FF 2022 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

Allocation pour perte de gain Covid-19 pour indépendants Rapport succinct de la Commission de gestion du Conseil national du 18 février 2022

2022-0550

FF 2022 515

FF 2022 515

Rapport 1

Introduction et objet du rapport

Fin mai 2020, les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont décidé, en leur fonction d'organe de haute surveillance parlementaire, de lancer une inspection visant à analyser la gestion de la crise du coronavirus Covid-191 par le Conseil fédéral et l'administration fédérale2. Depuis lors, les CdG et leurs sous-commissions procèdent à des clarifications concernant de nombreux aspects de la gestion de crise3.

Dans ce cadre, la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) s'est penchée sur le système mis en place par la Confédération à partir de mars 2020 afin de soutenir les indépendants dont l'activité était affectée par la pandémie («allocation pour perte de gain Covid-19», ci-après: «APG Covid-19»). Ce système, basé sur celui de l'allocation pour perte de gain (APG)4, a permis à certains indépendants (par exemple ceux ayant dû fermer leur établissement en raison des mesures sanitaires ou touchés par une quarantaine) de bénéficier d'une contribution financière de la Confédération visant à compenser leur suspension d'activité5. A partir d'avril 2020, le cercle des bénéficiaires a été élargi notamment aux indépendants touchés de manière indirecte par les mesures de lutte contre la pandémie (également appelés «cas de rigueur»).

La CdG-N a concentré ses travaux sur la mise en place du système d'APG Covid-19 et son fonctionnement de mars à septembre 2020, soit jusqu'à l'entrée en vigueur du nouveau système défini par le Parlement dans la loi Covid-196. Elle s'est en particulier informée sur les réflexions menées par l'administration lors de la conception et du lancement du système d'allocations en mars 2020, les modifications apportées au système au cours des mois ayant suivi, la manière dont la surveillance a été exercée par les autorités fédérales compétentes ainsi que la collaboration entre ces dernières.

1 2 3

4

5 6

Ci-après: «crise du Covid-19», «crise» ou «pandémie».

Les CdG lancent une inspection visant à analyser la gestion de la pandémie de Covid-19 par les autorités fédérales, communiqué de presse des CdG du 26 mai 2020.

Un aperçu des thèmes abordés par les CdG est disponible dans le Rapport annuel 2020 des Commissions de gestion et de la Délégation des Commissions de gestion du 26 janvier 2021, chap. 4 (FF 2021 570) et dans le Rapport annuel 2021 des Commissions de gestion et de la Délégation des Commissions de gestion du 25 janvier 2022, chap. 4 (pas encore publié dans la FF).

Initialement, l'APG est une assurance qui compense une partie de la perte de gain subie par les personnes qui accomplissent leur service militaire, leur service civil ou servent dans la protection civile. Depuis 2005, elle compense aussi les pertes de revenu liées à la maternité (allocation de maternité) et depuis 2021, les pertes de gain liées à un congé paternité. Elle est obligatoire et toutes les personnes assujetties à l'AVS/AI y cotisent.

Sous forme d'une indemnité journalière équivalant à 80% du revenu avant l'interruption de l'activité et 196 francs par jour au maximum.

Loi fédérale du 25 septembre 2020 sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (Loi COVID-19; RS 818.102); cf. en particulier art. 15.

2 / 18

FF 2022 515

La commission a examiné dans quelle mesure les autorités fédérales avaient agi dans le respect des critères de légalité et d'opportunité7 lors de la conception et durant les premiers mois de mise en oeuvre du système d'APG Covid-19. En revanche, elle n'a pas approfondi les questions relatives aux conséquences de l'APG Covid-19 pour les finances fédérales ou à l'efficience économique des fonds alloués pour cet outil par le Parlement. Ces aspects relèvent de la haute surveillance financière, exercée par les Commissions des finances (CdF) et la Délégation des finances (DélFin).

Sur la base des faits collectés, la CdG-N fait part, dans le présent rapport succinct, de ses conclusions du point de vue de la haute surveillance parlementaire.

2

Démarches de la CdG-N

La sous-commission DFI/DETEC de la CdG-N8 a procédé aux investigations détaillées dans ce dossier. Entre novembre 2020 et l'été 2021, elle a traité celui-ci dans le cadre de plusieurs séances. Elle s'est entretenue avec les représentantes et représentants des deux principales unités fédérales concernées, à savoir l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et le Contrôle fédéral des finances (CDF)9 et leur a adressé des questions complémentaires par écrit. Elle a également pris connaissance de divers documents, tels que certains formulaires de demande d'allocation. Enfin, elle a analysé les décisions du Conseil fédéral relatives à l'APG Covid-19 ainsi que les modifications apportées à la législation pertinente durant la période sous revue. La CdG-N remercie les unités administratives concernées pour les informations transmises et les réponses détaillées fournies à ses questions.

En octobre 2021, la sous-commission a décidé d'élaborer un rapport succinct afin de présenter une synthèse des faits à sa connaissance et de faire part de ses conclusions.

Ce rapport a été soumis à consultation auprès des entités concernées. Lors de sa séance plénière du 18 février 2022, la CdG-N a examiné et approuvé la version finale du rapport et a transmis celui-ci au Conseil fédéral. Lors de cette même séance, elle a également décidé de publier ce rapport.

Ci-après, la CdG-N se concentre sur quatre aspects liés au système d'APG Covid-19: la conception et le lancement du système (chap. 3.1), la prolongation du système en juillet 2020 (chap. 3.2), la mise en oeuvre du système et la collaboration avec les caisses de compensation (chap. 3.3) ainsi que la surveillance et la lutte contre les abus (chap. 3.4). Pour chaque aspect, la commission présente brièvement les faits portés à

7

8

9

Selon leur pratique habituelle, les CdG examinent également le respect du critère d'efficacité, c'est-à-dire si les mesures prises ont réellement atteint le but visé (à savoir, ici, permettre aux indépendants de surmonter la crise et empêcher les faillites). Néanmoins, dans la mesure où la pandémie est encore en cours au moment de l'adoption du présent rapport, il est trop tôt pour évaluer cet aspect du point de vue de la haute surveillance.

La sous-commission DFI/DETEC de la CdG-N se compose des conseillères nationales et conseillers nationaux Thomas de Courten (président), Angelo Barrile, Katja Christ, Alois Huber, Christian Imark, Matthias Samuel Jauslin, Priska Seiler Graf, Marianne Streiff-Feller et Michael Töngi.

Audition de l'OFAS du 11 novembre 2020; audition de l'OFAS et du CDF du 12 mai 2021.

3 / 18

FF 2022 515

sa connaissance ainsi que les arguments des autorités fédérales concernées et fait part de son appréciation.

3

Faits collectés et appréciation de la CdG-N

3.1

Conception et lancement du système d'APG Covid-19

Le 14 mars 2020, la direction de l'OFAS a été chargée par le Département fédéral de l'intérieur (DFI), sur mandat du Conseil fédéral, d'établir un système visant à soutenir les indépendants affectés par les mesures de lutte contre le Covid-19. Les clarifications de la CdG-N ont montré que l'office, en étroite collaboration avec le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO), avait alors cherché à mettre en place un système de soutien simple, non bureaucratique et standardisé, qui puisse être appliqué de manière large dans les plus brefs délais.

Dans le cadre de ses travaux préparatoires, l'OFAS a examiné différentes options, notamment celle de la remise de «chèques fixes». Néanmoins, prévoyant que plusieurs dizaines de milliers de demandes de soutien seraient déposées, l'office a expliqué qu'il avait rapidement décidé de se baser sur un modèle existant (celui des APG), essentiellement pour que les caisses de compensation puissent se servir de renseignements déjà disponibles10 et de processus automatisés.

L'OFAS a indiqué qu'il avait, dans ce cadre, volontairement renoncé à prévoir une vérification individuelle détaillée des demandes de soutien, dans la mesure où celleci aurait empêché une distribution rapide des prestations. Selon le directeur de l'office, ce choix était dicté par la volonté du Conseil fédéral d'introduire un système de soutien aussi vite que possible.

La première version de l'ordonnance correspondante, fondée sur l'art. 185, al. 3, de la Constitution fédérale (Cst.)11, a été adoptée par le Conseil fédéral six jours plus tard, le 20 mars 202012. Dans un premier temps, l'APG Covid-19 était réservée aux employés et indépendants concernés par la fermeture des écoles ou une quarantaine ordonnée par les autorités ainsi qu'aux indépendants touchés par la fermeture de leur établissement et l'interdiction des manifestations. Les premiers versements ont eu lieu aux alentours du 8 avril, puis de manière régulière dès le 15 avril. Le 16 avril, l'APG Covid-19 a été étendue aux indépendants touchés de manière indirecte par les mesures de lutte contre la pandémie décidées par la Confédération (également appelés «cas de

10 11 12

Les indépendants, en tant que personnes assujetties à l'AVS/AI, cotisent pour l'APG et sont donc répertoriés dans le système correspondant.

Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.; RS 101).

Ordonnance du 20 mars 2020 sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus (Ordonnance sur les pertes de gain COVID-19; RS 830.31). Cf. également: Coronavirus: Un train de mesures pour atténuer les conséquences économiques, communiqué de presse du Conseil fédéral du 20 mars 2020.

4 / 18

FF 2022 515

rigueur»)13. D'autres modifications ont encore été apportées à l'ordonnance correspondante les mois suivants14.

Globalement, la CdG-N considère que l'approche choisie par le Conseil fédéral lors de la conception du système d'APG Covid-19 était appropriée, au vu du contexte de l'époque. Elle salue les efforts des autorités fédérales compétentes, qui sont parvenues à mettre en place en quelques jours un système de soutien aussi simple et efficace que possible, et estime que le choix de se baser sur un modèle existant était judicieux. De son point de vue, il est compréhensible que l'on ait renoncé, lors du lancement du système, à une vérification individuelle des demandes de soutien, afin de permettre une mise en oeuvre rapide et élargie. La commission a examiné la manière dont les autorités ont exercé, par la suite, leur surveillance en la matière, et a constaté que celleci avait été réalisée avec sérieux, dans la limite des données disponibles (cf. chap. 3.4).

En ce qui concerne la collaboration entre les autorités fédérales compétentes pour le lancement de l'APG Covid-19, la commission note que l'OFAS tire un bilan positif de ses échanges avec le SECO et l'Administration fédérale des finances (AFF)15, qu'il décrit comme «intensifs et constructifs». L'office a notamment participé de manière régulière à la taskforce socioéconomique instituée par le SECO. La CdG-N salue la collaboration très précoce et étroite qui a été assurée entre ces offices.

En revanche, l'OFAS a laissé entendre que l'échange d'informations avec l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) avait été moins intensif et plus complexe. Le directeur a indiqué qu'il avait été difficile, sur la base des informations transmises par l'OFSP, de savoir à quelles modifications des bases légales il fallait s'attendre. La commission regrette qu'il n'ait pas été possible d'établir un meilleur dialogue entre ces deux offices, sachant que tous deux sont rattachés au même département. Elle invite le Conseil fédéral, respectivement le DFI, à procéder à un bilan de cette collaboration et à s'assurer que les enseignements adéquats soient tirés de ce cas en matière de collaboration entre l'OFAS et l'OFSP en période de crise.

Recommandation 1 Le Conseil fédéral est invité à procéder à un bilan de la collaboration et de l'échange d'informations
entre l'OFAS et l'OFSP durant la pandémie de Covid19 et à s'assurer que les enseignements pertinents soient tirés à ce propos, pour améliorer cette collaboration de manière générale en vue de crises futures.

La commission s'est également informée sur la collaboration entre l'OFAS et le CDF lors du lancement du système d'APG Covid-19. Elle a relevé que celle-ci s'était tout d'abord heurtée à certaines difficultés; le CDF a indiqué qu'il lui avait été difficile 13

14 15

Coronavirus: extension du droit à l'allocation pour perte de gain aux cas de rigueur, communiqué de presse du Conseil fédéral du 16 avril 2020. Cette extension s'est appliquée aux cas de rigueur présentant un revenu annuel entre 10 000 et 90 000 francs. L'OFAS a indiqué qu'il avait ici également renoncé à des vérifications individuelles, dans la mesure où cela aurait nécessité la création de critères d'admission complexes.

Notamment le 22 avril, le 19 juin et le 1er juillet 2020.

L'OFAS a notamment été associé à une «taskforce socioéconomique», ainsi qu'à des séances hebdomadaires organisées avec les partenaires sociaux.

5 / 18

FF 2022 515

d'établir un premier contact avec l'OFAS ­ ce dernier étant extrêmement sollicité par la gestion de crise ­ et qu'il avait été associé tardivement à la conception du système d'APG16. Les premiers échanges approfondis entre l'OFAS et le CDF au sujet du rôle de surveillance de ce dernier ont eu lieu début avril 2020. Une modification ultérieure de l'ordonnance a été nécessaire afin de préciser le rôle du CDF et lui garantir un accès aux données des caisses de compensation; celle-ci a été adoptée par le Conseil fédéral le 16 avril 2020 (cf. chap. 3.4).

Par ailleurs, certaines divergences sont apparues au printemps 2020 entre les deux unités concernant la portée de la surveillance exercée dans le domaine de l'APG Covid-19. Le CDF a indiqué qu'il aurait souhaité que l'on accorde aux autorités fédérales et cantonales compétentes un accès à certaines données fiscales des requérants17 ­ comme cela était le cas pour les crédits Covid-19 garantis par un cautionnement solidaire ­ afin de pouvoir procéder à des vérifications a posteriori. Une proposition correspondante a été soumise par le CDF au Conseil fédéral mi-avril 2020. Néanmoins, le DFI n'y était pas favorable18 et le Conseil fédéral n'y a pas donné suite.

Néanmoins, les modalités du partenariat entre les deux autorités concernant la surveillance se sont rapidement clarifiées et que tant l'OFAS que le CDF tirent un bilan positif de leur collaboration au cours des mois ayant suivi. La CdG-N a constaté que les échanges entre les deux unités étaient étroits et que la répartition des compétences concernant l'APG était réglée de manière claire.

3.2

Prolongation du système d'APG Covid-19 en juillet 2020

Le 1er juillet 2020, le Conseil fédéral a décidé de prolonger le système d'APG Covid-19 jusqu'au 16 septembre 2020 et d'élargir son application à certaines catégories de personnes supplémentaires dans le domaine de l'événementiel19. Dans ce cadre, le soutien aux personnes ayant bénéficié de l'APG Covid-19 jusque-là a été prolongé automatiquement, sans que celles-ci doivent déposer une nouvelle demande.

Cette mesure a fait l'objet de diverses critiques20.

16

17 18

19 20

Le directeur de l'OFAS a reconnu qu'au regard de l'urgence d'agir, la lutte contre les abus n'était pas la principale priorité de l'office durant les premières semaines, d'autant plus que cet aspect est habituellement essentiellement de la responsabilité des caisses de compensation.

Le CDF souhaitait notamment que les requérants libèrent les autorités du secret de fonction et du secret fiscal.

De l'avis du DFI, les bases légales existantes contenaient déjà des dispositions concernant l'obligation d'informer et de collaborer du bénéficiaire de prestations et permettaient de collecter les informations nécessaires pour prévenir les abus. Selon le département, compte tenu de la durée limitée des mesures concernées, il était plus efficient de s'en tenir aux règles ayant fait leurs preuves jusque-là dans les assurances sociales.

Allocation Corona-perte de gain pour les indépendants: prolongation jusqu'au 16 septembre 2020, communiqué de presse du Conseil fédéral du 1er juillet 2020.

Bund verschleudert Steuergelder. In: Blick, 21 août. 2020; Ärger mit der Nothilfe für Selbständiger-werbende. In: Neue Zürcher Zeitung, 25 août 2020; «Es musste schnell gehen ­ denn es herrschte Krise». In: Solothurner Zeitung, 28 août 2020; Profiteuren soll Riegel geschoben werden. In: Blick: 29 août 2020; Die Behörden waren vor Missbrauch gewarnt ­ und taten nichts. In: Basler Zeitung, 2 septembre 2020.

6 / 18

FF 2022 515

La CdG-N s'est informée sur les raisons pour lesquelles la surveillance sur les bénéficiaires n'avait pas été renforcée lors de cette prolongation. L'OFAS a fait valoir qu'une telle mesure aurait représenté une charge administrative trop élevée pour les caisses de compensation, du fait du grand nombre de cas concernés21, et aurait retardé les durées de traitement. Il a rappelé qu'à cette époque, une grande partie des indépendants étaient toujours fortement touchés par la pandémie, malgré les assouplissements. L'office a également souligné que plusieurs obstacles rendaient particulièrement complexe la surveillance de l'utilisation de l'APG Covid-19 par les indépendants (cf. chap. 3.4).

L'OFAS a toutefois précisé que les caisses de compensation avaient explicitement demandé aux personnes qui ne subissaient plus de perte de gain de le communiquer, que celles-ci y étaient légalement tenues au regard du principe de l'obligation d'informer22 et qu'une remarque correspondante avait été ajoutée sur les décomptes de prestations. L'office a par contre reconnu qu'il ne disposait pas de chiffres détaillés concernant le nombre d'indépendants qui avaient renoncé à percevoir l'APG suite à cette annonce, car il n'avait pas souhaité alourdir la charge de travail déjà élevée des caisses de compensation avec la collecte de données supplémentaires. Dans la presse, le président de la Conférence des caisses cantonales de compensation a estimé que seuls 5% des bénéficiaires environ avaient renoncé à continuer à percevoir des indemnités23.

De l'avis de la commission, les arguments avancés par l'OFAS sont compréhensibles.

Elle estime qu'une pesée d'intérêts a été réalisée, lors du prolongement du système d'APG en juillet 2020, entre un renforcement de la surveillance ­ qui aurait impliqué des coûts plus élevés et un délai de traitement plus long des dossiers ­ et les risques liés à l'utilisation abusive de l'APG ­ qui se sont révélés faibles selon les clarifications menées par la suite par l'OFAS et le CDF (cf. chap. 3.4). La commission regrette néanmoins que l'office ne soit pas en mesure de déterminer quelle part des indépendants ont renoncé à percevoir l'APG à l'été 2020. Ce manquement, s'il s'explique par le très grand nombre de cas traités, reflète aussi les désavantages de l'approche décentralisée en vigueur dans
les caisses de compensation et met en évidence un potentiel d'amélioration en matière de numérisation (cf. chap. 3.3).

La commission note qu'on ne peut pas complètement exclure que certains indépendants aient continué à bénéficier de l'APG durant l'été 2020 alors qu'ils ne subissaient plus de perte de gain liée au coronavirus. Elle constate qu'il s'agit d'un risque assumé pris par les autorités fédérales dans le contexte de la crise. Elle estime néanmoins qu'il est important que cet aspect soit clarifié autant que possible de manière postérieure,

21

22 23

Selon les chiffres du CDF, à fin juillet 2020, 172 000 cas avaient été traités dans le cadre de l'APG Covid-19, pour un montant total de prestations de 1,1 milliard de francs.

Source: COVID-19-Prüfungen, Dritter Zwischenbericht, rapport du CDF du 31 juillet 2020.

Cf. art. 31 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA; RS 830.1).

Kaum einer verzichtet freiwillig auf Staatshilfe. In: Basler Zeitung, 22 août 2020.

Les chiffres du CDF laissent penser que le nombre de bénéficiaires a plutôt augmenté au cours des mois ayant suivi: entre fin juillet et fin octobre 2020, le nombre total de cas traités dans le cadre de l'APG est passé de 172 000 à 219 000, et le montant total de prestations versées de 1,1 à 2 milliards de francs.

7 / 18

FF 2022 515

dans le cadre des évaluations prévues par l'OFAS et le CDF (cf. chap. 3.5). Elle s'informera en temps voulu des résultats de ces analyses.

3.3

Mise en oeuvre du système d'APG et collaboration avec les caisses de compensation

La mise en oeuvre de l'APG Covid-19 et le versement des indemnités est du ressort des caisses de compensation AVS24. La CdG-N a procédé avec l'OFAS et le CDF à un bilan de leur collaboration avec les caisses de compensation. De manière générale, les deux unités jugent celle-ci de manière positive.

Les modifications très fréquentes apportées au système d'APG durant les premiers mois ont représenté un grand défi. L'OFAS s'est assuré, à travers des circulaires, des documents d'information, des réunions et divers autres outils, que les bases légales soient appliquées de manière harmonisée. Il a également échangé de manière régulière avec les caisses de compensation pour répondre à leurs questions. Les caisses de compensation ont dû adapter à de nombreuses reprises leurs processus dans des délais très courts. Elles ont néanmoins réussi à assurer un versement rapide et efficace de l'APG, malgré une charge de travail très élevée. Selon l'OFAS, les caisses se sont montrées «très constructives et engagées» et leur travail a été de grande qualité.

La CdG-N n'identifie pas de nécessité d'agir du point de vue de la haute surveillance parlementaire en ce qui concerne la collaboration entre l'OFAS et les caisses de compensation pour la mise en oeuvre de l'APG Covid-19 et salue le grand engagement des acteurs concernés.

Les clarifications de la CdG-N mettent néanmoins en évidence certaines problématiques de portée générale relatives à la structure organisationnelle du système d'AVS/AI/APG, qui ont été accentuées par la crise du Covid-19:

24

­

Surveillance de l'OFAS sur les caisses de compensation: En temps normal, la surveillance de l'office sur les caisses de compensation se fait par le biais de sociétés de révision et porte essentiellement sur leur fonctionnement en tant qu'institutions. Par contre, durant la crise, la surveillance s'est aussi étendue au contenu des prestations fournies ­ c'est-à-dire que l'OFAS a lui-même procédé à la vérification d'éventuels cas d'abus. Aux yeux de la commission, il est important que le Conseil fédéral examine quels enseignements peuvent être tirés de la crise du Covid-19 en vue d'une adaptation ou d'une optimisation du système de surveillance de l'OFAS sur les caisses.

­

Harmonisation des données entre les caisses de compensation: Les clarifications de la CdG-N montrent que l'étendue et la qualité des données disponibles concernant l'APG Covid-19 varient d'une caisse de compensation à l'autre. Actuellement, une grande partie des données est consignée de manière décentralisée au sein des caisses de compensation. Face à la commission, le CDF a déploré qu'il n'existe pas de base de donnée centralisée dans ce domaine et a indiqué qu'il avait été contraint d'établir son propre registre afin Art. 10, al. 1, de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

8 / 18

FF 2022 515

de pouvoir exercer une surveillance à l'échelle nationale. Pour la commission, la question se pose de savoir par le biais de quelles mesures une meilleure harmonisation pourrait être atteinte en ce qui concerne les données collectées par les caisses de compensation, et si celle-ci se heurte essentiellement à des questions techniques ou à des aspects de protection des données.

­

Numérisation dans le domaine de l'AVS/AI/APG: Selon la commission, ce point constitue un défi important pour les caisses de compensation. L'OFAS a souligné que le niveau de numérisation était élevé dans le domaine des assurances sociales et que la mise en oeuvre de l'APG Covid-19 avait pu se faire en grande partie à travers des canaux numériques, ce que la CdG-N salue.

Face à la commission, le directeur a souligné que de nombreux projets étaient en cours en la matière; il a notamment cité à ce titre les travaux concernant la numérisation de l'APG. Il a toutefois aussi reconnu qu'une nécessité supplémentaire d'agir existait; ainsi, les caisses de compensation ne sont pas toutes équipées des mêmes systèmes informatiques. Le CDF, de son côté, se montre nettement plus critique sur l'avancée de la numérisation dans le domaine des assurances sociales.

­

Approche décentralisée du système de caisses de compensation: En lien avec la problématique de l'harmonisation des données et de la numérisation se pose la question plus générale de l'adéquation de l'approche décentralisée en vigueur dans le domaine de l'AVS/AI/APG en Suisse. De l'avis de l'OFAS, cette approche, qui correspond à la volonté du législateur, fonctionne globalement bien et a permis, durant la crise, une mise en oeuvre rapide des prestations dans toutes les régions, même si le directeur a reconnu que cela pouvait provoquer des complications au niveau de la communication. Le CDF considère de son côté que la décentralisation ne constitue pas une solution adéquate et que cette approche a compliqué la tâche de l'administration durant la pandémie.

De l'avis de la commission, il est important que le Conseil fédéral approfondisse les points évoqués ci-dessus et qu'il examine, sur la base des expériences faites lors de la mise en oeuvre de l'APG Covid-19, si des modifications ou améliorations doivent être apportées à la structure organisationnelle du système d'AVS/AI/APG, en particulier en direction d'une plus grande centralisation et d'une meilleure harmonisation des systèmes de données. Une grande partie des éléments mentionnés ci-dessus sont abordés de manière directe ou indirecte dans le cadre du projet de modernisation de la surveillance dans le 1er pilier, actuellement traité par le Parlement25. La CdG-N estime néanmoins nécessaire que le Conseil fédéral examine, sur la base des enseignements tirés de la mise en oeuvre de l'APG Covid-19, si des mesures supplémentaires sont nécessaires concernant ces aspects.

25

LAVS. Modification (modernisation de la surveillance) (19.080). Cf. également Message du 20 novembre 2019 concernant la révision de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (Modernisation de la surveillance dans le 1er pilier et optimisation dans le 2e pilier de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité; FF 2020 1).

9 / 18

FF 2022 515

Recommandation 2 Une fois la mise en oeuvre de l'APG Covid-19 achevée, le Conseil fédéral est invité à examiner, sur la base des expériences faites avec cet outil, si des modifications ou améliorations doivent être apportées à la structure organisationnelle du système d'AVS/AI/APG, en complément des mesures déjà prises dans le cadre de la modernisation de la surveillance dans le 1er pilier.

Dans ce cadre, il est en particulier invité à approfondir les aspects suivants: ­ Surveillance de l'OFAS sur les caisses de compensation; ­ Harmonisation des systèmes de données entre les caisses de compensation; ­ Renforcement de la numérisation dans le domaine de l'AVS/AI/APG.

Au-delà de la question spécifique de l'harmonisation des systèmes de données, le Conseil fédéral est invité à examiner de manière générale si l'approche décentralisée appliquée au sein des caisses de compensation est adéquate ou si d'autres mesures devraient être prises en faveur d'une plus grande harmonisation.

La CdG-N prie le Conseil fédéral de lui faire part des résultats de son examen.

3.4

Surveillance et lutte contre les abus

Pour terminer, la CdG-N s'est informée plus en détail sur la manière dont la surveillance sur la mise en oeuvre de l'APG Covid-19 et la lutte contre les abus avaient été assurées par l'OFAS et le CDF.

Comme préalablement indiqué (cf. chap. 3.1), la lutte contre les abus a été placée au second plan lors de la conception de l'APG Covid-19, le Conseil fédéral ayant renoncé à une vérification individuelle des demandes, en faveur d'une mise en place rapide et élargie du système. Faute de base de données centralisée ou de règles juridiques sur l'accès aux données, il n'existait donc aucune possibilité technique de contrôler les indications livrées par les personnes assurées. En conséquence, la distribution de l'APG a largement reposé sur le principe de confiance et l'obligation d'informer26. La surveillance s'est essentiellement focalisée sur la prévention des paiements à double entre l'APG Covid-19 et d'autres prestations de soutien (p. ex. dans le domaine de la culture)27, sur les cas de demandes déposées auprès de plusieurs caisses ou sur la perception de montants supérieurs au maximum prévu par la législation.

26

27

Cf. art. 31 LPGA. L'OFAS a indiqué que les caisses de compensation avaient rendu les bénéficiaires attentifs à leur obligation d'informer sur chaque modification pertinente pour la perception des prestations, et sur le fait que le droit aux prestations s'arrête lorsqu'il n'y a plus de perte de gain. Conformément à l'art. 25 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées.

Le droit à l'APG Covid-19 est subsidiaire à toutes les autres prestations d'assurances sociales (notamment indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail) et aux assurances telles que les assurances privées d'indemnités journalières en cas de maladie.

10 / 18

FF 2022 515

La répartition des tâches entre l'OFAS et le CDF en matière de surveillance a été réglée dans l'ordonnance par le biais de l'article 10a, ajouté le 16 avril 202028. Selon cet article, la responsabilité primaire de surveillance revient à l'OFAS, tandis que le CDF collabore avec l'office pour identifier les risques et éviter des versements indus de prestations. Le CDF peut en outre procéder à des contrôles spécifiques auprès des caisses de compensation. L'art. 10a a également conféré au CDF un accès direct aux données issues des caisses de compensation. Sur cette base, plus d'un million de données ont été transmises au CDF, qui les a analysées à partir de mai 2020.

Le CDF et l'OFAS ont présenté à la commission la manière dont ces données avaient été collectées et analysées, puis comment les cas problématiques avaient été traités.

Les deux unités tirent un bilan positif de leur collaboration en la matière. La CdG-N salue la valeur ajoutée des contrôles menés par le CDF, qui ont permis d'établir une base de données centralisée permettant une comparaison et une plausibilisation à l'échelon national29, alors que les données ne sont pas harmonisées entre les caisses de compensation (cf. chap. 3.3), et de permettre des analyses croisées avec d'autres domaines (tels que l'assurance-chômage).

La commission a pris connaissance du résultat des analyses menées par l'OFAS et le CDF. Pour l'office, les résultats de ces enquêtes «montrent clairement [...] que le risque d'abus est très faible», un avis partagé par le CDF. Selon les chiffres présentés par l'office en mai 2021, sur le million de données collectées, environ 540 cas suspects ont été identifiés, qui ont mené, après des clarifications approfondies, à des corrections ou demandes de remboursement dans quelques dizaines de cas30. Selon le CDF, le risque d'abus est restreint en particulier en raison des montants limités en jeu. L'OFAS et le CDF ont également souligné le rôle important des mécanismes de contrôle internes appliqués par les caisses de compensation lors du traitement des demandes.

Le formulaire de demande pour l'APG Covid-19 a joué un rôle important pour la prévention des abus. La CdG-N a examiné celui-ci et constaté que la première version du document présentait certaines faiblesses; ainsi, il ne contenait pas de questions relatives à la
perception d'autres prestations sociales. L'OFAS a expliqué que ce formulaire avait dû être développé dans un délai très restreint et que certains éléments n'avaient pas pu être considérés dans un premier temps. La commission constate néanmoins que ces manquements ont été corrigés par la suite.

Face à la commission, l'OFAS a par ailleurs souligné les défis que représentait la surveillance de l'activité des indépendants. Ainsi, selon l'office, les caisses de compensation ne disposaient pas des capacités nécessaires pour vérifier sur place si une entreprise continuait à réaliser des gains malgré les restrictions liées à la pandémie31.

Par ailleurs, l'OFAS a précisé que le contrôle de la situation financière mensuelle des

28 29 30

31

Avec effet rétroactif au 17 mars 2020.

Le CDF a souligné que la mise en place de cette base de données avait nécessité un effort particulièrement important de la part de l'ensemble des acteurs concernés.

Selon l'OFAS, il s'agissait essentiellement de cas d'inscriptions multiples. Ceux-ci ne constituaient toutefois pas des abus, mais des demandes légitimes qui, cumulées, menaient à une indemnisation excessive.

L'office a fait valoir en outre qu'une telle mesure aurait été disproportionnée au vu du faible montant en jeu par personne.

11 / 18

FF 2022 515

indépendants était complexe: en effet, sachant que le revenu déterminant des indépendants est calculé sur la base de la taxation fiscale annuelle, il n'existe aucune possibilité de calculer à brève échéance une perte de gain mensuelle pour ces derniers. Les caisses de compensation ont ainsi dû faire appel à des experts comptables afin de procéder à des contrôles aléatoires. De manière générale, l'OFAS a souligné que la situation des indépendants constituait une thématique peu documentée dans le domaine des assurances sociales jusqu'ici32.

Par ailleurs, la commission prend note du fait que les effets d'aubaine liés à l'APG Covid-19 n'ont pas fait l'objet de la surveillance exercée par l'OFAS et le CDF, dans la mesure où ceux-ci n'étaient pas explicitement exclus de l'ordonnance jusqu'à miseptembre 2020 en ce qui concerne les cas de rigueur33. Le CDF a néanmoins indiqué qu'il examinerait cette problématique dans le cadre d'un audit dont les résultats sont attendus pour 2022. Enfin, le CDF a indiqué qu'il avait procédé à certains contrôles ponctuels relatifs à d'éventuelles perceptions à double entre l'APG Covid-19 et l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail (RHT) et qu'il était arrivé à la conclusion que les risques d'abus à ce niveau étaient faibles.

La CdG-N salue les efforts de l'OFAS et du CDF afin d'exercer une surveillance aussi efficace que possible sur l'application de l'APG Covid-19, d'identifier et de prévenir les éventuels abus. Elle se félicite que la collaboration entre les deux unités se soit bien déroulée et que la répartition des responsabilités ait été définie de manière claire.

La commission juge positivement le faible nombre de cas problématiques qui ont été identifiés jusqu'à aujourd'hui. Elle arrive à la conclusion que les unités administratives ont assumé leur surveillance avec sérieux, sur la base des données disponibles.

Elle relève toutefois que la portée de cette surveillance est restée limitée. En raison de la conception du système, que le Conseil fédéral a souhaité le plus simple possible, il existait peu de possibilités de contrôler les indications fournies par les requérants, et donc de vérifier si certaines personnes ont bénéficié de prestations alors que leur activité n'était pas ­ ou peu ­ affectée par le Covid-19. Comme préalablement indiqué,
elle considère que cette décision, même si elle n'est pas entièrement satisfaisante, a été prise en connaissance de cause, dans le cadre du contexte particulier de la crise du Covid-19.

La CdG-N note également que les indépendants constituaient une catégorie de travailleurs relativement peu connue dans le paysage des assurances sociales. En ce sens, il est compréhensible à ses yeux que les structures de surveillance habituelles n'étaient pas adaptées à traiter ce genre de cas. La commission se demande s'il serait souhaitable que des analyses plus approfondies concernant cette catégorie de travailleurs soient effectuées sur la base des expériences faites durant la pandémie, afin d'identifier quels enseignements généraux (présentant une plus-value également en temps

32 33

Le directeur de l'OFAS a par exemple souligné que la Suisse ne disposait pas d'une liste indiquant dans quel domaine et dans quel type d'activité travaillent les indépendants.

Cf. art. 3, al. 3bis, de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19. Selon les explications du CDF, il était uniquement question dans l'ordonnance d'une perte de gain non chiffrée et il suffisait par conséquent d'une perte de gain minime pour pouvoir prétendre à l'allocation.

12 / 18

FF 2022 515

normal) peuvent être tirés du point de vue des assurances sociales34. Elle invite le Conseil fédéral à examiner cette question et à lui faire part du résultat de ses réflexions.

Recommandation 3 Le Conseil fédéral est prié d'examiner s'il serait opportun de procéder à des analyses plus approfondies concernant la couverture sociale des indépendants, sur la base des expériences faites durant la pandémie, afin d'identifier quels enseignements généraux (présentant une plus-value également en temps normal) peuvent être tirés du point de vue des assurances sociales. Il est prié de faire part à la CdGN du résultat de ses réflexions.

La commission s'est aussi ponctuellement informée de la manière dont le système de surveillance avait évolué depuis l'entrée en vigueur de la loi Covid-19 et des défis liés à la mise en oeuvre des nouvelles prescriptions. Elle a pris note qu'il était prévu que des contrôles aléatoires concernant les prestations versées soient introduits par l'OFAS à partir de l'été 2021. La CdG-N se réserve la possibilité de tirer ultérieurement un bilan de cette période.

3.5

Autres aspects examinés

Dans le cadre de ses clarifications, la CdG-N a également abordé avec l'OFAS et le CDF diverses autres aspects, concernant notamment la mise en oeuvre des allocations pour les cas de quarantaine et d'isolation. Elle s'est également informée des évaluations en cours ou prévues au sein de l'administration portant sur l'APG Covid-19. Elle a pris note que le CDF prévoyait de réaliser un audit visant à analyser l'effet et l'utilité de l'APG Covid-19 pour les indépendants, dont les résultats sont attendus pour l'été 202235. De son côté, l'OFAS a indiqué qu'il comptait mener dès 2021 des analyses internes sur le profil des bénéficiaires de l'APG Covid-19 et, dès 2022, sur l'évolution du revenu des bénéficiaires. L'office a également indiqué qu'il prévoyait de mandater des recherches externes sur divers aspects encore à définir.

Sur la base des informations reçues, la CdG-N n'a pas identifié d'éléments qui justifieraient un examen plus poussé du point de vue de la haute surveillance parlementaire. Elle continuera toutefois à s'informer de l'évolution du dossier et se réserve la possibilité d'approfondir certains de ces aspects ultérieurement.

La CdG-N s'est également informée sur l'utilisation du crédit alloué à l'APG Covid-19. Elle a pris note du fait qu'en date du 2 mai 2021, 390 961 cas avaient été 34

35

Un postulat allant dans ce sens est actuellement en suspens au Conseil national (Postulat Roduit «Pour optimiser la couverture sociale des indépendants» du 24 septembre 2020 [20.4141]).

Cet audit examinera notamment si tous les indépendants qui en avaient besoin ont eu accès à l'APG Covid-19, si certains indépendants ont bénéficié de contributions excessives (ou d'effets d'aubaine) et si l'APG Covid-19 s'intégrait de manière adéquate dans le système de prestations d'aide en faveur des indépendants.

13 / 18

FF 2022 515

traités dans le cadre de ce programme, pour un total de 2 959 866 767 francs de prestations versées36. La commission n'a pas approfondi davantage les aspects financiers de l'APG Covid-19, ceux-ci étant du ressort de la haute surveillance exercée par les CdF et la DélFin. La DélFin prend notamment régulièrement connaissance de rapports d'analyse remis par le CDF à ce sujet.

4

Conclusions

La CdG-N tire un bilan globalement positif de l'introduction et de l'exploitation du système d'APG Covid-19 pour la période allant de mars à septembre 2020. Elle salue le grand engagement des autorités fédérales compétentes et des caisses de compensation AVS afin de permettre la mise en place et l'exploitation de cet outil. De son point de vue, la principale faiblesse de l'APG Covid-19 durant cette période a résidé dans les possibilités limitées de surveillance et de lutte contre les abus. Cela s'explique par la volonté du Conseil fédéral d'introduire aussi vite que possible un système de soutien pouvant être appliqué de manière large, simple, rapide et non bureaucratique.

Pour la commission, cette décision a été prise en connaissance de cause et est liée au contexte particulier de la pandémie de Covid-19.

La commission considère que l'approche choisie par le Conseil fédéral lors de la conception du système d'APG Covid-19 ­ notamment le fait de se baser sur un modèle existant ­ était appropriée. Elle juge compréhensible et adéquat que l'on ait renoncé à une vérification individuelle des demandes de soutien. La CdG-N tire également un bilan positif en ce qui concerne la collaboration entre les autorités compétentes pour le lancement de l'APG Covid-19. Les échanges entre l'OFAS, le SECO et l'AFF à ce sujet semblent avoir été étroits et constructifs. La coopération entre l'OFAS et le CDF, quant à elle, s'est tout d'abord heurtée à quelques difficultés; néanmoins, les modalités du partenariat entre les deux autorités ont pu être rapidement clarifiées et celui-ci s'est ensuite déroulé de manière satisfaisante. En revanche, l'OFAS a laissé entendre que l'échange d'informations avec l'OFSP avait été moins intensif et plus complexe, ce que la commission regrette. Elle invite le Conseil fédéral à tirer un bilan de cette collaboration et à s'assurer que les enseignements adéquats soient tirés de ce cas en vue de crises futures (recommandation 1).

La CdG-N s'est également penchée sur la prolongation automatique du système d'APG Covid-19, début juillet 2020, celle-ci ayant fait l'objet de diverses critiques.

Elle estime que les explications présentées par l'OFAS à ce sujet sont compréhensibles. Elle arrive à la conclusion qu'une pesée d'intérêts a été réalisée à l'époque entre un renforcement de la
surveillance ­ qui aurait impliqué des coûts plus élevés et un délai de traitement plus long des dossiers ­ et les risques liés à l'utilisation abusive de l'APG ­ qui se sont révélés faibles au vu du petit nombre de cas identifiés, selon les clarifications menées par la suite. Elle constate par ailleurs que l'OFAS a explicitement demandé aux personnes qui ne subissaient plus de pertes de gain de le communiquer. Elle regrette par contre que l'office ne soit pas en mesure de déterminer 36

L'enveloppe globale prévue initialement était de 5,3 milliards de francs. La plus grande partie des prestations versées jusqu'ici est liée aux indemnisations pour fermetures (env. 1,1 milliard de francs) et aux cas de rigueur (env. 1 milliard de francs).

14 / 18

FF 2022 515

quelle part des indépendants ont renoncé à percevoir l'APG Covid-19 à ce momentlà, faute de données. On ne peut donc pas complètement exclure que certains indépendants aient continué à bénéficier de l'APG alors qu'ils ne subissaient plus de perte de gain. La commission estime important que cet aspect soit clarifié autant que possible dans le cadre d'évaluations futures.

En ce qui concerne la mise en oeuvre de l'APG Covid-19, la CdG-N n'a pas identifié de nécessité d'agir du point de vue de la haute surveillance. L'application harmonisée des bases légales et les fréquentes modifications apportées au système ont représenté un grand défi pour l'OFAS et les caisses de compensation, mais celui-ci a pu être relevé avec succès. Aux yeux de la commission, la crise du Covid-19 a néanmoins mis en évidence certaines problématiques de portée générale relatives à la structure organisationnelle du système d'AVS/AI/APG, notamment en ce qui concerne la surveillance exercée par l'OFAS sur les caisses de compensation, l'harmonisation des données entre les caisses de compensation et la numérisation. Pour la CdG-N, il est important que le Conseil fédéral approfondisse ces points et qu'il détermine si des améliorations doivent être apportées sur la base des expériences faites (recommandation 2).

Enfin, la CdG-N a examiné la manière dont l'OFAS et le CDF ont assuré la surveillance sur la mise en oeuvre de l'APG Covid-19. Le Conseil fédéral ayant privilégié une mise en place rapide et élargie de l'APG, la lutte contre les abus a volontairement été placée au second plan. Faute de données détaillées, le système a largement reposé sur le principe de confiance. Dans ce contexte, la surveillance de l'OFAS et du CDF s'est focalisée sur la prévention des paiements à double ou la perception de montants supérieurs au maximum autorisé; les résultats de ces contrôles montrent que le risque d'abus à ce niveau était très faible, ce dont la commission se réjouit. Les effets d'aubaine, par contre, n'ont pas fait l'objet de la surveillance, dans la mesure où ils n'étaient pas explicitement exclus par la législation; cet aspect fera toutefois l'objet d'un audit à venir du CDF. La CdG-N salue les efforts de l'OFAS et du CDF pour exercer ensemble une surveillance aussi efficace que possible sur l'APG Covid-19.

Elle arrive à la conclusion
que ces autorités ont assumé leur rôle avec sérieux, dans la limite des données disponibles.

La commission a également pris note des défis qu'a représenté la surveillance de l'activité et de la situation financière des indépendants. Elle relève que ces derniers constituent une catégorie de travailleurs peu documentée jusqu'ici dans le domaine des assurances sociales. Elle invite le Conseil fédéral à examiner s'il serait opportun de procéder à des analyses plus approfondies à ce sujet, sur la base des expériences faites durant la pandémie (recommandation 3).

15 / 18

FF 2022 515

La CdG-N invite le Conseil fédéral à tenir compte des constatations et recommandations formulées dans le présent rapport et le prie de bien vouloir lui remettre un avis à ce sujet d'ici au 1er juin 2022. Elle continuera à s'informer de l'évolution du dossier, et notamment des résultats des évaluations menées par l'OFAS et le CDF sur ce thème. Elle se réserve la possibilité d'approfondir certains aspects supplémentaires du dossier ultérieurement.

18 février 2022

Au nom de la Commission de gestion du Conseil national La présidente: Prisca Birrer-Heimo La secrétaire: Beatrice Meli Andres Le président de la sous-commission DFI/DETEC: Thomas de Courten Le secrétaire de la sous-commission DFI/DETEC: Nicolas Gschwind

16 / 18

FF 2022 515

Abréviations AFF

Administration fédérale des finances

APG Covid-19

Allocation perte de gain Covid-19

CdF

Commissions des finances des Chambres fédérales

CDF

Contrôle fédéral des finances

CdG

Commissions de gestion des Chambres fédérales

CdG-N Cst.

Commission de gestion du Conseil national Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101)

DélFin

Délégation des finances des Chambres fédérales

DFI

Département fédéral de l'intérieur

FF

Feuille fédérale

LPGA

Loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (RS 830.1)

OFAS

Office fédéral des assurances sociales

OFSP

Office fédéral de la santé publique

RS

Recueil systématique

SECO

Secrétariat d'Etat à l'économie

17 / 18

FF 2022 515

18 / 18