10.444 Initiative parlementaire Code de procédure pénale. Dispositions relatives à la rédaction des procès-verbaux Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats du 16 avril 2012

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet d'une modification du code de procédure civile et du code de procédure pénale que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

16 avril 2012

Pour la commission: La présidente, Anne Seydoux-Christe

2012-0746

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Condensé Conformément au code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (CPP; RS 312.0), en vigueur depuis le 1er janvier 2011, le procès-verbal d'une audition est lu ou remis pour lecture à la personne entendue avant qu'elle y appose sa signature. Cette disposition, qui s'applique aussi lorsque les dépositions ont été enregistrées sur bande sonore, peut avoir pour effet d'allonger considérablement la procédure, en particulier lorsqu'un prévenu est entendu dans une langue étrangère et que le procès-verbal de l'audition doit non seulement lui être lu, mais également être traduit dans sa langue.

Afin de limiter la durée des procédures, la commission estime qu'il devrait être possible de renoncer à la lecture du procès-verbal lorsque l'audition a été enregistrée par des moyens techniques. L'enregistrement assure en effet une documentation complète et exacte de l'audition et permet de rectifier facilement les éventuels malentendus ou erreurs qui se sont glissés dans le procès-verbal. Le champ d'application de la nouvelle réglementation se limite aux procédures menées devant les tribunaux qui ont la compétence de rendre des jugements; les débats devant le tribunal des mesures de contrainte et les auditions menées par la police ou le ministère public dans le cadre de la procédure préliminaire en sont exclus.

C'est pourquoi la commission a proposé les modifications présentées ci-après du code de procédure pénale. Suite à la procédure d'audition, elle a décidé de proposer une réglementation analogue pour le code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC; RS 272), lui aussi entré en vigueur le 1er janvier 2011.

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Rapport 1

Genèse de l'avant-projet

1.1

Initiative parlementaire

Se fondant sur l'art. 109, al. 1, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)1, la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (ci-après «la commission») a décidé, le 20 mai 2010, par 12 voix contre 0 et 1 abstention, d'élaborer une initiative parlementaire, sur proposition de l'un de ses membres.

Cette initiative vise à modifier le code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (CPP)2 de telle sorte que si une audience est enregistrée par des moyens techniques, il ne soit pas nécessaire que le procès-verbal soit lu ou remis pour lecture à la personne entendue, ni qu'il soit signé par elle. Le 15 octobre 2010, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a approuvé la décision de son homologue du Conseil des Etats par 21 voix contre 3, l'habilitant ainsi à élaborer un projet d'acte (art. 109, al. 3, LParl).

1.2

Travaux de la commission

En 2011, la commission a consacré deux séances à la mise en oeuvre de l'initiative parlementaire 10.444. Le 20 octobre 2011, elle a approuvé à l'unanimité un avantprojet de modification du code de procédure pénale et a décidé de le soumettre pour avis à un cercle restreint de milieux concernés dans le cadre d'une audition. Après avoir pris connaissance des avis reçus, elle a complété l'avant-projet en y adjoignant une réglementation analogue pour le code de procédure civile et décidé à l'unanimité, le 16 février 2012, d'adopter le projet d'acte ci-joint. Le 16 avril 2012, elle a adopté le présent rapport.

En vertu de l'art. 112, al. 1, LParl, la commission a été assistée dans ses travaux par le Département fédéral de justice et police.

2

Grandes lignes du projet

2.1

Point de la situation

2.1.1

Généralités

Code de procédure pénale L'art. 78 du code de procédure pénale concernant les procès-verbaux d'audience a la teneur suivante: Les dépositions des parties, des témoins, des personnes appelées à donner des renseignements et des experts sont consignées au procès-verbal séance tenante.

1

1 2

RS 171.10 RS 312.0

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Le procès-verbal est rédigé dans la langue de la procédure; toutefois, dans la mesure du possible, les dépositions essentielles sont consignées dans la langue utilisée par la personne entendue.

2

Les questions et les réponses déterminantes sont consignées textuellement au procès-verbal.

3

La direction de la procédure peut autoriser la personne entendue à dicter elle-même sa déposition.

4

A l'issue de l'audition, le procès-verbal est lu ou remis pour lecture à la personne entendue. Après en avoir pris connaissance, la personne entendue appose sa signature au bas du procès-verbal et en paraphe chaque page. Si elle refuse de lire intégralement ou de signer le procès-verbal, le refus et les motifs invoqués sont consignés au procès-verbal.

5

Si l'autorité pénale a procédé à une audition par vidéoconférence, la déclaration orale de la personne entendue, selon laquelle elle a pris acte du procès-verbal, vaut signature et paraphe de celui-ci. La déclaration est consignée au procès-verbal.

6

Si la lisibilité d'un procès-verbal manuscrit se révèle insuffisante ou si les dépositions ont été enregistrées en sténographie ou par des moyens techniques, le texte en est mis au net sans délai. Les notes et autres enregistrements doivent être conservés jusqu'à la fin de la procédure.

7

L'art. 86, al. 3, de l'avant-projet de CPP3 prévoyait pour sa part l'obligation de lire ou de remettre le procès-verbal pour lecture à la personne entendue uniquement lors d'auditions réalisées au cours de la procédure préliminaire et non dans le cadre d'une procédure devant un tribunal. Pour ce qui est des procès-verbaux établis durant l'audience au tribunal, l'art. 87, al. 2, 1re phrase, AP-CPP disposait que les déclarations essentielles de la personne entendue devaient lui être lues, sauf si elle y renonçait. Conformément à la 2e phrase, la personne entendue était toutefois tenue de s'exprimer sur l'exactitude du procès-verbal, ce qui semble difficilement concevable si la personne en question n'en a pas pris acte, c'est-à-dire si le procès-verbal ne lui pas été lu ou remis pour lecture4.

S'agissant de l'établissement des procès-verbaux des auditions, les dispositions actuelles distinguent trois phases:

3 4

­

la consignation des dépositions des personnes entendues (art. 78, al. 1, CPP);

­

la lecture du procès-verbal ou sa remise pour lecture à la personne entendue (art. 78, al. 5, 1re phrase, CPP), le contenu devant parfois être retraduit dans la langue de celle-ci;

­

après lecture, la signature du procès-verbal par la personne entendue (art. 78, al. 5, 2e phrase, CPP).

«Avant-projet d'un code de procédure pénale suisse», Office fédéral de la justice, Berne 2001.

Selon Peter Popp (cf. article intitulé «Einvernahmeprotokoll in der Hauptverhandlung.

Anmerkungen zu einer parlamentarischen Initiative» et paru dans le 2e numéro de l'année 2011 de la revue de droit pénal suisse forumpoenale, pp. 98 et suivantes), même si la réglementation prévue par l'avant-projet ne prévoyait pas une obligation de lire le procèsverbal à la personne entendue, dans les faits, cette dernière aurait de toute façon dû en prendre connaissance pour pouvoir s'exprimer sur son exactitude.

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Code de procédure civile Le CPC, en vigueur depuis le 1er janvier 2011, règle comme suit le versement des dépositions des témoins au procès-verbal (art. 176): L'essentiel des dépositions est consigné au procès-verbal, signé par le témoin. Les questions complémentaires des parties qui ont été rejetées sont également portées au procès-verbal sur requête d'une partie.

1

Les dépositions peuvent de plus être enregistrées sur bandes magnétiques, vidéo ou par tout autre moyen technique approprié.

2

Les art. 187, al. 2, et 193 CPC renvoyant à l'art. 176, ses règles s'appliquent par analogie à la consignation des rapports d'experts, des interrogatoires et des dépositions des parties au procès-verbal.

Il en résulte donc, comme dans le droit de la procédure pénale, trois étapes en matière d'établissement des procès-verbaux d'audition: ­

la consignation par écrit de l'essentiel des dépositions du témoin et des éventuelles questions complémentaires rejetées (art. 176, al. 1, CPC);

­

la lecture du procès-verbal ou sa remise pour lecture au témoin; cette phase n'apparaît pas directement dans la loi, contrairement au CPP, mais est une condition nécessaire pour que le témoin puisse le signer;

­

la signature du procès-verbal par le témoin (art. 176, al. 2, CPC).

2.1.2

Motifs à la base de la réglementation en vigueur

La réglementation en vigueur dans le CPP et le CPC repose sur les considérations suivantes: ­

Elle compense le fait que le procès-verbal ne doive redonner que le sens général des dépositions (art. 78, al. 3 a contrario, CPP et art. 176, al. 1, et 235, al. 2, CPC); étant donné qu'il suffit souvent de consigner le sens ou l'essentiel des dépositions du témoin et non de les consigner textuellement, un contrôle s'impose pour vérifier si le procès-verbal est conforme à ses déclarations. C'est le cas lorsque la personne entendue confirme l'exactitude du procès-verbal.

­

Elle assure la documentation du tribunal et des parties et leur permet de disposer de procès-verbaux exempts d'ambiguïté, non modifiables et pouvant servir de base aux délibérations et aux plaidoiries.

­

Elle rend en grande partie superflue la rectification du procès-verbal après l'audience (art. 79 CPP et art. 235, al. 3, CPC).

­

Elle évite que la deuxième instance doive évaluer l'exactitude du procèsverbal, lorsqu'une partie attaque le jugement en première instance du fait qu'il repose sur un procès-verbal soi-disant incorrect, en faisant valoir par exemple que la traduction est erronée.

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2.1.3

Critiques

Les opposants à la réglementation en vigueur critiquent le fait que la relecture ou la lecture à voix haute (couplée au besoin avec une rétro-traduction) de même que le processus de signature allongent notablement les débats. De plus, ils trouvent que cette réglementation a obligé plusieurs cantons à abandonner des systèmes qui ont fait leurs preuves.

Avant l'entrée en vigueur du CPP, on supputait que les opérations susmentionnées se traduiraient par un allongement des débats du double, voire du triple5. Or, à la faveur d'une phase de test mise sur pied par le canton de Zurich, il s'est révélé que, dans les cas simples, la durée des débats ne s'accroissait que d'environ 50 % alors que, dans les cas complexes, elle tendait à doubler, cette durée supplémentaire étant compensée par ailleurs (du moins partiellement)6.

2.2

La nouvelle réglementation proposée

2.2.1

L'avant-projet et les résultats de la procédure d'audition

Le 20 octobre 2011, la commission a adopté un avant-projet de modification de l'art. 78 CPP, qui permet de renoncer à la lecture du procès-verbal lorsque l'audition a été enregistrée par des moyens techniques. Elle l'a soumis pour avis à un cercle restreint de milieux concernés, dans le cadre d'une audition, du 31 octobre au 31 décembre 20117.

Ont été consultés: la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP), le Tribunal pénal fédéral (TPF), les Juristes démocrates de Suisse (JDS), la Conférence des autorités de poursuite pénale de Suisse (CAPS), l'Association suisse des magistrats de l'ordre judiciaire (ASM), la Conférence des présidents des tribunaux cantonaux de Suisse centrale et du canton de Zurich, la Société suisse de droit pénal des mineurs (SSDPM) et la Fédération suisse des avocats (FSA).

A part la CdC, tous les organismes sollicités se sont prononcés. Par ailleurs, la Cour suprême du canton de Schaffhouse, le Tribunal cantonal du canton d'Argovie et le Centre patronal se sont exprimés. Au total, la commission a donc reçu onze avis.

Une nette majorité des participants à l'audition8 ont approuvé la révision proposée.

A l'inverse, les JDS et la FSA se sont montrés critiques à son égard. Ceux-ci estiment que, outre les questions de fond qu'elle soulève, cette révision intervient trop

5 6

7

8

Niklaus Schmid, Schweizerische Strafprozessordnung. Praxiskommentar, Zurich/St-Gall, 2009, no 7 ad art. 78.

Peter Marti, «Das Protokollieren von Einvernahmen nach der Schweizerischen Strafprozessordnung aus der Sicht eines Zürcher Richters Fluch oder Segen?» dans: forumpoenale 2/2011, pp. 91 ss et 95.

Le rapport sur les résultats de l'audition est disponible sur le site Internet des commissions des affaires juridiques: www.parlament.ch/f/dokumentation/berichte/berichtelegislativkommissionen/kommission-fuer-rechtsfragen-rk/Pages/default.aspx SSDPM, ASM, Tribunal pénal fédéral, CCDJP, Conférence des présidents des tribunaux cantonaux de Suisse centrale et du canton de Zurich, CAPS, Centre patronal, Tribunal cantonal du canton d'Argovie, Cour suprême du canton de Schaffhouse.

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tôt, le nouveau code de procédure pénale étant entré en vigueur le 1er janvier 2011.

A noter que la CAPS partage cet avis.

Pour les partisans de la révision, les dispositions proposées permettent de simplifier la procédure, de réduire la durée des débats et, par conséquent, de réaliser des économies9, en particulier lors de procès de grande envergure ou dans les cas où le procès-verbal doit être traduit10. Par ailleurs, la réglementation actuelle ne permet pas de procéder à un véritable interrogatoire dans le cadre des débats ou de la procédure de recours11; les nouvelles dispositions devraient permettre au tribunal de s'adresser plus librement à la personne auditionnée pour lui demander de préciser certains points de sa déposition12. Les partisans de la révision soulignent en outre que certains anciens codes cantonaux ne prévoyaient pas de dispositions relatives à la rédaction des procès-verbaux analogues à celles contenues dans le code de procédure pénale, et que cela n'avait jamais posé le moindre problème13.

Les voix critiques estiment que les nouvelles dispositions limiteraient la possibilité pour la personne auditionnée de vérifier, de compléter ou de corriger les déclarations qu'elle a faites lors des débats, ce qui est un élément important du droit à un procès équitable14. Il est souligné que les appareils d'enregistrement les plus modernes peuvent présenter des défauts et que le risque de perdre une partie des données enregistrées à la suite d'une mauvaise manipulation existe15. Vu la complexité des processus techniques ou psychologiques présentés par les experts dans le cadre de leurs dépositions, il serait absolument nécessaire que ces derniers continuent d'attester l'exactitude du procès-verbal en y apposant leur signature. La FSA rappelle que les cantons qui appliquent depuis un certain temps les dispositions actuelles en matière de rédaction des procès-verbaux ont rapporté des expériences très positives.

Enfin, certains ont proposé de prévoir une révision analogue du code de procédure civile, dont les dispositions en matière de rédaction des procès-verbaux (art. 176, al. 1, 1re phrase et art. 193) se traduisent également par un allongement des débats. Il paraît judicieux de prévoir des règles parallèles dans les deux codes16.

2.2.2

Considérations générales sur la réglementation proposée

La réglementation proposée respecte la règle selon laquelle les dépositions doivent toujours être consignées au procès-verbal. Elle est donc en harmonie avec l'art. 76, al. 4, CPP et l'art. 176, al. 2, CPC, aux termes desquels les actes de procédure peuvent être enregistrés sur support-son ou support-image, en sus ­ et non au lieu ­ d'être consignés. La nouvelle réglementation exige également que l'essentiel des dépositions soit consigné séance tenante et en substance durant les débats, ce qui 9 10 11 12 13 14 15 16

ASM, Tribunal cantonal du canton d'Argovie, Cour suprême du canton de Schaffhouse.

TPF CAPS Cour suprême du canton de Schaffhouse, ASM.

Cour suprême du canton de Schaffhouse, ASM.

JDS JDS Conférence des présidents des tribunaux cantonaux de Suisse centrale et du canton de Zurich, Tribunal cantonal du canton d'Argovie, Cour suprême du canton de Schaffhouse.

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rend inutile toute révision du procès-verbal à l'issue de l'audience17. Si le procèsverbal devait à l'avenir être rédigé après les débats sur la base des enregistrements audio, le rédacteur serait alors obligé de tenir des procès-verbaux détaillés et parfois même de reprendre textuellement les propos tenus, d'où une mise au net particulièrement chronophage du texte à l'issue de l'audience18, ce que la nouvelle réglementation tient à éviter.

La nouvelle réglementation du CPP prévoit de confier la compétence de statuer une dérogation aux dispositions réglant le mode d'établissement des procès-verbaux, non pas à la direction de la procédure, mais au tribunal, notamment en raison de l'importance et de la finalité de la lecture ainsi que de la signature des procèsverbaux d'audition (cf. ch. 2.1.2). De plus, une décision de renoncer à ces deux opérations toucherait directement tous les membres du tribunal, ces derniers pouvant être amenés à écouter l'enregistrement des dépositions lorsqu'ils délibèrent sur le jugement. En outre, il n'est pas inconcevable que l'on renonce à la lecture et à la signature du procès-verbal, non pas de la totalité des débats, mais de l'une ou l'autre audition; en l'occurrence, il semblerait inapproprié qu'une telle simplification soit arrêtée par la seule direction de la procédure et non par le plénum du tribunal. En procédure civile en revanche, le membre du tribunal à qui l'administration des preuves est déléguée conformément à l'art. 155, al. 1, CPC pourra décider de s'écarter de la procédure ordinaire de rédaction du procès-verbal.

Le champ d'application de la nouvelle réglementation devrait se limiter aux tribunaux pénaux et civils qui ont la compétence de rendre des jugements; les débats devant le tribunal des mesures de contrainte devraient cependant en être exclus. Les sujets que ce dernier est appelé à traiter étant très limités, les auditions sont généralement brèves et il est rare que des personnes autres que le prévenu soient citées à comparaître: il semble donc qu'il ne soit pas nécessaire de prévoir une possibilité de simplifier l'établissement du procès-verbal. Les nouvelles règles ne seront pas applicables aux auditions qui ont lieu durant la procédure préliminaire, si bien que la police et le procureur général devront toujours lire le procès-verbal ou le
donner à lire à la personne entendue qui, ensuite, le confirmera. Cette démarche est rendue nécessaire avant tout par le fait qu'il est rare que le tribunal entende encore une fois directement les témoins dans le cadre de la procédure principale (cf. art. 343 CPP). Il est donc impératif que le procès-verbal pris durant la procédure préliminaire soit conforme aux déclarations des témoins.

La commission estime que la réglementation proposée permettra d'accroître l'efficacité de la procédure, tout en garantissant un équilibre raisonnable entre un traitement diligent des procès et le maintien des principes de procédure pénale et civile (cf. ch. 2.1.2). Ainsi, le tribunal pourra renoncer à lire le procès-verbal, ce qui contribuera à raccourcir la procédure, mais les dépositions devront toujours être consignées en substance et séance tenante au procès-verbal. En outre, la possibilité de 17

18

Peter Marti est aussi partisan de combiner l'obligation de consigner les dépositions au procès-verbal séance tenante, d'une part, et la renonciation à la lecture et à la signature du procès-verbal, d'autre part («Das Protokollieren von Einvernahmen nach der Schweizerischen Strafprozessordnung aus der Sicht eines Zürcher Richters - Fluch oder Segen?» dans: forumpoenale 2/2011, p. 97).

Telle était la pratique adoptée par les tribunaux du canton de Zurich à l'époque où la procédure pénale était régie par le droit cantonal, pratique qui les obligeait à consacrer énormément de temps à la mise au net du procès-verbal (Peter Marti, «Das Protokollieren von Einvernahmen nach der Schweizerischen Strafprozessordnung aus der Sicht eines Zürcher Richters - Fluch oder Segen?» dans: forumpoenale 2/2011, p. 95).

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rectifier le procès-verbal (cf. art. 79 CPP et art. 235, al. 3, CPC) garantit que des modifications pourront également y être apportées ultérieurement, sur demande.

Considérant le fait que certains cantons procédaient déjà de la sorte avant l'entrée en vigueur du CPP et du CPC en janvier 2011, sans que cela pose de problèmes, la commission est d'avis qu'il est opportun de réintroduire cette possibilité. L'usage de cette dernière demeurera facultatif et les tribunaux qui ont la compétence de rendre des jugements seront libres de procéder conformément à la règle générale prévue par le CPP et le CPC.

3

Commentaire article par article

3.1

Code de procédure civile

art. 176 al. 1 Selon les dispositions en vigueur, le témoin doit signer le procès-verbal sans impérativement en prendre connaissance en écoutant la lecture ou en le lisant lui-même.

Cette étape sera désormais prévue expressément dans la loi sans que la situation juridique change pour autant. Grâce à cette adaptation, les réglementations seront analogues dans le CPP et le CPC. Pour le reste, l'al. 1 demeure inchangé.

al. 3 Ce nouvel alinéa permet au tribunal ou au membre du tribunal à qui l'administration des preuves est déléguée de renoncer à lire ou à remettre le procès-verbal pour lecture au témoin avant de le lui faire signer si, conformément à l'al. 2, les dépositions ont été enregistrées par des moyens techniques durant les débats (bandes magnétiques, vidéo ou tout autre moyen approprié). L'obligation de consigner en substance et séance tenante les déclarations du témoin et les questions complémentaires rejetées des parties au sens de l'al. 1 demeure.

Le fait de renoncer à lire le procès-verbal ou à le remettre pour lecture au témoin confère une importance majeure aux enregistrements. Ils doivent par conséquent être versés au dossier et conservés avec le procès-verbal pour pouvoir être utilisés à un moment ultérieur, en particulier pour rectifier le procès-verbal ou en cas de recours.

Du fait des renvois inscrits aux art. 187, al. 2, et 193 CPC, cette réglementation s'applique par analogie aux rapports d'experts présentés oralement et aux interrogatoires et dépositions des parties.

art. 407a Contrairement à ce qui est prévu de manière générale dans les dispositions transitoires contenues à l'art. 404, al. 1, CPC, la disposition transitoire relative à cette modification prévoit que le nouveau droit s'applique aux procédures en cours, pour les auditions de témoins, les rapports d'experts présentés oralement, les interrogatoires et les dépositions des parties.

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3.2

Code de procédure pénale

art. 78 al. 5bis Le nouvel alinéa proposé à l'art. 78 établit clairement que si le tribunal peut exempter la personne entendue de la lecture et de la signature du procès-verbal, il ne peut, en revanche, pas déroger à l'obligation de consigner au procès-verbal les dépositions séance tenante et ­ généralement ­ en substance. Etant donné leur importance, les enregistrements devront être versés au dossier pour être disponibles ultérieurement.

En outre, l'exemption susmentionnée ne vaut que pour les débats. Il en résulte que devant le tribunal des mesures de contrainte, les procès-verbaux d'audience doivent toujours être lus et signés. En revanche, comme l'art. 405, al. 1, CPP contient un renvoi aux dispositions sur les débats de première instance, l'exemption en question est applicable aux débats d'appel. Quant à la procédure de recours, elle ne comporte pas d'auditions puisqu'elle se déroule toujours en la forme écrite (art. 397, al. 1, CPP).

al. 7 Le libellé en vigueur de cette disposition laisse supposer que les auditions peuvent être enregistrées par des moyens techniques et qu'en pareil cas on peut se dispenser de consigner les dépositions séance tenante et en substance. Une telle interprétation est en contradiction avec l'art. 76, al. 4, CPP, qui prévoit la possibilité d'enregistrer les dépositions par des moyens techniques en sus ­ et non en lieu et place ­ d'un procès-verbal écrit. Le nouvel al. 5bis proposé ne permet de dispenser que de la lecture et de la signature du procès-verbal mais non de la rédaction de celui-ci séance tenante et en substance. L'al. 7, dans sa formulation actuelle, serait en contradiction avec cette idée puisqu'il semble autoriser l'établissement du procès-verbal a posteriori sur la base de l'enregistrement réalisé par des moyens techniques.

4

Conséquences financières et effet sur l'état du personnel

Pour la Confédération et les cantons, les modifications proposées n'entraîneraient ni dépenses supplémentaires, ni répercussions sur le personnel. Au contraire, la possibilité de renoncer à la lecture et à la signature du procès-verbal permettrait de réduire la durée des débats et, par conséquent, de réaliser des économies. L'obligation de conserver les enregistrements n'entraînerait pas non plus de coûts notoires, vu les techniques actuellement disponibles.

5

Constitutionnalité

En vertu de la compétence législative que lui confèrent les art. 122, al. 1 et 123, al. 1, de la Constitution en matière de droit civil et de droit pénal, la Confédération est habilitée à édicter des dispositions dans ce domaine.

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