Détention administrative de requérants d'asile: Rapport succinct du 2 juillet 2019 de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) Avis du Conseil fédéral du 30 octobre 2019

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 158 de la loi sur le Parlement, nous nous prononçons comme suit sur le rapport succinct du 2 juillet 20191 de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) relatif à la détention administrative de requérants d'asile.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

30 octobre 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Avis 1

Contexte

Les commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont chargé le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA), le 28 janvier 2016, de conduire une évaluation sur la détention administrative de requérants d'asile. Le CPA a présenté ses résultats dans son rapport du 1er novembre 2017. Se fondant sur cette évaluation, la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) a adopté, le 26 juin 2018, un rapport comprenant sept recommandations à l'intention du Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral s'est prononcé sur les recommandations de la commission le 28 septembre 20182. Réunie le 2 juillet 2019, la CdG-N a examiné l'avis du Conseil fédéral et relevé avec satisfaction que ses recommandations avaient été favorablement accueillies, voire en partie déjà mises en oeuvre. Dans son rapport succinct du 2 juillet 2019, elle a pris position sur différents aspects, attirant une nouvelle fois l'attention du Conseil fédéral sur les mesures qu'elle juge nécessaire de mettre en oeuvre. Par lettre du 2 juillet 2019, elle l'a invité à se prononcer à nouveau.

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Avis du Conseil fédéral sur les recommandations de la CdG-N Recommandation 1:

Saisir les personnes passées dans la clandestinité

La commission invite le Conseil fédéral à lui communiquer les résultats de ces réflexions dès qu'ils seront disponibles.

La CdG-N demande une nouvelle fois au Conseil fédéral de revoir la notion de «départ non contrôlé» et de corriger les données enregistrées dans le SYMIC concernant les 9 % de cas qui réapparaissent dans les statistiques de l'aide d'urgence, après avoir comparé ces données à celles de l'aide d'urgence.

Avec l'entrée en vigueur, le 1er mars 2019, de la nouvelle loi sur l'asile visant à accélérer la procédure d'asile (restructuration du domaine de l'asile), les processus de saisie des départs non contrôlés dans le système d'information central sur la migration (SYMIC) ont été en partie adaptés. Dans son avis du 28 septembre 2018, le Conseil fédéral explique que, dans la procédure accélérée au sens de l'art. 26c de la loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi)3, le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) peut commencer les démarches en vue d'obtenir des documents de voyage ­ et donc commencer à assister le canton dans l'exécution du renvoi ­ sans que l'autorité cantonale compétente en matière d'exécution du renvoi en fasse la demande et ce, conformément à la version modifiée de l'art. 2, al. 2, de l'ordonnance du 11 août 2 3

Détention administrative de requérants d'asile. Rapport du 26 juin 2018 de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N). Avis du Conseil fédéral (FF 2018 7583) RS 142.31

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1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers (OERE)4. Ainsi, dans la procédure accélérée, les départs non contrôlés sont systématiquement saisis dans le SYMIC après la communication de l'entrée en force.

Pour les cas relevant de la procédure Dublin au sens de l'art. 26b LAsi, le SEM a depuis procédé à un examen des processus en partenariat avec les cantons, dans le cadre du comité paritaire Retour et exécution des renvois. Les experts de ce comité ont estimé qu'aucune adaptation n'était nécessaire pour les cas relevant de la procédure Dublin depuis la mise en oeuvre de la nouvelle loi sur l'asile. En vertu de l'art. 24, al. 3, let. b, LAsi, les requérants d'asile relevant de la procédure Dublin sont hébergés dans un centre de la Confédération jusqu'à leur sortie du territoire suisse. Se fondant sur l'art. 5, al. 4 de l'ordonnance du DFJP du 4 décembre 2018 relative à l'exploitation des centres de la Confédération et des logements dans les aéroports5, le SEM peut par ailleurs prévoir un contrôle renforcé des présences pour les personnes qui séjournent dans un centre de la Confédération après avoir reçu une décision de renvoi entrée en force assortie d'un délai de départ. Grâce à ces contrôles et compte tenu du fait que les personnes concernées ne sont pas transférées dans le canton, les départs non contrôlés devraient être immédiatement détectés pour les cas relevant de la procédure Dublin et saisis dans le SYMIC. Le comité Retour et exécution des renvois a par ailleurs fait observer que la qualité des données s'était nettement améliorée pour les saisies des départs non contrôlés dans le domaine Dublin depuis l'entrée en vigueur, le 1er octobre 2016, de l'art. 89b LAsi, et que la situation n'était donc plus comparable à celle évaluée par le CPA pour la période 2011 à 2014. En vertu de cette disposition, la Confédération peut réclamer le remboursement d'indemnités forfaitaires déjà versées ou renoncer à verser ces indemnités si le canton ne remplit pas ses obligations en matière d'exécution ou ne les remplit que partiellement et que rien ne justifie de tels manquements. Pour ne pas avoir à assumer les conséquences financières résultant d'une expiration du délai de transfert dans le cadre de la procédure Dublin qui attribuerait la responsabilité de l'examen de la demande d'asile à la
Suisse, les cantons devraient être davantage incités à communiquer au SEM les départs non contrôlés.

Concernant les cas relevant de la procédure Dublin étendue au sens de l'art. 26d LAsi, le comité Retour et exécution des renvois propose de modifier les processus afin que le SEM saisisse automatiquement le processus de soutien à l'exécution dans le SYMIC dès la communication de l'entrée en force de la décision. Le canton compétent serait informé par lettre standard et tenu d'indiquer en retour s'il renonce au soutien à l'exécution. Une telle situation pourrait se présenter si le départ non contrôlé de la personne considérée a dans l'intervalle été constaté. À réception de cette information, le SEM saisirait le départ non contrôlé dans le SYMIC et clôturerait le processus de soutien à l'exécution. Le SEM examine actuellement si une adaptation des bases juridiques s'impose ou si des ajustements par voie de directive et des descriptifs des processus suffisent.

Concernant la comparaison des données de l'aide d'urgence issues du suivi sur la suppression de l'aide sociale avec les données du SYMIC sur les départs non contrô4 5

RS 142.281 RS 142.311.23

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lés, le SEM envisage de transmettre les listes de noms correspondantes aux autorités cantonales de la migration. Celles-ci seraient tenues de reprendre les mesures d'exécution et d'adresser au SEM le formulaire de reprise en charge, à réception duquel le SEM saisirait le code correspondant dans le SYMIC.

Le Conseil fédéral s'est à nouveau penché sur la formulation unkontrollierte Abreise / départ non contrôlé. Bien que rien n'indique que les personnes considérées demeurent en Suisse, le SEM a délibérément opté pour le terme départ ­ et non sortie (du territoire suisse) ­ afin d'éviter toute allégation erronée ou trompeuse. Les autorités ne disposent bien évidemment pas d'informations précises sur l'endroit où se trouvent les requérants d'asile pour lesquels il a été fait état d'un départ non contrôlé. Si la CdG-N reste d'avis que la formulation allemande unkontrollierte Abreise n'est pas satisfaisante, le Conseil fédéral propose de la remplacer par unkontrollierter Weggang et invite la commission à lui communiquer sa préférence. La formulation demeure inchangée en français (départ non contrôlé).

Recommandation 2:

Harmonisation des pratiques en matière de recours à la détention administrative et d'exécution

La CdG-N invite le Conseil fédéral à examiner si, dans ce domaine, une modification de la répartition des compétences en faveur de la Confédération pourrait contribuer à l'harmonisation des pratiques, et à indiquer si une telle mesure serait, pour lui, opportune et d'en faire rapport à la CdG-N.

En outre, la commission invite le Conseil fédéral à établir à l'avenir régulièrement une statistique publique sur les différences de pratique entre les cantons en matière de recours à la détention administrative.

Le Conseil fédéral rappelle que le SEM a examiné en détail la question des compétences et des processus relatifs à l'exécution des renvois dans le cadre de la restructuration du domaine de l'asile, en partenariat avec les cantons, les villes et les communes. Les participants étaient unanimement parvenus à la conclusion que la mise en détention en vue de l'exécution du renvoi à partir d'un centre de la Confédération devait ­ comme plus généralement la détention administrative en vertu du droit des étrangers ­ être ordonnée par les cantons6. Le principal argument avancé était que la Confédération ne dispose pas des compétences policières dans ce domaine ni des moyens adéquats. Lors des conférences nationales sur l'asile du 21 janvier 2013 et du 28 mars 2014, les cantons se sont par ailleurs engagés à créer le nombre de places de détention administrative nécessaires à la mise en oeuvre de la restructuration du domaine de l'asile, dans des établissements de détention implantés dans les régions d'asile définies, la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) se chargeant des tâches de planification et de coordination. Le Conseil fédéral estime qu'il est prématuré ­ à peine six mois après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'asile ­ de procéder à de nouvelles adaptations législatives.

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Message du 3 septembre 2014 concernant la modification de la loi sur l'asile (restructuration du domaine de l'asile) (FF 2014 7771 7821)

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Le Conseil fédéral ne voit pas non plus, pour des raisons systémiques, l'intérêt de modifier la répartition des compétences en faveur de la Confédération pour ce qui concerne la décision et l'exécution des mesures de contrainte prévues par le droit d'asile. L'exécution (policière) des renvois continuerait d'incomber aux cantons, la Confédération ne disposant pas de forces de police pouvant être affectées dans ce domaine. La modification demandée de la répartition des compétences ne ferait ainsi que contribuer au morcellement des compétences entre la Confédération et les cantons en matière d'exécution, ce qui compliquerait l'exécution des renvois et entamerait son efficacité. En vertu de l'art. 2a OERE7, la réalisation des entretiens de départ relève de la compétence cantonale. Ces entretiens visent entre autres à clarifier et à documenter la disposition à quitter le territoire suisse des personnes sous le coup d'une décision de renvoi, d'attirer l'attention sur l'obligation de collaborer en vue de l'obtention de documents de voyage valables et, si nécessaire, d'agiter la menace de mesures de contrainte au sens des art. 73 à 78 de la loi du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) 8. Dans la mesure où elles ont une meilleure connaissance du cas que le SEM, les autorités cantonales sont mieux à même d'évaluer si une mise en détention est nécessaire, raisonnablement exigible et proportionnée.

Selon la CdG-N, la décision de détention administrative et la mise en détention relèveraient également de la compétence cantonale pour les personnes relevant du droit des étrangers. Les compétences et les processus ­ mais aussi les infrastructures (places de détention) ­ seraient ainsi différents selon que le cas relève du droit d'asile ou du droit des étrangers. Le Conseil fédéral ne voit pas en quoi cela présente un avantage. Qui plus est, l'examen de la détention induirait également deux voies de droits distinctes, l'une auprès du Tribunal administratif fédéral pour les cas de détention ordonnée par la Confédération (domaine de l'asile) et l'autre auprès des tribunaux cantonaux (tribunaux des mesures de contrainte) et en dernière instance du Tribunal fédéral pour les cas de détention ordonnée par les cantons (droit des étrangers). Le Conseil fédéral craint donc que l'on ne voie se développer
des pratiques différentes en matière de détention administrative pour les personnes relevant du droit d'asile et celles relevant du droit des étrangers, ce qui va à l'encontre de l'objectif d'harmonisation dans le domaine des mesures de contrainte. Il est d'avis que les tribunaux des mesures de contrainte sont plus compétents que le Tribunal administratif fédéral pour examiner la légalité et l'adéquation de la détention. En effet, ces instances judiciaires sont spécialisées dans les questions liées à la proportionnalité des mesures de contrainte.

Outre les mesures contribuant à l'harmonisation des pratiques évoquées dans son avis du 28 septembre 2018, le Conseil fédéral renvoie notamment à la possibilité d'un recours. Conformément à l'art. 14, al. 2, de l'ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police (Org DFJP)9, le SEM a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral, dans les domaines du droit des 7

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La procédure accélérée au sens de l'art. 26c LAsi dans le cadre de laquelle le SEM mène un entretien de départ avec la personne concernée après notification de la décision de renvoi constitue une exception. En accord avec le SEM, cet entretien peut être mené par l'autorité cantonale compétente (cf. art. 2a, al. 2, OERE).

RS 142.20 RS 172.213.1

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étrangers et de la nationalité, contre des décisions cantonales de dernière instance.

Le droit de recours des autorités vise à garantir l'application appropriée et uniforme du droit fédéral. Le SEM peut ainsi faire examiner par le Tribunal fédéral des décisions cantonales prises dans le domaine des mesures de contrainte relevant du droit des étrangers. Pour les cas qui requièrent des clarifications juridiques de nature à éclairer des cas similaires à l'avenir, le SEM forme recours devant le Tribunal fédéral contre les décisions cantonales de dernière instance.

En conséquence, le Conseil fédéral estime qu'il n'y a pas lieu de modifier la répartition des compétences en matière de recours à la détention administrative et d'exécution de celle-ci dans le domaine de l'asile. À des fins de transparence, il convient en revanche de mettre en place une statistique publique sur les pratiques cantonales de détention administrative des requérants d'asile. À l'avenir, le SEM devra intégrer cette statistique dans le suivi de l'exécution des renvois instauré en vertu de l'art. 46, al. 3, LAsi.

Recommandation 3:

Question de l'examen de la détention administrative prévu par la loi

La CdG-N invite le Conseil fédéral à réévaluer l'utilité de l'introduction d'un examen automatique des détentions.

Le Conseil fédéral fait observer que les différences de pratiques entre les cantons en matière de détention administrative étaient connues avant l'adoption et la mise en oeuvre du règlement Dublin III10. Dans son rapport du 24 août 2005 sur l'application et l'effet des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers 11, la CdG-N avait déjà relevé des disparités cantonales dans l'application des mesures de contrainte. Le Conseil fédéral a lui aussi admis à maintes reprises que des différences de pratique n'étaient pas à exclure, les mesures de contrainte relevant du droit des étrangers étant des décisions discrétionnaires dont l'adéquation est évaluée au cas par cas par le canton dans le cadre de son mandat d'exécution12.

Pour ce qui concerne la question de l'examen de la détention dans le cadre de la procédure Dublin soulevée par la CdG-N (art. 80a, al. 3, LEI), le Conseil fédéral renvoie ­ en complément de son avis du 28 septembre 2018 ­ à l'ATF 142 I 135 , dans lequel le Tribunal fédéral fixe certains principes pour ce type de détention. Il précise notamment que la motivation d'un premier recours contre une décision de détention dans le cadre de la procédure Dublin n'a pas besoin de respecter un grand 10

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Règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, JO L 180, 29.6.2013, p. 31 Application et effet des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers. Rapport du 24 août 2005 de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) (FF 2006 2607) Cf. notamment l'avis du Conseil fédéral du 30 novembre 2012 concernant l'IP 12.3830; cf. également: Protection de l'enfance et mesures de contrainte en matière de droits des étrangers. Rapport du 7 novembre 2006 de la Commission de gestion du Conseil national CdG-N). Avis du conseil fédéral du 16 mars 2007 (FF 2007 2391).

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formalisme (art. 76a LEI). En effet, contrairement à d'autres types de détention administrative en matière de droit des étrangers, telle que la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion visée à l'art. 76 LEI, la décision de détention dans le cadre de la procédure Dublin ne fait pas d'office l'objet d'un examen judiciaire, mais sur demande de la personne concernée.

Par ailleurs, la mise en oeuvre de la procédure accélérée au 1 er mars 2019 et le droit à un conseil et à une représentation juridique gratuits qui en découle (art. 102f ss LAsi) font que les requérants d'asile sont mieux informés que par le passé, notamment sur leurs possibilités de recours. Du point de vue du Conseil fédéral, la législation actuelle ne pénalise pas les personnes détenues dans le cadre de la procédure Dublin, d'autant que l'art. 80a, al. 3, LEI prévoit expressément qu'un examen de la légalité et de l'adéquation de la détention peut être demandé à tout moment. Après un nouvel examen des bases juridiques, le Conseil fédéral est d'avis que celles-ci sont opportunes et qu'elles garantissent une protection suffisante des droits fondamentaux.

Contrairement à ce que suggère la CdG-N, l'introduction de l'art. 89b LAsi (voir la prise de position sur la recommandation 1) n'a pas induit de hausse des décisions de détention dans le cadre des procédures Dublin. La détention administrative reste envisagée en dernier ressort et n'est appliquée que si des mesures moins coercitives (ou des restrictions de déplacement au sens de l'art. 74 LEI) ne sont pas efficaces.

Le nouvel art. 89b LAsi devrait plutôt inciter les cantons à initier en temps utile certaines mesures d'exécution (réservation d'un vol ou demande d'examens médicaux, par exemple). À noter par ailleurs qu'avant sa mise en oeuvre, les cantons étaient déjà tenus d'exécuter les décisions de renvoi entrées en force (art. 46, al. 1, LAsi).

Recommandation 5:

Places de détention pour mineurs

Compte tenu de ces éléments, la CdG-N demande au Conseil fédéral de lui faire part de son avis sur la question et de montrer les mesures qu'il adoptera dans le cadre de ses compétences et en collaboration avec les cantons concernés.

Le Conseil fédéral renvoie à la possibilité de financement de places de détention par la Confédération (art. 82, al. 1, LEI), qui permet la création de places de détention adaptées aux mineurs et à leurs accompagnants. En vertu de l'art. 15j, let. d, OERE, la Confédération subventionne la construction et l'aménagement d'établissements de détention cantonaux lorsque les personnes particulièrement vulnérables, notamment les mineurs non accompagnés et les familles avec enfants, sont hébergées dans des locaux séparés de ceux des autres détenus. Le groupe technique Surveillance des capacités institué par la CCDJP examine lui aussi si les places de détention administrative prévues pour les personnes étrangères dans les cantons satisfont aux dispositions et si des mesures s'imposent.

Le Conseil fédéral est d'avis qu'aucune mesure supplémentaire n'est actuellement nécessaire. La Suisse dispose en principe d'un nombre suffisant de places de détention adaptées aux mineurs, d'autant que le nombre de décisions de détention prononcées à l'encontre de mineurs est en baisse. En 2018, une détention administrative a 6927

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été ordonnée au total pour huit mineurs de plus de 15 ans (hors détention de personnes dépourvues d'autorisation de courte durée au sens de l'art. 73 LEI)13. Il n'est donc pas nécessaire de prévoir des places de détention pour les mineurs dans chaque canton. Les cantons qui ne disposent pas de structures spécifiques peuvent s'adresser aux autres cantons lorsqu'ils envisagent d'ordonner la détention d'un mineur. À noter que certains cantons se refusent à placer les mineurs en détention administrative.

L'exploitation suprarégionale des capacités de détention administrative des étrangers est l'un des principaux objectifs du financement des places de détention. L'une des conditions de la participation financière de la Confédération est que l'établissement soit mis à la disposition de plusieurs cantons et de la Confédération en vue de garantir l'exécution du renvoi, de l'expulsion ou de l'expulsion pénale (art. 15j, let. b, OERE)14. Cette disposition vise à favoriser la collaboration intercantonale dans le domaine de l'exécution de la détention administrative. Le but est notamment que les cantons se mettent mutuellement à disposition des places de détention et, idéalement, créent des centres de détention communs, par exemple dans le cadre de concordats cantonaux. L'idée est aussi que les établissements de détention atteignent une certaine capacité (cf. art. 15k OERE selon lequel la contribution fédérale est plus élevée pour les centres de détention de plus grande taille). Le Conseil fédéral ne juge pas judicieux d'exploiter dans chaque canton des petites unités pour l'exécution de la détention administrative. Il convient plutôt de construire des établissements de détention spécialisés exclusivement réservés à l'exécution de la détention administrative relevant du droit des étrangers. Cela permet d'une part de respecter la stricte séparation entre les étrangers et les personnes en détention préventive ou purgeant une peine (art. 81, al. 2, LEI), d'autre part d'améliorer la qualité des places de détention administrative. Cette régionalisation renforcée dans le domaine de l'exécution des renvois correspond par ailleurs à l'esprit de la révision de la loi sur l'asile visant à accélérer la procédure d'asile, entrée en vigueur le 1 er mars 2019, qui a conduit à la création des six régions d'asile pour l'exécution des procédures d'asile ­ et par là même des décisions de renvoi.

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Sont comptabilisés ici non pas uniquement des personnes relevant du domaine de l'asile, mais aussi des cas LEI.

Des exceptions sont possibles compte tenu de la situation géographique du canton.

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