ad 94.434 n Initiative parlementaire Sandoz Nom de famille et droit de cité des époux et des enfants Rapport du 31 août 1998 de la Commission des affaires juridiques du Conseil national Avis du Conseil fédéral du 19 avril 1999

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 21quater, al. 4, de la loi sur les rapports entre les conseils (LREC; RS 171.11), nous vous soumettons notre avis sur le rapport et la proposition du 31 août 1998 de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (FF 1999 . . .) demandant l'adoption d'un projet de modification du code civil (CC). La commission précitée propose d'abroger les art. 30, al. 2, 134, al. 1 et 2, 149 CC, et l'art. 44, let. a, de l'organisation judiciaire (OJ; RS 173.110), de modifier les art.

160, 161, 267a, 270, et 271 CC, l'art. 8a, titre final du CC et l'art. 4, al. 2, de la loi fédérale sur la nationalité (LN; RS 141.0), ainsi que d'adopter les nouveaux art.

160a et 270a CC. La modification envisagée concerne le droit relatif au nom patronymique et a pour but de réaliser l'égalité des époux. Elle entraîne également des changements relatifs au patronyme des enfants. En outre, les règles sur le droit de cité communal et cantonal des époux et des enfants sont modifiées afin de concrétiser le principe de l'égalité des sexes.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 avril 1999

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Ruth Dreifuss Le chancelier de la Confédération, François Couchepin

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1999-4550

Avis 1

Situation initiale

Madame Sandoz, ancienne conseillère nationale, a déposé le 14 décembre 1994 une initiative parlementaire conçue en termes généraux demandant la modification des dispositions du code civil concernant le nom de famille des époux pour assurer l'égalité entre hommes et femmes.

La révision du droit matrimonial du 5 octobre 1984, entrée en vigueur le 1er janvier 1988, a déjà cherché à instituer l'égalité entre les époux, en leur accordant les mêmes droits et obligations dans le mariage. Si ce but a été en principe atteint pour les effets du mariage et le domaine patrimonial, elle n'a en revanche pas permis d'assurer l'égalité des époux quant au droit du nom et au droit de cité. Lorsqu'il s'agit de réglementer le nom de famille d'un individu, plusieurs critères sont à prendre en considération. Le nom sert tout d'abord à désigner une personne et à la distinguer des autres; il est un élément particulièrement important des droits de la personnalité. L'attribution du nom de famille poursuit ensuite un but d'intérêt public, puisqu'il permet aux autorités d'identifier une personne et de l'inscrire dans les registres de l'état civil. Le nom a aussi pour fonction de rattacher la personne à une famille donnée en marquant ainsi l'unité de la famille. Par ailleurs, l'égalité entre hommes et femmes est également un élément à prendre en compte lors de la réglementation du nom. Etant donné ces différents critères et les diverses significations attachées au nom de famille, la question du droit du nom, ainsi que celle du droit de cité cantonal et communal, ont fait l'objet d'importants débats au sein du Parlement, au cours de la procédure législative de 1984. La solution finalement adoptée à l'époque est un compromis qui ne garantit pas pleinement le principe de l'égalité des sexes sur ces points.

Le nouveau droit du mariage est entré en vigueur il y a déjà plus de dix ans. Depuis lors, les conceptions de la société ont évolué en faveur d'une reconnaissance de l'importance du principe de l'égalité entre hommes et femmes. La jurisprudence des tribunaux s'est également développée en conséquence. Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme a, dans son arrêt du 22 février 1994 dans l'affaire Burghartz v. Suisse (série A no 280), déclaré inefficace la réserve faite par la Suisse dans le protocole no 7 à la Convention
européenne des droits de l'homme, relative au droit du nom et au droit de cité. Suite à cette décision, le Conseil fédéral a modifié l'art.

177a de l'ordonnance sur l'état civil (RS 211.112.1) et tiré ainsi les conséquences d'une interprétation du code civil conforme à la constitution et aux Droits de l'homme, telle qu'elle avait déjà été demandée par la doctrine avant l'arrêt de la Cour européenne1.

L'initiative Sandoz propose une réglementation qui prend en compte cette évolution.

Comme l'a montré la procédure de consultation, le temps est effectivement venu de garantir à chacun des époux les mêmes droits quant au choix de leur propre nom de famille et de celui de l'enfant. Le fait que la révision proposée par la Commission des affaires juridiques du Conseil national comprend aussi la question du droit de

1

Cyril Hegnauer et Peter Breitschmid, Grundriss des Eherechts, 3e éd., Berne 1993, no 13.28, p. 131 s.

4895

cité cantonal et communal, afin de supprimer l'inégalité entre hommes et femmes dans ce domaine également, est conforme à cette évolution.

2

Avis du Conseil fédéral

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Soutien de principe au projet de la Commission des affaires juridiques du Conseil national

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Choix du nom de famille des époux

L'initiative tend avant tout à modifier le droit relatif au nom patronymique afin de réaliser l'égalité entre l'homme et la femme. L'art. 160, al. 1, du projet de la commission permet aux fiancés de choisir, par une déclaration à l'officier de l'état civil, un nom de famille commun, qui est le nom actuel ou de célibataire du fiancé ou de la fiancée. Ceux-ci peuvent également déclarer vouloir garder leur nom actuel ou de célibataire. A défaut de déclaration, les époux conservent leur nom actuel en vertu de l'art. 160, al. 2, du projet. Il est prévu de renoncer au double nom officiel tel qu'il est actuellement prévu à l'art. 160, al. 2 et 3, CC et figurait à l'art. 160, al. 3 et 4, du projet mis en consultation.

Le Conseil fédéral approuve ces propositions dans leur principe. Le libre choix du nom de la fiancée ou du fiancé comme futur nom de famille est conforme au principe d'égalité et souligne le droit à l'autodétermination des conjoints. Le nom de famille est un élément essentiel de l'identité de la personne, qui justifie que les fiancés se déterminent ensemble sur ce point lors de leur mariage. La liberté de chacun des conjoints quant à cet aspect important de sa personnalité est pleinement garantie par l'alternative permettant de prendre le nom de son conjoint ou de conserver son nom actuel ou de célibataire.

Le Conseil fédéral ne peut en revanche se rallier à la proposition consistant à supprimer le double nom officiel qui a été introduit lors de la révision du droit matrimonial de 1988. Cela entraînerait une profonde modification de la réglementation du nom; or, une grand partie de la population aurait du mal à comprendre ce changement. Lors de la procédure de consultation, la suppression du double nom n'a été requise que par 12 cantons et 8 organisations intéressées (sur 41). La majorité approuve donc le maintien du double nom. Celui-ci répond d'une part au besoin d'assurer la continuité du nom et partant les droits de la personnalité des fiancés et met d'autre part en évidence le lien qui unit les époux entre eux et à leurs enfants.

Le double nom s'est bien implanté et jouit d'une popularité grandissante. L'on ne comprend dès lors pas qu'on veuille y renoncer. Par ailleurs, une telle solution pousserait encore davantage les fiancés à choisir un nom de famille commun afin de montrer
l'appartenance commune. Contrairement au projet mis en consultation, la possibilité de porter le double nom devrait toutefois non pas être réservée au seul fiancé qui prend le nom de l'autre comme nom de famille mais être ouverte aux deux époux lorsque chacun d'eux conserve son nom.

A l'avenir, aussi bien les personnes divorcées que les veufs et les veuves devraient avoir la possibilité de reprendre leur nom précédent (voir à cet égard le ch. 212).

Dès lors, le Conseil fédéral est d'avis qu'il n'existe pas de besoin impérieux de permettre aux fiancés qui n'optent pas pour un nom de famille commun de reprendre leur nom de célibataire au lieu qu'ils gardent leur nom porté avant le mariage (art.

160, al. 1, ch. 2 P).

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Aux yeux du Conseil fédéral, le souhait de la commission de simplifier la réglementation du nom est tout à fait légitime. Ce faisant, il ne faut toutefois pas porter préjudice à des impératifs de politique familiale tout aussi légitimes. Si l'on considère qu'il y a lieu de limiter la liberté de choix en vue d'une simplification du droit, le Conseil fédéral souhaite alors soumettre à la discussion une autre solution. Les fiancés devraient pouvoir opter entre un nom de famille commun ou le maintien de leur nom actuel suivi du nom de leur partenaire. Cette alternative présenterait l'avantage de réaliser non seulement l'égalité de l'homme et de la femme mais permettrait aussi d'assurer quelque peu l'unité du nom au sein de la famille, dans le sens de la réglementation de 1988.

La commission propose à l'art. 160, al. 3, du projet, que les conjoints ayant conservé les noms qu'ils portaient avant le mariage puissent choisir un nom de famille commun au moment de la naissance ou de l'adoption de leur premier enfant. De l'avis du Conseil fédéral, cette modification doit être approuvée si l'on part de la proposition de la commission. En effet ­ outre que de nombreux avis ont été émis en faveur d'un tel choix lors de la consultation ­, elle favorise l'unité du nom de famille au moment de la naissance ou de l'adoption du premier enfant des conjoints.

Pour résumer, le Conseil fédéral propose de formuler l'art. 160 comme suit: Art. 160 1 Les

fiancés déclarent à l'officier de l'état civil:

a.

Qu'ils porteront comme nom de famille commun le nom actuel ou de célibataire du fiancé ou de la fiancée;

b.

Qu'ils conserveront chacun leur nom actuel.

2A

défaut de déclaration des fiancés, chacun conserve son nom actuel.

3 Lorsqu'ils

conservent leur nom actuel, l'un et l'autre fiancé peuvent déclarer vouloir ajouter à leur nom actuel celui de l'autre.

4 Lorsque les fiancés portent déjà un double nom, seul le premier nom peut être choisi comme nom de famille ou être utilisé pour former un double nom.

5 Les conjoints qui ont conservé les noms qu'ils portaient avant le mariage peuvent déclarer au moment de la naissance ou de l'adoption de leur premier enfant commun vouloir porter désormais le nom de la femme ou celui du mari comme nom de famille commun.

Proposition alternative: Art. 160 B. Nom de famille 1 Les fiancés choisissent parmi leur nom actuel ou de célibataire leur nom de famille commun.

2 A défaut de choix, ils conservent chacun leur nom actuel auquel est ajouté le nom de l'autre.

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3 Lorsqu'ils portent déjà un double nom, seul le premier nom peut être choisi comme nom de famille ou être utilisé pour former un double nom.

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Nom de famille après la dissolution du mariage

Le nouvel art. 160a CC, qui règle de manière uniforme la question du nom de famille après la dissolution du mariage, quelle qu'en soit la cause, ne doit en revanche pas être accepté tel quel. Si nous sommes d'accord avec l'objet de la nouvelle réglementation, nous ne pouvons y adhérer du point de vue de la systématique légale.

En effet, régler par une disposition qui se trouverait sous le titre cinquième du code civil, intitulé «Des effets généraux du mariage», une conséquence du divorce, du décès de l'un des conjoints, de la déclaration de nullité ou de la dissolution pour cause d'absence ne nous paraît pas correct, parce que ces situations présupposent justement la dissolution du lien conjugal. Dès lors, le Conseil fédéral propose de régler le cas du changement du nom de famille suite au décès de l'un des conjoints par un nouvel art. 30a CC.

Proposition du Conseil fédéral: Art. 30, titre marginal 2.

Changement de nom a. En général

Art. 30a (nouveau) b.

En cas de décès d'un conjoint

En cas de décès de l'un des conjoints, le conjoint survivant qui a changé de nom conserve le nom de famille qu'il a acquis lors du mariage, à moins que, dans le délai d'une année à compter du décès, il ne déclare à l'officier de l'état civil vouloir reprendre son nom de célibataire ou le nom qu'il portait avant le mariage.

Art. 119, titre marginal et al. 2 a. Nom de famille 2 Abrogé

Commentaire: La question du nom de famille après la dissolution du mariage est réglée de la façon suivante par le code civil. Le changement de nom suite à la dissolution du mariage par le divorce sera régi, dès le 1er janvier 2000, par l'art. 119, al. 1, CC rév.

(modification du 26 juin 1998; RO 1999 1118 ss). Selon l'art. 109, al. 2, CC rév., les dispositions relatives au divorce s'appliqueront par analogie aux effets du jugement d'annulation. Quant à la déclaration d'absence, elle entraînera, dès le 1er janvier 2000, la dissolution du mariage d'après l'art. 38, al. 3, CC rév. Peuvent être exercés les mêmes droits qu'en cas de décès du conjoint (art. 38, al. 1, CC). Le fait que le délai d'une année pour la déclaration de changement de nom se calcule depuis le

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moment de la dissolution du mariage entrée en force découle de l'interprétation de la loi. Une disposition expresse n'est pas nécessaire. En revanche, il reste à régler par un nouvel art. 30a CC la situation du changement de nom suite au décès de l'un des conjoints.

Par ailleurs, le second al. de l'art. 119 CC rév. devra être abrogé, puisque, selon le projet de la Commission des affaires juridiques du Conseil national, le mariage n'aura plus d'effet sur le droit de cité cantonal et communal des époux. Dès lors, il convient d'adapter et de préciser le titre marginal de l'art. 119 CC rév. qui ne concernera plus que le nom de famille des conjoints après le divorce. En outre, les références faites, dans le projet de la commission, aux art. 134, al. 1 et 2, et 149 CC, dans la version de 1984 doivent être biffées.

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Droit de cité des époux

Nous approuvons également la modification de l'art. 161 CC, qui supprime le lien entre le mariage et le droit de cité de l'épouse et ne favorise plus celle-ci. Dans le cadre actuel de la tenue des registres d'état civil, la solution envisagée par la commission pourrait cependant avoir pour conséquence d'augmenter la charge administrative des offices d'état civil. En effet, dans l'esprit du principe de l'égalité entre les sexes qui caractérise le présent projet, il conviendrait d'inscrire les enfants d'un couple dans le registre des familles du lieu d'origine du père ainsi que de celui de la mère. Toutefois, au regard de la révision en cours du système de la tenue des registres d'état civil (en particulier, passage à un registre unique, cf. «projet INFOSTAR»), le travail administratif lié aux inscriptions devrait être limité.

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Nom de famille de l'enfant

En ce qui concerne la réglementation du nom de famille de l'enfant, le projet prévoit, à son art. 270, al. 1, 1re phrase, que l'enfant de conjoints qui ont choisi de porter un nom de famille commun acquiert ce nom. En revanche, en vertu de l'art.

270, al. 1, 2e phrase, lorsque les parents mariés n'ont pas le même nom de famille, ils doivent choisir si leur enfant portera le nom de la mère ou celui du père. Ce choix du nom de famille peut être effectué par les parents lors de leur mariage ou au moment de la naissance ou de l'adoption du premier enfant. Il découle de la loi que tous les enfants communs doivent porter le même nom de famille, afin de sauvegarder l'unité du nom de famille et donc l'unité de la famille. Nous souscrivons au fait de laisser aux parents le choix du nom de famille. En effet, il nous paraît important que cette prérogative fasse partie des compétences et des responsabilités que les parents peuvent et doivent assumer à l'égard de leur enfant. Le fait que les deux parents prennent part à la décision concrétise ici aussi le principe de l'égalité entre hommes et femmes. La possibilité pour les époux de pouvoir se déterminer sur le nom de famille à un moment postérieur à leur mariage est, à notre sens, une solution judicieuse qui prend en compte plusieurs considérations d'ordre pratique. Elle leur permet de ne pas devoir se décider à un moment où ils ne savent peut-être pas encore s'ils désirent ou non avoir un enfant. En revanche, il ne ressort pas clairement du projet si le choix des parents quant au nom de famille de leur enfant, au moment de leur mariage, doit être considéré comme définitif ou s'il peut être modifié à la 4899

naissance ou lors de l'adoption du premier enfant. Il peut arriver que les parents changent d'avis sur ce point par rapport au choix qu'ils avaient effectué au moment de leur mariage. Dès lors, il faudrait indiquer clairement si un tel changement est possible au moment de la naissance ou de l'adoption de l'enfant. Exiger des parents qu'ils recourent à une procédure en changement de nom au sens de l'art. 30, al. 1, CC, lorsqu'ils veulent modifier le nom de l'enfant choisi au moment de leur mariage, n'est pas une solution adéquate. Nous estimons qu'il serait plus judicieux d'admettre que le nom choisi finalement par les parents, au moment de la naissance ou de l'adoption de leur premier enfant, remplace celui qu'ils avaient éventuellement prévu au moment de leur mariage.

Le projet qui nous est soumis ne contient pas de règle pour le cas où les parents ne parviendraient pas à se mettre d'accord sur le nom qu'ils entendent donner à leur enfant commun et renonce à prévoir expressément l'intervention de l'autorité tutélaire dans ce cas. Plusieurs raisons nous amènent à accepter cette solution. Tout d'abord, l'absence de réglementation à ce sujet renforce la portée de l'art. 270, al. 1, du projet, en soulignant le fait que le choix du nom de famille de l'enfant relève de la sphère privée et de la seule responsabilité des parents. De plus, il ne paraît pas nécessaire de régler cette question dans la loi, dans la mesure où les situations dans lesquelles les parents n'arrivent pas à se mettre d'accord devraient rester rares dans la pratique. Dans l'hypothèse où les parents n'arrivent néanmoins pas à trouver une solution commune, en recourant à la médiation des proches ou à l'aide d'un centre de conseil familial, l'autorité tutélaire du lieu du domicile de l'enfant pourra, en se fondant sur l'art. 307 CC, rappeler les parents à l'ordre et leur donner des instructions. Ce faisant, il s'agira de préserver au mieux l'intérêt de l'enfant et de tenir compte de sa situation familiale. D'autres solutions pourraient être envisagées pour régler cette situation ­ prévoir que l'enfant porte le nom de la mère ou le nom du père, tirage au sort ­; aucune toutefois ne nous paraît devoir être retenue. Prévoir que l'enfant porte le nom de la mère ou celui du père s'oppose au principe de l'égalité des sexes qui guide la
révision du code civil proposée. Admettre un tirage au sort revient à laisser la décision au hasard, ce qui est incompatible avec l'intérêt de l'enfant et avec l'importance de son droit au nom au regard de ses droits de la personnalité.

Si l'une des variantes proposées par le Conseil fédéral à propos de l'art. 160 était adoptée, il faudrait ajouter un al. 3 à l'art. 270: Art. 270, al. 3 3 Lorsque le père ou la mère porte un double nom du fait du mariage, l'enfant acquiert uniquement le premier de ces deux noms.

En ce qui concerne la réglementation du nom de famille de l'enfant dont les parents ne sont pas mariés, prévue à l'art. 270, al. 2, du projet et reprise du droit en vigueur (art. 270, al. 2, CC), elle nous paraît tout à fait adéquate au regard de l'intérêt de l'enfant. En effet, au moment de la naissance d'un enfant dont la mère n'est pas mariée avec le père, le lien de filiation maternelle existe, alors que le lien de filiation paternelle n'est souvent pas encore établi juridiquement. Il est alors dans l'intérêt de l'enfant de se voir attribuer le nom de famille de sa mère, afin de créer une unité familiale avec la personne qui lui a donné naissance et avec laquelle il vivra dans la plupart des cas.

4900

A notre avis, le nouvel art. 270a CC peut être accepté en principe, bien qu'il s'agisse ici d'une limitation de l'art. 259, al. 1, CC. La modification, déjà demandée par la doctrine, est une innovation importante. En effet, au regard de l'importance du nom de famille pour l'identité d'une personne, le fait de devoir changer de nom malgré soi peut constituer une atteinte notable à la personnalité. Dès lors, il se justifie qu'un enfant capable de discernement soit appelé à donner son consentement à un changement de nom provoqué par le mariage de ses parents et puisse se décider à ce sujet. Quant à la fixation d'une limite d'âge, elle présente l'avantage d'être claire.

La solution qui consisterait à faire dépendre le droit de se prononcer de l'enfant de sa capacité de discernement dans le cas concret ne nous semble guère applicable.

Toutefois, on est en droit de se demander s'il ne se justifierait pas d'abaisser la limite d'âge prévue par la commission à 14 ans, compte tenu du fait que la majorité est fixée à 18 ans. Un enfant de 14 ans devrait donc avoir la faculté de se déterminer sur la question de son nom, qui touche sa personnalité.

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Droit de cité de l'enfant

Nous adhérons aussi à la modification de l'art. 271, al. 1 et 2, du projet, relatif au droit de cité communal et cantonal de l'enfant. En effet, l'al. 1 de la disposition proposée concrétise le principe de l'égalité des sexes, poursuivant ainsi l'objectif visé par l'initiative. Il supprime l'acquisition automatique du droit de cité du père pour l'enfant de parents mariés et rattache le droit de cité de l'enfant à son nom.

Etant donné le lien entre le nom et le droit de cité de l'enfant, il nous semble tout à fait logique que la modification du nom de famille de l'enfant pendant sa minorité entraîne également un changement de son droit de cité cantonal et communal, comme le prévoit l'al. 2. De même, la modification proposée de l'art. 267a CC est une conséquence logique de l'art. 271 du projet. Enfin, l'art. 4, al. 2, LN proposé par la commission reprend le principe du lien entre le nom et le droit de cité de l'enfant, tel qu'il est prévu à l'art. 271 du projet de révision du code civil.

216

Disposition transitoire

Nous soutenons enfin la proposition de modification de l'art. 8a, tit. fin., CC, qui permet au conjoint qui a changé de nom lorsqu'il s'est marié de déclarer à l'officier d'état civil, dans un délai de deux ans à partir de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, vouloir reprendre le nom qu'il portait avant son mariage ou son nom de célibataire (art. 8a, al. 1, tit. fin., CC, du projet). Il ressort de l'art. 8a, al. 4, tit. fin., CC, du projet, que ce choix exercé par la femme n'a pas d'effets sur son droit de cité cantonal et communal. Au regard de la révision du code civil, l'al. 4 de cette disposition peut être biffé.

Si l'art. 160 était cependant adopté conformément à l'une des propositions du Conseil fédéral, il y aurait lieu d'adapter en conséquence l'art. 8a tit. fin. L'une et l'autre variante impliqueraient de biffer l'al. 3 alors que l'al. 1 devrait être formulé différemment selon la solution retenue.

4901

Art. 8a, al. 1, tit. fin.

1 Dans le délai de deux années . . . célibataire, le cas échéant en ajoutant le nom de son conjoint. Celui-ci peut alors déclarer vouloir ajouter à son nom celui de son époux.

Proposition alternative: Art. 8a, al. 1, tit. fin.

1 Dans le délai de deux années à compter de l'entrée en vigueur de la loi du . . ., le conjoint qui, en vertu de l'ancien droit, a changé de nom lorsqu'il s'est marié, peut déclarer à l'officier de l'état civil vouloir faire précéder le nom de famille du nom qu'il portait avant le mariage. L'autre conjoint peut alors déclarer vouloir ajouter à son nom celui de l'autre.

Le fait de savoir dans quelle mesure la situation juridique actuelle devrait être corrigée par le droit transitoire est toujours une question d'appréciation. Au regard de la sécurité du droit et de l'intérêt des enfants, il nous paraît juste qu'une déclaration unilatérale d'un parent n'ait pas d'incidence sur le nom de famille des enfants communs (art. 8a, al. 2, tit. fin., CC, du projet de la commission). Demeure réservé un changement de nom au sens de l'art. 30 CC.

Enfin, les autres modifications proposées constituent de simples adaptations aux innovations apportées par le projet.

22

Rejet de la proposition de la minorité I (Baumann J. Alexander, Fischer-Hägglingen, Vallender)

Au regard du principe de l'égalité qui se trouve au centre de la modification présentée par la Commission des affaires juridiques du Conseil national, la proposition de la minorité I doit, à notre avis, être rejetée. En effet, la solution selon laquelle, à défaut de déclaration des fiancés, c'est le nom actuel du fiancé qui est le nom de famille des époux est contraire au principe de l'égalité des sexes et marque un pas en arrière par rapport à l'art. 4, al. 2, de la constitution. Par ailleurs, elle soumet de facto le choix de la fiancée de garder son nom au consentement de son futur conjoint. Si le fiancé voulait absolument, pour une raison ou une autre, que son nom devienne le nom de famille des époux, il lui suffirait de refuser de prendre le nom de son épouse et ne pas faire de déclaration à ce sujet, la présomption légale s'appliquant alors de plein droit en sa faveur. Or, le choix du nom de famille est une décision importante qui suppose une déclaration expresse de la fiancée qui souhaite changer de nom.

23

Rejet de la proposition de la minorité II (von Felten, Hollenstein)

Si nous reconnaissons les avantages que présente la proposition de la minorité II, dans la mesure où elle apporte une solution claire et aisément applicable lorsque le choix des parents sur le nom de l'enfant fait défaut, nous la rejetons cependant. En effet, cette proposition de la minorité II n'est pas non plus compatible avec le prin4902

cipe de l'égalité entre homme et femme, puisqu'elle favorise la position de la mère dans la mesure où l'enfant acquiert son nom à défaut de choix des parents. La règle proposée peut avoir pour conséquence que la mère décide de facto toute seule du nom de famille de l'enfant. Il lui suffit de ne pas consentir à donner le nom de son mari à l'enfant pour être assurée que ce dernier portera son nom. Par ailleurs, cette solution ne permet pas de tenir compte de la situation réelle de l'enfant et peut conduire, parfois, à un résultat contraire à l'intérêt de l'enfant.

4903