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Feuille Fédérale Berne, le 17 août 1967

119e année

Volume II

N°33 Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 36 francs par an: 20 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement

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Rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur l'initiative populaire contre la pénétration étrangère (Du 29 juin 1967) Monsieur le Président et Messieurs, Le parti démocratique du canton de Zurich a déposé le 30 juin 1965 à la chancellerie fédérale une initiative contre la pénétration étrangère appuyée par 59 164 signatures valables. Cette initiative populaire, dont la recevabilité a été constatée par l'arrêté du Conseil fédéral du 23 juillet 1965, a la teneur suivante: Les citoyens suisses soussignés font, en vertu de l'article 121 de la constitution fédérale et en conformité de la loi fédérale du 23 mars 1962 concernant le mode de procéder pour les initiatives populaires relatives à la revision de la constitution, la demande d'initiative suivante: Article premier La constitution fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1874 est complétée comme il suit : Art. 69quater Le nombre des étrangers établis ou en séjour ne doit pas dépasser, dans l'ensemble, un dixième de la population résidente. Pour prévenir le danger de pénétration étrangère, le nombre des ressortissants étrangers en séjour doit, dès l'entrée en vigueur de la présente disposition, être abaissé de cinq pour cent au moins chaque année jusqu'à ce que le maximum autorisé soit atteint, et compte tenu des exigences humanitaires.

Les besoins de l'économie seront pris équitablement en considération. Le Conseil fédéral décide chaque année la réduction à opérer dans chaque canton. L'autorité fédérale qu'il désigne annule, si besoin est, des autorisations de séjour.

Art. II L'article 69quater de la constitution entre en vigueur le 1er janvier de l'année suivant son acceptation par le peuple et les cantons et son homologation par l'Assemblée fédérale.

Feuille fédérale, 119- année. Vol. II.

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Nous avons l'honneur de vous soumettre ci-après notre rapport sur cette initiative populaire.

I. ÉVOLUTION DE L'EFFECTIF DES ÉTRANGERS ET POLITIQUE SUIVIE JUSQU'ICI EN MATIÈRE D'ADMISSION D'ÉTRANGERS 1. Evolution jusqu'à la première guerre mondiale Avec l'industrialisation du pays, qui s'est poursuivie depuis le milieu du siècle dernier, et le développement économique provoqué par la construction des chemins de fer, les besoins de main-d'oeuvre s'accrurent de manière très sensible. Attirés par des conditions économiques d'existence relativement favorables, des travailleurs étrangers provenant surtout des Etats voisins affluèrent en nombre toujours plus grand dans notre pays. La Suisse a en outre exercé, de tout temps, en raison de sa situation géographique favorable ainsi que de la stabilité de ses institutions politiques et de ses conditions économiques, une forte attraction sur d'autres catégories d'étrangers. Les traités d'établissement conclus avant la première guerre mondiale favorisèrent ce mouvement migratoire vers la Suisse. C'est ainsi que les ressortissants des Etats contractants pouvaient s'établir sans autres difficultés en Suisse et y exercer l'activité professionnelle de leur choix car les traités d'établissement les plaçaient sur le même pied que les citoyens suisses d'autres cantons en ce qui concerne le séjour et l'exercice d'une activité lucrative. Dans la pratique, cette liberté d'établissement et cette libre circulation des travailleurs s'étendirent aussi, avec le temps, à des ressortissants d'Etats avec lesquels la Suisse n'avait pas conclu de traité d'établissement, voire à des apatrides. La police des étrangers était alors l'affaire des cantons.

Il était tout au plus possible de s'opposer à l'admission d'étrangers pour des motifs de police et pour cause d'indigence; on ne connaissait pas, à l'époque, de mesures de défense prises selon une politique touchant l'admission des étrangers. Cette évolution, qui devait aboutir à un excès caractérisé de pénétration étrangère, ressort des chiffres qui suivent: Part des étrangers dans la population résidente de la Suisse, en pour-cent:

1850 1860 1870 1880 1888 1900 1910 ~3$ 4,6^7 7^4 "7^9TTë Ï4/7 La croissance toujours plus forte de la population étrangère avait déjà fait naître, à l'époque, une grande inquiétude au sein du peuple suisse; de larges milieux de la population voyaient avec beaucoup de souci s'accroître continuellement le taux des étrangers. Fait caractéristique, on ne recherchait alors la solution au problème de la pénétration étrangère que dans des mesures propres à stimuler l'assimilation et la naturalisation des étrangers; la liberté d'établissement étant considérée comme allant de soi, on ne pensait pas à des mesures destinées à endiguer l'immigration des étrangers. C'est ainsi qu'en 1909 déjà, la commission de gestion du Conseil national avait invité le Conseil

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fédéral, par un postulat, à examiner comment il serait possible de lutter contre un excès de population étrangère en facilitant la naturalisation. Le rapport présenté le 30 mai 1914 par le département politique fédéral, qui examinait aussi de façon approfondie le danger de pénétration étrangère, ne proposait pas de mesures de défense contre l'afflux de nouveaux étrangers, mais partait également de l'idée qu'il suffirait d'encourager l'assimilation des étrangers et de faciliter leur naturalisation pour enlever ce caractère de gravité au problème qui se posait. Le Conseil fédéral envisageait de soumettre aux conseils législatifs durant la session d'automne 1914 un message contenant les propositions faites dans ce rapport. H en fut toutefois empêché par la première guerre mondiale, qui avait éclaté entre-temps.

2. Evolution de la première à la seconde guerre mondiale Les hostilités de 1914-1918 créèrent une situation entièrement nouvelle.

Des dizaines de milliers d'étrangers quittèrent notre pays pour donner suite à l'ordre de marche qu'ils avait reçu. En outre, les Etats belligérants se virent contraints de soumettre à contrôle l'entrée et le séjour des étrangers. Tout d'abord, notre pays continua à accorder l'établissement aux nouveaux venus. Les conditions s'étant modifiées du tout au tout, la Suisse ne put également éviter, vers la fin de la guerre, de prendre les mesures nécessaires afin d'empêcher la venue d'étrangers indésirables et, en outre, de purger le pays des nombreux éléments peu recommandables qui s'y étaient fixés durant la guerre pour les raisons les plus diverses. Se fondant sur les pouvoirs extraordinaires qui lui avaient été conférés, le Conseil fédéral édicta le 21 novembre 1917 une ordonnance concernant la police à la frontière et le contrôle des étrangers *). En introduisant l'obligation de requérir le visa, ces prescriptions tendaient en premier lieu à assurer un tri minutieux des étrangers avant leur entrée en Suisse. En outre, les cantons étaient autorisés à expulser de l'ensemble du territoire fédéral les étrangers indéskables lorsque certaines conditions étaient remplies. Un office central de la police des étrangers fut de surplus créé et rattaché au département fédéral de justice et police; il avait pour tâche de donner les instructions nécessaires, d'apprécier les
renseignements qui devaient lui être communiqués sur les personnes suspectes et de statuer sur ces cas.

Après la fin de la guerre, la question du remplacement de ces sévères mesures de contrôle se posa. Comme on ne pouvait envisager d'en revenir au régime de libre circulation des personnes qui existait sur le plan international avant la guerre, mais que l'opinion prévalait que la liberté d'établissement accordée par les traités ne pouvait être restreinte ou supprimée que par une dénonciation et une modification formelles des traités, le Conseil fédéral décida de dénoncer à titre de précaution pour le 10 avril 1919 les traités conclus avec l'Italie et l'Allemagne. La France avait, pour sa part, déjà dénoncé le traité conclu avec notre pays. Toutefois, en vertu d'un arrangement, les traités passés avec ces trois Etats restèrent en vigueur provisoirement.

!) RO 1917, 989.

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Le Conseil fédéral édicta le 17 novembre 1919, à titre de mesure transitoire applicable jusqu'à la conclusion de nouveaux traités d'établissement, son ordonnance sur le contrôle des étrangers l), qui assouplit les prescriptions sévères s'appliquant jusqu'alors au visa d'entrée et mit principalement l'accent sur les contrôles s'exerçant à l'intérieur du pays.

Il apparut par la suite qu'une refonte des traités d'établissement conclus n'était guère réalisable et, en outre, qu'elle n'était plus absolument nécessaire.

Les Etats contractants prirent tacitement connaissance du fait que les nouveaux régimes nationaux de police des étrangers instaurés dans la plupart des pays soumettaient à autorisation de la pouce l'entrée, le séjour et l'exercice d'une activité lucrative. Depuis lors, les traités d'établissement ont été interprétés compte tenu de cette réserve tacite quant à la fixation des conditions d'admission des étrangers. Cette interprétation a été expressément confirmée par accords additionnels passés avec différents Etats. En outre, les traités d'établissement conclus depuis la première guerre mondiale réservent expressément l'application du droit national en ce qui concerne les conditions auxquelles est subordonnée l'admission des étrangers. Il en a résulté que seuls les étrangers admis à résider définitivement dans le pays en vertu du régime national de police des étrangers peuvent se prévaloir sans aucune restriction des clauses d'un traité d'établissement.

La possibilité était ainsi juridiquement créée d'établir en matière d'admission des étrangers une pratique conforme aux intérêts de notre pays. L'ordonnance du Conseil fédéral du 29 novembre 19212) sur le contrôle des étrangers, qui sé fondait également sur les pouvoirs extraordinaires conférés au Conseil fédéral, constitua un premier pas dans cette direction. Mais on manquait de la base constitutionnelle nécessaire pour passer du régime instauré sous l'empire des pouvoirs extraordinaires à une réglementation fédérale édictée selon lés voies normales. Cette base constitutionnelle fut créée par l'article 69 ter de la constitution fédérale adopté en votation populaire le 25 octobre 1925, qui donna à la Confédération le droit de légiférer en matière d'entrée et de sortie, de séjour et d'établissement des étrangers. La nouvelle disposition
constitutionnelle permit d'édicter le 26 mars 1931 la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers3), qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1934 avec le règlement d'exécution y relatif du Conseil fédéral.

Le but fondamental de la loi est de lutter contre un excès de pénétration étrangère en réglant l'admission des étrangers en Suisse, ainsi que le séjour de ceux qui n'ont pas encore été admis à s'y fixer définitivement. Cette intention du législateur est exprimée dans la prescription de l'article 4 de la loi, qui précise que l'autorité statue librement, dans le cadre des prescriptions légales et des traités internationaux, sur le séjour et l'établissement des étrangers. De plus, l'article 16 de la loi prescrit que les autorités doivent tenir compte dans leurs !) RO 1919, 947.

RO 1921, 829.

) RS 1, 113; RO 1949,1, 225.

2 ) a

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décisions des intérêts moraux et économiques du pays, ainsi que du degré de surpopulation étrangère, la situation du marché du travail devant être aussi spécialement prise en considération, selon l'article 8 du règlement d'exécution, lors de l'examen des demandes d'autorisation. Ainsi a été confirmé et précisé le principe déjà énoncé dans l'ordonnance du 29 novembre 1921, selon lequel l'admission d'étrangers doit être subordonnée dans chaque cas à la capacité d'absorption du pays.

L'application de ce principe à la politique suivie en matière d'admission des étrangers, mais surtout les départs très nombreux d'étrangers rentrés dans leur pays lors du premier conflit mondial, ainsi que la grande crise économique ont eu pour conséquence que la part des étrangers dans notre population de résidence a fortement diminué durant la période d'entre les deux guerres. Elle a atteint en 1941 le niveau le plus bas (5,2 %) depuis 1870: 1910 1914 1920 1930 1941 14,7

15,4

10,4

8,7

5,2 pour cent

3. Evolution de la fin de la seconde guerre mondiale à I960

La période d'après-guerre est caractérisée par une rapide croissance de l'activité économique. Comme la plupart des autres Etats, la Suisse a participé à l'énorme expansion économique provoquée par la reconstruction et la demande différée de biens. Etant donné qu'elle disposait d'un appareil de production intact, notre industrie se vit bientôt surchargée de commandes provenant de l'étranger. Mais à l'intérieur du pays aussi, la forte demande de biens de consommation de tous genres, l'activité de plus en plus grande dans la construction de logements, ainsi que la rénovation et l'agrandissement de nombreuses installations industrielles entraînèrent en un bref laps de temps une tell& augmentation des besoins de main-d'oeuvre que ceux-ci ne purent plus être satisfaits sur le marché indigène du travail. D'après les relevés de l'office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail régulièrement effectués en février depuis 1949 et également en août depuis 1955, l'effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle tripla de février 1950 à février 1960, passant de 90 112 à 275 291. Depuis 1950, le nombre de ces étrangers a évolué comme il suit: Travailleurs étrangers soumis à contrôle1) (1950-1960)

1

Année

Effectif de février

Année

Effectif de février

1950 1951 1952 1953 1954 1955

90112 95393 132282 139379 149987 166210

1956 1957 1958 1959 1960

194532 236984 261572 250794 275291

) Non-saisonniers, saisonniers et frontaliers.

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Sur les 275 291 travailleurs recensés au total en février 1960, on comptait 214 285 non-saisonniers (78 %) et 27 428 saisonniers (10 %) seulement, cette catégorie de travailleurs étant faiblement représentée à cette époque de l'année; il y avait en outre 33 578 frontaliers (12 %).

Cet afflux massif de main-d'oeuvre étrangère ne manqua pas d'influer sur l'accroissement de l'ensemble de la population étrangère résidant en Suisse, ainsi que le montre le tableau suivant: Fart des étrangers dans la population de résidence (1941 -1960) Année

1941 1950 19551) 1960

Population, résidente loiale

4266000 4715000 5004000 5429000

dont étrangers en valeur absolue en %

224000 285000 340000 585000

5,2 6,1 .6,8 10,8

!) Estimation.

L'opinion a tout d'abord prévalu que l'activité économique redeviendrait normale à plus ou moins brève échéance et que le nombre des travailleurs étrangers auxquels notre économie avait dû recourir pourrait être de nouveau abaissé de manière correspondante; C'est pourquoi les autorités s'appliquèrent en premier lieu à conserver dans toute la mesure du possible a l'emploi de travailleurs étrangers soumis à contrôle le caractère temporaire qu'il avait à l'époque. A cet effet, la durée du séjour .après laquelle le travailleur étranger a droit à l'autorisation d'établissement a été portée de cinq à dix ans dans les arrangements complémentaires conclus en 1948 et 1953 avec l'Italie et l'Allemagne pour régler les conditions d'établissement des ressortissants de ces deux Etats d'où provenait la majeure partie de notre main-d'oeuvre étrangère. Un accord conclu en 1950 avec l'Autriche a également fixé à 10 ans la durée après laquelle les ressortissants des deux Etats contractants peuvent être admis à s'établir à demeure dans l'autre pays. En outre, les cantons qui, en règle générale, doivent statuer dans chaque cas particulier sur les demandes d'admission de travailleurs étrangers, reçurent des instructions détaillées leur enjoignant d'adapter l'effectif des étrangers aux nouvelles conditions en cas de fléchissement du degré de l'emploi dans une entreprise ou un domaine économique, de maintenir le changement de place et de profession dans des limites aussi étroites que possible, ainsi que d'éloigner à temps les étrangers ne donnant pas satisfaction sur le plan professionnel ou quant à leur comportement. Ces mesures de précaution furent approuvées tant par la conférence des chefs des départements cantonaux dont relèvent la police et le marché de l'emploi, qui avait été convoquée par le département fédéral de justice et police au printemps 1953, que par la commission fédérale du marché de l'emploi, chargée d'examiner les questions de principe touchant ce marché.

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Pour qu'il fût possible d'apprécier les effets à longue échéance de l'afflux considérable de travailleurs étrangers, des enquêtes statistiques détaillées furent exécutées en octobre 1952 et 1955, ainsi qu'en février 1959 sur la durée du séjour ininterrompu de ces travailleurs. Les résultats de ces recherches ont confirmé les observations et les estimations faites précédemment, selon lesquelles un grand nombre de travailleurs étrangers entrés chaque année en Suisse quittaient notre pays au cours des quelques années suivantes. C'est ainsi qu'en février 1959, on n'enregistrait en Suisse, sur 199 000 travailleurs non saisonniers soumis à contrôle, que 49 000 (ou 25 % de l'ensemble) séjournant depuis 3 ans ou plus dans notre pays et que 22 000 (ou 11 %) y résidant depuis plus de 5 ans.

En comparant ces données à celles des recensements de 1955 et de 1952, on pouvait constater, ainsi que cela ressort du tableau ci-après, que la part des étrangers exerçant une activité lucrative, qui séjournaient en Suisse depuis plusieurs années, n'a pas augmenté depuis 1955.

Durée du séjour ininterrompu des travailleurs étrangers soumis à contrôle

(relevés des 1er octobre 1952, 1er octobre 1955 et 28 février 1959) Travailleurs étrangers soumis à contrôle en tout1)

Relevé du er

1 octobre 1952 1er octobre 1955 28 février 1959

Valeur absolue Durée du séjour

121 000 150000 199 000

depuis plus de 3 uns

26000 37000 49000

Travailleurs Durée du séjour étrangers soumis à depuis plus contrôle dcpuisplus depuisplus de 5 ans en tout1) de 3 ans de 5 ans

9000 16000 22000

21 25 25

100 100 100

7 11 11

*) Sans les saisonniers.

Ces résultats permirent alors de tirer la conclusion que le degré de pénétration étrangère n'avait rien de menaçant. On arrivait du reste à une appréciation semblable de la situation en considérant l'évolution de l'effectif des étrangers au bénéfice du permis d'établissement, telle qu'elle ressort du tableau ci-dessous (en partie estimations) : Population Étrangère de résidence (1910-1960)

Année

Etrangers au total1)

1910 1930 1941 1950 1955 1960

552000 356000 224000 285000 340000 506 000

Etablis

Au bénéfice d'un permis de séjour1)

Part en % de la population residente / Au bénéfice Total Etablis d'un permis de séjour

552000 262000 180000 159000 137000 138000

-- 94000 44000 126 000 203 000 368 000

14,7 8,7 5,2 6,1 6,8 9,5

14,7 6,4 4,2 3,4 2,8 2,6

· --.

2,3 1,0 2,7 4,0 6,9

*) Sans les saisonniers, y compris les fonctionnaires d'organisations internationales.

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A rencontre du chiffre absolu de la population étrangère de résidence et de sa part dans la population totale, le nombre des étrangers au bénéfice du permis d'établissement a régressé depuis 1910 pour atteindre son niveau le plus bas en 1957 (134 000); depuis lors, il ne s'est accru que dans de modestes proportions jusqu'en 1960. Si la diminution continue enregistrée avant la seconde guerre mondiale a résulté en premier lieu du conflit armé de 1914-1918 et de la crise économique des années «trente», le fléchissement ultérieur de l'effectif des étrangers au bénéfice du permis d'établissement doit être attribué aux départs provoqués par le second conflit mondial, ainsi qu'au fait que le nombre des personnes pouvant prétendre l'établissement était relativement faible et que l'effectif des étrangers établis a encore subi d'appréciables pertes au cours des années «cinquante», surtout en raison du vieillissement. La réintégration de 17 000 femmes suisses par naissance rétablies dans leur ancien droit de cité en vertu de la loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse a contribué à réduire encore davantage cet effectif.

Ces aspects relativement réjouissants ont toutefois leur envers: au cours des années qui suivirent la dernière guerre, le nombre des étrangers en possession d'autorisations de séjour n'a cessé de s'accroître. Même si, comme cela a été exposé, les enquêtes relatives à la durée de la présence des étrangers soumis à contrôle ont donné des résultats apaisants, on se rendait bien compte, à l'époque, que le nombre des étrangers au bénéfice du permis d'établissement ne manquerait pas de s'accroître rapidement si la période de. grande prospérité économique devait persister longtemps encore. Un rapport rédigé en mars 1958 par le département fédéral de justice et police et le département fédéral de l'économie publique insistait déjà sur la possibilité de telles évolutions démographiques et sur leurs conséquences. Après une analyse détaillée de la situation existant alors sur le plan de la pénétration étrangère et après un examen approfondi de la politique économique et conjoncturelle, tenant surtout compte de l'évolution économique prévisible, les auteurs du rapport en arrivèrent toutefois à la conclusion qu'il convenait de poursuivre durant l'avenir
immédiat une politique d'admission de main-d'oeuvre visant en premier lieu à satisfaire les besoins de l'économie. Ce rapport fut approuvé à l'époque par le Conseil fédéral.

4. Evolution depuis I960 La persistance d'une situation économique extrêmement favorable depuis 1960 provoqua une augmentation générale de plus en plus forte de la demande de main-d'oeuvre. Etant donné l'ampleur de la demande de biens et de services, de nombreux employeurs se virent dans l'obligation absolue soit de développer leur production, soit de perdre au profit de la concurrence indigène ou étrangère des débouchés souvent créés à grand-peine. La possibilité de recruter des travailleurs à l'étranger permit aux employeurs d'utiliser en plein la capacité de production de leur entreprise ou d'agrandir leur exploitation afin de sauvegarder

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leur position sur le marché international. De plus, l'équipement collectif (logements, routes, approvisionnement en eau potable, épuration des eaux usées, écoles, hôpitaux, autres établissements hospitaliers, etc.), qui datait en grande partie des années d'avant la guerre et ne permettait plus de satisfaire les besoins d'une population en constante augmentation, devait être considérablement et rapidement développé. Il fallait donc également y occuper une nombreuse main-d'oeuvre étrangère supplémentaire. Les 710 000 logements construits de 1946 à 1966 n'auraient jamais pu l'être sans travailleurs étrangers.

L'armée de travailleurs étrangers occupés par notre économie a contribué à l'accroissement rapide du revenu national au cours de l'après-guerre et, par là-même, à l'amélioration du bien-être général. Au cours de cette évolution, de nombreux Suisses eurent la possibilité d'améliorer leur situation professionnelle.

Il en résulta des transformations profondes de la structure professionnelle dans notre pays. Un nombre toujours plus élevé de Suisses trouvèrent des situations supérieures à celles qu'ils occupaient ou un emploi dans le secteur des services.

Ils laissèrent aux étrangers le soin d'exécuter les travaux pénibles, désagréables, salissants et moins bien rémunérés. Tous ces facteurs eurent pour effet que l'immigration de travailleurs étrangers s'accrut encore très fortement au début des années «soixante».

Travailleurs étrangers soumis à contrôle1) Année

Relevé d'août

Année

Relevé d'août

1955 1956 1957

271149 326065 377097

1961 1962 1963

548312 644706 690013

1958 1959 1960

363391 364778 435476

1964 1965 1966

720901 676328 648548

*) Non-saisonniers, saisonniers et frontaliers.

Sur les 648 548 travailleurs étrangers soumis à contrôle qui ont été recensés en août 1966, 435 979 ou 67,2 pour cent étaient des non-saisonniers, 164 569 ou 25,4 pour cent des saisonniers et 48 000 ou 7,4 pour cent des frontaliers.

Suivant l'évolution esquissée ci-dessus, la population étrangère de résidence a également continué de s'accroître, comme le montre le tableau ciaprès:

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Population étrangère de résidence (1960-1966)

Année

Etrangers au total1)

Etablis

Au bénéfice d'un permis .de séjour1)

Part en % de la population résidente Au bénéfice Total Etablis d'un permis de séjour

506000 368 000 138 000 I960 2,6 6,9 9,5 1961 610000 143 000 467 000 11,1 2,6 8,5 1962 700000 161000 539000 12,5 2,9 9,6 1963 770000 175 000 595000 13,4 3,0 10,4 1964 808000 187 000 621000 3,2 13,9 10,7 1965 825000 202 000 623000 14,0 3,4 10,6 1966 860000 229 000 631 000 14,4 3,8 10,6 ^ sans les saisonniers, y compris les fonctionnaires d'organisations internationales.

De la fin de 1960 à fin 1966, l'effectif des étrangers s'est donc accru d'environ 354000, c'est-à-dire de 70 pour cent. Mais la mesure dans laquelle le danger d'un excès de population étrangère s'est aggravé au cours des six dernières années est également mis en évidence par le fait que l'effectif des étrangers bénéficiant de l'établissement s'accroît de nouveau fortement après avoir continuellement régressé de 1920 à 1957 et n'avoir subi qu'une modeste augmentation jusqu'en 19601). Le fort accroissement de l'effectif des étrangers commença à faire ressentir nettement les désavantages d'ordre politique et économique de l'emploi massif de travailleurs étrangers. A cela s'ajoutait le fait que le rythme du renouvellement de la population étrangère séjournant en Suisse depuis plusieurs années s'était sensiblement ralenti au cours des dernières années. Pour ces raisons ainsi qu'à cause du fort accroissement du nombre des entrées de 1950 à 1962 et de l'excédent toujours plus élevé des naissances d'étrangers, l'effectif des étrangers au bénéfice de l'établissement continuera forcément de s'accroître au cours des prochaines années.

Avec le temps, on se rendit également compte que la possibilité qu'on avait de recruter toujours plus de travailleurs étrangers n'allait pas, à la longue, sans exercer d'effets défavorables sur la productivité et la structure de l'économie. De nombreuses entreprises ont préféré se borner, pour augmenter leur production, à agrandir leur exploitation et à accroître l'effectif de leur personnel. Si le manque de main-d'oeuvre s'était manifesté plus tôt, les entreprises auraient été forcées de passer plus rapidement à un mode d'exploitation faisant plus largement appel au facteur capital et de mécaniser et rationaliser plus fortement leur appareil de production. Il en résulte que, dans divers domaines, l'appareil de production des entreprises suisses a été modernisé dans une plus faible mesure ou plus lentement que
cela n'aurait été le cas sans la présence d'une si nombreuse main-d'oeuvre étrangère. L'emploi d'un nombre très important de travailleurs étrangers a, selon toute probabilité, également influé sur les structures économiques. Les branches et les entreprises dont la production !) Cf. tableaux 3 et 4.

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exige beaucoup de main-d'oeuvre ou dont la productivité est relativement faible, n'ont vraisemblablement pu survivre, dans de nombreux cas, que parce qu'il leur était possible de recruter continuellement de nouveaux travailleurs étrangers pour combler les vides causés dans l'effectif de leur personnel.

La relation entre la productivité et la consommation des étrangers s'est également modifiée. D'une part, les aptitudes professionnelles des étrangers récemment admis, qui devaient être recrutés dans des régions toujours plus éloignées, ont souvent laissé à désirer; il en a résulté des frais de recrutement, de formation et d'assistance sociale de plus en plus élevés. D'autre part, les étrangers qui séjournent depuis un certain temps en Suisse s'adaptent à notre mode de vie. Ils consomment une part de plus en plus grande de leur revenu en Suisse et grèvent toujours plus notre équipement collectif.

L'évolution qui s'est poursuivie depuis 1960 a amené tant les autorités que de larges milieux de l'économie et cercles politiques à revoir leurs conceptions. Jusqu'à la fin des années « cinquante» on estimait encore, d'après le résultat des statistiques, que la politique suivie jusqu'alors en matière d'admission de main-d'oeuvre étrangère serait encore longtemps supportable parce qu'on n'enregistrait pas d'accroissement excessif du nombre des étrangers établis et de ceux qui séjournaient en Suisse depuis une période prolongée. Mais les forts taux d'augmentation des effectifs de travailleurs étrangers au cours des années «soixante» ainsi que l'accroissement sensible du nombre des personnes bénéficiant de l'établissement montrèrent bientôt que la pénétration étrangère avait atteint un degré qui dépassait les limites de ce qui était supportable.

La défense contre un excès de population étrangère avait à faire face à deux grandes tâches. Il s'agissait, d'une part, de ramener le nombre excessif d'étrangers à un niveau supportable et, d'autre part, d'encourager l'assimilation des étrangers qui ont fourni la preuve de leurs aptitudes durant une période prolongée et dont notre économie aura durablement besoin. La commission constituée au début de 1961 par le département fédéral de l'économie publique, de concert avec le département fédéral de justice et police, a contribué à cette prise de conscience en étudiant
de manière approfondie le problème de la maind'oeuvre étrangère, des points de vue économique, démographique, sociologique et politique. Le résultat de ces travaux fut consigné dans un rapport détaillé.

Inquiétés par les désavantages toujours plus manifestes de la surchauffe économique, les groupements centraux de l'économie adressèrent en janvier 1962, avec l'accord du Conseil fédéral, un appel aux employeurs suisses pour leur demander de ne pas accroître sensiblement l'effectif total de leur personnel, de renoncer le plus possible aux projets d'agrandissement d'entreprises et de concentrer leurs efforts sur les investissements qui visent à accroître la productivité tout en économisant de la main-d'oeuvre et en réduisant d'autres frais.

Comme cet appel n'eut pas l'effet escompté, nous nous sommes vus contraints de prendre des mesures. Le 1er mars 1963, nous avons édicté un arrêté

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restreignant l'admission de main-d'oeuvre1), qui limitait l'effectif total du personnel des entreprises (Suisses et étrangers) au niveau maximum noté en décembre 1962. La durée de cette mesure, qui visait à modérer la demande de main-d'oeuvre, était limitée à un an. Si elle put freiner l'accroissement de l'effectif des étrangers, elle ne permit pas de l'arrêter, raison pour laquelle il se révéla nécessaire de proroger ces dispositions en les aggravant. Notre arrêté du 21 février 19642) prescrivit en conséquence une diminution de l'effectif total du personnel autorisé par entreprise, qui ramenait celui-ci à 97 pour cent de l'effectif enregistré le 1er mars 1964. Le 9 octobre 1964, une nouvelle réduction abaissa cet effectif à 95 pour cent de l'effectif de référence 3). Il ne fut cependant pas possible de réduire l'effectif de la main-d'oeuvre étrangère soumise à contrôle, ni même de le stabiliser. La raison en résidait dans le système de réglementation, qui limitait l'effectif total du personnel des entreprises mais non leur effectif de travailleurs étrangers. Des entreprises qui n'occupaient pas de maind'oeuvre étrangère étaient en mesure d'engager à volonté des travailleurs du pays. Ceux-ci pouvaient être remplacés par des étrangers dans les entreprises qu'ils avaient quittées jusqu'à ce que l'effectif total du personnel autorisé fût atteint. L'arrêté prévoyait en outre toute une série de motifs justifiant des exceptions ; bien que ces dérogations fussent moins étendues que celles qu'autorisait l'arrêté du 1er mars 1963, elles nuisaient cependant à l'efficacité des mesures prises. L'application des dispositions relatives aux dérogations, qui incombait pour la plus grande partie aux cantons, ne donna souvent pas satisfaction. Le contrôle des effectifs totaux du personnel des entreprises ne se révéla, en particulier, guère possible.

En raison de cette situation défavorable, nous étions décidés à adopter des mesures plus sévères et, partant, plus efficaces. A cet effet, nous avons pris le 26 février 1965 un arrêté limitant et réduisant l'effectif des travailleurs étrangers 4). Ces dispositions limitaient également par entreprise l'effectif des étrangers et obligeaient les entreprises à réduire de 5 pour cent jusqu'au 30 juin 1965 le nombre des étrangers qu'elles occupaient le 1er mars 1965. Pour
tenir compte des conditions économiques propres au domaine de la construction, le nombre des saisonniers de cette branche fut limité à 145 000 dans l'ensemble du pays.

Le régime applicable en matière de dérogations fut également rendu beaucoup plus sévère en ce sens que des exceptions ne purent désormais être accordées qu'en cas d'urgence manifeste et en vue de sauvegarder les intérêts de la recherche scientifique; le traitement des demandes y relatives fut confié à la Confédération.

Une année plus tard, nous avons, par notre arrêté du 1er mars 19665), réduit de 3 pour cent supplémentaires juqu'au 31 juillet 1966, puis de 2 pour cent encore jusqu'au 31 janvier 1967 l'effectif des travailleurs étrangers. Cela !) RO 1963, 185.

a ) RO 1964, 129.

3 ) RO 1964, 919.

4) RO 1965, 123.

6 ) RO 1966, 496.

81

représente, en tout, une réduction de 10 pour cent de l'effectif initial noté le 1er mars 1965. Le nombre maximum des saisonniers étrangers de la construction pouvant être engagés fut réduit de 5000 et ramené à 140 000. Les frontaliers qui conservent leur domicile à l'étranger furent exceptés de la réglementation.

Les inconvénients des entrées incontrôlées de travailleurs étrangers étant apparus de plus en plus nettement depuis le début des années I960, nous avions déjà édicté le 19 janvier 1965 un arrêté concernant l'assurance d'autorisation de séjour pour prise d'emploiT). En vertu de cet arrêté, les travailleurs étrangers qui n'ont pas besoin actuellement d'un visa ne peuvent entrer en Suisse pour y prendre un emploi et ne reçoivent une autorisation de séjour que s'ils sont munis de l'assurance requise. Les travailleurs qui ne bénéficient pas d'une assurance d'autorisation sont refoulés à la frontière ou ne reçoivent pas d'autorisation de séjour pour prise d'emploi à l'intérieur du pays. L'introduction générale de l'assurance d'autorisation de séjour a permis de contrôler l'entrée des travailleurs étrangers. Il a notamment été possible d'éviter que des immigrants n'ayant pas d'emploi assuré et démunis de moyens d'existence ne pénètrent en Suisse, ne tombent à la charge de l'assistance publique ou privée et ne doivent être rapatriés aux frais des pouvoirs publics s'ils ne trouvent pas immédiatement une place. En outre, l'introduction générale de l'assurance d'autorisation de séjour limite le nombre des entrées étant donné que beaucoup d'employeurs n'ont pas la possibilité de recruter des travailleurs à l'étranger.

Ainsi que cela ressort des chiffres qui suivent et des données du tableau 1, l'accroissement de l'effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle a été freiné depuis 1963 et leur nombre réduit depuis 1965 sous l'effet des arrêtés précités et aussi, en partie, sous l'influence d'un léger fléchissement du degré de l'emploi.

Effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle en août 1961-1966

Modification par rapport à l'année précédente Annie

1961 1962 1963 1964 1965 1966

Saisonniers

Non-saisonniers

En tout

+ 33 921 + 75 845 + 109 766 + 20651 + 73 349 + 94000 + 7238 + 43290 H- 36 052 + 4957 + 23 601 + 28558 --22070 --18873 -- 40943 --19666 --10514 -- 30180

Frontaliers

Total

+ 3070 + 2394 + 2017 + 2330 --3630 +2400

+ 112836 + 96394 + 45307 + 30888 -- 44573 -- 27780

La diminution du nombre des travailleurs étrangers soumis à contrôle a été de 72 000 au cours des deux dernières années. Toutefois, la plus grande partie de cette main-d'oeuvre, à savoir 43 000 environ, est formée de saisonniers et de frontaliers qui influent moins sur le degré de pénétration étrangère que les étrangers séjournant durablement dans le pays. Cette diminution n'a pas !) RO 1965, 62

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suffi à stabiliser l'effectif total des étrangers (étrangers de toutes catégories d'autorisation exerçant ou non une activité lucrative). Ainsi que le montrent les relevés statistiques de la police des étrangers, le nombre des personnes au bénéfice de l'autorisation d'établissement s'est encore accru et a passé de 187 000 en 1964 à 229 000 en 1966. L'effectif des étrangers en possession d'une autorisation de séjour (exerçant ou non une activité lucrative) a également augmenté, passant de 621 000 en 1964 à 63J 000 en 1966. Cet accroissement doit être attribué en partie à la transformation de permis saisonniers en autorisations pour activité s'exerçant toute l'année, mais surtout à l'excédent des naissances de la population étrangère.

Bien que des raisons de politique générale eussent rendu souhaitable une nouvelle diminution de l'effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle, la réduction ne put être poursuivie et encore moins intensifiée en 1967 parce que les désavantages économiques du système de la limitation des effectifs par entreprise, appliqué jusqu'ici, commençaient à se faire sentir de manière toujours plus marquée. Compte tenu des conditions économiques, qu'il importait aussi de prendre en considération, il apparaissait beaucoup plus opportun de s'en tenir, pour 1967, à la stabilisation obtenue de la population étrangère active (étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou de séjour exerçant une activité lucrative), pour laisser un temps de repos à l'économie. Pour atteindre ce but, nous n'avons prévu, par notre arrêté du 10 février 1967l), qu'une nouvelle réduction de 2 pour cent de l'effectif des travailleurs non saisonniers (soumis à contrôle) des entreprises jusqu'à fin juillet 1967. Nous nous sommes toutefois réservé la possibilité de prescrire une réduction supplémentaire pour la période du 15 octobre 1967 au 31 janvier 1968 si le rencensement d'août 1967 ne donnait pas des résultats satisfaisants. La réduction de l'effectif des saisonniers, qui n'avait déjà plus été exigée l'année précédente des établissements de l'hôtellerie ni des autres entreprises de tout genre qui relèvent du tourisme, n'a plus été appliquée aux autres domaines de l'économie.

Le nombre maximum des saisonniers pouvant être occupés dans la construction a été fixé à 125 000, effectif
enregistré en août 1966. Ces allégements étaient justifiés du fait que les travailleurs saisonniers influent de manière moins marquée sur le degré de pénétration étrangère et grèvent moins fortement notre équipement collectif que les étrangers séjournant durablement en Suisse. Finalement, les dispositions relatives aux dérogations ont été quelque peu complétées pour 1967, sans qu'il eût été toutefois possible d'assouplir sensiblement la pratique sévère suivie jusqu'ici en ce qui concerne les dérogations.

Le système du double plafond est extraordinairement rigide et devra, s'il y a lieu de maintenir les mesures tendant à limiter et réduire l'effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle, être remplacé par un autre système permettant "de laisser de nouveau progressivement aux forces économiques le soin de répartir la main-d'oeuvre entre les branches économiques. Nous avons insisté dès le début sur cette nécessité. L'effectif total du personnel des entreprises !) RO 1967, 248.

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(Suisses et étrangers), qui avait déjà été élevé de 4 pour cent en 1966, a pu encore être augmenté de 6 pour cent en 1967. Le 31 décembre 1967, la limitation de cet effectif total sera complètement abandonnée.

IL DEGRÉ ACTUEL DE LA PÉNÉTRATION ÉTRANGÈRE 1. Statistique de la population étrangère de résidence Le recensement de la population est le seul relevé statistique qui embrasse la population étrangère dans son ensemble et qui donne des renseignements complets sur sa structure. Comme les recensements de la population n'ont lieu que tous les dix ans, la police fédérale des étrangers établit, à la fin de chaque année, depuis 1964, un relevé de l'effectif de la population étrangère de résidence.

Ce relevé s'étend à tous les étrangers exerçant ou non une activité lucrative, en possession d'une autorisation de séjour, d'établissement ou de tolérance, qui habitent en Suisse le 31 décembre. H ne comprend pas, en revanche, les saisonniers ni les frontaliers. L'OFIAMT procède également en février et en août de chaque année à un relevé de l'effectif des étrangers, qui ne s'étend qu'aux travailleurs étrangers soumis à contrôle (non-saisonniers, saisonniers et frontaliers) mais ne donne pas d'indications sur l'effectif des étrangers exerçant une activité lucrative, qui ne sont plus soumis à contrôle. De même, la statistique de l'OFIAMT ne peut pas englober les étrangers n'ayant pas d'activité lucrative (membres de la famille de travailleurs étrangers, rentiers, écoliers et étudiants, etc.). En raison des buts différents que visent ces deux statistiques, elles ne s'étendent pas aux mêmes catégories d'étrangers et ne sont pas exécutées aux mêmes dates. C'est pourquoi leurs résultats ne sont pas directement comparables.

Pour qu'il soit possible de disposer d'une statistique uniforme des étrangers, une commission d'experts désignée par le département fédéral de l'économie publique et le département fédéral de justice et police a élaboré un projet d'aménagement des statistiques actuelles, qui s'efforce de tenir compte des exigences de la police des étrangers et de celles des autorités dont relève le marché du travail. Ce projet fait actuellement l'objet d'un examen approfondi.

2. Effectif des étrangers résidant en Suisse à fin 1966 A fin 1966, environ 860 000 étrangers habitaient en Suisse: 616 000 étaient
en possession de l'autorisation de séjour et 229 000 de l'autorisation d'établissement, la présence de quelque 15 000 fonctionnaires internationaux et des membres de leurs familles ne tombant pas sous le coup de la réglementation en matière de police des étrangers. Approximativement 70 pour cent (432 000) des 616 000 étrangers en possession de l'autorisation de séjour exerçaient une activité lucrative. Dans la catégorie des étrangers établis, il n'est pas possible de déterminer le nombre de ceux qui exercent une activité professionnelle parce que ces étrangers ne sont pas soumis au contrôle de la police des étrangers et que, sur le plan du marché du travail, ils sont placés sur le même pied que les

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Suisses. En se fondant sur les résultats du recensement de la population de 1960, on peut admettre qu'environ 51 pour cent (117 000) des 229 000 étrangers établis exerçaient une activité lucrative. L'effectif total de 860 000 étrangers comprenait donc approximativement 559 000 personnes (65 %) ayant une activité lucrative et 301 000 (35 %) n'en exerçant pas.

En 1966, un cinquième de l'effectif total des étrangers (sans les fonctionnaires d'organisations internationales et leurs familles) vivaient dans le canton de Zurich. Suivaient, compte tenu de leur part d'étrangers dans la population étrangère du pays, les cantons de Vaud (10,8%), de Genève (9,9 %), de Berne (9,5%), d'Argovie (7,7%), du Tessin (5,8%) et de Saint-Gall (5,6%). Ces sept cantons groupaient ensemble 587000 étrangers ou approximativement sept dixièmes du total. C'est Genève qui accuse la plus forte part d'étrangers dans la population de résidence du canton (31 %); suivent les cantons du Tessin (23 %), de Vaud (19%), de Neuchâtel (17%), d'Argbvie, Schaffhouse et Zurich (16% chacun), de Baie-Campagne, Glaris et Thurgovie (15% chacun), Baie-Ville et Zoug (14% chacun), Soleure et Saint-Gall (13 % chacun) et Appenzell RhodesExtérieures et Grisons (12% chacun). Tous les autres cantons ont des proportions de population étrangère inférieures à 10 pour cent. Dans l'ensemble, 10 cantons ont donné des proportions inférieures à la moyenne du pays (14,4 %), alors que 15 cantons dépassaient sensiblement cette moyenne (cf. tableau 2).

Le tableau qui suit renseigne sur la structure de l'effectif des principales colonies étrangères en Suisse durant la période allant de 1964 à 1966: Effectif à fin décembre 1964 en valeur absolue

en %

1965 en valeur absolue

454 657 109 529 77343 40754 39824 88136 810 243

en %

56 13 10 5 5 11 100

1966 en valeur absolue

Italie Allemagne Espagne ....

France ....

Autriche Autres pays . . .

En tout Fonct. de bureaux intern.

437212 113 776 74311 39417 40865 87770 793 351 15000

15000

15000

Total

808 351

825 243

859 987

55 14 10 5 5 11 100

en %

483 653

57

107 734 78442 42312 39459 93387 844 987

13 9 5 5 11 100

Une répartition selon l'état civil montre que, sur les quelque 845 000 étrangers séjournant en Suisse à la faveur d'une autorisation de la police des étrangers, 405000 (48%) sont des personnes mariées et 440000 (52%) des célibataires, au nombre desquels on compte environ 188 000 enfants de moins de 16 ans révolus.

85 L'effectif des étrangers établis a passé en 1966 de 202 000 à 229 000, marquant donc un accroissement de 27000 personnes ou 13,6 pour cent. Cette nouvelle et sensible augmentation est due, tout d'abord, au fort accroissement du nombre des étrangers venus en Suisse de 1955 à 1962 pour exercer une activité économique, mais aussi au fait que le renouvellement des effectifs assuré par les départs s'est ralenti. L'augmentation du nombre des étrangers établis résulte immanquablement du fait que les traités d'établissement conclus par la Suisse avec de nombreux Etats, assurent aux ressortissants des deux pays contractants le droit d'être admis définitivement dans leur pays de résidence, après une certaine durée de leur séjour. Leur épouse et leurs enfants encore mineurs doivent également, en vertu de la loi, être mis au bénéfice de l'autorisation d'établissement délivrée au chef de famille.

En revanche, l'effectif des étrangers soumis à contrôle ne s'est que légèrement accru; le nombre des personnes au bénéfice d'une autorisation de séjour ne s'est élevé que de 8000 personnes environ, passant de 608 000 à 616 000.

Une diminution d'approximativement 5000 personnes a même pu être constatée comparativement à l'année précédente en ce qui concerne les étrangers soumis à contrôle qui exercent une activité lucrative. Cette réduction est toutefois plus que compensée par l'augmentation de l'effectif des étrangers au bénéfice de l'autorisation de séjour qui n'ont pas d'activité lucrative (+13 000 environ).

3. Facteurs influant sur l'effectif des étrangers

Le nombre des étrangers est déterminé par les arrivées et les départs, les naissances et les décès, ainsi que par le changement de nationalité ensuite du mariage ou de naturalisation. Afin de pouvoir apprécier exactement le degré actuel de pénétration étrangère et son évolution ultérieure, il est indispensable d'examiner de plus près les facteurs qui influent sur l'effectif des étrangers.

a. Immigration Au cours de l'année 1966, quelque 322 000 étrangers ont reçu une autorisation initiale de séjour, dont 132 000 (41 %) pour un séjour à l'année, avec ou sans exercice d'une activité lucrative, et 190000 saisonniers (59%). Comparativement à 1965, le nombre des nouveaux venus a diminué de 32 000 (9%); la régression a été sensible tant en ce qui concerne les étrangers ayant une activité professionnelle que ceux qui n'en exercent pas. Dans la catégorie des nonsaisonniers, la diminution a été de 6300 (6 %), alors que le nombre des autorisations saisonnières délivrées a fléchi de 25 000 (12%). Le nombre des entrées d'étrangers n'exerçant pas d'activité lucrative a régressé de 700. Ce nombre, qui était d'environ 32 000, comprenait 15 000 membres de la famille de travailleurs étrangers occupés en Suisse, 10 000 écoliers et étudiants, 7000 personnes résidant dans le pays pour y jouir de leur retraite, y rétablir leur santé ou pour d'autres raisons encore.

La diminution sensible du nombre des admissions d'étrangers n'a cependant pas provoqué une réduction de leur effectif à fin 1966 car elle a été plus que Feuille fédérale, 119' année. Vol. n.

6

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compensée par la tendance toujours plus marquée des étrangers résidant en Suisse depuis quelques années à s'y fixer, par l'excédent de plus en plus élevé des naissances, ainsi que par la transformation d'autorisations de séjour saisonnières en autorisations non saisonnières.

b. Renouvellement des effectifs et transformation des structures La stabilité croissante des étrangers ressort des statistiques relatives à l'effectif des étrangers séjournant depuis quatre ans dans notre pays. En 1965, 26 416 des 103 922 travailleurs non saisonniers de sexe masculin admis en 1961 étaient encore présents en Suisse, ce qui représente environ 25 pour cent du chiffre initial. L'année d'après, 29 206 des 104 327 travailleurs non saisonniers venus en 1962 commençaient leur cinquième année de séjour, ce qui représentait une proportion de 28 pour cent. Le taux des étrangers au bénéfice du permis de séjour qui résident en Suisse depuis un certain nombre d'années s'est donc nettement accru depuis la dernière enquête sur le séjour des étrangers (février 1959) et a encore augmenté au cours de ces deux dernières années.

Indépendamment du renouvellement des effectifs provoqué par l'immigration et les départs, la structure des colonies étrangères subit constamment des transformations, surtout ensuite du passage de saisonniers dans la catégorie des travailleurs occupés toute Tannée, et d'étrangers au bénéfice du permis de séjour dans les rangs de ceux qui ont l'autorisation d'établissement. La transformation d'autorisations saisonnières en autorisations de séjour valables toute l'année entraîne une augmentation de la population étrangère de résidence, dans laquelle les saisonniers ne sont pas compris. En revanche, l'effectif des étrangers n'est pas modifié par le passage de personnes précédemment au bénéfice d'un permis de séjour dans la catégorie des étrangers établis, la diminution enregistrée dans la première de ces catégories étant compensée par l'augmentation qu'accusé la seconde.

D'importantes modifications de la structure de la population étrangère sont provoquées par le passage d'étrangers porteurs d'une autorisation de séjour dans la catégorie de ceux qui bénéficient de l'établissement. Le nombre des nouvelles autorisations d'établissement délivrées par les cantons a passé de 22 829 en 1962 à 32 710 en 1966,
ce qui représente une augmentation de 9881 ou 43 pour cent; 17 836 des nouveaux bénéficiaires de l'autorisation d'établissement (55% du total) ont une activité lucrative alors que 14 874 (45%) n'en exercent pas. Le nombre des autorisations d'établissement accordées ira en s'accroissant au cours de ces prochaines années en raison de la forte augmentation du taux d'immigration depuis 1955. Conjointement avec l'effectif des enfants nés de parents établis, il entraînera une nouvelle augmentation du taux d'accroissement net de l'effectif des étrangers établis.

c. Naissances et décès

Si l'on rapporte le nombre des naissances à la population de résidence indigène et étrangère, on constate qu'actuellement, le taux des naissances est sensiblement plus faible chez les Suisses que chez les étrangers; en revanche, le

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nombre des décès est proportionnellement beaucoup plus élevé chez les premiers que chez les seconds. Cet écart est principalement dû aux structures d'âge différentes de ces deux populations. C'est ainsi qu'en 1960 -- on ne dispose malheureusement pas de données plus récentes à cet égard -- la part des enfants et des personnes âgées de plus de 65 ans était approximativement le double chez les Suisses de ce qu'elle était chez les étrangers. Près des trois quarts de ceux-ci étaient alors des adultes en âge d'exercer une activité professionnelle, alors que cette proportion n'atteignait que 57 pour cent chez les Suisses. Plus de la moitié de l'effectif total des étrangers appartenaient alors à la catégorie des personnes âgées de 20 à 39 ans.

La structure par âge dé la population étrangère de résidence a été fortement influencée depuis lors par l'immigration, notamment par celle de jeunes travailleurs. Il en a résulté que, de 1950 à 1960, la part des étrangers âgés de 40 ans et plus s'est abaissée de 40 à 22 pour cent, alors que celle des personnes âgées de 20 à 39 ans passait de 40 à 56 pour cent. Cette évolution n'a pas été sans influer sur le taux des naissances et des décès de la population étrangère. Alors que plusieurs années après la guerre, il mourrait davantage d'étrangers qu'il en naissait, la situation s'est modifiée du tout au tout depuis 1952. Tandis qu'il ne naissait que 2789 étrangers dans notre pays en 1950, le nombre des naissances d'enfants étrangers s'élevait déjà à l l 367 dix ans plus tard. En 1965, le nombre de ces naissances avait passé à 29 120, mais est redescendu à 28 836 l'année suivante (cf. tableau 5). Etant donné la structure par âge actuelle de la population étrangère de résidence et le fait qu'on ne compte actuellement qu'un enfant par femme étrangère mariée, il faut également s'attendre à un nombre élevé de naissances d'enfants étrangers au cours de ces prochaines années.

Tandis que le nombre des naissances a augmenté, le total des décès d'étrangers ne s'est guère modifié depuis 1950. En effet, alors que le premier de ces nombres s'est décuplé durant ce laps de temps et a passé de 2789 à 29 120, le second n'est monté que de 3014 à 3890. L'accroissement sensible du nombre des naissances et un total des décès restant très bas ont donné un excédent des naissances toujours
plus élevé pour la population étrangère. Bien qu'en 1966 il soit né presque trois fois plus de Suisses (80 902) que d'étrangers, 46 pour cent (24 946) de l'excédent total des naissances provenaient de la population étrangère. Cela résulte de la différence des structures par âge de la population indigène et de la population étrangère.

Avec le temps, les mesures visant à limiter et réduire l'effectif des étrangers tendront également à normaliser la structure par âge de la population étrangère. Les restrictions sévères apportées à l'immigration de travailleurs étrangers auront pour effet que la proportion des étrangers d'un certain âge s'accroîtra d'année en année. Tout porte à croire que ce processus se poursuivra si l'on continue d'appliquer des mesures visant à restreindre l'immigration; cela aura pour conséquence que la structure par âge de la population étrangère se rapprochera de celle de la population indigène et que l'excédent des nais-

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sances des étrangers faiblira. Une évolution dans ce sens paraît s'être amorcée, cet excédent étant tombé, comme nous l'avons déjà mentionné, de 25 147 à 24 946 de 1965 à 1966.

d. Acquisition de la nationalité suisse par naturalisation ou par mariage Les naturalisations n'occupent qu'une place très modeste parmi les facteurs qui modifient l'effectif des étrangers. Sans doute l'application de la nouvelle loi sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse, entrée en vigueur le 29 septembre 1952, a-t-elle eu pour conséquence, en l'espace de deux ans (1953 et 1954), l'a naturalisation d'environ 27 000 étrangers résidant en Suisse. Toutefois, il s'agissait pour la plus grande part de Suissesses de naissance, qui avaient perdu leur nationalité ensuite de leur mariage avec un étranger et qui avaient eu la possibilité de présenter durant l'espace d'une année une demande de réintégration dans leur nationalité primitive. Si l'on excepte ce chiffre élevé, le nombre des naturalisations a toujours oscillé entre 2800 et 4500 depuis 1950.

A partir de 1960, le nombre des personnes habitant en Suisse, qui ont été naturalisées, a évolué comme il suit: Naturalisations de 1960 à 1966 Année

1960 1961 1962 1963 1964 1965 19661) !) Chiffres provisoires.

Total des Naturalisations personnes ordinaires naturalisées

2982 2972 2850 3172 3294 3474 4458

1939 1937 1828 2063 2171 2417 3187

Réintégrations Naturalisations facilitées

134 137 137 152 125 102 126

909 898 885 957 998 955 1145

La nationalité suisse n'étant accordée, en règle générale, qu'à des étrangers qui séjournent depuis de nombreuses années dans le pays, c'est presque exclusivement l'effectif des étrangers établis qui est réduit par les naturalisations.

Le fait que cet effectif s'est accru de 86 000 (60%) au cours de ces derniers cinq ans et a passé de 143 000 à 229 000 durant ce laps de temps, montre combien faible est l'influence qu'exërcent les naturalisations sur le nombre des étrangers établis en Suisse. Le total des naturalisations, peu important par lui-même, s'est toutefois sensiblement accru depuis 1960. Encore inférieur à 3000 de 1960 à 1962, il a passé à 4500 en 1966, ce qui fait approximativement une augmentation de 50 pour cent comparativement au nombre moyen enregistré de 1960 à 1962. Le nombre des personnes naturalisées au cours de ces dernières années est inférieur à ce qu'il était avant la première guerre mondiale, tant en chiffres absolus que par rapport à la population de résidence. Au cours des années 1910 à 1913, on naturalisait chaque année de 4100 à 5700 personnes,

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ce qui représentait 1,1 à 1,5 pour cent de la population de résidence d'alors (3 753 000). Si l'on voulait actuellement suivre, en matière de naturalisation, la même pratique qu'avant le premier conflit mondial, il faudrait, compte tenu de la population de résidence actuelle, naturaliser de 6500 à 9000 personnes chaque année.

Outre la naturalisation, un changement de nationalité se produit lorsque des Suisses épousent une étrangère ou que des étrangers contractent union avec une Suissesse sans que celle-ci déclare vouloir conserver la nationalité suisse, selon la possibilité que lui donne l'article 9 de la loi fédérale sur l'acquisition ou la perte de la nationalité suisse. Ces mariages entre conjoints de nationalité différente ont de sensibles conséquences d'ordre démographique, mais presque exclusivement en ce qui concerne les mariages entre Suisses et étrangères, les cas de Suissesses qui perdent leur nationalité par mariage avec un étranger étant devenus très rares. De 1960 à 1965, environ 29 000 étrangères ont acquis la nationalité suisse par mariage. L'effectif des étrangers n'a toutefois pas été réduit d'autant car une partie de ces étrangères ne résidaient pas en Suisse avant leur mariage.

4. Appréciation du degré de pénétration étrangère II a été déjà question plusieurs fois de l'excès de pénétration étrangère; cette expression reviendra encore fréquemment dans le reste de cet exposé.

Nous désirerions cependant préciser dès maintenant -- et souligner à rencontre d'une conception qui est apparemment à la base de l'initiative populaire -- que l'excès de pénétration étrangère n'est pas seulement déterminé par le nombre des étrangers, ni uniquement une question de statistique. En matière de statistique, on peut parler d'excès de pénétration étrangère lorsque le nombre des étrangers présents dépasse celui des nationaux ou, déjà, une certaine proportion de la population indigène. Conclure à un danger en se fondant sur de pures données statistiques serait déplacé, cela surtout dans un pays qui entretient autant de relations que le nôtre avec les autres Etats sur les plans culturel et économique et qui se refuse à apprécier la valeur de la personne selon son appartenance linguistique, nationale ou raciale. Une telle manière de faire serait contraire aux conceptions morales et humanitaires que
le peuple suisse respecte aussi bien que les autres nations.

Chaque peuple doit sauvegarder, outre sa souveraineté, un héritage culturel et politique, et veiller à rendre accessibles ces biens à tous les hommes. Cet héritage embrasse ses traditions historiques, politiques, linguistiques et culturelles, ainsi que c'est particulièrement le cas pour la Suisse.

Sur le plan démographique, l'excès de pénétration étrangère exerce ses effets dans deux directions. Il peut tout d'abord se traduire par la présence d'un . nombre important d'étrangers qui ne sont pas disposés à s'intégrer dans la communauté nationale, pour qui l'histoire et les institutions politiques du pays qui les héberge sont parfaitement indifférentes et qui continuent à former un groupe de population distinct qui ne prend aucune part à la vie nationale. En second lieu, il peut arriver qu'ensuite de l'accroissement continu du nombre des étran-

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gers, les influences d'autres conceptions deviennent si fortes qu'elles s'imposent de plus en plus et que l'attitude qu'observé une grande partie de la population "à l'égard de l'Etat, des traditions nationales et de l'avenir du pays risque de se modifier très fortement. Ces deux évolutions sont la source de graves inconvénients. Lors de la première guerre mondiale et surtout durant les années de grave tension d'avant mil neuf cent trente-neuf ainsi qu'au cours du dernier conflit mondial, nous avons connu les dangers que comporte la première de ces évolutions : étrangers vivant confinés dans le cercle de leurs compatriotes, ne participant en rien à notre vie nationale et marquant même leur aversion à l'égard de nos conceptions et de nos institutions. Si la seconde de ces évolutions se poursuit de manière beaucoup plus inapparente, elle peut, selon les circonstances, être tout aussi défavorable et lourde de dangers. Nous tenons à mettre en évidence ces perspectives sans nous livrer à des généralisations injustifiées.

Outre cet aspect démographique, il peut se produire une pénétration étrangère dans la vie économique, qui se constate en particulier lorsque la main-d'oeuvre, les cadres et les capitaux étrangers jouent un tel rôle que des secteurs entiers de l'économie tombent sous la dépendance de l'étranger ou que la gestion d'entreprises ou de certains groupes économiques passe juridiquement ou effectivement en mains étrangères.

Des évolutions telles que celles dont il vient d'être question comportent effectivement des dangers qui n'apparaissent guère en période de stabilité économique et politique, mais qui peuvent se manifester nettement à la longue, surtout en cas de crise politique. C'est pour prévenir de telles évolutions ou du moins pour les combattre, que des mesures sont prises contre l'excès de pénétration étrangère. Nous renvoyons pour le reste à l'exposé que contient à ce sujet le rapport de la commission chargée de l'étude du problème de la maind'oeuvre étrangère (page 135 de ce rapport, 3e partie. Aspects démographiques, sociaux et politiques du problème de la pénétration étrangère), qui traite de manière approfondie de ce problème, en général et sous ses différents aspects.

En appréciant l'ensemble du problème, nous devons considérer finalement qu'une limitation injustifiée de
l'installation d'étrangers dans un pays est contraire aux efforts entrepris en vue de renforcer l'unité européenne et, en particulier, aux efforts de la Communauté économique européenne visant à intégrer les institutions politiques et économiques.

Lors de l'élaboration de l'article 69 ter de la constitution fédérale, adopté en votation populaire le 25 octobre 1925, et de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers, on n'a pas cherché à préciser la notion de pénétration étrangère. Selon notre message du 2 juin 1924 à l'Assemblée fédérale concernant la réglementation du séjour et de l'établissement des étrangers en Suisse par le droit fédéral1), et d'après la disposition de l'article 16 de la loi fédérale précitée, qui prescrit que les autorités doivent tenir compte dans leurs décisions du «degré de surpopulation étrangère», il est cependant évident !) FF 1924, ÏI, 520:

:

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que les mesures de défense contre la pénétration étrangère ne doivent pas être différées juqu'au moment où des influences se sont déjà exercées à tel point que les caractères nationaux se trouvent menacés en tout ou en partie. Il serait alors trop tard pour prendre des mesures défensives. C'est pourquoi les autorités ne doivent pas attendre pour intervenir que la pénétration étrangère soit devenue excessive, mais prendre déjà les mesures nécessaires lorsque notre pays ou certains domaines de notre vie nationale sont menacés par l'intensité de cette pénétration.

C'est dans ce sens qu'il faut actuellement parler d'un danger de pénétration étrangère menaçant notre pays. Ainsi que nous l'avons exposé, si la pénétration étrangère pose manifestement un problème à notre pays, ce n'est pas en soi parce qu'un grand nombre d'étrangers y séjournent. Au contraire, des influences plus ou moins positives ou négatives peuvent s'exercer en l'occurrence selon la provenance de ces étrangers et -- tout à fait indépendamment de la capacité d'accueil de notre population et de la volonté des étrangers de s'intégrer à notre communauté nationale -- de leur aptitude à s'assimiler. En d'autres termes: il faut distinguer entre étrangers dont la présence contribue fortement à aggraver la pénétration étrangère et ceux qui n'exercent plus guère ou plus du tout d'influence à cet égard.

L'influence qu'exercent les étrangers sur le degré de pénétration varie sensiblement selon la durée de leur séjour. Celle des frontaliers, qui rentrent chaque soir à leur domicile situé au-delà de la frontière, peut être considérée comme sans danger. Le nombre élevé des saisonniers a une influence sensiblement plus grande bien qu'elle n'ait guère un caractère de gravité ; en effet, les saisonniers n'entrent ordinairement que fort peu en contact avec la population du pays.

En revanche, les étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour, qui vivent durant une période prolongée avec leur famille dans notre pays et qui ne sont encore qu'au début de leur assimilation, contribuent dans une plus forte mesure à accroître le taux de pénétration.

.

La situation des étrangers dans la profession et la société joue également un rôle important. C'est ainsi que les étrangers exerçant une activité indépendante, le personnel de direction et les intellectuels
ont une influence beaucoup plus marquée que les ouvriers sur le plan de la pénétration étrangère. Notons que le danger d'un excès d'influences étrangères est beaucoup moins grave à cet égard qu'avant la première guerre mondiale. A l'époque, de nombreux étrangers occupaient des situations dirigeantes ou possédaient des entreprises en Suisse alors qu'aujourd'hui, ils exercent plutôt des activités subalternes délaissées par les Suisses.

Le taux de pénétration étrangère est aussi fortement influencé par la provenance des étrangers et leur aptitude à s'assimiler, qui dépend dans une large mesure de leur origine. Les ressortissants de pays éloignés, dont les coutumes et le mode de vie diffèrent beaucoup des nôtres et qui n'ont guère de compréhension pour les affaires typiquement suisses, ne peuvent pas être assimilés ou ne peuvent l'être que difficilement.

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II faut, d'autre part, considérer qu'une bonne partie des étrangers établis sont nés en Suisse; on en comptait 64 787 en 1960. Les étrangers venus au monde dans notre pays, qui y ont été élevés, y ont suivi nos écoles et acquis leur formation professionnelle sont assimilés dans une large mesure. C'est plus particulièrement le cas lorsque la mère est Suissesse de naissance. A l'heure actuelle, on compte en Suisse 25 000 à 30 000 enfants dont la mère est mariée à un étranger bénéficiant de l'établissement. Toutefois, la statistique continue de compter comme étrangers les personnes établies, qui ont été élevées dans notre pays et peuvent être considérées comme assimilées. Sans doute, le nombre des étrangers établis qui ont atteint l'âge adulte et ne séjournent que depuis un peu plus de 10 ans en Suisse commence-t-il à s'accroître. Or, le degré d'assimilation de ces étrangers est fort différent et ne doit pas, en général, être surestimé.

Il est difficile d'apprécier le degré d'assimilation et le désir de s'intégrer à notre communauté nationale des étrangers séjournant de façon prolongée en Suisse sans être au bénéfice de l'autorisation d'établissement. Beaucoup d'entre eux n'ont que peu de contacts avec la population du pays, que ce soit au lieu de travail ou durant leurs heures de loisir. Mais, dans cette catégorie d'étrangers aussi, il y a des personnes qui ne contribuent guère à accroître la pénétration étrangère. C'est ainsi que les 20 000 étudiants et élèves qui quittent la Suisse une fois leurs études terminées ne peuvent être considérés comme aggravant cette pénétration. Cela vaut également pour une grande partie des quelque 20 000 étrangers déjà âgés qui, sans exercer d'activité économique, passent dans notre pays la fin de leur existence. Finalement, les 15 000 fonctionnaires d'organisations internationales et membres de leur famille ne constituent pas une charge supplémentaire sur le plan de la pénétration étrangère. Il reste donc un nombre d'environ 576 000 travailleurs étrangers soumis à contrôle qui exercent une influence sur le degré de pénétration étrangère. La durée du séjour des trois quarts de ces étrangers est de 1 à 5 ans; une partie importante du quart restant quitte également la Suisse après un certain temps. Il s'agit là pour l'essentiel d'une masse se renouvelant sans cesse
d'étrangers qui ne sont ni capables ni désireux de s'assimiler.

En résumé, sur les 860 000 étrangers recensés par la statistique à fin 1966, 120000 à 150000 doivent être considérés comme n'influant pas sur le degré de pénétration étrangère et peuvent, par conséquent, être déduits de ce chiffre.

Le nombre des étrangers séjournant en Suisse, qui ne sont pas assimilés ou ne pourraient l'être que difficilement, n'en doit pas moins être considéré comme fort élevé et pose de graves problèmes à notre pays. Indépendamment de cet aspect numérique de la question, il est particulièrement significatif que la structure des colonies étrangères s'est modifiée au cours de ces dernières années.

Alors que, durant les années «cinquante», le nombre des étrangers établis était resté longtemps étonnamment bas en raison d'un rapide renouvellement des effectifs des étrangers au bénéfice du permis de séjour et d'un faible excédent des naissances, il en va tout autrement aujourd'hui. Force est de constater que la stabilité de l'effectif des étrangers et l'excédent des naissances se sont à

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ce point accrus que la population étrangère a continué d'augmenter en dépit de la régression du nombre des nouvelles entrées. L'effectif des étrangers séjournant depuis longtemps en Suisse ne cesse de s'accroître et l'augmentation nette du nombre des étrangers établis de prendre de l'ampleur. Dans ces conditions, il faut s'attendre, ces prochains temps, à une augmentation du nombre des étrangers qui ne sont assimilés qu'en partie. Toutefois, le degré d'assimilation moyen tendra à s'élever peu à peu avec les années, si l'on arrive à stabiliser l'effectif global des étrangers.

Le danger d'un excès de pénétration étrangère est ressenti fort différemment selon les régions. Dans un pays aux structures aussi variées que le nôtre, il est clair que la nature de cette pénétration et la structure des intérêts en présence diffèrent sensiblement d'une contrée à l'autre. Il est dès lors compréhensible que la présence d'une nombreuse main-d'oeuvre étrangère soit appréciée de manière très diverse. Dans les régions où ne séjournent que peu d'étrangers, il ne saurait être question d'un danger de pénétration excessive. Dans les contrées encore peu industrialisées, c'est manifestement l'intérêt porté au développement économique qui prime; les étrangers n'y sont pas considérés comme représentant une menace, mais au contraire comme une aide indispensable.

Bien qu'on ne puisse nier l'existence d'un danger de pénétration étrangère excessive, il n'y a pas lieu de s'en inquiéter exagérément ni d'adopter des mesures brutales ne tenant pas compte des exigences économiques, ainsi que le proposent les auteurs de l'initiative. En revanche, comme nous l'exposions déjà dans notre rapport du 9 février 1965 à la commission élargie des affaires étrangères du Conseil national sur la limitation et la réduction de l'effectif des travailleurs étrangers, il importe de prendre toutes les dispositions nécessaires pour stabiliser l'effectif des étrangers et le réduire progressivement, compte tenu des exigences de l'économie x).

m. L'INITIATIVE CONTRE LA PÉNÉTRATION ÉTRANGÈRE Partant du degré actuel de pénétration étrangère, les auteurs de l'initiative populaire exigent que le nombre des étrangers établis ou en séjour ne dépasse pas un dixième de la population résidente. Pour que ce but puisse être atteint, l'effectif des ressortissants
étrangers en séjour -- c'est-à-dire au bénéfice d'une autorisation de séjour --· doit être abaissé de 5 pour cent au moins chaque année, compte tenu des exigences humanitaires. Les besoins de l'économie seront aussi pris équitablement en considération. Le Conseil fédéral décidera chaque année la réduction du nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour, qui devra être opérée dans chaque canton. Une autorité fédérale sera chargée, si besoin est, d'annuler des autorisations de séjour en cours de validité. Le nouvel article constitutionnel entrera en vigueur le 1er janvier de l'année qui suivra la date de son acceptation.

!) FF 1965,1, 358 à 360.

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Comme nous l'avons déjà exposé, l'initiative populaire part manifestement de l'idée que le problème de la pénétration étrangère doit être traité comme une question d'ordre statistique. Nous tirons cette conclusion du fait que l'initiative veut combattre unilatéralement l'excès de population étrangère par une réduction schématique de l'effectif des étrangers. Une telle manière de procéder ne tient cependant pas compte des différents éléments du problème et ne manquerait pas de nuire à notre pays sur les plans politique et économique. C'est pourquoi l'initiative populaire ne constitue pas un moyen permettant de résoudre de manière adéquate les problèmes posés par l'excès de pénétration étrangère.

Au contraire, les mesures proposées comporteraient des conséquences nuisibles.

1. L'effectif maximum d'étrangers autorisé Lorsque la constitution ou la législation fédérale se réfère à la population de résidence, ce sont les résultats des recensements fédéraux de la population qui doivent être pris en considération. Ces recensements ont lieu tous les dix ans et sont homologués par l'Assemblée fédérale en vertu d'un arrêté spécial.

C'est d'après les résultats donnés par les recensements de la population que s'établit le nombre des conseillers nationaux à élire (art. 72 CF) et que sont réparties les recettes provenant de l'imposition de l'alcool (art. 32bis,, 8e al., CF).

La notion est également utilisée dans la législation sur la banque nationale et la subvention de l'école primaire publique, dans la loi sur les conditions d'engagement des voyageurs de commerce, etc.

Les résultats du dernier recensement de la population de 1960, qui ont été homologués par arrêté fédéral du 21 septembre 1961 (FF 1961, II, 662), sont actuellement surannés. Jusqu'à ce que les résultats du prochain recensement soient disponibles, force est de recourir à des mises.à jour et à des estimations.

Nous reprenons ci-après les données statistiques de la police fédérale des étrangers qui, au contraire du recensement de la population, n'embrassent pas les travailleurs saisonniers étrangers., A fin 1966, la population totale de résidence (Suisses et étrangers) de la Suisse était de 5 954 000 selon toutes estimations. Les 860 000 étrangers, représentant 14,4 pour cent de cette population, se réparti ssaient entre (chiffres arrondis):
Etrangers établis .....

229 000 Etrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour (sans les saisonniers) 616000 Total Fonctionnaires de bureaux internationaux et administrations étrangères, y compris les familles . . . . . . . . . , . - . . . . . . , ···-.Population étrangère de résidence, en tout (sans les saisonniers ni les frontaliers)

845000 15000 860 000

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Si, d'après les exigences des auteurs de l'initiative, le nombre des étrangers ne devait pas, dans son ensemble, dépasser le 'dixième de la population totale de résidence, il faudrait réduire de 260 000 l'effectif des étrangers et le ramener à environ 600 000, ce qui exigerait une diminution de 30 pour cent. Il importe de ne pas perdre de vue que cette réduction ne peut être opérée que sur l'effectif des étrangers au bénéfice du permis de séjour. En effet, il ne saurait être question de restreindre le droit d'établissement, qui accorde à l'étranger admis à s'installer définitivement en Suisse le droit d'y résider de manière illimitée, sans qu'aucune condition ne soit attachée à l'autorisation qui lui est délivrée.

Cela serait d'autant moins possible que la situation juridique favorable dont jouissent en Suisse les bénéficiaires de l'autorisation d'établissement revêt une grande importance quant à la réciprocité dont bénéficient les Suisses à l'étranger.

Les promoteurs de l'initiative n'exigent du reste pas eux-mêmes de réduction du nombre des étrangers établis.

Le nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour s'établissait à 616 000 à fin 1966. La réduction de 260 000 étrangers exigée par l'initiative ramènerait cet effectif à 356 000, ce qui représenterait une diminution d'environ 42 pour cent approximativement. Egalement répartie entre les cantons, cette réduction ramènerait le nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour aux chiffres suivants: Zurich 69000 (120000 moins 51000), Vaud 40 000 (69 000 moins 29 000) et Tessin 16 000 (28 000 moins 12 000).

Quelle proportion la population étrangère de résidence peut-elle atteindre dans nos conditions sans devenir intolérable ? C'est là une question à laquelle on ne peut donner une réponse valable une fois pour toutes, indépendamment des conditions politiques et économiques du moment. Dans certaines circonstances, en particulier en temps d'essor économique, une forte proportion d'étrangers peut être tenue pour supportable, mais une réduction importante s'imposera en une période de crise ou de guerre, ou en des époques de tension politique. C'est ainsi qu'en 1925, lorsque l'article 69 ter de la constitution fédérale fut acceptée en votation populaire, la part des étrangers dans la population totale était, selon toute
estimation, de 8 à 9 pour cent; elle atteignait près de 13 pour cent en 1963, quand furent prises les mesures visant à lutter contre la «surpopulation étrangère», alors que l'inquiétude manifestée par l'opinion publique à l'égard de la pénétration étrangère ne prit un caractère grave qu'à partir de 1964, donc à une époque où la proportion des étrangers était presque de 14 pour cent. Force est donc de constater qu'il ne serait pas judicieux d'insérer dans la constitution une disposition fixant une proportion immuable d'étrangers ; une telle disposition manquerait tout à fait de souplesse.

De même qu'on ne peut déterminer des années à l'avance la part de la population étrangère résidente dans la population totale de résidence de notre .

pays, il est impossible de fixer, à titre de but final à atteindre, un effectif maximum des travailleurs étrangers. Selon le rapport de la commission chargée de l'étude du problème de la main-d'oeuvre étrangère (p. 118), 500 000 travailleurs étrangers au bénéfice du permis de séjour ou d'établissement suffiraient à assurer une

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croissance satisfaisante de notre économie jusqu'en 1970 si le produit national net réel continuait de s'accroître annuellement de 4 pour cent et la productivité de 3 pour cent. Ainsi que nous le mentionnions dans notre rapport du 9 février 1965 à la commission élargie des affaires étrangères du Conseil national sur la limitation et la réduction de l'effectif des travailleurs étrangers l), la commission a toutefois émis la réserve qu'une telle limitation du potentiel de maind'oeuvre ralentirait sensiblement l'amélioration du bien-être général. En outre, la commission a établi ses estimations en partant de l'effectif de décembre donné par le dernier rencensement de la population, qui comprenait environ 80 000 saisonniers. Ses calculs et estimations étaient fondés sur la situation existant en 1961 et 1962. Depuis lors, la réduction de l'effectif des travailleurs étrangers attendue par la commission n'a pas eu lieu ; au contraire, une nouvelle et considérable augmentation de cet effectif s'est produite sous l'influence du gonflement des investissements, de l'accroissement de la consommation et de l'afflux de capitaux étrangers. Cette évolution en sens opposé, tant sur le plan des structures que des effectifs, a sans aucun doute suscité des besoins minimums de main-d'oeuvre étrangère encore plus élevés que ce qu'on pouvait prévoir d'après la situation en 1961/1962. Les conditions ayant changé, les estimations de la commission doivent être considérées comme dépassées.

Imposer une réduction de la proportion des étrangers ramenant celle-ci à 10 pour cent, sans tenir compte de la situation économique, ne manquerait pas de provoquer de graves perturbations économiques qui ne resteraient pas sans effets sur l'emploi des travailleurs suisses. Des difficultés particulières résulteraient notamment du fait que seule la main-d'oeuvre étrangère pourrait être soumise à de telles mesures de réduction, ainsi que le montrent les chiffres qui suivent: Salariés (y compris les épouses exerçant une activité lucrative dépendante) Epouses n'exerçant pas d'activité lucrative et enfants de travailleurs étrangers Ecoliers et étudiants Rentiers et personnes faisant des séjours de villégiature prolongés..

Personnes de condition indépendante

432 000 140 000 20 000 20 000 4 000

Total 616 000 Fonctionnaires d'organisations internationales (y compris les membres de leurs familles) 15 000 En tout !) FF 1965,1, 355 et 356).

631 000

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Réduire le nombre des écoliers et étudiants étrangers, qui quittent le pays à la fin de leur scolarité ou de leurs études, ne s'impose pas comme mesure visant à lutter contre la pénétration étrangère et ne se justifierait pas d'autre manière.

Une réduction du nombre des étrangers de condition indépendante ne donnerait pas de grands résultats, d'autant moins que le nombre des nouveaux venus a déjà été très faible ces dernières années. Il ne saurait davantage être question de faire porter la réduction sur le nombre des fonctionnaires des bureaux internationaux et des administrations étrangères, étant donné qu'il n'est pas possible de refuser à ces organisations, qui ont leur siège en Suisse, le personnel étranger dont elles ont besoin. On ne peut pas non plus songer à diminuer le nombre des retraités et des étrangers faisant des séjours de villégiature et de convalescence prolongés parce qu'il s'agit là de personnes qui ne contribuent pas ou que peu à l'excès de population étrangère et parce qu'une telle mesure nuirait au renom d'hospitalité dont jouit notre pays. La seule catégorie pour laquelle une réduction entrerait en considération serait donc celle des travailleurs étrangers et de leurs familles. Mais il faut observer à ce propos que, selon les explications données sous chiffre 2, une réduction ne peut porter sur le nombre des membres des familles des travailleurs étrangers que si ces travailleurs quittent également le pays ou sont tenus de le quitter.

2. La réduction de l'effectif jusqu'au maximum autorisé

L'initiative prescrit une réduction d'au moins 5 pour cent par an du nombre des étrangers, mais ne précise pas dans quel laps de temps l'effectif des étrangers au bénéfice du permis d'établissement et de l'autorisation de séjour devrait être ramené à 10 pour cent de la population de résidence. D'après l'article II de l'initiative, celle-ci entrerait en vigueur le 1er janvier de l'année qui suivra la date de son acceptation, donc au plus tôt le 1er janvier 1969. Les auteurs de l'initiative ont apparemment voulu éveiller l'impression que leur but pourrait être atteint avec des réductions modérées. C'est pourquoi ils font figurer au premier plan un taux minimum de réduction de 5 pour cent. Or la réduction visée ne saurait être atteinte d'ici un avenir rapproché avec un pareil taux; en effet, la réduction serait compensée par l'augmentation annuelle du nombre des étrangers établis. Pour qu'il soit possible d'atteindre le but recherché, il faudrait appliquer des taux de réduction beaucoup plus élevés.

Si le but visé par l'initiative devait être atteint en cinq ans, en supposant qu'environ 25000 étrangers obtiennent l'autorisation d'établissement chaque année, il faudrait réduire de 71 000 par an l'effectif des étrangers au bénéfice du permis de séjour; or cela correspondrait à un taux de réduction de 14 à, 19 pour cent de l'effectif enregistré à la fin de l'année. La réduction porterait pour la plus grande partie (pour les deux tiers selon toute estimation) sur les travailleurs au bénéfice d'une autorisation de séjour pour activité s'exerçant toute l'année, dont le nombre devrait être réduit de 259 000 (60%) et ramené

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à 173 000, Les vides ainsi créés ne pourraient être que partiellement comblés par l'augmentation du nombre des étrangers recevant l'autorisation d'établissement. L'effectif des étrangers établis s'accroîtrait durant ce laps de temps de 123 000, dont seulement la moitié exerceraient, selon toute estimation, une activité lucrative. Dans ces conditions, l'économie suisse devrait renoncer à presque 200000 travailleurs étrangers au cours de cinq ans (cf. tableau 7/1).

Si la réduction devait être opérée en 10 ans, il faudrait réduire chaque année en moyenne de 43 000 ou 9 à 14 pour cent l'effectif des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour enregistré à la fin de l'année. Malgré cela, la perte nette de travailleurs étrangers que subirait l'économie peut être estimée à 190 000 car l'accroissement du nombre des étrangers établis qui exercent une activité lucrative ne suffirait pas à compenser la diminution du nombre des travailleurs au bénéfice d'une autorisation de séjour (cf. tableau 7/2).

Il est difficile de voir comment il serait possible, en cas de réduction aussi massive de l'effectif des étrangers, de tenir compte des exigences humanitaires imposées par l'initiative. Le problème ne pourrait, par exemple, être résolu par une pratique encore plus restrictive en matière d'admission d'étrangers, notamment par une prolongation de la période avant l'expiration de laquelle les familles ne peuvent rejoindre leur chef. Cette mesure ne toucherait en effet qu'une petite partie des membres de la famille venant rejoindre leur chef car en 1966, par exemple, le nombre des épouses admises en Suisse au titre de membre de la famille et n'exerçant pas d'activité lucrative n'a été que de 5000 approximativement. Pendant ce temps, 12 000 autres étrangères, dont les maris étaient déjà occupés dans notre pays, ont été autorisées à entrer en Suisse pour y prendre un emploi, sans devoir observer une période d'attente. Nous estimons que l'introduction d'une telle période pour les membres des familles désirant venir en Suisse pour y exercer une activité lucrative ne représenterait qu'un ajournement et n'aurait qu'un effet numérique très limité. Il n'est possible de réduire l'effectif des étrangers qu'en abaissant de manière appropriée le nombre des travailleurs étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour. Dans
ces conditions, il ne serait donc plus guère possible de tenir compte des intérêts économiques, comme le demande l'initiative. Les réserves de l'initiative ne sont donc que des mots dépourvus de sens.

L'économie s'est à ce point développée pendant les 20 dernières années qu'elle ne pourrait plus du tout fonctionner sans l'aide d'une nombreuse maind'oeuvre étrangère. La part des étrangers dans l'ensemble de la population active est aujourd'hui de presque 25 pour cent. Chez les ouvriers de l'industrie et de l'artisanat ainsi que chez les employés de l'hôtellerie, la proportion des étrangers est encore beaucoup plus élevée. En septembre 1965, on comptait 467 000 ouvriers suisses et 284 000 ouvriers étrangers dans les entreprises industrielles et artisanales alors soumises à la loi sur les fabriques; la proportion des étrangers y était donc de 38 pour cent.

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Les taux suivants de travailleurs étrangers ont été constatés en 1965 dans les branches d'industrie qui suivent (les données correspondantes pour 1966 ne sont pas encore disponibles) : Branche d'industrie

'

Alimentation, boissons et tabacs Industrie textile Industrie de l'habillement Industrie du bois Industrie du papier Arts graphiques ..:...

Industrie chimique Industrie de la terre et de la pierre Industrie métallurgique, machines Horlogerie, bijouterie

Etrangers en % de tous les ouvriers de fabrique 1965

:...

37 50 61 38 36 23 21 50 38 23

Pour les entreprises artisanales, on ne dispose que de données sur le nombre des travailleurs étrangers soumis à contrôle. Il est cependant possible d'admettre que la part des étrangers a atteint approximativement 60 pour cent dans la construction, en été, et environ 50 pour cent dans l'industrie hôtelière.

La forte proportion des étrangers n'est pas uniquement due au développement de l'activité industrielle et artisanale, mais aussi au passage de nombreux travailleurs suisses dans des situations professionnelles supérieures ou dans le secteur des services. C'est ainsi que le nombre des ouvriers de fabrique suisses est redescendu de 506 000 en 1960 à 467 000 en 1965. L'exemple de l'industrie textile est typique; au cours de cinq ans, la proportion des étrangers y a passé de 36 à 50 pour cent bien que le nombre total des personnes occupées ait diminué de 4700. Cela revient à dire que l'effectif des étrangers s'est accru de 7500 alors que 12 200 Suisses ont quitté cette industrie.

La réduction exigée par les auteurs de l'initiative aurait pour conséquence que l'effectif actuel des étrangers exerçant une activité lucrative devrait être réduit d'environ 35 pour cent. Dans les principaux domaines de l'économie, cette part n'est pas inférieure à une proportion d'un cinquième à un huitième du. nombre total des personnes occupées (Suisses et étrangers). Une telle réduction ne pourrait pas être obtenue par des réorganisations d'entreprise; elle conduirait plutôt à de sensibles diminutions de la production. Dans de nombreux cas, les entreprises ne seraient plus même en mesure de couvrir leurs frais avec une production réduite. La conséquence en serait que certaines d'entre elles devraient fermer leurs portes, ce qui conduirait également au congédiement de travailleurs suisses. L'hôtellerie doit, par exemple, pouvoir disposer d'un certain personnel et ne peut pas réduire à volonté ses prestations de services lorsqu'elle veut avoir une clientèle étrangère. L'industrie textile devrait,

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ensuite d'une pareille réduction, abandonner l'exploitation par équipes et ne serait plus guère viable. Cette réduction ne poserait pas seulement des problèmes d'effectifs car les travailleurs étrangers ne sont pas également répartis dans l'économie et entre les exploitations. Au contraire, la main-d'oeuvre étrangère est en bonne partie concentrée dans certaines activités délaissées par les Suisses. Les étrangers y occupent donc, dans nombre de cas, des positions-clés. Leur proportion est, par exemple, très élevée dans les installations d'ébarbage et de bains galvaniques. Si le degré d'activité de ces départements d'exploitation devait être fortement diminué ensuite de la réduction du nombre des étrangers, l'ensemble de la production aurait à en souffrir. Dans l'industrie de l'habillement, le travail hautement qualifié des créateurs suisses de mode et des couturières-modellistes ne servirait à rien si les ateliers de tailleurs et de repassage, qui occupent une forte proportion d'étrangers, venaient à manquer de personnel. L'industrie des conserves doit, elle aussi, recourir presque uniquement à l'emploi d'étrangères durant la saison. Il en va de même pour l'industrie des emballages. Si l'on y manquait de main-d'oeuvre ensuite de réductions massives de l'effectif des travailleurs étrangers, la mise en valeur de la récolte serait compromise et la marchandise ne pourrait plus être livrée au consommateur faute d'emballages appropriés.

Une réduction excessive du nombre des étrangers aurait également de graves conséquences en ce sens que les travailleurs étrangers ne sont pas uniquement occupés dans quelques grandes entreprises, mais le sont aussi par petits groupes ou même isolément dans presque toutes les entreprises de moins grande ampleur, petites pour la plupart, mais n'en exerçant pas moins d'importantes fonctions économiques. En raison de l'interpénétration très poussée de nos activités économiques, la disparition d'une petite entreprise d'un sous-traitant suffirait à entraver la bonne marche de toute une série d'autres exploitations.

Particulièrement graves seraient les effets d'une telle réduction sur les entreprises situées dans une région rurale, éloignée des centres, qui doivent tout particulièrement recourir à l'emploi de main-d'oeuvre étrangère pour compenser l'exode des travailleurs du
pays. Ce seraient ces entreprises qui auraient en premier lieu à subir les conséquences d'une réduction excessive de l'effectif des étrangers. Ces conséquences seraient d'autant plus graves que ces entreprises offrent souvent de précieuses possibilités de formation et d'emploi à des Suisses et constituent fréquemment la seule source importante de revenus fiscaux d'une collectivité. Mais, dans les régions industrielles également, des travailleurs suisses se trouveraient sans emploi ensuite de la formeture d'entreprises. Ce chômage toucherait principalement des personnes déjà âgées ou des travailleurs peu capables, qui ne pourraient plus guère être placés ailleurs.

Une réduction de l'effectif des travailleurs étrangers exige de l'économie qu'elle procède à des conversions importantes. Ainsi que nous l'avons déjà exposé de manière détaillée dans notre rapport du 9 février 1965 à la commission élargie des affaires étrangères du Conseil national sur la limitation et la réduction de l'effectif des travailleurs étrangers, il n'est pas possible de faire exécuter

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par des machines tout le travail qu'accomplissent des étrangers non qualifiés et mi-qualifiés. Si nous ne pouvons renoncer à ces activités, il sera nécessaire de disposer d'un effectif minimum de travailleurs étrangers, à moins que l'on n'arrive de nouveau à trouver des Suisses. Mais cela ne pourra se faire que si certains travaux peu agréables à exécuter ou socialement peu considérés sont revalorisés et rémunérés de manière suffisante. Il importe également d'adapter toujours plus la politique en matière de recrutement professionnel aux nouvelles conditions qui seront créées par la réduction de l'effectif des travailleurs étrangers. En outre, l'économie doit tendre à réaliser des économies de main-d'oeuvre en intensifiant la mécanisation, la rationalisation et l'automatisation des exploitations. On peut du reste se demander s'il est raisonnable de maintenir plus longtemps certaines branches dont la production est surtout assurée par la main-d'oeuvre et qui ne peuvent survivre que grâce à l'engagement continuel de travailleurs recrutés à l'étranger. Nous devons de plus en plus concentrer notre activité économique sur des genres de production n'exigeant qu'un minimum de main-d'oeuvre; cela réclame au préalable une refonte partielle des structures économiques. Pour toutes ces conversions, il faudra disposer de suffisamment de temps si l'on veut éviter de graves perturbations à notre économie.

3. L'exécution des mesures de réduction Les prescriptions qu'établit l'article I, 3e alinéa, du nouvel article constitutionnel proposé en ce qui concerne la manière de procéder pour réduire l'effectif des étrangers ne sont pas le fruit de mûres réflexions. Les auteurs de l'inititative proposent une mesure radicale sans se représenter comment leurs propositions pourraient être réalisées. Selon l'initiative, le Conseil fédéral doit décider chaque année la réduction de l'effectif des étrangers au bénéfice de l'autorisation de séjour, qui devra être opérée dans chaque canton. Il n'est du reste pas précisé comment la réduction doit être réalisée à l'échelon cantonal. Il faut considérer que ce n'est pas uniquement la part des étrangers (établis et au bénéfice d'une autorisation de séjour) dans la population de résidence qui varie (entre 4 % à Uri et 31 % à Genève), mais que la proportion des étrangers en possession
de l'autorisation de séjour (seuls soumis à la réduction) est également très différente d'un canton à l'autre (57% au Tessin et 81 % en Argovie).

L'effectif de ces étrangers devrait donc être diminué de manière qu'à la fin de la période de réduction, l'effectif total des étrangers résidant en Suisse ne dépasse pas un dixième de la population de résidence. En outre, il faudrait aussi prendre en considération le fait que, durant cette période, tant le nombre des Suisses que celui des étrangers établis va s'accroître et que ce fait ne restera pas sans influer sur la réduction frappant l'effectif des étrangers au bénéfice du permis de séjour. De plus, il convient de ne pas perdre de vue que les étrangers établis peuvent se déplacer librement d'un canton à l'autre et que l'effectif des étrangers peut donc se modifier dans les différents cantons au cours de la période de réduction. De même, il est impossible de prévoir les mouvements de Feuille fédérale, 119° année. Vol. II.

7

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la population suisse à l'intérieur du pays. Ces deux facteurs sont de nature à provoquer des modifications de la population de résidence des cantons et, partant, des effectifs de référence d'après lesquels sont calculées les parts de réduction.

Le texte de l'initiative ne précise également pas si la réduction doit se limiter aux cantons qui accusent une part d'étrangers supérieure à .10 pour cent de la population de résidence ou si tous les cantons doivent être soumis à la réduction. Dans le premier cas, 16 cantons comptant ensemble 507 000 étrangers au bénéfice du permis de séjour seraient touchés par cette mesure, qui réduirait ce nombre de 260 000 personnes, c'est-à-dire de plus de la moitié. Les cantons de Berne, Lucerne, Uri, Schwyz, Unterwald-le-Haut, Unterwald-le-Bas, Fribourg, Appenzell Rhodes-Intérieures et Valais ne seraient pas soumis à la réduction. Toutefois, ces cantons ne devraient pas accroître l'effectif des étrangers durant la période de réduction afin que la moyenne suisse de 10 pour cent ne soit finalement pas dépassée. · Si l'on voulait exécuter la réduction dans tous les cantons, ceux qui accusent un effectif des étrangers représentant plus de 10 pour cent de leur population de résidence seraient moins fortement touchés. 11 n'en reste pas moins qu'en pareil cas le canton de Zurich devrait réduire de 53 000 son effectif d'étrangers au bénéfice du permis de séjour, le canton du Tessin de 15 000, le canton de Vaud de 28 000 et le canton de Genève de 26 000, si l'on part de l'idée que la réduction se ferait au prorata du nombre total des étrangers. Ces quatre cantons auraient donc à supporter approximativement la moitié de la réduction.

Dans les cantons de Zurich, Vaud et Genève, il faudrait réduire les effectifs des étrangers au bénéfice du permis de séjour d'un peu plus de 40 pour cent et, au Tessin, de près de 55 pour cent. Il n'est pas besoin de dire quelles conséquences catastrophiques aurait aussi pour ces cantons cette variante moins rigoureuse.

D'après le texte de l'initiative, le Conseil fédéral devrait décider chaque année les réductions à opérer dans chaque canton. Il incomberait aux cantons d'exécuter les réductions exigées, l'autorité désignée par le Conseil fédéral étant chargée, si le besoin s'en fait sentir, d'annuler des autorisations de séjour. Cela supposerait
que les cantons soumettent toutes les décisions à l'autorité fédérale lors d'une procédure d'approbation. Une telle centralisation du contrôle des étrangers, qui a été instaurée durant la guerre en vertu du régime des pouvoirs extraordinaires, ne pourrait être réalisée dans un avenir rapproché étant donné que la Confédération et les cantons ne disposent pas du personnel supplémentaire voulu et que celui-ci ne pourrait guère être recruté dans les circonstances actuelles.

Le développement économique des cantons accusant des degrés différents, le choix d'un système de réduction et la fixation des contingents de réduction ne posent pas seulement un problème technique; ils ne manqueraient pas de soulever de graves questions d'ordre politique et économique. En effet, la fixation d'un nombre maximum d'étrangers par canton modifierait profondément la structure économique de certaines régions et entraverait d'une manière insupportable le développement économique de certaines autres.

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Pour toutes ces raisons, il est impossible de fixer des contingents cantonaux de réduction.

IV. POLITIQUE FUTURE TOUCHANT LA POPULATION ÉTRANGÈRE Quand bien même les exigences posées par les auteurs de l'initiative doivent être repoussées, la Confédération ne saurait faire preuve de passivité face au degré actuel de pénétration étrangère. Des mesures de défense s'imposent. Etant donné qu'il importe de tenir compte, en sus des considérations de politique générale, des intérêts économiques généraux de notre pays, il ne saurait être question de réduire de façon illimitée l'effectif des travailleurs étrangers, cela d'autant moins que notre économie doit pouvoir disposer à longue échéance d'un grand nombre de travailleurs étrangers. Le problème de la pénétration étrangère ne peut donc être uniquement résolu par une pratique restrictive en matière d'admission d'étrangers. Il importe plutôt de tout mettre en oeuvre pour réduire le danger d'un excès de population étrangère en poursuivant activement l'assimilation des étrangers qui séjournent durablement en Suisse.

1. Politique en matière d'admission d'étrangers et de réduction d'effectifs II importe en premier lieu d'empêcher un nouvel accroissement de l'effectif des travailleurs étrangers. Cette mesure s'impose pour des raisons de politique générale parce qu'une augmentation de cet effectif rendrait notrepays plus dépendant des événements économiques et politiques survenant à l'étranger. Mais, sur le plan de l'économie nationale aussi, une nouvelle augmentation de l'effectif des travailleurs étrangers serait indésirable car elle provoquerait des investissements supplémentaires pour de nouveaux postes de travail et logements, ainsi que pour le développement de l'équipement collectif, etc. Cela est d'autant plus important qu'il faut des années jusqu'à ce que l'activité du travailleur étranger supplémentaire permette d'obtenir une augmentation de l'offre correspondant à l'extension de la demande. Les exigences posées à un équipement collectif déjà fortement mis à contribution s'accroîtront probablement au cours de ces prochaines années même si l'effectif de la main-d'oeuvre étrangère n'augmente pas; en effet, les étrangers s'adaptent de plus en plus à nos conditions et améliorent leur niveau de vie.

En outre, nous ne devons pas nous fonder uniquement sur
la situation économique actuelle, qui peut se modifier à relativement brève échéance. En cas de fléchissement du degré de l'emploi, il serait impossible, compte tenu de leur situation juridique, d'obliger les travailleurs étrangers établis à quitter le pays. D'autre part, on ne pourrait, non plus, contraindre à partir des travailleurs étrangers soumis à contrôle que dans la mesure où des chômeurs du pays

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seraient disposés à occuper les places devenues vacantes. Comme les travailleurs du pays au chômage ne pourraient pas, selon leurs aptitudes professionnelles, prendre directement des emplois occupés par des étrangers, il faudrait continuer à disposer de main-d'oeuvre étrangère, même si des travailleurs du pays restaient inoccupés. Ce serait là une source de tensions supplémentaires.

Même si le nombre total des travailleurs au bénéfice d'une autorisation de séjour ou d'établissement ne devait plus s'accroître, la population étrangère de résidence augmenterait selon toutes prévisions de 66 000 personnes en cinq ans (cf. tableau 8). La principale cause de l'augmentation étant l'excédent des naissances, il ne serait pas raisonnable de chercher à le compenser en privant le pays de travailleurs étrangers économiquement utiles. La Suisse aura en effet besoin durant longtemps encore d'un grand nombre de travailleurs étrangers. Une politique de réduction allant trop loin ne manquerait pas, comme nous l'avons déjà exposé, d'avoir de graves désavantages économiques pour conséquence. Les intérêts des travailleurs et les intérêts publics seraient également touchés, notamment dans les régions économiquement peu développées.

Si l'on vise à stabiliser l'effectif de l'ensemble des étrangers exerçant une activité lucrative (au bénéfice de l'autorisation de séjour ou d'établissement), il importera de tenir compte de ce qui suit: Le passage des étrangers du régime de l'autorisation de séjour à celui du permis d'établissement a pour conséquence une diminution de l'effectif de la main-d'oeuvre soumise à contrôle. A moins que ces étrangers ne quittent ultérieurement notre pays, leur changement de statut n'entraîne pas une réduction du nombre des étrangers; ils continuent d'être à la disposition de notre-économie. Pour qu'ils ne soient pas remplacés par de nouveaux travailleurs étrangers soumis à contrôle, il importe de compenser chaque année l'augmentation nette de l'effectif des étrangers établis et exerçant une activité lucrative, par une réduction correspondante du nombre des travailleurs soumis à contrôle. Cette augmentation nette représentera, en moyenne, si la situation reste la même, quelque 13 000 personnes par an au cours de ces cinq prochaines années. Des mesures visant à limiter et réduire l'effectif des
travailleurs étrangers soumis à contrôle continueront donc d'être nécessaires. Nos efforts tendent à remplacer progressivement la réglementation actuelle (ACF des 26 février 1965,1er mars 1966 et 10 février 1967 limitant et réduisant l'effectif des travailleurs étrangers) par un régime plus conforme aux lois de l'économie.

En outre, différentes mesures restrictives, déjà appliquées depuis quelque temps, devront être maintenues en vigueur. Il s'agit surtout des prescriptions spéciales établies en Ì964 par le département fédéral de justice et police en matière d'admission de ressortissants de pays éloignés, qui excluent en règle générale l'entrée pour prise d'emploi d'étranger provenant de pays extraeuropéens et qui limitent en principe à la main-d'oeuvre qualifiée l'admission de travailleurs originaires de pays européens éloignés. Il importe de considérer qu'il s'agit de personnes provenant d'Etats dont les conditions économiques.

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sociales ou culturelles sont tout à fait différentes des nôtres. Les mesures à prendre en leur faveur, pour les assister et les soutenir, ainsi que leur incorporation à notre ordre social et économique posent aussi, cela va sans dire, des problèmes particulièrement difficiles à résoudre.

Notre arrêté du 19 janvier 1965, qui a établi l'obligation générale, pour les travailleurs étrangers, d'être en possession d'une assurance d'autorisation de séjour et qui a mis fin à une immigration désordonnée, doit également être maintenu. En revanche, l'introduction d'un délai d'attente prolongé pour le regroupement familial ne constitue pas une mesure efficace pour limiter l'effectif des étrangers, car elle n'aurait guère d'effet d'ordre numérique. En outre, il importe, pour des considérations de caractère humanitaire et social, de ne pas chercher dans cette direction une solution au problème de la pénétration étrangère.

Si, malgré l'application des mesures précitées, on n'arrivait pas à lutter de manière suffisamment efficace contre l'excès de pénétration étrangère, nous devrions nous réserver expressément la possibilité de prendre, selon l'évolution des conditions économiques ou d'après les exigences de la politique générale, d'autres mesures qui viseraient notamment à stabiliser la population étrangère de résidence ou à réduire son effectif.

L'article 69 ter de la constitution fédérale contient les bases constitutionnelles nécessaires, tant pour obtenir la stabilisation de l'effectif total des étrangers exerçant une activité lucrative que pour atteindre les autres buts mentionnés ci-dessus. II n'y a donc pas lieu de modifier ou de compléter la constitution fédérale.

2. Assimilation et naturalisation

Sous le terme d'assimilation, il convient de comprendre l'adaptation des étrangers à notre mode de vie, à nos conceptions ainsi qu'à nos us et coutumes.

Le processus d'assimilation se poursuit dans la vie intérieure de l'individu et exige beaucoup de temps. L'assimilation est favorisée par la tolérance, des chances égales sur le plan économique et l'appartenance à des milieux culturels apparentés. En revanche, elle est rendue difficile ou empêchée par de trop grandes différences d'ordre culturel, la mise à l'écart des nouveaux venus, des sentiments de supériorité manifestés par la population autochtone, ainsi que par la crainte que les étrangers ne portent atteinte au mode de vie de la population du pays. Des effectifs par trop élevés d'étrangers et un trop fort renouvellement de ces effectifs exercent également une influence défavorable sur l'assimilation des étrangers.

L'assimilation des travailleurs étrangers et des membres de leur famille ne saurait toutefois être en premier lieu l'affaire des autorités. Cette tâche relève plutôt -- outre l'école -- de l'initiative privée et incombe surtout aux employeurs, aux groupements professionnels et autres associations, mais aussi à

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chaque collaborateur de l'entreprise et à chaque locataire du même immeuble, voire à chaque voisin. Ce sont principalement eux qui peuvent, en considérant les problèmes concrets qui se posent à ces étrangers, ainsi que leurs soucis et leurs intérêts, les familiariser avec la langue de l'endroit, nos us et coutumes ou notre mentalité, et leur apprendre à mieux connaître nos institutions politiques et les problèmes propres à notre pays. II est ainsi possible de nouer de plus étroites relations humaines et, partant, de préparer leur formation civique. Mais cela exige qu'on abandonne à l'égard des étrangers capables et désireux de s'assimiler, dont le séjour a pris un caractère durable, une attitude surtout empreinte d'esprit de défensive et qu'on facilite leur adaptation à notre mode de vie et à notre manière de concevoir les choses. La presse, la radio et la télévision ont déjà contribué à renseigner le public sur ces questions et quelques résultats positifs ont déjà pu être constatés. De la sorte, il sera possible d'éviter que les étrangers ne continuent à vivre en colonies plus ou moins fermées et ne constituent ainsi de véritables corps étrangers troublant notre vie nationale.

En ce qui concerne les enfants étrangers, il importe, sur le plan des mesures visant à stimuler l'assimilation des étrangers, de s'efforcer de les intégrer dans les écoles publiques. Des cours préparatoires spéciaux peuvent être organisés à cet effet; cas échéant, le corps enseignant de nos écoles recevra une formation linguistique adéquate. Pour que l'assimilation porté des fruits une fois la scolarité terminée, il est nécessaire que les parents des enfants étrangers suivant nos écoles s'adaptent aussi à nos conditions de vie. Ainsi les enfants ne reprendront pas, au contact de leurs parents, des habitudes et des usages qui nous sont étrangers et le stade d'assimilation complète, indispensable à la naturalisation, ne sera pas seulement atteint à la troisième génération.

Il est aussi possible de favoriser l'assimilation des étrangers en veillant à ce que ceux dont le séjour a un caractère durable bénéficient d'un statut juridique bien assuré dans les domaines de la police des étrangers et du marché du travail.

De la sorte, l'intégration de ces étrangers dans notre communauté nationale se trouve également facilitée par
les services officiels. C'est pour cette raison que les travailleurs provenant des principaux pays où se recrute la main-d'oeuvre étrangère occupée en Suisse obtiennent, en règle générale, après cinq années de présence dans notre pays, le renouvellement de leur autorisation de séjour pour l'activité qu'ils exercent auprès de leur employeur, l'autorisation de changer de place ainsi que celle d'occuper un emploi dans une autre profession.

Après cinq ans de présence, l'autorisation de séjour de ces travailleurs est en outre prolongée chaque fois de deux ans. Le service public de l'emploi leur est ouvert et ils peuvent être admis dans les caisses suisses d'assurance-chômage.

Lorsque l'assimilation est parvenue à un stade suffisamment avancé, il importe finalement de penser à la naturalisation des étrangers entrant en considération. Il y a lieu de préciser en l'occurrence qu'il ne peut s'agir de forcer les naturalisations pour réduire le nombre des étrangers dans les statistiques. A l'avenir également, de strictes conditions doivent être posées quant à l'acquisition de la nationalité suisse.

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II n'est pas possible d'estimer le nombre des candidats virtuels à la naturalisation. On doit toutefois admettre que ce nombre est supérieur à celui des personnes naturalisées selon la procédure ordinaire, qui a oscillé entre 2000 et 3000 par an au cours de ces dernières années. Deux raisons sont surtout responsables du chiffre relativement modique des naturalisations selon la procédure ordinaire: le manque d'intérêt dont les étrangers font preuve quant à leur naturalisation et la retenue observée par les autorités dont relève la naturalisation.

D'une part, l'intérêt manifesté à l'égard de la naturalisation est beaucoup plus faible qu'on ne l'admet ordinairement. Cela proviendrait surtout du fait que la situation juridique de l'étranger établi ne diffère guère de celle du citoyen suisse, droits politiques exceptés. Sur le plan économique, il est placé sur le même pied que les Suisses sans avoir à s'acquitter de certaines obligations (service militaire). Etant donné que nous vivons à une époque où ce sont surtout les avantages et désavantages de caractère économique qui priment, les étrangers n'auront, à l'avenir également, pas un très grand intérêt à se naturaliser.

Il ne sera également jamais question d'accorder contre leur gré à des étrangers la nationalité suisse parce qu'une telle manière de procéder en matière de naturalisation serait de nature à menacer ou compromettre nos structures politiques traditionnelles et les particularités d'ordre culturel de notre pays. En ce qui concerne l'acquisition de la nationalité suisse en vertu du jus soli, il faut remarquer que, même dans la catégorie des étrangers établis, les effectifs continuent à se renouveler. Même si on limitait le jus soli aux enfants nés en Suisse de parents en possession de l'autorisation d'établissement, il en résulterait que de nombreux étrangers mis au benèfice de la nationalité suisse retourneraient à l'étranger avant d'être adultes et de s'être suffisamment adaptés à nos conditions.

En période de crise économique ou politique, il faudrait s'attendre qu'une bonne partie d'entre eux reviennent dans notre pays, où la population les considérerait comme des éléments étrangers ne pouvant s'assimiler.

Dans les conditions actuelles, il convient d'autre part de taxer de trop réservée la pratique suivie en matière de naturalisation
par de nombreux cantons et communes. En outre, la procédure de naturalisation est longue et compliquée. De plus, les taxes de naturalisation sont généralement trop élevées, cela d'autant qu'elles n'ont plus, en raison du développement des institutions sociales, l'importance qu'elles avaient autrefois comme équivalent des secours pouvant être accordés en cas d'indigence.

Jusqu'à l'heure actuelle, ce sont principalement deux catégories d'étrangers qui se sont intéressés à leur naturalisation, à savoir ceux qui sont nés et ont été élevés en Suisse, puis ceux qui ont épousé une Suissesse. Ces deux groupes ont constitué au cours de ces dernières années plus de 65 pour cent de toutes les naturalisations. Dans le message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse *), il était déjà exposé que l'étranger qui n'est arrivé dans notre pays qu'à x) FF 1951, II, 676.

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un certain âge, alors que son caractère était déjà formé, s'assimile beaucoup plus difficilement que ses enfants qui ont été élevés dans notre pays et qui y ont reçu leur formation scolaire et professionnelle. C'est en nous efforçant avant tout d'incorporer dans notre population les enfants des étrangers immigrés que nous arriverons à pratiquer une politique de naturalisation raisonnable, à même de nous permettre d'atteindre le but envisagé. Partant de ces considérations et des bonnes expériences faites avec la naturalisation facilitée d'enfants de mères suisses par naissance, le département fédéral de justice et police a soumis aux cantons, au début de 1965, différentes questions touchant les simplifications à apporter à la procédure et la réduction des taxes de naturalisation, ainsi qu'un projet de disposition à insérer dans la loi sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse: Les étrangers qui, à partir de l'âge de 6 ans, ont vécu en Suisse pendant 10 ans au moins, peuvent bénéficier de la naturalisation facilitée, lorsqu'ils résident en Suisse et font la demande avant l'âge de 22 ans révolus.

Ils acquièrent le droit de cité du canton et de la commune dans lesquels ils sont domiciliés depuis plus de 2 ans sans interruption au moment de l'octroi.

Pour que cette disposition puisse être insérée dans la loi, il faudrait une revision partielle de la constitution. Son adoption permettrait d'allier quantité et qualité. D'une part, la naturalisation s'étendrait à une catégorie d'étrangers dont il est normalement possible d'attendre une rapide assimilation. Ensuite, le choix serait opéré de façon individuelle, l'aptitude des candidats étant examinée dans chaque cas particulier par l'autorité. D'autre part, cette mesure permettrait de mettre chaque année au bénéfice de cette forme de naturalisation facilitée un grand nombre déjeunes étrangers élevés dans le pays et y ayant passé les années décisives quant à leur formation scolaire et professionnelle, ainsi qu'à leur assimilation. L'étranger lui-même se déciderait plus volontiers à présenter une telle demande de naturalisation étant donné que la procédure serait simple et gratuite. Pour le reste, la commune n'aurait pas à redouter des frais d'assistance excessifs du moment que la Confédération prendrait à sa charge la moitié de ces frais durant 10 ans, ainsi que le prévoit la réglementation actuelle touchant la naturalisation facilitée. Les intérêts du canton seraient également sauvegardés car la naturalisation facilitée ne pourrait pas être décidée sans qu'il soit préalablement entendu.

En dépit de ces avantages, les cantons ont dans leur majorité -- et surtout ceux qui ont les plus fortes proportions d'étrangers --fait preuve de beaucoup de retenue à l'égard de l'innovation proposée ou ont même émis un avis contraire.

Cette attitude procède surtout de considérations inspirées par le fédéralisme, cette forme de naturalisation représentant une nouvelle atteinte à la souveraineté cantonale et à l'autonomie communale et ne devant pas, par conséquent, être dans les maiqs des autorités fédérales. Malgré ces difficultés, il importe de poursuivre les efforts dans ce sens.

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V. CONCLUSIONS 1. En raison de la forte augmentation de l'effectif des étrangers au cours de ces dernières années, un grave danger de pénétration étrangère s'est manifesté.

Même si l'on peut déduire des 860 000 étrangers habitant en Suisse à fin 1966 120 000 à 150 000 personnes ne contribuant pas à accroître le degré de pénétration étrangère, le nombre des étrangers non assimilés ou difficilement assimilables qui y séjournent reste élevé. Le danger d'un excès de pénétration étrangère n'a encore pu être écarté en dépit des mesures de défense prises jusqu'ici.

2. La réduction de l'effectif des étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou de séjour qu'exigé l'initiative et qui doit ramener cet effectif à 10 pour cent au plus de la population totale ne saurait être supportée par l'économie nationale. Ce serait également le cas de la diminution annuelle d'au moins 5 pour cent de l'effectif des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour que réclame l'initiative pour permettre d'atteindre ce but. En effet, toute réduction de quelque importance frapperait les travailleurs étrangers soumis à contrôle et leurs proches; pour des considérations d'ordre humanitaire et social, l'effectif des membres des familles ne pourrait, de plus, être réduit que si l'on renonçait simultanément à la collaboration du chef de famille. Afin d'atteindre les buts visés par l'initiative, il faudrait, au total, réduire d'environ 260 000 l'effectif des étrangers soumis à contrôle et de quelque 200 000 celui des étrangers exerçant une activité lucrative; la diminution annuelle du nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour qui ont une activité professionnelle atteindrait 30 000 à 50 000 au cours de ces années prochaines. De telles réductions ne manqueraient pas de provoquer de graves perturbations économiques.

3. La réduction de l'effectif des étrangers exigée par les auteurs de l'initiative doit être considérée comme excessive. Elle ne tient pas compte des exigences humanitaires, ni des réalités politiques et économiques. En revanche, il sera également nécessaire, à l'avenir, de prendre des mesures contre la menace constante d'un excès de pénétration étrangère pour des considérations de politique générale et des raisons d'ordre économique. Nous tendrons à les harmoniser à l'évolution de la
situation et envisageons, selon le cours de cette évolution, de prendre non seulement des mesures visant à prévenir une nouvelle augmentation de l'effectif des travailleurs étrangers, mais aussi des dispositions qui permettraient de stabiliser la population étrangère et d'en réduire l'effectif.

4. Etant donné que le nombre des étrangers résidant de manière durable en Suisse va encore s'accroître en raison de leur stabilité plus grande et du fort excédent des naissances de la population étrangère, il importe, à titre de mesure complémentaire, de lutter contre l'excès de pénétration étrangère en encourageant l'assimilation de ces étrangers et en facilitant la naturalisation des enfants d'étrangers élevés en Suisse.

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5. Seule l'action combinée de ces deux moyens de défense, à savoir le frein mis à l'afHux d'étrangers, d'une part, et l'encouragement donné à l'assimilation ainsi que les facilités apportées à la naturalisation, d'autre part, permettra de combattre efficacement l'excès de pénétration étrangère.

Nous fondant sur les considérations qui précèdent, nous vous proposons de soumettre l'initiative populaire contre la pénétration étrangère à la votation du peuple et des cantons avec une proposition de rejet et sans contre-projet, comme le prévoit le projet d'arrêté ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 29 juin 1967.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Bonvin Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser 17S68

Ili (Projet)

Arrêté fédéral concernant l'initiative populaire contre la pénétration étrangère L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'initiative populaire du 30 juin 1965 contre la pénétration étrangère et le rapport du Conseil fédéral du 29 juin 1967; vu les articles 121 et suivants de la constitution et les articles 27 et 29 de la loi fédérale du 23 mars 1962 sur la procédure de l'Assemblée fédérale, ainsi que sur la forme, la publication et l'entrée en vigueur des actes législatifsl), arrête: Article premier L'initiative du 30 juin 1965 contre la pénétration étrangère sera soumise au vote du peuple et des cantons.

Elle a la teneur suivante: Article premier La constitution fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1874 est complétée comme il suit: Article 69guater Le nombre des étrangers établis ou en séjour ne doit pas dépasser, dans l'ensemble, un dixième de la population résidente. Pour prévenir le danger de pénétration étrangère, le nombre des ressortissants étrangers en séjour doit, dès l'entrée en vigueur de la présente disposition, être abaissé de cinq pour cent au moins chaque année jusqu'à ce que le maximum autorisé soit atteint, et compte tenu des exigences humanitaires.

Les besoins de l'économie seront pris équitablement en considération.

Le Conseil fédéral décide chaque année la réduction à opérer dans chaque canton.

L'autorité fédérale qu'il désigne annule, si besoin est, des autorisations de séjour, l

) RO 1962, 811.

112

Article II L'article 69guater de la constitution entre en vigueur le 1er janvier de l'année suivant son acceptation par le peuple et les cantons et son homologation par l'Assemblée fédérale.

Art. 2 Le peuple et les cantons sont invités à rejeter l'initiative.

Art. 3 Le Conseil fédéral est chargé d'exécuter le présent arrêté.

17568

113 Liste des tableaux

1. Effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle, de 1960 à 1966, d'après les relevés d'août de l'OFIAMT; 2. Population étrangère de résidence (sans les saisonniers) Jes 31 décembre 1965 et 1966, par canton et catégorie de permis; proportions approximatives d'étrangers; 3. Effectif des étrangers au bénéfice de permis de séjour ou d'établissement, depuis 1950; 4. Permis d'établissement initiaux et accroissement net du nombre des étrangers établis, de 1960 à 1966; 5. Naissances, décès et excédent des naissances des Suisses et des étrangers, depuis 1946; 6. Permis de séjour initiaux délivrés à des étrangers (immigration), depuis 1946; 7. Evolution de la population étrangère de résidence en cas d'acceptation de l'initiative populaire contre la pénétration étrangère : Variante 1 : si les buts visés par l'initiative devaient être atteints en 5 ans, Variante 2: si les buts visés par l'initiative devaient être atteints en 10 ans; 8. Evolution de la population étrangère de résidence en cas de stabilisation de l'effectif de tous les étrangers exerçant une activité lucrative (au bénéfice du permis de séjour ou d'établissement).

Tableau 1 Effectif des travailleurs étrangers soumis à contrôle, de 1960 à 1966, d'après les relevés d'août de l'OFIAMT Année

Saisonniers

Non-saisonniers

En tout

Frontaliers

Total

1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

139 538 173 459 194110 201 348 206 305 184 235 164 569

256519 332 364 405713 441 765 465 366 446 493 435 979

396 057 505 823 599 823 643 113 671 671 630 728 600 548

39419 42489 44883 46900 49230 45600 48000

435 476 548 312 644706 690013 720901 676 328 648 548

Modification par rapport à l'année précédente, en pour-cent

1961 1962 1963 1964 1965 1966

.

+24,3 + 11,9 + 3,7 + 2,5 --10,7 --10,7

+29,6 +22,1 + 8,9 + 5,3 -- 4,1 -2,4

+27,7 + 18,6 + 7,2 + 4,4 -- 6,1 -- 4,8

+ 7,8 + 5,6 + 4,5 + 5,0 -- 7,4 + 5,3

+25,9 + 17,6 + 7,0 + 4,5 -6,2 -- 4,1

Tableau 2 Population étrangère de résidence (sans les saisonniers) les 31 décembre 1965 et 1966, par canton et catégorie de permis; proportions approximatives d'étrangers Etrangers en tout

Etrangers au bénéfice du permis de séjour

Proport, approxim.

d'étrangers1)

Etrangers établis

Cantons

1965

1966

1965

Augmentation ou diminution

--2298

+ 4,3

-- 1,9

+ 998

+ 1.6 + 0,5.

-- 3,7

166 352 170781 76945 80291 24209 25 103 1466 1497 7602 7769 1249 1 365 1 809 1 893 6048 6206 8614 8668 11382 11 100 29010 27329 31 814 33577 24567 27356 11 147 11 810 5937 5785 939 933 45013 47069 16839 17274 60563 64746 26202 47096 87824 11 895 26553 81 091

27 168 48932 91 194 13 115 28298 83805

+ 966 + 1 836 + 3370 + 1745 + 2714

+ + + + + .+

Total

810 243

844987

+ 34744

+ 4,3

15000

15000

825 243 859 987

+ + + + + + + + + +

+

282 1681 1763 2789 663 152 6 2056 435 4 183

1 220

Augmentation ou diminution

+ 2.7

Zurich Berne Lucerne Uri Schwyz Unlerwald-le-Haut Unterwald-le-Bas Claris Zoug Frîbourg Soleure Baie- Ville Baie-Campagne Scbaffhouse AppenzellIUt.-Ext .

Appenzell Rh.-Inl.

Sainl-Gall Grisons Argovie Thurgovie Tessin Vaud Valais Neuchâlel Genève Fonct. de bureaux internat.

et d'administr.

étrangères.

approx.

+ 4429 + 3346 + 894 -- 31 -- 167 + 116 + 84 + 158 + 54

1966

122 623 120 325 61885 62883 18339 13438 + 3,7 1 021 1060 -- 2.1 5769 5427 -- 2,1 996 + 9,3 878 1368 1 394 + 4,6 4724 4758 + 2,6 + 0,6 6964 6651 9106 9225 + 2,5 + 6,2

+ 5,5 + 11,4 + 5.9 + 2,6 + 0,6 + 4,6 + 2,6

+ 6,9 3,7 3,9 3,8 10,3 6,6 3.3

--

--

+ 34744

+ 4,2

21 383 22012 18828 8428 4622 758 32574

11207 50846 19316 27 195 69600 8 183

22336 23 195 20 194 8588 4724 753 33261 11 388 52732 21 368 27770 68897 8838 21 700

+ 99 -- 39 -- 342 + 118 + 26 + 34

-- 3i3 + 119 + 453 + 1183 + 1366 + 160 + 102 -- 5 + 687 + 181 + 1886

58836

+ 1552 + 575 -- 703 + 655 + 315 + 507

608 332 615 698

+ 7316

21385 58329

1965

1966

43729 15060

50456 17408 6665 445 2175 369 499 1448 2017

5870

437

-- 5,9 + 13,4 + 1,9 + 0,7 -- 4,5 + 1,3 + 2,1

2000

+ + + + -- + + + + + -- +

9802 5739 2719 1 163 175

5,4 7,3 1,9 2,2 0,7 2,1 1,6 3,7 7,8 2,1 1,0 8,0

371 441 1 324 1 650 1 994 5446

12439 5632

9717 6386 19901

2 157 6674 10382 7 162 3222 1213 186 13808 5886 12014

5800

+ 1,5 + 0,9

18224 3712 5168 22762

21 162 22297 4277 6598 24969

+ 1,2

201 861

229 289

1965

1966

+ 15,4 + 15,6 + 13,5 + 1.8 + 8,8 -- 0,5 + 13,2

16° 8 9 4 9 5 7 ·

+ 9,4 + 22,2 + 8,2

14

16° 8 9 4 9 5 8 15 14

Augmentation ou diminution + 6727 + 2348 + 795 + +

8 175

--

2

+ +

58 124

+

367

+ 163 + 1228

+ 580 + 1423 + 503 + + + + + -- + +

50 11 1 369 254 2297 586 1261 4073

+ 22,5 + 5,9 + 24,8 + 18,5 + 4,3 + 6,3 + 11,0 + 4,5

14 7 13 14 14

7 13 14 15

16 11

16

7

7 13 12 16 15 23

12 11

12

+ 23.6 -- 9,2

15 15

+ 2207

+ 6,3 + 22,3 + 15,2 + 27,7 +. 9,7

22 18 6

17 31

19 7 17 31

+ 27 428

+ 13,6

14,0

14,4

+ 565 + 1 430

') Part des étrangers (y compris les fonctionnaires de bureaux internationaux, etc.) dans la population totale (chi (Très arrondis).

Tableau 3 Effectif des étrangers an bénéfice de permis de séjour ou d'établissement, depuis 1950 '} Etrangers au bénéfice du permis de séjour ') Année

Fin: 1950 1955 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

l

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

92000 148 000 271 000 346 000 399 000 440000 460 000 447 000 442000

34000 55000 97000 121 000 140 000 155 000 161 000 176000 189000

Total

Etrangers établis Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

126000 83000 76000 203000 73000 .64000 368000 72000 66000 467 000 74000 69000 539 000 84000 77000 595 000 91000 84000 621 000 97000 90000 623 000 104000 98000 631 000 117000 112000

EN TOUT Avec activité lucrative Total

159000 137000 138000 143 000 161 000 175000 187000 202000 229 000

Effectif

175 000 221 000 343 000 420 000 483 000 531000 557000 551 000 559 000

) En partie estimations.

2) Y compris les fonctionnaires de bureaux internationaux et leurs familles.

Comp. à l'année préc.

Sans activité lucrative Effectif

110000

-f 46000 + 122000 + 77000 + 63000 + 48000 + 26000 -- 6000 + 8000

119000 163 000 190000 217 000 239 000 251 000 274 000 301000

Comp. à l'année préc.

Total Effectif

285 000 340000 506 000 610000 700 000 770 000 808 000 + 23 000 825 000 + 27000 860 000

+ + + + + +

9000 44000 27000 27000 22000 12000

Comp. à l'armée préc.

+ 55000

+ 166000 + 104000 + 90000 + 70000 + 38000 + 17000 + 35000

Tableau 4 Permis d'établissement initiaux et accroissement net du nombre des étrangers établis, de 1960 à 1966

Année

Fin: 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

1 2

Avec activité lucrai ive

Sans activité lucrative ·

3932 6884 12049 8329 9075 12440 17836

2761 3956 7758 6322 7358 10389 14874

Accroissement net du nombre des établis 2)

Effectif des étrangers établis 2)

Permis d'établissement initiaux ') Total

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

Total

6693 10840 19807 14651 16433 22829 32710

71000 74000 84000 91000 97000 104000 117000

67000 69000 77000 84000 90000 98000 112000

138000 143 000 161 000 175 000 187000 202 000 229 000

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

Total

3000 10000 7000 6000 7000 13000

2000 8000 7000 6000 8000 14000

5000 18000 14 000 12000 15000 27000

) Sans les naissances.

) La répartition entre «avec activité lucrative» ou «sans activité lucrative» a été effectuée d'après les proportions enregistrées lors du recensement de la population de I960.

^

Cl

Feuille fédérale, 119' année. Vol. II.

Tableau 5 Naissances, décès et excédent des naissances des Suisses et des étrangers depuis 1946 Personnes décidées

Enfants nés vivants

Excédent des naissances

Année

1946 1950 1955 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

Suisses

Etrangers

Toi al

Suisses

Etrangers

Total

Suisses

Etrangers

86820

2306 2789 4532 11367 14920 19705 23926 27170 29120 28836

89126 84776 85331 94372 99238 104322 109 993 112890 111 835 109738

46896 44358 47276 48690 47625 51268 53047 49640 51584 519Î4

3380 3014 3090 3404 3379 3857 3942 3969 3963 3890

50276 47372 50366 52094 51004 55125 569S9 53609 55547 55804

39 924 37629 33523 34315 36693 33349 33020 36080 31 131 28988

-1074

100 100 100 100 100 100 100 100 100 100

103 101 96 81 76 68 62 61 55 54

-3 -1 4 19 24 32 38 39 45 46

81987.

80799 83005 843Ì8 84617 86067 85720 82715 , 80902

- 225 1442 7963 11 541 15848 19984 23201 25 157 24946

Tota]

38850 · 37404 34965 42278 48234 49197 53004 59281 56288 53934

En pour-cent

1946 1950 1955 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

97 97 95 88 85 8l 78 76 74 74

3 3 5 12 15 19 22 24 26 26

!00 100 100 ÎOO i 00 100 100 100 100 100

93 94 94 93 93 93 93 93 93 93

7 6 6 7

7 7 7 7 7

7

100 100 100 100 100 100 100 100 100 100

118 Tableau 6

Permis de séjour initiaux délivrés à des étrangers (immigration) depuis 1946

Permis Initiaux de séjour délivrés à des étrangers séjournant toute l'année Année d'entrée

1946 1950 1955 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966

dont: Total

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

34000 49000 106 000 162000 205 000 210 000 199 000 196000 139000 132 000

16000 32000 87000 138000 176 000 180000 165 000 159 000 106 000 100000

18000 17000 19000 24000 29 000 30000 34000 37000 33000 32000

Permis de séjour IMMIGRATION délivrés à des EN TOUT saisonniers

25000 32000 98000 157000 196 000 222 000 224 000 241 000 216000 191 000

59000 81 000 204 000 3J9000 401 000 432 000 423 000 437 000 355 000 322 000

119

Evolution de la population Étrangère de résidence Bases de calcul et d'estimation Les données des tableaux 7 et 8, qui suivent, ont été établies d'après les calculs et les estimations ci-après: L'effectif de référence (effectif initial) des étrangers établis est l'effectif recensé par la police fédérale des étrangers dans les cantons, à fin 1966. L'accroissement net annuel du nombre des étrangers établis a été calculé d'après le nombre des permis initiaux d'établissement délivrés et l'excédent des naissances, déduction faite des départs et des changements de nationalité. Les chiffres relatifs à l'immigration durant les années 1956 à 1966 jouent un rôle déterminant en l'occurrence. Quant à la part des personnes exerçant une activité lucrative dans le total des étrangers établis, on a admis la proportion de 51 pour cent.

Les étrangers au bénéfice du permis de séjour se répartissent entre les catégories mentionnées sous chiffre III, 1. Il n'a pas été tenu compte des frontaliers (48 000 en août 1966), du moment que ces étrangers doivent regagner journellement leur domicile hors de nos frontières et qu'ils ne sont pas en possession d'un permis de séjour en Suisse, mais uniquement d'une autorisation leur donnant le droit de prendre emploi. Les saisonniers ne sont pas non plus compris dans les relevés de l'effectif des étrangers qu'établit la police fédérale des étrangers. Ne sont considérés comme saisonniers que les travailleurs qui occupent un emploi de caractère saisonnier, dont le séjour n'atteint pas la durée d'une année et qui ne résident pas, en tout, plus de 45 mois en Suisse pendant cinq années consécutives. Ces travailleurs ne font donc pas partie de la population étrangère de résidence.

L'effectif des étrangers au bénéfice du permis de séjour qui exercent une activité lucrative, donné par les tableaux 7 et 8, comprend, outre les salariés, environ 4000 étrangers qui exercent une activité professionnelle à titre indépendant et dont on admet que le nombre est pratiquement constant. Le nombre des écoliers et étudiants (20 000), ainsi que celui des rentiers et des personnes faisant un séjour de villégiature ou de cure prolongé (20 000), qui sont compris dans le total des étrangers n'exerçant pas d'activité lucrative, sont également considérés comme stables.

En ce qui concerne les membres de la
famille des étrangers au bénéfice d'un permis de séjour, qui exercent une activité lucrative, il faut en revanche partir de l'idée que leur proportion -- 23 pour cent en 1966 --· va s'accroître selon toutes estimations et passer à 28 pour cent en 1976, en raison d'un excédent des naissances restant élevé et de l'augmentation du nombre des épouses n'ayant pas d'activité professionnelle. Pour le reste, on admet que les autres influences provoquant des modifications d'effectifs dans la catégorie des étrangers au bénéfice du permis de séjour se neutraliseront approximativement les unes les autres; il s'agit notamment de facteurs tels qu'entrées et départs, ainsi que du passage du statut d'étranger sans activité lucrative à celui d'étranger exerçant une activité professionnelle et vice-versa.

Tableau 7/7 Evolution de la population étrangère de residence en cas d'acceptation de l'initiative populaire contre la pénétration étrangère ') VARIANTE 1 : si les buts visés par l'initiative devaient être atteints en 5 ans

Etrangers avec permis de séjour Année de réduction

Effectif initial

l re e

2 3e 4e 5e

année année année année année

Etrangers établis

Population étrangère de. résidence au total

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En tout

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En tout

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En tout

432000 362000 307 000 258 000 214000 173 000

f 84 000 163 000 144000 127000 110000 89000

616000 525 000 451 000 385 000 324000 262000

117000 132000 142 000 153 000 164000 180000

112000 126000 137000 147 000 158000 172000'

229 000 258 000 279 000 300000 322 000 352 000

549 000 494 000 449000 411000 378 000 353000

296000 289000 281 000 274 000 268 000 261000

845 000 783 000 730 000 685 000 646000 614 000

Part des étrangers dans la population totale

Modification

Au total Moyenne par an 1

--259000 -- 95000 --354000 + 63000 + 60000 + 123000 --196000 -- 35000 --231000 -- 51 800 -- 19 000 -- 70 800 4- 12600 + 12000 + 24600 -- 39200 --

%

14,2 13,2 12,4 11,6 10,9 10,4

7000 -- 46200

) Sans les saisonniers et sans ïes fonctionnaires d'organisations internationales et leurs familles ; effectif initial (de référence) : fin 1966.

Tableau 7/2 Evolution de la population étrangère de résidence en cas d'acceptation de l'initiative populaire contre la pénétration étrangère1) VARIANTE 2: si les bute visés par l'initiative devaient être réalisés en 10 ans Etrangers avec permis de séjour Année de i

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

Effectif initial

432000 384000 345000 309000 275 000 241 000 209 000 181 000 155000 138 000 124000

184000 172000 162000 152000 141 000 Î24 000 108 000 93000 80 000 71 000 64000

l ree année 2e année 3 année 4°e année 5 année 6ee année 7 e année 8 année 9ee année 10 année

Etrangers établis .

Population étrangère de résidence au total

En tout

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En tout

616000 556000 507 000 461 000 416000 365000 317000 274 000 235 000 209 000 188 000

117000 132000 142000 153000 164000 180000 195000 209000 221000 228 000 234 000

112000 126000 137000 147 000 158000 172000 187 000 200000 213000 220000 225 000

229 000 258 000 279 000 300000 322 000 352 000 382 000 409000 434000 448000 459000

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En loui

549 000

296000 298 000 299000 299 000 299 000 296 000 295 000 · 293 000 293 000 291 000 289 000

845 000 814000 786 000 761 000 738 000 717000 699 000 683 000 669 000 657000 647000

516000 487 000 462 000 439 000 421 000 404000 390000 376000 366000 358000

Modification

Au total Moyenne par an 1

--308 000 --120000 --428 000 + 117000 + 113000 + 230000 --191 000 -- 7000 --198000 -- 30 800 -- 12000 -- 42 800 + 11700 + 11300 + 23000 -- 19100 --

700 -- 19800

) Sans les saisonniers et sans les fonctionnaires d'organisations internationales et leurs familles; effectif initial (de référence): fin 1966.

Part des étrangers dans la population totale

14°2 13,7 13,2 12,7 12,3 11,9 11,6 11,3 11,0 10,7 10,5

Tableau 8

Evolution de la population étrangère de résidence en cas de stabilisation de l'effectif de tous les étangers exerçant une activité lucrative (au benèfice du permis de séjour ou d'établissement) 1)

Etrangers avec permis de séjour

Etrangers établis

Population étrangère de résidence au total

Année de réduction

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

Er tout

Avec activité lucrative

Sans activité lucrative

En tout

Avec attivile lucrative

Sans activité lucrative

En loul

Effectif initial

432000 417000 407000 396000 385 000 369 000

184000 187000 192 000 195 000 198000 190000

616000 604000 599000 591 000 583 000 559000

117000 132 000 142 000 153 000 164000 180000

112000 126000 137000 147 000 158000 172 000

229 000 258 000 279 000 300 000 322000 352000

549 000 549 000 549 000 549 000 549000 549000

296 000 313000 329000 342 000 356 000 362 000

845000 862 000 878 000 891 000 905 000 911 000

l re année 2ee année 3 année 4ae année 5 année

Part des étrangers dans la population totale

% 14,2 14,4 14,5 14,6 14,7 14,7

Modification

Au total Moyenne par an 1

-- 63000 +

6000 -- 57000 -h 63000 + 60000 + 123000

-- 12600 +

1200 -- 11400 + 12600 + 12000 + 24600

- --

+ 66000 + 66000 + 13200 + 13200

) Sans les saisonniers et sans les fonctionnaires d'organisations internationales et leurs familles; effectif initial (de référence): fin 1966.

17SS9

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur l'initiative populaire contre la pénétration étrangère (Du 29 juin 1967)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1967

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

33

Cahier Numero Geschäftsnummer

9715

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

17.08.1967

Date Data Seite

69-122

Page Pagina Ref. No

10 098 534

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