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22.028 Message concernant l'approbation d'une convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Éthiopie du 18 mars 2022

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral portant approbation d'une convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Éthiopie, en vous priant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 mars 2022

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ignazio Cassis Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé Une convention entre la Suisse et l'Éthiopie contre les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu a été signée à Addis Abeba le 29 juillet 2021.

La convention permet d'étendre, pour la première fois, le réseau suisse des conventions contre les doubles impositions en Afrique de l'Est. Avec près de 100 millions d'habitants, l'Éthiopie est le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique. La convention garantit la sécurité juridique et offre à l'économie suisse des conditions-cadres fiscales favorables, ce qui aura un effet bénéfique sur l'évolution des relations économiques bilatérales et sur la coopération fiscale entre les deux pays.

Dans l'ensemble, la convention suit le Modèle de convention fiscale de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la politique conventionnelle actuelle de la Suisse dans ce domaine. Ainsi, le projet tient compte des développements issus du projet de l'OCDE de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices.

Une majorité des cantons et des associations intéressées a accueilli favorablement la conclusion de cette convention.

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Message 1

Présentation de la convention

1.1

Contexte, déroulement et résultats des négociations

Pays enclavé en Afrique de l'Est, l'Éthiopie compte près de 100 millions d'habitants.

C'est le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique. Durant les dix dernières années, le taux de croissance de l'économie éthiopienne a oscillé entre 8 % et 11 %. Cette croissance est en grande partie due à l'engagement de l'État dans des projets d'infrastructure comme la construction de routes, de voies ferrées et d'aéroports.

Le 26 juin 1998, la Suisse et l'Éthiopie ont conclu un accord concernant la promotion et la protection réciproque des investissements1. La Suisse importe de ce pays des produits issus des ressources minières (notamment de l'or) et de l'agriculture (café, fleurs). La Suisse exporte vers ce pays des produits pharmaceutiques et des machines.

L'Éthiopie est l'un des pays bénéficiaires du programme régional pour la Corne de l'Afrique, élaboré selon l'approche «Whole of Government» (WOGA) conjointement par la Direction du développement et de la coopération (DDC), par le Secrétariat d'État du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et par le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) du Département fédéral de justice et police (DFJP).

Depuis quelques années, l'Éthiopie cherche à renforcer son attrait par la conclusion de conventions contre les doubles impositions avec des pays industrialisés. Cette opportunité d'offrir à l'économie suisse en Éthiopie des conditions-cadres fiscales plus favorables a été saisie. Après deux rondes de négociations, les paraphes ont été apposés le 29 novembre 2017 sur un projet de convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après: «CDI-ET»). Ce dernier a fait l'objet d'une procédure d'orientation au printemps 2018. Il a alors reçu un accueil favorable des cantons et des associations intéressées consultés.

Le projet de CDI-ET n'a toutefois pas pu être signé, car l'Éthiopie a fait savoir qu'à la suite d'une modification de sa politique conventionnelle, elle n'était plus en mesure de signer une convention contre les doubles impositions n'incluant pas une disposition sur les rémunérations pour prestations de services techniques. Cette nouvelle position éthiopienne remettait en question l'équilibre conventionnel convenu en 2017. En effet, l'Éthiopie avait dans un premier
temps proposé une disposition sur les services techniques mais, conformément à sa politique conventionnelle de l'époque, elle y avait finalement renoncé dans le cadre du compromis global paraphé en 2017.

Dans ce contexte, les négociations ont été reprises et une troisième ronde de négociations a eu lieu en février 2020. Du point de vue suisse, l'inclusion éventuelle d'une disposition sur l'imposition à la source des rémunérations pour prestations de services techniques dans la CDI-ET aurait représenté une concession majeure qui nécessitait des aménagements substantiels de la CDI-ET afin de rétablir l'équilibre conventionnel de 2017. Côté éthiopien, seules des modifications de portée mineure étaient 1

RS 0.975.234.1

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toutefois envisageables, qui n'étaient pas de nature à contrebalancer l'inclusion d'une disposition sur l'imposition à la source des services techniques dans la CDI-ET. Dans ces circonstances, il a finalement été convenu d'exclure expressément les rémunérations pour prestations de services techniques du champ d'application matériel de la CDI-ET.

L'exclusion des prestations de services techniques, qui ne constitue pas une modification de principe de la politique conventionnelle suisse, a été bien accueillie par une très grande majorité des cantons et a été jugée acceptable dans l'ensemble par une majorité des associations intéressées lors de la nouvelle procédure d'orientation menée au printemps 2020. La CDI-ET a été signée à Addis Abeba le 29 juillet 2021.

1.2

Appréciation

La CDI-ET permet d'étendre, pour la première fois, le réseau suisse des conventions contre les doubles impositions en Afrique de l'Est. Elle garantit la sécurité juridique et un cadre contractuel, ce qui aura un effet favorable sur l'évolution des relations économiques bilatérales. Les solutions convenues placent les entreprises suisses dans des conditions assez compétitives par rapport aux entreprises sises dans des États qui ont conclu ces dernières années des conventions contre les doubles impositions avec l'Éthiopie.

L'exclusion expresse des rémunérations provenant de la fourniture de tous services de direction, professionnels, techniques ou de conseils du champ d'application matériel de la CDI-ET représente certes, du point de vue suisse, un résultat moins favorable que le projet de convention paraphé en 2017. Elle implique que chacun des deux États contractants pourra appliquer son droit interne dans ce domaine. Comme le droit suisse ne prévoit pas d'impôt à la source sur les services, cette exclusion est favorable à l'Éthiopie qui pourra appliquer son droit interne dans ce domaine. Toutefois, une telle solution est jugée acceptable pour la Suisse dans les circonstances actuelles. Elle permet en effet de conclure une convention supplémentaire contre les doubles impositions présentant un résultat d'ensemble intéressant pour l'économie suisse, notamment s'agissant de la notion d'établissement stable et de l'imposition des dividendes, des intérêts et des redevances de licence. Cette solution ne devrait pas pénaliser les entreprises suisses dans la mesure où celles-ci tiennent compte, en règle générale, des conditions fiscales locales pour fixer le prix de leurs services. Elle permet également d'éviter que la Suisse ne soit l'un des premiers États à convenir d'une clause sur l'imposition à la source des services avec l'Éthiopie après le récent changement de politique conventionnelle de ce pays sans être certaine que d'autres États accepteront une telle clause avec ce pays. Enfin, en vue d'alléger la double imposition résultant de cette solution, la CDI-ET prévoit expressément que le montant de l'impôt éthiopien prélevé à la source pourra être déduit, sur demande, de l'assiette de l'impôt suisse.

Cela correspond à la pratique actuelle.

Par ailleurs, la CDI-ET met en oeuvre les normes minimales
selon les rapports sur les actions 6 et 14 du projet de l'OCDE de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (ci-après: «projet BEPS») concernant le refus de l'octroi

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d'avantages conventionnels dans des situations abusives et l'amélioration des mécanismes de règlement des différends (cf. art. 27 et 24 CDI-ET respectivement).

Enfin, la CDI-ET respecte la norme internationale en matière d'échange de renseignements sur demande.

2

Commentaires des dispositions de la convention

Dans l'ensemble, la CDI-ET suit, tant sur le plan formel que matériel, le Modèle de convention fiscale de l'Organisation de coopération et de développement économiques (ci-après: «Modèle de convention de l'OCDE»2) et la pratique conventionnelle suisse dans le domaine de la double imposition. Les commentaires suivants se limitent à expliquer les principales différences par rapport au Modèle de convention de l'OCDE et à la politique conventionnelle suisse en la matière.

Titre et préambule Conformément à la norme minimale décrite dans l'action 6 du projet BEPS, il est précisé, dans le titre et dans le préambule, que la CDI-ET vise également à prévenir la fraude et l'évasion fiscales. Cette précision figure dans le Modèle de convention de l'OCDE.

Cette disposition établit clairement que la Suisse et l'Éthiopie n'avaient pas l'intention, en concluant la CDI-ET, de créer des possibilités de non-imposition ou d'imposition réduite par la fraude ou l'évasion fiscale. En d'autres termes, la CDI-ET vise aussi à éviter une double non-imposition causée par la fraude ou l'évasion fiscale. Il est ainsi tenu compte du fait qu'il existe des situations de double non-imposition voulues, par exemple des distributions de dividendes à des sociétés du même groupe. En pareil cas, la double non-imposition permet d'éviter des charges économiques multiples indésirables.

Il est nécessaire d'inscrire cette disposition dans la CDI-ET pour respecter la norme minimale fixée par l'action 6 du projet BEPS.

Art. 2

Impôts visés

Comme l'Éthiopie ne prélève pas d'impôt sur la fortune, la CDI-ET ne couvre que les impôts sur le revenu. En d'autres termes, la Suisse peut prélever ses impôts sur la fortune et le capital selon son droit interne.

Art. 4

Résident

Cette disposition correspond à l'art. 4 du Modèle de convention de l'OCDE. Parmi les critères cités à titre exemplatif permettant de définir la notion de «résident» au par. 1, figure également le lieu d'enregistrement d'une société. En outre, il est précisé

2

www.oecd.org > Fiscalité > Conventions fiscales > Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune.

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au par. 2 du protocole que les institutions de prévoyance et les organisations d'utilité publique exonérées d'impôt sont également considérées comme des résidents.

Art. 5

Établissement stable

La définition de l'établissement stable contenue à l'art. 5 de la CDI-ET est fondée sur la disposition correspondante du Modèle de convention de l'OCDE dans sa teneur de 2014.

Le par. 2 comprend, sur demande éthiopienne, dans le catalogue des exemples illustratifs d'un établissement stable, un «magasin de vente» (let. e) afin de faciliter l'application de la CDI-ET aux autorités fiscales locales. Dans ce cas, un établissement stable est toujours réalisé. Cette requête a donc été jugée acceptable du point de vue suisse. De même, le souhait éthiopien d'insérer dans ce catalogue un «entrepôt commercial» (let. g), par quoi il faut entendre une installation fixe d'affaires dans laquelle sont entreposés des biens appartenant à des tiers, a paru acceptable dans la mesure où la Suisse considère également qu'un tel entrepôt commercial constitue un établissement stable. Enfin, à la demande de l'Éthiopie, le par. 2 cite une «ferme» (let. h) dans le catalogue des exemples illustratifs d'un établissement stable, ce qui est également mentionné dans le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE.

Le par. 3 prévoit que l'exercice dans un État contractant pendant plus de six mois d'activités de construction ou de montage peut être considéré comme un établissement stable. La pratique suisse suit en principe le Modèle de convention de l'OCDE qui prévoit une durée de 12 mois. Le compromis retenu a permis d'éliminer la proposition éthiopienne de garantir à l'État de la source un droit d'imposition sur les activités d'assurances. Ce résultat correspond aux solutions convenues avec d'autres pays en développement.

Art. 7

Bénéfices des entreprises

Comme l'Éthiopie n'était pas encore prête à adhérer à la nouvelle version de l'art. 7 du Modèle de convention de l'OCDE introduite en juillet 2010, l'art. 7 suit les solutions préconisées par l'OCDE avant cette date.

Le par. 2 précise que le terme «bénéfices» employé dans cet article ne comprend pas les bénéfices provenant de la fourniture de tous services de direction, professionnels, techniques ou de conseils. Par conséquent, les rémunérations reçues par une entreprise pour la fourniture des services mentionnés ne tombent pas sous l'art. 7, mais sous l'art. 21 (Autres revenus).

Dans le cadre du compromis global, il a été possible d'éviter de reprendre à l'art. 7 les propositions éthiopiennes originelles qui prévoyaient la force d'attraction de l'établissement stable et une restriction de la possibilité de déduire les sommes autres que les frais encourus payés par l'établissement stable au siège principal. S'agissant de la déduction des dépenses exposées aux fins poursuivies par un établissement stable, le par. 4 précise que les limitations éventuellement prévues par le droit interne doivent être conformes aux principes de non­discrimination contenus à l'art. 23, par. 2, de la CDI-ET.

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Art. 8

Transport international

A la demande de l'Éthiopie, le titre de cet article a été adapté. Par ailleurs, comme dans d'autres conventions suisses contre les doubles impositions (p. ex. avec le Canada, le Chili et l'Ukraine), l'art. 8, par. 3, reprend les principes du commentaire du Modèle de convention de l'OCDE relatifs à l'exploitation de navires et aéronefs, selon lesquels l'exploitation comprend la location coque nue de navires et aéronefs ou de conteneurs et de leur équipement pour autant que ces activités soient accessoires à l'exploitation de navires ou d'aéronefs en trafic international. Il en va de même des bénéfices provenant de la vente de billets de transport par mer ou par air pour le compte d'autres entreprises et des intérêts sur des fonds directement liés à l'exploitation, en trafic international, de navires ou d'aéronefs.

Art. 10

Dividendes

Le droit éthiopien oblige une société qui a réalisé un bénéfice à le distribuer l'année suivante. A défaut de distribution, les bénéfices thésaurisés sont également soumis à une imposition à la source (fiction de distribution). En droit interne éthiopien, les dividendes payés à un non-résident sont soumis à un impôt à la source de 10 %. La CDIET prévoit un taux d'impôt résiduel général sur les dividendes de 15 % et un taux d'impôt résiduel de 5 % si le bénéficiaire effectif est une société qui détient directement au moins 25 % du capital de la société qui paie les dividendes pendant une période d'au moins 365 jours. Un taux résiduel de 5 % est également prévu pour les dividendes versés à une institution de prévoyance ou à la banque centrale de l'autre État contractant.

Art. 11

Intérêts

S'agissant des intérêts payés à un non-résident, le droit interne éthiopien prévoit un impôt à la source de 10 %. La CDI-ET prévoit un taux résiduel de 5 %. Malgré l'insistance de la Suisse, il n'a pas été possible de convenir d'exceptions à cette règle de portée générale.

Art. 12

Redevances

Une imposition exclusive des redevances dans l'État de résidence du bénéficiaire effectif n'était pas acceptable pour l'Éthiopie. Dans le cadre du compromis global, le taux finalement retenu est de 5 %. Toutefois, le leasing est exclu de ce champ et tombe ainsi sous l'art. 7 (cf. par. 3 du protocole) et les paiements effectués sans obtenir en contrepartie le droit d'exploiter commercialement un logiciel informatique ne constituent pas des redevances au sens de l'art. 12 (cf. par. 5 du protocole).

Art. 13

Gains en capital

Cette disposition suit les principes de la pratique conventionnelle suisse. Son par. 4 prévoit, à l'instar d'autres conventions suisses contre les doubles impositions, que les gains provenant de l'aliénation d'actions d'une société dont la fortune est, directement ou indirectement, composée pour plus de 50 % de biens immobiliers situés dans un État contractant, sont imposables dans cet État. Du côté suisse, il a été précisé dans 7 / 14

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l'article sur les méthodes pour éliminer les doubles impositions (cf. art. 22, par. 2, let. a, CDI-ET) que la Suisse ne doit exempter de tels gains qu'après justification de l'imposition en Éthiopie.

Art.14

Professions indépendantes

Le par. 2 précise que le terme «revenus» employé dans cet article ne comprend pas les revenus provenant de la fourniture de tous services de direction, professionnels, techniques ou de conseils. Par conséquent, les rémunérations reçues par une personne physique pour la fourniture de tels services ne tombent pas sous l'art. 14, mais sous l'art. 21 (Autres revenus).

Art. 15

Revenus d'emploi

Le par. 3 prévoit, à la demande de l'Éthiopie, que les rémunérations reçues par un résident d'un État contractant au titre d'un emploi salarié exercé à bord d'un navire ou d'un aéronef exploité en trafic international ne sont imposables que dans l'État où la direction effective de l'entreprise est située. Cette disposition paraît acceptable. En application de la méthode de l'exemption pour éliminer les doubles impositions, la Suisse n'imposerait pas le salaire d'un résident qui travaillerait pour une telle entreprise en Éthiopie. Inversement, si une telle entreprise sise en Suisse employait une personne résidente d'Éthiopie, la Suisse disposerait alors du droit exclusif d'imposer le salaire.

Art. 17

Artistes et sportifs

Cette disposition confirme la pratique suisse selon laquelle l'imposition au lieu où un artiste ou un sportif exerce son activité s'applique également au revenu attribué à une autre personne que l'artiste ou le sportif lui-même (par. 2). Il est cependant renoncé à cette imposition si cette activité est subventionnée, directement ou indirectement, entièrement ou principalement, par des fonds publics de l'État de résidence; dans ce cas, le revenu n'est imposable que dans l'État de résidence (par. 3).

Art. 18

Pensions

Les pensions, y compris les prestations en capital (cf. par. 6 du protocole), sont imposables dans l'État de la source. Cette solution tient compte du fait que les pensions ne sont pas imposables en Éthiopie. Elle permet à la Suisse de maintenir son impôt à la source sur les prestations privées et publiques de la prévoyance professionnelle, ainsi que sur celles du pilier 3a, payées à un résident d'Éthiopie.

S'agissant des bénéficiaires résidents de Suisse de pensions éthiopiennes, dont le nombre devrait demeurer plutôt limité, la Suisse exemptera les pensions si une justification de l'imposition en Éthiopie est fournie (cf. art. 22, par. 2, let. a, CDI-ET).

Le par. 7 du protocole contient une disposition qui figure dans le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE et qui a déjà été convenue matériellement par la Suisse avec d'autres États dans plusieurs conventions contre les doubles impositions.

Elle concerne la prise en compte fiscale des contributions à la prévoyance et vise à ce 8 / 14

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que les personnes qui s'expatrient ne soient pas pénalisées lorsqu'elles continuent à verser des cotisations à un régime de retraite dans leur pays d'origine alors qu'elles travaillent dans l'autre État contractant. Dans ce cas, il y a un risque que les cotisations à la sécurité sociale et à la prévoyance professionnelle ne soient pas prises en compte fiscalement.

La CDI-ET prévoit qu'en ce cas, les cotisations versées aux institutions de prévoyance du premier État contractant doivent être prises en compte fiscalement dans le second État aux mêmes conditions que les cotisations à la prévoyance de cet État. En Suisse, il s'agit des 1er et 2e piliers, et du pilier 3a. En Suisse, la déduction des cotisations aux assurances sociales suisses (y compris la prévoyance professionnelle) est aujourd'hui prise en compte de manière forfaitaire dans les barèmes de l'impôt à la source. D'une manière générale, la pratique suisse actuelle satisfait donc déjà à cette disposition.

Art. 21

Autres revenus

L'exclusion des rémunérations provenant de la fourniture de tous services de direction, professionnels, techniques ou de conseils du champ d'application des art. 7 et 14 CDI-ET a pour conséquence de faire entrer ces rémunérations dans la catégorie des autres revenus au sens de l'art. 21 CDI-ET.

S'agissant de l'imposition des revenus non traités dans la CDI-ET, l'Éthiopie ne peut admettre que le principe de l'imposition dans l'État de la source. Or, une disposition prévoyant, de manière générale, une imposition dans l'État de la source du revenu aurait été désavantageuse pour la Suisse, qui suit le Modèle de convention de l'OCDE sur ce point et qui applique la méthode de l'exemption pour les revenus qui, selon la convention, peuvent être imposés par l'État de la source. La solution de compromis convenue est fondée sur le Modèle de convention de l'OCDE mais précise que nonobstant les par. 1 et 2 de cette disposition, lorsqu'un résident d'un État contractant réalise dans l'autre État contractant un revenu non traité dans la CDI-ET (p. ex., un gain de loterie ou une rémunération d'un service de direction, professionnel, technique ou de conseil), ce revenu n'est pas visé par la CDI-ET (par. 3). En d'autres termes et comme le prévoit le par. 3, l'imposition d'un tel revenu est régie par le droit interne de chaque État contractant. Ainsi, les paiements effectués par une personne résidente d'Éthiopie pour rémunérer des services de direction, professionnels, techniques ou de conseils rendus par un résident de Suisse sont soumis au droit interne éthiopien. En revanche, un revenu provenant d'un État tiers peut uniquement être imposé dans l'État de résidence de la personne qui reçoit le revenu.

Le par. 4 précise qu'un paiement au titre des services rendus provient d'un État contractant uniquement s'il est fait par une personne résidente de cet État, ou par un établissement stable ou une base fixe situé dans cet État auquel les services payés ont été rendus et qui supporte la charge de ce paiement, indépendamment de la question de savoir si cet établissement stable ou cette base fixe appartient à une personne résidente d'un État contractant ou non.

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Art. 22

Élimination des doubles impositions

L'Éthiopie élimine la double imposition par la méthode de l'imputation. La Suisse pratique sa méthode habituelle de l'exemption sous réserve de progressivité. Elle conserve toutefois la possibilité d'imposer les gains en capital provenant de la vente de sociétés immobilières et les pensions si ces gains ou pensions n'ont pas été effectivement imposés en Éthiopie. Une disposition spécifique permet à la Suisse de ne pas exempter un revenu que l'Éthiopie exempterait, en cas de conflit de qualification, afin d'éviter des doubles non-impositions (par. 4). L'imputation d'impôts est prévue pour les dividendes, intérêts et redevances.

Le par. 2, let. c, de cette disposition prévoit que la Suisse prend en considération, sur demande, le montant de l'impôt à la source payé en Éthiopie au titre de la fourniture de tous services de direction, professionnels, techniques ou de conseils en tant que charge déductible afin de déterminer le revenu imposable en Suisse. La déduction de l'impôt éthiopien de l'assiette de l'impôt suisse permet d'alléger la double imposition.

En d'autres termes, c'est le montant net, à savoir après déduction de l'impôt à la source payé en Éthiopie, qui servira de base à l'imposition en Suisse. Cela correspond à la pratique actuelle. Cette clause a donc uniquement une portée déclarative.

Art. 24

Procédure amiable

Le par. 1 de cette disposition prévoit la possibilité, qui figure dans le Modèle de convention de l'OCDE, pour une personne contribuable de demander l'ouverture d'une procédure amiable soit dans son État de résidence, soit dans l'autre État contractant.

Conformément au standard minimal auquel a abouti l'action 14 du projet BEPS « Accroître l'efficacité des mécanismes de règlement des différends », les pays qui le peuvent devraient insérer dans leurs conventions fiscales la seconde phrase du par. 2 de l'art. 25, dont la teneur est la suivante: « L'accord [amiable] est appliqué quels que soient les délais prévus par le droit interne des États contractants ». Lorsqu'un pays ne peut pas insérer cette phrase dans ses conventions fiscales, par exemple parce qu'il a formulé une réserve (ce qui est le cas de la Suisse), il devrait être prêt à adopter d'autres dispositions conventionnelles qui limitent le délai pendant lequel un État contractant peut effectuer un ajustement en application de l'art. 7, par. 2, ou de l'art. 9, par. 1, du Modèle de convention de l'OCDE, afin d'éviter les ajustements tardifs qui ne peuvent faire l'objet d'un allègement en vertu de la procédure amiable. Le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE mentionne ces dispositions.

En Éthiopie, le délai de prescription est de 5 ans, aussi bien pour procéder à un ajustement que pour modifier une taxation entrée en force, par exemple à la suite de la conclusion d'un accord amiable. La proposition suisse, formulée en application de l'action 14 du projet BEPS, de limiter la durée pendant laquelle un ajustement primaire peut être effectué, n'a pas été acceptée par l'Éthiopie. En outre, en raison du délai de révision du droit éthiopien, cette solution n'aurait pas permis d'atteindre le but d'assurer la mise en oeuvre d'un éventuel accord amiable.

Il a finalement été renoncé à une limitation temporelle aux art. 7 et 9 dans le contexte de la solution convenue à l'art. 24, par. 2, 2e phrase. Selon cette disposition, l'accord amiable est appliqué quels que soient les délais prévus par le droit interne des États contractants, mais dans tous les cas au plus tard 10 ans à compter de la fin de l'année 10 / 14

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fiscale concernée. Une telle solution conventionnelle permet, d'une part, de garantir un délai assez long pour convenir d'une solution amiable qui puisse être mise en oeuvre tant par la Suisse que par l'Éthiopie et, d'autre part, de tenir compte du délai de prescription prévu par le droit fiscal suisse pour réviser une taxation entrée en force.

Par ailleurs, en dépit de l'insistance suisse, il n'a pas été possible de convenir d'une clause d'arbitrage pour les cas dans lesquels la procédure amiable ne permettrait pas de parvenir à une solution mutuellement satisfaisante. Une telle clause ne correspond pas à la politique conventionnelle éthiopienne actuelle. Toutefois, une clause évolutive de la nation la plus favorisée garantit à la Suisse qu'une telle clause prendra effet en relation avec l'Éthiopie à la date à laquelle une clause d'arbitrage conclue par l'Éthiopie avec tout autre État deviendra applicable (cf. par. 8 du protocole).

Art. 25

Échange de renseignements

La CDI-ET contient une disposition concernant l'échange de renseignements conforme au standard international. Les indications ci-après concernent uniquement certains points de l'art. 25 de la CDI-ET, ainsi que les dispositions y relatives du protocole (par. 9).

Le champ d'application de l'échange de renseignements est limité aux impôts visés par la CDI-ET.

Les dispositions de l'art. 25 sont précisées dans le protocole à la CDI-ET (par. 9).

Celui-ci règle ainsi en détail les exigences auxquelles une demande de renseignements doit répondre (let. b). Il faut notamment identifier la personne concernée (ce renseignement peut découler de tout élément qui permet une identification) et donner, pour autant qu'ils soient connus, le nom et l'adresse de la personne (p. ex. une banque) que l'État requérant présume être en possession des renseignements demandés. Le protocole à la CDI-ET précise également que ces conditions ne doivent pas être interprétées de manière formaliste (let. c).

D'après le standard international en la matière, l'échange de renseignements est limité à des demandes concrètes. Font également partie de ces demandes les requêtes qui visent un groupe de contribuables définis précisément, dont on peut déduire qu'ils n'ont pas satisfait à leurs obligations fiscales dans l'État requérant. La CDI-ET permet de donner suite à ces demandes. En donnant sur le groupe de contribuables des informations détaillées qui permettent à l'État requis de déterminer quelles sont concrètement les personnes concernées, l'État requérant satisfait à l'obligation d'identifier les contribuables concernés par la demande de renseignements. Cette interprétation est basée sur la clause d'interprétation (let. c en relation avec la let. b), qui oblige les États contractants à interpréter les exigences d'une demande de manière à permettre un échange de renseignements qui soit aussi étendu que possible, sans pour autant autoriser la pêche aux renseignements. Les conditions procédurales pour répondre en Suisse aux demandes groupées sont réglées dans la loi du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative fiscale3.

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RS 651.1

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L'art. 25 de la CDI-ET ne prévoit pas l'échange de renseignements spontané ou automatique.

Art. 27

Droit aux avantages

Le par. 1 de cette disposition prévoit une clause anti-abus faisant référence aux buts principaux d'un montage ou d'une transaction («principal purpose test», ci-après: «règle PPT»). En vertu de cette clause, un avantage fondé sur la CDI-ET n'est pas accordé si l'obtention de cet avantage était un des buts principaux d'un montage ou d'une transaction, à moins qu'il soit établi que l'octroi de cet avantage est conforme à l'objet et au but des dispositions correspondantes de la CDI-ET. La règle PPT met en oeuvre la norme minimale issue de l'action 6 du projet BEPS et a été insérée dans la version du Modèle de convention de l'OCDE mise à jour en novembre 2017.

Cette clause anti-abus est certes nouvelle, mais elle correspond dans les grandes lignes aux dispositions que la Suisse a conclues pour lutter contre les abus dans un grand nombre de conventions contre les doubles impositions jusqu'en 2017. Elle se différencie cependant de ces clauses par le fait qu'elle n'est pas limitée à certains types de revenus, tels que les dividendes, les intérêts ou les redevances de licence. Au contraire, elle s'applique à toutes les dispositions de la CDI-ET. Ainsi, les abus sont réservés pour tout avantage fondé sur la CDI-ET.

La teneur de cette disposition diffère en outre sur un autre point de celle des clauses anti-abus adoptées par la Suisse dans ses conventions contre les doubles impositions jusqu'en 2017. Elle ne se limite pas aux états de fait dans lesquels le but principal du montage ou de la transaction est de tirer des avantages conventionnels; elle englobe également les états de fait dans lesquels l'obtention de ces avantages n'est qu'un des buts principaux. Cependant, cette différence terminologique ne devrait pas aboutir à un résultat différent en pratique car la seconde partie de la clause prévoit qu'un avantage conventionnel est néanmoins accordé s'il est conforme à l'objet et au but des dispositions correspondantes de la CDI-ET. Tel devrait être le cas, en principe, si l'obtention de l'avantage conventionnel n'était pas le but principal du montage ou de la transaction.

Le par. 2 de l'art. 27 correspond à une disposition proposée comme règle complémentaire dans le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE relatif à la règle PPT.

En cas de situation abusive prévue par le par. 1, les avantages
conventionnels peuvent néanmoins être accordés s'il apparaît que ces derniers auraient été obtenus en l'absence du montage ou de la transaction. Le par. 2 permet ainsi à un État contractant d'appliquer, en cas de situation abusive, les conséquences fiscales de l'état de fait fictif qui auraient existé en l'absence du montage ou de la transaction. Pour la Suisse, cette clause a une portée déclarative car les autorités fiscales peuvent octroyer des avantages selon leur droit interne sans une telle clause.

Art. 28

Entrée en vigueur

Cette disposition tient compte du fait qu'en Éthiopie, la période fiscale commence le 8 juillet et se termine le 7 juillet, tant pour les personnes physiques que pour les personnes morales. Concernant l'Éthiopie, la CDI-ET sera applicable à partir du 8 juillet qui suit l'entrée en vigueur de l'accord. Il en ira de même des dispositions sur 12 / 14

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l'échange de renseignements, qui s'appliqueront aux renseignements concernant les années fiscales qui commencent le 8 juillet qui suit l'entrée en vigueur de la CDI-ET ou après cette date.

S'agissant de la Suisse, la CDI-ET sera applicable à partir du 1er janvier de l'année civile qui suit l'entrée en vigueur de l'accord. Il en ira de même des dispositions sur l'échange de renseignements, qui s'appliqueront aux renseignements concernant les années fiscales qui commencent le 1er janvier de l'année civile suivant l'entrée en vigueur de la CDI-ET ou après cette date.

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Conséquences financières

Dans toute convention contre les doubles impositions, les deux États contractants renoncent à certaines recettes fiscales. Le présent projet de CDI-ET réduit notamment le taux résiduel de l'impôt à la source sur les dividendes à 15 % (5 % pour les sociétés détenant au moins 25 % du capital de la société qui les paie, pour les institutions de prévoyance et les banques centrales) et à 5 % pour les intérêts. Globalement, ces mesures renforcent et garantissent les conditions-cadres fiscales et exercent par conséquent un effet positif pour l'économie suisse. L'inclusion d'une clause sur l'échange de renseignements n'entraîne aucune diminution directe des recettes fiscales. La CDIET peut être mise en oeuvre dans le cadre des ressources en personnel existantes.

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Aspects juridiques

La compétence de la Confédération de conclure la CDI-ET se fonde sur l'art. 54, al.

1, de la Constitution (Cst.)4 qui attribue à la Confédération la compétence en matière d'affaires étrangères. L'art. 184, al. 2, Cst. confère au Conseil fédéral la compétence de signer des traités internationaux et de les ratifier. En vertu de lart. 166, al. 2, Cst., il appartient à lAssemblée fédérale d'approuver les traités internationaux, à l'exception de ceux dont la conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité international (voir également les art. 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration, LOGA5 et 24, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement, LParl6). En l'absence d'une telle disposition dans le cas d'espèce, l'approbation de la CDI-ET relève de l'Assemblée fédérale.

L'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. dispose qu'un traité international est sujet au référendum notamment s'il contient des dispositions importantes fixant des règles de droit. Selon l'art. 22, al. 4, LParl, sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences.

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RS 101 RS 172.010 RS 171.010

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La CDI-ET contient des dispositions qui créent des obligations pour les autorités suisses, en particulier dans le domaine de l'assistance administrative, et qui confèrent des droits aux contribuables (personnes physiques et morales). Elle contient donc des dispositions importantes réputées fixer des règles de droit au sens des art. 22, al. 4, LParl et 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. L'arrêté fédéral portant approbation de la CDI-ET est par conséquent sujet au référendum au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

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Procédure de consultation

La CDI-ET est sujette au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. En vertu de l'art. 3, al. 1, let. c, de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation (LCo)7, elle était donc en principe soumise à une consultation. Toutefois, selon l'art. 3a, al.1, let. b, LCo, il est possible de renoncer à une procédure de consultation lorsqu'aucune information nouvelle n'est à attendre du fait que les positions des milieux intéressés sont connues.

La CDI-ET a été soumise à une procédure d'orientation en mars 2018 et en avril 2020.

Dans ce cadre, une note explicative (en 2018) et une note explicative complémentaire (en 2020) ont été adressées aux cantons et aux milieux intéressés à la conclusion des conventions contre les doubles impositions. En 2018, la CDI-ET a été bien accueillie et n'a pas rencontré d'opposition. En 2020, elle a été bien accueillie par une très grande majorité des cantons et a été jugée acceptable dans l'ensemble par une majorité des associations intéressées. Par conséquent, les positions des milieux intéressés sont connues et documentées. En vertu de l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, il a donc été renoncé à une consultation.

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RS 172.061

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