totalité de la manière brute mise en oeuvre

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à l'état sec. Quant aux cigarettes, elles sont taxées d'après le nombre de pièces et le poids des cigarettes finies. L'article 127,1er alinéa, lettre b, de la loi prévoit, en faveur des petites et moyennes entreprises, des réductions de la taxe de fabrication afin de permettre à ces entreprises d'affronter la concurrence des grandes entreprises (cf. art. 49 et 50 de l'ordonnance du 30 décembre 1947, réglant l'imposition du tabac, RS 6, 232; voir aussi chap. «Réductions» ciaprès). D'autres mesures sont venues se greffer sur cette mesure de politique artisanale: en faveur du tabac indigène, réduction des taux des taxes sur les cigarettes des catégories inférieures de prix, pour la fabrication desquelles on utilise au moins 50 pour cent de tabac indigène; réduction des taux des taxes sur les cigarettes fabriquées encore à la main ou emballées à la main. D'autre part, les articles 49 4e alinéa et 50 7e alinéa de l'ordonnance susmentionnée disposent que les réductions de la taxe de fabrication sur le tabac coupé et filé (tabac pour la pipe), ainsi que sur les cigarettes, ne sont pas accordées aux entreprises inscrites après le 15 novembre 1937 seulement dans le registre des fabricants de tabac coupé et de tabac filé ou dans celui des fabricants de cigarettes, ou qui ont été créées après le 15 novembre 1937 par fractionnement d'une entreprise. En outre, les fabriques de cigarettes qui ont changé de propriétaire après le 1er janvier 1939, à la suite de circonstances autres que l'héritage légal, ne bénéficient pas de la réduction pour la part qui dépasse de plus de 100 pour cent la production moyenne des années 1934 à 1938; font exception les entreprises dont la production annuelle n'est pas supérieure à 40 millions de pièces.

L'institution d'une taxe sur les papiers à cigarettes devint une nécessité du fait que, par suite de la forte imposition des tabacs manufacturés, nombre de fumeurs s'étaient mis à «rouler» leurs cigarettes eux-mêmes. Cette taxe est perçue au moyen de banderoles (art. 128 à 136 LAVS). A l'heure actuelle, la taxe sur les papiers à cigarettes ne revêt pas une grande importance sur le plan fiscal.

L'imposition du tabac sur la base de la loi sur l'assurance vieillesse et survivant s'est traduite par les recettes nettes suivantes en faveur de l'assurance : Fr.

1946 1950 1955 1960 1961

76 156 229 116445364 127604617 197328345 196 692 376

Fr.

1962 1963 1964 1965

217 971 722 243736249 256179519 303942570

Les contributions annuelles des pouvoirs publics en faveur de l'assurance s'élevaient, jusqu'à l'entrée en vigueur de la dernière revision (1er janvier 1964) à 160 millions de francs, dont 2/3, soit 106,7 millions de francs, étaient à la charge de la Confédération. Or, les recettes tirées de l'imposition du tabac, jointes à la part de la Confédération sur l'imposition des eaux-de-vie, permirent de constituer des réserves sensiblement supérieures aux contributions annuelles, réserves qui, le 31 décembre 1965, se montaient à 1 222 718 814 francs (provision AVS I, rubr. 318.01 du compte d'Etat). A partir de 1964, la contribution

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annuelle à la charge de Ja Confédération fut portée à 262 500 000 francs.

Vient s'y ajouter à partir du 1er janvier 1966, ainsi que nous le mentionnons ci-après, une contribution aux prestations complémentaires de l'assurancevieillesse et survivants et de l'assurance-invalidité, contribution qui doit, . elle aussi, être tirée de l'imposition du tabac. Or, les recettes actuelles ne parviennent plus à financer cette contribution supplémentaire, qui se monte provisoirement à 95 millions de francs par année.

Par suite de cette augmentation des prestations de Fassurance-vieillesse et survivants, le chiffre IV, lettre b, de la loi fédérale du 19 décembre 1963 modifiant celle sur l'assurance-vieillesse et survivants (RO 1964, 277) a autorisé le Conseil fédéral à majorer de 40 pour cent, d'abord jusqu'à fin 1969, la taxe de fabrication sur les cigarettes, le taux du droit de douane grevant le tabac brut destiné à la fabrication de cigarettes et le tabac à cigarettes, ainsi que le taux du droit de douane frappant les cigarettes. Dans notre message du 21 septembre 1964 concernant la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (FF 1964, II, 705), nous avons exposé les motifs qui nous ont incités à faire pleinement usage de cette autorisation. L'arrêté y relatif, majorant de 40 pour cent les taux à partir du 1er janvier 1966, date du 21 décembre 1965 (RO 1965, 1270). Les circonstances particulières de l'augmentation de la taxe sur le papier à cigarettes sont commentées à la page 21, Les cigares et le tabac pour la pipe fabriqués en Suisse sont sensiblement moins imposés que les cigarettes, ce qui est du reste aussi le cas à l'étranger.

Exprimée en pour-cent des prix de vente au détail, l'imposition se traduit actuellement par les chiffres ci-après : Cigares (bouts, bouts tournés, Virginie [brissago], toscani) Tabac pour la pipe Cigarettes

3 -- 7% 12 --- 20 % 34 -- 44%

L'imposition relativement faible des cigares est due au fait que, nonobstant la mécanisation toujours plus poussée, la fabrication de ce produit exige encore un fort contingent de main-d'oeuvre. Celle-ci représente environ 30 pour cent en moyenne du coût de la production dans l'industrie du cigare, comparativement à 5 pour cent au maximum dans l'industrie de la cigarette. Même les machines les plus modernes n'ont pas, tant s'en faut, la capacité de production des machines à fabriquer les cigarettes. De plus, les tabacs bruts pour la fabrication des cigares, notamment les couvertures, sont extrêmement chers (valeur moyenne des couvertures pour la statistique du commerce: de 2000 à 4000 fr. par q), de sorte que le prix de vente des produits finis demeure relativement élevé.

Le système actuel se caractérise par la garantie des prix. Cette dernière se fonde sur l'article 127, 1er alinéa, lettre d, de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants aux termes duquel le Conseil fédéral peut édicter des mesures réglementant le commerce de détail des tabacs manufacturés et du papier

1.17 à cigarettes. Selon l'article 94 de l'ordonnance réglant l'imposition du tabac, le prix de délai), que le fabricant est tenu d'indiquer sur les emballages des tabacs manufacturés, fait loi pour la remise aux consommateurs dans le commerce de détail. L'octroi de certains rabais ou ristournes est toutefois autorisé.

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2, Importance du tabac sur le plan économique

Le tabac influe sur l'économie suisse par trois facteurs: la culture du tabac, la fabrication industrielle de tabacs manufacturés et, enfin, le commerce de tabacs manufacturés.

a. Tabac indigène.

La culture indigène du tabac comprend, normalement une surface de quelque 1000 ha, répartie sur les régions suivantes: vallée de la Broyé, YverdonBelmont, vallée du Rhône, Poschiavo, Ajoie, Tessin (plaine de Magadino, Luganese, Mendrisiotto), ainsi que quelques régions saint-galloises et grisonnes de la vallée du Rhin ; on en trouve aussi dans la vallée de l'Aar, entre Bienne et Soleure, puis en Suisse orientale à Frauenfeld, Flaach et Stammìieim.

Le nombre de planteurs est de 2500 environ. Les récoltes normales rapportent approximativement 2 millions de kg de tabac non fermenté, soit à peu près 8 millions de francs (à l'état fermenté: 1,5 million kg/10 millions de fr.).

L'apparition du mildiou du tabac, en 1960, a eu pour conséquence une régression des surfaces cultivées et du nombre de planteurs. Grâce aux mesures de protection, auxquelles contribua la Confédération, la situation s'est améliorée.

Ce sont surtout de petites et moyennes entreprises familiales qui cultivent le tabac. Une grande partie des travaux peut être assumée par des femmes et des adolescents.

Le tabac est un élément favorable à la rotation des cultures ; il contribue donc à l'exploitation rationnelle du sol et à un rendement accru des entreprises agricoles. Cela ressort des chiffres ci-après, calculés par la fédération des associations de planteurs de tabac pour une commune de la vallée de la Broyé : surface cultivée, total : 201 ha, dont: prés 94 ha, champs labourés 107 ha.

Les cultures se répartissent comme il suit sur ces 107 ha de champs labourés: céréales 70 ha (essentiellement blé d'hiver), plantes sarclées 37 ha (essentiellement pommes de terre et tabac).

Le rendement brut de 10 ha de tabac, pour la moyenne des années 1960 à 1963, est de 108 000 francs, comparativement à 102 000 francs/70 ha de céréales et à 140000 francs/94 ha de prés (lait).-A Brusio (vallée de Poschiavo), par exemple, la récolte annuelle de tabac rapporte de 70 000 à 80 000 francs à 70 petits planteurs; au Tessin, de 1,8 à 2 millions de francs à 850 planteurs.

Avant l'institution de la taxe de fabrication, on ne rencontrait des organisations de planteurs que dans la vallée de la Broyé et au Tessin ; un nombre élevé de planteurs n'étaient pas organisés. Dans la plupart des cas, on cultivait

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sans établir de plans et sans tenir compte des besoins du marché; il en résultait périodiquement surproduction et effondrement des prix. Par suite de l'institution de la taxe de fabrication, un contrôle de la culture indigène du tabac se révéla indispensable. Aussi fallut-il créer une réglementation portant sur les surfaces cultivées annuellement, la récolte de tabac brut, sa livraison aux fabricants et son utilisation dans les fabriques. Cela exigea la création d'organisations de planteurs et d'acheteurs, qui évoluèrent par la suite sous forme d'organismes faîtiers, savoir: Fédération suisse des associations des planteurs de tabac (FAPTA) et Société coopérative pour l'achat du tabac indigène (SOTA). Les rapports entre ces deux organismes firent l'objet d'une convention visant notamment le but suivant: réglementer la culture et la livraison du tabac de manière à garantir un écoulement rationnel en fonction des besoins de l'industrie. On cherche à y parvenir, d'une part, en améliorant la culture indigène ; d'autre part, en stabilisant les prix et en taxant le tabac suivant la qualité. Enfin, il faut encourager la culture du tabac dans les entreprises agricoles proprement dites, tout en restreignant autant que possible la culture industrielle (entreprises exploitées par les fabricants eux-mêmes).

Pour atteindre dés prix plus élevés et garantir l'écoulement, il fallait d'abord améliorer la qualité des sortes de tabac et revoir les méthodes de culture, de récolte et de fermentation. Une station d'essais fondée à Lausanne-Mont Calme par la société coopérative pour l'achat du tabac indigène procéda, en collaboration étroite avec les stations fédérales d'essais agricoles et les stations cantonales d'essais, à des essais de grande envergure en vue d'obtenir des sortes mieux adaptées à notre climat et à notre sol, tout en se prêtant aux mélanges de tabac pour la pipe et de tabac à cigarettes. On y étudia aussi les méthodes modernes de culture, de séchage et de fermentation, par exemple l'utilisation de machines à planter et de machines à enfiler les feuilles, l'aménagement de hangars de séchage, etc. La construction de petits hangars privés bénéficia d'une participation à fonds perdu de la société coopérative, pour l'achat de tabac indigène, participation à laquelle vint s'ajouter un crédit de 5 millions
de francs mis à disposition par la Confédération;cela permit l'aménagement de quelque 500 hangars de séchage. En outre, les fabricants construisirent, pour leur propre compte ou en commun avec des planteurs, sur une base coopérative de grandes installations dans lesquelles le tabac livré à l'état vert par les planteurs est séché par des procédés rationnels. L'institut de botanique générale de l'école polytechnique fédérale, avec l'aide financière de la société coopérative, organise des cours donnant aux étudiants une formation spéciale dans le domaine du tabac. Jusqu'à ce jour, 25 millions de francs au moins ont été investis pour l'application de ces mesures (15 mio par la SOTA à elle seule), qui ont permis à la culture indigène du tabac d'atteindre son niveau actuel.

En plus de l'importance économique que revêt la culture indigène du tabac en tant que branche de l'agriculture, il y a Heu de relever son rôle pour l'approvisionnement du pays dans les périodes où les importations de tabac brut font

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défaut. Nous en avons fait l'expérience au cours des deux guerres mondiales.

En effet, lorsque après 1942 les stocks de tabac importé arrivaient à épuisement et que les importations se heurtaient à de grandes difficultés, la Suisse était le seul pays d'Europe qui, grâce aux planteurs indigènes, a pu s'abstenir de rationner le tabac.

: Signalons enfin que les recettes fiscales tirées de l'imposition du tabac indigène -- elles se montent actuellement à environ. 14 millions de francs par année -- demeurent assurées même lorsque les importations de tabac brut sont perturbées.

b. Industrie du tabac

L'industrie du tabac se subdivise en trois groupes : la fabrication des cigares, du tabac pour la pipe et des cigarettes.

La plupart des fabriques de cigares se trouvent dans les cantons d'Argovie et du Tessin; il y en a aussi en Suisse romande, dans le canton de Lucerne et dans l'Emmental. Quant aux fabriques de tabac pour la pipe et de cigarettes, elles sont disséminées dans les diverses régions du pays ; Zurich, Berne (Ajoie), Neuchâtel et Genève sont d'importants centres de production, 41 entreprises participent à la fabrication de cigares de tous genres (bouts, toscani, bouts tournés, Virginie [Brissago], cigares à plumes et cigarillos). Ce chiffre comprend 21 petites entreprises (consommation annuelle de tabac brut jusqu'à 36 000 kg), 17 entreprises moyennes (consommation annuelle de tabac brut jusqu'à 350 000 kg) et 3 grandes entreprises (consommation de tabac brut supérieure à 350 000 kg). 27 entreprises fabriquent le tabac pour la pipe, soit 15 petites entreprises (consommation de tabac brut jusqu'à 12000 kg), 10 entreprises moyennes (consommation de tabac brut jusqu'à 200 000 kg) et 2 grandes entreprises (consommation de tabac brut supérieure à 200 000 kg), Dans la plupart des cas, la fabrication du tabac pour la pipe n'est pas autonome; elle constitue une branche annexe dans les fabriques de cigares et de cigarettes. Certaines de ces entreprises fabriquent, comme produits secondaires, du tabac pour la pipe et des cigarettes. Ces entreprises dites «mixtes» sont réparties sur les groupes de fabrication en fonction de la consommation de tabac brut de leurs différentes branches de fabrication. Les 23 entreprises qui s'adonnent à la fabrication de cigarettes de tous genres (cigarettes dites « suisses » [fabriquées essentiellement avec du tabac indigène], cigarettes Maryland, Orient, Virginie, American-Blend et European-Blend) se subdivisent en 11 petites entreprises (fabrication annuelle jusqu'à 84 millions de pièces), 6 entreprises moyennes (plus de 84 jusqu'à 800 millions de pièces) et 6 grandes entreprises (plus de 800 millions de pièces). 7 des 11 petites entreprises fabriquent à la main des cigarettes de types spéciaux; il faut les considérer non pas comme des entreprises industrielles, mais comme de petites entreprises artisanales.

La consommation de tabac brut se traduit par les chiffres suivants:

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dans les fabriques de cigares : petites entreprises 9 % entreprises moyennes 45 % grandes entreprises 46 % de la totalité du tabac brut mis en oeuvre; dans les fabriques de tabac pour la pipe : petites entreprises 3 % entreprises moyennes 44 % grandes entreprises 53 % .

dans les fabriques de cigarettes : petites entreprises 1 % entreprises moyennes 8 % grandes entreprises 91 % En 1964, l'industrie suisse du tabac a occupé environ 8000 personnes, qui se répartissent comme il suit : industrie du cigare:.

industrie du tabac pour la pipe : .

industrie de la cigarette

Direction, bureau, venie:

Fabrication

Total

380 65 845

3940 265 2530

4320 330 3375

6735

8025

1290

Un peu plus de 3000 personnes étaient occupées dans les petites et moyennes entreprises. Ces entreprises, établies pour la plupart dans des régions campagnardes, offrent à un grand nombre de ménagères la possibilité de compléter le revenu familial.

Les tableaux ci-après renseignent sur l'évolution de la production : Cigares (en mio de pièces) Année

Total

dont:

1939 1946 1955 1960 1963 1964 1965

475.7 563.5 514.3 492.1 611.5 680.4 665.2

Année 1939 1946 1955 1960 1963 1964 1965

Total 2 561 951 3 096 383 2176944 2012805 1777909 1 601 779 1502474

bouts

cigarillos

380.6 444.3 412.4 363.7 405.1 402.2 377.3

8.6 12.2 28.2 58.7 127.8 197.212.6

Tabac pour ta pipe (en kg)

Brissago/Toscani

69.4 85.8 56.5 56.61.6 61.1 54.2

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Cigarettes (en mio de pièces) Année

Total

dont : . cigarettes suisses")

Maryland

Araerican/European Blcnd

1939 2412.5 439.1195.6 76.1 1946 4455.8 10461949.1 329.5 1955 8387.4 1082.3 3744.5 990.2 1960 10909.855.6 5943.1 1500.1 1963 15299.826.4 7161.5 4399.8 1964 15669.5 707.5 7000.6 5349.6 1965 19073.2 694.4 7940.4 7766.*) = cigarettes contenant au moins 50 % de tabac indigène

-- -- -- -- 1571.6 1556.5 1674.7

c. Commerce de tabacs manufacturés Le commerce de tabacs manufacturés est, en principe, libre en Suisse.

La législation sur le tabac ne contient aucune prescription relative à l'exercice du commerce, à l'ouverture de bureaux de tabac, etc. Elle précise simplement que les détaillants sont tenus de vendre les tabacs manufacturés aux consommateurs aux prix de détail indiqués sur les emballages (garantie des prix).

Au demeurant, la fixation des prix ne fait pas l'objet de dispositions légales; il en est de même en ce qui concerne les marges de bénéfice du commerce de gros et de détail.

On subdivise le commerce des tabacs manufacturés en trois groupes: Les grossistes (environ 130), c'est-à-dire les intermédiaires entre les fabricants et les détaillants. Les organismes d'achat du commerce des denrées alimentaires (USC, USEGO, Kolonial-E. G., etc.) disposent de leurs propres dépôts de tabacs manufacturés, qui, d'une manière générale, sont ravitaillés par les fabricants.

Les magasins spécialisés (environ 1500), qui s'occupent uniquement de la vente au détail de tabacs manufacturés et d'articles pour fumeurs. Es se procurent directement auprès des fabricants toutes les cigarettes et, en général, aussi les autres tabacs manufacturés.

Les autres détaillants (plus de 100 000), qui exercent accessoirement le commerce des tabacs manufacturés, par exemple les épiceries et autres magasins, les kiosques, établissements publics, garages, coiffeurs, etc. ; ils sont tenus de se ravitailler auprès des grossistes.

IL MOTIFS DE LA REVISION DE LA LÉGISLATION ACTUELLE Aux termes de l'article 3 de la convention instituant l'Association européenne de libre-échange (RO 7960, 635), les Etats membres réduisent, puis finalement éliminent jusqu'au 31 décembre 1966 (décision du Conseil N° 6/63 du 10 mai 1963 ; RO 1963,1067) les droits de douane et toutes autres redevances à effet équivalent, perçus à l'importation ou à l'occasion de l'importation, à l'exception des droits fiscaux désignés comme tels conformément à l'article 6.

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Ces derniers ne sont pas compris dans la réduction générale. Cependant, selon l'article 6, les Etats membres s'abstiennent d'appliquer directement ou indirectement aux marchandises importées des charges fiscales supérieures à celles qui frappent directement ou indirectement des marchandises nationales similaires.

Si, au moment de l'entrée en vigueur de la convention, l'imposition des marchandises importées était plus élevée que celle de marchandises indigènes similaires, les Etats membres devaient supprimer la différence, c'est-à-dire l'élément protecteur, soit par étapes dans la même mesure que les autres droits de douane, soit en une seule fois jusqu'au 1er janvier 1965 au plus tard.

· Chaque Etat membre devait indiquer les droits de douane fiscaux et redevances fiscales pour lesquels il revendiquait le traitement selon l'article 6 de la convention; il devait aussi indiquer les droits de douane fiscaux qu'il se proposait de supprimer en une seule fois. La Suisse annonça notamment comme droits de douane fiscaux les droits de douane grevant les tabacs et s'engagea à supprimer globalement pour le 1er janvier 1965 l'élément protecteur compris dans ces droits de douane. Cette élimination a été accomplie en deux étapes (cf.

ordonnance AELE n° 9 du 20 décembre 1963, RO 1963, 1175; ordonnance AELE n° 11 du 18 décembre 1964, RO 1964, 1389). On n'a toutefois pas éliminé le privilège fiscal en ce qui concerne les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse avec adjonction de tabac brut indigène, qui n'est donc pas passible des droits de douane. Dans ce cas, la parité d'imposition avec les tabacs manufacturés, importés de la zone AELE, n'est pratiquement pas réalisable, car les rapports des mélanges varient suivant le produit (marque) et sont souvent modifiés, ce qui entraînerait chaque fois un changement de l'imposition; en revanche, l'imposition douanière des produits importés n'est pas sujette à des fluctuations. Il y a heu de relever cependant que la part du tabac indigène brut n'est que de 8 à 9 pour cent de la consommation globale de tabac brut.

Au sujet du traitement d'un cas présentant une certaine analogie avec ce qui précède, le Conseil AELE a précisé que le maintien d'une protection douanière dont jouissent les matières premières agricoles énumérées à l'annexe D de la convention n'était pas autorisé
lors de la fixation d'un droit de douane fiscal sur les produits industriels importés, dans la composition desquels ces matières premières sont entrées. Les droits de douane grevant les importations de telles matières brutes agricoles ne peuvent donc, lors de la détermination du taux du droit de douane fiscal, être pris en considération que s'ils sont euxmêmes réputés droits de douane fiscaux au sens de l'article 6 de la convention, c'est-à-dire si les matières premières agricoles produites dans le pays sont, elles aussi, soumises à la même cote d'imposition. Cela se traduit comme il suit pour les droits de douane suisses grevant les tabacs manufacturés : Etant donné que, pour la fabrication de tabacs manufacturés indigènes, on utilise des tabacs bruts indigènes et que ces derniers sont au bénéfice d'une protection douanière assurée par les droits de douane sur les tabacs bruts, il n'est pas possible d'inclure cette protection dans les droits de douane fiscaux frappant les tabacs manufacturés. Le droit de douane sur le tabac brut ne pourrait, lors du calcul des droits de douane fiscaux, être pris en considération eti tant que charge

*

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fiscale sur la production indigène de tabac manufacturé que si le tabac brut indigène était frappé d'une redevance interne équivalente à l'imposition douanière. On pourrait aussi éliminer l'effet protecteur de la manière suivante : ne pas percevoir de droit de douane sur les tabacs bruts étrangers ou faire en sorte que le droit de douane fiscal grevant les tabacs manufacturés en provenance de pays AELE ne soit pas supérieur à la taxe de fabrication existant à l'intérieur du pays. Le système actuel d'imposition doit donc être modifié si l'on veut obtenir une concordance avec l'article 6 de la convention AELE.

D'autres considérations militent aussi en faveur d'une revision des dispositions actuelles. II faut s'attendre, à plus ou moins longue échéance, que les droits de douane perdront de leur importance en tant que moyens de financement des tâches de l'Etat, car leur rôle sera de plus en plus restreint par les efforts en vue de créer des territoires économiques unifiés et de réduire les entraves commerciales. Il en serait ainsi dans le cas d'un marché commun groupant l'Europe entière, auquel la Suisse pourrait se rallier ; en effet, par la suppression des droits de douane au sein de cette communauté, ce que présuppose un tel système, la Confédération se verrait privée d'une part importante de ces recettes. Les droits de douane fiscaux ne seraient probablement plus soumis à un statut spécial, de sorte que les droits de douane sur les tabacs manufacturés subiraient de fortes réductions. Le GATT tend également, sinon à la suppression intégrale, du moins à une réduction notable des droits de douane, en vue de stimuler les échanges de marchandises sur le plan international. En outre, il n'est pas non plus exclu que, dans l'intérêt de l'économie des pays en voie de développement, il faille même consentir à une réduction des droits de douane grevant les produits agricoles, ce qui est déjà le cas des droits de douane sur les bois tropicaux; cette éventualité n'est donc pas exclue a priori pour les droits de douane sur le tabac brut. Etant donné que, pour ces diverses raisons, il faut s'attendre à une évolution qui conduira tôt ou tard à une érosion des recettes douanières, nous devons, maintenant déjà, vouer toute notre attention à la manière d'assurer à la Confédération une compensation pour ce manque à
gagner. Ce problème doit être abordé également en ce qui concerne les recettes tirées de l'imposition du tabac, que la Confédération doit maintenir si possible intactes pour pouvoir continuer d'apporter sa contribution à l'assurancevieillesse et survivants. On peut y parvenir en convertissant en un impôt sur le tabac les recettes actuelles provenant du droit de douane sur le tabac. Il est vrai qu'on peut se demander si cette manière de voir doit être prise en considération déjà à l'occasion de la revision actuelle, laquelle est appelée en premier lieu à aligner les prescriptions en matière d'imposition du tabac sur les obligations résultant de la convention AELE. Nous sommes d'avis que, s'il est nécessaire de reviser certaines dispositions légales, il est préférable de rédiger les nouvelles dispositions de telle manière que les changements à apporter ultérieurement au système d'imposition soient aussi minimes que possible. C'est ce qui nous incite à vous proposer une revision fondamentale des dispositions légales concernant l'imposition du tabac.

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Fallait-il procéder à une revision générale du chapitre IV de la IIe partie de la loi sur l'assurance vieillesse et survivants ou rédiger une loi séparée?

L'insertion des dispositions sur l'imposition du tabac dans la loi susmentionnée est due aux circonstances suivantes : Le Conseil fédéral avait d'abord envisagé l'adoption d'une loi spéciale sur le financement, au moyen de fonds publics, de l'assurance-vieillesse et survivants (cf. message, FF 1946, II, 579), comprenant également l'imposition du tabac en tant que partie du financement. Cependant, avant la clôture des débats parlementaires (cf. Bulletin sténographique 1946, Conseil national, p. 1016 s.), les deux parties -- assurance et financement -- furent groupées en une seule loi. Considérées sous l'angle de la systématique, les dispositions sur l'application technique de l'imposition du tabac constituent un corps étranger dans cette loi, car elles n'ont qu'un rapport indirect avec le but de celle-ci, c'est-àdire l'application de l'assurance-vieillesse et survivants. Elles y sont aussi peu à leur place que les dispositions sur l'imposition des eaux-de-vie, bien que la part revenant à la Confédération sur le revenu net tiré de ces dernières serve aussi à financer la contribution officielle à l'assurance-vieillesse et survivants.

Nous pensons donc qu'il serait plus judicieux de séparer l'imposition du tabac de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants et, comme c'est le cas d'autres impôts fédéraux, d'en faire une loi séparée. Il est bien entendu que la destination constitutionnelle des recettes tirées de l'imposition du tabac demeurera inchangée; il en est de même des chapitres I à III de la 2e partie de la loi (financement, en particulier l'art. 104); Le projet que nous vous soumettons a été élaboré uniquement dans le dessein de créer un système d'imposition de tabac correspondant aux obligations internationales présentes ou à venir, système qui maintienne cependant intactes à l'intention de la Confédération les recettes actuelles de l'imposition du tabac en faveur de l'assurance-vieillesse et survivants. La revision ne tend donc aucunement à une imposition accrue du tabac. C'est pourquoi les recettes tirées des nouvelles impositions doivent se traduire par un montant égal à celui des recettes actuelles, mais non par un excédent. L'adaptation
des taux au nouveau système d'imposition repose sur cette directive. Le rapport d'imposition entre les cigares et le tabac pour la pipe, d'une part, entre les cigares et les cigarettes, d'autre part, est, en principe, maintenu. Cela doit permettre d'éviter autant que faire se peut des déplacements de consommation et des modifications de la structure de la production. Les bases de calcul étant différentes, il s'ensuivra forcément quelques variations en regard de l'imposition actuelle. Le nouveau système d'imposition n'entraînera toutefois pas de majorations de prix. Les nouveaux tarifs des cigarettes reposent sur les taux de la loi actuelle, augmentés de 40 pour cent. Ainsi, la disposition de la loi du 19 décembre 1963 (RO 1964, 277) -- sur la base de laquelle nous avons décrété, avec effet au 1er janvier 1966, une augmentation de 40 pour cent des taux grevant les cigarettes et le tabac à cigarettes -- se trouve reportée dans la nouvelle loi ; cette disposition peut donc être abrogée (cf. dispositions transitoires

125 et finales). Cela a pour conséquence la suppression de la limitation jusqu'à fin 1969 de la durée de l'augmentation; en outre, le Conseil fédéral ne pourrait plus, dans les limites de la compétence qui lui est accordée par la loi du 19 décembre 1963, abroger intégralement ou partiellement les taux qui étaient en vigueur jusqu'à la fin de 1965. Cependant, compte tenu des besoins financiers de l'assurance-vieillesse et survivants il est pratiquement exclu que le nouveau régime de financement de cette institution à partir de 1970 puisse ramener à la cote initiale l'imposition des cigarettes.

III. LE NOUVEAU SYSTÈME D'IMPOSITION 1. Généralités a. Conformité de l'imposition aux exigences AELE Nous avons vu, dans le chapitre précédent, que l'imposition du tabac doit être revisée sous l'angle des obligations découlant de la convention AELE, Aussi la première condition à laquelle devra répondre le nouveau système d'imposition est tel qu'il concorde avec les dispositions de ladite convention.

La nouvelle réglementation ne tend pas à innover entièrement; le système d'imposition doit s'intégrer dans le cadre créé par l'évolution antérieure.

Il ne s'agit donc pas de choisir une solution satisfaisant à des exigences purement théoriques, comme ce serait possible si l'on instaurait l'imposition.

Comment peut-on concevoir une imposition en fonction des exigences AELE? Parmi les six partenaires de la Suisse au sein de l'AELE, le Portugal et l'Autriche ont des monopoles d'Etat, L'Angleterre perçoit des droits de douane sur le tabac brut et les tabacs manufacturés. Le Danemark, la Suède et la Norvège appliquent un système de banderoles. Les deux premières solutions n'entrent pas en ligne de compte pour la Suisse. Dans les Etats dotés de monopoles, seule l'administration a le monopole de l'importation, de la fabrication et de la vente. Elle fixe les prix des tabacs manufacturés de telle sorte qu'il en résulte pour l'Etat un bénéfice comprenant une imposition aussi lucrative que possible pour le fisc. Une réglementation de ce genre exigerait une modification de la constitution fédérale; en outre, elle se heurterait à une vive opposition, car la majorité de notre population est hostile aux monopoles d'Etat en général. Quant à la variante consistant uniquement à percevoir des droits de douane sur les tabacs bruts
et les tabacs manufacturés, elle ne répondrait pas à l'un des buts principaux de la revision, c'est-à-dire la création d'un impôt perçu à l'intérieur du pays. De plus, il faudrait frapper le tabac indigène d'une redevance équivalente aux droits de douane, afin d'obtenir une égalité de traitement conforme aux dispositions AELE; cette question ne joue aucun rôle pour l'Angleterre, qui ne produit pas de tabac brut.

L'imposition qui se prête le mieux aux conditions helvétiques est un impôt interne sur les tabacs manufacturés. Un tel impôt existe -- en plus des droits

126 de douane -- sous forme de la taxe de fabrication; il n'est donc, en principe, pas nouveau. Le système des banderoles appliqué dans quelques Etats de l'AELE repose, lui aussi, sur l'imposition des tabacs manufacturés. Aussi cet impôt interne peut-il très bien revêtir la forme d'une imposition unique. C'est pourquoi le projet prévoit l'abolition des droits de douane sur le tabac brut, qu'elle qu'en soit la provenance; ces droits seront toutefois englobés dans l'impôt, afin de tendre à des recettes, équivalentes à celles que procure la réglementation actuelle. La base de calcul, ainsi que les taux, sont les mêmes pour les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse et pour ceux qui sont importés ; en conséquence, les tabacs manufacturés importés des pays de l'AELE et ceux qui sont fabriqués en Suisse seront traités sur un pied d'égalité en ce qui concerne l'imposition, quelle que soit la composition des tabacs manufacturés fabriqués en Suisse (tabac importé et tabac indigène) et quel que soit le rapport des mélanges. Etant donné que l'imposition frappe le produit fabriqué sans égard à la provenance et à l'origine des tabacs mis en oeuvre, elle revêt le caractère d'un impôt interne indirect, qu'on ne saurait lui contester même en rapport avec l'AELE ou une autre communauté économique ; interne, cet impôt n'est pas soumis aux dispositions régissant la suppression des droits de douane.

Dans cet ordre d'idée, on peut se demander pourquoi il est question d'abolir, maintenant déjà, les droits de douane sur le tabac brut importé de tous les pays et pas seulement sur les importations en provenance des pays de l'AELE.

L'abolition des droits sur ces dernières seulement n'aurait guère de sens, car nous n'importons pas de tabac brut en provenance de ces pays. En outre, pour les importations en provenance de pays tiers, le droit de douane grevant le tabac brut n'aurait pas pu être englobé dans les tarifs d'impôt et, par conséquent, n'aurait pas pu être incorporé dans la charge fiscale frappant le produit fini; il en serait résulté de sérieuses difficultés d'ordre pratique et de sensibles inégalités d'imposition.

b. Exigences auxquelles doit satisfaire le nouveau système d'imposition Ainsi que nous l'avons déjà relevé, la question de savoir si les bases de détermination de l'impôt interne sont appropriées ne
peut pas être appréciée uniquement selon des considérations théoriques. S'il faut aussi considérer le système à la lumière des exigences de la science, il n'en demeure pas moins que la question des répercussions économiques du changement de réglementation revêt une importance tout aussi grande. Considérées sous cet aspect, certaines exigences sont d'une importance déterminante. Sous le régime actuel, l'industrie du tabac a évolué dans une direction déterminée; certains rapports se sont établis entre la production des différents secteurs de fabrication -- influencés, évidemment, au cours des ans par la mode et les goûts changeants --; enfin, certaines catégories de prix sont devenues courantes. La nouvelle réglementation est dictée non pas par la nécessité d'une modification de tous ces éléments,

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mais par des circonstances extérieures; elle doit, le moins possible, empiéter sur la structure de l'industrie ou modifier les rapports existants. En d'autres termes, il faut éviter que la nouvelle imposition ait des répercussions économiques, à moins que ces dernières ne soient exigées par les nouvelles données fondamentales.

Il faut aussi tenir compte du facteur suivant : les recettes tirées de l'imposition du tabac servent à une fin déterminée.

Aussi est-ce essentiel de choisir un système qui ne compromette aucunement les revenus en faveur de l'assurance-vieillesse et survivants et qui garantisse, en temps normal, le chiffre actuel de ces revenus.

Enfin, le nouveau système d'imposition du tabac ne doit pas contribuer à enfler l'appareil administratif, qui assure à l'heure actuelle la rentrée de revenus très élevés avec un effectif minimum. Il ne doit donc pas exiger une augmentation notable de l'effectif ni apporter de complications accrues à l'administration et à l'industrie.

Il ressort de toutes ces considérations que l'élaboration de la structure de l'impôt interne ne peut pas ignorer complètement la réglementation actuelle.

La nouvelle imposition doit donc satisfaire d'abord à des exigences déterminées dues au fait qu'il est nécessaire d'assurer une continuité avec l'imposition actuelle, aussi bien dans l'intérêt de l'économie que des finances fédérales.

Mais cela ne signifie pas qu'il faille négliger les exigences résultant de la science fiscale. "A la lumière de cette dernière, un impôt sur les tabacs manufacturés étant réputé impôt de consommation, il devrait en principe frapper le contribuable proportionnellement aux prix payés par ce dernier. En outre, il devrait avoir un caractère neutre sur le plan de la concurrence, c'est-à-dire n'apporter au contribuable (importateur, fabricant, grossiste, détaillant, etc.) ni avantage ni désavantage fiscal. Enfin, il y aurait lieu de tenir compte également du fait que l'impôt doit être judicieux et économique dans les cas d'espèce.

2. Critères dont s'inspire le choix d'un nouveau système d'imposition a. A quel échelon de la transaction commerciale faut-il percevoir l'impôt ?

La réponse à cette question est primordiale, car elle influe notablement sur le choix du système d'imposition. Pour la trouver, il faut d'abord prendre en considération le travail qu'occasionnerait la détermination de l'impôt, ainsi que les relations avec le système actuel. Les trois possibilités suivantes entrent en ligne de compte: détermination de l'impôt à l'échelon «détaillant» détermination de l'impôt à l'échelon «grossiste» détermination de l'impôt à l'échelon «fabricant».

128 La détermination de l'impôt à l'échelon «détaillant» est exclue d'emblée, car il faudrait assujettir plus de 100 000 entreprises à la déclaration et au paiement, ce qui exigerait un immense appareil administratif pour assurer la perception. Il est vrai que l'impôt perçu à cet échelon serait le plus neutre sur le plan de la concurrence, mais cet avantage ne parvient pas, tant s'en faut, à compenser les désavantages sur le plan administratif.

La détermination de l'impôt à l'échelon «grossiste» se heurte à des difficultés dues à la particularité des méthodes de distribution dans le commerce des tabacs manufacturés. Ainsi que nous l'avons déjà indiqué, les grossistes ravitaillent, en règle générale, les détaillants, y compris les grands magasins.

En revanche, les fabricants ravitaillent directement les organismes d'achat de la branche des denrées alimentaires; ils fournissent aussi directement les cigarettes aux magasins spécialisés. Il faudrait donc créer deux catégories différentes en vue de la détermination de l'impôt. De toutes façons, ce système aurait pour conséquence une augmentation du nombre d'assujettis et un accroissement du travail administratif.

Il ne reste plus que la détermination de l'impôt à l'échelon «fabricant», comme cela se passe maintenant déjà en ce qui concerne la taxe de fabrication.

Avantage de ce système: La marchandise est imposée à.l'un des premiers stades du processus économique, donc avant de pénétrer dans le réseau commercial ; ainsi, le nombre d'assujettis est peu élevé. Ce système a fait ses preuves avec la taxe de fabrication. Un revenu fiscal élevé a pu être encaissé jusqu'à ce jour à peu de frais administratifs et sans appareil de contrôle compliqué.

b. Structure de l'impôt perçu à l'échelon «fabricant» II existe diverses possibilités de pratiquer l'imposition à cet échelon, savoir : accouplement avec l'impôt sur le chiffre d'affaires impôt sur la valeur de vente au détail imposition spécifique combinaison d'une imposition spécifique avec l'imposition ad valorem.

Les considérations ci-après tendent à mettre en relief certains aspects de ces possibilités, sans toutefois épuiser le sujet.

aa. L'idée d'accoupler l'impôt sur le tabac avec l'impôt sur le chiffre d'affaires serait assez intéressante en soi, notamment si l'on tient compte de la simplification
qui. semble en résulter sur le plan de la perception. Pour des motifs ressortissant à l'économie administrative, l'impôt sur le chiffre d'affaires est perçu maintenant déjà auprès du fabricant indigène. La solution consisterait donc en une détermination de l'impôt sur le tabac d'après la valeur entrant en ligne de compte pour déterminer l'impôt sur le chiffre d'affaires. Cependant, l'accouplement avec cet impôt présente divers aspects négatifs. L'étranger ne nous fournit, du reste, aucun exemple d'imposition du tabac sur la base du

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système de l'impôt sur le chiffre d'affaires. L'écueil réside dans le fait que l'imposition devrait se traduire par des taux très élevés. Le taux de l'impôt sur le chiffre d'affaires est respectivement de 5,4 et 3,6 pour cent seulement (2,7% pour les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse), cf. ordonnance n° 4 c du département fédéral des finances et des douanes concernant l'impôt sur le chiffre d'affaires, du 29 novembre 1958 (impôt sur le chiffre d'affaires en bière et en tabacs fabriqués); RO 1958, 1127; 1964, 85. C'est pourquoi les variations dans les indications de valeur fournies par l'assujetti ne jouent qu'un rôle insignifiant pour cet impôt. Or, si les taux d'impôt atteignent un multiple de ces chiffres, des différences -- si minimes soient-elles -- dans la valeur imposable ont une répercussion beaucoup plus forte. Cette valeur peut être très variable, également pour les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse ou importés. La quantité de marchandises vendues et l'échelon «acquéreur» sont, par exemple, des facteurs qui influent sur les prix. Nous avons vu que le fabricant ravitaille les grossistes, les distributeurs en gros, les organismes d'achat et même les magasins spécialisés; suivant l'ampleur de la commande et du chiffre d'affaires dans un laps de temps déterminé, ces acheteurs bénéficient de rabais échelonnés selon la quantité, d'escomptes en fonction du chiffre d'affaires, etc. La situation est semblable en ce qui concerne les transactions à l'importation. Une définition précise de la valeur serait donc nécessaire dans l'intérêt d'une perception unifiée de l'impôt et du recouvrement des recettes tirées de l'imposition du tabac.

Il faudrait, en outre, créer un appareil de contrôle spécial, chargé d'examiner, dans les cas d'espèce, les valeurs déclarées et d'élucider, lorsque c'est nécessaire, les différences de valeur. On aboutirait ainsi non pas à la simplification recherchée, mais à un surcroît de travail administratif. De toutes façons, la perception de l'impôt sur le chiffre d'affaires et des redevances grevant le tabac manufacturé est groupée maintenant déjà auprès de la direction générale des douanes, de sorte qu'il n'y a rien à simplifier sur ce point. Enfin, l'adaptation des taux actuels à une imposition de la valeur de gros serait très difficile. Aussi ne pourrait-on
prédire avec certitude qu'il serait possible d'atteindre à l'avenir le chiffre actuel des recettes tirées de l'imposition du tabac; on n'aurait donc pas satisfait à l'une des exigences auxquelles doit répondre le nouveau système.

L'accouplement de l'impôt sur le tabac avec l'impôt sur le chiffre d'affaires se heurte aussi à des considérations d'ordre constitutionnel. Aux termes de l'article 41 ter, 1TM' alinéa, de la constitution fédérale (teneur selon l'arrêté fédéral du 27 septembre 1963; RO 1963, 1171), l'impôt sur le chiffre d'affaires est limité jusqu'à fin 1974. En revanche, selon l'article 4l bis, 1er alinéa, lettre c, la durée de l'imposition du tabac, en tant que recette de la Confédération, est illimitée, bb. L'impôt sur la valeur de venté au détail est perçu en pour-cent de la valeur au détail du produit manufacturé. Cette valeur, contrairement à la valeur de gros, n'est pas difficile à déterminer. La loi peut obliger les fabricants à imprimer le prix de vente au détail sur les emballages dans lesquels sont vendus les produits. Un tel impôt permet de répartir exactement la charge fiscale Feuille fédérale, 119= année. Vol. I.

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proportionnellement à la dépense de l'acheteur ; il a un caractère neutre sur le plan de la concurrence. Mais ce système d'imposition aurait inévitablement des répercussions sur la structure de l'industrie du tabac. Cette dernière s'est organisée, depuis des décennies, en fonction de la détermination spécifique de l'impôt telle qu'elle existe actuellement. Un déplacement de la charge fiscale parmi les divers fabricants ébranlerait la situation actuelle sur )e plan de la concurrence; en outre, le marché serait perturbé par les adaptations ultérieures de l'imposition aux nouvelles conditions.

L'instauration de l'imposition sur la valeur de vente au détail mettrait dans une situation particulièrement délicate les entreprises de l'industrie du cigare qui sont spécialisées dans la fabrication de produits chers, composés de tabac de grande valeur. Ces entreprises sont maintenant déjà en butte à de sérieuses difficultés par suite du renchérissement des matières brutes et de la main-d'oeuvre; en outre, elles seront privées de l'actuelle réduction d'impôt (cf. ch. 5).

En ce qui concerne les cigarettes, il faut tenir compte du fait qu'une imposition sur la valeur de vente au détail entraînerait l'application d'un taux d'impôt unifié s'élevant à 40 pour cent environ. Il en résulterait des conséquences fâcheuses, du fait que les trois catégories principales de prix -- qui sont déterminantes pour le revenu fiscal -- participent de manière inégale à la production totale. Cette participation se monte actuellement à : 45 % P°ur la catégorie de prix de 1 fr. 20 par 20 pièces 32,5 % pour la catégorie de prix de 1 fr. 40 par 20 pièces 18 % pour la catégorie de prix de 1 fr, 50 par 20 pièces Par suite de l'application d'un taux unifié, l'imposition sur la valeur de vente au détail entraînerait une charge fiscale accrue pour toutes ces catégories de prix ; les cigarettes d'un prix de 1 fr, 20 par 20 pièces -- qui constituent presque la moitié de la production totale -- seraient relativement peu touchées, alors que la majoration serait plus sensible pour les catégories supérieures de prix. La charge fiscale accrue se traduirait vraisemblablement par une hausse des prix ou sinon par une compression du coût de la production au détriment de la qualité. Une hausse des prix aurait indubitablement pour conséquence un
fléchissement de la vente, comme ce fut le cas depuis le 1er janvier 1966, lorsque la charge fiscale sur les cigarettes fut augmentée de 40 pour cent. En même temps, il faudrait s'attendre à des déplacements de consommation, en ce sens que des consommateurs rechercheraient des cigarettes d'un goût semblable, mais moins chères. Même si l'on parvenait à maintenir les prix au détriment de la qualité, les expériences faites à l'étranger démontrent qu'il en résulterait aussi une baisse de la vente. Quelle que soit la solution envisagée, cette baisse ou les déplacements de la consommation au profit des produits meilleur marché entraîneraient un fléchissement du revenu fiscal, de sorte que les recettes en faveur de l'assurance vieillesse et survivants et des prestations complémentaires n'atteindraient plus le niveau escompté. Si l'on veut atteindre avec certitude le chiffre du revenu fiscal, il faudra très probablement majorer l'imposition

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des cigarettes des catégories inférieures de prix, mais alors on remettrait en question l'avantage que représente l'imposition sur la valeur de vente au détail en matière de neutralité sur le plan de la concurrence.

D'autre part, l'imposition sur la valeur de vente au détail présente le danger que l'impôt soit éludé par la vente des tabacs manufacturés à des prix supérieurs à ceux qui auront servi de base à l'imposition. Les pays qui appliquent ce mode d'imposition utilisent, comme moyen de sûreté, les banderoles' officielles apposées sur les emballages pour la vente au détail. Il faudrait examiner sérieusement si une telle mesure, qui occasionnerait de notables complications administratives et des frais accrus aussi bien à l'administration qu'au contribuable, pourrait être prise chez nous.

Toutes les associations de la branche du tabac (fabrication, vente, importation) se sont prononcées unanimement contre l'imposition sur la valeur de vente au détail.

ce. La taxe de fabrication actuelle est une imposition spécifique (base pour la détermination : poids des matières brutes mises en oeuvre, nombre de pièces et poids des cigarettes finies). Compte tenu des considérations qu'inspirent les deux possibilités ci-dessus, le maintien d'une imposition spécifique du tabac paraît être la solution Ja plus judicieuse. C'est la manière la plus simple d'établir la liaison avec l'imposition actuelle; on évite, de ce fait, une ingérence dans la structure de l'industrie du tabac, ce qui aurait pu se produire par une modification de l'imposition et par les fluctuations qui en résulteraient dans les rapports de prix entre les différents produits fabriqués. D'autre part, ce système garantit des recettes fiscales semblables au revenu actuel, de sorte que les rentrées nécessaires à l'assurance-vieillesse et survivants n'auront pas à souffrir de la nouvelle réglementation. Sont prévus comme unités de calcul : pour les cigares et les cigarettes, le poids par 1000 pièces pour le tabac coupé, le tabac à mâcher, le tabac en rouleaux et le tabac à priser, le kg de poids effectif pour le papier à cigarettes, la feuille ou le tube.

L'avantage de cette imposition spécifique réside particulièrement dans la simplicité de son application, car les unités sont faciles à établir et à vérifier.

Une autre répercussion positive
consiste dans le fait que ce système n'occasionne pas aux assujettis (fabricants) une imposition supplémentaire lors de la mise en oeuvre du tabac de grande valeur, ce qui leur permet de se concentrer sur la qualité ; ce fut du reste le cas jusqu'à présent pour les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse. Il est vrai qu'une imposition purement spécifique n'est pas neutre sur le plan de la concurrence, mais il a déjà été exposé dans ce message que, même pour une imposition sur la valeur de vente au détail, cet impératif devrait à la longue céder le pas à la nécessité d'obtenir des recettes fiscales d'un montant semblable à celui des recettes actuelles. D'autre part, on peut reprocher à une imposition purement spécifique d'augmenter les recettes

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fiscales seulement en cas d'accroissement de la quantité imposable; la majoration des prix demeure sans influence sur le résultat fiscal. Nous sommes toutefois d'avis qu'une certaine stabilité des recettes en faveur de l'assurance-vieillesse et survivants est préférable aux recettes variables de par la structure des prix. Jusqu'à présent, les recettes tirées de l'imposition du tabac ont été en continuelle progression malgré l'imposition spécifique. Enfin, un tel impôt ne renforce pas l'effet inflationniste des majorations de prix, comme ce serait le cas lors d'une imposition sur la valeur de vente au détail.

dd. Le projet de loi prévoit toutefois, comme base de calcul, non seulement la quantité mais, dans une certaine mesure, aussi le prix de détail (art. 10).

Il est établi que l'adaptation à la nouvelle imposition reposant sur un système purement spécifique aurait des conséquences regrettables pour l'équité fiscale.

Cela concerne en premier lieu les cigarettes. Selon le tarif actuel, les tabacs bruts auxquels la nervure médiane ou la tige manquent totalement ou en partie, pu travaillés autrement, sont passibles d'une surtaxe de respectivement 30 et 50 pour cent .Ces tabacs servent généralement à la fabrication de cigarettes des catégories de prix de 1 fr. 40 et 1 fr. 50 par 20 pièces. Les droits de douane sur le tabac de toutes provenances étant abolis, il en sera de même des surtaxes grevant le tabac brut importé à l'état travaillé. Les recettes correspondantes, qui s'élèvent actuellement à environ 3 millions de francs par année, pourraient évidemment être compensées par une surtaxe linéaire ajoutée aux taux d'impôt, mais il ne serait pas équitable de frapper de cette majoration d'impôt les fabricants de cigarettes des catégories de prix inférieures à 1 fr. 40 par 20 pièces, qui n'importent pas de tabacs bruts écôtés ou travaillés autrement. Les taux d'impôt légèrement majorés pour les cigarettes («Tarif d'impôt pour les cigarettes», annexe IV) des catégories de prix jusqu'à 7 centimes et au-dessus ou plus par pièce (= jusqu'à 1 fr. 40 et au-dessus par 20 pièces) compenseront largement la différence résultant de l'abolition des surtaxes précitées. Les fabricants visés ont approuvé cette solution.

Les taux des droits de douane frappant actuellement la tabac brut destiné à la fabrication de
cigares tiennent déjà compte, dans une certaine mesure, de la valeur de là marchandise par un échelonnement selon les variétés (de 30 à 80 fr. par 100 kg brut). La plupart des tabacs peu imposés sont utilisés pour la fabrication de produits bon marché (bouts ordinaires), tandis que ceux qui sont frappés de droits plus élevés servent généralement à fabriquer des produits plus chers (notamment des bouts tournés). Lors de l'élaboration du nouveau tarif d'impôt (annexe I du projet de loi), il a fallu, pour des raisons d'ordre technique, englober un taux de droit de douane moyen dans les taux d'impôt. Afin de rétablir les rapports d'imposition, on a dû, ici également, prévoir une progression supportable des taux d'après le prix de détail.

Cette même mesure se révéla nécessaire également pour le tabac coupé (tabac pour la pipe), car les produits bon marché contiennent une part importante de matières provenant de la fabrication des cigares (côtes, déchets),

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grevés uniquement de la taxe de fabrication peu élevée prévue pour les cigares (art. 119, 2e al,, LAVS), ou consistant en des adjonctions autres que du tabac et exemptes d'impôt. La paît de matières bénéficiant d'allégements fiscaux ou d'exemptions d'impôt diminue, en règle générale, d'une manière inversement proportionnelle au prix. C'est pourquoi le tarif d'impôt joint au projet de loi (annexe III) échelonne les taux d'impôt également d'après le prix de vente au détail de telle sorte que les rapports d'imposition actuels soient maintenus dans la mesure du possible.

Le système d'imposition sur lequel repose le projet de loi consiste en une imposition spécifique, complétée dans une faible mesure par une imposition sur la valeur de vente au détail. Cette imposition supplémentaire sous forme d'une progression fiscale en fonction de la valeur est toutefois limitée de manière à éviter d'intervenir dans la structure de l'industrie du tabac, tout en garantissant le chiffre actuel des recettes en faveur de l'assurance-vieillesse et survivants; cela permet en outre un échelonnement plus subtil des produits manufacturés relevant de diverses catégories de prix, sans qu'il faille craindre les répercussions défavorables de l'imposition axée uniquement sur la valeur. La prise en considération du prix de détail dans la base du calcul présuppose que l'on puisse déterminer cet élément sans difficulté. Nous avons déjà précisé que cela est possible: En effet, l'article 15, 1er alinéa, du projet de loi prescrit que le prix de vente au détail doit figurer sur les emballages pour la vente au détail des tabacs manufacturés fabriqués en Suisse et de ceux qui sont importés. La progression de la valeur étant insignifiante, on peut renoncer sans appréhensions à instituer la banderole d'impôt comme moyen de contrôle.

c. Redevances sur le papier à cigarettes

Les travaux préliminaires en vue de la nouvelle réglementation ont porté également sur la question du maintien de la redevance grevant le papier à cigarettes. Nous pensons qu'il est indiqué de maintenir cette redevance, nonobstant les recettes minimes qui en découlent actuellement. Il n'est pas exclu que les habitudes des fumeurs changent et que ces derniers recommencent à «rouler» les cigarettes à la main, de sorte que le danger d'une diminution des recettes fiscales, qui, à l'époque, a donné lieu à l'institution de la redevance, n'est pas écarté! Les dispositions concernant le papier à cigarettes (fabrication non industrielle de cigarettes) contenues dans le projet ont donc surtout un caractère préventif. La base du calcul demeure inchangée. Aux termes du chiffre IV, lettre b, de la loi fédérale du 19 décembre 1963 modifiant celle sur l'assurancevieillesse et survivants (RO 1964, 277), le Conseil fédéral aurait pu, au 1er janvier 1966, augmenter de 40 pour cent la taxe sur le papier à cigarettes, en même temps que l'augmentation de l'imposition des; cigarettes fabriquées industriellement. Cette majoration n'ayant pas pu avoir lieu à cette date pour des raisons d'ordre technique, le moment est venu de combler cette lacune. 11 est toutefois prévu de porter de 0,2 à 0,3 centimes (augmentation de 50 %) la taxe par feuille

134

ou tube, car c'est le seul moyen d'obtenir des montants d'impôt en chiffre rond (30 et 15 et.) pour les emballages de 100 ou 50 feuilles utilisés dans le commerce. Comme c'est le cas de l'imposition des cigarettes, la réglementation prévue dans là loi fédérale du 19 décembre 1963 sera, également pour l'impôt sur le papier à cigarettes, abrogée et remplacée par la présente loi.

3. Droits de douane sur les tabacs manufacturés importés

Alors que les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse ou importés de pays de l'AELE ne sont frappés que de l'impôt selon les tarifs constituant les annexes I à IV du projet de loi, ceux qui proviennent d'autres pays sont, en outre, passibles d'un droit de douane spécifique; ce droit est fixé de telle sorte que l'imposition des tabacs manufacturés provenant de pays ne faisant pas partie de l'AELE atteigne la cote d'imposition actuelle. Par conséquent, la charge fiscale ne change pas entre les tabacs manufacturés importés de pays de l'AELE ou d'autres pays et ceux qui sont fabriqués en Suisse.

Les importateurs de tabacs manufacturés avaient présenté une requête tendant à une réduction des droits d'entrée. Cette requête a dû être écartée, notamment parce que le moment semble peu propice à une réduction. Il n'est toutefois pas exclu que la Suisse soit de toutes façons obligée de réduire les droits de douane à l'occasion d'un nouvel allégement des barrières douanières. Ce serait donc prématuré d'entreprendre une réduction autonome des droits de douane, réduction qui, en outre, aurait pour désavantage d'atténuer le régime préférentiel AELE.

4. Tarifs d'impôt et tarif des droits de douane sur le tabac

a. Tarifs d'impôt Un tarif spécial a été élaboré pour chacun des trois groupes de tabacs manufacturés (cigares, tabac pour la pipe, cigarettes). Etant donné que, selon les prescriptions actuelles, les droits de douane sur le tabac brut et les taxes de fabrication varient d'un groupe à l'autre, il est indiqué de les adapter aux nouveaux taux d'impôt en s'inspirant également de la base actuelle. Le groupe «cigares» est subdivisé en tarifs spéciaux pour les bouts, cigarillos, cigares à plume et bouts tournés, d'une part, pour les Toscani et Virginie (Brissago), d'autre part.

En ce qui concerne les cigares et le tabac pour la pipe, on n'a pu établir la parité fiscale entre les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse et ceux qui sont importés de pays de l'AELE qu'en abandonnant la base du calcul reposant sur la consommation de tabac brut et en adoptant celle des produits finis. Il est vrai que ce mode de faire augmentera le travail administratif; cependant, des simplifications étant possibles dans d'autres domaines, le personnel actuel pourra probablement venir à bout de ce surcroît de travail.

135

aa. Tarif d'impôt pour les bouts, cigarillos, cigares à plume et bouts tournés Base du calcul: le poids moyen par 1000 pièces; le taux est échelonné par catégories de prix, suivant le prix de vente au détail par pièce. Les catégories de prix sont adaptées aux prix de vente qui ont cours actuellement dans le commerce; il en est de même des taux d'impôt de base pour les produits d'un poids moyen jusqu'à 2 kg par 1000 pièces. Selon la remarque 1 du tarif d'impôt, les produits ayant un poids plus élevé sont frappés d'un supplément de 80 centimes pour chaque fraction (intégrale ou partielle) de 500 g d'excédent de poids.

Cet échelonnement complémentaire était nécessaire pour atteindre une imposition aussi proche que possible de celle qui repóse sur les prescriptions actuelles. Malgré ses aspects quelque peu compliqués, son application ne devrait pas causer de difficultés.

Lorsque le poids moyen par 1000 pièces dépasse la limite tarifaire de la catégorie de prix, l'excédent du produit (excédent de poids) est compté comme une pièce en soi pour le calcul de l'impôt [cf. remarque 1] du tarif d'impôt); il est toutefois établi que de tels dépassements sont exceptionnels. Il en est de même des dépassements dans les catégories de prix de 2 francs (remarque 2) du tarif d'impôt).

L'application du taux du tarif d'impôt aux cigarillos d'un poids sensiblement inférieur à 2 kg par 1000 pièces constituerait une mesure rigoureuse. C'est pourquoi la remarque 1 du tarif prévoit, pour les produits de ce genre, que le taux d'impôt est réduit de 40 centimes en tant que le poids par 1000 pièces ne dépasse pas 1,750 kg.

Aux termes de l'article 11, 2e alinéa, lettre c, du projet de loi, le Conseil fédéral peut augmenter les taux du tarif d'impôt pour certaines sortes de cigares (cf. commentaires relatifs à cet article). Ainsi que nous l'avons déjà mentionné au chapitre I, chiffre 1, l'intervention de la main-d'oeuvre est beaucoup plus importante dans la fabrication des cigares que dans celle des cigarettes. On s'efforce toutefois de plus en plus de mécaniser la fabrication des cigares, ce qui n'est possible que grâce à l'utilisation de sous-capes et de capes en tabac homogénéisé (feuilles fabriquées mécaniquement à base de tabac brut ou de déchets de tabac). Ces nouveaux modes de fabrication permettent à l'industrie du
cigare de réduire le coût des matières brutes et de la fabrication, et d'augmenter sensiblement à la longue la capacité de production. Ainsi, une charge fiscale accrue devient supportable sans pour autant entraver les progrès de la technique. C'est pour tenir compte de cette évolution que le Conseil fédéral doit être autorisé à majorer les taux du tarif d'impôt; il doit pouvoir fixer la date qui lui paraît propice pour décréter cette majoration. La majoration des taux d'impôt entraînera vraisemblablement certaines élévations de prix pour les produits entrant en ligne de compte. Sur ce point, le projet de loi va au-delà des dispositions actuelles, mais la question de savoir si ces progrès de la technique devraient, à eux seuls, influencer la charge fiscale se serait posée même

136 sans la présente revision. Il est donc normal que le projet tienne compte de l'évolution dans la production des cigares, en particulier des cigarillos.

Le tableau ci-contre contient, en plus des taux d'impôt de base (dans la colonne «jusqu'à 2 kg»), les taux d'impôt pour tous les échelons ultérieurs de 500 g jusqu'à la limite tarifaire des diverses catégories de prix; il énumère donc chaque taux applicable dans les cas d'espèce.

bb. Tarif d'impôt pour Toscani et Virginie (Brissago) L'imposition a lieu d'après le principe régissant l'imposition des autres cigares Qettre -aa ci-dessus). Etant donné qu'il s'agit, en l'occurrence, d'un nombre relativement peu élevé de sortes, le tarif a pu être simplifié. L'élaboration d'un tarif spécial pour ces produits s'est révélée nécessaire parce que les produits en question se composent en majeure partie de tabacs actuellement moins imposés que la moyenne des tabacs utilisés au demeurant dans l'industrie du tabac; en outre, parce qu'il résulte de-la fabrication de ces cigares une quantité de déchets beaucoup plus grande que dans la fabrication des autres genres de cigares.

ce. Tarif d'impôt pour le tabac coupé, le tabac en rouleaux, à mâcher et à priser, ainsi que les rognures de cigares Bien que seuls le tabac coupé proprement dit et le tabac en rouleaux soient utilisés pour la pipe, tous les tabacs énumérés sous cette rubrique ont été groupés sous un seul et même tarif d'impôt, car ils ne se prêtent pas à une imposition d'après lé poids par unité.

Selon une remarque concernant ce tarif, le tabac coupé (tabac pour la pipe) fabriqué en Suisse, relevant des trois catégories inférieures de prix, ne peut être assujetti aux taux correspondants que s'il contient au minimum les quantités de tabac indigène ci-après : 40 pour cent (catégorie de prix 1, taux 1 fr. par kg) 25 pour cent (catégorie de prix 2, taux 2 fr. par kg) 10 pour cent (catégorie de prix 3, taux 3 fr, par kg) Si cette quantité n'est pas atteinte, on applique sans distinction le taux d'impôt de 4 francs par kg de la catégorie de prix 4. Cette mesure a été prise en accord avec l'association suisse des fabricants de tabac à fumer, dans le dessein d'assurer l'écoulement du tabac indigène. A défaut d'une telle mesure, le tabac indigène souffrirait de la concurrence des tabacs étrangers meilleur
marché; en effet, il faut réserver aux planteurs suisses cette seule porte de sortie (fabrication du tabac pour la pipe) pour les tabacs des qualités inférieures non utilisables par l'industrie de la cigarette. Cepenaant, ces cotes d'adjonction constitueraient pour les fabricants une obligation difficilement supportable en cas de pénurie de

Tarif d'impôt pour les cigares Taux d'impôt par 1000 pièces Poids moyen par 1000 pièces, sans bec fbte ni filtre Prix de vente au détail par pièce (catégories de prix)

et.

jusqu'à 2kg

Fr.

jusjusjusjusjusqu'à qu'à qu'à qu'à qu a 2,5 kg 3 k g 3,5 kg 4 k g 4,5 kg

jusqu'à 17 jusqu'à '19 · jusqu'à 22

2.'85

jusqu'à 27

3.35

· Fr.

3.40 3.55 3.65 3.75 3.90 4.15

jusqu'à 30

3.60

4.40

5.20

6.--

jusqu'à

40

4.10

4.90

5.70

6.50

jusqu'à 50

4.60

5.40

6.20

7.--

jusqu'à

60

5.10

fi. 70

7.50

jusqu'à 80

6.10

5.90 6,90

7.70

8.50

jusqu'à 100

7,10

7.90

8,70

9.50

jusqu'à 120

8,10

8,90

9,70

10.50

Jusqu'à 150

9,60

10.40

11.20

12.--

jusqu'à 200

12,10

12.90

13.70

14.50

jusqu'à

12

jusqu'à

15

2,60 2.75'

2.95 3.10

Fr.

Fr,

Fr,

Fr.

jusqu'à 5kg

jusqu a 5,5kg

jusqu'à 6kg

Fr.

Fr.

Fr.

jusjusjus- .jusqu a qu'à qu'à qu'à 6,5kg 7 k g 7,5kg S kg Fr.

Fr.

Fr,

Fr.

jusqu'à 9kg

jusqu a 10kg

jusjusqu'à qu'à l l k g 12kg

Fr.

Fr.

Fr.

Fr.

4.20

4.95

5.15 5.25 5.35 5.50 5.75

4.35

4.45 4.55 4.70

6.05 6.15 6.95 fi. 30 7.10 fi. 55 7.35 7. fiO 6.30 8.10 7.30 8. fiO 7.80 9,10 8.30 9.30 10.10 10.30 11.10 11.30 12.10

7.90 8,15 8.40 8,90 9.40

9.90 10.90 11.90 12.90 12.80 13.60 14.40 15.30 16,10 lfi.90

8.95 9.20 9.70 10.20 10.70 11.70 12.70 13.70 15.20 17,70

W.-- 10.50

11.30

11.--

11.80

12.60

11.50

12,30

13.10

12.50

13.30

14.10

13.50

14,30

15.10

13.90 14.90 15.70 15.90 16.70

14.50

15.30

16.10

16.90

17.70

19.30

20.90

16.--

16.80

17.60

18.40

19.20

20.80

22.40

18.50

19.30

20.10

20.90

21.70

23.30

29.40

18.30

24,-- 26.50 28.10

138 tabac indigène (mauvaises récoltes, maladies, etc.). Aussi le Conseil fédéral doit-il être autorisé, dans de tels cas, à abaisser dans une mesure appropriée ces cotes d'adjonction. Les conventions internationales auxquelles la Suisse a adhéré ne permettent pas, en ce qui concerne les tabacs manufacturés étrangers, que l'application de certains taux d'impôt soit subordonnée à une adjonction de tabac indigène. Les importations de tabac coupé des trois catégories inférieures de prix devraient donc être imposées inconditionnellement aux taux correspondants du tarif; il n'y a toutefois pas lieu de craindre,dece fait, une discrimination au détriment de la fabrication en Suisse, car les tabacs coupés de ces catégories de prix (prix de vente au détail jusqu'à 25 fr. par kg) n'ont jamais été importés jusqu'ici et ne le seront probablement pas non plus à l'avenir. Une réglementation semblable est prévue en ce qui concerne l'impôt sur les cigarettes (cf. lettre dd, 3e al., ci-après).

dd. Tarif d'impôt pour les cigarettes Ce tarif repose sur les mêmes bases de détermination que sous lettre aa ci-dessus (tarif des cigares). Il a pu être également élaboré sous forme de tableau énumérant tous les taux applicables dans les cas d'espèce (cf. tableau).

Les cigarettes pesant plus de 1,350 kg par 1000 pièces -- selon remarque 2 du tarif d'impôt, elles sont grevées d'un supplément de 7 francs par 1000 pièces -- sont représentées par quelques articles spéciaux proprement dits, grevés actuellement (art. 122, 2e al., LAVS) de la double taxe de fabrication.

Cette double imposition constitue une rigueur inéquitable et une imposition prohibitive dans les cas où la limite de poids de 1,350 g par pièce n'est que légèrement dépassée. L'assouplissement prévu se justifie donc pleinement. La quantité de cigarettes de ce genre, fabriquées en Suisse ou importées, étant insignifiante, la réduction de la charge ne joue fiscalement aucun rôle.

Aux termes de la remarque 3 du tarif d'impôt, le taux de la catégorie inférieure dé prix (cigarettes d'un prix de vente au détail jusqu'à 5 et par pièce, c'est-à-dire jusqu'à 1 franc par paquet de 20 pièces) n'est applicable aux cigarettes fabriquées en Suisse que si elles contiennent au moins 50 pour cent de tabac indigène. De ce fait, là différence entre les taux d'impôt grevant ces
cigarettes et les taux de la catégorie suivante est de 2 fr. 10 dans chaque cas.

Cette mesure tend à inciter les fabricants à utiliser du tabac indigène; en outre elle doit leur permettre d'introduire sur le marché des cigarettes de bonne qualité, même dans les catégories de prix les plus basses. La réglementation actuelle prévoit déjà des taux réduits pour les cigarettes dites suisses (art. 48, 1er alinéa, lettre a, de l'ordonnance sur l'imposition du tabac). Ainsi que nous l'avons déjà vu dans les commentaires concernant le tarif d'impôt pour le tabac coupé (lettre ce, ci-dessus), l'application d'un taux d'impôt déterminé aux produits importés ne peut être subordonnée à une adjonction dé tabac indigène, raison pour laquelle les taux d'impôt de la catégorie inférieure de prix doivent être appliqués inconditionnellement à ces produits. Toutefois, pour les cigaret-

Tarif d'impôt pour les cigarettes Taux d'impôt par 1000 pièces Prix de venie au délai! par pièce, en centimes (Catégories de prix) Poids par 1000 pièces papier compris, mais sana Oltre

jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à jusqu'à supérieur

800 g 850 900 950 1000 1050 1100 1150 1200 1250 1300 1350 1400 1450 1500 1550 1600 1650 1700 1750 1800 1850 1900 1950 2000 à 2000

jusqu'à 5 et.

Fr.

jusqu'à 6 cl.

Fr.

jusqu'à 7 et.

Fr.

jusqu'à 7,5 cl.

Fr.

plus de 7,5 cl.

Fr.

20.65

22.75

23.05

23.20

23.45

21.15 21.65 22.15 22.65 23.15 23.65 24.15 24.65 25.15 25.65 26,15 33.65 34.15 34.65 35.15 35.65 36.15 36.65 37.15 37.65 38,15 38.65 39.15 39.65 41.30

23.25 23.75 24.25 24.75 25.25 25.75 26.25 26.75 27.25 27.75 28.25 35.75 36.25 36.75 37.25 37.75 38.25 38.75 39.25 39.75 40.25 40.75 41.25 41.75 43.40

23.55 24.05 24.55 25.05 25.55 26,05 26.55 27.05 27.55 28.05 28.55 36.05 36.55 37.05 37.55 38.05 38.55 39.05 39.55 40.05 40.55 41.05 41.55 42.05 43.70

23.70 24.20 24.70 25.20 25.70 26.20 26.70 27.20 27.70 28.20 28.70 36.20 36.70 37.20 37.70 38.20 38.70 39.20 39.70 40.20 40.70 41.20 41.70 42.20 43.85

23.95 24.45 24.95 25.45 25.95 26.45 26.95 27.45 27.95 28.45 28.95 36.45 36.95 37.45 37.95 38.45 38.95 39.45 39.95 40.45 40.95 41.45 41.95 42.45 44.30

'

.

140

tes également, ce facteur ne se répercute pas défavorablement sur les produits indigènes, car les prix de vente au détail de cigarettes étrangères sont toujours notablement supérieurs à 1 franc par 20 pièces, de sorte que l'imposition au taux de la catégorie inférieure de prix n'entre de toute façon pas en ligne de compte.

Tous les tarifs d'impôt ont fait l'objet d'entretiens avec les associations de fabricants, lesquelles ont donné leur assentiment de principe.

b. Tarif des droits de douane sur le tabac

Le tarif des droits de douane sur le tabac remplace le chapitre 24 du tarif des douanes; l'article 11, chapitre I, de la loi sur le tarif des douanes devient donc sans objet. Les motifs de la suppression du droit de douane sur le tabac brut et les déchets de tabac, servant à la fabrication de tabacs manufacturés, sont exposés dans le chapitre III, chiffre !..

Cependant, le tabac brut et les déchets de tabac sont aussi utilisés à des fins autres que la fabrication de tabacs manufacturés, par exemple pour la production dé substances chimiques destinées à la fabrication de produits pharmaceutiques ou cosmétiques. Or, ces produits n'étant pas assujettis à l'impôt sur le tabac, il est justifié de grever la matière brute d'un droit de douane de 100 francs par 100 kg (n° du tarif 2401.60), qui est en rapport avec l'emploi; aucune obligation de caractère international ne s'oppose à cette mesure.

Les taux spécifiques des droits de douane, fixés pour les tabacs manufacturés (n05 du tarif 2402.10 -- 2402.80), ne sont applicables qu'aux importations eh provenance de pays ne faisant pas partie de l'AELE, alors que les importations AELE bénéficient de la franchise douanière. L'exonération de droits de douane en faveur des tabacs manufacturés provenant de pays de l'AELE fera l'objet d'un arrêté du Conseil fédéral fondé sur la convention de Stockholm instituant l'Association européenne de libre-échange (AELE).

La position tarifaire 2402.10, dont relève le tabac homogénéisé (droits de douane de 120 francs par 100 kg brut), appelle un commentaire. Il s'agit de feuilles faites de tabac en feuilles ou de déchets de tabac moulus, utilisées essentiellement pour la fabrication de sous-capes ou capes dans l'industrie du cigare en lieu et place des feuilles de tabac naturelles. Ces feuilles de tabac homogénéisé constituent une matière brute pour l'industrie; aussi sont-elles désignées expressément comme telle (art. 2) dans le projet de la nouvelle ordonnance concernant l'imposition du tabac. Le classement de ce produit sous les tabacs manufacturés dans le tarif d'importation découle du schéma de Bruxelles sur la nomenclature, adopté par notre pays. Le taux de ) 20 francs correspond à l'imposition actuelle (taux de 80 francs du n° 2402.32 du tarif + la surtaxe de 50 % selon note 2 du chap. 24 du tarif des douanes).

141 5. Le tabac indigène dans le nouveau système d'imposition Selon les prescriptions actuelles, le tabac indigène bénéficie d'une protection douanière appréciable grâce à la perception d'un droit de douane sur les tabacs bruts importés. L'imposition douanière sur les tabacs importés est de 160 francs par q pour le .tabac servant à la fabrication de tabac en rouleaux, tabac à mâcher et tabac à priser 300 francs par q pour le tabac servant à la fabrication de tabac pour la pipe 945 francs . par q pour le tabac servant à la fabrication de cigarettes (après l'augmentation selon ACF du 21 décembre 1965 [RO 1965, 1270]).

L'utilisation de tabac indigène dans la fabrication de cigarettes est pratiquement insignifiante, cela surtout pour des raisons de prix et de goût.

Pour les cigarettes des catégories inférieures de prix, d'une teneur minimum de respectivement 50 et 90 pour cent de tabac indigène, la taxe de fabrication est en outre ramenée de 1,59 c. par pièce à respectivement 1,38 et 0,96 (art. 122 LAVS et art. 48, 1er alinéa de l'ordonnance ,sur l'imposition du tabac, compte tenu de l'augmentation selon ACF du 21 décembre 1965 [RO 1965, 1270]).

La suppression des droits de douane sur le tabac brut, prévue au projet, prive le tabac indigène de la protection douanière. De même, les réductions spéciales de la taxe de fabrication pour les cigarettes contenant du tabac indigène ne peuvent pas être maintenues dans la forme actuelle, car elles ne profitent qu'à l'industrie indigène et constituent donc une discrimination au détriment des produits importés de pays de l'AELE (cf. commentaire concernant le tarif d'impôt, cbif. 4 dd) ci-dessus). D'autre part, ainsi que nous l'avons déjà souligné, les droits de douane actuels sur le tabac brut seront englobés dans l'impôt grevant les tabacs manufacturés, cela afin d'assurer le revenu fiscal actuel. Ainsi le tabac indigène est grevé complémentairement du droit de douane actuel frappant le tabac importé; en effet, les produits manufacturés fabriqués avec du tabac indigène sont également soumis à ces tarifs. Si l'on s'en tient aux quantités produites et consommées aujourd'hui, l'imposition supplémentaire, compte tenu de l'augmentation de la charge fiscale sur les cigarettes à partir du 1er janvier 1966, atteindra annuellement environ 12 à 14 millions de
francs. Considérées sous un autre angle, les recettes tirées de la charge fiscale du tabac -- si l'on s'en tient aux conditions actuelles -- seront augmentées de ce montant, bien que l'on ne cherche pas à modifier les rapports d'imposition.

Cela est toutefois inévitable si l'on veut obtenir une égalité d'imposition pour les produits suisses et étrangers.

Sous le régime fiscal actuel déjà, les prix du producteur se sont élevés pour le tabac indigène, à cause de l'augmentation du coût de la production, à un tel point que malgré les allégements fiscaux, le tabac indigène se trouve en difficulté comparativement au tabac brut étranger. Faisant droit à une requête

142

commune de la fédération suisse des associations des planteurs de tabac et de la société coopérative pour l'achat du tabac indigène, et nous fondant sur l'article 127, 1er alinéa, lettre a, de la loi sur Passurance-vieillesse et survivants, nous avons, par arrêté du 6 mars 1964 (RO 1964, p. 197), accordé une subvention fédérale de 1,1 million de francs aux fins d'assurer l'écoulement du tabac indigène de la récolte de 1964. La durée de validité de cet arrêté a été prorogée entretemps jusqu'à nouvel ordre (ACF du 19 février 1965, RO 1965, 114), cela pour assurer le soutien des prix en tant que mesure spéciale jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'imposition du tabac. A partir de cette date, la situation du tabac indigène face à la concurrence du tabac importé, de qualité semblable et offrant des possibilités d'utilisation similaires, continuera de s'aggraver, car les fabricants devront alors assumer la même charge fiscale pour le tabac indigène et. le tabac importé. Ils ne seraient donc pratiquement plus en mesure de prendre en charge le tabac indigène, de sorte que, faute d'autres possibilités d'écoulement, il faudrait abandonner la culture du tabac en Suisse.

L'abandon de la culture du tabac signifierait vraisemblablement l'affectation définitive de ce terrain agricole à d'autres fins, ainsi que l'exode de la main-d'oeuvre vers d'autres professions. Même si le tabac pouvait faire place à d'autres cultures, il ne serait pas possible d'éviter de sérieuses conséquences économiques. Nous avons déjà dit que la rentabilité des exploitations agricoles dans les régions où l'on cultive actuellement le tabac diminuerait. En outre, tous les efforts accomplis par les planteurs pour rationaliser leurs entreprises en construisant des hangars de séchage, en achetant des machines spéciales, etc., seraient réduits à néant. Les sommes investies au cours des dernières décennies en vue d'encourager la culture et d'améliorer la qualité des récoltes se traduiraient, forcément, dans une large mesure, par des pertes sèches. D'autre part, si l'on abandonne la culture du tabac, on ne pourrait la remettre sur pied qu'au prix de grandes difficultés et au bout d'une période de réadaptation de plusieurs années; en effet, la culture du tabac répondant aux exigences de la fabrication exige une longue expérience
et des connaissances spéciales. La situation serait particulièrement critique si les importations étaient tout à coup interrompues. La dépendance intégrale de l'étranger pour l'approvisionnement en tabac brut ne pourrait être compensée ni complètement ni partiellement dans des délais utiles par la reprise de la production indigène. L'importance de la culture indigène du tabac, en tant que mesure préventive pour des périodes d'hostilités, est donc incontestée.

11 faut donc se demander si la nouvelle réglementation de l'imposition du tabac découlant des obligations internationales doit vraiment faire disparaître la culture indigène du tabac. Face aux répercussions, nous répondons par la négative. Aussi avons-nous recherché une solution qui, même sous le régime de la nouvelle loi, garantisse l'existence de cette branche de l'agriculture.

En principe, il n'aurait pas été exclu d'obliger les fabricants, par une disposition de droit public pouvant se fonder sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre b, de la

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constitution, à prendre intégralement en charge le tabac indigène dans les limites des récoltes actuelles. Cette possibilité n'est toutefois que théorique car, par suite de la forte augmentation de l'imposition du tabac indigène, les produits fabriqués avec ce tabac n'auraient plus pu soutenir la concurrence des produits importés. On n'aurait guère pu, dans de telles conditions, exiger que les fabricants mettent en oeuvre du tabac indigène. La solution jugée finalement la plus appropriée consiste à accorder des subventions fédérales aux planteurs pour compenser le désavantage financier résultant de la nouvelle réglementation et à permettre de ce fait aux produits indigènes de concurrencer de nouveau les tabacs étrangers. Cette solution n'est pas en contradiction avec les obligations internationales de la Suisse. La convention AELE cite le tabac brut dans la liste des produits agricoles (annexe D) non soumis à la réduction des droits de douane ; les Etats membres ne sont donc liés à aucune restriction en ce qui concerne d'éventuelles mesures de soutien financières. Conformément à l'article III, chiffre 8, lettre b, de l'accord général sur les tarifs et le commerce (GATT), des subventions peuvent être octroyées aux producteurs indigènes.

Le projet propose donc que la Confédération accorde des contributions au tabac indigène, contributions qui peuvent être prélevées sur le revenu fiscal des produits fabriqués avec du tabac indigène. L'affectation à cette fin des revenus sensiblement plus élevés, par suite dé la nouvelle réglementation, tirés de l'imposition du tabac indigène se justifie pleinement. Il n'a jamais été question d'augmenter le revenu fiscal par l'imposition du tabac indigène; l'excédent des revenus résultera forcément de l'égalité de traitement des tabacs manufacturés importés et de ceux qui sont fabriqués en Suisse. Le prélèvement des contributions en faveur de la culture indigène du tabac sur les revenus de l'imposition du tabac n'amenuisera donc pas les recettes en faveur de l'assurancevieillesse et survivants. Les finances fédérales n'en subiront aucun contre-coup.

On pourrait toutefois se demander si une telle réglementation serait compatible avec l'article 34 quater, 6e alinéa, de la constitution, aux termes duquel la Confédération affectera à Fassurance-vieillesse et survivants
le produit total de l'imposition du tabac. Cette disposition constitutionnelle est issue des débats à l'Assemblée fédérale, au cours desquels certains parlementaires proposèrent que le revenu de l'imposition du tabac rentre intégralement dans la caisse fédérale; d'autres étaient d'avis qu'il fallait affecter un certain montant (10 ou 15 millions de fr. annuellement) à l'assurance (cf. Bulletin sténographique officiel 1925, Conseil national p. 204, Conseil des Etats p. 187, 188, 211). Cette disposition tend donc à empêcher qu'une partie des recettes de l'imposition du tabac soit déviée de la caisse fédérale pour couvrir d'autres dépenses générales de la Confédération. W. Burkhardt est également de cet avis dans son commentaire (3e édition, p. 300). Il constate que le «produit total» signifie non pas le produit brut, mais les recettes nettes. Les recettes brutes, qui représentent le total de la charge fiscale comptable, comprennent les impositions des produits manufacturés destinés à l'exportation et pour

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lesquels l'assujetti a droit à un remboursement des redevances fiscales (art. 116 et 126 LAVS). Il en est de même des tabacs manufacturés qui, parce qu'invendables, sont repris par le fabricant puis, sous surveillance douanière, détruits ou défaits en vue de leur réutilisation (art. 126 LAVS). Enfin, la part de la charge fiscale du tabac qui revient à la Principauté de Liechtenstein conformément au traité d'union douanière, est également prélevée sur les recettes provenant de l'impôt. A la suite de cette interprétation constante de la disposition précitée, on a toujours, depuis l'entrée en vigueur de la loi, affecté à l'assurance-vieillesse et survivants les recettes nettes. L'affectation du revenu fiscal découlant des produits fabriqués avec le tabac indigène aux contributions en faveur de la culture indigène du tabac, dans le dessein de maintenir et d'encourager cette dernière, est donc corroborée en théorie et en pratique par l'interprétation de l'article 34quater, 6e alinéa, de la constitution. La commission fédérale pour l'assurance-vieillesse et survivants et l'assurance-invalidité a été informée de l'intention d'encourager la culture indigène du tabac au moyen de recettes tirées de l'impôt. La majorité de la Commission s'est ralliée, en principe, à l'idée d'une telle affectation, alors qu'une minorité a exprimé des appréhensions quant à la constitutionnalité et aurait préféré que la contribution -- incontestée en soi -- en faveur de la culture indigène du tabac soit, comme c'est le cas pour d'autres mesures de soutien en faveur de l'agriculture, financée par le compte ordinaire de la Confédération.

Grâce à la contribution fédérale au tabac indigène, la fabrication de produits à base de ce tabac peut donc de nouveau concurrencer les produits étrangers. Aussi une prise en charge obligatoire de tabac indigène est-elle tout à fait supportable, notamment du fait que l'adjonction de tabac indigène tant dans les cigarettes que dans le tabac pour la pipe, dans des proportions différentes suivant le genre de fabrication, n'-influe pas sur les qualités du produit fini, étant donné la qualité satisfaisante de ce tabac. Une exception existe uniquement pour les cigares et les cigarettes Virginie et Orient des catégories supérieures de prix. Certains fabricants ont renoncé récemment de plus en plus au
tabac indigène, pour des raisons découlant toutefois ni de la qualité ni du prix. Afin de freiner cette tendance et d'assurer l'écoulement du tabac indigène, le projet prévoit, à titre de mesure complémentaire, que le Conseil fédéral peut, si c'est nécessaire, obliger les fabricants à prendre en charge du tabac indigène.

La part de tabac indigène à l'ensemble de la consommation suisse de tabac brut est actuellement de 8 à 9 pour cent et correspond à une récolte normale de 800 à 1000 ha. On peut exiger, dorénavant, de la part de l'industrie du tabac, une prise en charge correspondant à la récolte d'une surface d'environ 1000 ha.

Quant à une garantie de prise en charge illimitée, elle pourrait inciter les planteurs à une surproduction de tabac indigène. L'industrie du tabac s'est ralliée à cette disposition à la condition que les contributions fédérales prévues dans le projet de loi soient effectivement octroyées.

Etant donné que les mesures en faveur du tabac indigène reposent sur l'article 3lbu, 3e alinéa, lettre b, de la constitution (cf. passages relatifs à la constitutionnalité), les cantons et les organismes économiques compétents

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ont été consultés, conformément à l'article 32 de la constitution. Dans la mesure où ils se sont exprimés, ils ont tous reconnu le bien-fondé des mesures de protection en faveur de la culture indigène du tabac consécutivement à la suppression des droits de douane sur le tabac brut. Aucune objection de principe n'a été formulée contre la réglementation prévue, 6. Réduction

Les réductions de la taxe de fabrication constituent une particularité de la réglementation actuelle. Le législateur a estimé que ces réductions étaient nécessaires pour atténuer les répercussions, sur les petites et moyennes entreprises, de la très forte augmentation de la taxe de fabrication selon l'arrêté du Conseil fédéral du 24 décembre 1937 sur l'imposition du tabac (RO 53, 1043).

La disposition régissant les réductions a été insérée en 1946 dans la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants (art, 127, lettre b); elle autorise le Conseil fédéral à prendre des mesures favorisant le maintien de l'industrie du tabac.

La loi du 1er février 1952 modifiant la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants (RO 7952, 923) a remplacé cette prescription facultative par une disposition de caractère obligatoire et rédigée comme il suit: «Le Conseil fédéral prend des mesures pour sauvegarder l'existence des petites et moyennes entreprises de l'industrie du tabac, notamment en accordant des réductions sur la taxe de fabrication». La cote des réductions et les prescriptions d'exécution sont indiquées dans les articles 49 à 51 de l'ordonnance sur l'imposition du tabac.

Ainsi qu'il ressort de la disposition légale précitée, les réductions ont été instituées dans le dessein de sauvegarder l'existence des petites et moyennes entreprises ou, en d'autres termes, d'empêcher la concentration de l'industrie dans quelques grandes entreprises. Cette mesure, qui revêt un caractère de politique artisanale, a été spécifiée expressément dans le message concernant la réglementation actuelle (cf. FF 1946, il, 634; 1951, III, 511). Les réductions de la taxe de fabrication, qui sont échelonnées d'une manière dégressive au fur et à mesure qu'augmenté le volume de production, sont donc destinées à compenser, du moins en partie, les désavantages économiques que subissent les petites et moyennes entreprises par suite du volume restreint de leurs affaires, ce qui leur permet d'affronter plus efficacement la concurrence des grandes entreprises.

Cependant les réductions actuelles ne suffisent pas à permettre aux petites et moyennes entreprises d'introduire leurs produits sur le marché à des conditions plus favorables que les produits fabriqués par les grandes entreprises ou importés. En résumé, les réductions tendent donc
uniquement à créer, sur le marché, une situation de base semblable pour tous les producteurs.

Si on les traduit par un montant, les réductions sont tout de même demeurées modestes. En 1965, par exemple, les réductions accordées aux petites et moyennes entreprises ont atteint un total de 2,8 millions de francs en chiffre rond, soit un peu moins de 1 pour cent des recettes nettes tirées de l'imposition du tabac. Ces réductions se sont réparties comme il suit sur les divers secteurs de fabrication : Feuille iéttirale, 119° année. Vol. I.

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fabrication de la cigarette fabrication du cigare fabrication de tabac pour la pipe

environ 1,8 millions soit 64,1 % environ 0,96 millions soit 34,1 % environ 0,05 millions soit 1,8 %

En plus des réductions en faveur dés petites et moyennes entreprises, la réglementation actuelle prévoit une réduction uniforme de la taxe de fabrication pour tous les fabricants de cigarettes, de même que sur les cigarettes emballées à la main. Alors que la première de ces deux réductions consiste effectivement en un abaissement du taux de la redevance, la deuxième revêt un caractère de politique artisanale, c'est-à-dire qu'elle tend à maintenir le travail manuel et à soutenir les petites entreprises qui n'ont pas les moyens de se procurer des machines à emballer.

Au cours.des travaux préparatoires en vue de la nouvelle réglementation concernant l'imposition du tabac, la question des réductions d'impôt s'est révélée l'un des points les plus épineux. On ne saurait contester que de telles réductions en faveur des petites et moyennes entreprises constituent, sur le plan théorique du moins, un privilège en faveur d'un secteur de l'industrie suisse au détriment des fournisseurs étrangers. Il n'est pas possible d'échelonner, d'après la capacité de production des entreprises étrangères, les redevances dues sur les produits importés. A conditions égales, la charge fiscale varie donc pour les produits indigènes et étrangers. Or, de telles inégalités sont incompatibles avec l'article 6, chiffre 1, lettre a, de la convention AELE, aux termes duquel les Etats membres s'abstiennent d'appliquer directement ou indirectement aux marchandises importées des charges fiscales supérieures à celles qui frappent directement ou indirectement des marchandises nationales similaires.

Il faut toutefois tenir compte du fait que cette prescription tend à assurer, sur le marché des pays de l'AELE, des conditions de concurrence égales pour les marchandises indigènes et celles qui proviennent de la zone, 11 semble que les réductions suisses de la taxe de fabrication n'aient pas eu, jusqu'à présent, d'effets restrictifs sur le plan de la concurrence; en effet, ces réductions ne permettent pas aux petites et moyennes entreprises de placer leurs produits sur le marché à des prix plus avantageux. Le total annuel des réductions, qui diminue du reste d'année en année par suite de la concentration croissante de l'industrie (1964 environ 3,3 millions, 1965 environ 2,8 millions), est trop insignifiant pour pouvoir créer une discrimination
au détriment des importations.

Considérées sous un autre angle, les réductions d'impôt pourraient toutefois être réputées «aides gouvernementales» au sens de l'article 13 de la convention de l'AELE, que les Etats membres sont également tenus d'éliminer.

Cependant, leur effet principal n'est pas (art. 13, chif. 1, lettre b) de «compromettre les bénéfices attendus de l'élimination ou de l'absence de droit de douane et de restrictions quantitatives des échanges entre les Etats membres», car les importations en provenance de pays de l'AELE ne seraient à peine entravées par le maintien des réductions d'impôt. Il faut néanmoins reconnaître que les réductions d'impôt en faveur des petites et moyennes entreprises sont,

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quant à la forme, en contradiction avec les dispositions précitées de la convention AELE, de sorte qu'elles pourraient être attaquées par les autres Etats membres.

Si l'on s'en tient à des considérations de droit national, il faut d'abord se rappeler deux prescriptions entrées en vigueur depuis la création de la réglementation actuelle. D'une part, le nouvel article 31 bis a.remplacé l'ancien article 34 ter de la constitution, qui, selon la conception de l'époque (Burckhardt Kommentar, p. 295), permettait, sans restrictions spéciales, des empiétements sur la liberté du commerce et de l'industrie et sur lequel se fondait l'obligation pour le Conseil fédéral (art. 127 LAVS) de prendre des mesures de protection notamment en faveur des petites et moyennes entreprises de l'industrie du tabac.

On doit se demander si des allégements fiscaux en faveur des petites et moyennes entreprises peuvent encore, du point de vue constitutionnel, être prévues dans une nouvelle loi. Ces réductions sont des mesures de sauvegarde proprement dites qui, à l'heure actuelle, ne peuvent plus se fonder que sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre a, de la constitution. Conformément à cet article, la Confédération est habilitée, lorsque l'intérêt général le justifie, à édicter des prescriptions pour sauvegarder d'importantes branches économiques menacées dans leur existence, en dérogeant, s'il le faut, au principe de la liberté du commerce et de l'industrie. De telles mesures de protection doivent en outre respecter le principe de l'égalité de droit et être adaptées aux circonstances. Il est superflu d'élucider si, dans l'ensemble, l'industrie des cigarettes, des cigares et du tabac pour la pipe est une branche économique importante car, en l'occurrence, d'autres conditions constitutionnelles font défaut pour ces réductions. Selon les travaux préparatoires relatifs aux nouveaux articles économiques de la constitution, on entend par «branche économique» un secteur complet de l'économie nationale, par exemple le tourisme ou l'industrie des textiles (cf. FF 1937, II, 883). Il faut donc uniquement élucider si l'industrie du tabac dans son ensemble -- et non seulement quelques secteurs et cette industrie --· serait menacée dans son existence par la suppression des réductions. Parmi les petites et moyennes entreprises occupées
surtout à la fabrication du cigare et du tabac pour la pipe, seule une fraction serait vraiment menacée par la suppression des allégements fiscaux. C'est la fraction qui, jusqu'à présent, ne pouvait faire face à la production des grandes entreprises produisant plus rationnellement que grâce aux allégements fiscaux (cf. p. 36). On ne saurait donc guère parler d'une menace à l'égard de l'ensemble de cette branche économique.

Or, une menace pour certaines entreprises seulement d'un secteur partiel de l'industrie du tabac ne se justifie pas, à notre avis, à plus forte raison que, depuis quelques années, l'industrie de la cigarette s'est développée et a augmenté sensiblement son chiffre d'affaires. Si, au cours des dernières années, l'industrie du cigare a marqué plutôt une stagnation et si la production du tabac pour la pipe a fléchi, cela est dû à des changements dans les habitudes des consommateurs. Il n'est pas possible non plus d'invoquer une protection dictée par les intérêts généraux de l'économie nationale. Enfin, de telles mesures de protection enfreindraient également le principe de l'égalité juridique, car l'Etat ne

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prend pas, dans d'autres secteurs économiques, des mesures analogues pour sauvegarder l'existence de secteurs économiquement faibles.

Il faut aussi considérer que la loi fédérale du 20 décembre 1962 sur les cartels et organisations analogues (RO 1964, 49) est entrée en vigueur. Vu les dispositions de cette loi, il y a lieu de se demander dans quelles mesures des allégements fiscaux du genre précité, institués en faveur d'une certaine catégorie de contribuables seulement, sont réputés restriction inadmissible de la libre concurrence. La commission des cartels, à laquelle avait été soumis l'avant-projet de nouvelle réglementation de l'imposition sur le.tabac (art. 19 de ladite loi), fit remarquer, à l'époque, au sujet des dispositions envisagées, que celles qui concernaient la garantie des prix et la réduction d'impôt n'étaient pas compatibles avec la loi sur les cartels et organisations analogues (concernant la garantie des prix, cf. p. 37 s). Elle a objecté, au sujet des réductions, que les charges des petites et moyennes entreprises seraient diminuées comparativement aux grandes entreprises, ce qui permettrait aux petites et moyennes entreprises de mieux affronter la concurrence. Selon ses dires, une intervention de l'Etat dans la vie économique permettrait ainsi de sauvegarder l'existence des petites entreprises, ce qui ne serait pas le cas sous le régime de la libre concurrence.

La commission est d'avis que, pour des considérations de politique en matière de concurrence, les réductions d'impôts doivent être écartées.

Nous constatons donc, en substance, que les réductions en faveur des petites et moyennes entreprises sont anticonstitutionnelles, qu'elles sont contraires aux obligations découlant de la convention AELE et que la commission des cartels propose de les écarter pour des raisons de politique en matière de concurrence. D'autre part, les réductions remontant à la crise des années trente ne sauraient plus guère se justifier dans la situation économique actuelle.

Aussi arrivons-nous à la conclusion qu'il faut les supprimer, nonobstant les conséquences prévisibles.

Il ne faut pas pour autant perdre de vue ces conséquences, qui -- cela est, du reste, reconnu par la commission des cartels --- ne sont pas insignifiantes, notamment dans l'industrie du cigare, où, sur les 41 entreprises de
ce secteur, quelque 15 à 20 occupant environ 600 employés seraient éliminées du marché.

La situation serait semblable dans l'industrie du tabac pour la pipe, où il faudrait s'attendre à la fermeture de quelque 10 à 12 entreprises occupant au total 30 personnes environ. Dans l'industrie de la cigarette, en revanche, seules 3 à 5 entreprises (100 à 130 employés), sur un total de 16 fabriques proprement dites, seraient menacées. Dans l'industrie du cigare, les répercussions de la fermeture d'entreprises seraient d'autant plus sérieuses que la majeure partie des entreprises menacées se trouvent concentrées dans un rayon comprenant le Seetal et le Wynental argoviens. Les personnes âgées congédiées, habitant pour la plupart sur place, auraient vraisemblablement beaucoup de peine à trouver une nouvelle activité dans le voisinage, malgré la conjoncture actuelle. D'une manière générale, la structure de la production dans l'industrie du cigare et du tabac pour

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la pipe subirait un changement fondamental, par suite de la concentration sur quelques grandes entreprises aptes à lutter contre la concurrence.

Compte tenu de ces répercussions, il semble équitable de ne pas prendre brusquement la décision lourde de conséquences de supprimer les réductions, mais de la faire précéder d'une période raisonnable d'adaptation. Il faut donner aux propiétaires la possibilité de s'adapter aux nouvelles circonstances, soit en groupant plusieurs entreprises de manière à pouvoir lutter contre la concurrence, soit en réalisant des liquidations -- lorsque c'est indispensable -- à des conditions plus favorables que sous le coup de l'entrée en vigueur imminente de la nouvelle loi. La commission des cartels n'a rien à objecter non plus contre une période d'adaptation pendant laquelle les réductions actuelles seraient maintenues intégralement ou partiellement; un tel mode de procédé pourrait se justifier également à l'égard des autres pays de l'AELE. La légalité de cette solution, qui repose sur l'article 127 LAVS, 1er alinéa, lettre b, demeurant en vigueur pour le moment, est exposée à la fin du message, dans le chapitre concernant la constitutionnalité. Ainsi l'octroi de réductions est maintenu à titre de mesure transitoire pour les cigares et le tabac pour la pipe jusqu'à fin 1972, pour les cigarettes jusqu'à fin 1968, Une discrimination est indiquée du fait que la suppression des réductions dans l'industrie de la cigarette a des conséquences moins fâcheuses. Les quelques fabriques dont l'existence est menacée par la suppression des réductions dépendent, aujourd'hui déjà, de grandes entreprises qui ont des ramifications à l'étranger. Dans ces cas, le droit à la réduction peut de toutes façons être mis en doute, contrairement à ce qui est le cas pour les entreprises absolument autonomes, telles que sont généralement celles de l'industrie du cigare et du tabac pour la pipe.

Le mode de calcul des réductions et les prescriptions nécessaires seront spécifiées dans l'ordonnance. L'ampleur des réductions demeurera, dans l'ensemble, en deçà des sommes actuelles. A part quelques cas particulièrement dignes d'intérêt, le montant de la réduction annuelle, prévu pour chaque entreprise, ne doit pas dépasser celui de l'année 1964.

La réduction de 0,05 centimes par pièce (art. 50, 1er
al. chif. I, 1, OIT), octroyée sur la base de la réglementation actuelle à toutes les entreprises de l'industrie de la cigarette, ne figure plus dans le projet de nouvelle ordonnance, car il ne s'agit pas d'un allégement fiscal en faveur des petites et moyennes entreprises. Cette réduction générale a toutefois été prise en considération lors de la fixation des taux d'impôt concernant les cigarettes, afin de maintenir le niveau actuel de la charge fiscale. Il est clair que, sous cette forme, la réduction ne crée pas une discrimination au détriment des fabriques étrangères.

7. La garantie des prix a. Parallèlement à la nouvelle réglementation de l'imposition du tabac, on a dû se demander s'il fallait maintenir la garantie des prix (mesure de droit public instituée en 1938), c'est-à-dire le caractère obligatoire des prix de vente

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au détail indiqués sur les emballages des tabacs manufacturés. La question fut vivement discutée, car il s'agit non seulement d'un problème juridique, mais aussi et surtout d'un problème économique qui a toujours préoccupé le législateur depuis les années de guerre.

La première tentative d'instituer la garantie des prix remonte à 1929. Le Conseil fédéral soumit au parlement un projet de loi concernant l'imposition du tabac (FF 1929, I, 529), destinée à procurer à la Confédération les recettes nécessaires à une assurance-vieillesse et survivants et invalidité. Les articles 19 et 21 de ce projet prévoyaient, pour la première fois, que les paquets de cigarettes fabriquées industriellement en Suisse devaient porter le prix de vente au détail et que cette indication revêtait un caractère obligatoire pour la vente aux consommateurs. Il s'agissait, à l'époque, d'une garantie relative des prix, car l'octroi des rabais ou remboursements usuels par les organismes de consommateurs ou de rabais, ainsi que par les détaillants, était autorisé. Voici ce qu'on lit à ce sujet dans ce message du 4 mai 1929 concernant ledit projet de loi (FF 1929, 1,562/3): «Le problème de la garantie des prix est, il faut le reconnaître sans autre, difficile à résoudre. Il occupe du reste en ce moment les gouvernements d'autres Etats. En sa faveur, on peut invoquer que l'impôt sur le tabac constitue une charge fiscale ne grevant qu'une branche d'industrie et dans une mesure que ne connaît aucune autre activité économique. C'est pourquoi il n'est, à notre avis, pas contraire à l'équité d'accorder par cette même loi une certaine protection à la branche du commerce des tabacs manufacturés. Cette protection, nous la voulons, sous la forme de la clause relative au gâchage, au profit du produit le plus imposé. Le gâchage, qui constitue un procédé de commerce déloyal, peut avoir des effets désastreux pour le commerçant honnête. Cette pratique détestable peut, d'autre part, déterminer certaines répercussions économiques regrettables et causer certaines perturbations dans le commerce de la cigarette. Les anomalies qui en résultent peuvent être désagréables pour le fisc, parce qu'elles peuvent compromettre la perception régulière de l'impôt.» Dans ce même message, se fondant sur un préavis du professeur E. Blumenstein, le Conseil fédéral
spécifiait, au sujet de la constitutionnalité d'une disposition concernant la garantie des prix, que le caractère obligatoire des prix de vente au détail pouvait être étayé par l'article 41 ter (actuellement art. 41 bis) de la constitution. Il faisait notamment remarquer ce qui suit: C'est pourquoi si, en vertu de l'article 41 ter de la constitution fédérale, la Confédération est autorisée à prélever un impôt sur le tabac brut et manufacturé, elle a également le droit, en vertu de cette même disposition constitutionnelle, de prendre les dispositions nécessaires pour assurer une perception normale de l'impôt sur le tabac. On ne saurait opposer à ces mesures restrictives l'obligation de respecter l'intégralité du principe posé par l'article 31.

Les dispositions proposées n'ont point le caractère d'une immixtion policière inutile dans l'industrie, màis sont nécessaires pour empêcher la fraude en matière d'impôt sur les cigarettes.

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Le peuple ayant rejeté la loi le 6 décembre 1931, il n'était plus question de la garantie des prix. La clause y relative ne fut pas reprise dans les arrêtés concernant l'imposition du tabac, édictés sur la base de programmes financiers revêtant un caractère d'urgence. Les répercussions que craignait le Conseil fédéral se manifestèrent en 1935 et 1936. Dans la plupart des villes suisses, on vit s'ouvrir des magasins qui se livraient au gâchage des prix des tabacs manufacturés, de sorte que de nombreux détaillants firent faillite ou se trouvèrent en fâcheuse position. Pour remédier à ces difficultés, le conseiller national Joss présenta, le 21 janvier 1936, un postulat tendant à l'institution du régime de la concession et à la garantie des prix. La fédération suisse du tabac, en sa qualité d'organisme faîtier de l'enssmble de la branche, adressa, le 25 mai 1936, une requête semblable au département fédéral de l'économie publique. Ainsi qu'il ressort du message du 30 juin 1937, sur la prorogation et l'adaptation des programmes financiers pour 1938 (FF 1937, II, 396 s), la garantie des prix selon le postulat Joss et la requête de la fédération suisse du tabac devait être introduite pour la totalité des articles de marque produits par l'industrie du tabac, cela afin d'éviter le gâchage. Il fallait aussi empêcher d'éluder, par des allégements directs ou indirects (rabais, remboursements ou cadeaux quelconques), les prix fixés par le fabricant pour la vente au détail. Bien que les organismes faîtiers de l'économie (union suisse du commerce et de l'industrie, union suisse des paysans) et l'office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail se fussent prononcés énergiquement contre l'institution de la garantie des prix, l'article 8 du projet d'arrêté (FF 1937, II, 405) autorisait le Conseil fédéral à prendre des mesures pour réglementer le commerce de détail des tabacs manufacturés. Par arrêté du 23 décembre 1938 sur l'imposition du tabac (RO 54, 995), fondé sur les articles 42 et 50 de l'arrêté fédéral du 22 décembre 1938 assurant l'application du régime transitoire des finances fédérales, le Conseil fédéral institua une garantie des prix dite relative.

Lors de l'insertion du droit de nécessité dans la législation ordinaire, la garantie des prix fit l'objet de nouvelles discussions. L'article
127, lettre d, de la loi sur Fassurance-vieillesse et survivants -- dans la teneur initiale du 20 décembre 1946 (RS 8, 451) -- autorisait le Conseil fédéral, sous le titre «Mesures de protection», à réglementer le commerce de détail des tabacs manufacturés et du papier à cigarettes, sous forme d'une prescription dite facultative. Cette disposition fut convertie en une prescription de caractère obligatoire par la loi fédérale du 1er février 1952 modifiant les dispositions relatives à l'imposition du tabac (RO 1952, 923), mais demeura, pour le reste, inchangée. En été 1947, lors de l'élaboration de l'ordonnance sur l'imposition du tabac, la fédération suisse du tabac proposa une prescription relative à une garantie des prix absolue. Ses mobiles étaient la charge fiscale élevée, la faible marge de bénéfice et la forte concurrence opposée au commerce spécialisé par des milliers de négoces vendant le tabac à titre accessoire. Elle voulait faire interdire les rabais et les remboursements, alléguant que d'autres marchandises étaient, elles aussi, vendues au prix net. En outre, ladite société exigeait Tinter-

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diction des cadeaux de tous genres, notamment la remise gratuite d'allumettes (cf. Hans Herold, Tabaksteuer und Wirtschaftsartikel, dans le Schweizerisches Zentralblatt für Staats- und Gemeindeverwaltung, 1948, nos 13/14).

En vertu de l'article 127 de la loi sur l'assurance vieillesse et survivants, l'article 94 de l'ordonnance du 30 décembre 1947 (encore en vigueur) concernant l'imposition du tabac (RS 6, 232) règle la question des prix minimums, par la voie de la garantie relative, et interdit la remise de cadeaux de tous genres.

Quelques exceptions sont toutefois prévues; elles ont été précisées par l'arrêté du Conseil fédéral du 4 juin 1962 modifiant l'ordonnance sur l'imposition du tabac (RO 7952, 469). La notion «rabais usuels» fut notamment éliminée; elle avait, du reste, toujours donné lieu à des difficultés d'interprétation.

b. Lors des travaux préparatoires concernant la nouvelle réglementation de l'imposition du tabac, il fallut de nouveau se demander s'il y avait lieu d'y insérer des prescriptions sur la garantie des prix, sous une forme absolue ou relative, ou s'il fallait supprimer intégralement la garantie accordée jusque-là aux détaillants de tabacs manufacturés. Par circulaire du 30 janvier 1964, la direction générale des douanes soumit aux associations et aux organismes économiques l'avant-projet des nouvelles dispositions légales, qui prévoyait -- à l'exception de la remise gratuite d'allumettes -- la garantie des prix absolue.

Les organismes faîtiers de l'économie (direction de l'union suisse du commerce et de l'industrie, union suisse des arts et métiers), la fédération suisse des travailleurs du commerce, des transports et de l'alimentation, ainsi que les associations de l'industrie du tabac, des importateurs, grossistes et détaillants de tabacs manufacturés, se rallièrent sans exception au maintien de la garantie légale des prix sous l'une ou l'autre forme. Seules l'union syndicale suisse, la fédération suisse des syndicats chrétiens-nationaux, la fédération des sociétés d'employés et l'association des entreprises à succursales suisses de l'alimentation furent hostiles à la garantie des prix. Après coup, l'union des grossistes en tabac de la branche des denrées coloniales demanda également le maintien de la garantie des prix.

Selon notre conception, corroborée par un
préavis de la division fédérale de justice du 28 octobre 1964, des raisons d'ordre juridique sont opposables au maintien de la garantie des prix. Des prescriptions interdisant le gâchage des prix doivent, nonobstant la corrélation avec le droit fiscal, être réputées mesures de politique économique. C'est pourquoi, en fin de compte, il faut considérer ces prescriptions à la lumière de la liberté du commerce et de l'industrie. Adopter des dispositions légales ayant un caractère de politique industrielle, en faveur d'une branche économique déterminée, n'entre en ligne de compte, d'une façon générale, que si les conditions du nouvel article 31 bis de la constitution sont remplies. Les dispositions dérogeant à la liberté du commerce et de l'industrie doivent donc répondre à un intérêt général et garantir notamment les intérêts de l'ensemble de l'économie suisse. La branche économique à laquelle sont destinées ces dispositions doit être importante;

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d'autre part, il faut qu'elle soit menacée dans son existence. Les mesures de protection doivent en outre respecter le principe de l'égalité de droit et être adaptées aux circonstances; la protection officielle ne peut intervenir que subsidiairement, lorsque la branche menacée a pris toutes les mesures d'entraide qui étaient en son pouvoir.

On ne saurait prétendre que l'industrie du tabac est menacée dans son existence, car l'élimination de la garantie des prix n'est pas censée entraîner un fléchissement de la consommation. Il en résultera toutefois un certain regroupement dans le commerce du tabac; les particularités sont exposées ci-après dans le préavis de la commission des cartels. Les petits magasins spécialisés, qui n'ont pas la possiblité de s'adonner à la vente d'autres marchandises, seraient le plus durement touchés par_une pression sur les prix. Des mesures en matière de garantie des prix ne peuvent cependant pas se justifier par le fait que des entreprises de certains secteurs seulement sont menacées dans leur existence. Elles ne seraient pas non plus dictées par les intérêts généraux de l'économie nationale. L'article 31 bis de la constitution n'est donc pas un fondement suffisant pour interdire toute latitude en matière de prix.

Nous pensons qu'on ne peut pas non plus invoquer l'article 41 bis, 1er alinéa, lettre c, de la constitution -- qui autorise la Confédération à percevoir des impôts sur le tabac --, car les interdictions en question ne sont pas indispensables à l'application de l'imposition (cf. W. Burkhardt, Kommentar, p. 351, remarque 1).

La commission des cartels, à laquelle a été soumis l'avant-projet conformément à l'article 19 de la loi fédérale du 20 décembre 1962 sur les cartels et organisations analogues, s'est exprimée d'une manière circonstanciée sur le problème de la garantie des prix. Elle arrive également à la conclusion que la base constitutionnelle fait défaut pour une garantie des prix. Son rapport expose notamment ce qui suit: l'article 41 bis, 1er alinéa, lettre c (jusqu'en 1958, art, 41 ter) de la constitution, aux termes duquel la Confédération peut percevoir des impôts sur le tabac brut et manufacturé, pourrait étayer une consolidation de prix revêtant un caractère de droit public. La garantie des prix serait donc admissible constitutionneljement si elle
était techniquement indispensable à la perception d'un impôt. Cependant, le droit fiscal suisse ne connaît pas d'autres consolidations de prix, de sorte que, dans le cas de l'impôt sur le tabac, il faudrait faire valoir des particularités extraordinaires pour justifier ·-- même constitutionnellement -- une telle mesure. Une particularité réside dans le fait que les taux d'impôt sont relativement élevés et de toute façon supérieurs à ceux de l'impôt sur le chiffre d'affaires. Par sa nature, l'impôt sur le tabac est toutefois un impôt ordinaire de consommation. Selon un préavis demandé par ladite commission, un système de garantie des prix revêtant un caractère de droit public est une condition aussi peu indispensable à l'imposition du tabac qu'à tout autre impôt général ou spécial de consommation. 11 n'existe donc, du point de vue du droit fiscal ou de la technique fiscale, rien qui puisse motiver constitutionnellement une garantie des prix par des dispositions de droit public.

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Si l'article 41 bis de la constitution -- ajoute la commission des cartels -- ne peut donc pas être invoqué comme fondement d'une telle consolidation des prix, on peut éventuellement se référer à l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre a, de la constitution fédérale où il est dit ce qui suit: «Lorsque l'intérêt général le justifie, la Confédération a le droit, en dérogeant, s'il le faut, aux principes de la liberté du commerce et de l'industrie, d'édicter des dispositions pour sauvegarder d'importantes branches économiques ou professions menacées dans leur existence». Il est superflu de statuer sur la question de savoir si la fabrication, l'ouvraison et le commerce du tabac constituent une branche économique importante (l'appréciation devant porter sur la branche économique considérée, dans son ensemble), à plus forte raison que cette question fait l'objet d'une controverse. En effet, la condition supplémentaire prévue par la constitution, c'est-à-dire la question de savoir si l'élimination de la garantie des prix menacerait l'existence de la branche du tabac, n'est pas remplie.

Au stade de la fabrication et du commerce de gros, la suppression de la garantie des prix pourrait être éventuellement défavorable aux entreprises marginales, ce qui ne saurait toutefois justifier des mesures de protection (cf. Schürmann, Der Gewerbeartikel der BV, Wirtschaft und Recht, 1965, 160).

Etant donné que le chiffre d'affaires augmente d'année en année et compte tenu de la forte consommation par habitant, l'abolition de la garantie des prix et, partant, de la réduction du nombre de magasins, ne devrait pas entraîner un recul de la consommation. Il en résulterait sans aucun doute que la concurrence dans le domaine des prix apporterait des fluctuations sur le marché, puis des changements dans la structure du commerce du tabac.

La commission des cartels est d'avis que la suppression de la garantie des prix se répercuterait d'abord et surtout à l'échelon des détaillants. Le nombre des magasins qui, selon les estimations de la fédération suisse du tabac, dépasse actuellement le chiffre de 100000, comparativement à 50000 en 1935 (cf.

thèse Kropf : Die Schweizerische Zigarettenindustrie, Zürich 1938) est toutefois si élevé -- et, de ce fait, hors de toute proportion sur le plan international -- que le commerce de détail
en soi ne serait pas menacé dans son existence.

Il faudrait toutefois s'attendre à un certain raidissement de l'appareil de distribution; des entreprises indépendantes et même quelques organismes de distribution d'une certaine importance seraient obligés de s'adapter à la nouvelle situation. Une régression éventuelle du nombre des entreprises indépendantes doit cependant, vu les circonstances, être considérée comme une adaptation de la structure, dictée par l'intérêt général. Il n'est pas certain que les magasins spécialisés, indépendants, se trouvent dans de sérieuses difficultés car, comparativement à d'autres magasins, ils bénéficient de préférences locales, personnelles et d'achalandage. Si les structures exigent des adaptations, il ne faut pas oublier non plus que, sans la garantie officielle des prix instituée en 1938, jamais le commerce de détail n'aurait pris de telles proportions.

Cependant, même si l'existence des grossistes et détaillants indépendants était menacée et si l'élimination de la garantie des prix devait donc constituer

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une «circonstance extraordinaire» au sens de la doctrine concernant l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre a (Schürmann, 164), il faudrait supprimer la garantie des prix en tant que mesure comportant une intervention étatique trop poussée et la remplacer par une mesure moins rigoureuse. On pourrait considérer comme telle, par exemple, une période transitoire avant la suppression complète, les dispositions fondées sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre a, constituant de toute façon, par leur nature, des mesures à brève échéance (Schürrnann, l c, S. 160).

L'une des conditions déterminantes pour l'application de l'article il bis,.

3e alinéa, lettre a, faisant défaut, l'examen des autres conditions est superflu.

Le préavis ajoute que, conformément à un principe général du droit économique, des protections officielles ne devraient pas être supprimées brusquement, étant donné que la branche qui bénéficiait de cette mesure n'est pas responsable de leur abolition et que, notamment dans le cas d'une protection de longue durée, elle s'est organisée et développée en conséquence. Il faudrait donc, en l'occurrence, faciliter les adaptations par une période transitoire. Une telle solution, dit la commission des cartels, n'est contestable ni constitutionnellement ni du point de vue de la loi sur les cartels. Une prorogation de trois ans de la réglementation actuelle semble raisonnable, dans la mesure où elle est compatible avec les obligations internationales de la Suisse.

Il faut cependant mentionner que l'ancien juge fédéral Abrecht, dans un avis de droit rédigé en juillet 1965 à l'intention de l'association suisse des grossistes spécialisés de la branche du tabac, est parvenu à d'autres conclusions en ce qui concerne la constitutionnalité de la garantie des prix. M. Abrecht est d'avis que l'on peut se fonder sur l'article 41 ter, dans la mesure où le caractère obligatoire du prix de vente au détail des tabacs en tant que base de détermination pour l'imposition correspond simultanément à la fixation d'un prix de vente maximum. La fixation d'un prix de vente minimum pourrait, en revanche, entrer en ligne de compte seulement en guise de mesure de politique économique au sens de l'article 31 bis, lettre a. Selon cet avis de droit, les conditions requises pour de telles mesures seraient remplies; la décision
dépendrait surtout de l'appréciation du législateur. Si l'imposition du tabac est instituée en concours avec une garantie des prix par la fixation de prix de vente au détail maximums et minimums, un tel projet devrait reposer aussi bien sur l'article 41 ter que 31 bis, 3e alinéa, lettre a. Nous ajoutons que le caractère obligatoire actuel des prix de Vente au détail interdit toute variation des prix indiqués sur les emballages. L'interdiction d'augmenter les prix ne joua toutefois pratiquement aucun rôle jusqu'à présent; cette interdiction n'est de toute façon pas absolue (cf. art. 94, 4e alinéa, lettre d, de l'ordonnance sur l'imposition du tabac). La question de savoir sur quels éléments une garantie des prix devrait reposer à cet égard ne revêt donc pas une importance essentielle pour l'ensemble du problème. En ce qui concerne le caractère obligatoire des prix de vente minimums, nous sommes d'avis que les motifs cités plus haut, selon lesquels les conditions constitutionnelles font défaut pour déroger à la

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liberté du commerce et de l'industrie, ne sont pas infirmés par l'avis de droit Abrecht.

Vu ce qui précède, nous arrivons à la conclusion que, nonobstant les conséquences auxquelles il faut s'attendre, notamment pour le commerce spécialisé des tabacs manufacturés, la situation juridique non équivoque et les recommandations de la commission des cartels incitent à faire abstraction de dispositions concernant la garantie des prix. C'est pourquoi le projet de loi ne contient aucune disposition y relative. En revanche, conformément aux considérations exposées par la commission des cartels, nous proposons de maintenir encore la garantie durant une période transitoire s'étendant jusqu'à la fin de 1970. Il faudra évidemment tenir compte du jugement du Tribunal fédéral, du 28 novembre 1966 -- commenté brièvement dans la presse, mais dont on ne connaît pas encore les considérants --, dans la mesure où il conteste la constitutionnalité de la réglementation actuelle. En ce qui concerne la constitutionnalité du régime transitoire, nous renvoyons au chapitre V. Quant à la comptabilité avec les obligations internationales de la Suisse, il nous semble que la garantie des prix -- qui laisse aux fabricants étrangers et à l'importateur toute latitude pour fixer les prix des produits qu'ils introduisent sur le marché suisse et qui exige uniquement l'observation de ces prix -- ne constitue pas une mesure qui, selon l'article 15 de la convention AELE, compromettrait les bénéfices attendus de l'élimination ou de l'absence des droits de douane et des restrictions quantitatives dans les échanges entre les Etats AELE. Cette question peut donc demeurer pendante, vu qu'il s'agit d'une mesure transitoire qui sera abrogée au bout de trois ans au maximum.

IV. COMMENTAIRE DES DIFFÉRENTES DISPOSITIONS DU PROJET Introduction er

L'article premier, 1 alinéa, décrit brièvement l'objet de la loi, 2e alinéa: Comme dans le droit actuel, les termes «tabacs manufacturés» et «papiers à cigarettes», sont définis dans l'ordonnance, en tant que de telles définitions sont nécessaires. Les dispositions correspondantes de l'ordonnance actuelle, qui se limitent au tabac coupé et aux cigarettes (art. 42 et 43), n'ont pas dû être modifiées jusqu'à présent. A la lumière de la récente évolution dans le domaine de la fabrication des cigares (notamment les cigarillos), il semble cependant judicieux, vu la différence sensible d'imposition entre les cigares et les cigarettes, de pouvoir adapter, s'il le faut, sans retard les délimitations technologiques à la nouvelle situation. On ne peut le faire qu'en déléguant, à l'avenir également, cette compétence au Conseil fédéral; préalablement à une telle mesure, il consultera les milieux intéressés.

L'article 2 confie l'application de la loi à la direction générale des douanes, comme par le passé.

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Article 3 : L'exécution de la loi étant confiée à la direction générale des douanes, il était indiqué de déclarer applicables, en l'occurrence, les prescriptions régissant les droits de douane, dans la mesure où des réglementations spéciales ne sont pas nécessaires, cela afin d'alléger la loi. Des renvois semblables sont utilisés également pour d'autres prescriptions non douanières (impôt sur le chiffre d'affaires, alcool) pour les domaines rentrant dans l'activité de l'administration des douanes. Il est vrai que l'impôt sur le tabac n'est pas perçu uniquement à la frontière, mais aussi et surtout à l'intérieur du pays. Un examen a révélé que les questions non réglées dans la loi sur l'imposition du tabac, parce qu'il y a renvoi, notamment en matière de procédure, peuvent être traitées judicieusement et sans difficultés d'interprétation d'après les dispositions de la législation douanière, même lorsqu'il s'agit d'un impôt perçu à l'intérieur du pays. Ce système de renvoi aux prescriptions douanières correspond, du reste, dans une large mesure au droit actuel (art. 125, 135, 139 et 148 LAVS; art. 2 ordonnance sur l'imposition du tabac).

Chapitre premier Objet de l'impôt et assujettissement L'article 4, 1er alinéa, définit l'objet de l'impôt sur le tabac et sa portée territoriale. Sont assujettis à l'impôt les tabacs manufacturés fabriqués industriellement en Suisse et prêts à la consommation, de même que les papiers à cigarettes en feuilles ou en tubes. Est réputée fabrication industrielle toute fabrication de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes destinés à la revente ou à la remise gratuite (réclames, échantillons, cadeaux), ainsi que la remise à des employés et ouvriers de l'entreprise du fabricant. Ne sont pas réputés fabriqués industriellement les tabacs manufacturés que le fumeur met en oeuvre lui-même pour ses besoins personnels. L'impôt frappe également les importations de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes, 2e alinéa : On entend par produits analogues aux tabacs, exempts d'impôt, par exemple les cigarettes médicinales faites généralement à base de feuilles aromatisées, de plantes de thé, etc., mais ne contenant pas de tabac. La teneur de la lettre b correspond au droit actuel (art. 128, 2e alinéa, lettre d LF AVS).

Le 3e alinéa définit la notion «prêt à la consommation».
Article 5 : Selon les lettres a et b, les tabacs manufacturés et les papiers à cigarettes admis en franchise de droit de douane sur la base de prescriptions douanières autonomes (art. 14, chif. 2, 5 et 6 loi sur les douanes, art. 9 bis et 11 du règlement d'exécution) ou de conventions internationales, du fait de la petite quantité, de la valeur minime ou du montant insignifiant des redevances, sont aussi exonérés de l'impôt sur le tabac, car sa perception se révélerait trop onéreuse. La lettre c concerne par exemple les tabacs manufacturés et les papiers à cigarettes rendus inutilisables par collage sur des cartes d'échantil-

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Ions, par des perforations réitérées ou d'une autre manière. L'exemption d'impôt en faveur de tels papiers à cigarettes correspond au droit actuel (art, 128 LAVS, art. 61 ordonnance sur l'imposition du tabac).

Article 6: L'impôt grevant les tabacs manufacturés fabriqués en Suisse a toujours été perçu auprès du fabricant (impôt perçu du fabricant, cf. p. 16), Ce système est le plus judicieux, le plus rationnel et le plus sûr pour l'imposition des tabacs manufacturés.

Lettre b : Sont assujetties à l'impôt, pour les importations de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes: les personnes assujetties au paiement des droits de douane, c'est-à-dire le conducteur de Ja marchandise, son mandant et celui pour le compte duquel la marchandise est importée (art. 9 et 13 de la loi sur les douanes).

Les articles 7 et 8 traitent la succession fiscale et la responsabilité solidaire concernant l'impôt. Ils s'inspirent ·-- tout en étant limités aux nécessités de l'impôt sur le tabac -- des dispositions de l'arrêté sur l'impôt pour la défense nationale (art. 10 à 22,120 et 121) et de l'arrêté instituant un impôt sur le chiffre d'affaires (art. 12), Le but de ces articles est notamment d'inciter les héritiers et les personnes chargées de la liquidation d'une personne morale ou d'une société commerciale sans personnalité juridique, etc., à satisfaire à temps aux obligations fiscales découlant de la présente loi.

Chapitre deuxième Début de l'assujettissement et calcul de l'impôt Les articles 9 à 11 indiquent le début de l'assujettissement, la détermination et le calcul de l'impôt. Etant donné que celui-ci frappe le produit fini, il en résulte, selon l'article 9, 1er alinéa, lettre a, que l'impôt grevant les tabacs manufacturés et les papiers à cigarettes fabriqués en Suisse n'est dû, en principe, que dès qu'ils sont emballés définitivement en vue de la remise aux consommateurs. Cette réglementation aurait toutefois pour conséquence que, lorsque des tabacs manufacturés emballés définitivement en vue de la remise aux consommateurs sont livrés à des personnes ou des maisons non inscrites au registre prévu à l'article 12, ou quittent autrement l'entreprise du fabricant (p. ex. vol ou soustraction), le droit pénal serait seul applicable, mais non pas le droit fiscal.

Le 2e alinéa de l'article 9 comble cette lacune,
en ce sens que l'impôt est déclaré dû également dans de telles circonstances.

Les bases de la détermination de l'impôt (art. 10) et les tarifs d'impôt pour les différents produits (art. 11) ont déjà été commentés au chapitre III, chiffres 2 et 4, du message. Le 2e alinéa de l'article 10 concerne les emballages d'assortiments et les emballages spéciaux pour lesquels l'impôt est déterminé d'après le poids par pièce et le prix de vente au détail du contenu dans les emballages les

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plus usuels pour la vente au détail ; la valeur de l'emballage, que le fabricant calcule au prix de revient, n'est donc pas imposée. Selon l'article 11, 2e alinéa, lettres a et b, le Conseil fédéral peut réduire les taux d'impôt de 20 pour cent au maximum lorsque la situation sur le marché du tabac brut l'exige ou les augmenter de 20 pour cent au maximum lorsque les recettes du fonds spécial selon l'article 104 de la loi sur Fassurance-vieillesse et survivants ne parviennent pas à couvrir la contribution que doit verser la Confédération à cette assurance et aux prestations complémentaires. Le droit actuel contient une disposition semblable (art, 114 et 120 LAVS); le Conseil fédéral en a fait usage une seule fois, par arrêté du 1er août 1957 concernant la réduction de la taxe de fabrication sur le tabac à pipe, le tabac en rouleaux, à mâcher ou à priser (RO 7957, 623), en réduisant la taxe de fabrication de 1,5 pour cent lorsque les prix sur le marché mondial du tabac brut destiné à la fabrication de ces produits avaient subi une hausse notable. L'augmentation de 40 pour cent de la taxe de fabrication sur les cigarettes, entrée en vigueur le 1er janvier 1966, repose, ainsi que nous l'avons exposé plus haut, sur Je chiffre IV, lettre b, de la loi fédérale du 19 décembre 1963 modifiant celle sur l'assurance-vieillesse et survivants.

Article 11, 2e alinéa, lettre c : La compétence du Conseil fédéral d'augmenter certains taux d'impôt se rapporte aux taux grevant les cigares avec sous-cape et cape en matière autre que les feuilles de tabac naturel, de même qu'aux cigares sans sous-cape mais avec cape en matière autre que les feuilles de tabac naturel ; il s'agit donc de produits dont la fabrication est mécanisée dans une mesure accrue. Les possbilités de mécanisation étant toutefois limitées comparativement à l'industrie des cigarettes, une majoration supérieure au septuple des taux d'impôt sur les cigares ne se justifie pas à brève échéance.

Le 3e alinéa de l'article 11 se révèle judicieux de par la réglementation prévue dans le projet de loi, selon laquelle, en plus du poids, les prix de vente au détail entrent aussi en ligne de compte pour la détermination de l'impôt grevant la plupart des tabacs manufacturés (cf. tarif d'impôt dans l'annexe au projet de loi). En principe, lorsque les prix des
produits manufacturés augmentent, ces derniers sont classés dans une catégorie supérieure de prix; il sont, de ce fait, soumis à des taux d'impôt plus élevés. Le 3e alinéa de l'article 11 précise que cette conséquence n'a pas un caractère impérieux. Au contraire, si les prix de vente au détail sont majorés, le Conseil fédéral peut adapter en conséquence le tarif entrant en ligne de compte, c'est-à-dire substituer de nouveaux prix aux anciens, en tant que l'augmentation d'impôt qui interviendrait sans cela lui paraît indésirable pour des raisons économiques. Ainsi, une augmentation justifiée des prix de vente au détail par suite d'une élévation du coût des matières brutes ou des salaires ne se répercutera pas automatiquement sous forme d'une charge fiscale accrue; en outre, les prix de vente au détail ne seront pas, de ce fait, augmentés une fois de plus, directement ou indirectement, par un transfert de la charge fiscale sur les consommateurs ou par une qualité inférieure, ce qui pourrait avoir pour conséquence un recul de la consommation, puis une diminution des recettes découlant de l'imposition du tabac.

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Chapitre troisième.

Perception et remboursement de l'impôt L'article 12 est calqué en grande partie sur le droit actuel (art. 137 et 138 LAVS). La seule innovation est l'enregistrement obligatoire pour les importateurs de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes destinés à la revente.

L'enregistrement est une mesure de contrôle indispensable à l'application de l'imposition et au recouvrement de l'impôt.

L'article 13 est un complément de l'article 12. L'obligation reversale imposée aux fabricants de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes de ne remettre qu'à des entreprises inscrites au registre les matières brutes, ainsi que les tabacs manufacturés et papiers à cigarettes non encore prêts à la consommation, c'est-à-dire non encore imposés, permet de soumettre ces produits aux dispositions de la présente loi, afin d'éviter que soit éludé l'impôt sur les articles finis tirés de ces produits. Les obligations reversâtes correspondantes concernant les importateurs et les marchands de matières brutes ont été instituées dans le même dessein.

L'article 14, 1er alinéa, est conforme au droit actuel (art. 137, 5e alinéa, et art. 138, 5e alinéa, LAVS). La comptabilité de fabrication est nécessaire pour permettre de vérifier en tout temps l'exactitude des déclarations fiscales mensuelles. Les 2e et 3e alinéas portent également sur des mesures de contrôle destinées à empêcher des détournements de matières brutes ainsi que de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes non imposés. Ainsi que nous l'avons exposé d'une manière circonstanciée sous chapitre III, chif, 1, les droits de douane sur le tabac brut de toute provenance ont été supprimés et englobés dans l'impôt; en conséquence, les droits de douane grevant les matières brutes importées en franchise, puis livrées ou utilisées à des fins autres que la fabrication de tabacs manufacturés, doivent être payés après coup.

L'article 15 contient les prescriptions sur les emballages pour la vente de détail, prescriptions qui, dans une large mesure, sont semblables aux dispositions actuelles de la loi et de l'ordonnance sur l'imposition du tabac (art. 117, lettre b, art. 134, 1er alinéa, LAVS; art. 37, 85 à 87 de l'ordonnance); elles sont nécessaires à la fixation de l'impôt ou pour des raisons de contrôle. Il est bien entendu que le 1er alinéa,
aux termes duquel les tabacs manufacturés ne peuvent quitter la fabrique ou être importés qu'en emballage pour la vente au détail, ne tend pas à rendre impossible la vente à la pièce de cigarettes ou de cigares dans les magasins et les restaurants. La prescription selon laquelle l'importation de tabacs manufacturés n'est autorisée qu'en emballages pour la vente au détail ne constitue pas une mesure discriminatoire au détriment des partenaires de la Suisse dans l'AELE. De toute façon, l'obligation relative à l'emballage touche également la fabrication indigène. En outre, d'autres pays de l'AELE (Autriche, Danemark, Suède) connaissent également des dispositions légales

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selon lesquelles les tabacs manufacturés, qu'ils aient été fabriqués dans le pays ou importés, ne peuvent être mis sur le marché que dans des emballages pour la vente au détail. De même, la prescription selon laquelle les prix de vente au détail doivent être indiqués aussi bien sur les tabacs manufacturés importés que fabriqués en Suisse ne doit pas être considérée comme une entrave au commerce des produits étrangers; par ailleurs, pour diverses raisons, cette disposition existe également dans nombre d'autres Etats.

2e alinéa: La prescription selon laquelle le tabac à coupe fine ne peut être vendu que dans des emballages d'un contenu de 250 g au maximum a été tirée du droit actuel (art. 85, 1er al, lettre a, de l'ordonnance sur l'imposition du tabac) ; le tabac à coupe fine pouvant être utilisé pour la fabrication de cigarettes, on pouvait éluder l'impôt dans la fabrication industrielle des cigarettes en les vendant en emballages d'un contenu supérieur.

Le 3e alinéa correspond au droit actuel (art. 117, lettre b, et art. 134, er 1 alinéa LAVS).

Les articles 16 à 22 portent sur la détermination et le paiement de l'impôt.

Le 1er alinéa de l'article 16 correspond au droit actuel (art. 86, 1er al., de l'ordonnance sur l'imposition du tabac). La fixation à l'avance du taux d'impôt applicable est destinée à simplifier la procédure de détermination ; elle n'entre pratiquement en ligne de compte que pour les cigarettes et cigares dont le poids par pièce et le prix de vente au détail ne sont pas sujets à variations.

Selon l'article 17, l'impôt grevant les tabacs manufacturés en Suisse est déterminé par la direction générale des douanes ; celui grevant les tabacs manufacturés importés, par les bureaux de douane. Le 1er alinéa de l'article 18 prévoit que le délai de paiement de- 60 jours à compter de la notification de la détermination -- délai qui, selon le droit actuel (art. 125, 1er al. LAVS) n'est accordé qu'aux fabricants suisses de tabacs manufacturés et de papiers à cigarettes -- sera applicable désormais également aux importateurs. Cette égalité de traitement se justifie aussi eu égard aux importations en provenance de pays de l'AELE. Quant au fond, les articles 19 et 20 sont très proches du droit actuel (art. 133 LAVS; art. 67 s. de l'ordonnance sur l'imposition des tabacs; art. 125 et 135
LAVS). Selon le 1er alinéa de l'article 21, la différence est réclamée lorsque, par suite d'une erreur de l'administration, un impôt dû n'a pas été liquidé ou a été liquidé trop bas, ou un remboursement a été fixé trop haut.

Inversement, si le contrôle officiel de la détermination de l'impôt ou les contrôles d'entreprises révèlent qu'un impôt a été perçu indûment, le montant perçu en trop est remboursé d'office (art. 21, 2e al.). Cette disposition relative à la perception et au remboursement de différences d'impôt s'inspire de la loi sur les douanes (art. 125 et 126). L'article 22 régit la prescription conformément aux récentes législations dans d'autres domaines (cf. art. 17 de la loi fédérale sur l'impôt anticipé; RO 1966, 385): la créance fiscale se prescrit par 5 ans dès la fin de l'année civile au cours de laquelle elle a pris naissance (art. 9 du projet).

L'article 23 indique les conditions auxquelles est subordonné le remboursement de l'impôt grevant les tabacs manufacturés et les papiers à cigarettes Feuille fédérale, 119' année. Vol. I.

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fabriqués en Suisse, La seule innovation réside dans la disposition selon laquelle les tabacs manufacturés retirés du marché peuvent être non seulement rendus inutilisables, mais remis gratuitement à des institutions s'occupant uniquement de l'assistance sociale des pauvres, des malades, des invalides et des vieillards.

Comme c'est déjà le cas dans le droit actuel (art. 116, 2e al. LAVS), le Conseil fédéral est autorisé, selon l'article 25, à accorder des indemnités pour la sauce de tabac résultant de la fabrication de cigares en Suisse; des fabriques spécialisées transforment cette substance en extraits de tabac ou en nicotine, qui sont utilisés pour la fabrication de produits antiparasitaires et de produits pharmaceutiques, non assujettis à l'impôt.

Chapitre quatrième Tabac indigène Les articles 26 à 28 sont consacrés au tabac indigène. Les modifications essentielles comparativement au droit actuel ont été dictées par la convention AELE; elles sont motivées et commentées sous chapitre III, chiffre 5.

L'article 26 établit le principe des contributions octroyées par la Confédération, en précise le but et en indique la source. Ces contributions doivent, en particulier, permettre aux planteurs d'obtenir, pour le tabac offert, de bonne qualité, des prix couvrant les frais de production moyens du tabac, calculés sur une période de plusieurs années, dans des entreprises agricoles exploitées d'une façon rationnelle et reprises à des conditions normales. La fixation de ces prix repose donc sur le principe de la couverture des frais, selon l'article 29, 1er alinéa, de la loi fédérale sur l'agriculture. Afin de déterminer aussi exactement que possible les prix à la production, la fédération suisse des associations de planteurs de tabac et la société coopérative pour l'achat de tabacs indigènes, en collaboration avec la division de l'agriculture et la direction générale des douanes, recensent depuis 1965 le coût de la production pour des récoltes s'étendant à plusieurs années. La première phrase du 1er alinéa de l'article 26 précise que les contributions seront prélevées sur les recettes provenant de l'imposition des tabacs manufacturés avec du tabac indigène; ces contributions seront versées à l'organisation des planteurs, qui remet le tabac aux fabricants.

Le 2e alinéa confie au Conseil fédéral
l'exécution des mesures nécessaires à l'octroi des contributions. Le Conseil fédéral fixe notamment les prix de production selon le 1er alinéa en fonction des variétés et qualités, puis statue sur le montant des contributions. Viennent s'ajouter aux prix à verser aux planteurs les suppléments résultant des frais de réception du tabac et de sa fermentation, ces derniers étant calculés compte tenu de la perte de poids résultant de la fermentation. Le prix ainsi calculé se rapporte à la matière prête a la fabrication, comme c'est le cas du tabac brut, qui est toujours importé à l'état fermenté.

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Article 27, 1er alinéa: Les dispositions régissant la taxation et la prise en charge du tabac, de même que les questions plutôt techniques se rapportant à l'octroi des contributions, seront précisées dans l'ordonnance.

'Le 2e alinéa règle la prise en charge obligatoire de tabac indigène, que le Conseil fédéral peut décréter en cas de nécessité; cette prise en charge obligatoire est toutefois limitée à la récolte d'une surface de 1000 ha (v. a. commentaires sous chapitre III, chiffre 5,). La disposition astreignant les fabricants à prendre en charge du tabac indigène n'implique toutefois pas l'obligation de procéder à des mélanges; le producteur a toute latitude pour déterminer l'adjonction de tabac indigène aux différents produits. Faute d'une prise en charge obligatoire, les mesures prévues dans le projet de loi pour maintenir la culture indigène du tabac se révéleront probablement illusoires.

Article 28 : Les cantons sur le territoire desquels on cultive le tabac collaboraient déjà au recensement des cultures et des récoltes (art. 95 de l'ordonnance sur l'imposition du tabac). Nous envisageons de confier les tâches découlant des contributions de la Confédération -- en tant qu'elles incombent à la fédération suisse des associations de planteurs de tabac -- à une commission spéciale comprenant également des représentants de la division de l'agriculture et de la direction générale des douanes. Vu l'importance de cette commission, qui serait chargée d'organiser et d'appliquer la mise en oeuvre du tabac indigène et qui serait également responsable de l'emploi judicieux des contributions fédérales, il est indiqué de préciser ses attributions dans un règlement; celui-ci devrait être soumis à l'approbation de la direction générale des douanes et de la division de l'agriculture (une disposition y relative figurera dans l'ordonnance).

Chapitre cinquième Restitutions de contributions et d'indemnités

Selon l'article 29, la Confédération a le droit de demander la restitution de contributions et d'indemnités qui, d'emblée ou ultérieurement, se révèlent injustifiées. La réglementation proposée se fonde sur les dispositions corres.pondantes de la loi sur le blé (RO 1959, 1033) et sur l'arrêté fédéral du 20 décembre 1957 tendant à encourager la culture de la betterave sucrière et à mieux assurer l'approvisionnement du pays en sucre (RO 1959, 423).

Chapitre sixième Voies de droit Les articles 30 à 32 régissent la procédure de réclamation et de recours; c'est intentionnellement que cette réglementation revêt une forme simple.

Article 30: Les décisions de la direction générale des douanes peuvent être attaquées par voie de réclamation. Cette disposition doit permettre à la direc-

164 tion générale des douanes de revoir une décision avant que celle-ci ne fasse l'objet d'un recours de droit administratif.

Article 31 : Les mesures des bureaux de douane, ainsi que les mesures et les décisions des directions d'arrondissement, peuvent être attaquées par la voie du recours douanier, conformément aux article 109 s. de la loi sur les douanes. Il s'agit ici uniquement de différends en matière de détermination de l'impôt sur les tabacs manufacturés importés, étant donné que les bureaux de douane sont seuls compétents pour fixer l'impôt sur les tabacs manufacturés importés (art. 17, 3e al.); cette fixation va de pair avec la fixation des droits de douane lorsque ces produits sont importés de pays ne faisant pas partie de l'AELE.

Article 32, 1er alinéa: Les décisions de la direction générale des douanes, sur réclamation ou sur recours, peuvent être attaquées, dans les 30 jours suivant leur notification, devant la commission fédérale des recours en matière de douane s'il s'agit de la détermination d'un montant d'impôt. Cette disposition est conforme au droit actuel (art. 139 LAVS: «La fixation des droits et taxes sur les tabacs manufacturés et le papier à cigarettes, dans les cas d'espèce, ainsi que les décisions relatives à la réduction ou au remboursement de ces redevances, peuvent être attaquées devant la commission fédérale des recours en matière de douane»). Dans tous les autres cas, il faut dorénavant suivre la voie du recours administratif au Tribunal fédéral. Ainsi, toutes les décisions de la direction générale des douanes peuvent être déférées à l'appréciation d'un tribunal, contrairement au droit actuel, qui prévoit, pour certains cas, le recours administratif au département fédéral des finances et des douanes, sous réserve de recours administratif au Conseil fédéral (art. 140, 2e alinéa, LAVS).

2e alinéa: Selon l'article 112, 1er alinéa, de la loi sur les douanes, les recours à une instance supérieure, c'est-à-dire à la commission fédérale des recours en matière de douane, doivent être déposés dans les 20 jours. Cependant, si le recours à ladite commission attaque une détermination de droits de douane opérée en même temps que la détermination de l'impôt, le délai sera dorénavant également de 30 jours. Cette unification des délais pour les recours s'élevant simultanément
contre une fixation de droits de douane et une détermination d'impôt -- comme ce sera le cas lors de l'importation de tabacs manufacturés en provenance de pays ne faisant pas partie de l'AELE -- est dans l'intérêt du recourant, car il devrait sans cela attaquer dans les 20 jours une décision sur recours concernant la fixation des droits de douane et dans les 30 jours une telle décision relative à la détermination de l'impôt.

Chapitre septième Dispositions pénales Les articles 33 et 43 ont trait au droit pénal et à la procédure pénale.

Les dispositions pénales ont été en grande partie remaniées conformément aux résultats des délibérations de la commission instituée par le département

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fédéral de justice et de police en vue de l'élaboration d'une loi fédérale sur le droit pénal administratif, qui a terminé ses travaux en automne 1962. Cette loi fédérale sur le droit pénal administratif vise notamment une revision totale du droit pénal relatif aux décrets fiscaux de la Confédération dont l'application est confiée aux autorités fédérales, ainsi que du droit pénal fiscal relevant des articles 279 s. de la loi fédérale sur la procédure pénale. Dans le droit transitoire de la loi fédérale sur le droit pénal administratif, les dispositions pénales de la loi sur l'imposition du tabac devront être adaptées à cette nouvelle loi. La structure du projet tient compte de cette circonstance, de sorte que l'adaptation n'entraînera que peu de modifications.

Les dispositions pénales arrêtées séparément n'appellent pas de commentaires spéciaux. La peine d'emprisonnement ou d'arrêts prévue à l'article 34, 2e alinéa, correspond à la prescription semblable contenue dans la loi sur l'impôt anticipé. La disposition relative au recel fiscal ne figure pas dans le droit actuel. Vu que le projet prévoit l'octroi de contributions pour le tabac indigène et d'indemnités pour la sauce de tabac résultant de la fabrication de cigares en Suisse, il a fallu prévoir comme actes délictueux le fait de se procurer illicitement des contributions ou des indemnités, ainsi que l'inobservation des conditions et obligations auxquelles sont subordonnées ces contributions ou indemnités. Enfin, selon le 4e alinéa de l'article 42 et à défaut de dispositions spéciales contenues dans le projet, les dispositions de procédure régissant les contraventions douanières sont applicables aux infractions à la législation sur le tabac.

Chapitre huitième Dispositions finales et transitoires Article 44: cf. chapitre III, chiffre 4, lettre b.

Article 45 : n'appelle pas de commentaires.

Article 46 : Au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, il y aura encore en dépôt des matières brutes déjà grevées de droits de douane et, en partie, également de la taxe de fabrication. Les produits prêts à la consommation, fabriqués avec ces matières, étant assujettis à l'impôt d'après la nouvelle loi, les redevances payées antérieurement seront remboursées, cela afin d'éviter une double imposition.

Dès l'entrée en vigueur de la loi, les tabacs
manufacturés fabriqués avec des stocks de tabac indigène seront, conformément aux tarifs d'impôt, grevés supplémentairement des droits d'entrée actuels englobés dans les taux d'impôt.

Or, ces stocks de tabac indigène ne bénéficieront plus des contributions de la Confédération prévues à l'article 26, raison pour laquelle la différence entre l'ancienne et la nouvelle imposition sera remboursée au fabricant.

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Article 47: Vu les motifs exposés au chapitre ITI, chiffres 6 et 7, les réductions actuelles d'impôt en faveur des petites et moyennes entreprises, ainsi que la garantie des prix, doivent être abolies. Pour permettre aux entreprises visées de s'adapter à la nouvelle situation, le projet prévoit un régime transitoire limité, en ce sens que l'article 127, 1er alinéa, lettre b, de la loi sur l'assurancevieillesse et survivants servira encore de base à l'octroi de réductions jusqu'au 31 décembre 1972 au plus tard; quant aux dispositions de la lettre d, elles permettront, jusqu'au 31 décembre 1970, de maintenir la garantie des prix.

Durant cette période transitoire, les infractions aux prescriptions en matière de garantie des prix seront sanctionnées d'après les dispositions de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants.

V. BASES CONSTITUTIONNELLES Ainsi qu'il ressort de l'introduction, la loi sur l'imposition du tabac repose sur les articles 31 bis, 3e alinéa, lettre b, 32 et 41 bis, 1er alinéa, lettre c et 2e et 3e alinéas, de la constitution.

Quant au fondement constitutionnel de l'imposition, il se trouve dans l'article 41 bis, 1er alinéa, lettre c, de la constitution, selon lequel la Confédération peut percevoir «des impôts sur le tabac brut et manufacturé». L'exécution de cette disposition constitutionnelle ressortit à la législation fédérale (art, 41 bis, 3e al., Cst). A titre de mesure transitoire, le projet prévoit le maintien des réductions d'impôt en faveur des petites et moyennes entreprises de l'industrie du tabac, ainsi que de la garantie des prix. Ces mesures reposent sur l'article 127, 1er alinéa, lettres b et d, de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants, qui restent en vigueur, sans modification, jusqu'à l'expiration du régime transitoire. Cette solution est constitutionnellement irréprochable, car l'article 127, qui repose sur l'ancien article 34fer de la constitution, n'a pas été abrogé par les nouveaux articles dits «économiques». Tant que la teneur actuelle de l'article 127 LF demeure inchangée dans les limites d'un régime transitoire, le Conseil fédéral a toujours la compétence d'édicter, par voie d'ordonnance, des mesures tendant à maintenir les petites et moyennes entreprises de l'industrie du tabac, ainsi qu'à régler le commerce de détail des tabacs manufacturés
et du papier à cigarettes. Il est prévu d'insérer dans l'ordonnance les dispositions concernant les réductions d'impôt et la garantie des prix. Les réductions d'impôt devront être adaptées au nouveau système d'imposition. En ce qui concerne les prescriptions régissant la garantie des prix, il faudra tenir compte du jugement du Tribunal fédéral mentionné à la p. 44. Les mesures financières proposées en vue du maintien, de l'encouragement et de la rationalisation de la culture indigène du tabac, de même que la compétence du Conseil fédéral d'ordonner la prise en charge obligatoire de tabac indigène par les fabricants, reposent sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettre b, de la constitution, aux termes duquel « la Confédération a le droit d'édicter des dispositions pour conserver une forte population paysanne, assurer la productivité de l'agriculture et consolider la propriété rurale». La condition imposée par l'article 3lbis, 4e alinéa. («Les

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branches économiques et les professions ne seront protégées par des dispositions fondées sur les lettres a et b que si elles ont pris les mesures d'entr'aide qu'on peut équitablement exiger d'elles») est remplie en l'occurrence. A ce sujet, nous renvoyons au chapitre ï, chiffre 2, lettre a, où il est spécifié que les organisations de planteurs et d'acheteurs se sont groupées sous forme d'organismes faîtiers et que les rapports entre ces derniers ont fait l'objet d'une convention visant notamment le but suivant: réglementer la culture et la livraison du tabac de manière à garantir un écoulement rationnel en fonction des besoins de l'industrie. La collaboration des cantons et des organismes économiques à l'application des prescriptions repose sur l'article 32 de la constitution.

Berne, le 10 janvier 1967.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, Bonvin

17211

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant projet d'une loi fédérale sur l'imposition du tabac (Du 10 janvier 1967)

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