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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le complètement du réseau des routes nationales par un tunnel routier sous le Saint-Gothard (Du 22 décembre 1964)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet d'arrêté concernant le complètement du réseau des routes nationales par un tunnel routier sous le Saint-Gothard.

I. Introduction Au cours des sessions de printemps et d'été 1960, les chambres fédérales ont fixé le réseau des routes nationales. L'arrêté pris le 21 juin 1960 (RO 1960, 912) prévoit, pour assurer le trafic de transit nord-sud à travers la Suisse, trois voies de communication praticables toute l'année, l'une à l'ouest, l'autre au centre et la troisième à l'est des Alpes suisses. Il s'agit de la liaison par le Simplon à partir de la vallée du Rhône, de la liaison par le Saint-Gothard à partir de la vallée de la Reuss et de la liaison par le Bernardin, à partir de la vallée, du Rhin. Selon notre proposition, la liaison par le Bernardin devait, pour commencer, être seule assurée par un tunnel routier.

Nous fondant sur les résultats des études faites par la commission de planification du département fédéral de l'intérieur, nous étions arrivés, pour le Saint-Gothard et le Simplon, à la conclusion que le trafic d'hiver par ces deux liaisons pourrait être assuré provisoirement par le transport ferroviaire des véhicules à moteur. Déjà lors des délibérations des chambres concernant le réseau des routes nationales, il était cependant devenu manifeste que l'augmentation du trafic prévue par la commission de planification se ferait beaucoup plus tôt qu'on ne l'avait supposé, et qu'ainsi la capacité du service

1623 de transport par chemin de fer au Saint-Gothard serait épuisée dans un avenir assez proche. Une motion adoptée par le Conseil national le 23 mars et par le Conseil des Etats le 8 juin 1960 invita par conséquent le Conseil fédéral à entreprendre immédiatement l'étude d'un deuxième tunnel par le Saint-Gothard. Elle avait la teneur suivante: Le Conseil fédéral est chargé d'examiner sans délai la question de la construction d'un tunnel routier à travers le Saint-Gothard pour le trafic d'hiver et de soumettre aux conseils législatifs un rapport et des propositions.

Déjà en avril de la même année, le département fédéral de l'intérieur instituait le «Groupe pour l'étude d'un tunnel sous le Saint-Gothard».

Présidé par le service fédéral des routes et des digues, ce groupe était formé de représentants des cantons d'Uri et du Tessin, des chemins de fer fédéraux et des usagers de la route, de spécialistes de la construction de routes et de tunnels, ainsi que d'experts techniques et économiques. Les questions suivantes furent soumises au groupe d'étude : 1. Quels compléments doivent être apportés aux installations existant actuellement au Saint-Gothard pour que le trafic routier, auquel il faut s'attendre, puisse être assuré en hiver ?

2. A quelle altitude conviendrait-il de construire éventuellement un second tunnel sous le Saint-Gothard ?

3. Pour quel système de transport un tel tunnel devrait-il être aménagé ?

4. Pour quelle date cette construction devrait-elle être achevée ?

Au cours de sa séance finale, tenue à la fin du mois de février 1963, le, groupe d'étude fit son choix définitif parmi les variantes envisagées. Se fondant sur des examens très poussés dans le domaine de la technique proprement dite, de la technique de la circulation, de l'économie et de la politique des transports, il proposa au département de l'intérieur la variante d'un tunnel routier de Gesehenen à Airolo. Cette proposition fit l'objet dw rapport final du groupe d'étude de septembre 1963. Ce rapport, très complet et fouillé, a été distribué au-x membres des conseils législatifs.

II. Proposition du groupe d'étude concernant la construction d'un tunnel routier Gesehenen-Airolo A. GÉNÉRALITÉS 1. Les voies de communication routière par les Alpes suisses On discerne en Europe notamment deux zones où la productivité économique et la densité de la population atteignent un degré élevé: l'Italie et l'Europe du nord-ouest. L'Italie représente sous l'angle de l'économie agricole et de l'industrie la partie la plus importante du bassin européen de la Méditerranée; l'Europe du nord-ouest comprend les régions industrielles telles que : l'Allemagne de l'ouest, le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas, le nord et l'est de la France et, plus loin, l'Angleterre et la Scandinavie. Ces

1624 deux zones se complètent économiquement à plusieurs égards, si bien qu'il existe un courant intense de trafic dans les deux sens. A l'échange de matières premières, de produits industriels et de denrées alimentaires, et au mouvement des personnes inhérent aux échanges commerciaux vient s'ajouter un important trafic touristique en provenance du nord, plus froid, vers les régions privilégiées du sud qui servent de lieux de vacances. Ces deux zones sont séparées par la chaîne des Alpes, dont la partie centrale, la plus importante sous l'angle de la géographie du trafic, est occupée par la Suisse.

Celle-ci offre les plus courts chemins reliant le nord-ouest de l'Europe avec l'Italie. Ces liaisons s'établissent par les cols alpestres qui conduisent au Tessin et en Italie à partir de la vallée du Rhône, de la région Aar-ReussLimmat et de la vallée du Rhin. L'altitude de ces cols est comprise entre 1919 m (Lukmanier) et 2472 m (Grand-Saint-Bernard). A l'exception du Julier, tous les cols sont fermés en hiver, mais au Simplon et au Saint-Gothard, le trafic automobile demeure possible toute l'année, les voitures étant transportées par chemin de fer. La période d'ouverture des cols varie, en moyenne, entre 145 jours (Grand-Saint-Bernard) et 220 jours (Simplon).

La grande altitude des cols n'entraîne pas seulement leur fermeture en hiver.

La chaîne des Alpes, notamment sur le versant sud, forme un rempart qui entrave le trafic routier. Depuis ce printemps, le tunnel du Grand-SaintBernard est aussi ouvert au trafic ; mesurant 5,8 km, il est le plus long tunnel routier du monde actuellement exploité. Les expériences qui pourront y être faites, notamment en ce qui concerne la technique de la circulation, seront d'une grande importance pour l'étude ultérieure des tunnels routiers alpestres.

Mais les Alpes entravent aussi le trafic interne suisse. Au cours des six mois d'hiver, le trafic des véhicules n'est assuré entre la Suisse méridionale et les principales régions du pays que par le transport sur wagons à travers le tunnel du Saint-Gothard. Cette voie roulante fonctionne bien. Le tunnel du Bernardin, dont la construction est en cours, permettra, pour sa part, de libérer le réseau routier tessinois de l'isolement dont il souffre en hiver et de répondre ainsi, en partie au moins, à un très ancien voeu
de la Suisse méridionale. L'accès nord de ce tunnel étant situé dans une région périphérique, la nécessité demeure de créer une voie praticable en hiver pour relier directement le sud du pays avec les principales régions économiques du nord de la Suisse, c'est-à-dire avec le secteur de Zurich, Baie et Berne.

2. La zone d'alimentation du Saint-Gothard De même que nos cols alpestres occupent une position centrale en Europe, de même la route Bâle-Lucerne-Saint-Gothard-Chiasso constitue la transversale centrale suisse du nord au sud. Sa zone d'alimentation peut être déterminée stiivant les temps de parcours et la statistique du trafic.

1625 -- Temps de parcours On ne peut délimiter la zone d'alimentation d'un col alpestre que si l'on en connaît la zone à laquelle conduit la route qui le franchit. Ces zones d'aboutissement, si elles sont de vastes régions, peuvent être indiquées avec assez de précision par des points d'aboutissement et de transit. Pour l'Italie, la commission de planification avait choisi les quatre points suivants d'ouest à l'est : Milan, pour la Lombardie, Gênes, pour la côte ligurienne, Turin pour le Piémont et Vérone pour la Vénétie. La meilleure voie de transit est celle qui conduit au lieu de destination de la manière la plus rapide et la plus courte. La limite entre les zones d'alimentation de deux cols voisins sera ainsi la ligne à partir de laquelle les distances jusqu'au lieu de destination sont les mêmes. Pour les points de destination de Milan, Gênes et Vérone, l'éventail de la zone d'alimentation du Saint-Gothard s'étend à toute la Suisse centrale et à la zone nord-ouest de l'Europe. Son axe suit à peu près la ligne du Rhin (fig. 1).

-- Statistique du trafic Cette détermination théorique de la zone d'alimentation est nettement confirmée par la statistique du trafic. Cela appert clairement du schéma indiquant le trafic du Saint-Gothard d'après son origine, schéma dans lequel le faisceau des rayons diverge bien au-delà de la zone d'alimentation théorique vers l'ouest et l'est (fig. 2).

3. Le trafic au Saint-Gothard a. Analyse du trafic actuel Si l'on a sous les yeux une carte où l'intensité du trafic est représentée par des bandes de largeur différente, on s'aperçoit aussitôt que le SaintGothard se distingue par l'importance du trafic (fig. 3). Cela est encore plus évident si l'on considère seulement la circulation des étrangers, répartie d'après les pays d'origine. La circulation des étrangers atteint en moyenne 50 pour cent du trafic total. Depuis le recensement de 1948 jusqu'à celui de 1960, la moyenne d'été du trafic journalier à Hospental a passé de 524 (100 %) à 4898 automobiles (935 %). Dans le courant d'une année, les moyennes mensuelles du trafic au 'Saint-Gothard suivent presque la même courbe que celles du nombre des voyages à destination de l'Italie. D'importantes fluctuations se produisent toutefois d'un jour à l'autre. Le trafic de fin de semaine peut atteindre jusqu'au double du trafic
des jours ouvrables (fig. 4). Le trafic d'hiver (transport des véhicules par chemin de fer) atteint aujourd'hui 12 pour cent environ; la part des deux mois de juillet et d'août, où les voyages sont les plus nombreux, représente environ 45 pour cent du trafic annuel. En automne, l'intensité du trafic diminue longtemps avant la

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fermeture du col. Ces constatations sont très importantes pour l'examen des différentes variantes relatives à un nouveau tunnel routier du Saint-Gothard. Dans le cours journalier, les pointes du trafic ne sont pas aussi fortes que celles qui sont enregistrées particulièrement dans les environs des grandes villes ; le trafic demeure presque le même depuis la matinée jusque dans la soirée. Il est difficile de dire si l'on doit attribuer ce fait à l'éloignement considérable des villes d'une certaine importance ou à la capacité restreinte de la route. Ces deux facteurs jouent probablement leur rôle.

6. Pronostic du trafic Même si tout pronostic demeure problématique en raison des facteurs multiples qui déterminent l'évolution du trafic, la planification routière ne peut se passer de prévisions. La méthode appliquée dans la planification du réseau des routes suisses de grande communication pour établir un pronostic du trafic tient compte du fait qu'il existe une corrélation assez étroite entre l'effectif des automobiles et le volume du trafic routier. Si l'effectif des automobiles vient à doubler, le trafic double en général, lui aussi. Pour la période qui suivit la seconde guerre mondiale, cette règle n'a cependant pas été confirmée par les faits en ce qui concerne le Saint-Gothard. Le trafic a . alors augmenté d'une façon sensiblement plus forte que l'effectif des automobiles des pays de la zone d'alimentation de ce col. Cela provient probablement de ce que ces pays ont dû tout d'abord se remettre des effets de la guerre et que le niveau de vie n'a permis que plus tard à de larges milieux de la population d'entreprendre des voyages en automobile vers le sud.

En 1961, la moyenne d'été au Saint-Gothard était de 4800 automobiles par jour. Comme il est impossible d'établir des pronostics pour un avenir éloigné, les prévisions doivent se limiter à la période allant jusqu'à 1980, terme de la planification. Cette planification limitée dans le temps ne doit pas être considérée comme l'étape finale; elle doit laisser la porte ouverte au développement ultérieur. Pour la période susmentionnée, (1961-1980), on peut admettre que l'indice d'augmentation du trafic suisse et étranger sera en moyenne de 2,6. Il en résulte pour 1980 une moyenne d'été de 12 500 automobiles par jour (2,6 X 4800). D'après les calculs
de la commission de planification, on peut admettre que la part du trafic d'hiver sera de 20 pour cent du trafic annuel. Cela donne pour 1980 la moyenne d'hiver de 3100 automobiles par jour (----- = 3100) et la moyenne annuelle de 7800 automobiles par jour (

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= 7800). Il faut cependant ajouter

à ce chiffre le trafic lourd supplémentaire, dont l'estimation n'est pour l'instant pas aisée, le trafic lourd n'ayant pu jusqu'à ce jour se développer à cause de l'insuffisance de la route. En se fondant sur des comparaisons,

1627 le groupe d'étude a évalué ce trafic à 9 pour cent ou 700 véhicules par jour.

On obtient ainsi, pour l'ensemble, une moyenne annuelle de 8500 véhicules par jour, soit 13 600 en été et 3400 en hiver.

La capacité d'une route ne se mesure toutefois pas au trafic moyen.

C'est le trafic de pointe qui compte. Celui-ci est représenté par la courbe dite des durées, qui indique pendant combien d'heures par année un volume de trafic déterminé est atteint ou dépassé. Grâce au compteur automatique installé sur la route du Saint-Gothard à Hospental, il est possible d'établir cette courbe des durées, qui, avec la capacité, constitue un critère très important pour apprécier la nécessité d'aménager une route. Nous y reviendrons.

c. Entraves au trafic par suite de l'altitude élevée du col du Saint-Gothard.

Capacité de la route Le massif des Alpes constitue ici, durant toute l'année, un obstacle important au déroulement du trafic. L'altitude élevée du col (2108 m) nécessite de longues voies d'accès et un tracé artificiel. Certes, la route entre Göschenen et Airolo est déjà en partie aménagée selon les normes modernes adaptées pour les routes alpestres; néanmoins, l'existence de rampes très raides impose des exigences accrues aussi bien aux véhicules qu'aux conducteurs. Souvent, le moteur subit tout à coup un dérangement au cours de la montée; des voitures automobiles de faible puissance, des cars et des camions n'arrivent à avancer que lentement et entravent ainsi la circulation des autres usagers de la route. A l'altitude élevée du col, les précipitations atmosphériques sont plus fréquentes qu'aux basses altitudes, et l'on risque presque toute l'année d'être pris dans des tourmentes de neige. Mentionnons aussi l'apparition très fréquente du brouillard, qui gêne également le trafic.

Pendant l'hiver, c'est-à-dire en général de novembre à avril, le col est fermé et les automobilistes sont obligés de recourir à la voie roulante, c'est-à-dire de faire transporter leurs véhicules par chemin de fer entre Göschenen et Airolo.

La capacité d'une route alpestre même bien aménagée demeure très limitée. Dès que le trafic a atteint une certaine intensité, il y a des à-coups, les dépassements deviennent difficiles ou même impossibles et le conducteur, même s'il est habile et conduit une puissante voiture, doit adapter
sa vitesse à celle de l'ensemble des autres conducteurs. Derrière les voitures lentes, les camions et les cars, il se forme des colonnes, la fluidité du trafic est entravée et la course devient une épreuve pour les nerfs du conducteur pressé.

Le fait qu'il ne s'agit pas seulement de phénomènes subjectifs, mais qu'on est en présence de réalités objectivement contrôlables est prouvé par la vitesse horaire moyenne enregistrée sur trois tronçons caractéristiques, lorsque le trafic marque différents degrés d'intensité. Pour la montée, la

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vitesse horaire, .lorsque le trafic est très faible, atteint 42 km/h sur le tronçon Amsteg-Wassen ; lors d'une augmentation du trafic à 700 voitures par heure, elle tombe à 36 km/h. Pour la Tremola, des vitesses de 34 et 24 km/h correspondent à ces mêmes degrés d'intensité du trafic. Sur la section bien aménagée des Schöllenen, les vitesses se situent entre les valeurs indiquées pour les tronçons susmentionnés. Pour la descente, la situation est encore plus critique dans la Tremola : seule une vitesse moyenne de 20 km/h est encore possible pour un trafic de 700 voitures/h; dans les Schöllenen, où la route est excellente, une vitesse de 43 km/h est possible par faible trafic et de 32 km/h si la circulation est de 700 voitures par heure. Le déplacement en cours de la route de la Tremola permettra d'éliminer le goulet le plus dangereux.

La capacité d'une route ne peut donc être mesurée seulement au volume de trafic qu'elle peut supporter ; il faut également tenir compte du rôle que joue la vitesse horaire possible pour un volume de trafic donné. On arrive ainsi à faire une distinction entre la capacité proprement dite et le volume de trafic admissible, lequel, d'après ce qui vient d'être dit, est plus faible du fait que les conducteurs doivent conserver une certaine liberté de mouvement. On peut dire que la limite de la capacité théorique ou absolue d'une route à deux chaussées est de 1600 voitures par heure. Le volume de trafic admissible doit être fixé à 900.autos/h pour une route alpestre très bien aménagée; si ce volume est dépassé, le trafic commence à être entravé.

Si nous reportons ces limites dans notre courbe des durées au moyen de lignes horizontales, nous constatons qu'en 1961 le volume de trafic admissible a été atteint durant la pointe horaire la plus élevée. Pour les années ultérieures, la courbe présiimable des durées pourra être établie par extrapolation, suivant le rapport linéaire entre l'effectif des véhicules à moteur et l'intensité de la circulation. En 1970, le volume de trafic admissible sera dépassé pendant 180 heures en nombre rond, ce qui signifie que les conducteurs seront fortement gênés pendant ce temps-là. Durant l'heure de pointe, le trafic atteindra à peu de chose près la limite de la capacité absolue de 1600 autos/h. En 1980, le volume de trafic admissible de 900
autos/h sera dépassé pendant 520 h en nombre rond et la capacité-limite de 1600 autos/h le sera pendant 75 heures. Il faudra s'attendre alors à ce que la circulation soit sérieusement gênée, si une partie notable du trafic ne préfère pas emprunter les autres tunnels routiers transalpins qui, à cette époque, seront ouverts à la circulation (fig. 5).

Il ressort de ces données que les plaintes au sujet du manque d'agrément de la conduite de véhicules automobiles sur la plus importante de nos voies de communication nord-sud sont tout à fait justifiées et que le trafic est vraiment entravé dans une large mesure par les conditions actuelles. Vers la fin de cette décennie déjà, la route du Saint-Gothard, même si elle est

1629 fort bien aménagée, sera très surchargée. Après 1970, le trafic risquera d'être gêné au point d'être paralysé aux heures de pointe. Si le trafic lourd devait augmenter au-delà des limites prévues, la situation deviendrait encore pire.

d. La capacité du transport par chemin de fer sur le parcours actuel Goschenen-A irolo Après l'amélioration des installations à Airolo, la capacité du transport par chemin de fer sera de 565 autos/h en période d'exploitation normale et de 635 autos/h aux heures de pointe. Le chiffre maximum ne pourra cependant être atteint que si, pendant ce temps, le reste du trafic ferroviaire, en premier lieu le trafic-marchandises, est réduit. Cette réduction ne se justifierait qu'exceptionnellement, à Pâques, par exemple.

Si, en extrapolant les valeurs actuelles, on calcule la part du trafic d'hiver en 1980 dans le trafic total, on constate que le trafic d'hiver ne pourra plus être assuré pendant 30 heures; il en résultera une accumulation, qui retombera sur les heures de pointe suivantes, si bien que le chemin de fer sera entièrement mis à contribution pendant plus de 60 heures durant le semestre d'hiver. Supposé que le trafic d'hiver puisse se dérouler librement sans être entravé par l'état de la route et atteigne ainsi 20 pour cent du trafic annuel, la capacité du transport par chemin de fer serait dépassée durant 200 heures. Du fait des arrêts forcés que subirait la circulation dans ces circons tances, le chemin de fer serait complètement mis à contribution pendant près de 400 heures par année. Aux deux jours de pointe, les temps d'attente seraient de plus de 5 heures et il se formerait des colonnes de voitures sur une distance de 20 km environ.

e. Les conséquences Ce qui vient d'être exposé montre qu'en 1980, pendant l'été, la route du col et, pendant l'hiver, le transport par chemin de fer ne correspondent plus au volume du trafic et qu'il est ainsi nécessaire d'améliorer de manière fondamentale la communication par le Saint-Gothard. .Pour cela, il faut construire un tunnel qui permette de décharger la route du col, soit situé à plus basse altitude et assure les communications durant toute l'année.

B. LES DIFFÉRENTES FAÇONS DE CRÉER AU SAINT-GOTHARD UNE ROUTE PRATICABLE EN HIVER 1. La tâche du groupe d'étude La motion dont il a été question au début de ce message délimitait nettement le problème que le groupe d'étude avait à résoudre: déterminer les possibilités de compléter la route du Saint-Gothard par un tunnel prati-

1630 cable en hiver. Grâce à la situation orographique particulière résultant du fait que la route du Saint-Gothard franchit la chaîne des Alpes par la ligne la plus courte, par deux vallées transversales, sans passer par des vallées longitudinales, le groupe d'étude a pu limiter ses recherches à la région du Saint-Gothard au sens étroit du terme, dont les voies de pénétration sont, au nord, la vallée de la Reuss et, au sud, celle du Tessùi. Au nord comme au sud, la topographie devait fixer les limites de la région à étudier (GöschenenAirolo). Comme le groupe d'étude devait inclure dans ses recherches le tunnel de base Amsteg-Giornico proposé depuis longtemps par des milieux privés, il étendit ses travaux à un secteur élargi, limité au nord par Amsteg et au sud par Giornico.

Des études géologiques, climatologiques et topographiques ne tardèrent pas à montrer que, dans la région restreinte, seules des solutions prévoyant un tracé qui épouserait le plus possible l'actuelle route du col ou suivrait plus ou moins celui du tunnel ferroviaire pourraient être prises en considération ; la cuvette du col est d'ailleurs le lieu où les puits pour la ventilation d'un tunnel routier seraient les plus courts.

La motion a délibérément laissée ouverte la question du système de transport. Le terme «tunnel routier pour le trafic d'hiver» ne visait pas en premier Heu ou exclusivement un tunnel routier proprement dit. Ce point a été précisé comme il suit par le président (et rapporteur de langue allemande) de la commission du Conseil national lors des délibérations concernant le réseau des routes nationales (traduction): «II convient... d'étudier avec soin la façon de concilier les besoins du trafic d'été et d'hiver, quel tracé et quelle longueur entrent en considération pour un tunnel routier avec ventilation. Les expériences qui seront faites aux tunnels du GrandSaint-Bernard (5,8 km de longueur), du Bernardin (6,6 km) et du MontBlanc (de 12 km) seront précieuses pour la décision à prendre au sujet du Saint-Gothard. L'incertitude la plus complète règne encore au sujet du comportement du conducteur dans un très long tunnel, tel que celui du Saint-Gothard, la peur du tunnel ayant déjà causé des accidents à l'étranger.

On doit encore se demander si, pour un tunnel de cette longueur, l'exploitation par chemin de fer
ne serait pas plus avantageuse. Tous ces problèmes doivent être fouillés avant que l'on ne songe à entreprendre la construction d'un tunnel routier de 15 km». (Bull. stén. 1960, CN, 65;). Conformément à l'interprétation de la motion par les chambres, le groupe d'étude a englobé ce problème dans ses recherches. Ayant reconnu avec raison que le problème du Gothard ne pouvait être traité que dans son ensemble, il a tenu à inclure le chemin de fer dans ses études. Il s'est exprimé comme suit dans son rapport final (cf. p. 20/21, édition allemande): «Si la route du Saint-Gothard, malgré sa fermeture durant les six mois d'hiver et son altitude élevée, a réussi à s'imposer comme voie do transit à travers les Alpes, il le doit à sa situation géographique, mais aussi,

1631 en bonne partie, au fait que le .chemin de fer est, en hiver, à disposition pour le transport des automobiles. Ce transport est fort bien organisé, selon un horaire serré, si bien que la traversée ne dure pas plus que le trajet par le col ; c'est à juste titre que ce service est appelé «tapis roulant ». Il fonctionne si bien que même en été, alors que le col est ouvert, de nombreux automobilistes le préfèrent au trajet par le col. Ils arrivent ainsi plus rapidement à destination qu'en empruntant la route encombrée.

Au début des années cinquante, alors que la question d'un tunnel routier sous le Saint-Gothard commençait à occuper plus fortement l'esprit des milieux intéressés, l'idée d'un second tunnel ferroviaire GöschenenAirolo destiné en premier lieu au passage des automobiles chargées sur wagons, fut également lancée. Elle était d'autant plus intéressante que l'on nourrissait de sérieuses appréhensions au sujet d'un tunnel routier de la même longueur que l'actuel tunnel ferroviaire, à cause du manque d'expériences dans l'exploitation d'un tel ouvrage. Encore moins qu'aujourd'hui, on ne pouvait avoir une notion sûre de la longueur que peut avoir un tunnel ouvert à la circulation autonome des voitures. On ne saurait nier que cette longueur est limitée. Aussi la commission de planification a-t-elle fait procéder à des études pour déterminer à partir de quelle longueur le système du tapis roulant est supérieur au tunnel routier ordinaire. Elle est arrivée à la conclusion que la longueur-limite dépend en grande partie du volume du trafic et que, le trafic augmentant, le tunnel routier avec ventilation est économiquement plus avantageux. Mais les hypothèses faites alors sont dépassées aussi bien en ce qui concerne les dépenses que le volume du trafic.

Aujourd'hui, on ne pense plus que le problème se pose sous le seul angle du trafic hivernal.

Comme il ressortira des considérations qui suivent, il est nécessaire de poursuivre l'aménagement de la ligne du Saint- Gothard. Les plans dépendent, jusqu'à un certain point, de la solution qui sera donnée au problème routier.

La liaison la plus étroite entre le rail et la route serait obtenue par la construction d'un tunnel de base d'Amsteg à Biasca conformément au projet de l'ingénieur Grüner. Ce projet, dont nous reparlerons, prévoit de réunir le
rail et la route dans un seul et même tunnel. Même si l'on envisage une liaison moins étroite, il s'agit d'examiner jusqu'à quel point les plans devront être adaptés les uns aux autres.

Le chemin de fer et la route ne sont pas en rapport seulement en tant qu'installations empruntant ensemble les vallées étroites de la Reuss et du Tessin, mais aussi en tant que des moyens de transport, à la fois complémentaires et rivaux. Pour cette raison également, il est bon que les travaux de planification se fassent simultanément et que des contacts étroits soient établis, car il est fort possible que les programmes influent l'un sur l'autre.

Il est certain que le problème du Saint- Gothard suscitera le vif intérêt des diverses autorités politiques, qui éprouveront le besoin d'être informées sur

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l'ensemble du problème et pas seulement sur l'un des moyens de transport.

Donner dès le début des informations sur tous les aspects du problème, c'est faciliter les délibérations qui vont avoir lieu et hâter la décision. La collaboration dans les travaux de planification routière et ferroviaire présente encore le grand avantage de faire comprendre à ceux qui s'occupent du chemin de fer comme à ceux qui s'occupent de la route qu'il s'agit, en ce qui concerne le Saint-Gothard, de deux problèmes nationaux qui doivent être résolus l'un et l'autre.

Telles qu'elles ont été formulées, les questions posées au groupe d'étude par le département de l'intérieur, montrent aussi que le problème doit être traité dans son ensemble, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas simplement d'étudier quel est le tracé le plus favorable pour une route praticable en hiver, mais encore de déterminer quel système de transport est le plus approprié.

Cela étant, le groupe d'étude a fait appel dès le début à la collaboration des CFF et d'un représentant du département des transports et communications et de l'énergie. Cette étroite collaboration ne signifie pas que les décisions à prendre de part et d'autre seront liées pendant longtemps. Une fois prises les décisions de principe, chaque partie retrouvera sa liberté d'action dans les limites de l'oeuvre à accomplir.» Enfin, la commission a bien saisi que le problème du Saint-Gothard n'est pas seulement d'ordre technique, mais concerne également la politique en matière de trafic. C'est pourquoi, en plus de l'aspect technique, elle a considéré les répercussions que le tunnel aura dans le domaine économique et dans celui du trafic pour les cantons d'Uri et du Tessin, pour notre pays en général ainsi que ses effets sur le trafic de transit international.

2. Les variantes Se fondant sur les considérations qui précèdent, le groupe d'étude a examiné les variantes suivantes, relatives à une voie de communication praticable en hiver: a. Tunnel routier -- Tunnel de faîte de Gamssteg/Mätteli à Motto Bartola, de 7,2 km de longueur, à l'altitude de 1680 m.

-- Tunnel de moyenne altitude de Hospental à Bedrina/Airolo, de 10,5 km de longueur, à l'altitude de 1464 m.

-- Tunnel à basse altitude de Göschenen à Airolo, de 16,4 km de longueur, à l'altitude approximative de 1161 m.

-- Tunnel routier de base, combiné ou non avec tunnel ferroviaire, d'Amsteg à Giornico, de 45,3 km de longueur, à l'altitude de 549 m.

1633 b. Tunnel ferroviaire ·-- Second tunnel ferroviaire, à section normale, de Gesehenen a Airolo pour le transport des véhicules par voie ferrée, 15,1 km de longueur, à l'altitude de 1154 m.

-- Second tunnel ferroviaire, à section élargie, de Göschenen à Airolo, tout d'abord aménagé pour l'exploitation ferroviaire ordinaire et le transport des véhicules automobiles par voie ferrée, susceptible d'être aménagé plus tard en un véritable tunnel routier pour les véhicules roulants s -- Aménagement du tunnel ferroviaire actuel Göschenen-Airolo en un véritable tunnel routier pour les véhicules roulants, en cas de construction d'un tunnel de base.

-- Tunnel ferroviaire de base d'Amsteg à Giornico, d'environ 45,3 km de longueur, à l'altitude de 549 m.

-- Tunnel ferroviaire et routier de base, d'Amsteg à Giornico.

c. Rampes d'accès -- Construction d'une autoroute à 4 voies d'Amsteg à Giornico et de Giornico à Airolo.

-- Construction d'une autoroute à 4 voies pour le même parcours, mais en utilisant une partie du tracé ferroviaire, pour le cas où l'exploitation ferroviaire serait supprimée sur le parcours en montagne après la construction du tunnel ferroviaire de base. La voie ferrée serait alors utilisée dans la mesure du possible pour la rampe ascendante tandis qu'une nouvelle chaussée à deux pistes serait construite pour la rampe descendante.

-- Aménagement de la route des Schöllenen pour la rendre particable en hiver, en construisant une voie à deux pistes pour la montée et en utilisant la route existante pour la descente.

Les bureaux d'ingénieurs chargés de l'étude de ces variantes ont élaboré un projet général pour chacune d'elles, avec les détails nécessaires pour l'établissement d'un devis aussi sûr que possible. L'établissement du projet était fondé sur une description géologique approfondie de toute la région, d'un examen climatique, de levés photogrammétriques spéciaux avec des plans hypsométriques. Des règles de calcul précises furent établies afin de permettre la comparaison des devis de tous les projets.

d. Installations mécaniques Le groupe d'étude a voué une attention particulière au calcul des installations de ventilation nécessaires. Lors de la planification du réseau des routes nationales, une méthode pour le calcul de la ventilation avait été

1634 mise au point par une commission de spécialistes. Des mesures effectuées par un groupe international de spécialistes (comité technique des tunnels routiers de l'association internationale permanente des congrès de la route) dans des tunnels français, belges, néerlandais et suisses ont confirmé la valeur de la méthode suisse de calcul. Le calcul de la ventilation permet de déterminer la quantité d'air pur nécessaire pour diluer les gaz nocifs des moteurs d'automobiles et de fixer les dimensions des canaux de ventilation, des puits d'aération ainsi que la puissance mécanique nécessaire. Le volume d'air est calculé en fonction d'une circulation de 1600 automobiles par heure.

Cette intensité de trafic égale à peu près la capacité d'un tunnel. Nous y reviendrons. Dans les longs tunnels, l'air pur ne peut être introduit économiquement que par des puits d'aération. Il existe des rapports mathématiques très compliqués entre le volume du trafic, les caractéristiques géométriques du tunnel et des puits d'aération, le nombre des stations de ventilation, le nombre, la hauteur et la section des puits. C'est pourquoi le programme des calculs a été établi de telle sorte qu'ils puissent être effectués par une machine électronique dans le temps le plus court. Il a été ainsi possible d'étudier un grand nombre de variantes pour trouver la solution optimum.

La centrale de ventilation est une construction très compliquée comprenant des canaux courbés, des moteurs électriques, des ventilateurs, des volets à air, des transformateurs, des installations de commande, de nombreux appareils de mesure, de contrôle et de télécommunication. La salle de commande peut être comparée à celle d'une importante usine hydroélectrique.

Le personnel nécessaire pour surveiller les installations mécaniques et le trafic comprend, par exemple, pour les variantes suivantes : 1. Mätteli-Motto Bartola 32 unités 2. Hospental-Bedrina 37 unités 3. Göschenen-Airolo 51 unités 4. Amsteg-Giornico 90 unités La pratique révélera, après la construction, si ces effectifs peuvent être réduits par la rationalisation de l'exploitation.

H ressort de ce qui précède que les frais d'exploitation d'un long tunnel routier augmentent à peu près en proportion de la longueur. Pour les trois variantes examinées dans la région restreinte du Saint-Gothard,
ils varient entre 1,1 et 2,2 millions de francs par année.

Dans tous les projets, il a fallu prévoir les dispositifs de sécurité suivants : -- appareils de mesure du CO couplés avec les installations de ventilation ; -- analyseurs de l'opacité ;

1635 -- stations téléphoniques SOS, environ tous les 200 m; ·-- bouches à eau et appareils pour lutter contre les incendies, environ tous les 300 m; -- niches de stationnement pour véhicules en panne, environ tous les 750 m ; -- éclairage de secours s'allumant automatiquement au moment où l'éclairage normal s'éteint ; -- kilométrage très visible permettant aux conducteurs de déterminer le point où ils se trouvent ; -- signaux réguliers rouge-jaune-vert, environ tous les 200-300 m; -- signaux de vitesse ; -- balisage de la chaussée pour empêcher de changer de piste.

3. Tableau des combinaisons des variantes les plus importantes et estimations des frais Les variantes susmentionnées se prêtent à toutes sortes de combinaisons ; il serait trop long de les énumérer, vu qu'elles ne se distinguent en partie que par des caractéristiques d'ordre secondaire. Pour les comparer sous l'angle des dépenses, il a fallu considérer une même longueur de parcours, en tenant compte, dans le cas des tunnels courts, de parcours d'accès plus longs. Les points limites pour les variantes de la région du Saint-Gothard proprement dite sont, au nord, la « Schönibrücke » au-dessous de Gesehenen et, au sud, le «Ponte Sordo» au-dessous d'Airolo.

Les caractéristiques techniques et les dépenses évaluées sur la base des prix d'avril 1961 pour les différentes variantes sont récapitulées au tableau ci-après :

Tableau comparatif des variantes de la région du Saint-Gothard proprement dite (x) Tunnel Göschenen-Airolo Tunnel de faîte

Combinaison de variantes

Longueur du tunnel du Saint- Gothard . . km Point culminant -. m Longueur du trajet entre les deux points fixes km Nombre de tunnels, tunnel du Saint-Gothard y compris Parcours couverts . . . .

km

Tunnel d'altitude moyenne

Tunnel routier

Fraîs annuels totaux Par rang: Dépenses de construction (y compris les installations mécaniques) . . .

Deuxième tunnel ferroviaire Profil normal

Section élargie lre étape

Total

7,2 1680 34

10,5 1464 28

16,4 1161 24

15,0 1150 22

15,1 1154 22

15,8 1155 23

16,0 1155 23

16 23 8,9 20,9

8 16 3,3 17,1

2

2

2

2

2

16,7

15,3

15,5

16,2

16,3

Frais de construction (y compris les installa-

Dépenses de capital et amortissement . . . .

Dépenses du trafic, à raison de 55 % d'utilisation de tunnel Dépenses du trafic, à raison de 86 % d'utilisa-

Aménagement du tunnel ferroviaire existant en tunnel routier

418

426

351

6

6

6

En millions de fr mes 276 241 15,5

7,5

254

450

7

15

2,9 22,0

2 >o0 22,4

Hillions de francs /année 2,2 2,3 3,5 20,9 14,3 13,4

35,5

30,3

26,0

25,4

17,4

17,4

25,7

34,5 59,4

28,6 53,8

23,9 47,0

23,3 39,9

13,4 30,3

13,3 30,9

23,9 50,5

5 7

6 6

4 4

3 3

1 1

2 2

7 5

3,5 14,1

2,4 24,2

(!) Une récapitulation plus complète des combinaisons de variantes englobant la région étudiée dans sa totalité est donnée par le tableau 94, p. 267 de l'éd. ail., du rapport du groupe pour l'étude d'un tunnel sous le Saint-Gothard.

1637 Pour établir une comparaison avec le tunnel de base, il faut ajouter à ces frais les dépenses concernant les rampes, à savoir: Frais de construction 510 , millions de francs Frais d'exploitation et d'entretien . . . .

2,2 millions de francs/année L'étude des variantes avec tunnel de base a permis de déterminer les grandeurs caractéristiques suivantes: Tunnels routiers Variante K

Tunnel routier et ferroviaire combiné

Longueur du tunnel du Saint- Gothard. . . . . km Dépenses de construction ·· (y compris installations électro-mécaniques) millions de francs

45,5

1207 13

Frais d'exploitation et d'entretien, millions de francs/ année Dépenses de capital et amortissement, millions de Dépenses du trafic . . . . millions de francs/année> Frais annuels totaux. . . . millions de franes/anné

·

Tunnel routier seulement

45,0 1477 >13

5,5

5,4

69,9 58,9 134,3

86,0 58,9 150,3

Les variantes qui, d'une façon ou d'une autre, sont en connexion avec des installations ferroviaires existantes ou futures exigent une durée de construction plus longue que les simples tunnels routiers. Cela est dû au fait que le tunnel ferroviaire ne peut être percé au moyen de puits ou qu'il faut d'abord construire le tunnel de base.

C. CONSIDÉRATIONS RELATIVES A LA TECHNIQUE EN MATIÈRE DE CIRCULATION ET AU DOMAINE ÉCONOMIQUE La route du Saint-Gothard est avant tout une liaison internationale et nationale pour le trafic de transit. Mais il y a une interdépendance manifeste, du point de vue'technique et économique, entre elle et les vallées traversées.

En plus des études techniques, la solution du problème du Saint-Gothard exige la connaissance des conditions économiques du trafic. Ces conditions seront brièvement examinées ci-après.

1. le trafic dans la région du Saint- Gothard La route du Saint-Gothard n'est pas empruntée par le seul trafic de transit proprement dit. Elle sert encore de voie d'accès aux cols du Susten, · Feuille fédérale. 116«= année. Vol. II.

106

1638

de rOberalp et de la Furka, ainsi que de voie de pénétration dans la vallée de la Reuss et la Léventine, Une enquête sur le trafic à laquelle il a été procédé en juillet 1962 au moyen de fiches distribuées à tous les automobilistes pénétrant dans la région dont il s'agit a permis de déterminer les volumes de trafic correspondants à ces différentes fonctions de la route. La représentation schématique des courants de circulation met immédiatement en évidence la place occupée par le trafic de transit. Sur la voie de transit proprement dite, ce furent les véhicules étrangers qui prédominèrent, atteignant une proportion approximative de 2/3 du trafic total. A côté du transit nord-sud, seule la liaison Susten-Schattdorf accuse un trafic de transit d'une certaine importance, alors que les autres voies de communication sont nettement à l'arrière-plan. Au sud, le trafic à destination fixée qui pénètre dans la région est plus fort qu'au nord. On peut en conclure qu'un tunnel routier de base ne saurait satisfaire aux exigences d'un trafic très important. Un principe admis dans la planification des routes nationales suisses veut cependant que les grandes routes de transit servent aussi les intérêts du trafic régional, à condition que la fonction primaire de la nouvelle construction le permette.

2. Les dépenses annuelles pour les différentes variantes, considérées sous l'angle de l'économie nationale De même que les investissements faits pour d'autres modes de transport, les grands projets routiers doivent être jugés sous l'angle de l'économie nationale. Parmi les différentes variantes, la meilleure est celle qui, par année, exige économiquement le moins. Entrent ici en considération les dépenses que font les pouvoirs publics pour la construction, l'exploitation et l'entretien et celles que font les usagers de la route pour l'exploitation des véhicules. La commission de planification avait appliqué une méthode particulière pour ces recherches. Le groupe d'étude reprit cette méthode, en l'adaptant aux circonstances particulières là où c'était nécessaire.

La plus forte dépense des pouvoirs publics est due à la construction.

Pour pouvoir être mise en rapport avec les frais annuels d'exploitation, cette dépense doit être convertie en annuités, c'est-à-dire qu'on fixe pour le Saint-Gothard la dtirée d'amortissement
à 50 ans et le taux à 4 pour cent.

A cette dépense viennent s'ajouter les frais annuels pour l'exploitation du tunnel, le courant pour l'éclairage et la ventilation, les frais de personnel de nettoyage, d'entretien, de rénovation et autres frais divers.

Pour évaluer les dépenses des usagers, on admettra un prix fixe de 12 et/km pour la prestation kilométrique d'une voiture particulière et de 90 et/km pour celui d'un camion moyen. Ces prix ne tiennent compte que des frais nets d'exploitation et de la moitié des dépenses pour l'amortissement, ce qui explique les taux relativement bas. On multipliera ces taux par le

1639 volume du trafic, évalué pour chacune des variantes. Pour les déclivités, les courbes et les tunnels, on se fondera sur les longueurs dites virtuelles et non les longueurs géométriques, c'est-à-dire qu'on tiendra compte par des suppléments, des difficultés particulières rencontrées sur ces sections.

La part de trafic qui subsistera sur l'ancienne route étant plus ou moins grande selon la variante choisie, il s'agit d'établir le bilan du trafic pour tout le réseau. Les dépenses des usagers sur une ancienne route sont, naturellement, plus élevées que sur la nouvelle construction qui permet un roulement plus économique. Pour les variantes avec transport par chemin de fer, on calculera, à la place des dépenses des automobilistes, celles de l'exploitation ferroviaire.

Une comparaison des frais annuels des combinaisons des variantes dans la région d'Erstfeld à Biasca montre que les solutions avec tunnel ferroviaire, à l'exception de la variante rail-route du tunnel de base et d'un deuxième tunnel ferroviaire de Gesehenen à Airolo avec section élargie, comportent en général des frais annuels moins élevés que les variantes de tunnels routiers proprement dits. Parmi celles-ci, celle du tunnel de Gesehenen à Airolo est la plus favorable, suivie de près par celles des tunnels à moyenne et à haute altitude. Le tunnel routier de base entraîne les frais annuels les plus élevés.

En comparant les frais annuels des combinaisons de variantes dans la région plus restreinte, à savoir entre Schönibrücke et Piotta ouest, on remarque que les solutions avec tunnel ferroviaire sont, à une exception près, plus favorables que celles des tunnels routiers proprement dits. Cela est dû au fait que les frais de construction de tunnels ferroviaires sont sensiblement moins élevés (gabarit d'espace libre plus petit, pas de puits de ventilation).

La supériorité du transport collectif en tunnel non ventilé s'y manifeste par rapport au trajet individuel. En d'autres termes, la plus grande liberté de mouvement dont bénéficie l'automobile doit se payer. C'est là une constatation qui est valable pour de nombreux cas où les deux moyens de transport entrent en considération. Compte tenu des dépenses annuelles totales, c'est de nouveau le tunnel routier Göschenen-Airolo qui occupe le premier rang parmi les tunnels routiers proprement dits (v. tableaux p. 15 et J6).

D. LE COMPORTEMENT DES USAGERS DE LA ROUTE DANS UN LONG TUNNEL Lors des travaux du groupe d'étude, personne ne pouvait encore dire quel serait le comportement des usagers de la route dans un long tunnel.

On a souvent entendu exprimer la crainte qu'un long parcours en tunnel ne puisse présenter un danger à cause des réactions psychiques imprévisibles des conducteurs. C'est pourquoi le groupe d'étude tenait particulièrement à jeter de la clarté sur cet ensemble de questions en faisant appel à un expert en psychologie. La question était de savoir quelle est la longueur maximum

1640 d'un tunnel routier qui doit pouvoir encore être traversé en toute sécurité.

L'expert arriva à la conclusion qu'un tunnel de 16 km ne pose pas des problèmes particuliers. Bien entendu, il faut compter que l'air chaud du tunnel et le bruit des véhicules à moteur entraîneront une certaine diminution de moyens du conducteur et que la monotonie risque de provoquer la somnolence et même le sommeil. La cinétose ou mal de voyage ne sera pas plus fréquente dans un parcours en tunnel que sur la route à.ciel ouvert. En revanche, il est certain que des cas de phobie des tunnels se manifesteront sous la forme de claustrophobie (peur de se voir enfermé), d'agoraphobie causée par l'impression d'être dans un tunnel interminable, ou de nyctophobie ou peur de. l'obscurité dans un .tunnel mal éclairé. Ces phobies auxquelles les personnes, très sensibles sont sujettes ne semblent pas devoir accroître les risques d'accidents, car ces personnes, conscientes de leur état, éviteront d'être placées dans une situation semblable et renonceront donc aux trajets en tunnel. L'éclairage des tunnels devrait être l'objet de soins particuliers, il sera installé de façon qu'il ne se produise pas des effets de lumière irritants par intermittence, qui peuvent provoquer des malaises et même des crises d'épilepsie.

Se fondant sur ces considérations d'ordre médico-psychologiques, le groupe d'étude est arrivé aux conclusions suivantes dans son estimation des longueurs-limites des tunnels routiers (rapport final, p. 315, édition allemande) : «Le groupe d'étude ne méconnaît pas certains dangers que comporte l'exploitation d'un tunnel routier d'une certaine longueur. Il réconnaît aussi que les difficultés augmentent en proportion de la longueur du tunnel. Il estime qu'une longueur de tunnel de 16 km ne dépasse pas la limite admissible. Néanmoins, si la Suisse est le premier pays à construire un tunnel routier de 16 kilomètres, les mesures concernant le contrôle, la surveillance, l'annonce des accidents et la lutte contre l'incendie devront être très sévères.

En revanche, pour juger si une longueur .de 45 km est admissible pour un tunnel de base, des examens approfondis seront nécessaires, et il faudra attendre de connaître les expériences faites dans l'exploitation de tunnels routiers d'une certaine longueur. » Nous reviendrons plus
loin sur ces questions.

E. PRONOSTIC POUR L'UTILISATION DU TUNNEL Le groupe d'étude s'est également efforcé d'établir un pronostic pour l'utilisation du tunnel. Pour cela il s'agit de répartir entre le tunnel et le col le volume total du trafic entre les deux portails, tel qu'il.ressort de l'analyse du trafic. Ce travail présente cependant des difficultés du fait qu'il n'existe pas jusqu'à ce jour d'indices permettant de dire dans quelles circonstances l'automobiliste préférera le tunnel au col. La méthode usuelle de la

1641 répartition du trafic appliquée dans la planification routière n'étant ainsi pas utilisable, il fallut se résoudre à admettre certaines hypothèses extrêmes entre lesquelles se situerait la valeur probable. On peut faire une distinction entre les parcours pour lesquels le tunnel devra être emprunté dans tous les cas ou très probablement et ceux où le choix entre les deux passages reste possible.

Le trafic entrant en considération pour l'utilisation du tunnel est : -- le trafic d'hiver (20 % du trafic annuel) ; -- du trafic d'été : selon l'hypothèse 1 : le trafic de nuit, le trafic par mauvais temps, le trafic lourd ; selon l'hypothèse 2: 50 pour cent du trafic de nuit, 50 pour cent du trafic par mauvais temps, le trafic lourd en entier.

Pour le reste du trafic, il y a le choix entre le col et le tunnel. Là aussi, deux hypothèses extrêmes ont été envisagées, à savoir: -- % du trafic libre emprunte le tunnel, -- % du trafic libre empruntent le tunnel.

Ces deux couples d'hypothèses fournissent quatre valeurs dont les extrêmes sont, d'une part, 57 pour cent et, d'autre part, 87 pour cent du trafic annuel total.

Selon cette estimation; les deux tiers environ du trafic annuel total emprunteront le tunnel. Ce taux peut sembler relativement élevé par rapport aux hypothèses, qui ne sont pas très optimistes.

Le nombre de ceux qui emprunteront le tunnel se rapprochera-t-il de la limite supérieure ou inférieure ? Cela dépendra certainement, jusqu'à un certain point, de la longueur du tunnel. Un tunnel de base de 45 km serait , certainement moins utilisé qu'aucun autre ; d'autre part, le tunnel de faîte serait si court qu'il ne fera guère concurrence à la route du col, à ciel ouvert.

F. PROPOSITION DU GROUPE D'ÉTUDE Pour procéder systématiquement à l'élimination des variantes et le» apprécier suivant une mesure commune, le groupe d'étude a établi une série de critères, à savoir : 1. La voie de communication pourrait-elle rester ouverte toute l'année ?'

2. Quel est l'abaissement du point culminant en soi ?

3. Quelles seraient les caractéristiques en ce qui concerne la technique de la circulation ?

1642 4. Quelles seraient les répercussions sur le trafic ?

5. Comment apprécier la route sous l'angle du trafic en général ?.

6. Quelles seraient les répercussions sur les intérêts économiques régionaux ?

7. Quelles seraient les répercussions sur les constructions dans les zones traversées ?

8. Quels seraient les avantages ou les inconvénients considérés du point de vue de la technique de la construction et de l'économie ? Comment se présenterait le programme de construction ?

9. Quels seraient les frais ?

10. Comment apprécier la route du point de vue militaire ?

11. Comment l'apprécier d'une façon générale ?

Ces critères furent subdivisés pour permettre une étude encore plus approfondie. Pour le choix entre les variantes, le groupe d'étude a adopté le procédé suivant : il a d'abord retenu, sur la base des critères susmentionnés, la plus favorable des solutions avec tunnel routier. Il a ensuite fait son choix parmi les solutions avec tunnel ferroviaire. En dernier lieu, il a comparé la solution choisie pour un tunnel routier et celle qu'il a retenue pour un tunnel ferroviaire.

1. Appréciation des variantes de tunnels routiers o dans la région étudiée d'Erstfold à Biasca a. Tunnel routier de base Les études ont révélé qu'il ne serait pas possible de réunir en un seul ouvrage, comme des tiers l'ont proposé, un tunnel routier et un tunnel ferroviaire.' Des raisons de construction et de ventilation s'opposent à cette solution. Le profil du tunnel en fer à cheval, réalisable du point de vue de la technique de construction, n'offrirait l'espace nécessaire que pour la section réservée à la circulation et le canal d'adduction d'air frais. Le conduit , évacuateur d'air vicié devrait trouver place dans une galerie parallèle.

Un tunnel routier de 45 km nécessiterait, lors d'un trafic maximum, un. volume d'air frais de 5100 m3 par seconde. La puissance installée de tous les groupes de ventilateurs serait de 33 000 kW.

Il est évident qu'un tunnel routier de base remplit les conditions requises quant à une utilisation permanente et à un point culminant situé aussi bas que possible. Pour obtenir ce niveau, il faudrait cependant construire un tunnel qui serait beaucoup trop long par rapport à son altitude. Pour une altitude de 500 m, la longueur ne devrait pas dépasser 25 km (p. ex. tunnel ferroviaire par le Simplon, de 20 km, situé à 700 m d'altitude). Ce désavan-

1643

tage est par trop grand, si le niveau bas ne répond à aucune nécessité impérieuse. Sous l'angle de la technique de la circulation, cette solution a le gros inconvénient de réunir les deux courants de trafic sur une seule chaussée, sur une longueur de plus de 45 km, où les dépassements devraient probablement être interdits. Un tunnel souffrant de tels défauts conviendrait probablement beaucoup moins aux automobilistes qu'un passage situé plus haut. Par temps incertain, le conducteur devrait se décider soit pour le col soit pour le tunnel à un moment où il ne serait pas encore en mesure de juger des conditions météorologiques qui pourraient être décisives pour lui. L'aménagement ultérieur du tunnel de base en un ouvrage à quatre voies de circulation exigerait des dépenses, bien supérieures à celles de toutes les autres variantes, car à côté du tunnel de base, la route du Saint-Gothard devrait être aménagée en semi-autoroute, pour le moins jusqu'à Gesehenen et Airolo, de façon à pouvoir faire face au trafic d'été. L'ensemble du trafic par la vallée de la Reuss en direction du Susten, de l'Oberalp et de la Furka ne pourrait pas emprunter le tunnel, ce qui signifierait d'avance une perte considérable pour cet ouvrage, dont le coût serait particulièrement élevé.

Les mêmes considérations sont valables pour le versant sud.

Les dépenses pour le tunnel routier de base sont très élevées., étant de l'ordre de 1,5 milliard de francs ; les frais d'entretien et d'exploitation seraient de 5,5 millions de francs par année, en nombre rond, et les annuités pour le paiement des intérêts et l'amortissement pendant '50 ans atteindrait à peu près 85 millions de francs.

D'une manière générale, on peut constater que les conditions climatiques dans la vallée de la Reuss et la Léventine ne sont pas telles qu'il serait impossible de construire une autoroute jusqu'à Gesehenen et jusqu'à Airolo, praticable en hiver et dont la déclivité ne dépasserait pas 5 pour cent. Les interruptions du trafic par suite d'avalanches, dont l'opinion publique se préoccupe, pourraient être supprimées par la construction de galeries relativement courtes ; grâce au foehn, l'étroite vallée de la Reuss jouit, d'ailleurs, d'une situation climatique favorable.

Des analyses du trafic sur une grande échelle ont confirmé le fait universel que des
routes touristiques, telles que le Saint-Gothard, sont empruntées avant tout durant le semestre d'été, où l'on n'éprouve pas le besoin d'éviter le parcours sur une rampe aménagée en autoroute. La différence d'altitude de 629 m entre Erstfeld et Göschenen est inférieure à celle de 686 m qui existe entre Bologne et les Appennins, sur la célèbre Autostrada del Sole. Vu les conditions topographiques, la rampe de 5 pour cent prévue au Saint-Gothard, comparée avec celle de 3,75 pour cent de l'Autoroute du Soleil dans les Appennins, peut être considérée comme étant plutôt faible et parfaitement acceptable. Si la construction d'un tunnel de base devait être motivée par la réduction de parcours qu'il permet, on pourrait construire aussi bien sur le Plateau suisse et dans le Jura de nombreux tunnels routiers

1644 qui permettraient une liaison directe plus courte entre certains points; personne, toutefois, ne songerait sérieusement à en exiger la construction.

Nous avons déjà parlé des effets psychologiques qu'aurait pour les automobilistes un tunnel routier de 45 km.

L'examen critique du projet de tunnel de base peut se résumer comme suit : un tel tunnel ne répondrait en aucune manière aux · nécessités du trafic et à nos possibilités techniques et financières. L'idée doit donc en être écartée.

b. Autoroute d'Erstfeld à Oöschenen, et de Biasca à Airolo, avec utilisation partielle du tracé ferroviaire existant Si un tunnel ferroviaire de base était construit, la suppression du trafic ferroviaire sur le parcours de montagne pourrait être envisagée, théoriquement au moins. Ainsi on pourrait disposer du tracé ferroviaire actuel pour la construction de la route; pour la moitié descendante de l'autoroute, il faudrait construire une nouvelle route, alors que la chaussée ascendante pourrait être placée sur le tracé ferroviaire dans la mesure du possible. Or il ressort des études que par suite des tunnels en lacets, de nouvelles constructions seraient également nécessaires sur de longs tronçons pour le parcours à la montée, ce qui ne rendrait pas cette solution moins onéreuse que la construction d'une nouvelle autoroute indépendante à quatre voies.

Du point de vue de l'exploitation, cette autoroute serait d'ailleurs désavantageuse à cause de sa division en deux parties indépendantes. Cette variante, qui n'aurait guère de chance de réalisation également du point de vue de la politique des transports, a donc été éliminée.

2. Comparaison des variantes de tunnels routiers dans la région restreinte du Saint- Gothard L'examen critique des trois possibilités déjà mentionnées, à savoir: -- Mätteli-Motto Bartola (7,2 km; 1680 m s. m.)

(tunnel de faîte) -- Hospental-Bedrina (10,5 km; 1460 m s. m.)

(tunnel de moyenne altitude) -- Göschenen-Airolo (16,4 km; 1160 m s. m.)

(tunnel à basse altitude) · ' a pu être fait en une seule phase, en appliquant aux trois solutions les critères déjà énumérés.

En ce qui concerne l'avantage d'être praticable durant toute l'année, le tunnel à basse altitude l'emporte nettement sur les deux autres. Bien que dans les Schöllenen la route puisse être aménagée de façon à demeiirer praticable en hiver, grâce à des moyens techniques appropriés, il s'agit évidemment d'une solution forcée. Le tunnel de Göschenen à Airolo présente,

1645 par rapport au passage à une altitude moyenne, l'avantage d'un point culminant à 300 m plus bas, ou même à 950 m par rapport au col. D'après le projet du groupe d'étude, la route des Schöllenen aurait une rampe de 6 pour cent, soit 1 pour cent de plus que les rampes inférieures de l'autoroute du Saint-Gothard. Si l'on voulait réduire encore davantage la déclivité, cela exigerait de plus grandes longueurs et des dépenses de construction supplémentaires. Pour le tunnel de moyenne altitude, les sections avec circulation dans les deux directions seraient un peu moins longues qu'avec les autres solutions; en revanche, la route des Schöllenen devrait rester ouverte au trafic mixte, ce qui diminuerait la valeur de la solution du tunnel d'altitude moyenne. Le tunnel à basse altitude est plus favorable au grand trafic de transit à destination fixée, que ce soit le trafic commercial ou touristique, alors que les deux autres solutions seraient préférées par le trafic d'excursion en cas de beau temps. Les tunnels de faîte et à moyenne altitude, bien que l'ouvrage principal soit moins long, présentent des sections couvertes plus longues que le tunnel à basse altitude.

Le tunnel à basse altitude représente, avec une dépense de l'ordre de 351 millions de francs, une économie de 75 millions par rapport au tunnel à moyenne altitude. Le tunnel de faîte, malgré la longueur réduite du tunnel principal, ne coûterait que 8 millions de moins que le tunnel à altitude moyenne, à cause des accès difficiles. Le tunnel à basse altitude l'emporte sur les deux autres également pour les frais d'exploitation. Le point culminant étant moins élevé et le parcours moins long, il exige des frais de trafic moins élevés.

Le fait que le choix de la variante à basse altitude permet de porter le point culminant du Saint-Gothard au-dessous de celui du tunnel du MontBlanc et du col du Brenner est d'une importance considérable pour la politique du trafic.

Du point de vue de la défense nationale, seuls le tunnel de moyenne altitude et la variante Göschenen--Airolo revêtent de l'importance. Les deux projets présentent des avantages et des inconvénients d'ordre militaire, mais il n'existe aucune raison impérieuse d'écarter l'une ou l'autre de ces solutions. Ce qui compte toutefois c'est que la variante prévue par le projet Göschenen-Airolo
assure une meilleure liaison entre la vallée de la Reuss et le Tessin que celle du projet Hospental-Airolo/Bedrina. Elle est plus directe, plus courte, mieux praticable en hiver et complètement à couvert entre Göschenen et Airolo. Ainsi la solution Göschenen-Airolo a donc la préférence, sans qu'elle exclue cependant, sur le plan de la défense nationale, le projet Hospental-Airolo/Bedrina, si d'autres raisons pouvaient être invoquées en sa faveur.

Se fondant sur cette comparaison, le groupe d'étude a choisi lé tunnel Göschenen-Airolo parmi les variantes d'un tunnel routier dans la région du Saint-Gothard proprement dite.

1646 3. Appréciation des différentes variantes avec tunnel ferroviaire a. Tunnel de base d'Amsteg à Giornico Même si l'accroissement du trafic devait être moins prononcé dans les années futures qu'il ne l'a été depuis la dernière guerre, la capacité de la ligne du Saint-Gothard aura épuisé ses dernières réserves dans 20 ans.

Puisque la limite de la capacité sera atteinte d'abord sur les sections en rampe, la construction d'un tunnel ferroviaire parallèle au tunnel existant ne résoudrait pas le problème ferroviaire. C'est pourquoi les représentants des chemins de fer fédéraux au sein du groupe d'étude en ont conclu que» la construction d'un tunnel de base d'une longueur de 45 km serait le moyen le plus efficace d'augmenter la capacité du chemin de fer. Les arguments qui conduisirent à l'élimination d'un tunnel routier proprement dit de 45 km sont également valables pour une combinaison rail-route. Aussi la décision des chemins de fer fédéraux en faveur du tunnel de base ne peut-elle faire revenir la commission sur son appréciation antérieure.

6. Tunnel ferroviaire entre Gesehenen et Airolo; le principe du «tapis roulant» Après que les chemins de fer fédéraux se furent désintéressés d'un tunnel ferroviaire Göschenen-Airolo servant à leurs propres besoins, il restait une solution, celle dite du «tapis roulant», soit la construction d'un tunnel ferroviaire pour le transport des véhicules automobiles..

Les études faites par les chemins de fer fédéraux ont prouvé que lacapacité du tapis roulant ne se mesure pas à celle du trajet en tunnel, car la ligne à double -voie pourrait assurer le transport de 4000 automobiles par heure. La limite de la capacité est en réalité déterminée par le chargement et le déchargement des véhicules; pour chaque direction, elle sera de 940 automobiles par heure après l'aménagement optimum des installations.

Les deux directions n'étant pas également chargées durant les périodes de pointe, la limite de la capacité de la direction la plus chargée sera atteinte à un moment où le train opposé n'est pas complet. Si les délais d'attente doivent être évités dans les deux directions, la capacité totale des installations de transbordement sera donc inférieure au double de celle d'une seule direction. Si le rapport de la répartition était de 60 %· : 40 %, la capacité serait de 1560
automobiles par heure (940 + 620). La capacité totale dépend, donc dans une forte mesure de la répartition du trafic entre les deux directions; moins cette répartition est équilibrée, moins grande est la capacité.

En comparaison, la capacité de la route dépend très peu de la répartition du trafic entre les deux directions; on peut admettre théoriquement qu'elle est de 2000 automobiles par heure, à condition que les installations de ventilation soient suffisantes pour diluer les gaz nocifs. Les enquêtes faites par les chemins de fer fédéraux et le groupe d'étude ont cependant prouvé

1647 qu'avec un tunnel ferroviaire prévu exclusivement pour le transport des véhicules, le tapis roulant pourrait parfaitement assurer le trafic entrant en considération jusqu'au terme de la planification. .Nous reviendrons sur ce problème de la capacité.

Après ces constatations générales, il s'agissait de choisir entre les solutions ferroviaires entrant en ligne de compte.

On écarta en premier lieu la possibilité de reporter jusqu'à la mise en service du tunnel de base le développement qu'il est prévu de donner aux installations de transbordement de l'actuel tunnel Göschenen-Airolo, pour lui donner la haute capacité dont il a été question plus haut. Nous reviendrons plus loin sur cette proposition.

La construction d'un tunnel ferroviaire ayant une section élargie en vue de sa transformation en tunnel routier n'a pas été jugée rentable. C'est pourquoi cette variante a aussi été définitivement éliminée. Il ne restait donc plus que le projet d'un second tunnel ferroviaire de Göschenen à Airolo, où les chemins de fer fédéraux assumeraient, pour ainsi dire, le- service d'entreprise de transport des automobiles. Il fallait donc encore comparer cette solution du «tapis roulant» avec celle du tunnel routier.

4. Comparaison de la solution routière et de la solution ferroviaire pour un nouveau tunnel de Göschenen à Airolo Le choix entre les deux solutions restant en lice n'était pas aisé, car le tunnel ferroviaire coûterait 110 millions de francs, soit 30 pour cent, de moins que le tunnel routier; de plus, sa capacité serait à peu près égale à celle de la route. Le groupe d'étude, après mûres réflexions, s'est malgré tout prononcé à l'unanimité en faveur du tunnel routier. Les raisons de cette proposition sont exposées dans le chapitre suivant.

° 5. Proposition du groupe d'étude · Se fondant sur les diverses recherches dont nous avons donné un aperçu, le groupe d'étude a répondu comme il suit aux questions posées par le département fédéral de l'intérieur : 1. Pour suffire aux exigences du trafic routier d'hiver, auquel on peut s'attendre, les installations actuelles doivent être complétées par un tunnel ; 2. Ce tunnel ne doit pas seulement rendre possible le trafic en hiver, mais il doit aussi avoir l'avantage d'avoir un point culminant sensiblement plus bas que la route du Saint-Gothard. Ces deux objectifs peuvent être le mieux atteints si l'on construit un tunnel à l'altitude du tunnel ferroviaire actuel,, c'est-à-dire de Göschenen à Airolo ;

1648 3. Le tunnel doit être aménagé comme tunnel routier, à ventilation artificielle, à l'usage des automobilistes conduisant eux-mêmes ; 4. Ce tunnel routier'ne servira pas seulement à assurer le trafic d'hiver, il devra encore permettre d'alléger la route du col, qui est surchargée; il faut donc le mettre en chantier le plus rapidement possible, afin qu,'il puisse être ouvert au trafic d'ici à l'année 1970.

lit. Discussion de la proposition du groupe d'étude Une fois les propositions du groupe d'étude rendues publiques, les gouvernements des deux cantons directement intéressés, Uri et le Tessili, firent part au Conseil fédéral, sous forme de lettres et lors d'audiences au département de l'intérieur, de leurs désirs concernant le choix des variantes.

Une délégation de trois membres du Conseil fédéral reçut les représentants des deux gouvernements, pour recueillir des renseignements complets sur les opinions et les voeux des cantons.

Le Tessin se rallia sans réserve au projet de tunnel routier GoschenenAirolo proposé par le groupe d'étude. Le gouvernement uranais mit également l'accent sur l'urgente nécessité de construire un tunnel routier au Saint-Gothard, mais il donna la préférence à la variante du tunnel routier Hospental-Bedrina, cadrant mieux avec un système routier qui devrait englober, selon lui, les communications par les cols de l'Oberalp et de la Furka. La vallée d'Urseren, déjà fortement désavantagée du point de vue économique par la construction du tunnel ferroviaire Göschenen-Airolo, ne devrait pas être coupée cette fois du trafic par un tunnel routier. Les représentants d'Uri exposèrent en particulier que si l'on · construisait un tunnel routier Göschenen-Airolo, le trafic en direction de la vallée d'Urseren (donc d'Andermatt et d'Hospental), de l'Oberalp, du Saint-Gothard et de la Furkà atteindrait dans un proche avenir un volume que la capacité de la route des Schöllenen pourtant aménagée selon des conceptions modernes, ne pourrait plus absorber normalement. A cela s'ajouterait la nécessité de maintenir ouverte le plus longtemps possible la route du col. De toute façon, le problème de la voie de transit par le Saint-Gothard ne saurait être considéré indépendamment des questions routières régionales. Le canton d'Uri défendit donc l'idée qu'un tunnel routier Hospental-Bedrina
avec voies d'accès praticables en hiver devait être construit en première étape.

Le complètement de ce système -- comme solution définitive -- pourrait être reporté à une période ultérieure. Il ne serait point nécessaire de décider maintenant déjà si ce complètement consisterait dans la construction d'un tunnel routier à l'altitude de Göschenen ou dans l'aménagement approprié du tapis roulant. Si le Conseil fédéral devait se prononcer en faveur d'un tunnel routier Goschenen-Airolo, concluait le canton d'Uri, le gouverne-

1648 ment uranais exigerait la garantie que l'aménagement de la route du SaintGothard sera poursuivi avec l'intention de maintenir l'ouverture du colle plus longtemps possible et d'assurer le trafic d'hiver par la route des Schöllenen.

Nous examinerons de plus près, dans les pages qui vont suivre, les questions que soulève la requête des autorités uranaises. Il ne s'agit pas dans la discussion engagée avec le canton d'Uri, d'une divergence fondamentale d'opinions, mais simplement du choix de la meilleure variante. En revanche, divers milieux, dont la presse s'est fait l'écho, ont proposé qu'aucune décision ne soit prise au sujet du tunnel routier avant que soit publié le rapport de la commission pour les tunnels ferroviaires à travers les Alpes, instituée par le département des transports et communications et de l'énergie. Selon ces milieux, la décision concernant le tunnel routier devrait être fondée sur une conception du trafic suisse en général. Cela revient ardire qu'il faudrait renoncer pour l'instant à toute entreprise au · Saint-Gothard et faire dépendre la question routière des décisions encore incertaines concernant les projets de chemins de fer alpestres. En outre, on a encore exprimé la crainte dans le public que les risques de l'exploitation d'un tunnel de 16 km de longueur ne soient trop grands pour ceux qui conduisent une voiture et allégué que la solution dite du tapis roulant serait donc préférable.

, Bien que-le rapport final du. groupe d'étude ne laisse subsister aucun doute sur ces questions, il est utile de traiter ici l'un ou l'autre problème pour compléter les considérations qui précèdent.

A. CAPACITÉ DE LA FUTURE ROUTE DU SAINT-GOTHARD . La future route du Saint-Gothard peut être subdivisée en différentes sections qui se distinguent nettement selon leur forme d'aménagement et leur fonction, à savoir : -- Les accès depuis le nord jusqu'à Gesehenen et depuis le sud jusqu'à Airolo, sous forme d'autoroutes à quatre voies. Ils servent aussi bien au trafic.de transit que de voies de pénétration dans la vallée de la Reuss, la Léventine et la vallée d'Urseren, et permettent en même temps . d'accéder à la Purka et à l'Oberalp.

-- Le tunnel de Gesehenen à Airolo. Il est exploité dans les deux directions et assure le trafic entre le nord et le sud des Alpes ; le trafic de grand transit y prédomine, les relations entre les vallées des deux versants étant relativement faibles.

1650 -- La route du col entre Göschenen et Airolo. Elle sert au trafic de transit durant le semestre diète. Sur le parcours des Schöllenen, vient s'y ajouter le trafic régional en direction d'Urseren et des cols déjà mentionnés.

Le nouveau tunnel et la route du col doivent être considérés comme une unité du point de vue de la technique du trafic, l'autoroute à quatre voies entre Göschenen et Airolo étant divisée en deux chaussées à double voie avec circulation dans les deux directions. Voilà d'ailleurs la raison pour laquelle la route du col devra continuer à faire partie du réseau des routes nationales, même après l'incorporation du tunnel routier GöschenenAirolo dans ce réseau. A cause de sa fonction supplémentaire de voie de communication régionale, la route des Schöllenen aura une intensité de circulation plus forte que le col du Saint-Gothard.

Lors de la discussion des variantes, le canton d'Uri a fait valoir que si l'on construisait un tunnel d'Hospental à Bedrina, la route à quatre voies venant du nord serait prolongée au-delà de Göschenen jusqu'à Hospental et qu'ainsi la capacité de la route du col proprement dite serait augmentée.

Par la suite, nous avons chargé le service des routes et des digues d'examiner si cela pourrait avoir une importance déterminante dans le choix des variantes. Le service en question a exposé ce qui suit : La capacité d'une route ne peut guère être indiquée par un seul chiffre.

Elle est fonction du genre d'exploitation et de la composition du trafic. Pour une route à quatre voies avec séparation des sens de circulation, la capacité est atteinte au moment où l'intensité maximum est réalisée dans l'un des deux sens. La répartition du trafic étant généralement inégale, notamment aux heures de pointe, l'autre chaussée ne supporte alors pas le volume de trafic maximum. La capacité ne correspond donc pas à la somme des capacités des deux chaussées. Elle équivaut à la somme de la capacité de la chaussée dont le pouvoir d'absorption est moindre (p. ex. direction ascendante) et des volumes de trafic auxquels on peut s'attendre dans la direction opposée. Le rapport des intensités de la circulation dans les deux sens peut être exprimé par 60 % : 40 %, mais il peut aller jusqu'à 70 % : 30 %. Si l'on veut définir le moment où la limite de capacité sera atteinte, c'est-à-dire
celui où l'ouvrage absorbera le volume de trafic maximum dans le sens où la circulation est la plus intense, sans qu'il se produise des temps d'attente, on dira que cet état sera atteint avant que la circulation dans le sens opposé n'ait atteint la limite de sa capacité. Si l'on veut vraiment supprimer les temps d'attente, la somme des capacités théoriques des deux chaussées ne peut jamais être atteinte avec une répartition inégale du trafic. Cet état de choses joue un rôle important -- comme on le verra plus loin --.dans la comparaison de la capacité du transbordement ferroviaire avec celle d'une route à deux chaussées, celle-ci dépendant moins de la répartition du trafic dans les deux sens.

1651 Sur la base de ces hypothèses, on peut indiquer la capacité des sections précitées comme il suit: 1. Autoroute jusqu'à Gesehenen 1. Le trafic ascendant prédomine 2. Le trafic descendant prédomine 3. Si les deux courants de circulation atteignent la même intensité, la capacité sera le double de celle de la direction dont le pouvoir d'absorption est moindre, soit

5320 autos/h 6000 autos/h

6280 autos/h

2. Tunnel routier Goschenen-Airolo Les dimensions des installations de ventilation du tunnel ont été calculées sur la base d'un volume de trafic de 1600 automobiles par heure.

Ce volume est un peu inférieur à la capacité de l'ouvrage, considérée sous l'angle technique du trafic. Cependant, le. calcul étant fondé sur différentes hypothèses plutôt défavorables, il est probable que la ventilation serait encore capable de suffire à un trafic plus intense. On a admis, par exemple, que le poids brut d'une voiture moyenne était de 1300 kg. La production de monoxyde de carbone étant proportionnelle au poids des véhicules, la ventilation pourrait suffire à un trafic plus intense dans le cas où le poids des voitures serait inférieur à celui qui est admis dans l'hypothèse. Si, par exemple, le poids est de 1100 kg au lieu de 1300 kg, la même installation de ventilation permettrait le passage de 1900 au lieu de 1600 automobiles par heure. Il est d'ailleurs bien possible que les constructeurs d'automobiles réussissent à créer des moteurs produisant moins de monoxyde; ainsi le calcul des installations de la ventilation comprendrait une réserve de plus, qui ne peut toutefois pas être exprimée en chiffres. Sur la base de ces constatations, on pourra mettre en compte, en plus d'une capacité de ventilation suffisant pour 1600 automobiles par heure, la capacité du point de vue de la technique du trafic, évaluée à 1800 automobiles par heure au minimum.

Pour un trafic de voitures très équilibré, une capacité de 2000 automobiles par heure est même possible théoriquement.

Ainsi la capacité du tunnel du Saint-Gothard peut être estimée comme suit : · -- Capacité d'après les calculs de ventilation selon des hypothèses plutôt défavorables . . . .'

1600 autos/h -- Capacité du point de vue de la technique du trafic, réalisable en cas de conditions plus favorables concernant la production de CO 1800 autos/h

1652 A l'inverse de la route à quatre voies ou du tapis roulant, la route à deux voies n'est guère influencée par la répartition du trafic selon les directions; même dans la proportion de 3 : 1, sa capacité peut être considérée comme n'ayant subi aucune modification.

3. Boute du col Se fondant sur l'expérience, le groupe d'étude a estimé à 1600 automobiles par heure la capacité de la route du col, aménagée selon les conceptions modernes. Le volume de trafic admissible, qui laisse encore à chaque conducteur une liberté de mouvement suffisante, n'est que de 900 véhicules par heure. On peut admettre cependant qu'un volume de 1200 automobiles permet une circulation à des conditions encore acceptables. Pour une pointe de trafic absolue de 1600 automobiles, le volume de 1200 automobiles pourrait 'être atteint pendant 30 heures au cours de l'année (le volume qui est atteint durant 30 heures est considéré comme déterminant pour le dimensionnement). On peut donc fixer -- la capacité de la route des Schöllenen et de la route du col (trafic n'étant plus fluide) à 1600 autos/h -- le volume de trafic admissible, dans des conditions de circulation satisfaisantes .

à 900 autos/h dans des conditions de circulation acceptables . . . à 1200 autos/h 4. Eoute des Schöllenen Dans le cas où le tunnel de Göschenen à Airolo serait construit, les estimations faites pour la route du col seront également valables pour la route des Schöllenen.

Mais si, donnant suite à la proposition du canton d'Uri, on construisait le tunnel d'Hospental à Bedrina, la route des Schöllenen devrait absorber tout le trafic du Saint-Gothard. Elle deviendrait ainsi le prolongement de l'autoroute venant du nord et conduisant jusqu'à Göschenen. Le groupe d'étude a proposé pour cette variante une nouvelle route à deux voies pour la direction ascendante, alors que pour la descente on emprunterait l'actuelle route des Schöllenen. A cause des lacets que présente cette route, on ne peut lui attribuer, malgré le trafic à sens unique, une capacité supérieure à 2000 automobiles par heure. La capacité de la nouvelle route accusant une rampe de 6 pour cent a été estimée à 2750 automobiles. Ainsi la capacité sur la section des Schöllenen aménagée à quatre voies serait la suivante: -- Si le trafic principal va en direction du sud : direction ascendante 2750 autos/h 2750 direction descendante x 40 en nombre rond. . . 1850 autos/h.

60 · Total en cas de prédominance du trafic ascendant. . . 4600 autos/h

1653 -- Si le trafic principal va en direction du nord : direction descendante 2000 autos/h 2000 direction ascendante ------ x 40 en nombre rond . . . . 1300 autos/h bu Total en cas de prédominance du trafic descendant . . 3300 autos/h 5. Capacité du transport par chemin de fer, avec utilisation des installations existantes dont le rendement a toutefois été porté au maximum Le groupe d'étude du tunnel du Saint- Gothard indique comme suit la capacité des installations ferroviaires existantes, dont le rendement aura cependant été porté au maximum : -- par trafic normal 565 autos/h -- par trafic de pointe 635 autos/h Le rendement supérieur par trafic de pointe nécessite des mesures spéciales d'organisation. Il ne peut donc être assuré en tout temps. Il faut également tenir compte du fait que, dans ce cas, le trafic est de même intensité pour les deux sens de la circulation. Si le trafic se répartit dans la proportion de 60 : 40, la capacité tombe à -- par trafic normal 470 autos/h -- par trafic de pointe 530 autos/h

6. La capacité totale de la route du Saint-Gothard Si toutes les réserves sont utilisées, la capacité totale de la route du Saint-Gothard est de: , -- route du col 1600 autos/h -- tunnel routier 1600-1800 autos/h -- transport par chemin de fer (capacité entièrement utilisée, dans les deux sens) 570 autos/h Total 3770-3970 autos/h ou en nombre rond 3800-4000 autos/h Ces chiffres doivent cependant être considérés comme une valeur extrême, qui ne peut être atteinte que si le courant du trafic est régulier.

Déjà avec 3300 automobiles par heure, on aura l'impression que l'intensité est très forte.

Feuille fédérale. 116e année. Vol. II.

107

1654 B. INTENSITÉ FUTURE DU TRAFIC SUR LA ROUTE DU SAINT-GOTHARD II s'agit maintenant d'opposer à la capacité indiquée ci-dessus les volumes de trafic auxquels on peut s'attendre. Se fondant sur les travaux de la commission de planification, le groupe d'étude a établi ses pronostics jusqu'en 1980, terme de la planification. Le délai en question est court, eu égard à l'importance du problème du Saint-Gothard pour l'avenir. Mais il serait difficile de pronostiquer au-delà de ce terme, le développement ultérieur du trafic ne pouvant être envisagé avec certitude. Face aux difficultés que comporte une appréciation, on peut donner tout au plus quelques indications concernant le développement postérieur à 1980.

En admettant que le tunnel Göschenen-Airolo sera construit, on peut, sur la base du rapport du groupe d'étude, au sujet des différentes sections de la route, donner les chiffres suivants, valables pour 1980: Moyenne annuelle autos/jour Section à ciel ouvert

WassenGöschenen GosohenenAndermatt AndermattHospental .

Hospental--col

Tunnel«.

.

Total

Pointe horaire absolue autos/heure Section a ciel ouvert

Tunnel (')

Total

10500

.

2660

.

.

3110

7610

900

10.270

750

10720 8510

870 250

2880 2130

3000 2380

(*) Utilisation du tunnel à 100 pour cent

II ressort de ce tableau qu'au moment des pointes maximums (2130 autos/h), le tunnel (capacité 1600 à 1800 autos/h) ne serait pas en mesure d'absorber tout le trafic de transit de Göschenen à Airolo ; le surplus serait de 330 à 530 véhicules par heure (2130-1600 à 1800). Ces véhicules pourraient, le cas échéant, être transportés par le tapis roulant existant. Or, ces pointes surviennent toujours durant le semestre d'été, quand le col est ouvert. On peut déterminer l'intensité du trafic par le col en soustrayant du trafic total Hospental-Airolo celui qui passe par le tunnel. Celui-ci dépend, d'une part, des conditions atmosphériques et, d'autre part, de l'intensité du trafic sur la route du col. En cas d'utilisation maximum du tunnel routier, l'intensité du trafic sur la section à ciel ouvert peut être déterminée comme suit, selon qu'il y a ou non transport ferroviaire :

1655 Section

Sans utilisation du chemin do 1er

Mise à profit de la capacité du transport ferroviaire

Route des Schöllenen .

Andermatt-Hospental .

Route du col

1080-1280 autos/h 1200-HOO autos/h 580- 780 autos/h

510-710 autos/h 630-830 autos/h 10-210 autos/h

Ces chiffres doivent être considérés comme valeurs extrêmes théoriques ; en réalité, les tunnels routier et ferroviaire ne seront probablement pas mis entièrement à contribution, même en cas de trafic extrême. Il n'est en effet pas possible de diriger le trafic sur les différentes installations avec la précision nécessaire.

L'intensité plus forte sur la section Andermatt-Hospental est due au trafic en provenance de la Furka et de l'Oberalp. Vu que des routes d'évitement devront de toute façon être construites à Andermatt et à Hospental, on disposera là, avec la route existante, d'une si grande réserve que cette section ne saurait être déterminante pour la conception générale.

La réserve de capacité ressort de la comparaison de la capacité et de la future pointe horaire. Elle peut être estimée comme suit pour les différentes sections de la route du Saint-Gothard:

Section

Wasserir-Goschenen

Capacité autos/h

5230

Gesehenen-- Airolo lre variante : Tunnel à basse altitude et route du col Goschenen -- Airolo (route des Schöllen e n déterminante) . . . . 3770-3970 e 2 variante : Tunnel de moyenne altitude Hospental--Bedrina a. Schöllenen, trafic nordsud prédominant . . .

5170 trafic sud-nord prédominant 3870 6. route du col + tunnel . 3770-3970 c. Bedrina-- Airolo : comme Schöllenen A-irolo--Piotta .

' 5230

Pointe horaire 1980 autos/h

2940

2880

2880 2880 2380

2500

autos/h

%

Année où la réserve sera épuisée (évaluation sommaire) environ

2290

78

2005

Réserve de capacité en l'année 1980

890-1090 31-38

2290

80

990 34 1390-1590 58-67

2730

109

1990

2005

1990 2000

2015

1656 II est difficile d'estimer à quel moment les réserves seront épuisées, vu qu'on ne peut se faire une idée exacte de l'évolution du trafic après 1980.

Si l'on admet que le trafic continuera à augmenter au même rythme, l'épuisement des réserves pourrait se produire au cours des années indiquées dans la dernière colonne.

La section critique est véritablement celle des Schöllenen. Si le trafic nord-sud y prédomine, la variante avec tunnel à moyenne altitude (Hospental) sera beaucoup plus favorable que la variante avec tunnel à basse altitude (Göschenen). Cela est dû à ce que, dans ce cas, le trafic ascendant disposera d'une nouvelle route. Si c'est le trafic sud-nord qui prédomine, la variante avec tunnel à basse altitude sera plus favorable. La raison en est que la route existante, bien qu'exploitée dans une seule direction, a une capacité relativement faible et que la capacité de la nouvelle route ascendante ne serait pas mise entièrement à contribution, faute de trafic. Or les chances de voir le trafic de pointe atteindre le maximum sont égales dans les deux directions; c'est pourquoi la variante avec tunnel à Hospental ne serait plus favorable que pour la-moitié des pointes de trafic les plus fortes.

Ajoutons les remarques suivantes à ces indications sur la capacité. Les valeurs numériques doivent être considérées comme des limites extrêmes qui ne peuvent entrer en jeu que si la circulation est bien réglée et si le trafic entre le portail du tunnel routier et la route du col et, le cas échéant, entre ce portail et les wagons assurant le transport des véhicules fonctionne sans accrocs. Des doutes demeurent à ce sujet, bien qu'il soit possible de soumettre ces opérations à certaines règles. Dans la pratique, la surcharge de la route aux pointes extrêmes du trafic se manifestera donc plus tôt.

Les valeurs maximums figurant au tableau sont des pointes horaires absolues qui, théoriquement, ne seront d'abord atteintes qu'une fois par année. De même les pointes de trafic suivant immédiatement sont rares; si la pointe absolue comporte 100 pour cent, la pointe maximum atteinte durant 10 heures au cours de l'année ne sera plus que de 90 pour cent et celle atteinte durant 20 heures de 80 pour cent. Ces pointes horaires maximums se répartissent sur quelques jours de l'été et il peut arriver que deux
ou plusieurs d'entre elles tombent le même jour. Le jour où ces pointes atteindront ou dépasseront les capacités-limites indiquées dans le tableau ci-dessus, les temps d'attente seront inévitables et le surplus de trafic se répartira sur les heures suivantes moins chargées. La sursaturation de la région du SaintGothard ne se produira donc pas d'une année à l'autre ; elle se manifestera graduellement. Les automobilistes qui connaissent la route prévoiront probablement quels sont les jours où l'intensité de la circulation atteindra son apogée (soit au week-end de la période principale des voyages), ce qui les amènera probablement à chosir d'autres tunnels et passages alpestres, à l'ouest et à l'est. A ce moment-là, le réseau routier de la Suisse et celui de l'étranger seront d'ailleurs surchargés sur de nombreux parcours, ce qui

1657 pourrait éventuellement contribuer à diminuer le volume de trafic affluant au Saint-Gothard.

Une réserve de capacité encore plus grande se produirait si le tunnel ferroviaire de base Amsteg-Giornico était construit. Le tunnel actuel serait alors fortement déchargé eib l'on pourrait en disposer dans une large mesure comme tapis roulant.

Après avoir constaté que la surcharge de trafic au Saint-Gothard durant le semestre d'été se produira vers la même époque dans les Schöllenen pour les deux variantes de tunnels Göschenen-Airolo et Hospental-Bedrina, il faut se demander quels compléments sont nécessaires aux deux liaisons pour que la capacité soit augmentée. Il existe les possibilités suivantes : a. Pour le tunnel Göschenen-Airolo -- compléter la route existante des Schöllenen par une nouvelle piste, -- construire une deuxième-route aux Schöllenen, -- construire un deuxième tube de tunnel Göschenen-Airolo ; 6. Pour le tunnel Hospental-Bedrina -- amélioration de l'actuelle route des Schöllenen, particulièrement dans les lacets, -- construction d'une troisième route aux Schöllenen pour le trafic gagnant la vallée, -- construction d'un tunnel de Gesehenen à Aifolo.

Il serait prématuré de s'occuper de ce qui se révélera nécessaire vers la fin du siècle, particulièrement si l'on songe que seul l'avenir permettra de voir de quelle manière le trafic au Saint-Gothard se répartira entre le col et le tunnel. Jusque-là, on disposera aussi des expériences nécessaires dans le domaine de l'exploitation de longs tunnels routiers, ce qui facilitera le choix de la bonne solution.

La variante avec le tunnel Hospental-Bedrina préconisée par le canton d'Uri, coûte 75 millions de francs de plus que le tunnel routier Göschenen-Airolo. H faudrait ajouter à ce montant les dépenses nécessaires pour augmenter la capacité de la route des Schöllenen, qui ne seront pas évaluées en chiffres ici. Ensemble, ces frais seraient sensiblement plus élevés que les dépenses qu'imposera l'augmentation de la capacité de la route des Schöllenen dans le cas de la construction du tunnel à basse altitude, pour que cette voie de communication puisse absorber le trafic pendant longtemps encore.

Les études relatives à la capacité de la future route du Saint-Gothard montrent donc qu'à ce point de vue également, on ne peut déceler des
raisons majeures pour préférer le tunnel partant d'Hospental. Celui-ci exigerait d'ailleurs dès le début des investissements plus grands, ce qui doit compter, étant donné les difficultés de financement que l'on sait.

165S C. AMÉNAGEAIENT DE LA ROUTE DES SCHÖLLENEN POUR LE TRAFIC D'HIVER Si le canton d'Uri recommande la construction du tunnel HospentalBedrina, l'une des raisons, et non la moindre, en est que cette variante fournira à la vallée d'Urseren une voie de communication également praticable en hiver. Le canton d'Uri a reçu plus d'une fois l'assurance qu'il demeurait possible de poursuivre l'aménagement de la route du SaintGothard par le col au titre de route nationale. Les travaux à cet effet, on le sait, ont commencé sur une large échelle par la construction d'une route sur la rampe sud pour éviter la Tremola. Ce programme d'aménagement engloberait en premier lieu les sections suivantes : -- Construction de routes d'évitement de Göschenen, Andermatt et Hospental.

-- Construction d'ouvrages de protection dans les Schöllenen pour que le trafic soit possible en 'hiver. Seul l'établissement de projets détaillés permettra de décider quels ouvrages doivent être construits; leur ampleur dépendra du degré de sécurité qu'on veut atteindre.

-- Aménagement de la route du col proprement dite pour qu'elle soit praticable le plus longtemps possible, l'ouverture de cette route au printemps ayant une importance particulière.

Il est compréhensible que la vallée d'Urseren attache une grande importance à un tel aménagement. De même, l'automobiliste obligé jusqu'ici d'attendre longtemps l'ouverture de la route du col, au printemps, approuvera ces plans d'aménagement. Pendant la période des voyages, une bonne partie du trafic continuera certainement à emprunter, surtout par le beau temps, la route du col, la liaison parle Saint-Gothard n'ayant pas une ·capacité suffisante pour absorber tout le trafic sans le concours simultané de cette route. Andermatt et Hospental n'ont donc pas à craindre d'être délaissés, car la vallée d'Urseren restera toujours un point de croisement important de la route nationale N 2 par le col du Saint- Gothard et du passage Furka-Oberalp, qui appartient au réseau des routes principales.

Les voeux du canton d'Uri pourront ainsi être satisfaits largement dans la décision à prendre dans l'intérêt général au sujet de la route du SaintGothard.

1659 D. PROBLÈMES TECHNIQUES DE L'EXPLOITATION DU TUNNEL Les longs tunnels routiers donnent lieu à deux objections principales, l'une'technique, l'autre psychologique.

Le problème de la ventilation des longs tunnels routiers est en principe résolu aujourd'hui. Les nombreux tunnels exploités dans le monde entier et qui absorbent d'énormes volumes de trafic de 30 000 à 40 000 automobiles par jour et par tube, et les tunnels à deux tubes par lesquels passent 60 000 à 80 000 automobiles, confirment le fait. Les tunnels d'une certaine longueur ne posent pas de nouveaux problèmes concernant la technique de la ventilation ; ils obligent simplement de donner des dimensions appropriées aux installations mécaniques et aux canaux d'aération. Pour les tunnels alpestres du réseau des routes nationales, les dimensions des installations de ventilation sont calculées en fonction du volume maximum du trafic, c'està-dire pour 1600, éventuellement pour 1800 automobiles par heure.

Les avis sont encore divisés en ce qui concerne le comportement des usagers dans les longs tunnels routiers. Récemment encore, on n'avait pas fait d'expériences dans l'exploitation de tels tunnels. Les expériences faites depuis ce printemps dans le tunnel du Grand-Saint-Bernard, long de 6 km · à peine, ne semblent confirmer en aucune manière des craintes quelconques à ce sujet. Au contraire, de l'avis des usagers en général, la traversée du tunnel n'augmente pas les difficultés du parcours, et jusqu'à maintenant il n'y a pas eu d'accidents dus au trajet en tunnel. L'exploitation exige, en effet, un service de surveillance parfaitement organisé, capable d'intervenir immédiatement en cas d'accidents, d'incendies et de pannes. L'année prochaine, le tunnel du Mont-Blanc, de 12 km de longueur, sera également mis en service. Le département de l'intérieur et le service des routes et des digues suivront attentivement le développement du trafic dans ces deux tunnels et s'efforceront d'obtenir toute la documentation sur les expériences faites, susceptible d'être utilisée pour l'établissement des projets du tunnel du Saint-Gothard.

E. LA QUESTION DE LA ROUTE DU SAINT-GOTHARD DOIT-ELLE ÊTRE ÉTUDIÉE CONJOINTEMENT AVEC LE PROBLÈME DES LIGNES DE CHEMINS DE FER SUISSES DE TRANSIT PAR LES ALPES ?

Il est permis de se demander si la décision de compléter
le réseau des routes nationales par un tunnel routier au Saint-Gothard ne devrait intervenir qu'au moment où l'on connaîtra les résultats des études relatives à d'éventuelles communications ferroviaires nouvelles par les Alpes. .Une décision dans ce sens se fondrait sur le fait que, dans le cas de la construc-

1660 tion d'un tunnel ferroviaire de base d'Amsteg à Giornico, le tunnel existant serait à la disposition du trafic automobile pour le transport des véhicules (tapis roulant) et que l'on pourrait ainsi éviter les dépenses d'un nouveau tunnel routier. Nous nous bornerons à résumer ici les raisons d'ordre pratique les plus importantes qui militent pour le rejet d'une telle solution. Nous pouvons être brefs parce que la question fondamentale, qui est de savoir si le système du tapis roulant peut être considéré comme la solution définitive pour le Saint-Gothard, est traitée ailleurs, et résolue négativement.

On est unanime à reconnaître que le tapis roulant avec utilisation du tunnel ferroviaire existant serait la solution la moins onéreuse. En effet, le trafic routier devrait se contenter, pour l'avenir, de l'installation ferroviaire 'existante, quelque peu modifiée et améliorée. Or, le choix du tunnel ferroviaire existant n'entre pas en considération pour les raisons suivantes.

La capacité du tunnel actuel au Saint-Gothard, aménagé pour le transport des véhicules routiers, correspondrait, théoriquement, à peu près à la capacité d'un nouveau tunnel ferroviaire conçu pour le système du tapis roulant qui sera décrit plus loin. Mais en pratique, cette capacité serait réduite du fait que des trains de voyageurs et de marchandises continueraient à emprunter l'ancienne ligne du Saint-Gothard, car il ne serait guère possible de supprimer le parcours de montagne, une fois que serait construit un tunnel ferroviaire de base. Les chemins de fer fédéraux ont précisé, lors de la discussion de cette question au sein du groupe d'étude du tunnel du Saint-Gothard, qu'ils ne songent pas, à l'heure actuelle, à renoncer au trafic ferroviaire sur les rampes existantes, même si un tunnel de base était construit. Du point de vue d'une exploitation économique, la suppression de ce parcours serait parfaitement acceptable; elle irait cependant à l'encontro des voeux et des besoins des cantons d'Uri et du Tessin. Enfin, un abandon des rampes serait inopportun à cause de la liaison qu'elles assurent avec la ligne Furka-Oberalp et des intérêts militaires dont il faut tenir compte.

Même si ces besoins du trafic n'existaient pas, les chemins de fer fédéraux en arriveraient à se demander, si, eu égard au fait qu'on ne sait pas
comment se développera le trafic ferroviaire au Saint-Gothard, il serait raisonnable de renoncer à ce parcours d'une grande capacité, vu qu'un tunnel de base peut également être débordé et constituer ainsi un goulet gênant l'exploitation.

Le réseau ferroviaire européen offre déjà plusieurs exemples de parcours de ce genre où, à côté d'un nouveau tunnel à basse altitude, l'ancienne voie est encore exploitée et rend de bons services'en permettant la répartition du trafic sur les deux parcours. Le trafic ferroviaire au Saint-Gothard qui continuerait à emprunter la voie existante entraînerait une diminution de la capacité d'un tapis roulant aménagé dans le tunnel actuel, tandis que par la construction d'un tunnel routier Göschenen-Airolo, le maintien du tunnel ferroviaire et des installations de transbordement garantirait une importante réserve de capacité.

1661

En plus de ces raisons de politique du trafic et d'exploitation, des questions de temps viennent aussi s'opposer au choix de la solution du tapis roulant dans le tunnel ferroviaire existant. Le rapport final de la commission pour les tunnels ferroviaires à travers les Alpes est attendu pour l'automne 1965, mais il pourrait se faire que ce terme ne puisse être respecté. De plus, il n'existe aucun pronostic sûr quant à la conclusion à laquelle la commission arrivera. Que les experts optent en faveur d'un tunnel ferroviaire alpestre à l'est ou d'un tunnel de base Amsteg-Giornico, il faudra s'attendre dans chaque cas à des discussions nourries, sur le plan de la politique du trafic, entre les partisans du Saint-Gothard et ceux d'un tunnel alpestre à l'est. On ne saurait s'étonner qu'une discussion d'une telle envergure traîne en longueur et que quelques années s'écoulent depuis la remise du rapport sur les chemins de fer alpestres jusqu'au moment où le parlement prendra sa décision. C'est alors seulement qu'on pourra établir les projets de détail, puis passer aux préparatifs de construction, ce qui, étant donné l'ampleur de l'oeuvre, exigera de nouveau quelques années.

Le groupe d'étude indique une durée de construction de 13 ans pour le tunnel ferroviaire de base et de 6 ans pour le tunnel routier de Gesehenen à Airolo. Nous tenons ce dernier délai pour trop optimiste et croyons qu'il faut plutôt envisager une durée de 8 ans.

Si la décision devait être -défavorable au Saint-Gothard, les travaux d'établissement de projets et les travaux préliminaires de construction du tunnel routier de Göschenen à Airolo pour le trafic routier pourraient être entrepris incessamment. Jusqu'à l'achèvement de la construction, soit du tunnel routier, soit d'un tunnel pour le tapis roulant, il faudrait compter depuis aujourd'hui un minimum de 15 ans. Cela signifie que les travaux d'amélioration des conditions au Saint-Gothard dureraient jusque vers 1980.

Si la construction d'un tunnel ferroviaire de base d'Amsteg à Giornico devait être décidée, il faudrait envisager une période d'environ 20 a 25 ans jusqu'au moment où le tunnel ferroviaire existant serait déchargé et où les installations pour le transport des véhicules seraient aménagées selon la conception nouvelle. Notre pays n'aurait pas le droit de différer aussi
longtemps l'aménagement de la route du Saint-Gothard, qui est une tâche nationale et internationale urgente. En effet, nous avons établi que la capacité de la route du Saint-Gothard durant l'été sera épuisée peu après 1970. Cela aurait pour conséquence de graves embouteillages durant la période des voyages.

F. 'LE SYSTÈME DU TAPIS ROULANT Dans les milieux d'experts et dans le public, on a enfin discuté la question de savoir si un nouveau tunnel de Göschenen à Airolo avec traction électrique (tapis roulant) ne serait pas plus économique et avantageux qu'un tunnel routier proprement dit (pour véhicules roulant par leurs propres

1662 moyens). Comme le groupe d'étude, nous avons pesé les avantages,et les inconvénients des deux systèmes.

1. Les variantes étudiées par le groupe d'étude La commission de planification avait déjà étudié la question du tapis roulant. Elle a fait une distinction entre les tunnels qui peuvent être combinés avec une installation ferroviaire existante et ceux qui sont indépendants.

La première solution présente' de grands avantages du point de vue de l'exploitation en permettant d'utiliser les moyens de traction et les installations du chemin de fer existant et de disposer du personnel commun selon les besoins. Mais un tunnel indépendant donnerait la possibilité de construire des installations et des wagons d'une conception entièrement nouvelle, adaptée au but spécifique, qui est le transport des véhicules à moteur.

L'idée d'un tapis roulant au Saint-Gothard ayant été considérée en premier lieu en raison de l'existence du chemin de fer, il n'y avait qu'un pas à faire pour trouver une variante qui s'incorporerait au chemin de fer et ne s'écarterait pas, en principe, du système actuel du tapis roulant. Il s'agit, en l'occurrence, de la variante appelée dans le rapport du groupe d'étude «tapis roulant avec nouveau tunnel ferroviaire de Gesehenen à Airolo». Ses caractéristiques techniques sont les suivantes: -- Rampes de chargement. Le chargement et le déchargement des voitures se font sur une rampe à six pistes, flanquée d'un rail de chaque côté.

Les voitures prêtes à être chargées viennent se placer sur deux rangées, en bordure de la rampe, à gauche et à droite, et attendent l'arrivée du train. Les voitures que celui-ci transportait sont déchargées sur la chaussée à deux pistes demeurée libre entre les deux colonnes de voitures à charger; aux points de sortie du train, les (colonnes de voitures qui attendent doivent laisser des passages libres permettant d'accéder au train. Une fois déchargé, celui-ci peut être chargé à' nouveau, les voitures empruntant les passages libres pour gagner les wagons à plateforme. Une rampe spéciale est réservée au chargement des camions et des cars. Sur chaque rail de la rampe pour les voitures particulières, quatre trains peuvent être chargés et déchargés en une heure et deux trains à la rampe pour les camions, ce qui fait dix trains pour les deux rampes. Pour un
cycle complet, c'est-à-dire le trajet aller et retour et les préparatifs pour le prochain départ, un train met 45 minutes. Pour atteindre une fréquence de quatre départs par rail et par heure, il faudrait donc six compositions de train auxquelles il faut ajouter encore deux trains pour le transport des camions.

-- Les trains. Un train pour voitures particulières mesure au maximum 590 m et sa capacité de charge est de 100 voitures de moyenne grandeur ; les motocyclettes sont chargées sur un wagon spécial. Les motocyclistes et les automobilistes qui ne veulent pas rester dans leur voiture

1663 peuvent monter dans l'automotrice aménagée pour le transport de personnes. Vu les lourds poids à transporter, les trains pour camions sont plus courts ; Us peuvent être chargés de 33 camions d'une longueur de 10 m.

-- La capacité du tapis roulant. Un train complètement chargé peut transporter dans une direction 800 voitures par heure 72 motocyclettes par heure 66 camions et cars par heure 938 véhicules par heure Théoriquement, on obtient pour les deux directions ou, en nombre rond

1876 véhicules par heure 1880 véhicules par heure

Pour que cette valeur maximum puisse être atteinte, il faut non seulement un bon fonctionnement des opérations de charge et de décharge, mais aussi une intensité de trafic égale dans les deux directions. Si le trafic de moindre intensité n'atteint que les 2/3 de celui de l'autre direction, la capacité pratique tombe à : -- direction à intensité plus forte 940 véhicules par heure 0,4 -- direction à intensité plus faible -- X 940 620 véhicules par heure 0,6

1560 véhicules par heure On peut conclure que la capacité pratique d'un tunnel routier et celle du tapis roulant sont à peu près égales. D'après le projet du tapis roulant, les installations ferroviaires actuelles pour le transport des véhicules seraient incorporées au nouvel aménagement. Dans le cas de la construction du tunnel routier, la capacité du service actuel de transport, de l'ordre de 565 automobiles par heure (l'intensité maximum étant atteinte dans les deux directions) resterait à la disposition des usagers. La capacité totale serait dès lors de: -- tunnel routier 1600 autos/h , ..

. . 565 , 0,4 565 _,__ A ., -- transport ferroviaire -----1- ---- x --r- = . . .

470 autos/h -- tunnel routier + transport par l'installation existante, total -- capacité du nouveau tunnel ferroviaire (intensité plus forte dans une direction) -- capacité supplémentaire en cas de construction du tunnel routier .

2070 autos/h 1560 autos/h 510 autos/h

1664 Le tunnel routier combiné avec le service de transport par le moyen des installations existantes aurait donc une capacité supérieure d'un tiers à celle d'un nouveau tunnel ferroviaire construit pour le tapis roulant.

2. Augmentation de la capacité du tapis roulant par une modification du système a. Trafic en circuit fermé avec boucles terminus Le groupe d'étude a examiné, sommairement, par quel moyen on pourrait augmenter la capacité de la route du Saint-Gothard, une fois épuisée la capacité de l'installation proposée. En ce qui concerne le système du tapis roulant, il mentionne la possibilité d'un trafic en circuit fermé. Celui-ci permettrait d'augmenter la fréquence des trains, vu que les croisements, inévitables dans une gare de rebroussement, seraient supprimés entre les trains qui arrivent et ceux qui partent. Le trafic en circuit fermé exige cependant l'aménagement de boucles terminus qui, faute de place, devraient être construites en majeure partie dans la montagne. La condition fondamentale d'une utilisation maximum de la capacité serait un aménagement approprié des rampes de chargement et de déchargement des véhicules, mais celui-ci se heurterait à de très grosses difficultés, à cause du manque de place à Airolo et à Göschenen pour de telles installations. L'étude de cette variante n'a pas été poursuivie en considération des dépenses que comporterait l'établissement du projet.

b. Utilisation de trains avec wagons à deux étages pour le transport des automobiles Depuis que le rapport final du groupe d'étude a été rédigé, le service des routes et des digues a appris que le projet d'un tunnel ferroviaire sous la Manche prévoit des wagons à plate-forme à deux étages pour le transport des véhicules à moteur. Les chemins de fer de la République fédérale d'Allemagne ont également recours à ce système, depuis des années déjà, sur le parcours entre Niebüll et Westerland (Sylt) ; il s'agit toutefois d'un trafic dont l'intensité est moindre que celle à laquelle U faudra s'attendre au SaintGothard.

Cette solution n'a pas été étudiée de plus près par le service des routes et des digues, un examen sommaire ayant montré que la réalisation d'un tel projet se heurterait à des difficultés quasi insurmontables.

Pour ne pas perdre les avantages qu'offrirait l'exploitation combinée du tapis roulant et
du chemin de fer du Saint-Gothard, à savoir l'utilisation des automotrices usuelles des chemins de fer fédéraux, fabriquées en séries, des installations accessoires telles que les ateliers pour le service d'entretien, les voies de garage pour trains transporteurs non réquisitionnés, il faudrait que

1665

les wagons à deux étages trouvent la place nécessaire dans le gabarit d'espace libre normal des chemins de fer. Il ressort des expériences faites par les chemins de fer de la République fédérale d'Allemagne que les wagons à deux étages suffisent pour assurer le transport des voitures particulières ordinaires.

Pour le transport d'automobiles avec remorques (caravanes) ou avec portebagages sur le toit, ainsi que de minibus, chaque composition devrait comprendre un certain nombre de wagons à un étage. Mais alors la capacité ·de transport par rapport à celle du tapis roulant ne serait pas doublée; elle ne serait augmentée que de 50 à 60 pour cent suivant la longueur requise de la composition comprenant des wagons à un étage. L'augmentation notable ·de poids de ces trains transporteurs soulèverait des problèmes de traction qui ne peuvent être étudiés en détail dans ce message.

Les problèmes les plus difficiles, par suite des conditions topographiques à Gesehenen et à Airolo, sont ceux que pose la construction des rampes d'accès et de chargement et déchargement, qui devraient permettre le triage et le groupement des véhicules à moteur par catégories de poids lourds (cars, camions) et de voitures particulières à charger sur des wagons à un et à deux étages. Les voies de triage et les rampes d'accès exigent un déploiement de la longueur qu'on ne saurait trouver, du moins à Göschenen. La capacité réalisable, en pratique, d'un tapis roulant avec wagons à deux étages nécessiterait malgré tout un trafic en circuit fermé, en cas d'exploitation maximum d'une autoroute à quatre voies.

Les considérations qui précèdent, bien que sommaires, montrent que la réalisation du transbordement ferroviaire à deux étages serait très difficile, bien que ce système soit proposé pour le tunnel sous la Manche. Ce projet prévoit de vastes installations aux têtes du tunnel, pour lesquelles la place ferait défaut dans nos étroites vallées alpestres.

3. Conclusions II ressort de l'exposé qui précède que, parmi tous les systèmes de tunnels envisagés pour le Saint-Gothard, le tunnel routier avec ventilation est le plus favorable. S'il devait arriver, dans un avenir éloigné, que le premier tunnel soit trop fortement utilisé, il serait possible, en tirant parti des expériences faites dans l'intervalle, d'en construire un second. Ainsi
la capacité de la route du Saint-Gothard serait à peu près la même sur tout le parcours.

Comme nous l'avons mentionné plus haut, le tunnel par un tapis roulant coûterait 110 millions de francs, soit 30 pour cent, de moins que le tunnel routier. Cette solution serait donc la meilleure marché du point de vue purement économique. L'exploitation du tapis roulant serait pratiquement sans risques parce qu'elle ne dépend pas du comportement des conducteurs de voitures dans le tunnel. Si la préférence va malgré tout au tunnel routier, les raisons en sont les suivantes: Nous sommes ici devant une grande tâche

1666 à très longue échéance, qui consiste à créer pour la Suisse méridionale la meilleure communication routière possible avec les régions principales du pays, c'est-à-dire une liaison à basse altitude, directe et praticable toute l'année.

Mais le Saint-Gothard n'a pas seulement une importance nationale, il est encore une route transalpine européenne de premier ordre, une charnière reliant les réseaux d'autoroutes suisse et européen, au nord et au sud des Alpes. Cette liaison doit assurer un trafic fluide, sans restriction ni obstacle.

Si le trafic motorisé a connu un essor extraordinaire, il le doit en grande partie au fait qu'il ne dépend d'aucun appareil de transport. En revanche, le difficile problème que pose le tapis roulant est le suivant : comment charger sur le chemin de fer un volume de trafic égal à celui d'une autoroute pleinement utilisée, sans provoquer des délais d'attente? Comment adapter l'offre de transport aux fluctuations du trafic routier aussi bien en ce qui concerne son volume que sa part au trafic lourd ?

IV. Proposition du Conseil fédéral A. CRÉATION AU SAINT-GOTHARD D'UNE VOIE DE COMMUNICATION PRATICABLE EN HIVER. INCORPORATION DU TUNNEL DU SAINT-GOTHARD AU RÉSEAU DES ROUTES NATIONALES Ainsi que nous l'avons exposé au .début du présent message, les conseils législatifs ont reconnu déjà lors de la fixation du réseau des routes nationales que la création, au Saint-Gothard, d'une voie de communication praticable en hiver répond à une nécessité. Cela étant, ils nous ont donné le mandat impératif d'étudier la question de la création d'un tunnel et de leur présenter ensuite un rapport. Les recherches entreprises par le groupe d'étude ont démontré que la route nationale N2 doit être complétée par un autre ouvrage.

Cette nécessité résulte du fait -- qu'il importe de disposer d'une route qui soit utilisable durant toute l'année et puisse être parcourue avec facilité et sûreté ; -- que la capacité des installations de transport des automobiles par chemin de fer sera bientôt épuisée lors des pointes de trafic des six mois d'hiver, c'est-à-dire durant le temps où le col est fermé; -- que la capacité de la route franchissant le col sera bientôt épuisée lors des pointes de trafic des six mois d'été ; -- qu'il importe d'avoir ime route dont le point culminant soit moins élevé.
Le groupe d'étude est arrivé à la conclusion que la meilleure solution consiste à percer un tunnel routier entre Göschenen et Airolo pour relier de la façon la plus directe, à une altitude de quelque 1100 mètres, les voies

1667 d'accès par le sud et par le nord projetées sous la forme d'autoroutes à quatre pistes.

Nous ralliant à ces conclusions et propositions du groupe d'étude, nous vous recommandons de compléter le réseau des routes nationales fixé par l'arrêté fédéral du 21 juin 1960 par un tunnel routier entre Göschenen et Airolo.

Voici une brève description du projet de tunnel : Le tunnel routier aura une longueur de 16,36 kilomètres entre Göschenen et Airolo. Le point culminant sera situé à 1160,97 mètres. L'emplacement 'des portails de Göschenen et d'Airolo sera déterminé suivant les considérations qui ont guidé, autrefois, les constructeurs de la ligne du Saint-Gothard.

Comme on cherchera surtout à obtenir un tunnel, aussi court que posssible, avec rampes d'accès directes, les portails du nouveau tunnel seront à proximité des portails actuels.

Le tunnel routier ne pourra pas avoir le tracé rectiligne du tunnel ferroviaire. Etant donné qu'il devra être ventilé, il faudra aménager quatre puits d'aération. Ces puits déboucheront en bordure de la route du col, ce qui oblige à donner au tunnel un tracé qui suive la courbe de la route dans la dépression du col. Le tracé a été choisi à la lumière de recherches économiques poussées et compte tenu des conditions géologiques (fig. 6).

Le percement du tunnel ferroviaire du Saint-Gothard a largement contribué à faire connaître la structure géologique du massif rocheux. Les observations et expériences faites à l'époque pourront être utilisées dans une large mesure lors de l'établissement du nouveau projet. Depuis le percement du tunnel, on a fait en outre de nombreux travaux dans le rocher qui ont fourni des résultats intéressants sur les conditions géologiques et les exigences à remplir en matière de construction. Les recherches scientifiques sur la géologie et la pétrographie des Alpes entre Göschenen et Airolo ont été fortement développées' ces dernières années, si bien qu'on peut faire des prévisions sûres concernant le tunnel routier et ne pas craindre de grandes surprises.

Le système de ventilation qui a été choisi obligera d'installer dans le tunnel des canaux d'aération (sortie et amenée). Le profil normal ne pourra cependant être établi définitivement que lors de l'établissement du projet de construction.

Les puits d'aération seront circulaires. Une paroi
séparera les conduites destinées à l'air frais et à l'air vicié. Les dimensions ont été calculées de façon à assurer les meilleures vitesses de circulation de l'air. L'air frais sera aspiré par un ouvrage en forme d'entonnoir, tandis que l'air vicié sera expulsé par une sorte de cheminée.

Au fond des puits d'aération et aux deux portails, il y aura des centrales de ventilation. Elles seront au nombre de six. Elles seront munies de ventilateurs et abriteront les moteurs et les appareils de commande

1668 nécessaires. Cet équipement pourra trouver place dans un espace restreint.

Aussi les dimensions des ouvrages près des portails et les cavernes seront-elles réduites au minimum.

L'utilisation du puits de ventilation à Gamssteg pour l'extraction des matériaux permettra de réduire d'une année et demie le temps nécessaire pour percer le tunnel. Le rapport du groupe d'étude indique que les travaux pourront être menés à chef en cinq ans, y compris les derniers travaux d'achèvement.

Les expériences faites avec la construction du tunnel du Bernardin incitent à penser que la durée de construction sera plus longue si de nouvelles techniques ne permettent pas un avancement beaucoup plus rapide. Pour le moment, il est sage de prévoir une durée de huit ans.

La ventilation jouera un rôle déterminant dans l'exploitation du tunnel.

Les calculs ont montré que les ventilateurs axiaux doivent débiter 4100 m3/s d'air lors des pointes de trafic, ce qui exige une puissance électrique de 10 000 kW. Le programme d'exploitation, établi d'après la courbe des durées du trafic, entraîne la consommation de 8 millions de kW/h par an.

Les frais de construction et d'entretien du tunnel routier sont estimés comme suit, en nombre rond (sur la base des prix en avril 1961) : -rn_

n

,



-- Frais de construction Constructions Installations électro-mécaniques Frais généraux Imprévus

'

-

En millions

de francs 240 20 17 28 Total 305

-- Frais d'exploitation Surveillance et administration Entretien des ouvrages et nettoyage du tunnel ; entretien des bâtiments d'exploitation Fonctionnement et entretien des installations de ventilation .

Fonctionnement de l'éclairage et remplacement des lampes. .

Fonctionnement et remplacement. des véhicules de service ; fonctionnement des installations de téléphone et de contrôle Imprévus .

Total

0,2 0,2 2

-- Total des frais annuels résultant de la construction et de l'exploitation Frais de capital (intérêts et amortissement) Exploitation et entretien Total

16,5 2 18,5

0,6 0,2 0,5 0,3

1669 Des estimations exactes des frais ne seront possibles qu'une fois les projets de construction établis.

Si des difficultés inattendues dans l'exploitation des tunnels routiers du Grand-Saint-Bernard et du Mont-Blanc devaient révéler qu'un tunnel routier de 16 km de longueur serait à déconseiller, le Conseil fédéral reviendrait sur la question de principe du tunnel routier avant d'approuver le projet général du tunnel du Saint-Gothard. Il soumettrait alors aux conseils législatifs, en vue d'un nouvel examen, le choix d'un système de transport à la manière du tapis roulant, avec traction électrique.

B. FINANCEMENT DE L'OUVRAGE Si le tunnel routier Göschenen-Airolo est, conformément à notre proposition, incorporé au réseau des routes nationales, il sera indiqué que la contribution de la Confédération aux frais de construction et ses contributions éventuelles aux frais d'exploitation soient prélevées sur les ressources mises à disposition pour le financement ordinaire de la construction des routes nationales. Les dispositions constitutionnelles et légales concernant la construction et le financement de ces routes commandent qu'il en soit ainsi.

Lors de l'approbation du projet général du tunnel routier du Bernardin (N 13), dans notre message du 5 juin 1961 concernant la perception d'une taxe supplémentaire sur les carburants destinée à financer la construction des routes nationales, puis récemment encore dans notre message du 3 novembre 1964 concernant le financement des routes nationales, nous avons déjà déclaré qu'il y aurait lieu d'examiner si l'on ne devrait pas percevoir des taxes pour l'usage des tunnels alpestres compris dans le réseau des routes nationales. Il faudra alors établir si l'on pourrait tenir compte des besoins du trafic indigène en réduisant les taxes de passage. En cas de couverture des frais globaux par la perception de taxes, il serait possible de distraire les tunnels du Bernardin, du Rawil et un futur tunnel par le Saint-Gothard du compte des routes nationales et de les financer séparément. Vu les grandes difficultés que rencontre le financement de la construction des routes nationales, ce serait là un avantage considérable.

L'article 37, 2e alinéa, de la constitution fédérale, dont la teneur a été modifiée lors de l'adoption des articles relatifs à la construction
routière, dispose ce qui suit au sujet des taxes de passage: «Des taxes ne peuvent pas être perçues pour l'usage des routes ouvertes au .trafic public dans les limites de leur destination. L'Assemblée fédérale peut autoriser des exceptions dans des cas spéciaux. » Lors des délibérations du Conseil national, la clause d'exception de cet . article a donné lieu au commentaire suivant du rapporteur de langue allemande (traduction) : Feuille fédérale. 116>= année. Vol. II.

108

1670

«Le droit accordé à l'Assemblée fédérale d'autoriser des exceptions au principe de l'usage gratuit des routes n'est prévu qu'en vue de cas spéciaux.

On vise ici en premier lieu les tunnels assurant le trafic en hiver, qui nécessitent des installations adéquates et dont l'exploitation entraîne aussi des frais extraordinaires. Il peut s'agir aussi de ponts ou de galeries dont l'entretien exige des frais spéciaux. Il appartient à l'Assemblée fédérale de faire les distinctions nécessaires et de prendre une décision dans chaque cas particulier . . . » (Bui. sten. 1958, CN, 249).

Etant donnée la façon dont la nouvelle disposition constitutionnelle règle la question des péages, l'Assemblée fédérale peut autoriser les cantons à percevoir des taxes pour couvrir leur part des frais de construction de tunnels appartenant au réseau des routes nationales, de même que les frais d'exploitation et d'entretien, qui doivent être supportés en premier lieu par les cantons, conformément à la législation sur les routes nationales. La Confédération serait-elle également en droit de couvrir sa part des frais de construction de ces tunnels par le moyen de péages ? Leur perception devrait-elle être autorisée expressément par la constitution ? Ce sont des questions controversées. Elles sont actuellement à l'étude.

On peut invoquer de sérieuses raisons en faveur de la perception de péages. Il est en effet établi que la construction d'un tunnel routier à travers les Alpes, son exploitation et son entretien exigent des sommes très importantes. Ces nouvelles voies de communication apportent d'ailleurs sans contredit de grands avantages à leurs usagers, qui peuvent épargner du temps et de l'argent s'ils ne sont pas obligés .d'emprunter le passage par le col. Il y a aussi des cas où le percement d'un tunnel, tel celui du Rawil, par exemple, modifiera fondamentalement et améliorera les communications. En considérant le problème sous cet angle, on peut certainement soutenir que les frais ne doivent être supportés non par le trafic motorisé dans son ensemble, mais par celui qui utilise ces tunnels. Cette raison est d'autant plus péremptoire que les tunnels alpestres du réseau des routes nationales sont utilisés en très grande partie par des étrangers qui ne contribuent à la couverture des frais de nos routes que par les carburants
qu'ils emploient.

Si des taxes étaient perçues, ce trafic motorisé, en particulier le trafic lourd, pourrait être mis à contribution dans une plus large mesure pour le financement de nos routes. Enfin, on constate qu'en général le public ne compte même pas que le passage de tunnels alpestres sera franc de taxes. Le tiinnel dii Grand-Saint-Bernard ainsi que certaines voies de communication dans trois de nos pays voisins et en Amérique, présentant un standard d'aménagement très élevé, ne sont-ils pas déjà soumis au système des droits de passage ?

Ces considérations qui militent en faveur de la perception de taxes pour l'usage des tunnels alpestres revêtent une grande importance. Des arguments opposés n'ont toutefois pas manqué d'être avancés lors de la

1671 discussion publique. Nous avons donc jugé nécessaire, avant de trancher la question, de demander l'avis des cantons et des associations économiques intéressées. La procédure de consultation est en cours. Contrairement à l'avis que nous avons exprimé dans notre message du 3 novembre 1964 concernant le financement des routes nationales, la question des taxes ne peut pas encore faire l'objet d'une proposition dans ce message et le projet d'arrêté qui y est joint. Suivant le résultat de la consultation et la solution donnée à la question de droit, ce point donnera prochainement lieu à un rapport spécial. Cette procédure s'impose aussi pour des raisons de forme.

Si l'on décide de couvrir les frais de construction des tunnels alpestres appartenant au réseau des routes nationales par la perception de péages, la décision doit valoir -- comme nous l'avons déjà dit -- non seulement pour le tunnel du Saint-Gothard, mais aussi pour ceux du Bernardin et du Rawil. Le présent projet d'arrêté tend uniquement à compléter le réseau des routes nationales par un tunnel routier sous le Saint-Gothard.

Y. Considérations finales La décision que les conseils législatifs prendront au vu de notre proposition concernant la construction au Saint-Gothard d'une voie praticable en hiver aura, sur l'ensemble du territoire européen, des effets qui dureront bien au-delà de la fin du siècle. Aussi était-il indiqué d'étendre largement le champ des recherches. Si nous vous proposons, pour assurer en hiver le trafic à travers le Saint-Gothard, de vous prononcer en faveur de l'aménagement d'un tunnel routier entre Gesehenen et Airolo, c'est parce que nous sommes convaincus de vous proposer la solution qui sera encore la bonne dans un avenir lointain.

On peut, il est vrai, se demander si, en ces temps de grande activité économique, où les autorités fédérale et cantonales et de larges milieux économiques font des efforts pour conserver une monnaie saine, il est raisonnable de soumettre à l'Assemblée fédérale un projet dont l'exécution coûterait plus de 300 millions de francs et augmenterait la tension sur le marché de la construction. On pourrait aussi objecter que le financement de la construction des routes nationales faisant partie du réseau fixé par l'Assemblée fédérale ne paraît pas encore assuré et qu'il serait par conséquent
téméraire d'y ajouter des ouvrages coûteux dont l'exécution rendrait encore plus difficile le financement de l'ensemble. Il faut reconnaître qu'il y aurait quelque chose de juste dans ces objections. Cependant, nous ne vous proposons pas encore de décréter la construction immédiate de cette nouvelle voie de communication. Nous vous demandons seulement de décider, en principe, s'il faudra créer au Saint-Gothard une route praticable en hiver et si cette route devra être aménagée entre Gesehenen et Airolo dans un tunnel ouvert à la circulation des automobiles roulant par leurs propres

1672 moyens. Cette décision préalable est urgente non seulement parce que les travaux d'établissement du projet devraient pouvoir commencer sans délai mais aussi parce que le canton d'Uri aurait besoin de savoir à quelle variante il doit adapter les travaux depuis longtemps nécessaires pour améliorer la route du Saint-Gothard entre Göschenen et Hospental.

Selon les dispositions de la loi sur les routes nationales, il appartiendra au Conseil fédéral de décider, dans les limites des programmes de construction, quand les travaux pourront commencer. Il devra, bien entendu, tenir compte de la situation économique du moment et des possibilités réelles de financement.

Les articles premier et 11 de la loi sur les routes nationales, qui se fonde particulièrement sur les articles 366is et 36 ter de la constitution, autorisent l'Assemblée fédérale à fixer, compléter ou modifier le réseau des routes nationales. Ces décisions de l'Assemblée fédérale sont définitives. C'est pourquoi elles doivent, selon les dispositions de la loi du 23 mars 1962 sur la procédure de l'Assemblée fédérale, ainsi que la forme, la publication et l'entrée en vigueur des actes législatifs (loi sur les rapports entre les conseils), revêtir la forme d'un arrêté fédéral de portée générale, non soumis au referendum. La constitutionnalité du projet d'arrêté est ainsi certaine.

Le présent message et le projet d'arrêté donnent suite à la motion ad n° 7951, des 23 mars/8 juin 1960. Nous proposons de la classer.

Nous fondant sur les considérations qui précèdent, nous vous proposons d'adopter le projet d'arrêté ci-annexé.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 22 décembre 1964.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, L. von Moos 16808

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

1673

(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL complétant

le réseau des routes nationales par un tunnel routier sous le Saint-Gothard

L'Assemblée fédérale de, IM Confédération suisse,

vu les articles premier et 11 de la loi fédérale du 8 mars 1960 (1) sur les routes nationales; vu le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1964, arrête:

I

La liste des routes nationales suisses annexée à l'arrêté de l'Assemblée fédérale du 21 juin 1960 fixant le réseau des routes nationales est complétée et modifiée comme suit: Boute et section

Classe

N 2 - Tunnel routier Göschenen-Airolo 2 Göschenen-col du Saint-Gothard-Airolo . . 3 II Conformément aux articles premier et 11 de la loi du 8 mars 1960 sur les routes nationales, le présent arrêté n'est pas soumis au referendum. Il entre immédiatement en vigueur.

(!) RO I960, 569, 632.

15508

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le complètement du réseau des routes nationales par un tunnel routier sous le Saint-Gothard (Du 22 décembre 1964)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1964

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

52

Cahier Numero Geschäftsnummer

9128

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

31.12.1964

Date Data Seite

1622-1673

Page Pagina Ref. No

10 097 584

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