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Feuille Fédérale Berne, le 22 juin 1967

119e année

Volume I

N°25 Parait, en règle générale, chaque semaine. Prix: 36 francs par an: 20 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à une

modification partielle de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques (Du 5 juin 1967) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre un projet de loi modifiant celle du 22 décembre 1916/20 juin 1952 sur l'utilisation des forces hydrauliques en vue d'adapter à la situation actuelle les prestations prévues à l'article 49 de cette loi.

I. ORIGINE DU PROJET Le 21 juin 1963, M. Joseph Diethelm, conseiller national, déposait un postulat invitant le Conseil fédéral à adapter à la hausse des prix intervenue depuis 1952 la redevance annuelle maximum de 10 francs par cheval théorique (75 kilogrammètres à la seconde) fixée à l'article 49, 1er alinéa, de la loi fédérale sur l'utilisation des forces hydrauliques. Le nouveau texte de l'article 49 de ladite loi devait prévoir aussi une indexation pour le futur calcul des redevances. Enfin, le Conseil fédéral était invité à soutenir énergiquement les efforts des cantons tendant à rapprocher des taux maximums fixés par la loi les redevances des usines hydrauliques qui appartiennent à des établissements en régie de la Confédération ou dans lesquelles ceux-ci sont partenaires (chemins de fer fédéraux et économie privée).

M. Diethelm a exposé, au cours de la séance du 15 décembre 1964, les motifs qui l'avaient incité à déposer ce postulat. Dans sa réponse donnée le même jour, le chef du département des transports et communications et de l'énergie déclara que le Conseil fédéral était prêt à examiner l'opportunité d'augmenter les taux maximums des redevances hydrauliques. En revanche, et par principe, il ne pouvait envisager une indexation. Intervenir notamment auprès des chemins de fer fédéraux dans le sens indiqué ne lui paraissait pas Feuille fédérale, 119e année. Vol. I.

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nécessaire. Sous ces réserves, le Conseil fédéral acceptait donc le postulat Diethelm. En conclusion, et sans discussion, le Conseil national a adopté le postulat, compte tenu des réserves mentionnées.

Le 20 juin 1966, M.. Paul de Courten, conseiller national, déposait un postulat invitant le Conseil fédéral à proposer aux chambres une revision de l'article 14 de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques. Selon ce postulat, l'indemnité de 3 francs par cheval due en vertu de cet article par la Confédération aux cantons sur le territoire desquels elle requiert des forces hydrauliques devrait être réajustée, compte tenu de la valeur actuelle du franc, et compenser équitablement la perte des impôts cantonaux, communaux et autres.

Ce postulat a été adopté le 22 septembre 1966. Comme il concerne la même loi que le postulat Diethelm, il nous a paru indiqué de vous faire simultanément part du résultat des études relatives aux deux postulats.

II. RELÈVEMENT DES REDEVANCES ANNUELLES 1. Base constitutionnelle La constitution fédérale contient, à l'article 24 bis, le principe selon lequel les droits et redevances à payer pour l'utilisation des forces hydrauliques appartiennent aux cantons ou aux ayants droit selon la législation cantonale (5e al.).

Il ne faut cependant pas que les cantons soient entièrement libres de déterminer ces prestations pécuniaires. Des limites doivent leur être fixées par la législation fédérale (6e alinéa). Le constituant voulait ainsi atteindre le but suivant: accorder les intérêts fiscaux des cantons avec le devoir de la Confédération d'encourager l'utilisation des forces hydrauliques. Le législateur fédéral doit, en limitant les droits et les redevances, favoriser la mise en valeur de la ressource nationale que sont ces forces et réduire le prix de leur produit principal, soit l'énergie électrique; les avantages des forces hydrauliques doivent profiter à l'économie publique et ne pas être perdus à cause de la charge fiscale qui viendrait grever les. usines hydrauliques (cf. notamment Burckhardt, Kommentar der Schweiz. Bundesverfassung, IIIe édition, p. 175 s. et 179).

Conformément à ce qui précède, la loi du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques disposait à l'article 49, dans sa version originale, que la redevance annuelle ne pouvait pas excéder
six francs par cheval théorique, c'est-à-dire par unité de production.

2. La revision de la loi en 1952 L'article 49 précité fut revisé par la loi du 20 juin-1952, en ce sens que le taux maximum de la redevance a été porté à dix francs par cheval théorique, avec cette réserve que le Conseil fédéral devait réduire partiellement jusqu'à six francs ce taux maximum, suivant la durée des débits utilisables. A l'encontre de la réglementation antérieure à 1952, le taux maximum par unité de puissance

1039 n'est donc pas le même pour toutes les usines, mais dépend de la qualité des forces utilisables dans chacune de celles-ci. En outre, les prescriptions revisées n'ont été appliquées intégralement aux droits existants qu'après une période transitoire de 9 ans au cours desquels le taux maximum a été de 6 francs par cheval théorique, majoré annuellement du dixième de la différence entre le nouveau taux -- différent donc pour chaque usine -- et l'ancien taux maximum unitaire de 6 francs.

Par un arrêté du Conseil fédéral du 30 décembre 1953 ayant effet au 1er janvier de la même année, le règlement de 1918 concernant le calcul des redevances a été modifié conformément à la nouvelle teneur de l'article 49 de la loi et aux directives que le représentant du Conseil fédéral et les rapporteurs des commissions, au cours des délibérations parlementaires, avaient été unanimes à considérer comme devant servir de base au règlement revisé.

Ces directives étaient les suivantes : a. La moyenne des taux maximums pour l'ensemble des usines doit être de 9 francs environ par cheval théorique; b. Sauf exceptions, le taux maximum de la redevance pour chaque usine ne doit pas être inférieur à 8 francs par cheval théorique; c. La construction d'usines à accumulation doit être favorisée en ce sens que le taux maximum afférent à ces usines soit relativement bas ; d. La régularité interannuelle des débits due à la présence de glaciers est un facteur favorable dont on doit tenir compte, ce qui permettra d'obtenir des taux maximums relativement élevés pour les forces hydrauliques des cantons de montagne.

Ces- principes caractérisent la réglementation actuelle sur le plan fédéral, étant donné qu'ils ont servi de base à l'arrêté d'application du Conseil fédéral du 30 décembre 1953 et que la période transitoire de 9 ans est expirée depuis le 1er janvier 1962.

3. L'évolution intervenue depuis 1952

Le droit fédéral laissant aux cantons le soin de déterminer, dans les limites qu'il fixe, les redevances à payer pour les concessions accordées dans le cadre de leur compétence, il en résulte que les prescriptions cantonales en la matière varient fortement d'un canton à l'autre. Les cantons sont en effet demeurés libres de fixer comme ils l'entendent le taux et le mode de calcul des redevances, pourvu qu'elles ne dépassent pas, par unité de puissance calculée selon les prescriptions fédérales, le maximum admis par ces dernières. On rencontre donc dans le droit cantonal toute une gamme de dispositions, depuis celles qui fixent, d'une façon générale, les taux et la méthode de calcul applicables dans chaque cas particulier jusqu'à celles qui abandonnent entièrement à l'autorité concédante la tâche de fixer spécialement, dans chaque concession, la somme à payer à titre de redevance.

1040 Dans notre message du 13 novembre 1951 relatif à la loi du 20 juin 1952, nous avons estimé à 7 millions de francs le montant des redevances payées en 1949 par les entreprises livrant à des tiers, ce qui représentait un peu plus de .11/2 pour cent des recettes totales de l'ensemble de ces entreprises. La charge correspondante par kWh produit était de 0,09 centime en moyenne alors que si le taux maximum de 6 francs avait été appliqué partout, cette charge se serait élevée à 0,12 centime/kWh étant admis qu'un cheval théorique produit en moyenne 5000 kWh par année. Le taux effectif moyen par cheval théorique était donc de 4 fr. 50 environ.

Une enquête effectuée en 1965 auprès des cantons au sujet des redevances perçues en 1964 a montré qu'elles se sont élevées à 32,8 millions de francs. Elles correspondaient sensiblement à la production de l'année hydrographique 1962/ 63. Or cette année-là, la production de l'ensemble des usines hydro-électriques suisses a été de 21,7 milliards de kWh, d'où une charge moyenne de 0,15 centime par kWh ou encore un taux moyen de 7 fr. 50 par cheval théorique. Ce taux était encore assez éloigné des 9 francs résultant de l'utilisation intégrale des possibilités offertes par la réglementation fédérale actuelle. Cela est dû: a. Au fait que la revision de 1952 a expressément réservé les droits acquis; elle est donc restée sans effet sur nombre de concessions pour lesquelles la possibilité d'une revision du taux initial n'avait pas été réservée, soit dans la concession elle-même, soit dans la législation cantonale; b. Au fait que plusieurs cantons n'ont pas encore modifié leur législation ou l'ont modifiée sans utiliser au maximum les possibilités offertes par la réglementation fédérale.

Notons encore que selon les statistiques de l'office fédéral de l'économie énergétique, les recettes totales des entreprises électriques livrant à des tiers se sont élevées durant l'année 1963 à 1181 millions de francs alors que le montant des redevances perçues l'année suivante a été de 32,8 millions de francs. Comme la production des entreprises électriques livrant à des tiers représente 85 pour cent environ de la production totale du pays, on peut admettre, en première approximation, que le montant des redevances afférent à ces entreprises a été de 32,8 xO,85 = 27,8 millions de francs,
ce qui représente 2,35 pour cent environ de leurs recettes totales. Si l'on considère en outre que la moyenne des redevances versées par les entreprises de chemins de fer qui produisent leur propre énergie est un peu inférieure à celle de l'ensemble des usines, on peut en déduire que le pourcentage en question atteignait presque 2l/2 pour cent. Or, nous l'avons déjà dit, le taux correspondant était seulement un peu supérieur à 1 y2 pour cent en 1949.

4. Nouvelle adaptation des taux maximums des redevances

Chacun sait que la valeur de l'argent a subi une notable dépréciation depuis 1952 et que l'indice suisse des prix à la consommation a marqué une hausse importante depuis lors. Quant aux indices du coût de la construction, ils ont

1041 subi une augmentation encore plus marquée, mais qui s'est sensiblement atténuée dans la suite. Cette augmentation a entraîné un fort accroissement des charges des cantons et des communes pour les travaux publics, en particulier ceux de correction de cours d'eau et d'assainissement. Par ailleurs, les redevances sont non pas un véritable impôt, mais l'indemnité due aux communautés ayant mis leurs forces hydrauliques à disposition; il semble donc équitable que cette indemnité puisse être réadaptée dans une certaine mesure. Un ajustement des taux maximums des redevances apparaît donc justifié. Il paraît d'autant plus indiqué que la revision de 1952 était restée en deçà de l'évolution des prix intervenue depuis 1916. Enfin, l'effet d'une augmentation des redevances serait surtout favorable aux régions de montagne. C'est ainsi que sur les 32,8 millions de francs encaissés en 1964 au titre de redevances, la majeure partie l'a été dans les cantons du Valais (9 millions de francs), des Grisons (6 millions), du Tessin (3,3 millions) et d'Uri (1,8 million).

Mais les arguments contre une augmentation trop accusée des taux maximums actuels ne manquent pas non plus. Tout d'abord, comme nous l'avons indiqué, le taux moyen des redevances était de 7 fr. 50 environ par cheval en 1963; il ne doit pas être beaucoup plus élevé actuellement. Il reste donc jusqu'à la limite de 9 francs environ, une marge non négligeable que l'on pourrait utiliser avant de modifier la réglementation fédérale ; mais cette marge est très variable et.

pour nombre d'aménagements, le plafond est déjà atteint. D'autre part, si la situation actuelle des entreprises électriques est encore saine, leurs charges augmentent constamment, non seulement en valeur absolue, mais encore en valeur relative. C'est ainsi que, selon les statistiques de l'office fédéral de l'économie énergétique, le prix de vente moyen de l'énergie distribuée par les entreprises électriques livrant à des tiers a passé de 6,5 centimes/kWh en 1950/51 à 7,4 en 1964/65, ce qui ne représente qu'une hausse de 13,8 pour cent alors que durant ce même laps de temps, les charges de ces entreprises dues aux impôts et redevances, ont crû de 0,278 centime par kWh produit (moyenne des années 1950, 1951 et 1952) à 0,367 (moyenne des années 1963, 1964 et 1965), soit de 32 pour cent.
Impôts et redevances apparaissent comme une charge encore plus lourde si on les compare aux sommes distribuées par les entreprises électriques à titre de dividendes ou de versements aux caisses publiques. C'est ainsi qu'en 1950, impôts et redevances représentaient 28 pour cent des sommes en question alors que ce pourcentage s'est élevé à 47,1 pour cent en 1965. En contre-partie, lesdits versements aux caisses publiques, c'est-à-dire les montants versés aux communautés (cantons, communes, etc.) par les entreprises électriques appartenant à ces communautés ont diminué fortement, pour se réduire de 15,4 pour cent en 1952 à 10,5 pour cent en 1965 des recettes totales de l'ensemble des entreprises électriques livrant à des tiers.

Rappelons enfin que si, jusqu'à maintenant, les tarifs de vente de l'électricité n'ont subi que des hausses généralement peu importantes, on le doit avant tout à une forte proportion d'anciennes usines construites à bas prix et forte-

1042 ment amorties. Par suite de la forte augmentation du coût de la construction et des taux de l'intérêt, le prix de l'énergie produite dans les nouvelles usines est généralement élevé. Or cette dernière énergie représente une part toujours plus grande de la production totale.

Que conclure de cette situation? C'est sans doute par rapport à ses répercussions possibles sur les prix de vente de l'électricité d'une part et sur la construction de nouvelles usines d'autre part qu'il convient de le faire. Or, sous ces deux aspects, il ne semble pas qu'une augmentation restant dans des limites raisonnables puisse avoir de graves conséquences. En effet, à rencontre de la hausse du taux de l'intérêt de l'argent et de la forte augmentation du coût de la construction à un moment donné, l'augmentation du prix de revient de l'énergie électrique qui en résulterait ne devrait se faire sentir que lentement et devrait rester dans les limites très modestes, étant donné que l'adaptation du maximum des redevances ne grèverait que faiblement les frais annuels.

D'autre part, des répercussions défavorables sur l'aménagement de nouvelles forces hydrauliques ne devraient pas résulter d'une revision de la réglementation fédérale, celle-ci ne fixant que les taux maximums admissibles; cantons et communes resteraient donc libres de fixer les taux des redevances des nouvelles usines à des conditions acceptables par les intéressés à l'utilisation de leurs forces non encore aménagées.

Une consultation des directions cantonales des travaux publics a montré que la plupart d'entre elles étaient favorables à une augmentation raisonnable des taux maximums actuels. L'union des centrales suisses d'électricité, l'association suisse pour l'aménagement des eaux et les chemins de fer fédéraux se déclarèrent contraires à toute modification de la législation. Quant à la section de l'utilisation des forces hydrauliques de la commission fédérale de l'économie hydraulique et énergétique, elle a admis, à une faible majorité, qu'une augmentation de l'ordre de 10 pour cent des taux maximums pouvait entrer en ligne de compte, notamment en vue d'apporter une aide aux régions de montagne.

En définitive, nous sommes arrivés à la conclusion qu'une hausse de 25 pour cent des taux maximums actuels des redevances, telle qu'elle ressort du projet de
loi ci-annexé, paraît d'autant plus acceptable qu'elle ne représenterait au maximum qu'une nouvelle charge de 2 fr. 50 par cheval théorique ou 0,05 centime par kWh. Par ailleurs, et comme ce fut déjà le cas lors de la revision de 1952, nous proposons que cette augmentation ne puisse avoir lieu, en ce qui concerne les droits existants, que successivement, à raison de cinq augmentations partielles de 5 pour cent chacune, le laps de temps entre chacune de celles-ci étant d'une année. Cette mesure évitera un accroissement trop brusque des charges que les entreprises électriques intéressées supportent au titre des redevances. Le retard au plein effet de l'augmentation proposée devrait aussi contribuer à la lutte contre le renchérissement général.

5. Indexation des redevances

A première vue, l'instauration d'un indice semble constituer une solution séduisante puisqu'elle assurerait une adaptation automatique du taux maximum

1043 des redevances à de nouvelles conditions économiques sans qu'il soit nécessaire de procéder à la revision d'une loi fédérale. Toutefois, le choix d'un tel indice serait déjà très délicat car il devrait tenir compte de nombreux facteurs comme les salaires, le coût de la construction, le taux de l'intérêt de l'argent, le prix de vente de l'énergie, etc. et cela dans des proportions bien difficiles à déterminer équitablement. Mais surtout, une telle clause constituerait un précédent, comme aussi, de la part du législateur fédéral, l'aveu officiel que l'on doit s'attendre à une nouvelle diminution de la valeur de notre monnaie.

Dans d'autres occasions déjà, nous avons refusé, par principe, l'instauration d'indices et nous pensons qu'il n'y a pas lieu de s'écarter de cette règle, à propos des taux maximums des redevances.

6. Redevances versées par les chemins de fer fédéraux M. Diethelm désirerait enfin que le Conseil fédéral soutienne énergiquement les efforts des cantons visant à rapprocher des taux maximums fixés par la loi fédérale les redevances des usines hydrauliques qui appartiennent à des établissements en régie de la Confédération ou dans lesquelles ceux-ci sont partenaires.

Remarquons d'emblée que parmi les établissements en régie de la Confédération, seuls les chemins de fer fédéraux possèdent eux-mêmes d'importantes usines électriques, soit comme uniques propriétaires, soit en tant que partenaires avec d'autres entreprises publiques ou privées.

Selon leurs indications, la somme des redevances hydrauliques qu'ils ont versées en 1966 s'est élevée à 1,87 million de francs, correspondant à un taux moyen de 6 fr, 62 par cheval théorique. Il s'agit effectivement d'un taux moyen un peu inférieur à celui qui est payé pour l'ensemble des usines, lequel, comme nous l'avons indiqué plus haut, est de 7 fr. 50 environ. La différence entre ces deux taux est relativement faible. Sans doute est-elle due au fait que les chemins de fer fédéraux possèdent une proportion relativement élevée d'usines hydroélectriques construites en vertu d'anciennes concessions, c'est-à-dire de concessions octroyées à une époque où les taux usuels des redevances étaient peu élevés. Au cours des ans -- et ces dernières années spécialement -- un certain ajustement de ces anciens taux a eu lieu, en particulier à l'occasion
de modifications ou de prolongations de droits d'utilisation auxquels se rapportent ces concessions. Cette évolution n'est pas terminée. Il y a donc tout lieu de penser qu'au cours des prochaines années, le taux moyen des redevances versées par les chemins de fer fédéraux se rapprochera toujours plus de celui qui est payé par les autres concessionnaires de forces hydrauliques, lequel lui-même tend vers le taux maximum fixé par les prescriptions fédérales.

Nous pensons donc que, pour atteindre le but envisagé par M. Diethelm, une intervention du Conseil fédéral auprès des chemins de fer fédéraux n'est pas nécessaire. Elle ne pourrait guère qu'accélérer un peu l'évolution en cours.

D'ailleurs, une telle intervention ne paraît pas souhaitable si l'on considère les

1044 charges toujours plus lourdes des chemins de fer fédéraux comme aussi leur statut (loi sur les chemins de fer fédéraux du 23 juin 1944), qui prescrit qu'ils doivent être gérés et exploités selon les principes d'une saine économie.

III. AUGMENTATION DE L'INDEMNITÉ POUR PERTE D'IMPÔTS 1. La situation actuelle

Avant la mise en vigueur, le 1er janvier 1918, de la loi du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques, les communautés -- cantons, districts, communes et corporations -- investies du droit de disposer des forces hydrauliques, pouvaient s'opposer à ce que la Confédération les utilise pour accomplir ses propres tâches. Le législateur de 1916 a estimé qu'il convenait de modifier cette situation en ce sens que la Confédération devait être habilitée à requérir les forces dont elle pourrait avoir besoin; c'est ce qu'énoncent les articles 12 et 20 de la loi.

D'autre part, la Confédération et ses institutions ont toujours été exonérées de tous impôts cantonaux et communaux. Il en résulte que la réquisition d'une force par la Confédération représente une perte d'impôts pour les cantons et les communes intéressés. Cette situation fit l'objet de longues délibérations aux chambres lors de la discussion de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques; elle faillit même la faire échouer. C'est pourquoi le Conseil fédéral proposa un compromis, qui fut accepté par le parlement. Il s'agit des articles 14 et 20 de la loi; le principe de l'exonération d'impôts est maintenu mais avec le correctif qu'une compensation partielle est allouée aux cantons intéressés pour la perte d'impôts cantonaux, communaux et autres qu'ils pourraient subir, cette compensation étant de un franc par cheval théorique installé. Cette indemnité s'applique donc, pour chaque usine, au même nombre d'unités de puissance que celui qui intervient lors du calcul des redevances hydrauliques et qui est déterminé conformément à l'article 51 de la loi et au règlement des 12 février 1918/ 30 décembre 1953 concernant le calcul des redevances en matière de droits d'eau.

La loi fédérale du 20 juin 1952 modifiant la loi de 1916 a porté cette indemnité à 3 francs par cheval. En outre, depuis un certain nombre d'années, les chemins de fer fédéraux versent cette somme pour toutes les forces qu'ils utilisent, quels que soient la date et le mode d'acquisition (réquisition, concessions fédérale, cantonale, communale) et qu'il s'agisse des usines dont ils sont seuls propriétaires ou de leur part dans des usines de partenaires. C'est ainsi qu'actuel, lement, ils payent à titre d'indemnité pour perte d'impôts une somme totale de l'ordre de 850
000 francs par année aux six cantons d'Uri, de Schwyz, des Grisons, d'Argovie, du Tessin et du Valais. En 1950, alors qu'ils s'en tenaient strictement aux termes de la loi et que l'indemnité forfaitaire ne s'élevait qu'à, un franc par cheval, le montant de ces indemnités avait été de 92 000 francs seulement.

1045 2. Nouvelle augmentation de l'indemnité Le postulat de Courten, du 20 juin 1966, vise donc à reviser encore une fois les articles 14 et 20 de la loi afin de tenir compte de l'évolution des prix intervenue depuis 1952.

Pour juger si une telle revision est indiquée, il convenait d'abord de connaître le montant des impôts -- cantonaux, communaux et autres, -- que devraient payer actuellement les chemins de fer fédéraux s'ils ne jouissaient pas de la franchise fiscale. Ces calculs ont été effectués par l'administration fédérale des contributions ainsi que par les services des contributions des cantons intéressés. En ce qui concerne la première, elle a admis dans tous les cas les principes applicables aux usines de partenaires. Elle a donc traité les usines appartenant aux seuls chemins de fer fédéraux comme des usines de partenaires, ce qui est admissible, étant donné qu'elles se trouvent dans une situation analogue à ces dernières, tant en ce qui concerne la production que l'utilisation de l'énergie. Les principes concernant la taxation des usines de partenaires ont été confirmés en 1956 par deux arrêts du Tribunal fédéral rendus à la suite de différends qui s'étaient produits, l'un entre le canton de Schwyz et l'usine de PEtzel, l'autre entre l'administration fédérale des contributions et les usines hydro-électriques de l'Oberhasli.

Sur la base de ces considérations, comme aussi en faisant quelques hypothèses de moindre importance, l'administration fédérale des contributions a donc calculé que la franchise fiscale dont jouissent les chemins de fer fédéraux représente une perte totale de l'ordre de 1 775 000 francs pour les cantons et communes intéressés. Comme la puissance entrant en ligne de compte est de 282 000 chevaux, la perte d'impôt s'élève à 6 fr. 30 par cheval en moyenne.

Les montants calculés par les services des contributions des cantons intéressés pour les usinés n'appartenant que partiellement aux chemins de fer fédéraux coïncident généralement avec ceux qui sont déterminés par l'administration fédérale des contributions puisque, comme cette dernière, ces services ont pu se fonder sur la taxation effective des partenaires des chemins de fer fédéraux dans ces usines. Quant aux montants des impôts afférents aux usines dont les chemins de fer fédéraux sont seuls propriétaires,
les services cantonaux les ont aussi calculés en appliquant le mode de taxation valable pour les usines de partenaires; les divergences, parfois importantes, entre ces montants et ceux trouvés par l'administration fédérale proviennent de différences d'estimation quant à certains éléments de l'assiette des impôts.

Lors de la revision de 1952, on avait admis -- en se basant sur des calculs effectués par les services cantonaux des contributions seulement -- que la perte d'impôt était de 9 fr. 50 par cheval. C'est donc sur cette base que fut justifiée l'augmentation de 1 à 3 francs de l'indemnité pour perte d'impôts (voir le message du Conseil fédéral du 13 novembre 1951). Comment expliquer le fait que le montant de 9 fr. 50 obtenu alors soit notablement plus élevé que celui de 6 fr. 30 correspondant à la situation actuelle?

1046 Tout d'abord, il faut se rendre compte que le montant moyen de 9 fr. 50 par cheval calculé lors de la revision de 1952 comme moyenne de cette perte était trop élevé. En effet, en l'absence de données précises concernant les éléments imposables et vu les incertitudes régnant alors quant au mode de taxation de ce genre d'usines, les services cantonaux mentionnés ont pu avoir tendance à admettre des montants très favorables pour les finances de leur canton et de leurs communes. C'est ainsi que dans certains cas, le calcul des bénéfices avait été fondé sur la valeur marchande de la production; dans d'autres cas, on avait calculé le montant des impôts par analogie à ceux qui sont perçus sur les usines d'entreprises du secteur privé vendant leur production à des tiers.

D'ailleurs, les deux arrêts cités plus haut n'ayant pas encore été rendus par le Tribunal fédéral, les cantons pouvaient à bon droit admettre que leur mode de taxation était acceptable.

En réalité, l'assiette des impôts des usines en question, comme les lois fiscales y relatives, y compris les taux d'imposition, n'ont que peu ou pas varié depuis la revision de 1952. La perte d'impôts subie alors par les cantons ne devait donc pas s'écarter beaucoup du montant valable actuellement de 6 fr. 30.

En résumé, il ressort premièrement de ce qui précède qu'une augmentation de l'indemnité actuelle pour perte d'impôts ne saurait être fondée sur un accroissement sensible du montant de la perte d'impôts qui serait intervenue depuis la revision de la loi en 1952.

Nous avons examiné ensuite si, malgré ce fait, il convenait de donner suite au postulat de Courten en considérant la situation sous un autre aspect, à savoir celui du pourcentage de la perte, effective d'impôts que représente l'indemnité allouée en vertu de l'article 14 de la loi.

Suivant les calculs effectués en 1950/51 par les services des impôts des cantons intéressés (voir le message du Conseil fédéral du 13 novembre 1951), les impôts qu'auraient dû payer les chemins de fer fédéraux en 1916 s'ils n'en avaient pas été exonérés se seraient élevés à 4 fr. 50 par cheval en moyenne.

L'indemnité pour perte d'impôts, fixée par la loi cette même année 1916 à 1 franc par cheval, devait donc représenter 22,2 pour cent de cette perte.

La revision de 1952 a porté cette indemnité à 3 francs
par cheval. Rapportée à la perte d'impôts communiquée par les cantons, mais surestimée, de 9 fr. 50, l'indemnité en question représentait 31,5 pour cent de cette perte.

En réalité, aujourd'hui encore, la perte effective moyenne est de l'ordre de 6 fr. 30 par cheval seulement et l'indemnité de 3 francs représente donc près de la moitié de ce montant. Il est vrai que ce montant de 6 fr. 30 ne comprend pas certaines pertes indirectes dues à des prestations complémentaires (énergie livrée gratuite ou à prix réduit, droit de retour, etc.) peut-être moindres de la part des chemins de fer fédéraux comme aussi à l'exonération de l'impôt pour la dófcnsc nationale des usines appartenant entièrement aux chemins de fer fédéraux et par conséquent à la perte pour les cantons intéressés de la ristourne correspondante, n nyen reste pas moins que l'indemnité de 3 francs par cheval

1047 constitue aujourd'hui encore une compensation de la perte d'impôts proportionnellement plus élevée presque 50 pour cent que celles admises lors de l'adoption de la loi en 1916 (22,2 %) et lors de sa revision en 1952 (31,5 %).

Considérée sous cet angle également, la réglementation actuelle ne nous paraît donc pas devoir être modifiée car il a toujours été entendu que l'indemnité en question ne devait représenter qu'une compensation partielle de la perte d'impôts (voir le message complémentaire du Conseil fédéral du 25 juillet 1916 et le message du 13 novembre 1951).

En outre, par l'article 14 de la loi, le législateur n'a pas entendu allouer aux cantons une indemnité susceptible d'être ajustée en cas de dépréciation de la monnaie. II n'a voulu prévoir qu'une compensation partielle pour perte d'impôts. Une adaptation de cette indemnité ne serait donc indiquée que si les charges fiscales des chemins de fer fédéraux -- au cas où ils n'en seraient pas exonérés -- avaient augmenté dans une sensible mesure. Or, comme nous l'avons vu, cela ne fut pas le cas ces dernières années.

Rappelons enfin qu'en vue de lutter contre l'augmentation dés salaires et des prix en général, les chemins de fer fédéraux ont maintenu leurs tarifs bien au-dessous du renchérissement général, ce qu'illustrent les chiffres suivants: 1939

1952

1966 Janv. 1967

Indice moyen des prix à la consommation 100 171 225 230 Indice moyen des tarifs-marchandises 100 124 130 137 Indice moyen des tarifs-voyageurs 100 127 163 170 En conclusion, toutes les raisons exposées ci-dessus nous amènent à vous proposer de ne rien changer à la législation actuelle en matière d'indemnités pour perte d'impôts.

IV. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS Nous vous proposons de reviser sur un seul point la loi du 22 décembre 1916/20 juin 1952, à savoir la disposition de l'article 49 qui fixe les taux maximums des redevances annuelles pouvant être exigés pour les concessions de forces hydrauliques. Selon le nouveau texte proposé, les taux-limites actuels seraient augmentés de 25 pour cent. Une disposition transitoire réserve les droits acquis et prévoit en outre que pour les droits existants, l'augmentation des taux maximums actuels sera réalisée sous forme de 5 paliers annuels de cinq pour cent chacun, la première augmentation partielle coïncidant avec la mise en vigueur de la loi.

L'examen approfondi des multiples aspects de la question soulevée par le postulat Diethelm nous a donc conduits à proposer une augmentation d'un quart des taux admissibles actuellement. Cette augmentation permettrait à de nombreuses communautés, d'adapter aux circonstances nouvelles les recettes qu'elles tirent des redevance sans que le prix de revient de l'énergie électrique en soit sensiblement affecté. En revanche, par principe et selon une pratique cons-

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tante, nous ne saurions proposer une solution prévoyant une indexation des nouveaux taux maximums. Une clause de cette nature constituerait en effet un précédent et signifierait que l'on s'attend à une nouvelle diminution de la valeur de notre monnaie. De même, l'examen de la situation actuelle quant aux redevances des usines hydrauliques appartenant à des établissements en régie de la Confédération ou dans lesquelles ceux-ci sont partenaires a montré qu'une intervention de notre part à ce sujet ne serait pas souhaitable. Elle n'est d'ailleurs pas nécessaire, l'évolution en cours conduisant déjà au rapprochement désiré entre les redevances payées par ces usines et celles qui correspondent aux taux maximums.

Enfin, en ce qui concerne une augmentation de l'indemnité pour perte d'impôts proposée par le postulat de Courten, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'y avait pas lieu de modifier la réglementation actuelle. En effet, non seulement la charge fiscale des usines hydrauliques n'a pas augmenté sensiblement depuis 1952, année de la dernière revision de la loi, mais l'indemnité allouée actuellement représente déjà une partie importante de la perte effective d'impôts.

D'ailleurs, s'il pouvait paraître paradoxal de recommander le maintien de la situation actuelle dans ce domaine alors que nous proposons en même temps une augmentation de 25 pour cent du maximum admissible des redevances hydrauliques, il convient de ne pas oublier que, lors de la revision de 1952, ce maximum n'a été élevé que de 50 pour cent tandis que l'indemnité pour perte d'impôts a été augmentée de 200 pour cent.

La loi du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques repose sur l'article 23 comme aussi sur l'article 24bis de la constitution. Le projet de revision que nous vous soumettons a la même base constitutionnelle.

Au vu de ce qui précède, nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet de loi ci-annexé. Les postulats Diethelm (n° 8813 du 15 décembre 1964) et de Courten (n° 9509 du 28 septembre 1966) peuvent être considérés comme exécutés et par conséquent classés.

Nous saisissons cette occasion pour vous assurer, Monsieur le Président et Messieurs, de notre haute considération.

Berne, le 5 juin 1967.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, Bonvin 17488

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

1049 (Projet)

Loi fédérale modifiant la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 5 juin 1967, arrête: La loi fédérale du 22 décembre 1916 ^ sur l'utilisation des forces hydrauliques est modifiée comme suit :

Art. 49, 1er al.

La redevance annuelle ne peut excéder 12,50 francs par cheval théorique . (75 kilogrammètres à la seconde). Le Conseil fédéral réduira partiellement jusqu'à 7,50 francs ce taux maximum, suivant la durée des débits utilisables; il édictera les dispositions nécessaires à cet effet.

Disposition transitoire

II L'article 49, 1er alinéa, revisé est applicable en tant qu'il ne porte pas atteinte à des droits acquis.

Pour les droits existants, la nouvelle prescription sera applicable graduellement, durant les cinq premières années, à raison d'un échelon par année.

Chaque échelon sera égal au cinquième de la différence entre le nouveau et l'ancien taux maximum admissible.

III Le Conseil fédéral est chargé d'exécuter la présente loi et de fixer la date de son entrée en vigueur.

17488

i) RS 4, 761 ; RO 1952, 1039.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à une modification partielle de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques (Du 5 juin 1967)

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