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24.035 Message relatif à l'arrêté fédéral concernant le recours aux moyens de communication électroniques dans les procédures civiles internationales du 15 mars 2024

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'arrêté fédéral concernant le recours aux moyens de communication électroniques dans les procédures civiles transfrontalières1, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2021

M 20.4266

Moderniser les procédures civiles transfrontalières (E 17.12.2020, Commission des affaires juridiques du Conseil des États; N 17.06.2021)

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 mars 2024

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Viola Amherd Le chancelier de la Confédération, Viktor Rossi

1

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2024-0781

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Condensé Le présent projet a pour but de simplifier le recours à la conférence téléphonique, à la vidéoconférence ou à d'autres moyens de communication électroniques dans les procédures civiles internationales.

Contexte Pour les procédures civiles étrangères, le droit en vigueur prévoit l'obligation d'obtenir une autorisation préalable de l'Office fédéral de la justice pour interroger ou entendre par conférence téléphonique ou vidéoconférence les personnes séjournant en Suisse. La motion 20.4266 «Moderniser les procédures civiles transfrontalières» de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États charge le Conseil fédéral de simplifier le recours aux moyens de communication électroniques dans les procédures judiciaires internationales.

Contenu du projet Dans le cadre de procédures civiles étrangères, les personnes séjournant en Suisse pourront être interrogées ou entendues par conférence téléphonique ou vidéoconférence sans autorisation préalable, pour autant que des conditions spécifiques de préservation de la souveraineté de la Suisse et de protection de la personne concernée soient réunies. Des interrogatoires ou des auditions par conférence téléphonique ou vidéoconférence pourront également avoir lieu dans le cadre de procédures civiles d'États qui ne sont pas parties à la Convention de La Haye du 18 mars 1970 sur l'obtention de preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale (CLaH70). Le droit en vigueur ne permet ce type d'interrogatoire ou d'audition qu'à titre exceptionnel.

La mesure sera mise en oeuvre par une adaptation de la déclaration no 5 de la Suisse à propos des art. 15, 16 et 17, CLaH70 et des art. 11 et 11a de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP).

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Message 1

Contexte

1.1

Motion 20.4266 «Moderniser les procédures civiles transfrontalières»

Le 17 décembre 2020 et le 17 juin 2021, les Chambres fédérales ont adopté à l'unanimité la motion 20.4266 «Moderniser les procédures civiles transfrontalières» de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États (CAJ-E). Celle-ci charge le Conseil fédéral «de soumettre au Parlement un projet d'arrêté fédéral permettant d'adapter la réserve formulée par la Suisse en lien avec la Convention de La Haye sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale, de manière à simplifier le recours à la vidéoconférence et à la conférence téléphonique dans un contexte international».

La motion s'inscrit dans le contexte de la révision du code de procédure civile (CPC)2 adoptée le 17 mars 2023 par les Chambres fédérales. Le Parlement a introduit dans la loi des dispositions visant à permettre le recours aux moyens de communication électroniques (notamment la vidéoconférence) dans la procédure civile3. Il a reconnu la nécessité d'adapter les dispositions pour les cas internationaux également.

1.2

Situation juridique actuelle

La motion concerne l'obtention de preuves en Suisse dans le cadre de procédures civiles étrangères, et plus particulièrement le fait d'interroger ou d'entendre par conférence téléphonique ou vidéoconférence une personne séjournant en Suisse. Les actes d'obtention de preuves sont des actes de puissance publique. Les tribunaux étrangers ne peuvent effectuer de tels actes directement sur le territoire suisse; il doivent passer par la voie de l'entraide judiciaire.

Pour la Suisse, deux traités règlent l'obtention de preuves en matière civile par la voie de l'entraide judiciaire: la Convention de La Haye du 1er mars 1954 relative à la procédure civile (CLaH54)4, appliquée aussi aux États tiers par analogie (art. 11a, al. 4, de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé, LDIP5), et la Convention de La Haye du 18 mars 1970 sur l'obtention de preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale (CLaH70)6, dont il est question dans la motion. Le chapitre II de la CLaH70 autorise dans certaines circonstances l'obtention directe de preuves sur territoire étranger, soit par l'action d'un représentant diplomatique ou consulaire (art. 15 et 16 CLaH70), soit par l'action d'un commissaire désigné par le tribunal devant lequel la procédure est engagée (art. 17 CLaH70). Ces mesures doivent 2 3 4 5 6

RS 272; FF 2023 786; entrée en vigueur fixée par le Tribunal fédéral au 1er janvier 2025.

Voir en particulier les art. 141a, 141b, 170a, 187, al. 1, 3e phrase, et 193 du CPC révisé.

RS 0.274.12 RS 291 RS 0.274.132

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avoir lieu «sans contrainte» et requièrent en principe l'autorisation préalable de l'État sur le territoire duquel elles sont déployées. Les États contractants peuvent faire une déclaration pour renoncer à l'obligation de demander une autorisation. La Suisse a quant à elle déclaré que toutes les formes d'obtention directe de preuves au sens du chapitre II de la CLaH70 requéraient l'autorisation préalable du Département fédéral de justice et police (DFJP; déclaration no 5 ad art. 15, 16 et 17).

Selon la pratique suivie de longue date par le DFJP, le fait d'interroger ou d'entendre directement par conférence téléphonique ou vidéoconférence une personne séjournant en Suisse est considéré comme un cas d'application de l'art. 17 CLaH70; un tel interrogatoire peut être autorisé si certaines conditions sont réunies. Cette pratique concerne tant les interrogatoires réalisés par un commissaire que ceux réalisés par un tribunal étranger. Plusieurs autres États, de même que la Conférence de La Haye de droit international privé, considèrent que le chapitre II de la CLaH70 est applicable à ce type de situations7.

La compétence du DFJP en matière d'autorisations au sens de l'art. 17 CLaH70 découle de l'art. 31 de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA)8, qui dispose que «les départements [...] décident des autorisations de procéder pour un État étranger à des actes qui relèvent des pouvoirs publics prévues à l'art. 271, ch. 1, du code pénal9». Selon la pratique constante, les actes d'obtention de preuves effectués en Suisse par un tribunal étranger constituent de tels actes pour un État étranger, si bien que les autorisations au sens du chapitre II de la CLaH70 relèvent de l'art. 31 OLOGA. Le DFJP a délégué le droit de signature dont il dispose dans ces cas à l'Office fédéral de la justice (OFJ).

Conformément à la déclaration de la Suisse, la demande d'autorisation doit être adressée «à l'autorité centrale du canton où aura lieu l'acte d'instruction» qui, selon la pratique actuelle, procède à un examen préalable avant de transmettre la demande à l'OFJ. L'«autorité centrale» est l'autorité qui est désignée par l'État contractant pour recevoir les commissions rogatoires (art. 2, par. 1, CLaH70). La Suisse a désigné une autorité centrale pour chaque canton.
Les actes d'obtention directe de preuves effectués en Suisse par un État qui n'est pas partie à la CLaH70 sont considérés comme illicites. Aucune base légale ne permet l'octroi d'une autorisation au cas par cas. Il n'est pas possible d'invoquer les art. 271 code pénal (CP)10 et 31 OLOGA: selon la pratique du Conseil fédéral, les autorisations fondées sur l'art. 271 CP sont exclues lorsqu'il est possible d'emprunter la voie ordinaire de l'entraide judiciaire11. Les États qui ne sont pas parties à la CLaH70 peuvent emprunter la voie de l'entraide judiciaire en application de la CLaH54 (qui, comme indiqué précédemment, s'applique également aux États tiers). Le DFJP a toutefois édicté une règle dérogatoire applicable pour la durée de la pandémie12, selon laquelle une autorisation fondée sur l'art. 31 OLOGA peut être délivrée pour les États 7 8 9 10 11 12

Voir Convention Preuves de 1970, Guide de bonnes pratiques: Utilisation de la liaison vidéo; Conférence de La Haye de droit international privé, pp. 39 ss.

RS 172.010.1 RS 311.0 RS 311.0 Voir Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération 61.82.

Cette réglementation est en vigueur jusqu'au 30 juin 2024.

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qui ne sont pas parties à la CLaH70, si les conditions d'une autorisation au sens de l'art. 17 CLaH70 sont réunies, mis à part le fait qu'ils n'ont pas adhéré à la convention.

Les nouvelles dispositions du CPC (voir le ch. 1.1) sont applicables en dehors du territoire suisse dans le cas inverse où une personne séjournant à l'étranger doit être interrogée ou entendue dans le cadre d'une procédure civile suisse. L'art. 141a du CPC révisé dispose notamment que le tribunal peut à certaines conditions «procéder à des actes de procédure oraux en recourant à des moyens électroniques de transmission du son et de l'image [...], ou [...] autoriser les personnes concernées à participer à la procédure par ce biais». La LDIP n'exclut pas l'application des dispositions du CPC en dehors du territoire suisse13. Le droit de l'État concerné doit toutefois permettre qu'une personne séjournant sur son territoire soit interrogée ou entendue de cette manière, comme il en résulte de l'interdiction de violer la souveraineté territoriale d'un État étranger prévue à l'art. 299 CP. La Suisse peut tout au plus exercer une influence sur ce point en concluant un traité avec l'État concerné. Les règles du chapitre II de la CLaH70 s'appliquent s'il s'agit d'un État contractant (voir le ch. 3 concernant les modalités d'application de ces règles dans chacun des États).

1.3

Nécessité d'agir

Dans un monde en pleine révolution numérique, le recours aux moyens de communication électroniques est de plus en plus fréquent dans les procédures civiles internationales pour interroger ou entendre les parties, les témoins ou les experts. Le nombre de demandes d'interrogatoire par vidéoconférence a considérablement augmenté du fait de la pandémie.

Le recours aux moyens de communication électroniques présente des avantages de poids pour les personnes et les entreprises se trouvant en Suisse. Elles peuvent plus facilement faire valoir leurs droits sans devoir forcément se rendre à l'étranger. Pour citer un exemple tiré de la pratique des autorités fédérales: une mère vivant en Suisse qui engage une action en paternité aux États-Unis ne doit plus impérativement faire un voyage pénible et coûteux pour se rendre sur place. De même, la propension de tiers à déposer comme témoin ou expert dans une procédure étrangère s'accroît. Enfin, les interrogatoires et les auditions menés par vidéoconférence limitent les voyages et donc l'impact sur le climat.

Le Parlement, en adoptant la motion 20.4266, a souhaité simplifier le recours aux moyens de communication électroniques tant à l'interne qu'à l'international. Il considère le régime en vigueur (voir le ch. 1.2), qui requiert une autorisation à chaque fois qu'une personne vivant en Suisse est interrogée ou entendue par une autorité étrangère, comme trop pesant.

La motion, au vu de sa teneur, demande seulement une adaptation de la déclaration de la Suisse relative à la CLaH70 (réserve formulée par la Suisse). Les délibérations parlementaires ont toutefois mis en évidence une volonté générale de simplifier le recours aux moyens de communication électroniques sur le principe. Ce régime plus libéral 13

Voir le renvoi à la LDIP figurant à l'art. 2 CPC.

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devrait s'appliquer dans les relations avec les États parties à la CLaH70, mais aussi avec les États tiers. Le fait d'interroger ou d'entendre des personnes sur territoire suisse par des moyens de communication électroniques porte une atteinte relativement faible à la souveraineté territoriale de la Suisse. Contrairement aux cas classiques visés par l'art. 17 CLaH70, il ne s'agit pas d'actes effectifs d'un État étranger sur le territoire suisse. La pratique actuelle fait comme si la personne qui procède à l'interrogatoire ou à l'audition par conférence téléphonique ou vidéoconférence se rendait effectivement en Suisse, mais on pourrait tout aussi bien, en théorie, considérer que la personne à interroger participe à une audience dans l'État étranger. Comme le montrent les explications ci-après, la personne à interroger peut aussi être adéquatement protégée dans les rapports avec des États tiers. L'exigence prévue à l'art. 17 CLaH70 selon laquelle les actes d'instruction doivent avoir lieu «sans contrainte», notamment, peut être étendue aux États tiers.

1.4

Réglementation proposée

La déclaration no 5 relative à la CLaH70, que la motion demande d'adapter, subordonne les actes d'obtention de preuves effectués en Suisse par le commissaire d'un tribunal civil étranger à une autorisation préalable au cas par cas. Une exemption de l'autorisation exigée, option prévue à l'art. 17, al. 2, CLaH70, s'impose pour mettre en oeuvre ce mandat parlementaire. Elle sera limitée aux interrogatoires et aux auditions menés au moyen d'outils de communication électronique. Le projet prévoit d'autoriser le Conseil fédéral à modifier la déclaration no 5 en ce sens. L'exemption de l'autorisation sera toutefois subordonnée à des conditions visant à préserver la souveraineté de la Suisse et à assurer la protection de la personne concernée.

L'art. 17, al. 2, CLaH70 ne prévoit pas expressément d'exemption conditionnelle de l'autorisation. Le contexte rend toutefois une telle exemption admissible, d'une part, parce qu'une exemption conditionnelle restreint moins les prérogatives des autres États contractants que le maintien de l'exigence d'une autorisation et, d'autre part, parce que les art. 17, let. b, et 19 CLaH70 permettent à l'autorité qui délivre les autorisations de les assortir de conditions, y compris lorsqu'il s'agit d'autorisations données «d'une manière générale». Ce qui est admissible pour une autorisation générale doit aussi l'être pour une exemption de l'autorisation.

Comme l'indique le ch. 1.3, la nouvelle réglementation s'appliquera également aux interrogatoires et auditions menés dans le cadre de procédures civiles d'États tiers (qui ne sont pas parties à la CLaH70). On procède pour ce faire à des modifications des art. 11 et 11a. LDIP, qui régissent l'entraide judiciaire internationale en matière civile.

La libéralisation proposée présente en outre l'avantage que les autres États qui ont également un régime libéral, mais qui exigent la réciprocité14, pourront aussi appliquer leurs dispositions libérales dans leur relation avec la Suisse. Le projet ne prévoit pas d'obligation de réciprocité dans la mesure où les allègements proposés ont vocation à servir les intérêts des résidents en Suisse et des entreprises sises en Suisse et non ceux d'un autre État.

14

Par ex. le Royaume-Uni.

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1.5

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 24 janvier 202415 ni dans le projet d'arrêté fédéral sur le programme de la législature 2023 à 2027. Il vise à mettre en oeuvre la motion 20.4266.

1.6

Classement d'interventions parlementaires

Les modifications proposées donnent suite à la motion 20.4266; son classement est proposé.

2

Procédure préliminaire

2.1

Consultation des autorités centrales cantonales

Au printemps 202216, les autorités centrales cantonales chargées de la mise en oeuvre de la CLaH70 (voir le ch. 1.2) ont été consultées de manière informelle sur la solution proposée et sur une première ébauche de mise en oeuvre. Les 18 cantons qui se sont exprimés ont soutenu l'approche choisie. Un canton a rejeté l'inclusion des États tiers (voir le ch. 1.4).

2.2

Procédure de consultation

2.2.1

Résultats

La procédure de consultation sur l'avant-projet s'est tenue du 23 novembre 2022 au 9 mars 2023. 25 cantons, 4 partis politiques et 12 organisations et autres participants se sont prononcés. À une exception près, tous les participants ont approuvé l'orientation générale de l'avant-projet (voir le ch. 2.2.2).

Trois participants estiment toutefois que la participation à des audiences qui ne visent pas l'obtention de preuves ne devrait pas être incluse. Le fait que les adaptations proposées incluent les États tiers (voir le ch. 2.1), jugé défavorablement lors de la consultation des autorités centrales cantonales, n'est par contre plus critiqué17.

De nombreux avis comportent des propositions relatives aux détails de la réglementation, en particulier sur la nouvelle déclaration no 5 de la Suisse relative à la CLaH70.

15 16 17

FF 2024 525 Lettre de l'OFJ du 13 avril 2022.

Voir le rapport sur les résultats de la procédure de consultation et le rapport explicatif à l'adresse www.fedlex.admin.ch > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2022 > DFJP > Procédure de consultation 2022/18.

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2.2.2

Appréciation

Le seul participant défavorable au projet sur le principe se prononce en faveur du maintien du droit en vigueur, craignant que les changements prévus n'entraînent une détérioration de la situation juridique des personnes concernées.

Le Conseil fédéral estime que cette crainte est infondée. Les mesures prévues dans le régime en vigueur pour protéger les personnes concernées sont maintenues sous une forme adaptée et même complétées par de nouvelles conditions (voir le ch. 4.2). Les personnes concernées ne remarqueront guère les changements, d'autant moins que, selon la pratique actuelle, les interrogatoires et les auditions par voie électronique sont presque toujours autorisés, pour autant que le demandeur fournisse les informations nécessaires.

Les entreprises suisses impliquées dans une procédure civile étrangère, ainsi que leurs collaborateurs et témoins qui doivent se rendre à l'étranger pour les besoins de la procédure, ont un intérêt à ce que l'interrogatoire ou l'audition puisse avoir lieu de manière facilitée par conférence téléphonique ou vidéoconférence. C'est pourquoi quatre bureaux d'avocats qui représentent régulièrement de telles entreprises se sont clairement exprimés en faveur de l'avant-projet du Conseil fédéral.

L'appréciation de la critique relative à l'inclusion des audiences qui ne visent pas l'obtention de preuves figure au ch. 4.2.

Nombre des suggestions faites à propos de la nouvelle déclaration no 5 ont été mises en oeuvre dans le projet, par exemple la concrétisation de la notion «en temps utile» pour qualifier le moment où les autorités suisses sont informées, la flexibilisation des exigences relatives au contenu de la communication et l'ajout de nouvelles conditions dans la déclaration visant à protéger la personne concernée, à savoir la traduction dans sa langue des dépositions essentielles pendant la conférence téléphonique ou la vidéoconférence et la protection et la sécurité des données (voir le ch. 5).

3

Comparaison avec le droit étranger

Dix18 des 64 États parties à la CLaH70 ont déclaré expressément à la demande de la Conférence de La Haye de droit international privé qu'ils acceptaient les actes d'instruction au sens de l'art. 17 CLaH70 ou du moins les interrogatoires par vidéoconférence effectués par des tribunaux étrangers sans autorisation préalable. Quinze19 autres États contractants excluent le principe de l'obtention directe de preuves au sens de l'art. 17 CLaH70 sur leur territoire.

18 19

Australie (pour certains de ses États), Chine (pour Hong Kong), Chypre, Espagne, États-Unis, Finlande, Kazakhstan, Malte, Royaume-Uni et Singapour.

Dont cinq États européens (Bulgarie, Pologne, Portugal, Roumanie et Ukraine).

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Le règlement européen sur l'obtention des preuves (ci-après «règlement européen»)20, fortement inspiré de la CLaH70, s'applique entre les États membres de l'UE; sa nouvelle mouture après révision est entrée en vigueur le 1er juillet 202221. Selon son art. 19, l'obtention directe de preuves à l'étranger requiert une autorisation, sans dérogation possible pour les États membres, contrairement à ce que prévoit la CLaH70.

L'«exécution directe de la mesure d'instruction en utilisant la vidéoconférence ou d'autres technologies de communication à distance» est évoquée à l'art. 20 à titre de possibilité et encouragée, conformément au considérant 21: «Les technologies de communication modernes, par exemple la vidéoconférence, qui constitue un moyen important de simplifier et d'accélérer l'obtention des preuves, ne sont actuellement pas exploitées autant qu'elles le pourraient. Dans le cas où des preuves doivent être obtenues par l'audition d'une personne, telle qu'un témoin, une partie à la procédure ou un expert, présente sur le territoire d'un autre État membre, la juridiction requérante devrait obtenir lesdites preuves directement en utilisant la vidéoconférence ou d'autres technologies de communication à distance, lorsque la juridiction dispose de ces technologies et qu'elle considère l'utilisation de ces technologies comme étant appropriées au regard des circonstances spécifiques de l'affaire et du déroulement équitable de la procédure». Les auteurs de doctrine sont partagés sur le caractère impératif de l'exigence d'une autorisation pour cette forme d'obtention de preuves.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

Le projet est un arrêté fédéral en deux parties: la première (art. 1) autorise une nouvelle mouture de la déclaration no 5 de la Suisse relative à la CLaH70 et la seconde (art. 2 et annexe) comporte les modifications des art. 11 et 11a LDIP.

L'art. 1 autorise le Conseil fédéral à modifier la déclaration no 5 de manière à ce qu'aucune autorisation préalable ne soit nécessaire pour interroger ou entendre une personne séjournant en Suisse, pour autant que des conditions spécifiques de préservation de la souveraineté de la Suisse et de protection de la personne concernée soient réunies. Il exige que les conditions figurent dans la déclaration.

Les conditions que le Conseil fédéral entend inscrire dans la déclaration seront essentiellement les suivantes: d'une part, la demande adressée à l'OFJ par l'intermédiaire de l'autorité cantonale d'entraide judiciaire sera remplacée par une communication à ces deux autorités à la fois, étant entendu que cette communication devra pour l'essentiel contenir les mêmes indications à propos de la conférence téléphonique ou de la vidéoconférence prévue qu'une demande d'autorisation au sens du droit en vigueur; 20

21

Règlement (UE) 2020/1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l'obtention des preuves en matière civile ou commerciale (obtention des preuves), JO L 405 du 2 décembre 2020, p. 1.

La version précédente du règlement s'intitulait «règlement (CE) no 1206/2001 du Conseil du 28 mai 2001 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l'obtention des preuves en matière civile ou commerciale (JO L 174 du 27 juin 2001, p. 1)».

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d'autre part, les conditions dont sont actuellement assorties les autorisations du DFJP seront maintenues sous une autre forme.

Les modifications de l'art. 11 LDIP prévues en annexe de l'arrêté fédéral visent à étendre le recours simplifié à des moyens de communication électroniques aux États qui ne sont pas parties à la CLaH70. L'art. 11, al. 2, P-LDIP renvoie à l'art. 17 CLaH70 s'agissant de l'obtention directe de preuves en Suisse dans le cadre d'une procédure civile étrangère sous la forme d'un interrogatoire ou d'une audition par conférence téléphonique ou vidéoconférence. Ce renvoi s'applique aussi bien aux États contractants qu'aux États tiers et inclut la déclaration no 5. S'agissant des États contractants, le renvoi est en principe purement déclaratoire, puisque la CLaH70 s'applique directement du fait de la réserve en faveur des traités internationaux énoncée à l'art. 1, al. 2, LDIP (voir le ch. 4.2 concernant l'exception).

4.2

Inclusion des auditions qui ont lieu en dehors de la procédure d'administration des preuves

Le projet vise à faciliter l'emploi de moyens de communication électroniques pour la procédure d'obtention des preuves, mais aussi pour les autres auditions menées dans le cadre de procédures civiles, par exemple pour permettre aux parties de déposer leurs conclusions et leurs arguments ou pour garantir le droit d'être entendu. Le renvoi à l'art. 17 CLaH70 a trait également aux conférences téléphoniques et aux vidéoconférences effectuées dans un tel but. L'art. 17 CLaH70 ne s'applique cependant que «par analogie», puisque le chapitre II de la convention ne porte que sur l'«obtention de preuves».

Il existe aussi des intérêts à ce que des auditions puissent être menées par des moyens de communication électroniques en dehors de la procédure d'obtention des preuves, d'où la nécessité de prévoir des règles étendues. Inclure ce type d'auditions permet en outre d'éviter des problèmes de délimitation dans le cas concret qui risqueraient de mettre à mal la sécurité juridique. Rien ne s'y oppose du point de vue de la souveraineté de la Suisse, qui est en général moins touchée par ce genre d'auditions qui concernent en règle générale les parties à la procédure, lesquelles sont soumises à la compétence juridictionnelle de l'État étranger22. Les interrogatoires, en tant que mesures d'obtention de preuves, par contre, concernent dans la plupart des cas des témoins ou des experts, c'est-à-dire des personnes extérieures à la procédure.

Les parties suisses sont confrontées à des risques procéduraux à l'étranger, qu'elles participent au procès par des moyens électroniques ou en personne. Elles décident d'elles-mêmes si elles souhaitent participer à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence; c'est le cas dans le droit en vigueur et cela le restera sous le nouveau régime. Le choix d'une participation virtuelle ou en personne à la procédure civile étrangère leur appartient. Le Conseil fédéral tient toutefois compte des craintes exprimées par certains participants: il a inclus dans son projet de nouvelle déclaration no 5

22

Voir les lignes directrices de l'OFJ Entraide judiciaire internationale en matière civile, p. 20.

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des dispositions supplémentaires visant la protection des personnes concernées (voir l'al. 3, let. i, j et k).

4.3

Inclusion des conférences téléphoniques

Le nouvel art. 141b, al. 2, CPC dispose que, dans le cadre d'une procédure civile suisse, le tribunal ne peut «renoncer à la transmission de l'image» qu'à titre exceptionnel, «si une urgence particulière ou d'autres circonstances particulières l'exigent dans le cas d'espèce». Il ne serait toutefois pas indiqué d'inscrire une telle restriction à l'al. 3 de la nouvelle déclaration no 5 ou à l'art. 11, al. 2, P-LDIP, car elle reviendrait à faire dépendre l'admissibilité des conférences téléphoniques des circonstances du cas concret. Les conditions auxquelles l'obtention directe de preuves en Suisse sans autorisation préalable est admise devraient dans la mesure du possible être formulées de manière claire.

Limiter l'admissibilité des conférences téléphoniques aux seuls actes d'obtention de preuves, comme le propose un participant à la consultation compliquerait considérablement les dispositions et poserait des problèmes de délimitation. Par ailleurs, le Conseil fédéral estime que l'exclusion totale des conférences téléphoniques réduirait inutilement la marge de manoeuvre des tribunaux civils étrangers, d'autant plus que l'ensemble de la réglementation repose sur le principe du consentement libre (voir le ch. 1.2). Les interrogatoires et les auditions menés par conférence téléphonique requièrent le consentement des personnes concernées.

5

Mise en oeuvre de l'art. 1 de l'arrêté fédéral

5.1

Nouvelle déclaration no 5

Le Conseil fédéral a l'intention de modifier la déclaration no 5 comme suit: 5. Ad art. 15, 16 et 17 Conformément à l'art. 35, la Suisse déclare que l'obtention des preuves selon les art. 15, 16 et 17 est subordonnée à une autorisation préalable du Département fédéral de justice et police. L'al. 3 est réservé. La demande d'autorisation doit être adressée à l'Office fédéral de la justice (OFJ). Une copie de ladite demande doit être transmise à l'autorité centrale du canton où aura lieu l'acte d'instruction.

1

Le commissaire au sens de l'art. 17 peut procéder lui-même à l'obtention des preuves ou seulement la superviser. Il veille au respect des dispositions de la Convention et des conditions dont est assortie l'autorisation ou des conditions énumérées à l'al. 3. En cas d'empêchement, il peut désigner un représentant. Le tribunal peut désigner plusieurs commissaires.

2

Les personnes séjournant en Suisse peuvent être interrogées ou entendues sans autorisation préalable par un commissaire se trouvant à l'étranger ou participer à une audience à l'étranger par conférence téléphonique, par vidéoconférence ou par tout autre 3

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moyen électronique de transmission du son ou de l'image, si les conditions suivantes sont réunies: a)

l'heure et la date de la conférence téléphonique ou de la vidéoconférence sont communiquées en temps utile à l'OFJ et à l'autorité centrale du canton sur le territoire duquel la personne concernée séjourne au moment de la conférence (art. 19); la communication est réputée avoir été faite en temps utile si elle parvient à l'OFJ au moins quatorze jours avant la conférence téléphonique ou la vidéoconférence;

b)

la communication comporte les indications suivantes: ­ désignation et no de référence de l'affaire, ­ désignation du tribunal compétent, ­ noms et adresses des parties et de leurs représentants (y compris les éventuels représentants en Suisse), ­ nom et adresse privée ou professionnelle de la personne concernée et désignation du canton dans lequel elle séjourne pendant la conférence téléphonique ou la vidéoconférence, ­ noms, s'ils sont connus, et fonctions des autres personnes participant à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence, ­ nature et objet de l'affaire et sujet de la conférence téléphonique ou de la vidéoconférence, ­ désignation précise du moyen de communication utilisé et, si elles sont déjà connues, indication des données d'accès, ­ désignation d'un interlocuteur auquel pourra s'adresser l'OFJ ou l'autorité centrale cantonale;

c)

si le tribunal a désigné un commissaire, une copie de la décision est jointe à la communication; celle-ci comporte en outre le nom et l'adresse privée ou professionnelle du commissaire;

d)

les autorités peuvent exiger des informations supplémentaires;

e)

l'autorité centrale cantonale ou une autre autorité par elle désignée peut participer à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence (art. 19);

f)

une déclaration de la personne concernée par laquelle celle-ci reconnaît avoir pris connaissance des présentes conditions et consent à sa participation à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence est jointe à la communication;

g)

la personne concernée peut en tout temps retirer son consentement;

h)

les règles des art. 20 et 21 doivent être respectées;

i)

la personne concernée a le droit d'être interrogée et de s'exprimer dans sa langue maternelle et peut demander une traduction des dépositions essentielles des autres personnes participant à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence;

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j)

les moyens techniques employés garantissent la protection des données personnelles contre tout traitement indu; lors d'une vidéoconférence, le son et l'image doivent parvenir simultanément à tous les participants;

k)

les résultats de l'acte d'obtention de preuves sont utilisés exclusivement aux fins de la procédure dans le cadre de laquelle il est effectué.

Les demandes au sens de l'al. 1 et les communications au sens de l'al. 3 peuvent être adressées à l'OFJ sous forme électronique; elles doivent être rédigées dans une langue officielle du canton concerné ou accompagnées d'une traduction.

4

Les dispositions du droit pénal suisse sur les obligations de secret, en particulier l'art. 273 du code pénal (RS 311.0), sont réservées.

5

5.2

Commentaire par alinéa

Remarques préliminaires La déclaration no 5, qui ne comporte actuellement qu'un seul alinéa, en comptera cinq.

L'al. 1 correspond au texte de la déclaration actuelle, à cela près qu'il règle plus clairement les compétences internes en matière d'octroi des autorisations. L'al. 2 fait état de précisions qui, en partie, figurent actuellement dans les conditions des décisions d'autorisation. L'al. 3 consacre de nouvelles règles spéciales pour l'obtention de preuves sous la forme d'un interrogatoire ou d'une audition par conférence téléphonique ou vidéoconférence. L'al. 4 est consacré aux aspects formels des demandes et communications au sens des al. 1 et 3. L'al. 5 consacre une réserve en faveur des obligations de secret du droit pénal suisse.

Déclaration no 5, al. 1 L'al. 1 se fonde sur l'actuelle déclaration no 5. Les nouveautés sur le plan du contenu consistent dans la réserve en faveur des interrogatoires ou des auditions menés par conférence téléphonique ou vidéoconférence, réglés à l'al. 3, et dans la clarification du déroulement de la procédure.

Le texte actuel de la déclaration no 5 prévoit que les demandes d'autorisations au sens des art. 15 à 17 CLaH70 doivent être adressées à l'autorité centrale du canton où aura lieu l'acte d'instruction. Cette règle, élaborée du temps où les cantons étaient encore compétents en matière de procédure civile, soulève des questions relatives à la répartition des rôles. Le texte est modifié de manière à ce que la demande soit adressée à l'OFJ et à ce que l'autorité centrale cantonale en reçoive une copie. Elle pourra de la sorte faire ses remarques concernant la demande. En même temps, on établit clairement que la compétence en matière d'octroi d'autorisations relève entièrement du DFJP, comme il découle de l'art. 31 OLOGA, adopté après le dépôt de la déclaration no 5. Les autorisations délivrées en vertu du chapitre II de la CLaH70 constituent, comme cela a été dit, des autorisations au sens de l'art. 271 CP. Aucun canton n'a critiqué ces nouvelles règles de compétences lors de la procédure de consultation.

L'un d'entre eux souhaiterait néanmoins une modification encore plus poussée, d'après laquelle les cantons ne participeraient plus du tout aux procédures au sens de la déclaration no 5.

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La déclaration no 5 porte exclusivement sur le chapitre II de la CLaH70. Les règles de compétences restent inchangées pour les demandes au sens du chapitre I de la CLaH70 ou au sens de la CLaH54.

Déclaration no 5, al. 2 L'al. 2 comporte des précisions qui, dans la pratique actuelle, figurent en partie dans les conditions des décisions d'autorisation. Il indique notamment que les commissaires peuvent désigner un représentant en cas d'empêchement. Le représentant assume les prérogatives et les obligations du commissaire à la place de ce dernier.

Déclaration no 5, al. 3, phrase introductive Selon l'al. 3, une autorisation préalable n'est pas nécessaire si l'acte d'obtention des preuves prend la forme d'un interrogatoire ou d'une audition par conférence téléphonique ou vidéoconférence ou par tout autre moyen électronique de transmission du son ou de l'image. Le texte mentionne d'une part «les personnes séjournant en Suisse [...] interrogées ou entendues sans autorisation préalable par un commissaire se trouvant à l'étranger» et d'autre part le fait pour une telle personne de «participer à une audience à l'étranger». Le premier élément correspond à l'art. 17 CLaH70, où il est question des actes d'obtention de preuves effectués par un «commissaire». Le second élément tient compte de la pratique des autorités suisses selon laquelle le fait pour un tribunal d'interroger ou d'entendre une personne par conférence téléphonique ou vidéoconférence équivaut à un interrogatoire mené par un commissaire. Le texte utilise à dessein le terme d'«audience» et non d'«audience d'administration des preuves» ou un autre terme. Le but est d'éviter d'avoir à vérifier à chaque déclaration de la personne concernée si celle-ci relève ou non de l'obtention des preuves, car il n'est pas toujours facile d'opérer une délimitation stricte. Cela ne change rien au fait que la déclaration no 5 est en principe conçue pour les actes d'obtention de preuves, puisqu'elle concerne le chapitre II de la CLaH70 consacré à l'obtention de preuves. Il n'est pas nécessaire de distinguer de manière absolue les interrogatoires et auditions visant l'obtention de preuves des auditions d'un autre type dans la mesure où la CLaH70 (et donc la déclaration no 5) s'appliquera aux deux cas conformément à l'art. 11, al. 3, P-LDIP (voir le commentaire de
cette disposition au ch. 6).

La réglementation s'appliquera dans les cas où la personne concernée séjourne en Suisse pendant la conférence téléphonique ou vidéoconférence. Elle ne prévoit pas que celle-ci doive se rendre dans un lieu particulier (par ex. les locaux d'un tribunal civil) pour les besoins de la conférence. La personne concernée devra toutefois séjourner dans le canton indiqué (voir l'al. 3, let. b). Selon les termes de la réglementation, la personne qui mène l'interrogatoire ou le tribunal qui tient une audience doit en revanche se trouver à l'étranger au moment où la conférence a lieu.

L'exemption de l'autorisation est liée à une série de conditions figurant aux let. a à k, qui découlent pour l'essentiel de la pratique actuelle en matière d'octroi d'autorisations.

Déclaration no 5, al. 3, let. a à k Pour que la souveraineté suisse soit respectée, ainsi que pour la protection de la personne concernée, l'acte devra être annoncé. Cette communication remplace l'obliga14 / 24

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tion de demander une autorisation préalable. La let. a prévoit que l'OFJ et l'autorité centrale cantonale sont informés qu'une conférence téléphonique ou vidéoconférence est prévue, à quelle heure et à quelle date. Peu importe qui fournit ces informations.

Ce peut être le tribunal civil étranger, une partie à la procédure ou son représentant en Suisse ou à l'étranger, ou encore la personne concernée ou son représentant. La communication devra intervenir «en temps utile». Cette notion provient de l'art. 19 CLaH70 et doit être comprise au sens de cette disposition. Il s'agit de donner suffisamment de temps à l'autorité centrale cantonale pour qu'elle soit en mesure de participer à la conférence téléphonique ou vidéoconférence si elle le souhaite. À la demande de nombreux participants à la consultation, la let. a du projet comporte un délai: la communication sera réputée avoir été faite en temps utile si elle parvient à l'OFJ au moins quatorze jours avant la conférence téléphonique ou la vidéoconférence. Les communications reçues à plus proche échéance pourront, en fonction des circonstances du cas concret, être considérées comme ayant été faites en temps utile.

La réglementation n'a pas pour but d'exclure que les autorités puissent accepter des communications à court terme en cas d'urgence.

La let. b comporte une liste des indications relatives à la procédure civile étrangère et à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence prévue et qui doivent figurer dans la communication aux autorités. L'essentiel de ces indications sont déjà requises à l'heure actuelle. Selon la let. c, si le tribunal étranger a désigné un commissaire, il faudra joindre à la communication une copie de la décision. La let. d précise que les autorités pourront exiger des informations supplémentaires.

La fourniture des indications énumérées permettra à la Suisse, et c'est là l'objectif premier, de garder un certain contrôle sur les actes de puissance publique qui ont des implications sur son territoire et en particulier à l'autorité centrale cantonale de décider si elle souhaite prendre part à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence.

La let. e l'y habilite. Cette prérogative résulte de l'art. 19 CLaH70; elle existe donc déjà dans le droit en vigueur. L'art. 19 s'applique également aux cas où l'autorité
compétente pour délivrer l'autorisation l'a donnée de manière générale (art. 17, al. 1, let. a, CLaH70). Les États contractants doivent donc pouvoir jouir de cette prérogative même en cas d'exemption de l'autorisation. Le fait qu'il appartiendra non pas à l'OFJ, autorité qui délivre les autorisations, mais à une autorité centrale cantonale de l'exercer n'est pas problématique, dans la mesure où l'organisation des autorités est l'affaire des États contractants. La participation d'une autorité centrale cantonale à une conférence téléphonique ou à une vidéoconférence aura essentiellement pour but d'assurer le respect des règles de protection de la personne concernée et des obligations de secret s'appliquant en Suisse.

La let. f, qui exige une déclaration de la personne concernée par laquelle celle-ci reconnaît avoir pris connaissance des règles définies et consent à participer à la conférence téléphonique ou vidéoconférence va au-delà de la pratique actuelle. Elle vise à assurer le maintien du niveau de protection actuel de la personne concernée. Dans le droit en vigueur, les décisions d'autorisation indiquent à la personne concernée les droits dont elle dispose. Si l'autorisation disparaît, il faudra lui fournir ces renseignements juridiques sous une autre forme. La déclaration ne devra pas revêtir de forme particulière; la personne concernée pourra par exemple l'envoyer par courriel. Elle pourra retirer son consentement ultérieurement (let. g).

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L'OFJ ou l'autorité centrale cantonale pourront être invités à apprécier de manière informelle si les informations et documents qui leur ont été fournis suffisent à remplir les exigences de la déclaration no 5. Lorsqu'une autorité constate d'elle-même qu'il manque des informations ou des documents, elle pourra en aviser l'auteur de la communication ou l'interlocuteur qui y est désigné (voir la let. b). Elle ne pourra toutefois pas interdire la conférence téléphonique ou la vidéoconférence avec la personne concernée. Si elle estime que, malgré ses avertissements, les conditions énumérées à l'al. 3 ne sont pas respectées, elle pourra faire une dénonciation pénale fondée sur l'art. 271, ch. 1, CP (voir plus bas). Si elle a des doutes sur la conformité de la procédure civile étrangère avec les principes de l'état de droit, elle pourra le faire savoir à la personne concernée.

Les droits procéduraux de la personne concernée découlent principalement des let. g à i, lesquelles renvoient notamment aux art. 20 et 21. CLaH70. L'art. 21 CLaH70 comporte pour sa part un renvoi à l'art. 11 CLaH70, qui règle la dispense de déposer de la personne concernée. Dans la mesure où il n'y a pas de changements quant à l'application des art. 20 et 21. CLaH70, on peut renoncer à les commenter davantage et renvoyer aux explications données dans le message relatif à la ratification de la CLaH7023.

La let. i concernant la langue de l'interrogatoire ou de l'audition reprend une condition fréquemment imposée sous le régime du droit en vigueur. La deuxième partie de la phrase, selon laquelle la personne concernée peut demander une traduction des dépositions essentielles des autres personnes participant à la conférence téléphonique ou à la vidéoconférence, est cependant nouvelle. Elle reprend un principe général du droit suisse dérivé du droit d'être entendu prévu par la Constitution24. Cet ajout est important au vu du champ d'application par analogie de la déclaration no 5 (voir le commentaire de l'art. 11, al. 3, P-LDIP au ch. 6) et répond à une critique énoncée lors de la procédure de consultation.

La première phrase de la let. j concernant la sécurité des données résulte d'une demande de plusieurs participants à la consultation25. La question de la protection des données est traitée dans le commentaire de la let. k ci-dessous. La
2e phrase de la let. j relative à la synchronicité de la transmission du son et de l'image provient de l'art. 141b, al. 2, du CPC révisé.

La let. k fait suite à une proposition d'un participant à la consultation et met en oeuvre le principe de la spécialité26. Cette restriction vise en particulier à exclure l'utilisation des résultats des actes d'obtention de preuves dans une procédure pénale. L'obtention de preuves dans un autre État en matière civile ne doit pas permettre de contourner l'entraide judiciaire en matière pénale.

23 24 25 26

FF 1993 III 1185 Art. 29, al. 2, Cst. (RS 101). Voir l'arrêt du TF 5A_639/2014 du 8 septembre 2015, consid. 4.2.

Voir aussi l'art. 141b, al. 1, let. c, du CPC révisé.

Voir l'arrêt du TF 5P.152/2002 du 26 août 2002.

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Pour le reste, le projet ne va pas au-delà du droit en vigueur. La nouvelle réglementation perdrait en praticabilité si la liste des conditions était excessivement longue.

L'OFJ fournira davantage de détails sur chacune des conditions dans ses lignes directrices Entraide judiciaire internationale en matière civile27.

Si les conditions ne sont pas respectées, le fait d'interroger ou d'entendre une personne en Suisse dans le cadre d'une procédure civile étrangère constituera en règle générale un acte exécuté sans droit pour un État étranger au sens de l'art. 271, ch. 1, CP.

Déclaration no 5, al. 4 À la demande de diverses autorités centrales cantonales (voir le ch. 2.1), l'al. 4 indique que les demandes d'autorisation au sens de l'al. 1 et les communications au sens de l'al. 3 peuvent être adressées à l'OFJ sous forme électronique. Il n'y aura pas d'exigences particulières pour la forme électronique, contrairement à ce que prévoit par exemple l'art. 130, al. 2, CPC. Un simple courriel suffira.

La deuxième phrase précise que les communications doivent être rédigées dans une langue officielle du canton où aura lieu l'acte d'instruction (ou être accompagnées d'une traduction dans cette langue). Dans le cas visé à l'al. 3, il s'agira du canton dans lequel la personne concernée séjourne au moment de la conférence téléphonique ou de la vidéoconférence. Contrairement à la déclaration de la Suisse relative à l'art. 4 CLaH70 (déclaration no 3), les communications ne devront pas impérativement être rédigées dans la langue de la partie du canton concernée. Il en est ainsi d'une part parce qu'elles ne seront pas adressées à une autorité de district (contrairement aux cas visés dans la déclaration no 3), mais à une autorité fédérale et à une autorité centrale cantonale. D'autre part, le district concerné n'est pas toujours prédéfini, contrairement aux demandes d'entraide au sens du chapitre I de la CLaH70. Il suffira que la communication au sens de l'al. 3, let. a, indique dans quel canton la personne concernée séjourne au moment de l'acte d'obtention des preuves.

Comme dans le droit en vigueur, l'OFJ et les autorités cantonales pourront choisir librement la forme sous laquelle ils souhaitent communiquer avec les personnes impliquées; ils pourront notamment utiliser des canaux usuels tels que le téléphone
et les courriels.

Déclaration no 5, al. 5 Cet alinéa rappelle que la permission de procéder directement à des actes d'obtention de preuves ne change rien au fait que la personne concernée doit respecter les obligations de secret du droit suisse, notamment celles prévues aux art. 273 CP (secrets de fabrication ou secrets d'affaires) et 47 de la loi du 8 novembre 1934 sur les banques (LB)28 (secret bancaire). Dans le droit en vigueur, les autorisations au sens de l'art. 17 CLaH70 sont souvent assorties de charges de ce type.

27 28

Disponibles à l'adresse www.rhf.admin.ch > Droit civil > Directives et aide-mémoire.

RS 952.0

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Les dispositions de la loi du 25 septembre 2020 sur la protection des données (LPD)29 ne sont pas incluses à l'al. 5. L'al. 2, al. 3, LPD dispose en effet que «les traitements de données personnelles effectués dans le cadre de procédures devant des tribunaux [...], ainsi que les droits des personnes concernées, obéissent au droit de procédure applicable».

6

Commentaire des dispositions de la LDIP

Art. 11, titre marginal Le titre marginal de l'art. 11 est adapté au nouveau contenu de la disposition, qui ne se limite plus à la transmission des demandes d'entraide judiciaire, mais comprend d'autres principes de l'entraide judiciaire.

Art. 11, al. 1, 1re phrase Pour le cas particulier des téléconférences et vidéoconférences, la nouvelle réglementation vise à créer une exception au principe selon lequel les autorités étrangères doivent passer par la voie de l'entraide judiciaire pour effectuer des actes de puissance publique sur le territoire suisse (voir ci-dessous concernant l'al. 2). Ce principe, qui découle de la conception suisse de la souveraineté, est inscrit dans le nouvel al. 1.

Les actes de puissance publique les plus fréquemment effectués en Suisse dans le cadre de procédures civiles étrangères sont les notifications et les mesures d'obtention de preuves telles que les auditions de témoins, de parties et d'experts, les demandes de production de titres ou les inspections par des représentants du tribunal ou des experts. Ainsi, les notifications et les actes d'obtention des preuves sont l'objet de divers accords multilatéraux et bilatéraux, dont la CLaH54 et la CLaH70. D'autres actes de puissance publique sont néanmoins envisageables sur le territoire suisse, tels que l'audition formelle d'une personne à d'autres fins que l'obtention de preuves. Le nouvel al. 1 couvre également ces actes.

Les formulations «notification d'actes judiciaires et extrajudiciaires» et «actes d'obtention des preuves» sont à interpréter dans le sens des conventions susmentionnées.

Les actes extrajudiciaires sont, comme les actes judiciaires, des actes notifiés par des entités ou des personnes exerçant la puissance publique30. La notion de «procédure civile» doit quant à elle être comprise au sens large et désigne n'importe quelle procédure en matière civile menée devant une telle entité ou personne et pas seulement les procédures menées devant une autorité judiciaire.

29 30

RS 235.1, en vigueur depuis le 1er septembre 2023.

Voir le ch. II.B des lignes directrices de l'OFJ Entraide judiciaire internationale en matière civile, mentionnées au ch. 5.2.

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Art. 11, al. 1, 2e phrase Le renvoi à la voie de l'entraide judiciaire signifie qu'un tribunal étranger, ou une personne par lui mandatée, ne peut effectuer des actes sur le territoire suisse que par l'intermédiaire d'une autorité suisse. Les conditions et le déroulement de la procédure d'octroi de l'entraide judiciaire sont réglés dans les traités internationaux susmentionnés. En l'absence de traité applicable, le tribunal étranger devrait adresser une demande à la Suisse par la voie diplomatique, démarche à la fois compliquée et désuète.

Le droit en vigueur prévoit dès lors déjà, dans les cas précités, que les règles de la CLaH54 s'appliquent (art. 11a, al. 4, LDIP). La nouvelle structure de l'art. 11 LDIP nécessite que le renvoi à la CLaH54 figure à l'art. 11, al. 1. Ainsi, l'art. 11 P-LDIP règle dès lors la nécessité de passer par l'entraide judiciaire et les conditions d'octroi de celle-ci, tandis que l'art. 11a P-LDIP porte sur l'exécution des actes d'entraide judiciaire en Suisse. Les déplacements effectués ne modifient en rien la situation juridique.

Le renvoi à la CLaH54 est limité aux chapitres I et II, qui régissent l'entraide judiciaire au sens de l'art. 11, al. 1, P-LDIP. De fait, cette restriction s'applique déjà largement dans le droit en vigueur, car les chapitres suivants, c'est-à-dire le chapitre III (caution «judicatum solvi») et le chapitre IV (assistance judiciaire gratuite) sont principalement couverts par les art. 11b et 11c LDIP. La CLaH54 a une formulation suffisamment ouverte pour pouvoir s'appliquer aux actes de puissance publique qui n'entrent pas dans les catégories «notifications» et «obtention de preuves» (voir en particulier l'art. 8 CLaH54).

Contrairement à l'art. 11a, al. 4, LDIP en vigueur, le renvoi à la CLaH54 ne portera que sur les actes de puissance publique effectués en Suisse. Le droit de l'État concerné, outre les conventions internationales évoquées et les principes de droit international, détermine dans quelle mesure les tribunaux civils suisses peuvent effectuer des actes de puissance publique à l'étranger. Le droit suisse, notamment l'art. 299 CP (interdiction de toute violation de la souveraineté territoriale étrangère) les oblige à respecter les règles de l'État considéré. Si celui-ci requiert une demande d'entraide judiciaire, elle doit lui être
adressée par l'intermédiaire de l'OFJ en application de l'art. 11, al. 4, P-LDIP (jusqu'ici art. 11 LDIP). Tout cela est conforme au droit en vigueur.

Comme à l'art. 11a, al. 4, LDIP en vigueur, le renvoi à la CLaH54 ne concerne que les États tiers. Si l'État étranger concerné est partie à la CLaH54, celle-ci est applicable d'emblée (voir l'art. 1, al. 2, LDIP). S'il est partie à la CLaH70, c'est celle-ci qui s'applique (voir l'art. 29 CLaH70).

Art. 11, al. 2 L'art. 11, al. 1, P-LDIP vise à codifier le droit en vigueur. La pratique actuelle quant à la nécessité de passer par la voie de l'entraide judiciaire demeure inchangée, de même que les dispositions pertinentes des lignes directrices de l'OFJ Entraide judiciaire internationale en matière civile (voir quant à celles-ci le ch. 5.2 du présent message et le commentaire de la déclaration no 5, al. 3, let. a à k). Deux participants à la consultation ont toutefois exprimé la crainte que cette disposition puisse être perçue

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comme un durcissement de la pratique actuelle. Le nouvel al. 2 vise à répondre à cette crainte.

Il dispose que l'autorité étrangère qui dirige la procédure (ou le représentant d'une partie dans le cadre d'une procédure de discovery selon la pratique américaine) peut s'adresser directement à une partie à l'instance séjournant en Suisse et l'inviter à déposer des actes (prise de position ou renseignements écrits, etc.) ou des moyens de preuve (par ex. un titre au sens de l'art. 177 CPC). La condition en est que l'autorité étrangère ne menace pas la partie de sanctions pénales si celle-ci ne s'exécute pas31 et que l'invitation soit notifiée par la voie de l'entraide judiciaire. Il n'est pas nécessaire de passer par la voie de l'entraide judiciaire si la partie à l'instance a un domicile de notification à l'étranger (par ex. chez son représentant légal dans l'État où est menée la procédure), puisque dans ce cas, la notification ne constitue pas un acte de puissance publique effectué «en Suisse» au sens de l'art. 11, al. 1, P-LDIP.

La partie qui reçoit l'invitation de l'autorité étrangère peut y donner suite sans pour autant se rendre coupable de l'infraction visée à l'art. 271, ch. 1, CP. Elle doit toutefois respecter les limites fixées par l'ordre juridique suisse, et en particulier les obligations de secret figurant dans la loi, notamment le secret de fabrication et le secret d'affaires au sens de l'art. 273 CP et le secret bancaire au sens de l'art. 47 LB. Seul un tribunal suisse peut l'en libérer.

L'art. 11, al. 2, P-LDIP ne s'appliquera pas aux cas dans lesquels un représentant d'une autorité étrangère se rend en Suisse pour récupérer des actes ou des moyens de preuve. De tels actes ne peuvent être accomplis qu'en application des règles et des conditions du chapitre II de la CLaH70 et de la déclaration no 5 de la Suisse. L'al. 2 ne sera pas non plus applicable à la communication d'informations par oral, laquelle relève de l'al. 3.

Art. 11, al. 3, 1re phrase L'al. 3 prévoit une autre exception à l'al. 1, pour les cas où le recours à des moyens de communication électroniques est prévu. Il y aura deux cas de figure dans lesquels il ne s'impose pas de passer par la voie de l'entraide judiciaire: lorsqu'une personne séjournant en Suisse: 1) est censée participer à une procédure civile à l'étranger
ou 2) est censée être interrogée par une personne qui y est habilitée par un tribunal étranger. Comme indiqué au ch. 4, il s'agit de la sorte de couvrir tous les types d'interrogatoires et d'auditions menés dans le cadre d'une procédure étrangère, et pas seulement ceux qui servent à l'administration des preuves. Pour le reste, il s'agit toutefois ici d'une réglementation exhaustive. L'obligation de passer par la voie de l'entraide judiciaire doit par exemple être maintenue pour la transmission électronique de preuves écrites ou la notification électronique d'actes judiciaires.

31

Voir les lignes directrices de l'OFJ Entraide judiciaire internationale en matière civile pour plus de détails, pp. 20 s.

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Art. 11, al. 3, 2e phrase La 2e phrase de l'al. 3 renvoie au chapitre II de la CLaH70. Le recours facilité aux moyens de communication électroniques ne sera possible qu'aux conditions prévues par ce chapitre, à lire à la lumière de la déclaration no 5. Le chapitre II sera applicable «par analogie», car le renvoi vaudra également pour les auditions menées en dehors des procédures d'obtention de preuves, lesquelles ne relèvent pas desdites dispositions de la convention. Le champ d'application de la CLaH70 est, de plus, étendu de manière à ce que ses règles s'appliquent à tous les États, et pas seulement aux États contractants. En conséquence, la même réglementation s'appliquera aux relations avec les États tiers et aux relations avec les États parties à la CLaH70.

L'art. 21, let. a, CLaH70 dispose que seuls les actes d'obtention de preuve «qui [ne sont] pas incompatible[s] avec la loi de l'État de l'exécution» peuvent être effectués.

L'art. 21, let. d, CLaH70 dispose que ces actes «peu[ven]t être accompli[s] suivant les formes prévues par la loi du tribunal devant lequel la procédure est engagée, à condition qu'elles ne soient pas interdites par la loi de l'État de l'exécution». Si le CPC interdit le recours à des moyens de communication électroniques pour l'interrogatoire ou l'audition (voir par ex. l'art. 298, al. 1bis, du CPC révisé), il faut en tenir compte pour les procédures civiles étrangères.

Outre les conventions mentionnées à l'art. 11, ce sont essentiellement les lois de l'État concerné qui déterminent si les tribunaux civils suisses peuvent mener des conférences téléphoniques ou des vidéoconférences avec des personnes séjournant à l'étranger. Le CPC et ses nouvelles dispositions sur le recours aux moyens de communication électroniques n'excluent pas les conférences téléphoniques ou les vidéoconférences internationales. Le régime libéral prévu pour les tribunaux étrangers permettra plus facilement aux tribunaux suisses de mener des conférences téléphoniques ou des vidéoconférences avec des États qui appliquent le principe de réciprocité.

Art. 11, al. 4 L'al. 4 reprend l'essentiel de l'art. 11 LDIP, à l'exception de la nouvelle partie de phrase «Sauf disposition contraire du droit fédéral». Dans la version française, on adapte également la proposition principale, dont la formulation
actuelle était mal comprise: le terme «traiter» suggère le traitement de tous les dossiers, alors que les versions allemande et italienne se limitent à la transmission des demandes d'entraide judiciaire, ce qui est le sens voulu.

La nouvelle partie de phrase donne à comprendre que l'al. 4 a un caractère subsidiaire.

Elle permet en outre de fonder plus soigneusement en droit la pratique actuelle. En règle générale, les dispositions de la LDIP sont présumées remplacer les dispositions plus anciennes sur le même sujet. Or, selon la doctrine dominante, l'art. 11 LDIP dans la version entrée en vigueur en 2011 ne modifie en rien les déclarations faites par le Conseil fédéral en 1994 lors de l'adhésion à la CLaH70 et à la Convention relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (CLaH65)32, déclarations selon lesquelles les autorités centrales chargées de l'exécution de la convention sont cantonales.

32

RS 0.274.131

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Ces déclarations ne concernent que les autorités réceptrices. On conclut du fait qu'aucune autre autorité n'y est citée que les autorités expéditrices sont déterminées par le droit cantonal33. Cette pratique doit elle aussi être maintenue.

Art. 11a, titre marginal et abrogation de l'al. 4 On se reportera au commentaire de l'art. 11, al. 1, 2e phrase, P-LDIP.

7

Conséquences

7.1

Conséquences pour la Confédération

La réglementation proposée ne prévoit pas de nouvelles tâches pour la Confédération.

Le remaniement des compétences à l'al. 1 de la déclaration no 5 permettra à l'autorité fédérale compétente d'accomplir ses tâches de manière plus efficace. On s'épargnera en outre de nombreuses procédures grâce à la suppression des autorisations au cas par cas. Compte tenu de tous ces éléments, la Confédération réalisera des économies.

7.2

Conséquences pour les cantons

Le projet ne prévoit pas non plus de nouvelles tâches pour les cantons. Le remaniement des compétences à l'al. 1 de la déclaration no 5 permettra même de les décharger.

Le fait de s'épargner des procédures aura en outre des conséquences positives sur la charge de travail des autorités cantonales d'entraide judiciaire, d'où un potentiel d'économies également pour les cantons.

8

Aspects juridiques

8.1

Constitutionnalité

L'art. 1 du projet se fonde sur l'art. 54, al. 1, Cst., qui dispose que les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. L'art. 184, al. 2, Cst. habilite le Conseil fédéral à signer les traités et à les ratifier. Aux termes de l'art. 166, al. 2, Cst., c'est à l'Assemblée fédérale qu'il revient d'approuver les traités internationaux, à l'exception de ceux dont la conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral (art. 24, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement [LParl]34; art. 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration [LOGA]35). Les dispositions relatives à la compétence de conclure des traités s'appliquent par analogie aux déclarations et réserves unilatérales relatives aux traités internationaux.

33 34 35

Voir les lignes directrices de l'OFJ Entraide judiciaire internationale en matière civile, pp. 7 et 21.

RS 171.10 RS 172.010

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Il s'agit d'une modification unilatérale des obligations internationales de la Suisse en vertu de la CLaH70, à laquelle le Conseil fédéral ne pourrait procéder seul que si elle était de portée mineure (application par analogie de l'art. 7a, al. 2, 2e phrase, LOGA).

Or ce n'est pas le cas puisque la déclaration no 5 vise la souveraineté de la Suisse et les droits de personnes et contient dès lors des dispositions importantes qui fixent des règles de droit au sens de l'art. 22 LParl. Seuls les détails de la nouvelle réglementation sont de portée mineure. Le projet prévoit par conséquent que l'Assemblée fédérale autorise le Conseil fédéral à modifier la déclaration no 5 et prescrive les contenus essentiels de sa nouvelle mouture.

L'arrêté fédéral par lequel la CLaH70 a été approuvée36 ne mentionnait pas expressément la déclaration no 5. Toutefois, le message qui l'accompagnait37 comportait le texte de toutes les déclarations de la Suisse relatives aux conventions concernées.

L'approbation portait donc également sur le texte des déclarations, ou du moins sur leur contenu.

L'art. 2, en relation avec l'annexe, du projet prévoit des adaptations de la LDIP, laquelle se fonde sur les art. 54 et 122 Cst. (compétence de la Confédération dans les affaires étrangères et concernant la législation en matière de droit civil)38. C'est à l'Assemblée fédérale qu'il revient d'édicter les dispositions importantes qui fixent des règles de droit (art. 164, al. 1, Cst.).

8.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Il s'agit en l'espèce de l'adaptation de la déclaration no 5 de la Suisse sur la CLaH70, qui se fonde sur les art. 15, 16 et 17 CLaH70. Conformément à l'art. 34 CLaH70, tout État peut «à tout moment retirer ou modifier une déclaration».

Les modifications proposées n'ont pas de conséquences sur d'autres obligations internationales de la Suisse.

8.3

Forme de l'acte à adopter

L'approbation de l'Assemblée fédérale porte sur la modification d'une déclaration relative à un traité international. Elle prendra la forme d'un arrêté fédéral, en application par analogie de l'art. 24, al. 3, LParl. La forme de l'arrêté simple ne convient pas, car la modification en question porte sur des dispositions importantes qui fixent des

36

37

38

Arrêté fédéral du 9 juin 1994 concernant trois conventions de La Haye et un Accord européen relatifs à l'Entraide judiciaire internationale en matière civile ou commerciale (RO 1994 2807).

Message du 8 septembre 1993 concernant la ratification de quatre instruments internationaux relatifs à l'Entraide judiciaire internationale en matière civile et commerciale, FF 1993 III 1185.

Plus précisément sur les dispositions en la matière qui figuraient dans l'ancienne Constitution du 29 mai 1874.

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règles de droit (voir le ch. 7.1), lesquelles sont sujettes au référendum (art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.).

Les modifications prévues dans la LDIP, étroitement liées à celles de la déclaration no 5, sont intégrées à l'arrêté fédéral, en application par analogie de l'art. 141a, al. 2, Cst.

8.4

Frein aux dépenses

Le projet ne comporte pas de nouvelles dispositions relatives aux subventions ni ne fonde de nouveaux crédits d'engagement ou de plafonds de dépenses.

8.5

Délégation de compétences législatives

Le projet ne prévoit pas de délégation de compétences législatives.

8.6

Protection des données

La LPD renvoie au droit de procédure applicable pour ce qui est des questions de protection des données (voir le ch. 5.3, commentaire de la déclaration no 5, al. 5). À l'al. 3, let. k, de la nouvelle déclaration no 5, le Conseil fédéral prévoit comme norme minimale le respect du principe de la spécialité (voir le ch. 5.3, commentaire de la déclaration no 5, al. 3).

La nouvelle déclaration no 5 comporte en outre un passage sur la sécurité des données s'agissant du recours aux moyens de communication électroniques (voir le ch. 5.3, commentaire de la déclaration no 5, al. 3).

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