FF 2022 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

22.031 Message concernant la loi fédérale sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique et l'arrêté fédéral portant approbation d'un crédit d'engagement à cet effet du 18 mai 2022

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de les adopter, les projets suivants: ­

loi fédérale sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique;

­

arrêté fédéral portant approbation d'un crédit d'engagement pour l'octroi de prêts au secteur de l'électricité.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 mai 2022

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ignazio Cassis Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2022-1253

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Condensé Par le présent message, le Conseil fédéral soumet au Parlement le projet d'une loi fédérale urgente sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique et lui propose, dans ce contexte, d'approuver un crédit d'engagement de 10 milliards de francs.

Contexte Les importantes fluctuations de prix que connaissent les marchés de l'énergie depuis la fin de l'année 2021 font que les entreprises du secteur de l'électricité ont besoin de moyens financiers supplémentaires afin de couvrir leurs garanties financières liées au négoce de l'énergie. La situation s'est encore aggravée depuis le début de la guerre en Ukraine, les marchés de l'énergie faisant face à une volatilité des prix qui a atteint un niveau inédit. Par conséquent, les risques de liquidité encourus par les entreprises électriques actives dans le commerce de gros augmentent fortement.

Les conséquences pourraient être considérables si une entreprise du secteur de l'électricité d'importance systémique manquait de liquidités ou était surendettée et ne parvenait plus à déposer des garanties suffisantes sur les bourses de l'électricité.

Or une forte hausse à court terme des prix de l'électricité ou du gaz, due par exemple à la cessation abrupte des livraisons de gaz russe ou à une défaillance incontrôlée d'une grande entreprise, pourrait entraîner une réaction en chaîne et menacer la sécurité d'approvisionnement de la Suisse.

Le Conseil fédéral veut éviter un tel scénario. Pour cela, il faut créer les conditions générales permettant de soutenir, en cas d'urgence, les liquidités des grandes entreprises d'importance systémique. Les aides financières subsidiaires prévues par le projet garantiront que, dans un cas d'urgence peu probable, les entreprises d'importance systémique touchées obtiendront les liquidités nécessaires en très peu de jours.

Contenu du projet Un approvisionnement sûr en électricité est en premier lieu l'affaire de ce secteur économique. Complétant le cadre légal en place, la loi proposée a pour but de garantir l'approvisionnement de la Suisse en électricité, en cas d'évolution extraordinaire des marchés à laquelle le secteur de l'électricité ne parvient pas à faire face lui-même.

La loi crée la base légale nécessaire pour que des aides
financières subsidiaires puissent être octroyées sous forme de prêts aux entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique et ainsi en garantir le sauvetage. Outre cette loi, un arrêté fédéral relatif à un crédit d'engagement de 10 milliards de francs est proposé au Parlement, afin que la Confédération puisse s'engager à mettre rapidement les liquidités nécessaires à la disposition des entreprises d'importance systémique.

Les entreprises et leurs propriétaires, à commencer par les cantons et les communes, continueront de devoir trouver eux-mêmes des solutions dans un premier temps. La Confédération n'interviendra que de manière subsidiaire pour les entreprises et leurs bailleurs de fonds externes et de fonds propres. Les entreprises d'importance systé-

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mique seront automatiquement assujetties à la loi. Cet assujettissement s'accompagnera d'une obligation d'information limitée et de l'obligation de s'acquitter d'un forfait qui servira à couvrir les coûts incombant à la Confédération pour la mise à disposition du montant de 10 milliards de francs. Le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication pourra étendre le champ d'application de la loi à d'autres entreprises d'importance systémique. Afin d'éviter toute mauvaise pratique, la loi liera le soutien de la Confédération au respect de conditions strictes. Celles-ci consisteront, par exemple, en des prescriptions en matière de transparence, en une rémunération conforme aux règles du marché, en l'acquittement d'une prime de risque et en l'interdiction de distribuer des dividendes.

Il est également prévu que les aides financières de la Confédération ne soient que temporaires. Celles-ci céderont la place, à la fin de l'année 2026 au plus tard, à une réglementation ordinaire et complète qui garantira l'approvisionnement en électricité sans le moindre prêt de la Confédération.

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Table des matières Condensé

2

1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.2 Solutions étudiées et solution retenue 1.3 Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

5 5 6

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

7

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

4

Présentation du projet 4.1 Réglementation proposée 4.2 Mise en oeuvre

10 10 11

5

Commentaire du projet 5.1 Commentaire des dispositions 5.2 Commentaire de l'arrêté fédéral

12 12 30

6

Conséquences 6.1 Conséquences pour la Confédération 6.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.3 Conséquences économiques

30 30

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Frein aux dépenses 7.5 Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale 7.6 Conformité à la loi sur les subventions 7.7 Protection des données

32 32 32 33 33 34 34 35

7

Loi fédérale sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique (LFiEl) (Projet)

7 9

31 31

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Arrêté fédéral portant approbation d'un crédit d'engagement pour des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique (Projet) FF 2022 1185

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

Les importantes fluctuations de prix que connaissent les marchés de l'énergie depuis la fin de l'année 2021 font que les entreprises du secteur de l'électricité ont besoin de moyens financiers supplémentaires afin de couvrir leurs garanties financières liées au négoce de l'énergie. La situation s'est encore aggravée depuis le début de la guerre en Ukraine, les marchés de l'énergie faisant face à une volatilité des prix qui a atteint un niveau historique. Les entreprises du secteur de l'électricité négocient sur le marché de gros et vendent leur future production d'électricité jusqu'à deux ou trois ans à l'avance, afin de réduire le risque de marché dû à leurs positions dans le secteur de l'énergie, de s'assurer une certaine rentabilité et de parvenir à une meilleure prévisibilité de leur trésorerie. Pour couvrir le risque de contrepartie, les chambres de compensation (établissements financiers) exigent d'elles une garantie financière (marge), calculée à partir des prix du marché et de leur volatilité (versement initial), ainsi que de la différence entre le prix de transaction et la valeur de marché (marge de variation).

Le montant de ces garanties financières dépend par conséquent à chaque fois du prix de l'électricité actuel, et les participants au marché doivent en général s'en acquitter sous forme de sûretés monétaires. Ces garanties sont restituées aux entreprises dès lors que les prix baissent, mais au plus tard lorsque l'entreprise livre l'électricité au prix convenu. Les fluctuations de prix d'une ampleur inédite ont exacerbé les risques de crédit, et les garanties financières ont été revues à la hausse, si bien que les entreprises électriques suisses encourent des risques de liquidité sensiblement accrus.

Dans l'hypothèse où les prix subiraient une hausse brutale, par exemple si les livraisons de gaz russe devaient cesser, les besoins de liquidités des entreprises d'électricité augmenteraient à court terme au point que celles-ci ne seraient plus en mesure de fournir à temps des garanties suffisantes. Cette situation pourrait entraîner à son tour la défaillance incontrôlée d'une entreprise d'importance systémique. Deux fonctions en particulier, à savoir la direction d'une centrale et la responsabilité d'un groupebilan, peuvent remettre en cause la stabilité du système si elles ne sont
plus assumées.

Le groupe-bilan sert à coordonner les programmes prévisionnels et les valeurs indicatives de la production, du négoce, de la livraison et de la consommation d'électricité de l'exploitation propre et fait fonction de prestation envers des producteurs, fournisseurs et gros consommateurs tiers. Une défaillance de cette fonction compromettrait la stabilité du système. À cela s'ajoute que la défaillance d'un fournisseur d'électricité d'importance systémique obligerait des tiers à se procurer l'énergie par d'autres moyens, ce qui serait particulièrement délicat en présence de prix élevés sur le marché et de liquidités commerciales restreintes. Une réaction en chaîne de ce genre pourrait aussi nuire à la sécurité d'approvisionnement de la Suisse.

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Selon le dossier sur les dangers encourus par la Confédération, une panne d'électricité de grande ampleur causerait de graves préjudices aux personnes, d'immenses dommages patrimoniaux et une atteinte majeure à la capacité économique du pays 1, un scénario que le Conseil fédéral entend éviter. Aussi juge-t-il nécessaire de prendre des mesures.

1.2

Solutions étudiées et solution retenue

Le Conseil fédéral prévoit toute une série de mesures pour rendre le secteur de l'électricité plus résilient. Sont notamment envisagées des prescriptions qui garantissent le maintien permanent de fonctions importantes comme la production d'électricité (business continuity management, BCM), une loi sur l'intégrité et la transparence du commerce de gros de l'électricité et du gaz, ainsi que des exigences relatives aux liquidités et à la dotation en capital des entreprises. L'instauration de ces mesures prendra toutefois du temps de sorte que celles-ci ne déploieront leurs effets qu'à moyen terme.

Comme mesure immédiate, le Conseil fédéral a donc décidé d'élaborer une loi fédérale urgente sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique. La loi a pour but de garantir l'approvisionnement de la Suisse en électricité en cas d'évolution extraordinaire des marchés à laquelle le secteur de l'électricité ne parvient pas à faire face lui-même. À cette fin, elle prévoit la possibilité que des aides financières soient versées sous forme de prêts, à titre subsidiaire.

La sécurité de l'approvisionnement en électricité relève avant tout du secteur de l'énergie (art. 6, al. 2, de la loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie2). Par conséquent, il appartient d'abord aux entreprises concernées et à leurs propriétaires (à commencer par les cantons et les communes) de veiller à avoir assez de liquidités et de prendre constamment les mesures de prévention qui s'imposent pour garantir l'approvisionnement en électricité. Une aide financière de la Confédération n'interviendra que subsidiairement et en dernier recours pour empêcher, dans une situation de crise ou en cas d'évolution extraordinaire des marchés, qu'une entreprise du secteur de l'électricité d'importance systémique ne soit menacée d'illiquidité ou de surendettement et ne fasse ensuite l'objet d'une procédure de faillite ou de sursis concordataire. Les aides ne seront par conséquent à disposition qu'à titre temporaire, jusqu'à ce que les entreprises soient à même de garantir par leurs propres moyens la poursuite de leur activité, même dans des situations de marché difficiles.

Le soutien que la Confédération destine aux entreprises du secteur de l'électricité sera limité aux situations
d'urgence pouvant nécessiter une compensation très rapide du manque de liquidités pour éviter toute réaction en chaîne incontrôlée. Il est par conséquent nécessaire de prendre des dispositions, tout en concentrant les efforts sur les entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique. Les entreprises dont 1

2

Office fédéral de la protection de la population (2020): Dossier sur les dangers Pénurie d'électricité. Disponible sous: www.babs.admin.ch > Autres domaines d'activités > Risques et dangers > Analyse nationale des risques > Dossiers sur les dangers.

RS 730.0

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l'importance systémique n'est pas reconnue devront compter sur l'aide de leurs propriétaires pour ne pas céder leur place à des concurrents. Les réactions en chaîne peuvent également avoir leur origine à l'étranger et s'étendre à la Suisse. Au besoin, elles doivent être brisées sur le territoire national.

Compte tenu de l'urgence ­ le risque d'embargo sur le gaz est bien réel et, en cas de crise, les liquidités doivent pouvoir être octroyées en quelques jours, voire en 48 heures ­, il est prévu que la loi soit déclarée urgente et entre vigueur immédiatement, conformément à l'art. 165 de la Constitution (Cst.)3, sans attendre l'expiration du délai référendaire. C'est pourquoi il faut en limiter la durée de validité.

Le Conseil fédéral a rejeté l'idée d'élaborer une solution sans faire appel au législateur, en se fondant sur le droit de nécessité. Même s'il est pour lui clair qu'il est urgent d'agir, le Conseil fédéral considère que la Suisse n'est pas encore dans une situation telle qu'il faudrait parer à des troubles menaçant gravement l'ordre public, la sécurité extérieure ou la sécurité intérieure (art. 185, al. 3, Cst.). Dans ce contexte, il serait problématique d'un point de vue politique de n'agir qu'en vertu des compétences prévues dans le droit de nécessité et d'empêcher ainsi le débat politique urgent et l'inclusion du législateur dans la solution aux questions qui se posent.

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

La loi fédérale urgente qui fait l'objet du présent message n'a été annoncée ni dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20234, ni dans l'arrêté fédéral du 21 septembre 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20235.

Au moment de définir son programme pour la législature à venir, le Conseil fédéral ne pouvait pas prévoir que la guerre éclaterait en Ukraine.

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

Du 27 avril au 4 mai 2022 inclus, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) a soumis le projet de loi fédérale à une procédure de consultation accélérée 6.

Sur le fond, la plupart des participants à la consultation rejoignent le Conseil fédéral sur la nécessité d'agir. Certains ont toutefois remis en cause la nécessité de prendre des mesures sur le plan légal et, en particulier, le caractère urgent du projet. L'avantprojet prévoyait l'assujettissement obligatoire des entreprises d'importance systémique à la loi. Il disposait en outre que, dans les six mois suivant l'entrée en vigueur 3 4 5 6

RS 101 FF 2020 1709 FF 2020 8087 Le dossier mis en consultation est publié sur le site www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2022 > DETEC.

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de la loi, ces entreprises devaient conclure un contrat de prêt garanti avec la Confédération pour parer toute évolution extraordinaire des marchés. Les dispositions correspondantes ont été largement critiquées. L'opposition a également été particulièrement vive à l'égard des obligations de renseigner, jugées excessives, de la possibilité donnée à la Confédération d'intervenir dans la gestion opérationnelle des entreprises, du montant de la prime de risque et de l'instauration d'un droit de gage sur les actifs des entreprises. Des participants à la procédure de consultation ont en outre demandé que le mécanisme de soutien soit accessible à toutes les entreprises du secteur de l'électricité. Enfin, le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence rejette l'exclusion proposée de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans) 7, indiquant que cette loi garantit déjà la protection des secrets d'affaires et de la sphère privée et faisant donc valoir que l'exclusion proposée n'est pas utile. Un aperçu des autres résultats de la consultation figure dans le rapport établi à ce sujet8.

Se fondant sur les réponses des participants à la consultation, le Conseil fédéral renonce à obliger les entreprises à engager des négociations contractuelles et prévoit à la place que des prêts pourront, le cas échéant, être octroyés par voie de décision. Il maintient en revanche l'assujettissement obligatoire des entreprises d'importance systémique à loi. Si une entreprise a une importance systémique et qu'elle joue de ce fait un rôle essentiel dans l'économie suisse, il ne suffit plus de ne compter que sur la bonne volonté des acteurs concernés. Le projet de loi prévoit désormais un autre mécanisme de soutien: les entreprises auxquelles le droit cantonal applique des mesures en matière de liquidités équivalentes à celles de la loi proposée pourront être exemptées de la plupart des dispositions de la loi fédérale. Le Conseil fédéral a aussi assoupli les obligations de renseigner et d'informer (en particulier avant l'octroi d'un prêt), supprimé la possibilité que l'avant-projet lui conférait d'influer sur les opérations des entreprises, nettement réduit la prime de risque et précisé le calcul du forfait de mise à disposition. En outre, ce n'est qu'après avoir eu recours à un prêt que les entreprises
devront engager des négociations avec les cantons et les communes pour obtenir un sursis au paiement des redevances cantonales et communales. Le Conseil fédéral renonce également à l'instauration automatique d'un gage légal sur les actions de l'entreprise au moment de l'octroi d'un prêt. Afin de ne pas compromettre l'obtention de lignes de financement privées, le projet de loi prévoit, en cas d'extrême nécessité, la possibilité de déclarer la postposition des créances sur les prêts. En outre, il ne prévoit plus explicitement l'interdiction de répercuter le forfait de mise à disposition, la prime de risque et les intérêts sur les consommateurs finaux qui se procurent de l'électricité pour garantir leur propre approvisionnement de base. La régulation des prix de l'électricité exclut déjà cette répercussion.

Le Conseil fédéral refuse d'étendre le champ d'application de la loi aux entreprises dont l'importance critique n'est pas avérée. Le projet contribuera à garantir l'approvisionnement en électricité même en cas d'urgence et d'échec de toutes les mesures prises à titre subsidiaire, étant donné que les entreprises d'importance systémique auront l'assurance de disposer de liquidités suffisantes et que le risque de défaillance de 7 8

RS 152.3 Le rapport sur les résultats de la consultation est publié sur le site www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2022 > DETEC.

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ces entreprises sera ainsi réduit. La loi n'a pas vocation à promouvoir l'activité économique du secteur de l'électricité. Il appartiendra aux propriétaires concernés d'aider financièrement les entreprises sans importance systémique pour éviter que celles-ci ne doivent céder la place à une concurrente. Il serait impossible d'appliquer à temps le mécanisme de soutien fédéral à l'ensemble des entreprises du secteur de l'électricité sans un net renfort des ressources en personnel. Cependant, les entreprises dont l'importance systémique n'est pas reconnue profiteront aussi des aides prévues, car cellesci stabiliseront l'ensemble du marché.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Au début mars 2022, la Fédération européenne des négociants en électricité (European Federation of Energy Traders) a demandé à la Commission européenne une aide d'urgence limitée dans le temps et aux besoins de liquidités immédiats, afin de pérenniser le fonctionnement des marchés de gros de l'énergie en cas d'évolution extraordinaire. Il était prévu que les aides financières soient fournies par les gouvernements ou les banques centrales. Le 23 mars 2022, la Commission européenne a adopté un encadrement temporaire de crise pour les aides d'État visant à soutenir l'économie à la suite de l'agression de la Russie contre l'Ukraine (communication 2022/C 131 I)9.

Les États membres ont ainsi plus de flexibilité qu'en temps normal pour accorder des aides publiques à leurs entreprises. Au début avril 2022, le gouvernement fédéral allemand a annoncé la création d'un mécanisme de protection en faveur des entreprises touchées par les conséquences de la guerre, notamment celle qui sont actives dans le secteur indigène de l'énergie. Les entreprises disposent, auprès de la banque publique de développement allemande (Kreditanstalt für Wiederaufbau), de lignes de crédit couvertes par une garantie fédérale d'un montant de 100 milliards d'euros. L'aide de l'État est également assortie de conditions strictes. Ainsi, les crédits doivent servir exclusivement aux opérations de couverture et ne pas être utilisés à des fins spéculatives. Le versement de salaires variables (primes) est également interdit. Les entreprises bénéficiaires doivent se soumettre à un examen strict des primes qu'elles versent. La rémunération des crédits est fondée sur les prix du marché et assortie d'une majoration. En outre, une provision de mise à disposition doit être constituée. Le 12 mai 2022, le Bundestag a voté une modification de la loi sur la sécurité énergétique.

Cette modification prévoit notamment la possibilité d'une gestion fiduciaire, voire d'une expropriation des entreprises exploitant des infrastructures sensibles. Le Bundesrat ne s'est pas encore prononcé à ce sujet10. À la mi-mars, la France a recapitalisé le groupe public Électricité de France. L'Agence pour la coopération des régulateurs de l'énergie (ACER) mentionne expressément dans son rapport d'avril 2022 sur le marché européen de gros de l'électricité que les gouvernements peuvent influer sur la

9

10

Communication de la Commission Encadrement temporaire de crise pour les mesures d'aide d'État visant à soutenir l'économie à la suite de l'agression de la Russie contre l'Ukraine 2022/C 131, JO C 131 I, du 24.3.2022, p. 1.

État des délibération disponible sous: www.bundestag.de/dokumente/textarchiv/2022/ kw19-de-energiesicherungsgesetz-891872.

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constitution des liquidités nécessaires à la fourniture des sûretés en mettant des garantie financières à la disposition des entreprises concernées11.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

La loi a pour but de garantir l'approvisionnement de la Suisse en électricité en cas d'évolution extraordinaire des marchés à laquelle le secteur de l'électricité ne parvient pas à faire face lui-même. À cet effet, elle prévoit la possibilité d'octroyer des aides financières subsidiaires sous forme de prêts en vue du sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité qui ont une importance systémique. Sont notamment considérées comme évolution extraordinaire des marchés une très forte augmentation de prix dans un laps de temps très court, ou une perte de confiance généralisée sur les marchés européens de l'énergie se traduisant par une pénurie de liquidités.

Selon le principe de subsidiarité, les entreprises d'importance systémique sont de tenue de prendre, avec leurs bailleurs de fonds externes (banques, obligataires, etc.)

ainsi que leurs propriétaires (cantons, communes, particuliers), en tout temps toutes les mesures de prévention qui s'imposent pour surmonter d'éventuelles crises et assurer la continuité de leurs activités. Dans le cas des sociétés anonymes, cette responsabilité incombera d'abord au conseil d'administration. Celui-ci devra préserver en toute bonne foi les intérêts de la société et veiller notamment à en maintenir ou rétablir rapidement la solvabilité, en prenant toutes les mesures qui s'imposent. Il lui faudra analyser toutes les possibilités d'assurer ou de rétablir les liquidités de l'entreprise, avec des fonds propres adaptés aux risques encourus et, le cas échéant, intervenir avec les personnes ou établissements financiers concernés. Les actionnaires ont beau ne pas être obligés en vertu du droit de la société anonyme à effectuer des versements supplémentaires, leur statut de propriétaires d'une entreprise implique une certaine responsabilité (politique) à son égard.

Si une entreprise a une importance systémique et qu'elle joue de ce fait un rôle essentiel dans l'économie suisse, il ne suffit plus de ne compter que sur la bonne volonté des acteurs concernés. C'est pourquoi les entreprises du secteur de l'électricité dont l'importance systémique est avérée seront soumises à la réglementation proposée, par le seul effet de la loi. Cette réglementation comprend les deux phases suivantes: ­

11

Première phase: à compter de l'entrée en vigueur de la loi, les entreprises devront fournir à la Confédération les renseignements nécessaires à l'exécution de la loi et s'acquitter d'un forfait destiné à couvrir les coûts que la Confédération devra supporter en particulier pour la mise à disposition des liquidités. Aucun prêt ne sera octroyé durant cette phase si bien qu'aucun intérêt ni aucune prime de risque ne seront dus. La première phase offrira toutefois l'occasion aux entreprises de prendre contact avec les autorités en vue de l'oc-

Rapport disponible sous: www.acer.europa.eu > Events and Engagement > News > ACER publishes its Final Assessment of the EU Wholesale Electricity Market Design > Final Assessment of the EU Wholesale Electricity Market Design.

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troi rapide d'un prêt le moment venu. La Confédération aura ainsi la possibilité d'octroyer rapidement des prêts à une entreprise du secteur de l'électricité d'importance systémique organisée selon le droit privé, si une évolution extraordinaire des marchés cause des problèmes de liquidités et menace l'entreprise d'une illiquidité ou d'un surendettement qui rendrait, en dernier lieu, probable l'ouverture d'une procédure de faillite ou de sursis concordataire et compromettrait indirectement l'approvisionnement en électricité.

­

Seconde phase: en cas d'évolution extraordinaire des marchés, les prêts seront octroyés en général par voie de décision. Cette procédure garantira que les entreprises d'importance systémique restent aptes à mener leurs activités et à assurer l'approvisionnement de la Suisse en électricité. À cette fin, la Confédération entend mettre à disposition un montant total de 10 milliards de francs au maximum.

Afin de prévenir les mauvaises pratiques (par ex. la perspective d'une aide financière ne doit pas amener les entreprises à prendre davantage de risques, ou leurs propriétaires à se désintéresser des mesures de prévention qui s'imposent), toute aide financière de la Confédération sera assortie de conditions strictes. Celles-ci consisteront, notamment, en des prescriptions en matière de transparence ou en l'interdiction de distribuer des dividendes. Les prêts seront rémunérés aux conditions du marché et augmentés d'une prime de risque située entre 4 et 8 %. Cette prime sera en outre majorée si l'entreprise enfreint les dispositions de la décision de prêt ou de la loi pendant la durée du prêt.

Le projet faisant l'objet du présent message pourrait inciter les entreprises, leurs propriétaires et les bailleurs de fonds externes à adopter un comportement problématique.

Il est ainsi à craindre que les entreprises ne suspendent ou diminuent leurs efforts visant à mettre en place un volant de liquidités et de fonds propres suffisants, que les bailleurs de fonds externes (banques notamment) ne retirent leurs crédits ou lignes de crédit, ou que les propriétaires ne privent de capital leurs entreprises. Il n'est pas possible d'éviter tous les comportements inadéquats. Le Conseil fédéral a donc veillé, lors de l'élaboration du projet, à limiter autant que possible les incitations inopportunes et à ne pas décourager l'initiative privée. Par exemple, le projet a été conçu de façon à ne pas empêcher les entreprises de conclure de nouvelles lignes de crédit auprès des banques. En outre, il est essentiel que la loi ait un caractère transitoire. À moyen terme, il faudra mettre en oeuvre des mesures qui rendent inutile toute aide financière de la Confédération (par ex. prescriptions BCM, loi sur l'intégrité et la transparence du commerce de gros de l'électricité et du gaz, éventuelles prescriptions concernant les liquidités et la dotation en capital des entreprises). C'est pourquoi la durée de validité de la loi fédérale urgente faisant l'objet du présent message est limitée à la fin de l'année 2026.

4.2

Mise en oeuvre

Après l'entrée en vigueur de la loi, on attend des entreprises d'importance systémique qu'elles prennent contact spontanément avec le DETEC, représenté en l'occurrence par l'Office fédéral de l'énergie (OFEN). Afin que l'objectif de la loi soit atteint, les 11 / 36

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entreprises et les autorités examineront de près les difficultés qui se posent au cas par cas. En accord avec les entreprises concernées, les autorités prépareront une décision de prêt conforme aux dispositions légales. Celle-ci ne sera toutefois rendue en général qu'en présence d'un besoin concret. Une fois que la décision aura été adoptée, l'entreprise d'importance systémique pourra, au besoin, déposer une demande d'obtention de prêts. Ceux-ci serviront à faire face à une évolution extraordinaire des marchés susceptible de causer l'illiquidité ou le surendettement d'une entreprise d'importance systémique.

5

Commentaire du projet

5.1

Commentaire des dispositions

Section 1

Dispositions générales

Art. 1

But, objet et champ d'application

La loi a pour but de contribuer à garantir l'approvisionnement de la Suisse en électricité malgré toute évolution extraordinaire des marchés (al. 1).

L'approvisionnement de la Suisse en électricité est l'affaire d'un nombre restreint d'acteurs jouant un rôle essentiel dans l'économie du pays et donc importants d'un point de vue systémique. La défaillance incontrôlée de l'un de ces acteurs pourrait entraîner une réaction en chaîne qui compromettrait la sécurité d'approvisionnement de la Suisse. Par conséquent, l'objet de la réglementation est l'anticipation d'une situation dans laquelle une entreprise du secteur de l'électricité d'importance systémique serait menacée d'illiquidité ou de surendettement à cause d'une évolution extraordinaire des marchés et malgré les mesures qu'elle a prises elle-même ou que ses partenaires financiers et ses propriétaires directs ou indirects ont mises en oeuvre (al. 2).

La réglementation proposée s'appliquera uniquement aux entreprises qui sont des sujets de droit privé (par ex. sociétés anonymes, sociétés à responsabilité limitée ou coopératives de droit privé). Les entreprises faisant partie d'une administration cantonale ou communale ou organisées comme des établissements de droit public en seront exclues. En cas d'urgence, il incombera aux collectivités publiques concernées de soutenir les entreprises qui nécessiteraient un apport extraordinaire de liquidités (al. 3).

Art. 2

Entreprises d'importance systémique

L'al. 1 définit les conditions dans lesquelles une entreprise du secteur de l'électricité est réputée d'importance systémique. L'entreprise doit obligatoirement avoir son siège en Suisse (let. a). On considère qu'une entreprise active dans le secteur de l'électricité est importante d'un point de vue systémique lorsqu'elle détient une part considérable du parc de production indigène et qu'elle participe à des marchés organisés pour le négoce de l'électricité (let. b). Dans ce contexte, la gestion de l'exploitation des centrales électriques peut déjà être reconnue d'importance systémique. Par ailleurs, d'autres fonctions d'une entreprise du secteur de l'électricité revêtent potentiellement une importance systémique, à commencer par la responsabilité d'un groupe12 / 36

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bilan. Les fournisseurs n'ayant qu'une production propre restreinte ne seront a priori pas considérés comme importants d'un point de vue systémique, car leur défaillance ne générera pas nécessairement d'externalités, à savoir d'effets négatifs sur la stabilité de tout le système d'approvisionnement. Le nombre de clients finaux n'est pas non plus un critère de qualification. Pour évaluer quelle puissance sera considérée comme le seuil déterminant l'importance systémique, on se base sur la puissance de réglage acquise et mise en réserve par Swissgrid, soit l'énergie servant au réglage primaire (PRL), au réglage secondaire (SRL) et au réglage tertiaire (TRL). Par souci de simplification, on suppose ici que la puissance mise en réserve par Swissgrid permet de compenser à court terme la défaillance d'une entreprise ayant une puissance moindre.

Selon les chiffres des années précédentes, la puissance pertinente est d'environ 1200 mégawatts. Ce critère reflète le fait que certaines entreprises n'ont pas uniquement des centrales électriques en propriété directe, mais peuvent aussi utiliser la puissance d'autres centrales (partenaires) par la voie des participations qu'elles détiennent à titre majoritaire ou minoritaire dans ces centrales ou par la voie d'autres droits.

L'importance systémique d'une entreprise sera donc évaluée en fonction de la puissance globale, celle-ci pouvant être obtenue par diverses entités juridiques (ch. 1). En d'autres termes, une personne morale qui exploite une centrale électrique mais qui met la puissance obtenue à la disposition d'une autre personne morale (par ex. en vue de sa commercialisation) ne sera pas réputée d'importance systémique au sens de la loi.

L'art. 2, al. 1, let. b, ch. 2, qualifie d'importantes d'un point de vue systémique seulement les entreprises qui participent à des marchés organisés. L'activité de négoce sur des marchés organisés comprend tous les contrats et produits dérivés portant sur la fourniture, l'acquisition ou le transport d'électricité conclus notamment sur des plateformes européennes de bourse ou de courtiers. Les entreprises faisant le négoce d'électricité sur la base de contrats bilatéraux tels que des contrats avec des centrales partenaires n'entrent pas dans le champ d'application de cette disposition (ch. 2).

Axpo Holding AG, Alpiq
Holding AG et BKW SA remplissent à l'heure actuelle les conditions de l'al. 1.

Le Conseil fédéral juge nécessaire d'assujettir ces entreprises à la réglementation proposée. Les travaux préliminaires ont montré qu'il peut y avoir des situations où les entreprises d'importance systémique ne sont plus à même de fournir les liquidités nécessaires. Il paraît pour le moins douteux que dans un cas urgent, la Confédération puisse refuser un prêt à une entreprise d'importance systémique à court de liquidités sans que sa décision ne compromette la sécurité d'approvisionnement. C'est aussi pour cette raison que l'assujettissement à la réglementation ne sera pas laissé à la bonne volonté des entreprises d'importance systémique. Tenant compte de la structure fédéraliste de la Suisse, la réglementation proposée prévoit cependant qu'une entreprise d'importance systémique sera exemptée de la plupart des dispositions légales si le canton concerné lui fournit une aide financière au moins équivalente à celle qui est visée dans la réglementation fédérale (art. 21 s.).

En raison de la difficulté à définir l'importance systémique de manière exhaustive et univoque, le DETEC pourra, après avoir consulté la Commission fédérale de l'électricité (ElCom), reconnaître par décision l'importance systémique d'autres entreprises du secteur de l'électricité ayant leur siège en Suisse (al. 2), cette possibilité n'étant 13 / 36

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toutefois applicable qu'aux sujets de droit privé (art. 1, al. 3). Encore faudra-t-il que l'entreprise remplisse les critères énoncés à l'al. 2, let. a et b, pour que le DETEC puisse lui accorder un tel statut.

Elle devra notamment avoir un réseau commercial important avec d'autres entreprises du secteur de l'énergie (let. a). Ce réseau peut avoir une importance systémique puisque la défaillance d'une entreprise qui en fait partie peut faire courir un risque financier considérable à des tiers. Si une contrepartie fait défaut, une entreprise du secteur de l'électricité doit de nouveau se procurer elle-même sur le marché les quantités d'énergie nécessaires pour remplir ses engagements ou pour couvrir ses propres besoins. Cela pourrait être difficile dans une situation de marché tendue, et même d'autant plus délicat qu'une partie de la production d'une entreprise insolvable du secteur de l'électricité ne sera pas mise sur le marché. Autrement dit, il se peut que certaines entreprises aient d'étroits rapports de dépendance financière (credit exposure) avec d'autres entreprises du secteur (fournisseurs ou sociétés de trading), et qu'elles présentent par conséquent une importance systémique à titre individuel.

La let. b énonce le deuxième critère devant impérativement être rempli: elle exige que l'entreprise fournisse des prestations centrales pour l'économie suisse dont il est en principe impossible de se passer (ch. 1) et qu'un autre participant au marché ne peut pas fournir dans un délai supportable pour l'économie (ch. 2).

Le DETEC pourra déclarer en tout temps l'importance systémique des entreprises visées à l'al. 2. En vertu de l'al. 3, une entreprise (ou la société mère du groupe auquel elle appartient) qui remplit les conditions de l'al. 2 pourra demander au DETEC, dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la loi, de lui attribuer le statut d'entreprise ayant une importance systémique. Dans tous les cas, le DETEC consultera l'ElCom avant de rendre sa décision.

L'al. 4 précise que si une entreprise visée à l'al. 1 fait partie d'un groupe, seule la société mère qui consolide le groupe sera réputée entreprise d'importance systémique.

L'objectif est d'éviter que plusieurs filiales d'un même groupe soient considérées individuellement comme importantes d'un point de vue systémique.

Art. 3

Aides financières subsidiaires de la Confédération sous forme de prêts

En vertu de l'al. 1, la Confédération pourra octroyer un prêt à une entreprise d'importance systémique seulement si celle-ci est menacée d'illiquidité ou de surendettement en raison de problèmes de liquidités dus à une évolution extraordinaire des marchés et malgré les mesures qu'elle a prises elle-même ou que ses partenaires financiers ou propriétaires directs ou indirects ont mises en oeuvre. Le principe de subsidiarité est notamment respecté au moyen des conditions d'octroi d'un prêt prévues par la section 2 de la loi.

Dans tous les cas, les aides de la Confédération n'auront qu'un caractère subsidiaire.

Les entreprises d'importance systémique et leurs propriétaires directs ou indirects devront prendre les mesures qui s'imposent pour garantir leur solvabilité et une base de capital suffisante. L'organe de direction ou d'administration suprême de ces entreprises aura un rôle clé dans l'application de ces mesures. En vertu de l'art. 716a, al. 1,

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ch. 3, en relation avec l'art. 717, al. 1, du code des obligations (CO)12, il lui incombe de veiller fidèlement aux intérêts de la société. Il devra par conséquent adopter, préventivement et avant toute crise, les mesures propres à maintenir la capacité de l'entreprise à poursuivre son activité. En d'autres termes, il devra faire le nécessaire afin que la solvabilité de l'entreprise soit maintenue ou qu'elle puisse être pleinement rétablie à brève échéance. En cas de crise, il lui faudra concevoir une planification financière résolument axée l'assainissement de l'entreprise. Tout ce qui permet de garantir ou de restaurer les liquidités de l'entreprise ou un capital propre adapté aux risques encourus devra être analysé et, au besoin, mis en oeuvre avec les personnes et les établissements financiers qui détiennent des participations dans l'entreprise (par ex. modification des opérations pour compte propre et des opérations à terme ou prévention de la défaillance d'une contrepartie). Si le conseil d'administration ne prend pas les mesures nécessaires alors même qu'il a connaissance du problème, il devra s'attendre à des actions en responsabilité13.

Étant donné que les propriétaires (à commencer par les cantons et les communes) influent sur le développement et la structure des producteurs d'électricité (parfois par l'intermédiaire de représentants aux conseils d'administration, de conventions d'actionnaires ou d'objectifs stratégiques), ils assument une responsabilité au moins indirecte dans l'exécution de mesures provisionnelles. Bien que le droit de la société anonyme ne les astreigne pas à des versements supplémentaires, plus les actionnaires interviennent, juridiquement ou politiquement, dans les affaires de «leur» SA, et plus ils se verront contraints de mettre à disposition les fonds nécessaires. Il pourra s'agir ici de prêts, d'augmentations du capital-actions ou de solutions du marché (par ex. emprunts convertibles).

Il y aura évolution extraordinaire des marchés si, par exemple, des ruptures structurelles apparaissent dans l'approvisionnement en gaz (par ex. de Russie) et entraînent une flambée des prix sur les marchés de gros. Des sanctions plus sévères pourraient ainsi conduire à une réduction sensible et soudaine des livraisons physiques de gaz, et donc à un renchérissement brutal de
l'énergie (gaz et électricité). D'où des prix durablement plus élevés sur le marché de gros, ce qui aurait pour effet immédiat d'accroître les garanties financières à fournir. Il se peut également que l'expiration des actuels contrats de livraison européens avec la Russie fasse continuellement augmenter les prix de l'électricité et du gaz durant les semaines et mois à venir. La situation pourrait s'aggraver au semestre d'hiver, au point qu'une entreprise ne parvienne plus à satisfaire à ses exigences de marge ou que la défaillance de contreparties importantes ait un effet domino sur le marché.

L'al. 2 précise que l'aide financière subsidiaire n'est pas une subvention à laquelle les entreprises ont droit.

Cette disposition vise en premier lieu à garantir le respect du principe de subsidiarité et la capacité de remboursement du prêt par l'entreprise.

12 13

RS 220 Cf. notamment Roland MÜLLER/Lorenz LIPP/Adrian PLÜSS, Der Verwaltungsrat, 5e édition, Zurich 2021, ch. 3.128 ss et 3.154 ss.

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Section 2

Critères des prêts octroyés par la Confédération

Art. 4

Octroi de prêts par voie de décision

L'al. 1 prévoit qu'en règle générale, le DETEC octroiera par voie de décision des prêts aux entreprises d'importance systémique qui lui en font la demande. La demande de l'entreprise devra lui parvenir dès que possible. Celle-ci soumettra sa requête au DETEC au plus tard quand elle pressentira un risque d'illiquidité ou de surendettement. Cette façon de faire tient compte des cas où l'évolution du marché est lente et insidieuse. Elle n'exclut pas pour autant les changements brusques et sans signes avant-coureurs. Là encore, les entreprises devront s'adresser au plus vite aux autorités et en particulier leur livrer les informations nécessaires. Ainsi seulement, les autorités pourront prendre à temps les mesures de prévention qui s'imposent.

Comme l'art. 25, al. 2, le précise, le DETEC octroiera les prêts en accord avec le Département fédéral des finances (DFF). Il sera toutefois l'interlocuteur principal de l'entreprise, coordonnant et accomplissant le travail de fond et les tâches administratives que le prêt exige. L'intensité des échanges dépendra notamment des principaux développements des marchés et de la situation financière des entreprises. Plus le marché sera tendu et l'entreprise se trouvera à court de liquidités, plus des examens ciblés et approfondis s'imposeront préalablement à l'octroi d'un prêt. La collaboration avec le DFF portera notamment sur les aspects liés à la politique des dépenses, au droit des subventions et au droit des finances. Le DETEC et le DFF associeront ensuite l'ElCom à leurs travaux.

L'al. 2 prévoit que la décision offrira à l'entreprise d'importance systémique la possibilité d'obtenir un prêt. Concrètement, une entreprise pourra, sur la base de la décision rendue, obtenir un ou plusieurs prêts à des moments différents. Elle devra soumettre une demande au DETEC pour chaque prêt qu'elle souhaite obtenir (cf. art. 9).

En outre, la décision règlera les modalités des prêts, qui devront satisfaire les exigences de la section 2. Celles-ci ne sont toutefois pas exhaustives. Les autres éléments constitutifs de la décision seront à chaque fois adaptés au cas d'espèce et pourront inclure tout ce qui est susceptible de figurer dans un contrat de prêt.

L'al. 3 dispose que le DETEC pourra rendre une décision de prêt même si l'entreprise d'importance systémique est déjà
surendettée au moment de la décision. Le cas échéant, les obligations du conseil d'administration seront définies en vertu de l'art. 725 s. CO. Bien que cela ne soit pas souhaité en général, il pourra être nécessaire d'adopter une décision de prêt malgré le surendettement, si le temps presse et que l'entreprise ne peut pas mettre en place d'autres mesures assez rapidement. L'entreprise devra ensuite prendre les mesures requises par l'élimination de son surendettement ou par son assainissement avant l'obtention effective du prêt (art. 9). La condition de l'absence de surendettement au moment de l'obtention du prêt vise à éviter que des prêts n'aillent à des entreprises dont les difficultés ne sont pas dues seulement à l'évolution extraordinaire des marchés, mais aussi à des problèmes structurels de solvabilité. Il est prévu que l'aide financière de la Confédération permette de combler un manque de liquidités, et non qu'elle serve à résoudre des problèmes structurels.

C'est en effet aux propriétaires des entreprises qu'il incombe de régler ces problèmes.

Utilisée à dessein, la forme potestative de cette disposition permettra par exemple au 16 / 36

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DETEC de rendre une décision de prêt dès lors que l'entreprise ou ses propriétaires auront pris des mesures d'autofinancement même si, d'un point de vue formel, ces mesures n'ont pas encore éliminé le surendettement. Cette disposition autorise la Confédération à encourager les propriétaires à adopter d'autres mesures ou à lui donner des garanties dans ce sens avant de pouvoir obtenir les prêts souhaités. Sa forme potestative indique clairement que le DETEC ne sera pas tenu de rendre une décision; il pourra aussi ne pas le faire. Cette marge d'appréciation dépendra également de la crédibilité avec laquelle l'entreprise pourra démontrer comment et jusqu'à quand elle est capable de résoudre les problèmes de surendettement auxquels elle fait face.

Art. 5

Octroi de prêts par voie de contrat

Au lieu de rendre une décision, le DETEC pourra conclure un contrat de prêt de droit public avec l'entreprise d'importance systémique. À l'instar de la décision, le contrat de prêt devra satisfaire aux prescriptions énoncées dans la section 2.

L'octroi d'un prêt par voie de décision fait que la Confédération fixera unilatéralement les critères du prêt et que l'entreprise aura une marge de manoeuvre extrêmement limitée. Si elle n'est pas d'accord avec les modalités du prêt décidées par la Confédération, l'entreprise pourra déposer un recours de droit administratif.

L'art. 5 offre une marche de manoeuvre accrue aux entreprises. Il vise à leur donner la possibilité d'entrer le plus tôt possible en contact avec la Confédération et de négocier avec elle en toute transparence. Dans l'idéal, l'entreprise et la Confédération se mettront d'accord sur des conditions-cadres acceptables pour les deux parties. En cas d'échec des négociations sur un contrat de prêt, il restera l'instrument de la décision de prêt.

Art. 6

Bénéficiaire du prêt, but et monnaie

En vertu de l'al. 1, le prêt ne pourra être accordé qu'à une entreprise présentant une importance systémique au sens de l'art. 2.

L'al. 2 dispose que les entreprises d'importance systémique ne pourront pas utiliser sans restriction un prêt de la Confédération. Celui-ci poursuit en effet un but précis, à savoir combler un manque de liquidités dû à l'évolution extraordinaire des marchés (cf. art. 9, al. 3).

Selon l'al. 3, les prêts seront exclusivement octroyés en francs suisses. Il n'appartient pas à la Confédération d'acquérir des devises pour le compte des entreprises d'importance systémique. C'est à elles et non à la Confédération de supporter les éventuels risques de change.

Art. 7

Somme prêtée, intérêts et prime de risque

L'al. 1 prévoit que la décision devra fixer le montant maximal du prêt, celui-ci dépendant également de l'évolution extraordinaire des marchés (cf. art. 9, al. 3).

L'al. 2 précise que le prêt sera rémunéré aux conditions du marché et augmenté d'une prime de risque. Pour déterminer des taux d'intérêt conformes au marché, on se fondera notamment sur les taux de référence en vigueur, la notation de l'entreprise, les 17 / 36

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taux d'intérêt pratiqués sur le marché du crédit ou des capitaux pour des financements comparables et les garanties fournies à la Confédération par l'entreprise ou ses propriétaires.

Si une entreprise d'importance systémique a besoin du soutien de la Confédération pour obtenir des liquidités, cela signifie qu'elle n'est plus en mesure de trouver à temps un financement sur le marché du crédit ou des capitaux. Les banques ne lui fournissent plus de liquidités, ce qui laisse supposer que le taux d'intérêt conforme aux conditions du marché est trop bas. C'est pourquoi il est nécessaire d'ajouter une prime de risque. Celle-ci vise à indemniser la Confédération du risque qu'elle encourt en qualité de prêteuse ultime (lender of last resort) et possède une fonction incitative, compte tenu du caractère subsidiaire des aides de la Confédération: une entreprise d'importance systémique sera dissuadée autant que possible de recourir au soutien de la Confédération ou, si elle y a fait appel, elle sera incitée à rembourser le prêt au plus vite.

Selon l'al. 3, la prime de risque s'ajoutant aux intérêts se situera entre 4 et 8 % par an des montants dus par l'entreprise au titre des prêts obtenus. La fourchette sera de 5 à 10 % par an si, pendant la période où elle peut obtenir un prêt, l'entreprise enfreint les obligations, charges ou conditions énoncées dans la décision de prêt du DETEC ou dans la loi. La prime de risque sera fixée dans ces fourchettes, compte tenu de tous les risques déterminants, y compris les éventuelles garanties constituées (art. 11), la subordination (art. 12) et d'autres aspects encore liés aux risques. Le DETEC disposera d'une marge d'appréciation dans ce contexte.

La décision de prêt indiquera aussi dans quelle mesure la prime de risque est majorée en cas de violation des règles, telles que l'interdiction de fixer et de distribuer des dividendes (art. 10, al. 1, let. a), l'interdiction de rembourser des apports en capital (art. 10, al. 1, let. b), ou encore l'interdiction de procéder à des restructurations (art. 10, al. 3).

La majoration de la prime de risque tient à l'impossibilité, du fait de l'importance systémique de l'entreprise, de résilier le prêt octroyé et d'abandonner l'entreprise à son sort. L'augmentation des coûts de financement (ici via la prime de risque) est un mécanisme
usuel dans les structures de financement. Elle est conçue ici comme une incitation économique pour assurer en tout temps le respect des conditions du prêt.

Afin de garantir la bonne application du droit objectif en cas de violation grave de la décision de prêt, la Confédération pourra en dernier recours révoquer la décision de prêt. Le cas échéant, la possibilité d'obtenir un prêt sera aussitôt caduque, et toutes les créances ouvertes deviendront immédiatement exigibles.

Le paiement de la prime de risque ne deviendra exigible qu'à l'expiration de la période où l'entreprise peut obtenir un prêt (al. 4). Ainsi, la Confédération contribuera à ménager les liquidités de l'entreprise.

Le projet n'interdit plus explicitement de répercuter la prime de risque et les intérêts sur les consommateurs finaux qui se procurent de l'électricité pour garantir leur propre approvisionnement de base. La régulation des prix de l'électricité exclut déjà la prise en compte de ces deux éléments dans les coûts de l'approvisionnement de base. Les opérations de couverture qui peuvent poser des problèmes de liquidités (cf. art. 9, al. 3, let. a, ch. 3) ne sont pas nécessaires à la production des quantités destinées à 18 / 36

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l'approvisionnement de base, car la vente à des tarifs régulés constitue déjà une couverture suffisante. C'est pourquoi la prime de risque et les intérêts ne peuvent pas être inclus dans les prix de revient et les redevances grevant l'énergie fournie dans le cadre de l'approvisionnement de base.

La répercussion de la prime de risque sur les coûts de l'énergie serait contraire au but de cette prime, dont la définition vise précisément à éviter les incitations inopportunes.

La sollicitation d'un prêt serait d'autant plus attrayante pour une entreprise que celleci ou ses propriétaires n'auraient pas à supporter eux-mêmes les coûts qui y sont liés.

Art. 8

Modalités d'obtention

Pour garantir dans la mesure du possible l'égalité de traitement entre les entreprises d'importance systémique et la faisabilité des opérations liées à l'octroi des prêts par la Confédération, cette disposition prévoit que la décision de prêt doit fixer des modalités uniformes pour l'obtention de chaque prêt, soit le montant minimal et la durée minimale d'un prêt ou d'un montant partiel à obtenir, le moment du versement et le calcul des intérêts. Ces modalités seront précisées dans la décision, compte tenu essentiellement des ressources et des possibilités techniques de la Trésorerie fédérale.

Art. 9

Obtention par l'emprunteuse

La décision de prêt permettra à l'entreprise de solliciter l'aide de la Confédération sous la forme d'un prêt de liquidités. En vertu de l'al. 1, l'emprunteuse devra soumettre une demande au DETEC pour pouvoir obtenir tout ou partie de la somme prêtée. Les exigences formulées dans la décision et dans la loi devront être satisfaites.

L'al. 2 prévoit que la demande adressée au DETEC devra préciser en particulier le montant des prêts que l'entreprise d'importance systémique souhaite obtenir ainsi que le moment où les diverses tranches seront versées. Elle devra aussi justifier le besoin de liquidités. En outre, elle devra être accompagnée d'une attestation écrite et signée par un ou plusieurs membres du conseil d'administration de l'emprunteuse ayant qualité pour la représenter. Ce document servira à attester que l'entreprise n'est pas surendettée et que tous les mesures d'autofinancement raisonnablement exigibles ont été prises. Si le DETEC soupçonne le surendettement d'une société du groupe directement ou indirectement liée à l'emprunteuse, il pourra exiger pour cette société également une attestation du conseil d'administration infirmant le surendettement de cette société. La décision de prêt pourra encore être assortie d'autres exigences relatives au contenu de la demande.

Le DETEC ordonnera le versement du prêt (al. 3) si l'entreprise n'est pas surendettée, que toutes les mesures d'autofinancement raisonnablement exigibles ont été prises et que l'évolution extraordinaire des marchés (cf. commentaire de l'art. 3, al. 1) pose des problèmes de liquidités à l'entreprise.

Tandis que la loi permet l'octroi de prêts subsidiaires pour combler un manque de liquidités, la résolution des problèmes de solvabilité incombera à l'entreprise, à ses propriétaires et à ses autres partenaires financiers. Pour éviter toute situation de surendettement qui l'empêcherait d'obtenir des prêts, l'entreprise devra par conséquent s'assurer en permanence qu'elle n'est pas surendettée et qu'elle adopte les mesures 19 / 36

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utiles pour atténuer un surendettement imminent ou déjà présent. Ces règles seront aussi valables pour les cas où un prêt serait octroyé malgré une situation de surendettement (cf. commentaire de l'art. 4, al. 3). Les mesures envisageables comprennent par exemple la postposition de financements en place, des augmentations de capital ou des abandons de créances.

Art. 10

Obligations de l'emprunteuse pendant la période de recours à des prêts

L'al. 1 contient des règles contraignantes visant à garantir que les liquidités mises à disposition par la Confédération ne seront affectées dans l'entreprise qu'aux fins prévues (cf. art. 9, al. 3). Les prescriptions s'appliqueront pendant que l'entreprise bénéficiera de prêts, c'est-à-dire tant que les sommes effectivement prêtées n'auront pas été remboursées et que la prime de risque n'aura pas été payée.

Reprenant l'art. 2, al. 2, let. b à d, et 3, let. b, de la loi du 18 décembre 2020 sur les cautionnements solidaires liés au COVID-19 (LCas-Covid-19)14, l'al. 2 dispose que l'entreprise pourra continuer à remplir ses obligations ordinaires préexistantes de paiement des intérêts et des charges d'amortissement.

Même après avoir obtenu un prêt, l'emprunteuse et les sociétés du groupe qui lui sont directement ou indirectement liées auront, au besoin, la possibilité de se restructurer ou de céder des actifs, conformément au droit en vigueur. Toutefois, des restructurations ou des cessions d'un volume assez important d'actifs fondées sur le droit des sociétés peuvent nuire au remboursement du prêt ou à la fourniture des garanties exigées pour le prêt et augmenter ainsi le risque pour la Confédération. L'interdiction absolue de toute restructuration ou cession d'actifs postérieure à l'octroi d'un prêt ne serait ni pertinente ni proportionnée. C'est pourquoi l'al. 3 précise que les restructurations et les cessions devront toujours être réalisées de manière à ce qu'elles ne compromettent ni le remboursement du prêt ni la fourniture des garanties qui y sont liées.

Les restructurations et cessions d'actifs qui ne satisfont pas ces exigences ne seront pas admises.

L'emprunteuse devra informer le DETEC avant toute cession d'actifs supérieure à 50 millions de francs et toute restructuration.

Conformément au droit cantonal ou communal et à leur concession, les entreprises exploitant des centrales (en particulier dans le secteur de l'énergie hydraulique) doivent verser régulièrement des indemnités aux cantons ou aux communes concernés (par ex. redevances hydrauliques). Ces indemnités génèrent des sorties de liquidités pour les entreprises d'importance systémique, mais elles constituent parfois aussi des sources de revenus importantes pour les collectivités publiques. Certes, un sursis légal au paiement
de ces redevances servirait l'objectif de ménager les liquidités des entreprises, mais il poserait des problèmes aux collectivités publiques concernées et offrirait une flexibilité insuffisante.

C'est pourquoi l'al. 4 prévoit l'assujettissement des entreprises d'importance systémique à l'obligation de négocier un sursis à la perception des redevances avec les 14

RS 951.26

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cantons ou les communes. Les acteurs concernés pourront ainsi convenir de solutions sur mesure qui tiennent compte à la fois de la protection des liquidités des entreprises et des besoins légitimes de liquidités des collectivités publiques.

Art. 11

Garanties

La Confédération prend des risques considérables en octroyant des prêts. Aussi, selon l'al. 1, la décision de prêt pourra-t-elle prévoir que l'emprunteuse, les sociétés du groupe qui lui sont directement ou indirectement liées ou les personnes (physiques ou morales) détenant des participations dans l'emprunteuse devront mener des négociations avec le DETEC en vue de la conclusion de conventions de droit public portant sur la constitution de garanties. Les droits de gage constitués sur des actifs, la cession de créances ou une garantie de remboursement du prêt fournie par des tiers sont ici au premier plan. Cette disposition ne permet toutefois pas à l'emprunteuse de faire valoir des garanties immédiates sur la seule base de la décision de prêt.

Le droit de gage visé à la let. a pourra porter sur des actifs de l'entreprise elle-même, des actifs de personnes ou de collectivités détenant des participations dans l'entreprise, ou encore des actifs de sociétés appartenant au même groupe que l'emprunteuse.

On peut penser par exemple ici à des droits de gage sur des actions de filiales valorisables ou de l'emprunteuse elle-même. Les contrats portant sur la constitution des garanties appropriées seront soumis au droit public. Les dispositions du CO et du code civil s'appliqueront par analogie et à titre subsidiaire (al. 2).

L'octroi à la Confédération de garanties adéquates et valablement constituées a en principe une influence positive sur les risques que cette dernière prend ou a pris. Dans cette perspective, il est justifié de réduire la prime de risque visée à l'art. 7, al. 3. La réduction sera proportionnelle à la diminution du risque, mais sera d'au moins un point de pourcentage. Or même si cette réduction s'applique, la prime de risque ne devra jamais être inférieure au seuil de 4 % fixé à l'art. 7, al. 3 (al. 3).

Art. 12

Subordination

Les prêts de la Confédération auront en principe le même rang que les financements octroyés à l'emprunteuse par des tiers. On a renoncé ici à déclarer que les prêts de la Confédération occuperont un rang plus élevé, ce qui aurait pu régulièrement poser des problèmes avec les financements existants. Mais si, malgré l'égalité de rang, un prêt prévu par la loi n'est pas compatible avec un financement existant ou si le surendettement guette l'entreprise après l'octroi d'un prêt, le DETEC pourra déclarer la postposition de créances visées dans la loi (al. 1). À cet effet, il prendra en compte une éventuelle augmentation des risques financiers encourus par la Confédération et vérifiera en particulier si la déclaration de subordination doit être assortie d'autres conditions ou limitée dans le temps, ou s'il faut la faire dépendre de la déclaration de subordination d'autres créanciers. Cette déclaration devra être structurée de manière à ce que les autres risques financiers encourus par la Confédération soient restreints au strict minimum. Compte tenu du principe de subsidiarité, le niveau de subordination et les autres modalités ne devront, en général, pas dépasser ce minimum. Si, par la suite, les liquidités de l'entreprise s'améliorent, le DETEC pourra réduire la déclaration de postposition en fonction des besoins restants, voire la supprimer.

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Dès lors que le DETEC déclarera la postposition d'une créance, la prime de risque visée à l'art. 7, al. 3, sera majorée. En revanche, le taux d'intérêt ne variera pas. La majoration de la prime de risque tiendra compte du risque supplémentaire résultant de la subordination du prêt de la Confédération, mais sera d'au moins un point de pourcentage. Or même si cette majoration s'applique, la prime de risque ne devra jamais dépasser le plafond de 10 % fixé à l'art. 7, al. 3 (al. 2).

Art. 13

Durée de la possibilité d'obtention et modalités de remboursement

Selon l'al. 1, la possibilité d'obtenir des prêts expirera le 31 juillet 2026 au plus tard.

Les prêts obtenus devront être remboursés durant la période indiquée dans la demande de l'entreprise, mais au plus tard au moment prévu dans la décision de prêt (al. 2). Peu avant ce moment, il conviendra d'octroyer des prêts avec retenue.

Art. 14

Restrictions et conditions liées à la réduction des risques encourus par la Confédération

Sur la base de cette disposition, le DETEC pourra préciser dans sa décision les restrictions et conditions à respecter afin de réduire les risques financiers que les pouvoirs publics encourent du fait de l'octroi de prêts à l'emprunteuse ou les sociétés du groupe qui lui sont directement ou indirectement liées. Les restrictions et conditions qui seront définies porteront en particulier sur les liquidités et le capital. D'un point de vue matériel, cette disposition donne au DETEC la base légale nécessaire pour intégrer dans sa décision les clauses usuelles des financements bancaires si les risques pesant sur la Confédération l'exigent. Sur le fond, ces restrictions et conditions dépendront du recours aux sommes prêtées tout en tenant compte du degré d'intervention et de l'aspect temporel. Dans la mesure où cela est ordinaire pour les financements octroyés sur les marchés, les restrictions et conditions déploieront leurs effets avant même que l'entreprise n'obtienne un prêt. Si l'emprunteuse les enfreint, le montant de la prime de risque s'en ressentira (art. 7, al. 3). Le DETEC pourra appliquer les instruments ordinaires du droit administratif, voire modifier sa décision ou, le cas échéant, décider au cas par cas de ne pas imposer les restrictions ou conditions si cela paraît supportable pour la Confédération eu égard aux risques globaux qu'elle encourt. Le DETEC disposera d'une marge d'appréciation dans ce contexte.

Section 3

Obligations des cantons et des communes et participation des cantons aux pertes sur les prêts et aux primes de risque

Art. 15

Abstention obligatoire des cantons et des communes

Ayant valeur de clause générale, l'art. 15 dispose que les cantons et les communes devront s'abstenir de tout acte pouvant retarder ou compromettre le remboursement des prêts. Ils n'auront pas non plus le droit de compromettre les éventuelles garanties octroyées.

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Art. 16

Participation des cantons aux pertes sur les prêts et aux primes de risque

Le projet de loi dispose que la Confédération soutiendra les entreprises d'importance systémique, dont la plupart appartiennent aux cantons et aux communes. Ce soutien permettra de garantir l'approvisionnement de toute la Suisse en électricité et pas seulement celui des cantons où les entreprises concernées exercent leurs activités ou encore celui des cantons qui sont (indirectement) propriétaires de ces entreprises. Si la Confédération subit des pertes définitives sur les prêts augmentés des intérêts et des primes de risque, le solde sera mutualisé. Cela signifie que la Confédération prendra en charge 50 % de ces pertes et les cantons, les 50 % restants (al. 1).

L'al. 2 précise que les primes de risque perçues par la Confédération seront redistribuées pour moitié aux cantons. Pour des raisons de symétrie, il est indispensable que les cantons obtiennent une part des primes perçues, étant donné qu'ils supportent une partie du risque lié aux pertes.

Le montant des pertes réalisées et des primes de risque perçues sera réparti entre les cantons en fonction de la part du produit intérieur brut (PIB) que ceux-ci ont fournie en 2020 (al. 3).

Section 4

Financement

Art. 17

Crédit d'engagement

Le DETEC a besoin d'un crédit d'engagement pour pouvoir donner aux entreprises d'importance systémique la possibilité d'obtenir un prêt. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose au Parlement d'approuver à ce titre un montant de 10 milliards de francs. Le Parlement arrêtera le crédit d'engagement sous la forme d'un arrêté fédéral simple non sujet au référendum.

À l'heure actuelle, le Conseil fédéral juge peu probable que la Confédération doive réellement octroyer des prêts à une entreprise. Il renonce donc pour l'instant à solliciter des crédits budgétaires devant le Parlement. Si des prêts devaient être octroyés et versés, le Conseil fédéral proposerait au Parlement, le moment venu, un crédit supplémentaire urgent au sens de l'art. 34 de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances (LFC)15. La Délégation des finances devrait ensuite se prononcer à ce sujet. On peut partir du principe qu'un éventuel prêt remplira les conditions énoncées à l'art. 15 LFC aux fins de sa comptabilisation en tant que dépense extraordinaire.

Art. 18

Forfait de mise à disposition

La Confédération percevra un forfait de mise à disposition annuel auprès des entreprises d'importance systémique (art. 1).

Selon l'al. 2, ce forfait sera calculé d'après le rendement d'un emprunt quadriennal de la Confédération équivalant au crédit d'engagement approuvé au moment de l'entrée en vigueur de la loi. En présence d'un rendement négatif, il s'élèvera au minimum à 0 %. Il se basera également sur les coûts que la Confédération devra supporter 15

RS 611.0

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lorsqu'elle fera appel à des tiers pour l'exécution de la loi. La réglementation sert d'une part et surtout à couvrir les coûts incombant à la Confédération pour la mise à disposition des liquidités requises. D'autre part, elle vise à éviter toute distorsion de la concurrence, indépendamment des coûts effectifs. Ainsi, cette disposition garantit que la Confédération n'octroiera pas des liquidités à des conditions plus avantageuses qu'un établissement bancaire. Devant veiller à respecter à la fois le principe de couverture des coûts et l'équité concurrentielle, le forfait prévu ne sera pas une contribution causale fixée en fonction des coûts.

L'al. 3 garantit que le forfait de mise à disposition ne s'additionnera pas aux intérêts et primes de risque dus. Une entreprise recourant à des prêts s'acquittera des intérêts et primes de risque qui y sont liés. Ceux-ci seront déduits du forfait qui sera perçu la même année. Si les intérêts et primes de risque dépassent le forfait dû la même année, celui-ci ne sera pas perçu.

L'al. 4 permet une majoration du forfait de mise à disposition si celle-ci est nécessaire pour éviter toute distorsion de la concurrence. Une telle majoration sera par exemple requise s'il le forfait de mise à disposition est plus avantageux que les émoluments liés à l'octroi d'un crédit bancaire et de financements comparables accordés aux entreprises aux conditions du marché.

L'al. 5 énonce que le forfait de mise à disposition sera réparti à parts égales entre toutes les entreprises d'importance systémique. Le DETEC le facturera une fois par an et informera les entreprises de toute majoration fondée sur l'al. 4.

Comme ce qui est le cas pour la prime de risque et les intérêts, le projet n'interdit plus explicitement de répercuter le forfait de mise à disposition sur les consommateurs finaux qui se procurent de l'électricité pour garantir leur propre approvisionnement de base. La régulation des prix de l'électricité exclut déjà la prise en compte du forait de mise à disposition dans les coûts de l'approvisionnement de base (cf. commentaire de l'art. 7).

Section 5

Obligations de renseigner et traitement des données

Art. 19

Obligations de renseigner

L'al. 1 dispose les entreprises d'importance systémique et les sociétés du groupe qui lui sont directement ou indirectement liées, ainsi que leurs organes de révision et les personnes et entreprises auxquelles elles font appel pour leurs activités comptables ou fiduciaires seront tenus de communiquer aux autorités compétentes de la Confédération, ElCom et Contrôle fédéral des finances (CDF) compris, ainsi qu'aux éventuels tiers mandatés (cf. art. 25, al. 3) toutes les informations et données nécessaires à l'exécution de la loi, notamment à l'octroi, à la gestion, à la surveillance et au règlement des prêts et des garanties. Les autorités fédérales concernées mettront en place avec les entreprises une procédure d'échange d'informations régulier qui tienne compte notamment des besoins des autorités. Celles-ci pourront aussi prescrire un format de données et les entreprises devront s'y conformer.

Compte tenu du niveau d'intervention requis et de leur limitation au strict nécessaire pour l'exécution, les obligations d'informer et de renseigner varieront en fonction du moment. En d'autres termes, elles seront moins étendues (et se limiteront au strict 24 / 36

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minimum) avant l'adoption d'une décision relative à l'octroi d'un prêt qu'après le dépôt d'une demande visant l'adoption d'une telle décision. Les informations et documents qui seront réclamés avant l'adoption d'une décision de prêt serviront en particulier à évaluer les risques, analyser toute modification des liquidités nécessaires et examiner rapidement l'obtention éventuelle d'un prêt ou la mise en oeuvre visée à l'art. 9, al. 3.

Les al. 2 et 3 précisent à partir de quel moment les entreprises devront fournir quelles informations. La fourniture des données sera échelonnée, certaines devant être mises à la disposition des autorités dès le début de la procédure et d'autres, seulement au besoin (au cas par cas). Dès l'entrée en vigueur de la loi, une entreprise sera ainsi tenue, en vertu de l'al. 2, de livrer des informations et des documents sur sa situation financière (let. a) et sur les opérations de négoce de l'énergie qu'elle a conclues (let. b). Elle devra aussi justifier dûment les évolutions du marché qui la contraindront à détenir des liquidités supplémentaires pour garantir sa solvabilité (let. c). Par opérations de négoce de l'énergie conclues (let. b), on entend tous les contrats et produits dérivés portant sur la fourniture, l'acquisition ou le transport de l'énergie, qui sont conclus notamment sur des plateformes européennes de bourse ou de courtiers ou, hors bourse, avec d'autres entreprises du secteur de l'électricité (over the counter) et dont le lieu de destination est l'Union européenne (UE) ou la Suisse.

Dès lors qu'elle déposera une demande fondée sur l'art. 4, al. 1, l'entreprise devra en outre (al. 3) remettre le plan financier portant sur la période de validité de la loi (let. a), fournir des informations sur le montant et le degré d'utilisation des prêts et lignes de crédit octroyés par des partenaires financiers existants (let. b), justifier les positions ouvertes (en particulier la valeur de ces positions) auprès de contreparties (let. c) et donner des informations distinctes sur ses appels de marge sur l'ensemble des marchés organisés (let. d).

Dans tous les cas, elle devra fournir les informations et documents requis assez tôt afin de permettre la mise en place des mesures de prévention qui s'imposent. Les faits qui se sont produits avant le dépôt de la demande ou
avant l'entrée en vigueur de la loi seront aussi concernés par les obligations de renseigner et d'informer si les informations et documents visés sont nécessaires à l'exécution de la loi. Dans les cas incluant des contrats de prêt (art. 5), les renseignements et documents visés à l'al. 3 ne seront pas requis à l'entrée en vigueur de la loi, mais devront être fournis seulement lors des négociations contractuelles.

L'obligation d'informer et de renseigner comprend ­ par effet miroir ­ le droit de la Confédération (y c. ElCom, CDF et éventuels tiers mandatés) de demander aux entreprises de lui remettre les données personnelles et les informations dont elle a besoin pour gérer, surveiller et exécuter les prêts fondés sur la loi, ainsi que pour prévenir et combattre les abus et engager des poursuites contre leurs auteurs. La prescription d'un format de données approprié sera possible. La Confédération pourra aussi demander des informations à des entreprises dont l'importance systémique n'est pas clairement établie.

Selon l'al. 4, les entreprises concernées devront fournir tous les documents et renseignements nécessaires à l'examen de l'importance systémique visé à l'art. 2, al. 3 et 4,

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en particulier les documents et informations prévus à l'al. 2, let. b (documents et informations sur les opérations de négoce de l'énergie conclues), et à l'al. 3, let. b (informations sur le montant et le degré d'utilisation des prêts et lignes de crédit des partenaires financiers existants) et c (positions ouvertes auprès de contreparties).

Art. 20

Traitement des données

Cette disposition s'inspire de l'art. 11 LCaS-Covid-19. L'échange de toutes les informations et données nécessaires visé à l'al. 1 est impératif pour la Confédération. Il sert aussi, entre autres, à prévenir et combattre les abus et à engager des poursuites contre leurs auteurs. Il est également essentiel pour l'examen de l'importance systémique d'une entreprise.

Les autorités fédérales compétentes, ElCom et CDF compris, ainsi que les tiers mandatés visés à l'art. 25, al. 3, pourront traiter, apparier et se communiquer mutuellement toutes les données personnelles et les informations nécessaires à la gestion, à la surveillance et au règlement des prêts et éventuelles garanties fondés sur la loi ainsi qu'à la prévention des abus, la lutte contre ceux-ci et à l'engagement de poursuites contre leurs auteurs. L'al. 1 assure l'échange nécessaire d'informations et de données. L'ElCom est expressément mentionnée en raison de sa fonction d'autorité de régulation indépendante du secteur de l'électricité. Elle observera non seulement l'évolution des marchés, mais également le comportement des entreprises et les éventuels effets de ce dernier sur les risques qu'elles encourent (art. 24).

L'al. 2 précise que les autorités et tiers mandatés pourront s'échanger les informations qu'une entreprise du secteur de l'électricité aura éventuellement remises à titre volontaire, pour autant que cet échange soit utile à l'examen des liquidités et à la surveillance de la sécurité de l'approvisionnement.

L'al. 3 indique expressément que le secret bancaire, fiscal, statistique, de la révision ou de fonction ne pourra être invoqué contre le traitement, l'appariement et la communication des données personnelles et des informations.

Comme l'art. 11 LCaS-Covid-19, cette disposition considère le CDF comme une autorité fédérale compétente en la matière (cf. art. 8, al. 1, let. c, de la loi du 28 juin 1967 sur le Contrôle des finances16). Dans le cas présent, les données personnelles et les informations comprennent tant les données relatives aux personnes physiques que les données relatives aux personnes morales.

Il est impératif de garantir une transparence aussi élevée que possible à propos de la mise à disposition des prêts. En même temps, les informations et données des entreprises privées concernées sont sans aucun doute
très sensibles. Elles pourraient contenir des secrets d'affaires ou de fabrication au sens de la LTrans. Compte tenu de la sensibilité avérée de ces données et informations et à des fins de clarté juridique, le projet de loi limite le champ d'application matériel de la LTrans. L'al. 4 constitue donc une disposition spéciale au sens de l'art. 4, let. a, LTrans. En revanche, il ne limite en rien l'échange d'informations et de données entre les offices compétents,

16

RS 614.0

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ElCom comprise. Il vise à garantir que les unités administratives chargées de l'exécution de la loi recevront rapidement toutes les informations pertinentes de la part des entreprises d'importance systémique. Si une entreprise doit craindre en permanence de devoir autoriser les unités administratives à accéder aux informations et documents mis à disposition, il peut arriver que les informations requises ne soient pas fournies ou ne soient fournies qu'en partie ou avec beaucoup de retard. Une réglementation au contenu sensiblement similaire figure à l'art. 14 de la loi fédérale du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer17.

Il est toutefois indéniable que la transparence concernant l'action de l'État est importante et nécessaire. Cette transparence sera assurée d'une autre manière, par la publication appropriée des principaux résultats, indicateurs et conditions-cadres. Le public disposera ainsi d'informations qui auront été triées en amont de manière à en garantir la pertinence, au moyen desquelles il pourra évaluer les aides financières et qu'il pourra consulter dans le respect des règles de confidentialité correspondantes, sans qu'il soit possible de tirer des conclusions sur les affaires internes des entreprises concernées.

Section 6

Exceptions applicables aux entreprises d'importance systémique en présence de mesures cantonales équivalentes

Art. 21

Exigences relatives aux mesures cantonales

La loi a pour but de contribuer à la sécurité du système suisse d'approvisionnement en électricité. À cet effet, il est prévu que les entreprises d'importance systémique soient dotées de suffisamment de liquidités pour éviter une insolvabilité ou un surendettement qui pourrait causer la défaillance de l'approvisionnement en électricité. Les prêts qui seront octroyés en vertu de la section 2 de la loi servent à atteindre cet objectif.

Pour des questions de fédéralisme, les entreprises présentant une importance systémique à l'échelle nationale ne seront pas assujetties au mécanisme de sauvetage de la Confédération si un ou plusieurs cantons leur garantissent une protection équivalente à celle de la Confédération. C'est pourquoi la loi prévoit que les entreprises d'importance systémiques seront exemptées de la plupart des exigences légales en présence de mesures cantonales équivalentes.

Les exigences imposées aux mesures cantonales visent à garantir que celles-ci déploient des effets équivalents à ceux du mécanisme de protection fondé sur la loi. Ces mesures devront notamment résider dans la mise à disposition très rapide de liquidités suffisantes pour protéger une entreprise d'importance systémique contre le manque de liquidités et le surendettement.

Si les mesures des cantons permettent d'atteindre le but de la loi, il est judicieux d'en reconnaître la priorité (al. 1). Ainsi, une entreprise systémique bénéficiant d'une aide cantonale ne sera soumise qu'aux art. 1 et 2, 19 et 20 (obligations de renseigner et traitement des données), 21 et 22 (exigences relatives aux mesures cantonales et engagements de liquidités insuffisants) et 24 et 25 (observation et exécution).

17

RS 742.101

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L'al. 2 précise que les mesures relevant du droit cantonal devront inclure tous les éléments énoncés afin que leur adéquation matérielle soit reconnue. À cet effet, il faudra que l'entreprise reçoive les liquidités requises dans un délai de trois jours ouvrés (let. b). Celles-ci devront en outre être utilisées à des fins clairement définies (let. c).

Pour que les mesures soient aussi jugées adéquates d'un point de vue formel (al. 3), les bases légales des cantons devront rester en vigueur au moins jusqu'à l'expiration de la durée de validité de la loi et permettre l'application des mesures visées à l'al. 2 (let. a). En outre, elles devront remplir toutes les exigences du droit cantonal des finances (let. b).

La satisfaction de ces exigences vaudra comme preuve de l'équivalence entre les mesures cantonales et le mécanisme de sauvetage de la Confédération.

Aucune décision explicite ne sera nécessaire pour exempter formellement une entreprise (d'une partie) des dispositions prévues par la loi. Une décision de constatation sera toutefois possible dans ce contexte si le DETEC doit par exemple supposer que l'entreprise croit bénéficier de la dérogation visée à l'art. 21.

Art. 22

Engagements de liquidités insuffisants

Lorsque, au terme d'un délai de dix jours, les mesures cantonales ne satisfont plus les exigences de l'art. 21, toutes les dispositions de la loi s'appliqueront de plein droit aux entreprises concernées.

Section 7

Responsabilité de la Confédération et obligation d'observer et d'informer de l'ElCom

Art. 23

Responsabilité

La réglementation proposée à l'art. 23 correspond à celle de l'art. 19 de la loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers 18. Le message du 1er février 2006 concernant cette loi19 précise qu'une très large responsabilité causale pourrait notamment pousser l'autorité à pécher par excès de prudence, ce qui aurait en fin de compte des répercussions négatives sur les acteurs concernés et compromettrait l'atteinte du but de la loi. À l'instar de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), le DETEC adaptera son action à la taille et à la nature de l'entreprise d'importance systémique et aux risques que celle-ci représente. À noter également que les entreprises d'importance systémique bénéficient d'une très grande responsabilité individuelle et d'une très vaste liberté économique, si bien que les autorités compétentes ne pourront pas être tenues pour responsables de tous les dommages causés à ces entreprises.

En vertu de l'al. 1, la responsabilité de la Confédération, de ses organes, de son personnel et des tiers mandatés par elle sera régie par la loi du 14 mars 1958 sur la responsabilité (LRCF)20, sous réserve de l'al. 2. Les personnes entrant dans le champ d'application de la LRCF sont désignées aux art. 1 et 2 de cette loi.

18 19 20

RS 956.1 FF 2006 2741, 2757 RS 170.32

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L'al. 2 dispose que les acteurs visés à l'al. 1 seront responsables uniquement s'ils ont violé des devoirs de fonction essentiels ou si les dommages ne sont pas dus à une violation des obligations par l'emprunteuse.

Art. 24

Obligation d'observer et d'informer de l'ElCom

L'ElCom observera l'évolution des marchés et ses éventuelles incidences sur les entreprises du secteur de l'électricité (al. 1).

En vertu de l'al. 2, elle devra rendre compte régulièrement de ses observations aux autorités fédérales compétentes visées à l'art. 25.

Section 8

Dispositions finales

Art. 25

Exécution

L'al. 1 dispose que le DETEC aura compétence pour exécuter la loi, à moins que celle-ci ne délègue cette compétence à une autre autorité fédérale. En vertu de sa compétence de décision générale, le DETEC devra statuer sur les litiges auxquels l'exécution de la loi donnera éventuellement lieu. Sa décision pourra faire l'objet d'un recours.

Selon l'al. 2, le DETEC sera compétent pour l'octroi des prêts. Dans tous les cas, cet octroi sera fondé sur une décision ou un contrat et requerra l'accord du DFF.

L'al. 3 prévoit que le DETEC pourra faire appel à d'autres unités administratives de la Confédération, en particulier l'ElCom, et à des tiers pour les tâches d'exécution comme l'octroi, la gestion, la surveillance et le règlement des prêts et éventuelles garanties.

La loi ne contient pas de dispositions pénales. Celles d'autres lois (par ex. code pénal21 ou loi du 5 octobre 1990 sur les subventions [LSu]22) seront toutefois applicables.

Art. 26

Effet suspensif

Compte tenu de l'urgence, les recours contre une décision prise en vertu du projet de loi n'auront pas d'effet suspensif, conformément à l'art. 55, al. 5, de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative23.

Art. 27

Référendum et entrée en vigueur

Selon l'al. 1, la loi est déclarée urgente. Il pourra ainsi entrer en vigueur avant l'expiration du délai référendaire, mais sa durée de validité devra être limitée (art. 165, al. 1, Cst.).

Selon l'al. 2, la loi entrera en vigueur le [...] et aura effet jusqu'au 31 décembre 2026.

21 22 23

RS 311.0 RS 616.1 RS 172.021

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5.2

Commentaire de l'arrêté fédéral

La loi fédérale est soumise au Parlement avec un arrêté fédéral relatif à un crédit d'engagement de 10 milliards de francs.

Le montant de 10 milliards de francs résulte d'une estimation. Les besoins d'une entreprise dépendent, d'une part, des prix de l'électricité (difficilement estimables à l'avance) et, d'autre part, des opérations de négoce conclues auparavant. Le projet vise notamment à avoir un effet préventif et psychologique et à montrer que l'État est prêt à fournir des liquidités aux entreprises qui en ont besoin de toute urgence. Il est cependant évident que les entreprises en difficulté auront besoin de montants considérables le moment venu. Ainsi, les médias ont rapporté qu'Alpiq a demandé, à la fin de 2021, des liquidités d'un montant supérieur à 1 milliard de francs. Le mécanisme de sauvetage mis en place en Allemagne peut également servir de comparaison: il s'élève à 100 milliards d'euros. Le PIB allemand est environ cinq fois plus important que le PIB suisse, de sorte que le montant de 10 milliards de francs prévu pour la Suisse semble proportionné.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

Il est très difficile de déterminer la mesure dans laquelle le projet influera sur les finances de la Confédération. Dans l'idéal, l'adoption de la loi et les mécanismes qui y sont proposés contribueront à apaiser les marchés concernés avant qu'un prêt ne doive être octroyé à une entreprise d'importance systémique. Le cas échéant, la Confédération courra des risques financiers qui seront indemnisés au moyen d'un intérêt et d'une prime de risque. Si un ou plusieurs prêts ne sont pas remboursés, elle pourra subir, dans le pire des cas, des pertes se chiffrant au total par milliards. À l'inverse, il est possible que la Confédération tire des millions de bénéfices sur les intérêts et les primes de risque perçus durant la période allant de l'octroi au remboursement intégral de l'un ou plusieurs prêts.

Le forfait de mise à disposition permettra de couvrir non seulement les coûts liés à la mise à disposition des liquidités par la voie du crédit d'engagement de 10 milliards de francs, mais aussi les coûts externes de la Confédération. Ce sont ainsi les entreprises qui indemniseront l'essentiel de la garantie d'État fournie par la Confédération.

Étant donné qu'il est très difficile de savoir avec certitude si des prêts directs de la Confédération seront effectivement nécessaires, aucun crédit budgétaire n'est demandé au Parlement. Au besoin, le Conseil fédéral proposera à la Délégation des finances d'accorder un crédit supplémentaire urgent au sens de l'art. 34 LFC. Si des ressources financières étaient versées, les prêts pourraient être considérés comme des dépenses extraordinaires au sens de l'art. 15 LFC.

Il n'est pas encore possible d'évaluer quelles conséquences les dispositions proposées auront sur le personnel de la Confédération. La Confédération, plus précisément

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l'OFEN et l'Administration fédérale des finances, pourrait temporairement avoir besoin de personnel supplémentaire pour l'exécution de la loi, pour la gestion des prêts ou la surveillance du respect des prescriptions. Une aide externe sera aussi requise.

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

La loi faisant l'objet du présent message contribuera à renforcer la sécurité d'approvisionnement de la Suisse en électricité. Les cantons et les communes en profiteront également, qu'ils détiennent des participations directes ou indirectes dans les entreprises d'importance systémique.

Les aides financières destinées aux entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique ne seront octroyées qu'à titre subsidiaire. Le Conseil fédéral est d'avis qu'il incombe en premier lieu aux entreprises ainsi qu'aux cantons et aux communes qui en sont propriétaires de prendre en permanence toutes les mesures qui s'imposent pour surmonter les crises, garantir la pérennité des entreprises concernées et, en fin de compte, éviter les aides financières de la Confédération. Celle-ci ne sont prévues qu'en cas d'évolution extraordinaire des marchés rendant probables l'insolvabilité et une procédure de faillite ou de sursis concordataire. Les pertes que la Confédération est susceptible de subir sur les prêts octroyés seront mutualisées. Cela signifie que la Confédération prendra en charge 50 % de ces pertes et les cantons, les 50 % restants.

Étant donné qu'ils supportent une partie du risque de perte, les cantons recevront la moitié du montant perçu par la Confédération au titre de la prime de risque sur les prêts. Tant les pertes que les primes de risque seront réparties entre les cantons en fonction de la part du PIB que ceux-ci ont fournie en 2020.

6.3

Conséquences économiques

Selon le dossier sur les dangers encourus par la Confédération, une panne d'électricité de grande ampleur causerait de graves préjudices aux personnes, d'immenses dommages patrimoniaux et une atteinte majeure à la capacité économique du pays. Étant donné qu'il contribuera à renforcer la sécurité d'approvisionnement de la Suisse en électricité, le projet peut être considéré comme positif pour l'économie nationale.

À noter toutefois que le présent projet de loi peut avoir des incitations inopportunes.

En d'autres termes, il est par exemple possible que la perspective d'une aide financière de la Confédération amène les entreprises assujetties à prendre davantage de risques ou leurs propriétaires à négliger des mesures de prévention qui s'imposent. C'est pourquoi les conditions strictes auxquelles la loi lie une aide financière de la Confédération sont nécessaires.

D'un point de vue réglementaire, les aides financières fondées sur le projet de loi ne peuvent être que transitoires. À moyen terme, il faudra mettre en oeuvre des mesures et des règles qui rendent inutile l'aide de la Confédération en cas de crise (prescriptions BCM, loi sur l'intégrité et la transparence du commerce de gros de l'électricité 31 / 36

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et du gaz, prescriptions concernant les liquidités et la dotation en capital des entreprises).

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

Le but de la loi est de permettre à la Confédération d'octroyer des aides financières aux entreprises d'importance systémique, essentielles pour la sécurité d'approvisionnement, en cas d'évolution extraordinaire des marchés posant des problèmes de liquidités aux entreprises et rendant par la suite probable un manque de liquidités ou un surendettement. La loi servira donc en fin de compte à continuer à garantir l'approvisionnement de la Suisse en électricité.

Aussi la loi repose-t-elle sur l'art. 91 Cst., qui fonde notamment la loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité (LApEl)24. L'art. 91, al. 1, Cst. habilite la Confédération à légiférer sur le transport et la livraison de l'électricité. Dans son message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité25, le Conseil fédéral a notamment précisé que, sur la base de l'art. 91, al. 1, Cst., la Confédération pouvait monopoliser le transport de l'électricité et prévoir des mesures visant à garantir l'approvisionnement, telles que des obligations de raccordement et de fourniture. La doctrine confirme également que les prescriptions en matière d'approvisionnement sont couvertes par l'art. 91 Cst. On en trouve déjà des exemples dans la législation sur l'énergie en vigueur.

Bien que la Confédération soit habilitée à réglementer la sécurité d'approvisionnement en électricité, elle n'est pas la seule autorité compétente dans ce domaine, en particulier pour ce qui est de la production d'électricité. En outre, elle n'est pas propriétaire d'entreprises actives dans le secteur de l'électricité. Aussi la Constitution impose-t-elle également que le mécanisme de protection fédéral fondé sur le projet de loi soit déployé seulement à titre subsidiaire.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Les mesures prévues constituent des subventions entrant dans le champ d'application de l'accord OMC du 15 avril 1994 sur les subventions et les mesures compensatoires26 relatives aux marchandises (dans lesquelles l'électricité peut être incluse). Bien qu'elles ne fassent pas partie des subventions prohibées par cet accord (celui-ci concernant les subventions subordonnées aux résultats de l'exportation et les subventions subordonnées à l'utilisation de produits nationaux de préférence à des produits impor-

24 25 26

RS 734.7 FF 2005 1493 1559 RS 0.632.20, annexe 1A.13

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tés), les mesures prévues peuvent, potentiellement, être qualifiées de mesures spécifiques du fait de leur application à des entreprises bien déterminées. La subvention prévue pourrait inciter un autre État membre de l'OMC à introduire une procédure de règlement des différends ou des mesures compensatoires à l'encontre de la Suisse s'il y avait lieu de considérer que la subvention de la Suisse aurait de graves effets défavorables sur d'autres États membres (en particulier la capacité de causer un dommage à un secteur économique du pays).

La plupart des accords de libre-échange contiennent aussi des dispositions relatives aux subventions ou renvoient à l'accord OMC sur le sujet. Aux termes de l'accord de libre-échange du 22 juillet 1972 entre la Suisse et l'UE27, les mesures prévues sont des aides publiques (art. 23, par. 1, ch. iii). Elles peuvent être jugées incompatibles avec le bon fonctionnement de l'accord si elles faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions et, partant, si elles sont susceptibles d'affecter les échanges entre la Suisse et l'UE. Les parties contractantes interprètent les dispositions de l'accord de manière autonome. Celui-ci ne définit pas de dérogations légales ou discrétionnaires concernant les aides admises. Il laisse en revanche une certaine marge de manoeuvre aux parties contractantes pour évaluer les mesures et s'y opposer. Selon l'art. 23, par. 2, en relation avec l'art. 27, par. 3, let. a, les parties contractantes peuvent saisir le comité mixte si elles estiment qu'une pratique donnée est incompatible avec le bon fonctionnement de l'accord, au sens de l'art. 23, par. 1. Divers autres États ayant pris des mesures semblables à celles qui font l'objet du présent message, le Conseil fédéral juge improbable qu'un autre pays engage une procédure contre la Suisse.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Il est prévu que le Parlement adopte la loi en tant que loi fédérale urgente au sens de l'art. 165, al. 1, Cst. Compte tenu du contexte actuel, elle ne peut pas être repoussée à plus tard. Elle doit entrer en vigueur immédiatement et sa validité doit être limitée dans le temps. Elle doit être adoptée par la majorité des membres des deux conseils.

Sujette au référendum, elle sera, le cas échéant, soumise au vote du peuple. Si elle n'est pas acceptée, elle cessera de produire un an après son adoption par l'Assemblée fédérale.

Pour que la Confédération puisse octroyer les prêts prévus par la loi, le Parlement doit l'autoriser à prendre les engagements correspondants. C'est pourquoi un arrêté fédéral simple relatif à un crédit d'engagement de 10 milliards de francs est soumis aux Chambres fédérales en même temps que la loi.

7.4

Frein aux dépenses

Conformément à l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., l'art. 4, al. 1, de la loi fédérale sur des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de 27

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l'électricité d'importance systémique requiert l'approbation de la majorité des membres des deux conseils, car cette disposition entraîne une subvention unique de plus de 20 millions de francs.

L'art. 1 de l'arrêté fédéral relatif à un crédit d'engagement pour des aides financières subsidiaires destinées au sauvetage des entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique doit également être approuvé par la majorité des membres des deux conseils. Une aide financière accordée en vertu de la loi peut entraîner des dépenses uniques de plus de 20 millions de francs.

7.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Les entreprises du secteur de l'électricité d'importance systémique qui pourraient avoir recours à un prêt sont en mains privées. En outre, il est possible que les cantons et les communes y aient des participations financières. Il appartient donc en premier lieu aux particuliers, ainsi qu'aux cantons et aux communes, de soutenir financièrement leur entreprise. C'est pourquoi l'art. 3 de la loi prévoit qu'une aide de la Confédération ne peut être que subsidiaire.

Le respect du principe d'équivalence fiscale est garanti par la réglementation de l'art. 21. En général, les entreprises et, par conséquent, leurs propriétaires seront euxmêmes chargés de fournir les garanties financières liées au négoce de l'électricité.

Tant que les cantons seront capables de prendre les dispositions nécessaires pour aider les entreprises d'importance systémique à faire face à l'évolution extraordinaire des marchés, la Confédération n'interviendra pas. Étant donné que ce genre d'évolution peut nécessiter la fourniture rapide d'une aide financière potentiellement considérable, le soutien de la Confédération sera crucial pour garantir le maintien d'un approvisionnement suffisant en électricité.

7.6

Conformité à la loi sur les subventions

Conformément à l'art. 91, al. 1, Cst., la Confédération légifère sur le transport et la livraison d'énergie électrique. Selon le message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité28, la Confédération peut notamment, en vertu de sa compétence législative étendue, soumettre le transport à un monopole, décréter des prescriptions tarifaires, réglementer le secteur de l'électricité, instaurer un droit d'accès au réseau ou prévoir des mesures en matière de sécurité de l'approvisionnement, telles que des obligations de raccordement au réseau ou de fourniture d'électricité.

La défaillance d'une entreprise du secteur de l'électricité d'importance systémique pourrait entraîner des coupures de courant en Suisse et à l'étranger. La Confédération

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a tout intérêt à ce que l'approvisionnement en électricité puisse être garanti sans interruption. Si les propriétaires d'une entreprise ne parviennent pas à lui apporter un soutien financier suffisant, la Confédération pourra intervenir.

Selon l'art. 4, les aides financières de l'État seront subsidiaires aux mesures prises par l'entreprise du secteur de l'électricité et ses propriétaires. Cela correspond aux prescriptions générales de la LSu, qui autorise les aides financières lorsque la tâche ne peut être dûment accomplie sans l'aide financière de la Confédération et que les efforts d'autofinancement qu'on peut attendre de l'entreprise ont été accomplis et que toutes les autres possibilités de financement ont été épuisées (art. 6, let. c et d, LSu).

La durée de validité de la loi est limitée à la fin de l'année 2026.

7.7

Protection des données

En vertu de l'art. 19, les entreprises d'importance systémique seront tenues de fournir les informations et renseignements nécessaires à l'exécution de la loi.

L'art. 20 permet aux autorités compétentes de la Confédération ainsi qu'à l'ElCom, au CDF et à des éventuels tiers mandatés de traiter, d'apparier et de se communiquer mutuellement les données personnelles et les informations nécessaires à l'octroi, à la gestion, à la surveillance et au règlement des prêts et des garanties ou, de toute autre manière, à l'exécution de la loi.

L'art. 20, al. 3, dispose expressément que le secret bancaire, fiscal, de la révision ou de fonction ne pourra pas être invoqué contre la collecte, le traitement, l'appariement et la communication de données personnelles et d'informations entre les autorités et les personnes mentionnées à l'art. 20, al. 1. L'échange, le traitement et l'appariement appropriés des données sont des conditions indispensables à l'octroi, à la gestion, à la surveillance et au règlement des prêts et des garanties, ainsi qu'à l'exécution des aides financières. Inspirée de la LCaS-COVID-19, la restriction des droits au secret mentionnés a démontré son efficacité dans ce contexte.

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