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23.060 Message concernant la modification de la loi sur la géoinformation du 23 août 2023

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi fédérale sur la géoinformation, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

23 août 2023

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Alain Berset Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé La planification de l'utilisation du sous-sol devient une vraie nécessité face à la multiplication des conflits d'utilisation. Aujourd'hui, les informations géologiques géoréférencées requises font défaut pour cet aspect de l'aménagement du territoire et pour les données de base nationales de la géologie nationale nécessaires à cet effet. Le présent projet vise à créer des bases légales appropriées afin que des données géologiques puissent être mises à disposition à l'avenir pour planifier l'utilisation du sous-sol. Il met en oeuvre les enseignements tirés dans le rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat Vogler 16.4108.

Contexte L'utilisation du sous-sol entraîne souvent des conséquences à long terme, irréversibles pour certaines d'entre elles. On dénombre par ailleurs de multiples conflits d'intérêts entre différents projets et diverses activités en sous-sol ou à la surface terrestre. Avec la révision partielle en cours de la loi sur l'aménagement du territoire, l'aspect du sous-sol doit désormais être suffisamment pris en compte dans les travaux de planification à tous les niveaux et une coordination adaptée des intérêts doit avoir lieu. Une coordination, en termes d'aménagement du territoire, des différentes utilisations effectives et envisagées en sous-sol doit se fonder sur une connaissance suffisante des conditions géologiques existant dans le sous-sol et sur un recensement des utilisations actuelles du sous-sol; il est donc nécessaire de disposer d'informations géoréférencées appropriées, comme c'est le cas pour un aménagement prévu en surface. Toutefois, de telles données géologiques font largement défaut aux autorités de planification. Pour avoir la capacité de les recueillir ou de les acquérir, il faut pouvoir accéder aux données géologiques des acteurs tant privés que publics.

Contenu du projet Ce projet vise à obliger tous les titulaires de données à mettre leurs données géologiques à la disposition des cantons et de la Confédération ­ en premier lieu à des fins de relevés géologiques et d'aménagement du territoire ­ sans pour autant en perdre les droits d'utilisation économique. Les données géologiques issues des procédures d'approbation des plans doivent également être mises à disposition.

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

1.1.1

Données manquantes pour la planification de l'utilisation du sous-sol

L'utilisation du sous-sol a souvent des conséquences à long terme, irréversibles pour certaines d'entre elles. Il est par exemple difficile de démanteler des ouvrages en soussol pour restaurer l'état initial. Souvent les tubes de forage et le ciment utilisé restent par exemple dans le sol jusqu'à ce qu'ils soient éliminés par des processus naturels.

Et si les forages n'étaient pas obstrués dans les règles de l'art, les nouvelles communications créées artificiellement dans le sous-sol (appelées voies préférentielles, le long du forage ou dans le trou de forage lui-même) subsisteraient elles aussi. C'est pourquoi il est généralement opportun de coordonner assez tôt les utilisations et les éventuelles mesures à prendre, notamment pour éviter des effets irréversibles ou de longue durée, cas par exemple de constructions inappropriées dans des nappes phréatiques. Les mesures d'assainissement nécessaires ou le déplacement des captages d'eaux souterraines sont synonymes de travaux aussi lourds que coûteux. On dénombre par ailleurs de multiples conflits d'intérêts entre différents projets et diverses activités en sous-sol ou à la surface terrestre. On citera ici l'opposition existante entre la construction d'un tunnel et des forages géothermiques, ou entre des activités industrielles ou agricoles d'une part et l'approvisionnement en eau potable d'autre part. La pression liée à l'utilisation du sous-sol ne cesse d'augmenter. Dans le domaine de l'énergie, on mise de plus en plus sur la géothermie. Dans le domaine de la mobilité, un transport dans le sous-sol est discuté et sera probablement mis en oeuvre progressivement, une fois les bases légales pour le transport souterrain de marchandises créées. Dans le cadre de la discussion sur le climat, le stockage de CO2 dans le sol est un sujet d'actualité.

Dans son message du 31 octobre 20181 relatif à la deuxième étape de la révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire, le Conseil fédéral a notamment soumis au Parlement un nouvel art. 3, al. 5, de la loi du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire (LAT)2, exigeant que l'aspect du sous-sol soit suffisamment pris en compte lors des travaux de planification entrepris à tous les niveaux et qu'une concertation adaptée des intérêts puisse avoir lieu. Cette modification se retrouve également dans
l'avant-projet de modification de la LAT, élaboré entre-temps par la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États, et mis en consultation. Une coordination, en termes d'aménagement du territoire, des différentes utilisations effectives et envisagées du sous-sol doit se fonder sur une connaissance suffisante des conditions géologiques existant dans le sous-sol et sur un recensement des utilisations actuelles du sous-sol; il est donc nécessaire de disposer 1 2

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d'informations géoréférencées appropriées, comme c'est le cas pour un aménagement prévu à la surface et au-dessus du sol.

À la surface et au-dessus du sol, la collecte et la mise à jour de géoinformations ne posent aucun problème avec les moyens techniques actuels: en règle générale, les points à mesurer sont directement accessibles et le cadre juridique est clair. En ce qui concerne la surface du sol, les données géoréférencées sur l'aménagement et l'environnement sont mises à jour périodiquement et donc de bonne qualité et disponibles en quantité suffisante. Il en va tout autrement du sous-sol. En Suisse, les normes et les standards à validité générale font largement défaut pour la mensuration du sous-sol, contrairement à celle effectuée en surface. Les informations relatives au sous-sol ne sont généralement accessibles qu'à grands frais via des carottages, des tunnels et des galeries ou indirectement via des mesures géophysiques (sismiques, gravimétriques, géoélectriques, etc.) et cela sur des périmètres relativement restreints ou ponctuels. La couverture territoriale complète des informations géologiques résulte de l'interprétation des données existantes ou d'une interpolation fondée sur elles, de sorte qu'elle est entachée d'une grande incertitude. Améliorer la situation au niveau des données en géologie requiert généralement de mettre en oeuvre des moyens considérables.

L'incitation pour les particuliers à mettre à disposition du public de telles données obtenues à grands frais est donc faible.

1.1.2

Des compétences éparpillées pour les informations géologiques

Les cantons sont compétents pour la réglementation du sous-sol et pour les données géologiques qui s'y rapportent ­ souvent sur la base de la régale des mines. En vertu de la Constitution (Cst.)3, la Confédération peut se prévaloir de certaines compétences législatives dans le domaine des données géologiques, en matière par exemple de défense et de protection de la population (art. 60 et 61 Cst.), de recherche du ressort de l'administration fédérale (art. 64 Cst.), de statistique (art. 65 Cst.), de protection de l'environnement (art. 74 Cst.), de mensuration nationale et de mensuration officielle (art. 75a Cst.) ou d'énergie nucléaire (art. 90 Cst.). Les compétences de la Confédération jouent également un rôle en matière de prescriptions sur la protection des eaux (art. 76, al. 3, Cst.), de planification et d'approbation de voies ferrées (art. 87 Cst.) et de routes nationales (art. 83 Cst.) ainsi qu'en matière de transport d'énergie (art. 91 Cst.) et de politique énergétique (art. 89).

La collecte et le regroupement coordonné des informations nécessaires à l'aménagement du territoire ­ qu'il s'agisse de l'aménagement du territoire classique ou de dispositions spéciales relatives au sous-sol ­ ne sont régis ni dans la LAT ni dans d'autres actes de droit fédéral tels que la loi du 5 octobre 2007 sur la géoinformation (LGéo)4.

Ainsi, il n'existe ni attribution claire des compétences ni loi unique pour le sous-sol, traitant exclusivement et intégralement les questions qui se posent à son sujet et les données qui s'y rapportent. Le droit fédéral de la géoinformation prévoit certes la mise 3 4

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à disposition des données géologiques d'intérêt national par la géologie nationale (art. 27 et 28 LGéo), mais faute de règles correspondantes dans la législation spécialisée, les compétences pour exiger ces données font largement défaut à la Confédération. Seules la législation sur l'énergie nucléaire et l'ordonnance du 1er novembre 2017 sur l'énergie5, entrée en vigueur le 1er janvier 2018, ainsi que l'ordonnance du 30 novembre 2012 sur le CO26 contiennent des règles explicites sur les informations géologiques. La Confédération dispose aussi d'autres informations géologiques provenant de ses propres activités, recueillies par exemple lors de la construction des routes nationales. Aujourd'hui, si elle veut fournir des informations géologiques de base et des modèles, la géologie nationale en est réduite à demander aux acteurs privés et aux cantons qu'ils mettent gracieusement à sa disposition les données de base nécessaires à cet effet.

À peine un tiers des cantons (Appenzell Rhodes-Intérieures, Argovie, Berne, Genève, Lucerne, Thurgovie, Vaud, Zoug, Zurich) dispose aujourd'hui d'une réglementation actualisée sur l'utilisation du sous-sol; dans trois cantons, la législation date du 19e siècle et dans dix cantons, il n'existe aucune réglementation spécifique en la matière7. Dans la moitié des cantons à peine, on trouve des règles régissant la collecte et l'utilisation de données géologiques dans la législation relative à la régale des mines, à la protection des eaux ou à la géoinformation. Ces règles permettent aux autorités cantonales de contraindre les acteurs privés à leur fournir des données afin de pouvoir les utiliser ensuite à des fins de planification et pour accomplir certaines tâches régaliennes. Dans leur forme actuelle, la plupart des législations cantonales (par exemple les lois sur la régale des mines) ne font aucunement obligation aux concessionnaires de transmettre des données aux cantons. En général, il manque aussi des règles qui permettraient à un canton d'échanger et de partager des données géologiques avec d'autres autorités à des fins de coordination ou d'établissement de bases relevant de l'aménagement du territoire, sans avoir à recueillir au préalable l'assentiment du titulaire des droits correspondants. Il peut y avoir plusieurs titulaires de droits pour un même jeu de
données. Il peut s'agir du mandant d'une acquisition de données, du producteur des données (le traitement et l'interprétation de données géologiques peuvent notamment donner lieu à des droits d'auteur) ou même d'un tiers auquel les droits sur les données ont été cédés.

1.1.3

Clarifications entreprises dans le cadre de l'exécution du postulat Vogler 16.4108

Le 16 décembre 2016, l'ancien conseiller national Karl Vogler a déposé le postulat 16.4108 «Données géologiques relatives au sous-sol» avec la demande suivante: «Le Conseil fédéral est chargé d'indiquer dans un rapport quelles conditions concrètes et juridiques et, le cas échéant, quelles autres conditions doivent être réunies en relation 5 6 7

RS 730.01 RS 641.711 Pour une vue d'ensemble des réglementations cantonales sur l'utilisation du sous-sol (état: mars 2016), cf. Daniel Kettiger, Cadre légal de la saisie, la mise à jour et la gestion de données géologiques, Rapports du Service géologique national n° 9, FR; Berne 2016.

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avec l'aménagement du sous-sol afin que les informations géologiques utiles à cet effet puissent être récoltées et coordonnées en collaboration avec les cantons et, si nécessaire, d'autres acteurs.» Cette intervention a bénéficié du soutien du Conseil fédéral et du Conseil national; ce dernier a adopté le postulat le 17 mars 2017.

Le Conseil fédéral a demandé l'établissement d'un rapport en réponse à cette demande. La responsabilité de sa rédaction a été conjointement confiée à l'Office fédéral du développement territorial (ARE) et à l'Office fédéral de topographie (swisstopo).

Les instances suivantes ont par ailleurs été associées à l'élaboration du rapport pour que le texte résultant bénéficie d'un large assentiment: ­

un groupe d'accompagnement où étaient représentés l'ARE, l'Office fédéral des routes (OFROU), l'Office fédéral de l'environnement (OFEV), l'Office fédéral des transports (OFT), l'Office fédéral de l'énergie (OFEN), l'Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN), le Secrétariat général du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (SG-DDPS) et l'Office fédéral de topographie (swisstopo);

­

le groupe de travail Sous-sol, existant déjà au sein de l'administration (axé sur les exigences en matière d'utilisation et de sécurité, dirigé par l'ARE);

­

l'Organe de coordination de la Confédération pour la géologie (KBGeol), institué en vertu de l'art.15 de l'ordonnance du 21 mai 2008 sur la géologie nationale (OGN)8.

Une enquête auprès des cantons, conduite en avril 2018 par swisstopo et l'ARE, puis un atelier de discussion commun, organisé en mai 2018 avec d'autres acteurs, ont visé à recueillir l'opinion des cantons à propos de la collecte et du regroupement coordonné des données géologiques pour l'aménagement du sous-sol. Un document de synthèse a été élaboré à partir des résultats de l'enquête et de l'atelier de discussion. Les participants à ce dernier ont pu se prononcer sur ce document. Si les avis des représentants des cantons montrent une certaine hétérogénéité, ils sont toutefois assez proches de l'orientation proposée par les services fédéraux si on les considère globalement.

Un rapport a été rédigé sur la base de ces travaux préparatoires. Il a été adopté par le Conseil fédéral le 7 décembre 20189. Le rapport contient en annexe le document de synthèse mis au point.

Le rapport du Conseil fédéral propose les trois mesures suivantes dans le domaine législatif: ­

8 9

La création de bases légales cantonales pour l'utilisation du sous-sol. Ces textes législatifs cantonaux devraient notamment régir la collecte des données et informations géologiques ainsi que leur transmission puis leur utilisation et

RS 510.624 Données géologiques relatives au sous-sol, rapport du Conseil fédéral du 7 décembre 2018 en réponse au postulat Vogler 16.4108 du 16 décembre 2016.

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leur publication par les autorités10. Ils devraient aussi indiquer les projets requérant une base dans le plan directeur cantonal. Si un canton estime qu'une telle réglementation générale contraignante ne s'impose pas, il lui est recommandé d'inclure les règles régissant la collecte et la transmission des données dans chacune des décisions concernées.

­

La révision partielle de la LGéo, complétée par une disposition générale relative à la collecte et à la mise à disposition de données géologiques pour l'aménagement du territoire et à la publication de celles-ci. Les obstacles juridiques existants empêchant un échange simple de données géologiques entre autorités peuvent ainsi être levés, ouvrant la voie à une utilisation aisée de ces données par les diverses autorités.

­

Une extension du catalogue des géodonnées de base fondée sur la révision partielle de la LGéo (mesure 2) et une modification de l'ordonnance du 21 mai 2008 sur la géoinformation (OGéo)11, resp. de son annexe. L'inscription explicite des jeux de données géologiques d'importance comme géodonnées de base relevant du droit fédéral dans l'annexe 1 OGéo vise à en améliorer la disponibilité et l'exploitabilité: lorsqu'un jeu de données est inscrit au catalogue, il est indiqué qui en est le maître (Confédération ou cantons) et qui est responsable de l'établissement du modèle de données. Les questions des autorisations d'accès aux données et de l'échange de données entre les cantons et la Confédération sont ainsi aussi réglées.

Le mandat suivant a été confié à l'Office fédéral de topographie dans le rapport: la révision partielle de la LGéo doit régler explicitement la collecte et le regroupement de données géologiques au niveau de la Confédération. Les jeux de données pertinents dans ce cadre doivent être inscrits à l'annexe 1 OGéo au titre de géodonnées de base relevant du droit fédéral. Ils deviendraient ainsi librement accessibles par principe (art. 10 LGéo); la protection de secrets de fabrication et de secrets commerciaux est à régler au cas par cas. Le présent projet de révision de la LGéo concrétise donc la première partie du mandat législatif confié, sur la base des conclusions figurant dans la réponse apportée au postulat Vogler 16.4108.

1.1.4

Conférence du sous-sol géologique (CSG)

Les cantons sont compétents en matière de sous-sol et d'aménagement du territoire.

Des lacunes existent cependant au niveau de l'application des bases légales. Rares sont en effet les cantons à disposer d'une réglementation actualisée pour l'utilisation du sous-sol. L'amélioration de l'échange des données géologiques et de l'accès à ces 10

11

Les actes législatifs où peuvent figurer ces dispositions sont: les lois sur l'utilisation du sous-sol (lois sur la régale des mines), les lois sur la protection des eaux ou les lois spéciales sur les cadastres géologiques (à l'exemple du Canton de Vaud). Il est renvoyé ici à la recommandation du KBGeol destinée aux cantons. La Confédération y présente sa vision consolidée de la manière dont les lois cantonales sur l'utilisation du sous-sol devraient tenir compte des données géologiques. Les principes consignés ici peuvent également s'appliquer aux autres lois mentionnées.

RS 510.620

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dernières au niveau cantonal bénéficie également à l'accomplissement des tâches fédérales. Au niveau fédéral, l'organe de coordination KBGeol a été fondé déjà en 2015.

Le 7 novembre 2019, les cantons ont créé une organisation similaire, la Conférence intercantonale sous-sol géologique (CISG), à l'initiative de la géologie nationale: chacun des 26 cantons dispose d'un siège à la Conférence et contribue à élaborer des règles et à promouvoir la coordination de l'échange des données géologiques entre les cantons, la Confédération et le secteur privé ainsi que l'accès à ces données, tout en s'engageant en faveur de l'harmonisation et de la centralisation des données géologiques au niveau cantonal.

1.2

Solutions étudiées et solution retenue

Il n'y a qu'une seule solution: créer une base légale contraignant les titulaires de données à mettre à la disposition de la Confédération et des cantons des données géologiques à des fins de relevé géologique national. Une nouvelle collecte de données par la Confédération entraînerait des coûts considérables et des atteintes à l'environnement; en revanche, l'obligation de mettre à disposition des données géologiques existantes ne constitue qu'une atteinte mineure à la liberté économique et n'affecte pas le droit des titulaires de données de continuer à utiliser leurs données à des fins commerciales. Aucune autre solution n'a donc été étudiée. La solution retenue tient compte de manière optimale du principe de proportionnalité. D'autres solutions ont été évaluées et rejetées lors de l'élaboration du rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat Vogler 16.4108. La solution choisie correspond au mandat législatif du Conseil fédéral.

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet est annoncé dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature de 2019 à 202312, sous Objectif 2, «Autres objets» (cf. «modèle géologique national», MGN). La modification proposée de la loi sur la géoinformation est nécessaire pour cette raison ainsi qu'au vu des développements indiqués, du postulat Vogler 16.4108 transmis par le Parlement et des clarifications entreprises pour y répondre.

En outre, la modification de la loi est nécessaire pour mettre en oeuvre efficacement le plan d'action «Numérisation du-sol» demandé par le Parlement (cf. § 1.4 ci-dessous).

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1.4

Classement d'interventions parlementaires

Le rapport du Conseil fédéral du 7 décembre 201813 (cf. § 1.1.3) a déjà pleinement répondu au postulat Vogler 16.4108 «Données géologiques relatives au sous-sol». La présente révision de la loi permet maintenant d'aller plus loin et de mettre en oeuvre les enseignements acquis dans le cadre des clarifications relatives au rapport du Conseil fédéral.

Avec la motion 19.4059 «Garantir les investissements dans le sous-sol grâce au numérique», le conseiller national Karl Vogler avait demandé que le Conseil fédéral soit chargé d'élaborer un plan d'action «Numérisation du sous-sol géologique» pour garantir les investissements futurs dans les infrastructures souterraines, dans l'extraction des géoressources et dans le stockage des déchets. La motion a été adoptée par les deux Chambres. Par la suite, le Conseil fédéral a adopté en mai 2021 le «Plan d'action pour la numérisation du sous-sol» et a autorisé le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) à en mettre en oeuvre les mesures en collaboration avec les cantons, sous la conduite de swisstopo, au cours des huit prochaines années. La présente modification de la loi soutient une mise en oeuvre efficace et complète du plan d'action.

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

2.1

Réalisation

Le 19 mai 2021, le Conseil a chargé le DDPS de mener une procédure de consultation auprès des cantons, de la Conférence des gouvernements cantonaux, des partis politiques, des associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne qui oeuvrent au niveau national, des associations faîtières de l'économie qui oeuvrent au niveau national et des milieux intéressés concernant la modification prévue de la loi sur la géoinformation. La période de consultation a duré jusqu'au 20 septembre 2021.

2.2

Avant-projet

L'avant-projet poursuivait le même objectif que le projet de modification de la loi sur la géoinformation présenté ici.

2.3

Résultats de la procédure de consultation

Dans le cadre de la procédure de consultation, 70 prises de position au total ont été reçues (26 cantons, 4 partis politiques, 16 associations et autres organisations intéressées). Parmi elles, 24 émanaient d'organisations non contactées ou de particuliers.

13

Données géologiques relatives au sous-sol, rapport du Conseil fédéral du 7 décembre 2018 en réponse au postulat Vogler 16.4108 du 16 décembre 2016.

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Deux cantons et une association ont renoncé par écrit à participer à la procédure de consultation14.

Les orientations générales des réponses des participants à la consultation peuvent être résumées comme suit: ­

13 saluent les modifications de la LGéo, sans propositions ou exigences de fond;

­

22 saluent les modifications de la Lgéo, mais ont des propositions ou exigences de fond;

­

14 jugent la mise en oeuvre du projet de manière critique à très critique;

­

18 rejettent explicitement les modifications de la LGéo, dont

­

2 demandent la répétition de la procédure de consultation.

Quelques participants ont objecté que la Confédération ne disposait pas de la compétence constitutionnelle pour édicter les dispositions légales prévues, notamment pour l'obligation des particuliers de mettre leurs données à disposition des cantons et de la Confédération.

En ce qui concerne les définitions légales ajoutées à l'art. 3 LGéo, il a notamment été demandé que la notion de données géologiques secondaires soit également ancrée au niveau de la loi. Par ailleurs, de très nombreuses remarques plutôt techniques ont été faites au sujet de la terminologie.

L'art. 28a LGéo proposé, qui contraint les titulaires de données possédant des droits sur des données géologiques à mettre ces dernières à la disposition du canton et de la Confédération, a été critiqué à plusieurs égards. Ainsi, le champ d'application semble être formulé de manière trop ouverte ou ne pas être limité. En outre, une «expropriation» des données est redoutée. Enfin, certains craignent que des intérêts de droit privé (droits d'auteur, secret de fabrication et d'affaires, etc.) soient lésés. Il a également été reproché de ne pas faire de distinction entre les «anciennes» données, qui ont été créées avant l'entrée en vigueur de la modification de la loi, et les «nouvelles» données, créées à partir de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation.

Le nouvel art. 28b LGéo proposé, selon lequel la Confédération et les cantons sont tenus d'échanger mutuellement des données géologiques, n'a guère été critiqué.

De même, l'art. 28c LGéo proposé concernant les données géologiques orphelines n'a guère suscité de critiques substantielles.

2.4

Appréciation des résultats de la procédure de consultation

Les doutes concernant une compétence constitutionnelle suffisante de la Confédération ont été pris en compte, en demandant un avis de droit sur cette question à l'Uni14

Le rapport explicatif peut être consulté gratuitement à l'adresse suivante: www.fedlex.admin.ch > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2021 > DDPS > Procédure de consultation 2021/37.

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versité de Zurich15. L'expertise conclut que les données géologiques peuvent être qualifiées de données de mensuration au sens de l'art. 75a al. 1 et 2 Cst. et que la Confédération dispose, sur la base de l'art. 75a Cst. de la compétence d'édicter des règles relatives aux données géologiques dans la mesure où celles-ci servent à la mensuration nationale (y compris la géologie nationale) ou à la mensuration officielle16.

Les critiques émises à l'encontre de l'art. 28a LGéo, qui oblige également les particuliers titulaires de droits sur des données géologiques à les mettre à la disposition du canton et de la Confédération, reposent manifestement en partie sur des craintes et des incertitudes suscitées par le fait que les réglementations n'étaient pas assez claires. Le fait qu'une partie de la réglementation doive figurer dans une ordonnance, alors que le projet d'ordonnance n'a pas pu être présenté lors de la procédure de consultation, a également contribué à cette situation. L'objectif et l'idée de la réglementation sont maintenus, mais le nouvel art. 28a LGéo a été considérablement reformulé par rapport à l'avant-projet. En outre, une disposition transitoire doit être élaborée concernant les données créées avant l'entrée en vigueur de la modification de la loi.

Aujourd'hui déjà, les données géologiques qui sont mises à la disposition de la géologie nationale en vertu d'une obligation légale sont en principe dotées du niveau d'autorisation d'accès B selon l'art. 21, al. 1, let. b, et 23 OGéo et ne sont donc pas accessibles au public; cela restera également le cas avec la présente modification de la loi.

Initialement envisagé, l'art. 28c LGéo concernant les données géologiques orphelines a été abandonné. Le problème des données orphelines doit être réglé de manière générale dans la loi et ne relève donc plus du mandat législatif du Conseil fédéral.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Un regard sur d'autres pays européens montre que les avantages de données complètes, harmonisées et structurées ont été très tôt reconnus. L'EuroGeoSurveys, une organisation qui regroupe 37 services géologiques nationaux au niveau européen, a créé une infrastructure européenne de données géologiques (European Geological Data Infrastructure). Celle-ci permet d'accéder aux données géologiques des services géologiques nationaux dans l'espace européen. La nouvelle loi allemande sur les données géologiques (GeoIDG) du 19 juin 2020 crée les conditions pour la transmission et la sauvegarde des données géologiques en Allemagne. Aux Pays-Bas, les données géologiques couvrant l'ensemble du territoire sont accessibles dans une base de données nationale (Dutch Key Register of the Subsurface). Il en va de même en France depuis 1999 avec l'accès à la banque de données du sous-sol (Banque du Sous-Sol).

Il en ressort que la Suisse est à la traîne dans ce domaine.

15 16

Avis de droit des professeurs Florent Thouvenin et Nadja Braun Binder (Universités de Zurich et Bâle) du 19 juillet 2022.

Voir à ce sujet le § 5.1 ci-dessous.

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En raison de la structure totalement différente des administrations publiques dans le domaine de la géologie nationale (souvent le résultat de la tradition minière dans d'autres pays), les concepts de l'étranger ne peuvent pas être repris pour la Suisse.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

4.1.1

Modification de la loi sur la géoinformation

Les données géologiques étant toujours à référence spatiale, elles sont par définition toujours des géodonnées (cf. art. 3, al. 1, let. a, LGéo). La loi sur la géoinformation régit donc aujourd'hui déjà les données géologiques de la Confédération (art. 2, al. 3, LGéo), de même que les tâches de la géologie nationale (art. 27 LGéo). Ces tâches comprennent notamment la mise à disposition de données géologiques d'intérêt national (art. 27, al. 2, let. b, LGéo), le conseil et l'assistance de l'administration fédérale pour toute question géologique (art. 27, al. 2, let. c, LGéo) et la coordination des activités géologiques à l'échelon fédéral (art. 27, al. 2, let. e, LGéo). Il est par conséquent logique de concrétiser le mandat législatif visant à créer des bases légales régissant la collecte et la mise à disposition de données géologiques pour l'aménagement du territoire dans la LGéo et non dans la LAT.

Les règles inscrites dans la LGéo obligeront les titulaires de données à mettre ces dernières à la disposition des cantons et de la Confédération. La Confédération et les cantons seront par ailleurs tenus d'échanger les informations géologiques en leur possession en cas de besoin.

Les données mises à disposition par leurs titulaires servent à la géologie nationale à établir les données géologiques d'intérêt national requises, par exemple pour la création et l'amélioration qualitative de modèles tridimensionnels du sous-sol géologique, que la Confédération et les cantons peuvent notamment utiliser à des fins de planification (cf. figure 1). Les données originales mises à disposition par leurs titulaires ne sont pas transmises par la Confédération à des tiers.

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Figure 1 Utilisation des données par la Confédération

4.1.2

Modification de la loi fédérale sur les chemins de fer et de la loi fédérale sur le transport souterrain de marchandises

Les plans doivent être approuvés par la Confédération pour différents types de projets d'infrastructure (installations ferroviaires, remontées mécaniques, routes nationales, conduites, aérodromes, lignes du réseau électrique national, ouvrages militaires). Certains de ces projets (installations ferroviaires, routes nationales, installations militaires souterraines) donnent naissance à une grande quantité d'informations géologiques, par exemple des données de sondages, des expertises géologiques ou des coupes géologiques horizontales lors du percement de tunnels. Il s'agit donc de (mieux) mettre ces informations géologiques qui existent de toute façon à la disposition de la géologie nationale et de certains services cantonaux et de les utiliser par la suite, par exemple pour l'aménagement du territoire. La Confédération peut accéder à de telles données en vertu de sa compétence en matière d'approbation des plans, pour autant qu'une règle correspondante ait été prévue dans la loi. C'est pourquoi il doit être inscrit dans la loi fédérale du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer (LCdF)17 que les entreprises qui construisent de telles infrastructures sur la base de plans approuvés par la Confédération doivent mettre les données géologiques produites à cette occasion à la disposition de la Confédération (pour plus de détails, cf. § 2.2).

Au terme de la procédure de consultation, le Parlement a adopté la loi fédérale du 17 décembre 2021 sur le transport souterrain de marchandises18. Celle-ci est entrée en vigueur le 1er août 2022 et doit être complétée de la même manière que la LCdF.

Aucune base légale n'est requise pour l'accès aux données géologiques générées dans le cadre de la construction de routes nationales et d'installations militaires, la Confé-

17 18

RS 742.101 RS 749.1

13 / 26

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dération étant maître d'ouvrage et disposant à ce titre des droits sur les données géologiques.

L'expérience montre que les installations à câbles, les conduites, les aérodromes et les lignes du réseau électrique national ne produisent en général que peu de données géologiques, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de prévoir une obligation de fournir ces données dans le cadre des procédures d'approbation des plans.

4.2

Adéquation des moyens requis

La modification de loi proposée permet de promouvoir de manière efficace le relevé géologique national, déjà défini aujourd'hui à l'art, 27, al. 2, let a, LGéo comme une tâche de la géologie nationale. Il est par ailleurs renvoyé au § 6.1.

5

Commentaire des dispositions

5.1

Loi sur la géoinformation

Préambule Les modifications apportées au préambule sont sans lien direct avec la présente révision matérielle de la loi; elles sont de nature purement rédactionnelle. La base constitutionnelle supplémentaire mentionnée ici a tout simplement été omise lorsque la LGéo a été édictée. La profession d'ingénieur géomètre est une profession réglementée en vertu de l'art. 41 LGéo; sa réglementation se fonde sur la compétence à légiférer accordée à la Confédération par l'art. 95, al. 1, Cst.

Art. 3, al. 1, let. k à n Aujourd'hui, la notion de données géologiques et d'autres notions qui lui sont associées sont définies à l'art. 2 de l'OGN (définitions légales). Attendu que des règles beaucoup plus étendues régissant les informations géologiques sont désormais inscrites dans la LGéo, les définitions légales correspondantes devraient également figurer au niveau de la loi. C'est pourquoi les notions en lien direct avec la modification de la loi seront dorénavant incluses dans la LGéo. Les autres définitions légales de la géologie nationale continuent à être régies au niveau de l'ordonnance en application de l'art. 3, al. 2, LGéo. L'OGN sera adaptée en conséquence à l'entrée en vigueur de la présente révision partielle de la LGéo.

Il en résulte que les données géologiques sont des données concernant le sous-sol géologique relatives notamment: ­

à sa structure, sa nature et ses propriétés;

­

à des processus géologiques passés, présents et potentiels;

­

à l'utilisation passée et présente, notamment des ressources (sans les créations humaines ou «man made objects», c'est-à-dire par exemple sans constructions et installations ou conduites souterraines);

14 / 26

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­

à sa valeur économique, sociétale et scientifique.

Comme cela a déjà été indiqué (cf. § 1.1.1), la couverture territoriale complète par les informations géologiques résulte de l'interprétation des données (brutes) existantes ou d'une interpolation entre elles. Il convient donc de distinguer les trois paliers successifs dans la génération des données géologiques que sont les données géologiques primaires, les données géologiques primaires traitées et enfin les données géologiques secondaires.

Les données primaires comprennent notamment (liste non exhaustive): ­

les forages: métadonnées, relevés géologiques avec indications sur la structure et la composition des couches, mesures (par exemple concernant les caractéristiques géotechniques et pétrophysiques, indications sur les eaux souterraines);

­

les données géophysiques de terrain issues de campagnes sismiques, électromagnétiques et gravimétriques ainsi que de la géophysique de forage: métadonnées, données non traitées (valeurs mesurées), forages de surface (forages pour calibrer les mesures sismiques), protocoles de mesure;

­

les analyses de terrain et de laboratoire: caractéristiques géotechniques, géochimiques et pétrophysiques.

Les données primaires traitées comprennent notamment les données géophysiques qui ont été traitées à l'aide de méthodes reconnues en vue d'une interprétation future.

Cette distinction est particulièrement importante du point de vue des droits d'auteur: les données géologiques primaires sont les résultats bruts des mesures et des relevés directs effectués par des spécialistes en géologie; elles ne peuvent donc pas faire l'objet de droits d'auteur. Le traitement des données géologiques peut donner lieu à des droits d'auteur. Ce qui est déterminant pour la protection par le droit d'auteur, c'est la prestation intellectuelle propre de la personne qui procède au traitement. Lorsque le traitement des données géologiques primaires s'appuie exclusivement sur des méthodes mathématiques reconnues, à savoir quand le traitement des données brutes repose par exemple sur des algorithmes, alors aucun droit d'auteur n'en résulte. La représentation graphique de carottes de forage n'est protégée par aucun droit d'auteur.

L'existence de tels droits sur les données géologiques primaires traitées doit donc être vérifiée au cas par cas.

En revanche, on présume toujours que les données géologiques secondaires sont protégées par des droits d'auteur. Les données et informations géologiques secondaires résultent de l'interprétation de données géologiques primaires ou de données géologiques primaires traitées.

Art. 28a

Mise à disposition de données géologiques

L'al. 1 s'adresse à tous les titulaires de données géologiques, donc aux personnes physiques et morales qui disposent de fait de données géologiques et les contraint à mettre ces informations à la disposition des cantons et de la Confédération. Les bureaux de géologie qui acquièrent des données géologiques et rédigent des expertises géologiques ne devraient que rarement être concernés ici, leurs donneurs d'ordres s'assu15 / 26

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rant généralement les droits sur les résultats des travaux par contrat. L'obligation de fournir les données ne concerne que les données qui existent déjà; il n'y a pas d'obligation à acquérir des données supplémentaires ou à préparer des données primaires existantes pour une interprétation voire à les faire interpréter. L'al. 1 institue une obligation passive, car la remise des informations ne se fait que sur demande du canton ou de la Confédération. Toutefois, une obligation d'annonce peut être introduite au niveau de l'ordonnance. Les règles des législations cantonales ne sont pas affectées par cette modification de la LGéo.

Les cantons et la Confédération ne doivent être habilités à accéder aux données géologiques de tiers que dans un but précis. La Confédération (let. a) doit disposer de ce droit dans la mesure où les données sont nécessaires à l'accomplissement des tâches de la géologie nationale visées à l'art. 27, al. 2, let. a à c, LGéo, c'est-à-dire pour les relevés géologiques nationaux, pour la mise à disposition de données géologiques d'intérêt national ainsi que pour le conseil et l'assistance de l'administration fédérale pour toute question géologique.

La géologie nationale a notamment pour tâche de mettre à disposition des données géologiques d'intérêt national (art. 27, al. 2, let. b, LGéo); de telles données sont en particulier requises par la Confédération aux fins de planification, pour l'établissement de plans sectoriels et de concepts stratégiques. Sur la base de l'al. 1, la Confédération ne demandera aux titulaires de données que les données qui sont techniquement importantes pour l'établissement de données géologiques d'intérêt national. Ces données géologiques et géophysiques décrivent le sous-sol de manière pertinente et aident la Confédération à créer des géodonnées de base relevant du droit fédéral. Elles se prêtent notamment à la production de représentations géologiques générales suprarégionales ou nationales (cartes et modèles). Le Conseil fédéral a déjà défini les données géologiques d'intérêt national à l'art. 5 OGN. Il s'agit toujours de la création de jeux de données pour l'accomplissement ou l'exécution de tâches fédérales.

Les cantons (let. b) doivent avoir accès aux données géologiques dans la mesure où celles-ci sont nécessaires à l'accomplissement de tâches
relevant du droit fédéral ainsi que du droit cantonal (par exemple sur la base d'une loi sur l'utilisation du sous-sol).

Cette règle préserve l'autonomie des cantons, qui peuvent aller au-delà des exigences du nouveau droit fédéral dans leur législation.

En ce qui concerne l'al. 2, il convient de préciser que les données ne font pas l'objet d'un droit de propriété réel et qu'elles sont des biens incorporels et donc utilisables de manière non privative. Cela signifie que les données peuvent être copiées à volonté sans perte de substance et qu'elles peuvent être utilisées simultanément par plusieurs personnes. Si, par exemple, des particuliers mettent leurs données géologiques à la disposition du canton et de la Confédération, ils conservent néanmoins la maîtrise de leur jeu de données. Conformément à l'al. 2, les droits d'exploitation et d'utilisation des personnes autorisées à utiliser les données géologiques subsistent vis-à-vis des tiers. Le principe de l'épuisement du droit d'auteur au sens de l'art. 12, al. 1, de la loi du 9 octobre 1992 sur le droit d'auteur19 ne s'applique pas à la livraison des données géologiques au canton ou à la Confédération.

19

RS 231.1

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L'al. 3 régit la compensation financière en contrepartie des données géologiques. Les données géologiques primaires doivent être mises à disposition gratuitement. Ces informations sur le sous-sol géologique sont d'intérêt public et doivent pouvoir servir à l'État et à la société. En outre, les cantons ont généralement un pouvoir de disposition exclusif sur le sous-sol géologique. 20 Les données géologiques primaires traitées sont indemnisées en tenant compte des contributions publiques déjà allouées. Il s'agit d'indemniser tout ou partie des frais pour le traitement. Lorsque des données géologiques primaires ont été générées dans le cadre d'un projet financé ou subventionné par la Confédération ou un canton, elles doivent en règle générale être fournies gratuitement.

La Confédération prend en charge l'indemnisation des données qu'elle demande. Les cantons restent libres de régler dans leur législation l'indemnisation des données qu'ils demandent. L'indemnisation n'est jamais supérieure aux coûts de traitement supportés par les titulaires de données concernés.

L'alinéa 4 habilite le Conseil fédéral à édicter les dispositions d'exécution requises concernant les modalités et l'indemnisation de la mise à disposition et de l'obtention de données géologiques, les exigences qualitatives et techniques auxquelles les données doivent répondre ainsi que l'utilisation des données par la Confédération et les cantons; la participation des milieux concernés au sens de l'art. 35 LGéo est garantie.

Le Conseil fédéral peut ainsi introduire une obligation d'annonce et régler en détail la question de l'indemnisation des données reçues. Le Conseil fédéral est en outre chargé de définir par voie d'ordonnance si et dans quelle mesure les données géologiques fournies doivent être accessibles à des tiers voire au grand public. La loi oblige le Conseil fédéral à tenir compte de manière appropriée des intérêts économiques des titulaires des données, notamment du secret de fabrication et du secret commercial.

En effet, le fait que les données géologiques doivent être mises à la disposition des cantons et de la Confédération ne signifie pas que ces données sont d'accès public.

Les secrets de fabrication et commerciaux ou les droits d'auteur sur les données peuvent venir s'opposer à un tel accès public. Si les informations
géologiques constituent des informations sur l'environnement et sont ainsi couvertes par la convention de droit international public d'Aarhus du 25 juin 199821, elles ne sont pas moins soumises à certaines restrictions d'accès visant à préserver les secrets de fabrication et commerciaux ainsi que les droits des auteurs (cf. § 7.2). Concrètement, les données géologiques mises à la disposition de la Confédération sur la base du droit fédéral sont aujourd'hui déjà dotées du niveau d'autorisation d'accès B et ne sont donc pas d'accès public (art. 13, al. 2, let. a, OGN). Cette règle doit être maintenue. Il est en revanche incontestable que les bases géologiques d'intérêt national créées par la géologie nationale en traitant et en interprétant les données fournies doivent être librement accessibles à tout un chacun.

Les données géologiques secondaires ne font pas l'objet de la nouvelle réglementation légale. La Confédération acquiert les données géologiques secondaires conformément à la législation sur les marchés publics ou les achète sur le marché libre.

20 21

ATF 119 Ia 390 consid. 5d RS 0.814.07

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Art. 28b

Échange de données géologiques entre la Confédération et les cantons

Le nouvel art. 28b LGéo crée une obligation pour la Confédération et les cantons, puisqu'ils doivent se mettre mutuellement et gratuitement à disposition les données et les informations géologiques existantes. En conséquence, cette nouvelle règle étend l'obligation légale existante en matière d'échange de géodonnées de base entre autorités (art. 14 LGéo) aux données géologiques.

Art. 46a

Dispositions transitoires relatives à l'art. 28a

Le nouvel art. 28a LGéo doit s'appliquer à toutes les données géologiques, donc également aux données géologiques qui existent déjà au moment de la modification de la loi. Il faut partir du principe que de grandes quantités de ces données, pour autant qu'elles présentent encore un intérêt pour les cantons ou la Confédération, possèdent des formats de données qui ne correspondent pas aux standards actuels et qui doivent d'abord être convertis avant de pouvoir être utilisés dans des applications techniques modernes. Une partie des données sera également disponible sur papier (sous forme de plans ou de protocoles de mesure). Il serait disproportionné d'imputer aux personnes concernées les frais de reformatage ou de changement de support. C'est pourquoi, pour les données géologiques créées selon l'ancien droit, la Confédération doit prendre en charge les coûts de transformation et les frais de copie (par exemple lors de la copie ou de la numérisation de documents papier).

Le moment déterminant n'est pas l'entrée en vigueur de la modification de la loi, mais l'année qui suit. Il est ainsi tenu compte du fait que, pour les données géologiques produites au cours de la première année suivant l'entrée en vigueur de l'art. 28a LGéo, les mandants privés concernés ne pouvaient pas encore savoir, au moment de l'attribution du mandat, quels formats le Conseil fédéral déclarera obligatoires (art. 28a, al. 4, LGéo). Il est prévu de définir comme applicables des formats et des standards usuels dans la branche. La participation des cantons et des organisations professionnelles et spécialisées au sens des art. 35 LGéo et 18 OGN est assurée lors de l'édiction de ces dispositions d'exécution.

5.2 Art. 45

Loi fédérale sur les chemins de fer Données géologiques

Des informations géologiques (comme des données de sondage ou des relevés de tunnels) sont produites autant lors de la construction que de l'entretien d'installations ferroviaires, et ce en grande quantité à chaque fois. Ces informations géologiques qui existent de toute façon doivent être (mieux) utilisées pour le relevé géologique national. Les gestionnaires d'infrastructures sont régis par le droit privé, si bien que la Confédération a besoin d'une base légale dans une loi fédérale pour pouvoir accéder aux données géologiques (art. 36, al. 1, Cst.). Cette base légale est créée avec le nouvel art. 45 LCdF relatif à la construction d'installations ferroviaires.

Les entreprises ferroviaires seront tenues de mettre gratuitement des données géologiques à la disposition de la Confédération pour les besoins du relevé géologique na18 / 26

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tional, notamment des profils de forage, des expertises géologiques et des relevés de tunnels, réalisés dans la perspective d'une procédure d'approbation des plans, dans le cadre d'une telle procédure ou lors de l'exécution d'un projet approuvé.

5.3

Loi fédérale sur le transport souterrain de marchandises

Les procédures d'approbation des plans prévues par la loi fédérale du 17 décembre 2021 sur le transport souterrain de marchandises (LTSM) sont soumises aux mêmes règles que les installations ferroviaires. Il est par ailleurs renvoyé au § 5.2.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

Les modifications apportées à la loi n'entraînent aucun surcoût pour la Confédération.

Aujourd'hui déjà, des données géologiques traitées sont achetées auprès de particuliers. Le plan d'action «Numérisation du sous-sol» prévoit une augmentation du volume de données acquises auprès de tiers au cours des prochaines années.

L'actualisation des anciennes données, qu'il faudra demander en plus pour atteindre la couverture territoriale complète visée, coûtera environ quatre millions de francs.

Les travaux correspondants s'étaleront sur une période de quatre à six ans. Les coûts qui y sont liés peuvent être financés par le budget existant de swisstopo et par les moyens supplémentaires accordés pour le plan d'action «Numérisation du sous-sol».

Les modifications apportées à la loi n'entraînent aucune conséquence pour le personnel de la Confédération.

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne, les modifications apportées à la loi n'entraînent ni conséquence financière directe, ni conséquence en termes de personnel.

Les cantons profitent des modifications de la loi: premièrement, les cantons sans législation cantonale correspondante disposent désormais, grâce au nouvel art. 28a LGéo, d'une base légale leur permettant d'accéder aux données géologiques de titulaires de données privés lorsqu'ils en ont besoin pour l'exécution de tâches fédérales (p. ex. l'aménagement du territoire). Deuxièmement, l'art. 28b LGéo oblige désormais la Confédération à échanger les données géologiques de la géologie nationale avec les cantons. Aucun inconvénient identifiable ne résulte pour les cantons de l'obligation découlant également de l'art. 28b LGéo qui les astreint à mettre leurs données géologiques à la disposition de la Confédération.

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6.3

Conséquences économiques

Plus le volume de données géologiques existantes mises à la disposition de la géologie nationale est conséquent, plus sera élevée la qualité des jeux de données numériques géologiques qui en résultent par interprétation et qui proposés gratuitement (données publiques en libre accès, open government data) aux particuliers par la géologie nationale (aujourd'hui sous forme de jeux de données 2D et de modèles 3D). La sécurité de la planification s'en trouve non seulement accrue pour les autorités cantonales et communales, mais aussi pour les acteurs privés, ce qui les rend vraisemblablement plus enclins à investir (cf. la motion 19.4059 Vogler). L'économie nationale tire un grand bénéfice des plus-values créées par la large utilisation des informations géologiques privées existantes.

Les modifications apportées à la loi n'entraînent guère d'inconvénients pour les acteurs économiques du secteur privé. La protection par le droit d'auteur ainsi que celle des secrets de fabrication et des secrets commerciaux reste assurée (cf. § 7.2 et 7.8 à ce sujet). Les particuliers qui ont des droits sur les données géologiques peuvent continuer à les utiliser sans restriction, indépendamment de leur fourniture au canton ou à la Confédération, et conservent leurs droits d'exploitation ou d'utilisation vis-à-vis de tiers (cf. ci-dessus § 5.1). Les dispositions transitoires (art. 46a LGéo) garantissent que les particuliers qui ont des droits sur des données géologiques existantes ne soient pas pénalisés financièrement par la livraison des données au canton ou à la Confédération. Les particuliers sont indemnisés des frais de traitement des données géologiques primaires traitées (art. 28a, al. 3 LGéo). La modification de la loi n'entraîne donc pas de charge financière supplémentaire pour l'économie.

Sur la base des études préliminaires, il a été renoncé à une analyse d'impact de la réglementation (AIR).

6.4

Conséquences sanitaires et sociales

Le projet de loi n'a pas d'effets directs sur la société; les dimensions du développement durable telles que la santé, la sécurité, les valeurs culturelles et sociales ou la solidarité entre les générations ne sont pas affectées. Le grand public n'est pas concerné par la modification proposée, vu que celle-ci traite d'un domaine très spécifique de la législation fédérale spécialisée. Les bases de données supplémentaires obtenues pour la géologie nationale et pour l'application du droit fédéral par les cantons peuvent toutefois avoir à l'avenir un effet positif sur le développement durable grâce à l'amélioration des bases de planification.

6.5

Conséquences environnementales

Les modifications apportées à la loi n'entraînent aucune conséquence directe sur l'environnement.

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Si plus d'informations de meilleure qualité sur le sous-sol géologique sont disponibles à l'avenir, le sous-sol pourra plus facilement être pris en compte dans l'aménagement du territoire, la protection du climat et la transition énergétique. Par conséquent, les intérêts liés à la protection de l'environnement en sous-sol seront mieux identifiés et donc mieux coordonnés avec des projets de construction.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

La Confédération est habilitée par l'art. 75a, al. 1 et 2, Cst., à édicter des règles applicables aux données géoréférencées dont les données géologiques font aussi partie. Il faut tenir compte du fait que la géologie nationale fait partie intégrante de la mensuration nationale, ce qui autorise la Confédération à légiférer de manière globale dans le domaine de la géologie nationale (art. 75a, al. 1, Cst.)22. Des acteurs privés sont certes titulaires de droits sur des données géologiques, mais une base légale ad hoc serait constitutionnellement suffisante pour autoriser une restriction au sens de l'art. 36 Cst. L'existence d'un intérêt public (art. 36, al. 2, Cst.) ne fait pas de doute (comparer les développements au § 1). Le critère de la nécessité est également rempli (cf. ci-dessus § 1.1.4). Si l'obligation de fournir les données est liée à leur utilisation pour les besoins de la géologie nationale et si l'accès public aux données fournies est limité, comme prévu, et si, en outre, les particuliers sont indemnisés pour les frais de traitement des données géologiques primaires traitées, le principe de proportionnalité (art. 36, al. 3, Cst.) peut lui aussi être respecté.

La constitutionnalité du nouvel art. 28a LGéo a fait l'objet d'un examen externe sur mandat de swisstopo23. L'équipe d'experts est arrivée à la conclusion que la Confédération peut édicter des dispositions légales sur les données géologiques au sens large sur la base de l'art. 75a, al. 1 et 2, LGéo pour autant que celles-ci servent à la mensuration nationale et à la mensuration officielle, et que la géologie nationale constitue une partie de la mensuration nationale. En revanche, les experts estiment que l'art. 28a LGéo ne peut pas se fonder sur les art. 75 et 122 Cst. Ils admettent en outre que les nouvelles dispositions peuvent également être partiellement fondées sur d'autres dispositions constitutionnelles. Dans l'ensemble, l'équipe d'experts estime que l'art. 28a LGéo est conforme à la Constitution.

L'art. 87 Cst. permet également à la Confédération de régir intégralement les installations ferroviaires et les autres infrastructures de transport. Les nouvelles dispositions introduites dans la loi servent aussi à harmoniser les données géoréférencées relatives au sous-sol, puisque la géologie nationale peut mettre de telles informations géologiques à disposition dans des modèles de données homogènes, de sorte qu'elles peuvent aussi se fonder sur l'art. 75a, al. 3, Cst.

22 23

Cf. Daniel Kettiger: Rechtsgrundlagen der Landesgeologie; expertise succincte du 20 décembre 2005 à l'attention de l'Office fédéral de topographie, p. 11.

Cf. l'avis de droit des professeurs Florent Thouvenin et Nadja Braun Binder (Universités de Zurich et Bâle) du 19 juillet 2022.

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La solution législative proposée est par conséquent constitutionnelle; elle dispose notamment de bases constitutionnelles suffisantes.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La convention d'Aarhus oblige la Suisse à rendre les données sur l'environnement accessibles au public. Elle s'est acquittée de cette obligation au moyen des art. 10e et 10g de la loi du 7 octobre 1983 sur la protection de l'environnement (LPE)24. La notion d'information sur l'environnement, telle qu'elle est définie à l'art. 7, al. 8, LPE, englobe aussi de nombreuses informations géologiques, pour autant que ces dernières concernent la nature ou les propriétés du sous-sol géologique ou des processus géologiques, en particulier des données concernant les dangers naturels, parmi lesquels on compte notamment les séismes, les avalanches, les glissements de terrain et l'érosion.

Le projet s'inscrit donc dans le cadre fixé par la convention d'Aarhus.

Les informations géologiques doivent ainsi être rendues accessibles au public, dès lors que la maîtrise des données est transférée à la Confédération ou à un canton. Dans certains cas, cet accès public peut s'opposer aux intérêts des acteurs privés devant mettre les données à la disposition de la Confédération ou des cantons en vertu de la nouvelle législation. Les données géologiques peuvent en effet constituer un secret de fabrication ou commercial, notamment lorsqu'elles sont liées à l'exploitation de richesses naturelles pour lesquelles les acteurs privés concernés disposent d'une concession accordée en vertu du droit cantonal. Le traitement des données géologiques par interprétation peut par ailleurs donner naissance à des droits d'auteur. La convention d'Aarhus et le droit suisse sur le principe de transparence comportent des règles visant à protéger des droits privés et permettent notamment de restreindre l'accès aux données géologiques aux fins de protection (secrets de fabrication et commerciaux, droits d'auteur). De telles restrictions seront nécessaires lors de la mise en oeuvre des modifications apportées à la loi si leur ampleur reste celle actuellement prévue. La nouvelle réglementation de l'art. 28a, al. 4, let. c, LGéo oblige le Conseil fédéral à tenir compte de manière appropriée des intérêts économiques des titulaires des données, en particulier du secret de fabrication et commercial, lors de la réglementation de l'accès aux données géologiques livrées par des particuliers. Il est prévu de continuer à affecter ces données au niveau d'autorisation d'accès B. Ces restrictions sont compatibles avec la convention d'Aarhus.

Le projet n'affecte aucune autre obligation internationale de la Suisse.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Les nouvelles règles introduites dans la loi imposent une obligation aux acteurs privés et restreignent leurs droits (cf. § 7.1). Ces règles doivent figurer dans une loi fédérale

24

RS 814.01

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pour assurer la conformité de l'ingérence ainsi réalisée dans les droits fondamentaux (art. 36, al. 1 en relation avec l'art. 164, al. 1, let. c, Cst.).

7.4

Frein aux dépenses

Le projet ne crée pas de nouvelles dispositions en matière de subventions qui entraîneraient des dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou périodiques de plus de 2 millions de francs. Le projet n'est donc pas assujetti au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

7.5

Conformité à la loi sur les subventions

Selon le nouvel l'art. 28a, al. 3, LGéo, les données géologiques primaires doivent être mises gratuitement à la disposition de la Confédération et des cantons par les titulaires des données. En revanche, la Confédération et les cantons versent une indemnité pour la livraison des données géologiques primaires traitées demandées; lors du calcul de cette indemnité, ils tiennent compte des subventions qu'ils ont déjà versées. Selon l'art. 3, al. 2, de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)25, les indemnités sont des prestations accordées à des bénéficiaires étrangers à l'administration fédérale et destinées à atténuer ou à compenser les charges financières découlant de l'accomplissement de tâches prescrites par le droit fédéral. En l'occurrence, les indemnités prévues à l'art. 28a, al. 3, LGéo visent à indemniser les titulaires de données géologiques pour les dépenses qu'ils ont engagées pour le traitement de ces données, dont la Confédération ou le canton peut désormais profiter. Il est à chaque fois question de montants relativement faibles. Ainsi, l'imputation de subventions antérieures à la collecte ou au traitement des données doit notamment permettre d'éviter que les titulaires de données ne s'enrichissent grâce à l'indemnisation.

7.6

Délégation de compétences législatives

Les nouvelles règles prévoient une délégation de compétences législatives au Conseil fédéral à trois endroits. Elles sont suffisamment définies dans chaque cas: ­

25

Art. 28a, al. 4, LGéo: Le Conseil fédéral doit pouvoir édicter des prescriptions détaillées concernant l'obligation faite aux acteurs privés de mettre des données géologiques à la disposition de la Confédération et des cantons (art. 28a, al. 1, LGéo). Ces prescriptions doivent notamment régir les modalités de l'échange de données ainsi que l'utilisation des données, notamment l'accès des tiers. Cette délégation du pouvoir de légiférer permet au Conseil fédéral de régir l'accès aux informations de manière générale et abstraite au moyen de niveaux d'autorisation d'accès, aussi pour le cas des données géologiques

RS 616.1

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(sur le modèle des géodonnées de base relevant du droit fédéral) dans le catalogue des géodonnées de base (annexe 1 OGéo).

­

Art. 47a, al. 2, LCdF: Le Conseil fédéral est habilité à édicter des prescriptions détaillées concernant l'obligation faite aux gestionnaires d'infrastructures de fournir leurs données géologiques à la Confédération. Ces prescriptions portent notamment sur les données à fournir, les modalités, la date et le format de livraison des données. Le Conseil fédéral doit pouvoir préciser davantage les données à fournir, parce que les informations géologiques produites dans le sillage des constructions ferroviaires ne sont pas toutes d'intérêt national et ne sont pas toutes importantes dans l'optique de la géologie nationale.

­

Art. 24a, al. 2, LTSM: Le Conseil fédéral est habilité à édicter des prescriptions détaillées concernant l'obligation faite aux gestionnaires d'infrastructures de fournir leurs données géologiques à la Confédération. Ces prescriptions portent notamment sur les données à fournir, les modalités, la date et le format de livraison des données. Le Conseil fédéral doit pouvoir préciser davantage les données à fournir, parce que les informations géologiques produites dans le sillage de la construction d'installations de transport souterrain de marchandises ne sont pas toutes d'intérêt national et ne sont pas toutes importantes dans l'optique de la géologie nationale.

7.7

Protection des données

Les données géologiques sont par nature des données attributaires qui se rapportent au sous-sol géologique. C'est pourquoi elles ne sont généralement pas liées à une personne donnée et ne sont donc pas soumises aux règles régissant la protection des données. La combinaison de données géologiques et d'autres attributs ne conduit généralement pas non plus à des données personnelles. Dans certains cas de figure particuliers, les données géologiques sont cependant liées à des personnes morales ou physiques, par exemple à l'entreprise ayant procédé à une exploration ou à un bureau géologique privé (ayant par exemple réalisé des expertises géologiques ou représenté des données de forage). Attendu que les données géologiques peuvent être attribuées à une personne donnée ou clairement identifiable, elles acquièrent le caractère de données personnelles et sont soumises au droit de la protection des données applicable.

On notera ici qu'en vertu du droit suisse en vigueur, la législation sur la protection des données couvre aussi bien les personnes physiques que les personnes morales; on notera toutefois que dans la nouvelle loi fédérale du 25 septembre 2020 sur la protection des données26, la protection est réservée aux seules personnes physiques à partir du 1er septembre 2023. Le droit général de la protection des données ne s'applique pas si le lien entre les données géologiques et une personne est uniquement établi via le numéro d'immeuble et le registre foncier, parce que l'association ainsi réalisée entre les immeubles et leurs propriétaires est voulue par le législateur.

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RS 235.1; RO 2022 491

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Le droit fédéral de la géoinformation (art. 27, al. 2, let. a, b et d, LGéo; art. 4, 5, 8 à 10 OGN) crée une base légale suffisante pour que swisstopo puisse saisir, mettre à jour et gérer les données géologiques constituant simultanément des données personnelles. Il est légitime de présumer, dans le cas d'expertises géologiques et de rapports, que leurs auteurs ont implicitement approuvé la citation de leurs noms (ou la souhaitent le cas échéant) en cas de réutilisation des documents par des tiers. La question qui se pose ici est plutôt celle des droits d'auteur et de l'obligation de mentionner les auteurs concernés. Pour une entreprise procédant à une exploration ou à l'exploitation de ressources naturelles sur la base d'une concession ou d'une autorisation, la protection des données et le secret de fabrication ou commercial peuvent se chevaucher. Si c'est le cas, le secret de fabrication ou commercial, plus restrictif, prend le dessus.

Enfin, les noms des personnes morales et physiques qui ont déposé des demandes de permis d'exploitation de ressources naturelles ou de géothermie sont obligatoirement publiés, de sorte que l'association entre les données personnelles et le projet considéré est nécessairement publique et ne peut plus, dès lors, jouir de la moindre protection.

Les nouveaux art. 28a LGéo et 47a LCdF créent une base légale suffisante pour que les autorités fédérales et cantonales compétentes puissent traiter les données géologiques fournies même lorsqu'il s'agit de données personnelles.

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