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20.456 Initiative parlementaire Loi fédérale sur les résidences secondaires. Supprimer les restrictions inutiles et fâcheuses en matière de démolition et de reconstruction de logements créés selon l'ancien droit Rapport explicatif de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national du 24 avril 2023

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de modification de la loi fédérale sur les résidences secondaires que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

24 avril 2023

Pour la commission: Le président, Jacques Bourgeois

2023-1629

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Condensé Les expériences réalisées depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les résidences secondaires montrent que la loi et la jurisprudence qui en découle entraînent parfois des restrictions considérables lors de la rénovation de logements créés selon l'ancien droit. Le but du projet est de créer des possibilités de transformation et d'agrandissement supplémentaires pour ces logements. Ainsi, à l'intérieur des zones à bâtir, il doit être possible, en cas de démolition et de reconstruction d'un logement créé selon l'ancien droit, d'augmenter la surface utile principale de 30 % au maximum. En cas d'agrandissement de logements existants créés selon l'ancien droit ainsi qu'en cas de démolition et de reconstruction de tels logements, des logements et des bâtiments supplémentaires devront aussi pouvoir être créés sans qu'il soit nécessaire d'imposer des restrictions d'utilisation selon la loi fédérale sur les résidences secondaires. Si ces possibilités de transformation et d'agrandissement supplémentaires entrent en conflit avec les exigences de la protection des espaces ouverts dans le milieu bâti, des sites construits ou des résidences principales, les cantons et les communes disposent d'instruments d'aménagement du territoire appropriés pour les éviter.

Contexte En vertu de la loi fédérale en vigueur sur les résidences secondaires, les logements créés selon l'ancien droit, soit les logements qui avaient été créés de manière conforme au droit en vigueur avant le 11 mars 2012 ou qui étaient au bénéfice d'une autorisation définitive à cette date, peuvent être démolis et reconstruits dans les limites des surfaces utiles préexistantes. Lorsque les logements sont non pas démolis, mais agrandis, l'agrandissement ne peut excéder 30 % des surfaces utiles principales qui existaient le 11 mars 2012 dans la mesure où il n'en résulte aucun logement supplémentaire. Lorsque les logements sont agrandis de plus de 30 %, l'agrandissement n'est autorisé que s'il est assorti d'une restriction d'utilisation selon la loi fédérale sur les résidences secondaires.

Du fait de ces restrictions, il peut arriver que la rénovation des logements anciens soit difficile. Dans son arrêt du 8 mai 2020, le Tribunal fédéral a confirmé que selon le droit en vigueur, la surface utile principale ne peut pas être augmentée en
cas de démolition et de reconstruction d'un logement créé selon l'ancien droit.

Contenu du projet Le projet prévoit de modifier la loi fédérale sur les résidences secondaires pour permettre, en cas de démolition et de reconstruction d'un logement créé selon l'ancien droit, d'augmenter la surface utile principale de 30 % au maximum, de créer des logements et des bâtiments supplémentaires et de reconstruire le logement ailleurs sur le bien-fonds. En outre, lors de l'agrandissement de logements existants, il sera possible de créer des logements supplémentaires pour autant que l'agrandissement n'excède pas 30 % de la surface utile principale préexistante.

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Rapport 1

Contexte

1.1

Besoins et buts

Le projet de loi du Conseil fédéral du 19 février 2014 sur les résidences secondaires prévoyait que les logements créés selon l'ancien droit, à savoir les logements qui ont été créés de manière conforme au droit en vigueur avant le 11 mars 2012 ou qui étaient au bénéfice d'une autorisation définitive à cette date, ne peuvent être agrandis qu'à la condition d'être déclarés résidence principale, logement assimilé à une résidence principale ou logement affecté à l'hébergement touristique. Le Conseil fédéral y expliquait qu'un agrandissement est contraire à l'objectif visé par l'article constitutionnel selon lequel la surface au sol habitable utilisée comme résidence secondaire doit être plafonnée (Message du 19 février 2014 concernant la loi fédérale sur les résidences secondaires, FF 2014 2209 ss [ci-après: message], p. 2232 ad art. 12 P-LRS). Les Chambres fédérales approuvèrent cependant la possibilité d'agrandir les logements créés selon l'ancien droit. Pour cette raison, la loi fédérale du 20 mars 2015 sur les résidences secondaires (LRS; RS 702) prévoit que les agrandissements de 30 % sont admissibles sans qu'il faille imposer de restrictions d'utilisation (art. 11, al. 3, LRS).

L'art. 11, al. 2, LRS prévoit aussi que les logements créés selon l'ancien droit peuvent, dans les limites des surfaces utiles principales préexistantes, être rénovés, transformés et reconstruits. Lorsque des logements supplémentaires en résultent, ceux-ci peuvent être autorisés sans restriction d'utilisation selon l'art. 7, al. 1, LRS. La question de savoir si la possibilité d'agrandissement visée à l'al. 3 vaut aussi dans le cas, prévu à l'al. 2, d'une démolition suivie d'une reconstruction s'est posée peu après l'entrée en vigueur de la loi. Sur recours de l'Office fédéral du développement territorial, le Tribunal fédéral décida, le 8 mai 2020, qu'un tel agrandissement n'est pas autorisé. Dans le cas contraire, arguait le Tribunal fédéral, la restriction de l'al. 2, qui prévoit qu'une reconstruction peut avoir lieu «dans les limites des surfaces utiles principales préexistantes», n'aurait pas de sens. Cette interprétation a été soutenue par le rapporteur de la commission lors des délibérations au Conseil des États (arrêts du Tribunal fédéral 1C_478/2019 et 1C_479/2019 du 8 mai 2020, consid. 4.1 et 4.2).

Le 19 juin
2020, le conseiller national Martin Candinas déposa l'initiative parlementaire 20.456 «Loi sur les résidences secondaires. Supprimer les restrictions inutiles et fâcheuses en matière de démolition et de reconstruction de logements créés selon l'ancien droit». L'initiative demandait de modifier la loi fédérale sur les résidences secondaires pour que des logements supplémentaires puissent être créés lors d'un agrandissement limité à 30 % des surfaces utiles principales. Elle demandait aussi qu'il soit possible, en cas de démolition et de reconstruction d'anciens logements, d'agrandir les surfaces utiles principales de 30 %, de créer des nouveaux logements et de reconstruire les logements ailleurs sur le bien-fonds. Selon l'auteur de l'initiative parlementaire, cette modification législative se justifie par le fait que depuis son entrée en vigueur, on constate que la loi fédérale sur les résidences secondaires, ainsi que la jurisprudence y relative, limitent excessivement l'utilisation des logements créés selon l'ancien droit et entravent parfois des investissements nécessaires et urgents.

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Le 20 mai 2021, la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-N) a donné suite à l'initiative parlementaire 20.456 du conseiller national Martin Candinas. La CEATE-E a approuvé à son tour l'initiative le 12 août 2021. Par la suite, la CEATE-N s'est penchée, lors de trois séances, sur l'élaboration d'un projet visant à modifier la LRS. Le 3 novembre 2022, la CEATE-N a approuvé un avant-projet, par 14 voix contre 10, et l'a envoyé en consultation. Après avoir analysés les avis exprimés dans le cadre de la consultation, la majorité de la commission a confirmé ses propositions selon l'avant-projet. Deux propositions de minorité reprenant des propositions de participants et participantes à la consultation ont été déposée. La commission a adopté le projet à sa séance du 24 avril 2023, par 14 voix contre 9 et 2 abstentions.

1.2

Modèles examinés et solution choisie

Les réflexions ont porté sur la question de savoir si les possibilités de transformation et d'agrandissement supplémentaires, prévues par l'initiative parlementaire 20.456, pour les logements érigés selon l'ancien droit sont applicables dans les communes qui comptent plus de 20 % de résidences secondaires de manière générale, ou si le champ d'application de la disposition correspondante doit être limité dans l'espace. Limiter ces possibilités à des communes expressément désignées dans le plan directeur cantonal serait par exemple envisageable. Il pourrait s'agir des communes où aucun effet d'éviction, voire aucun effet d'éviction considérable, n'est à attendre de la disposition prévue sur le marché des résidences principales. Dans le plan directeur, les communes concernées pourraient se voir confier des obligations particulières en matière d'aménagement (p. ex. mesures pour promouvoir des résidences principales financièrement accessibles ou pour encourager une meilleure occupation des résidences secondaires existantes). En complément, on pourrait exiger de limiter le champ d'application des nouvelles dispositions à certains territoires expressément désignés dans le plan d'affectation et de prendre d'autres mesures pour maintenir le parc des résidences principales (p. ex. fixation d'un pourcentage de résidences principales) et pour maintenir et améliorer la qualité du milieu bâti (p. ex. préservation des espaces ouverts typiques d'un site sur la base d'un concept des espaces ouverts, exigences d'aménagement accrues). La CEATE-N a préféré renoncer à de telles solutions en matière d'aménagement. Elle demande que l'adaptation proposée de l'art. 11, al. 2 et 3, puisse s'appliquer à toutes les communes avec plus de 20 % de résidences secondaires. Deux propositions de minorité visant à limiter géographiquement le champ d'application de la nouvelle réglementation ont été déposées.

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1.3

Interventions parlementaires avec une orientation similaire

a)

Motion du conseiller national Candinas 18.3704 «Autoriser la création de logements supplémentaires lors de l'agrandissement de logements créés sous l'ancien droit» du 15 juin 2018

La motion demandait de modifier la loi fédérale sur les résidences secondaires «de telle sorte que la création de nouveaux logements soit autorisée lors de l'agrandissement, limité à 30 % de la surface utile principale, de logements créés selon l'ancien droit. Ladite loi devra également autoriser un agrandissement de 30 % de cette surface et la création de logements supplémentaires en cas de démolition et reconstruction de l'objet concerné.» Le 15 août 2018, le Conseil fédéral demandait de rejeter la motion. Donner suite à la motion reviendrait à abolir les restrictions fixées par l'art. 11 LRS en relation avec l'art. 75b de la Constitution. L'art. 11, al. 2, de la loi tient compte de cette prescription en disposant qu'un agrandissement des surfaces utiles n'est pas autorisé lorsque le nombre de logements augmente. En revanche, l'al. 3 autorise l'agrandissement des logements, mais pas l'augmentation de leur nombre. Cette réglementation est le fruit d'un compromis politique. Elle atteint les limites de ce qu'autorise l'article constitutionnel. La motion a été classée le 19 juin 2020, car elle n'a pas été traitée dans un délai de deux ans.

b)

Initiative parlementaire du conseiller national Franz Ruppen 20.500 «Agrandissement des logements créés selon l'ancien droit. Plus de flexibilité!» du 17 décembre 2020

L'initiative parlementaire demandait de modifier l'art. 11, al. 3, de la loi fédérale sur les résidences secondaires (LRS) de manière à supprimer la règle des 30 %. Pour les logements concernés, une limitation des possibilités d'agrandissement à 30 % est très restrictive. La réalité montre que la loi actuelle et la jurisprudence limitent de manière disproportionnée l'utilisation des logements créés selon l'ancien droit. Il n'est dès lors pas rare que des propriétaires renoncent à des investissements urgents. Il devrait être pourtant possible d'entretenir et d'agrandir le bâti existant pour en faire des infrastructures modernes. L'initiative a été classée le 3 juin 2021, car son auteur a quitté le Conseil national.

1.4

Résultats de la procédure de consultation

La procédure de consultation s'est déroulée du 3 novembre 2022 au 17 février 2023: les partis et organisations invités à y participer ainsi que les autres milieux intéressés ont pu faire part de leur avis sur l'avant-projet1. Il y a eu 97 prises de position en tout.

Dans l'ensemble, le projet a été accueilli favorablement.

La plupart des cantons se sont prononcés en faveur du projet: 14 d'entre eux l'ont soutenu sans réserve, 4 ont salué son orientation générale tout en émettant des réserves, et 2 s'y sont opposés. En outre, 6 cantons ont renoncé à prendre position. Parmi 1

https://fedlex.data.admin.ch/eli/dl/proj/2022/70/cons_1

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les partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, le Centre, le PLR-Les Libéraux-Radicaux et l'UDC ont soutenu le projet, tandis que le PVL, Les VERT-E-S et le PS se sont prononcés contre. Les associations faîtières des communes, des villes, des régions de montagne et de l'économie se sont montrées favorables au projet. Ce dernier a été rejeté avant tout par des organisations de protection du patrimoine, de la nature, du paysage et de l'environnement.

La plupart des prises de position se sont limitées à des considérations générales sur le projet. Seuls quelques rares participants ont pris position sur certaines dispositions de l'avant-projet et proposé des modifications ou des compléments. Après avoir pris connaissance des résultats de la consultation, la commission se voit confortée dans l'idée d'avoir élaboré un projet susceptible de recueillir une majorité. La commission maintient donc son projet et le soumet sans modification de fond à son conseil. Deux minorités au sein de la commission proposent de reprendre des propositions de modification soumises par des participants à la consultation: d'une part en ce qui concerne les modifications du lieu d'implantation lors de la reconstruction et, d'autre part, en ce qui concerne la question des communes auxquelles la nouvelle règlementation doit s'appliquer.

2

Grandes lignes du projet

Le projet prévoit de modifier la loi fédérale sur les résidences secondaires pour permettre, en cas de démolition et de reconstruction d'un logement créé selon l'ancien droit, d'augmenter la surface utile principale de 30 % au maximum, de créer des logements et des bâtiments supplémentaires et de reconstruire le logement ailleurs sur le bien-fonds. En outre, lors de l'agrandissement de logements existants, il sera possible de créer des logements et des bâtiments supplémentaires à condition que l'augmentation de la surface utile principale n'excède pas 30 % de la surface utile principale préexistante.

Le projet vise à assouplir ponctuellement la LRS afin de contribuer à créer des logements modernes pour la population locale et à encourager le développement des régions de montagne. À l'heure actuelle, les logements créés selon l'ancien droit qui sont situés dans une commune affichant un taux de résidence secondaire supérieur à 20 % ne peuvent être modernisés que de manière limitée s'ils doivent rester libres d'utilisation. Les nouvelles conditions prévues dans le projet offrent également de nouvelles opportunités de financement pour des assainissements énergétiques. Par ailleurs, le projet permet de favoriser une densification du bâti.

Une minorité de la commission propose de ne pas entrer en matière et estime que les nouvelles possibilités de modification proposées pour les logements créés selon l'ancien droit (en particulier la possibilité de démolir les logements créés selon l'ancien droit et de les reconstruire à neuf en agrandissant au maximum de 30 % la surface utile principale préexistante, ainsi que la possibilité, dans le cadre de l'agrandissement d'un logement érigé selon l'ancien droit, d'augmenter la surface utile principale de 30 % à la construction des nouvelles unités d'habitation) vont à l'encontre de l'objectif de la Constitution, à savoir limiter le nombre des résidences secondaires et réduire les surfaces occupées par ces résidences (cf. chap. 5.1 ci-dessous). Cette minorité sou6 / 16

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ligne par ailleurs que la demande de résidences secondaires est particulièrement forte dans les communes hotspots. Elle estime donc que la nouvelle règle proposée pourrait conduire, en particulier dans ces communes, à une réduction non souhaitée de l'offre de résidences principales à prix abordable. En effet, selon elle, la population locale se trouverait encore davantage évincée des sites touristiques. Par ailleurs, à ses yeux, le projet crée une incitation à construire des bâtiments de remplacement, ce qui n'est pas opportun des points de vue climatique et énergétique.

3

Commentaire des dispositions

Art. 11 Al. 2 La disposition fusionne les actuels alinéas 2 et 3, étant donné que l'actuelle distinction entre l'agrandissement d'un logement existant érigé selon l'ancien droit et la démolition et reconstruction de celui-ci sera abandonnée. Désormais, à l'intérieur des zones à bâtir, la surface utile principale pourra être augmentée de 30 % au maximum dans les deux cas. Dans ce cadre, il sera possible de créer des logements supplémentaires sans restriction d'utilisation selon l'art. 7, al. 1 ainsi que des bâtiments supplémentaires. Demeurent réservées des dispositions plus sévères du droit cantonal ou du plan d'affectation communal (cf. al. 4).

La possibilité de déplacer légèrement l'emplacement lors de la reconstruction d'un logement créé selon l'ancien droit est déjà prévue par le droit en vigueur, sans que le texte de loi ne le dise expressément (cf. avis du Conseil fédéral du 31 août 2022 concernant l'interpellation 22.3761 du conseiller national Thomas Rechsteiner datée du 16 juin 2022, «Préciser la loi sur les résidences secondaires en ce qui concerne les logements créés selon l'ancien droit à l'intérieur de la zone à bâtir»). Cette possibilité doit être maintenue. Aux yeux de la commission, elle permettrait d'optimiser l'utilisation des surfaces de construction et de renforcer le développement de l'urbanisation vers l'intérieur.

Al. 2 (proposition de minorité) Une minorité demande pour sa part que les modifications du lieu d'implantation de la construction soient autorisées uniquement dans la mesure où elles contribuent à améliorer la situation globale et en particulier l'aspect du site.

Al. 3 La formulation correspond largement à l'actuel al. 4. Seule la phrase introductive est légèrement modifiée afin de préciser que l'al. 3 se réfère exclusivement à l'agrandissement dépassant le plafond prévu à l'al. 2 (agrandissement de la surface utile principale préexistante de 30 % au maximum).

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Al. 3bis (proposition de la minorité Clivaz Christophe, ...)

Cette disposition vise à limiter la possibilité, prévue à l'al. 2, de transformer ou de démolir et de reconstruire des logements érigés selon l'ancien droit et, ce faisant, d'agrandir de 30 % au maximum la surface utile principale préexistante, ce qui permet, dans ce cadre, de créer des logements et des bâtiments supplémentaires. La dernière partie de la disposition, selon laquelle des logements et des bâtiments supplémentaires peuvent être également créés dans ce cas de figure, ne doit pas être applicable de manière généralisée dans toutes les communes dont la part de résidences secondaires est supérieure à 20 %. Il s'agit plutôt de confier aux cantons la tâche de désigner par le droit cantonal (donc par ex. par une loi ou une ordonnance) les communes dans lesquelles cela est autorisé. L'objectif de cette disposition est de permettre aux cantons de pouvoir tenir compte de leurs particularités et besoins spécifiques. Les cantons pourraient ainsi limiter la possibilité de construire des logements et des bâtiments supplémentaires lors de la transformation ou de la démolition et de la reconstruction de logements créés selon l'ancien droit, par ex. uniquement aux communes dans lesquelles cela ne conduira vraisemblablement pas à l'éviction ou au renchérissement des résidences principales.

Al. 3bis (proposition de minorité Munz, ...)

Tout comme la minorité précédente, cette minorité souhaite limiter la possibilité d'augmenter la surface et de créer simultanément des logements et des bâtiments supplémentaires en cas de transformation ou de reconstruction d'un logement érigé selon l'ancien droit. Les options prévues à la troisième phrase de l'al. 2 doivent selon elle s'appliquer uniquement aux communes où la part de résidences principales est supérieure à 50 %. Aux yeux de cette minorité, sans une telle restriction, la population locale risque de ne plus trouver de logements abordables. En effet, si des logements créés selon l'ancien droit sont transformés et vendus comme résidences secondaires, les prix de location et d'achat des résidences principales risquent d'augmenter. C'est pourquoi la minorité estime qu'il ne faut pas encourager davantage la transformation de résidences principales en résidences secondaires dans des communes où l'offre
de résidences principales est déjà limitée.

Al. 4 Pour des raisons de systématique, l'article regroupe dans un même alinéa les deux réserves contenues actuellement aux alinéas 2 et 3, et qui disposent que les autres conditions du droit fédéral et du droit cantonal demeurent réservées et que les agrandissements hors de la zone à bâtir restent autorisés dans les limites des prescriptions relatives à la construction hors de la zone à bâtir. Pour les projets hors de la zone à bâtir, le renvoi à la législation sur l'aménagement du territoire ne doit pas s'appliquer uniquement en cas d'agrandissement, mais de manière générale en cas de modification en matière de construction et d'utilisation de logements érigés selon l'ancien droit.

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4

Conséquences

4.1

Conséquences pour la Confédération

Le projet n'a pas de conséquences pour la Confédération en matière de finances et de personnel.

4.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

90 % des résidences secondaires en Suisse se trouvent dans les cantons du Valais (31 %), des Grisons (25 %), du Tessin (16 %), de Berne (9 %) et de Vaud (9 %). Les cantons du Valais et des Grisons sont les plus concernés par la modification législative. Viennent ensuite les cantons du Tessin, de Berne et de Vaud. Les autres cantons avec des communes qui comptent plus de 20 % de résidences secondaires (dans un ordre décroissant) ­ Saint-Gall, Lucerne, Obwald, Fribourg, Glaris, Schwytz, Uri, Jura, Nidwald, Soleure, Neuchâtel, Thurgovie et Genève ­ ne devraient être que faiblement touchés.

Figure 1 Communes avec plus de 20 % de résidences secondaires selon l'inventaire des logements (état au 31 mars 2022)

En gris: communes avec plus de 20 % de résidences secondaires.

Cartes de la Suisse ­ Confédération suisse ­ map.geo.admin.ch

Dans les communes avec plus de 20 % de résidences secondaires, le nombre de logements créés selon l'ancien droit est estimé à 426 000 environ. La plupart d'entre eux se trouvent dans les communes dites «hotspots» (Tableau 2) , soit les grandes stations

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touristiques2 telles que St. Moritz, Davos, Zermatt et Gstaad. On dénombre 19 communes hotspots dans les Grisons et 11 au Tessin. On en trouve également dans les cantons de Berne (6), du Valais (5), de Vaud (5), de Lucerne (2) et d'Obwald (1).

Pour les logements créés selon l'ancien droit, la démolition et la reconstruction d'un logement plus grand s'avèrent intéressantes notamment lorsque ce logement a besoin d'être rénové ou qu'il peut, par la suite, être vendu avec de manière profitable, en tant que résidence secondaire. Les logements les plus appropriés devraient être ceux qui ont été érigés entre 1946 et 1980. Pour les logements plus anciens, l'étroitesse du terrain ainsi que les mises sous protection font souvent obstacle à un agrandissement.

En ce qui concerne les logements plus récents, les constructions sont de meilleure qualité, et la surface habitable est aussi plus vaste. Les communes avec les plus grandes parts de logements bâtis entre 1946 et 1980 se trouvent au Tessin et en Valais (Tableau 1). Toutefois, l'exploitation effective de ce potentiel dépend aussi bien du cadre légal cantonal et communal que de la pression de la construction. C'est dans les communes hotspots que cette pression est la plus forte.

Tableau 1 Communes LRS hotspots, moyennes et périphériques avec les plus grandes parts de logements bâtis entre 1946 et 1980 Hotspots

% 1946­80

Moyennes

% 1946­80

Périphériques

% 1946­80

Crans-Montana (VS)

60 %

Loèche-les-Bains (VS)

66 %

Isone (TI)

70 %

Ronco sopra Ascona (TI)

59 %

Mörel-Filet (VS)

64 %

Brusino Arsizio (TI)

69 %

Lens (VS)

58 %

Randa (VS)

59 %

Zwischbergen (VS)

68 %

Melide (TI)

54 %

Grächen (VS)

57 %

Novaggio (TI)

64 %

Adelboden (BE)

52 %

Bissone (TI)

57 %

Bodio (TI)

62 %

Engelberg (OW)

52 %

Veysonnaz (VS)

55 %

Icogne (VS)

59 %

Muralto (TI)

52 %

Vex (VS)

54 %

Flühli (LU)

58 %

Vaz/Obervaz (GR)

51 %

Bedretto (TI)

54 %

Lax (VS)

52 %

Ascona (TI)

51 %

Bettmeralp (VS)

53 %

Oberiberg (SZ)

51 %

Saas-Fee (VS)

51 %

Zernez (GR)

53 %

Vernate (TI)

49 %

Dans les communes LRS moyennes et hotspots, la part des logements qui sont utilisés en tant que résidences principales s'établit à respectivement 41 % et 43 %. Dans les communes LRS périphériques, elle atteint 60 %. Quantitativement, les communes 2

La typologie communale utilisée (distinction entre les communes LRS hotspots, moyennes et périphériques) a été développée en 2020 par Rütter Soceco pour classer les communes en fonction de l'importance des résidences secondaires pour le marché du logement (cf. Analyse des effets de la loi sur les résidences secondaires, CF, 2021, p. 17).

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LRS hotspots sont celles qui comptent le plus grand nombre de logements construits entre 1946 et 1980. Si la demande de logements se déplace vers les communes LRS moyennes ou périphériques, le projet pourrait augmenter les transformations en résidences secondaires dans les communes périphériques avec de bas prix de l'immobilier. En raison de leur faible population, les communes périphériques disposent de moyens organisationnels et financiers restreints pour combattre les transformations en résidences secondaires. Pour cette raison, le projet aurait des conséquences particulièrement fortes dans ces communes. Il faut cependant rappeler qu'en vertu de l'art. 3, al. 2, LRS, les cantons et les communes peuvent édicter des dispositions plus strictes que celles prévues par la LRS. Dans des cas extrêmes, un canton (voire une commune, selon le droit cantonal) pourrait prévoir, en dérogation à l'art. 11, al. 1, LRS, que le mode d'habitation de toutes ou de certaines résidences principales ne puisse pas être modifié.

Tableau 2 Estimation du potentiel de transformation de logements créés selon l'ancien droit.

Communes RS, par type

Nombre de communes LA ­ dont RP Part des RP dans le parc des LA ­ construits entre 1946 et 1980

Toutes

Hotspots

Moyennes

Périphériques

346 426 000 204 000

49 162 000 71 000

102 132 000 54 000

195 132 000 79 000

48 % 79 000

43 % 31 000

41 % 20 000

60 % 28 000

Légende: LA = logement ancien droit, RP = résidence principale, RS = résidence secondaire.

Le projet de révision n'entraîne aucune modification au niveau de l'organisation dans les cantons et les communes. Dans les cantons et les communes fortement touchés, il pourra toutefois se traduire par des modifications des plans directeurs cantonaux et des plans d'affectation communaux en raison des mesures à prendre pour éviter qu'il ait des conséquences négatives non seulement sur le marché du logement, mais aussi sur les sites et les espaces ouverts dans le milieu bâti.

4.3

Conséquences économiques

Le marché suisse du logement présente des signes de surchauffe. De nombreuses régions de Suisse sont concernées, et les régions touristiques figurent au premier rang de celles-ci. La modification législative ne devrait cependant guère créer de nouvelles résidences principales, car la surface habitable moyenne des logements construits entre 1946 et 1980 est beaucoup plus basse (79 m2) que celle des logements neufs (116 m2 pour la période 2011­2021). Même en cas d'agrandissement de 30 %, leur surface habitable n'atteindrait que 103 m2. Dans la plupart des cas, un agrandissement devrait permettre d'accroître le confort des logements existants. Une subdivision en deux logements pourrait se révéler intéressante, par exemple pour créer deux résidences secondaires d'une surface de 50 m2 environ chacune.

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Selon une estimation, entre 10 % et 33 % des logements construits selon l'ancien droit pourraient être démolis dans les dix prochaines années et remplacés par des logements neufs plus grands. Le volume de travail en résultant dans la construction de logements pourrait augmenter de 45 % environ par rapport à la période 2011­2021 (moyenne arrondie de 20 % et 67 %). La construction, en particulier le secteur du bâtiment, en profiterait considérablement.

Tableau 3 Estimation des conséquences sur le secteur de la construction et de l'immobilier par rapport à la période 2011­2021 Total des logements

Nombre de LA utilisés en tant que RP et construits entre 1946 et 1980

Logements par année

79 000

Hypothèse 1: dans 10 ans, 10 % des LA démolis, reconstruits et agrandis

7 900

env. 800

Hypothèse 2: dans 10 ans, 33 % des LA démolis, reconstruits et agrandis

26 000

2600

Logements construits entre 2011 et 2021

39 000

Effets sur l'activité de la construction (hypothèse 1/ hypothèse 2) par rapport à la période 2011­2021

3 900 entre + 20 % et + 67 %

Légende: LA = logements ancien droit, RP = résidences principales, RS = résidences secondaires.

La crise sanitaire liée à la pandémie de coronavirus et la faiblesse des taux d'intérêt ont provoqué une forte hausse de la demande de logements sur les marchés tant de la location que de la vente. En ce qui concerne les prix de l'immobilier3, les démolitions et reconstructions de logements créés selon l'ancien droit accentueront la pression sur les logements anciens abordables, en particulier pour la population locale. Comme les prix des résidences secondaires sont plus élevés4, le marché devrait voir apparaître des résidences secondaires plus confortables, ou bien de petites unités d'habitation utilisées en tant que résidences secondaires et créées à partir d'unités d'habitation plus grandes, et qui représentent un placement financier particulièrement attrayant.

En cas de hausse des taux, les investisseurs pourraient se tourner vers d'autres actifs.

Dans ce cas, la pression sur le marché immobilier s'atténuerait quelque peu. De plus, du fait de la généralisation du télétravail, la demande en résidences principales pourrait s'accroître dans des régions qui disposent déjà de bonnes infrastructures.

4.4

Conséquences sociétales

Il existe un certain risque que le projet accentue la pression sur les résidences principales existantes en vue de leur transformation en résidences secondaires. Cette pres3 4

Durant les seules années 2020 et 2021, les prix des logements en propriété ont enregistré une hausse comprise entre 13,4 et 16,9 %. Immo-Monitoring 2022/2, wüestpartner. p. 68.

Immo-Monitoring 2022/2, wüestpartner. p. 72.

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sion s'exercerait surtout sur les logements anciens et d'un prix abordable. Les transformations et agrandissements supplémentaires que permettrait la loi rendraient les démolitions et les reconstructions de ces logements et leur vente en tant que résidences secondaires encore plus intéressantes financièrement. Si de nouvelles résidences principales plus spacieuses sont construites à la place de logements anciens avantageux, les loyers et les prix de l'immobilier augmentent aussi, en même temps que l'offre de logements modernes.

4.5

Conséquences environnementales

Les démolitions et reconstructions de logements créés selon l'ancien droit s'effectuent sur des parcelles déjà construites. Comme la surface brute principale peut être augmentée, une réduction des espaces ouverts est à escompter. De plus, les nouvelles constructions modifieront la physionomie du site. Avec une planification minutieuse d'un nouveau bâtiment tenant compte de la structure bâtie existante, il est toutefois aussi possible de valoriser le site et de respecter les normes les plus récentes en matière de construction. Par ailleurs, grâce à la nouvelle règle permettant de combiner un agrandissement de 30 % des surfaces utiles principales avec la construction de nouveaux logements, de nouvelles possibilités voient le jour sur le plan financier en termes d'assainissement énergétique. Sous l'angle énergétique et climatique, les démolitions et reconstructions ne représentent souvent pas l'option la plus écologique: si l'on considère les besoins énergétiques et les émissions de CO2, une nouvelle construction fait nettement moins bien qu'un assainissement énergétique.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

L'art. 75b, al. 1, Cst. limite la surface brute au sol habitable et la part des résidences secondaires dans le parc de logements d'une commune à 20 % au maximum. Dans les communes qui comptent plus de 20 % de résidences secondaires, cela revient à empêcher non seulement la construction de nouvelles résidences secondaires, mais aussi la création de surfaces supplémentaires en vue d'une utilisation en tant que résidences secondaires. Pour les logements créés selon l'ancien droit, cela signifie qu'en raison des dispositions constitutionnelles, ces logements ne peuvent ni être subdivisés en plusieurs logements, ni être agrandis. Cette réglementation s'applique si ces logements sont utilisés comme résidences secondaires. Tout projet qui entraîne des résidences secondaires supplémentaires ou un agrandissement de la surface occupée par des résidences secondaires va à l'encontre du but de l'article constitutionnel de limiter de telles utilisations.

Malgré ce cadre constitutionnel, la loi fédérale en vigueur sur les résidences secondaires prévoit que des logements supplémentaires puissent être créés dans les limites des surfaces utiles principales préexistantes (art. 11, al. 2). Les agrandissements de 30 % au maximum des surfaces utiles principales ne sont admis que s'il n'en résulte aucun logement supplémentaire (al. 3). Actuellement, les dispositions légales ne tou13 / 16

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chent toujours qu'un seul des deux critères ancrés dans la Constitution (nombre de résidences secondaires ou surface brute au sol), mais jamais les deux simultanément.

Avec la réglementation proposée, il deviendrait possible d'intervenir simultanément sur les deux critères, ce qui la rend très critiquable du point de vue constitutionnel. Il convient de noter qu'avec la réglementation proposée, l'interprétation du Tribunal fédéral (qui ne découle pas du texte de la LRS) selon laquelle les deux dispositions concernant «l'agrandissement» ainsi que «la démolition et la reconstruction» ne peuvent être exercées en même temps, est corrigée. Signalons également le fait que la loi en vigueur n'exclut pas qu'une maison construite selon l'ancien droit soit d'abord agrandie puis ultérieurement fasse l'objet d'une demande de démolition et de reconstruction.

La minorité de commission qui propose de ne pas entrer en matière est d'avis que le problème constitutionnel posé par la réglementation proposée (cf. chap. 2 ci-dessus) serait résolu par l'ajout d'un nouvel al. 1bis à l'art. 75b, Cst., dont la teneur serait la suivante: Art. 75b, al. 1bis, Cst.

En cas de rénovation, transformation et reconstruction d'unités d'habitation qui avaient été créées de manière conforme au droit en vigueur avant le 11 mars 2012 ou qui étaient au bénéfice d'une autorisation définitive à cette date, la loi peut prévoir qu'à l'intérieur des zones à bâtir, la surface utile principale peut être agrandie et le nombre d'unités d'habitation peut être augmenté sans restriction d'utilisation.

1bis

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet ne touche à aucune obligation internationale de la Suisse.

5.3

Forme de l'acte à adopter

La modification proposée se réfère à l'art. 11 de la loi fédérale sur les résidences secondaires. Elle ne contient pas de délégation de compétences (au Conseil fédéral) en vue d'une modification de l'ordonnance.

5.4

Frein aux dépenses

Le projet ne contient pas de dispositions relatives aux subventions et ne prévoit ni crédits d'engagement ni plafonds de dépenses.

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5.5

Respect des principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Le projet n'affecte pas la répartition des tâches de la Confédération et des cantons.

5.6

Conformité aux principes de la loi sur les subventions

Le projet est conforme aux prescriptions de la loi sur les subventions.

5.7

Délégation de compétences législatives

La présente modification de la loi ne prévoit aucune nouvelle norme de délégation qui habiliterait à l'édiction de réglementations au niveau des ordonnances du Conseil fédéral.

5.8

Protection des données

Le projet n'a aucune pertinence du point de vue de la protection des données.

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