Rapport sur la violence dans les relations de couple. Ses causes et les mesures prises en Suisse (en réponse au postulat Stump 05.3694 du 7 octobre 2005) du 13 mai 2009

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Le 7 octobre 2005, la conseillère nationale Doris Stump a déposé un postulat qui chargeait le Conseil fédéral de présenter un rapport sur les causes de la violence dans l'environnement social proche et un plan d'action visant à prévenir cette forme de violence. Le 16 décembre 2005, le Conseil national a transmis la première partie du postulat (rapport).

Nous vous soumettons le rapport ci-après. Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

13 mai 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2008-2884

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Condensé Le présent rapport a pour origine le postulat de la conseillère nationale Doris Stump 05.3694 du 7 octobre 2005, qui charge le Conseil fédéral de présenter un rapport sur les causes de la violence dans l'environnement social proche et un plan d'action visant à prévenir cette forme de violence. Dans sa prise de position du 23 novembre 2005, le Conseil fédéral a proposé d'accepter la première partie du postulat (rapport) et de rejeter la deuxième (plan d'action). Le Conseil national a suivi le Conseil fédéral.

Début 2008, le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG) a mandaté deux chercheuses pour réaliser une étude en deux volets. Le premier consistait à donner un aperçu de l'état de la recherche sur les causes de la violence dans les relations de couple, le second à recenser les mesures de prévention mises en place en Suisse au cours de ces dernières années. Le mandat se limitait par conséquent à la forme la plus répandue de violence dans l'environnement social proche, notamment pour des questions d'ordre pratique.

Dans la première partie de l'étude, les chercheuses ont réalisé une analyse bibliographique de grande envergure, donnant une vue d'ensemble de l'état de la recherche sur les causes de la violence dans les relations de couple. Dans la seconde partie de l'étude, qui recense et évalue les mesures préventives mises en place en Suisse, les chercheuses ont dépouillé les données résultant d'une enquête menée dans tous les cantons, ont mené des entretiens avec des expertes et experts et ont analysé de nombreux documents. Elles ont finalement examiné en détail la situation dans six cantons choisis, de toutes les régions linguistiques. Les chercheuses ont rendu leur rapport final en automne 2008. Le chapitre de synthèse sur lequel se fonde le présent rapport contient des recommandations pour la recherche, la pratique et la politique.

L'étude est publiée par le BFEG en même temps que le présent rapport. Les autorités, les spécialistes et autres milieux intéressés trouvent dans cette étude une synthèse des causes possibles de la violence dans les relations de couple, une vue d'ensemble de l'état actuel de la recherche ainsi qu'un tour d'horizon et une appréciation des mesures législatives et institutionnelles prises en Suisse au cours de ces dernières années. Elle permet
un débat approfondi sur la prévention de la violence domestique et soutient efficacement les différentes actrices et les différents acteurs dans le cadre de la planification et de la mise en oeuvre de nouvelles mesures de prévention comme dans celui de modifications législatives.

En se basant sur l'étude, le Conseil fédéral constate qu'un grand nombre de mesures importantes ont été prises au cours de ces dernières années à tous les niveaux pour prévenir et lutter contre la violence dans les relations de couple. Il veille à ce que le travail de coordination et de soutien fourni par divers offices fédéraux en matière de prévention soit poursuivi et, si nécessaire, développé et optimisé. Dans le domaine de la recherche, il souhaite d'une part que les coûts inhérents à la violence soient analysés et, d'autre part, que les lacunes de la recherche sur la violence dans l'environnement social proche soient mises en évidence et comblées.

3612

Table des matières Condensé

3612

1 Situation initiale 1.1 Postulat Stump 1.2 Programme de la législature 1.3 Mandat d'étude 1.4 Contexte sociopolitique 1.4.1 La violence domestique: une préoccupation internationale 1.4.2 La lutte contre la violence domestique en Suisse 1.5 Structure du rapport

3615 3615 3615 3615 3616 3616 3618 3619

2 Objectif et conception de l'étude 2.1 Définition de l'objet de l'étude 2.2 Démarche

3619 3619 3619

3 Résultats 3620 3.1 Faits et chiffres 3620 3.2 Connaissances scientifiques sur les causes de la violence 3621 3.2.1 L'insuffisance d'une approche unidimensionnelle 3621 3.2.2 Causes de la violence dans les relations de couple et facteurs de risque 3622 3.3 Mesures contre la violence 3624 3.3.1 Mesures législatives 3625 3.3.2 Mesures de coordination et de coopération 3626 3.3.3 Intervention et poursuite pénale 3627 3.3.4 Mesures de protection des victimes directes et indirectes 3627 3.3.5 Mesures en faveur des personnes auteures de violence 3628 3.3.6 Services de consultation et de soutien pour les questions conjugales et familiales 3629 3.3.7 Mesures de formation initiale et de perfectionnement 3629 3.3.8 Campagnes de sensibilisation et relations publiques 3630 3.4 Recommandations 3631 3.4.1 Examiner les bases légales et les appliquer rigoureusement 3631 3.4.2 Assurer le réseautage et la coopération 3632 3.4.3 Soutenir et protéger les victimes directes et indirectes 3632 3.4.4 Soutenir les personnes auteures de violence ou susceptibles de l'être 3632 3.4.5 Prendre des mesures de formation initiale et de perfectionnement pour les catégories professionnelles concernées 3633 3.4.6 Informer, sensibiliser et procéder au travail de relations publiques en permanence 3633 3.4.7 Combler les lacunes de la recherche 3634

3613

4 La position du Conseil fédéral et les mesures planifiées au niveau fédéral 4.1 Appréciation générale 4.2 Commentaires sur les recommandations de l'étude 4.2.1 Examiner les bases légales et les appliquer rigoureusement 4.2.2 Réseautage et coopération 4.2.3 Protection des personnes concernées 4.2.4 Offres à l'intention des personnes auteures de violence 4.2.5 Mesures de formation initiale et de perfectionnement 4.2.6 Information, sensibilisation et relations publiques 4.2.7 Combler les lacunes de la recherche 4.3 Conséquences financières pour la Confédération et les cantons 4.4 Tableau synoptique des mesures planifiées par les offices concernés 5 Besoin d'agir et bonnes pratiques dans les cantons 5.1 Bases légales et leur application 5.2 Assurer le réseautage et la coopération 5.3 Protéger les victimes directes et indirectes 5.4 Offres à l'intention des personnes auteures de violence 5.5 Formation initiale et perfectionnement des catégories professionnelles concernées 5.6 Information et sensibilisation en permanence 5.7 Combler les lacunes de la recherche

3614

3634 3634 3636 3636 3638 3639 3640 3641 3641 3642 3643 3644 3645 3645 3645 3646 3647 3647 3648 3649

Rapport 1

Situation initiale

1.1

Postulat Stump

Le postulat du 7 octobre 2005 (Po. 05.3694) de la conseillère nationale Doris Stump «Identifier les causes de la violence et engager la lutte contre ce phénomène», chargeait le Conseil fédéral de présenter un rapport sur les causes de la violence dans l'environnement social proche, ainsi que d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan d'action visant à prévenir cette forme de violence.

Dans sa prise de position du 23 novembre 2005, le Conseil fédéral a proposé d'accepter la première partie du postulat (rapport) et de rejeter la deuxième (plan d'action). Il a renvoyé aux études disponibles sur la violence dans l'environnement social proche et s'est déclaré prêt à établir un bref aperçu et une synthèse des principaux résultats de la recherche et à répertorier les mesures mises en place en Suisse au cours de ces dernières années. Il a considéré que l'élaboration et une mise en oeuvre efficace d'un plan d'action étaient trop ambitieuses et que ces objectifs n'étaient pas réalisables vu la situation financière tendue.

Le 16 décembre 2005, le Conseil national a adopté la première partie du postulat (rapport) et rejeté la deuxième (plan d'action).

1.2

Programme de la législature

Dans son message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20111, le Conseil fédéral a annoncé son intention de présenter un rapport sur les causes de la violence dans l'environnement social proche qui inventorie les mesures existantes et formule des recommandations à l'attention des différents acteurs. Il a en même temps évoqué son projet de rapport sur la violence des jeunes, qui mettra en évidence les causes de ce phénomène, et à partir duquel il proposera des mesures concrètes sur le plan sociétal et politique.

1.3

Mandat d'étude

Le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG) a été chargé de l'établissement du rapport en réponse au postulat. Suivant les motifs développés dans ce dernier, le rapport se concentre sur la violence commise par les hommes envers leur partenaire féminine. La violence conjugale et la violence dans le couple sont les formes de violence les plus répandues dans l'environnement social proche.

Pour son rapport, le BFEG a mandaté une étude en deux volets. Il souhaitait d'une part avoir un aperçu de l'état de la recherche sur les causes de la violence dans les relations de couple et, d'autre part, un inventaire des mesures de prévention mises en place en Suisse au cours de ces dernières années (notamment les mesures législa1

FF 2008 639 686

3615

tives prises aux niveaux fédéral et cantonal, les structures spécifiques mises sur pied ainsi que les campagnes, les programmes et les mesures spéciales). Les deux volets de l'étude devaient permettre de tirer des conclusions et de faire des recommandations pour la pratique et la recherche.

Un groupe de travail interne à l'administration a accompagné la réalisation du mandat. Y étaient représentés, outre le BFEG chargé de la rédaction du rapport, les principaux offices fédéraux s'occupant de la violence domestique, à savoir l'Office fédéral de la police (fedpol, service d'analyse et de prévention), l'Office fédéral des migrations (ODM, domaine de direction Travail, intégration et nationalité, section Intégration), l'Office fédéral de la justice (OFJ, unité Projets et méthodes législatifs; aide aux victimes d'infraction), l'Office fédéral de la santé publique (OFSP, unité de direction Santé publique), l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS, domaine Famille, générations et société, secteur Questions de l'enfance, de la jeunesse et de la vieillesse) et l'Office fédéral de la statistique (OFS, section Criminalité et droit pénal).

Suite à un appel d'offres auquel onze personnes et institutions ont répondu, le BFEG a confié ce mandat en 2008 au «Bureau d'études de politique du travail et de politique sociale BASS» et à Madame Schär Moser, Recherche et conseil. Ils ont rendu leur rapport final2 en automne 2008.

Le présent rapport se fonde sur les résultats du rapport final susmentionné.

1.4

Contexte sociopolitique

La violence dans l'environnement social proche, à savoir la violence domestique, a longtemps été considérée comme une affaire privée et un tabou. Un important changement de mentalité s'est toutefois opéré depuis les années 1990. La lutte contre la violence envers les femmes d'une manière générale et contre la violence domestique en particulier préoccupe de plus en plus les organes internationaux, nationaux et locaux et est reconnue comme une tâche de la communauté.

1.4.1

La violence domestique: une préoccupation internationale

La violence envers les femmes est pour la première fois débattue en profondeur en 1993, à la Conférence des droits humains de l'ONU à Vienne, qui déclare que la violence envers les femmes représente clairement une violation des droits humains et qu'elle est condamnable. Cette affirmation est reprise dans la Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU en 19933. La violence conjugale et la violence dans les relations de couple y occupent une place primordiale. La plate-forme d'action de la Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes, qui s'est tenue en 1995 à Beijing, consacre tout un 2

3

Partenariat de recherche Bureau d'études de politique du travail et de politique sociale BASS & Marianne Schär Moser, Recherche et conseil: La violence dans les relations de couple. Ses causes et les mesures prises en Suisse, Berne 2008.

Déclaration de l'Assemblée générale de l'ONU du 20.12.1993 sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes.

3616

chapitre au thème de la violence envers les femmes, dans lequel sont énumérées explicitement les différentes formes de violence dans le contexte familial. Les Etats sont tenus d'établir des plans d'action, d'instaurer des mesures de sensibilisation et de perfectionnement destinées aux catégories professionnelles confrontées à des situations de violence domestique, de soutenir les services de consultation et les structures d'accueil pour les victimes de violence et de prévoir des mesures législatives qui sanctionnent les personnes auteures de violence. En 1999, la Suisse a élaboré un plan d'action suite à la Conférence mondiale sur les femmes de l'ONU. Il prévoit différentes mesures de lutte contre la violence envers les femmes. Certains objectifs ont été concrétisés, comme la mise en place d'une structure de coordination de la lutte contre la violence envers les femmes (Service de lutte contre la violence du BFEG, cf. ci-dessous ch. 1.4.2), l'introduction de dispositions pénales spéciales et la prise en compte du domaine de la protection des victimes.

La Convention des Nations Unies du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF)4 ne qualifie certes pas expressément la violence domestique de forme de discrimination que les Etats parties sont contraints d'abolir. Le Comité CEDEF a toutefois traité le sujet dans deux recommandations d'ordre général. Dans la Recommandation 19, il spécifie explicitement que la «violence fondée sur le sexe, qui compromet ou rend nulle la jouissance des droits individuels et des libertés fondamentales par les femmes en vertu des principes généraux du droit international ou des conventions particulières relatives aux droits de l'homme» représente une forme de discrimination. La Recommandation 12 invite les Etats à soumettre un rapport sur les mesures de prévention et de lutte contre la violence récemment mises en place. Dans ses remarques finales sur le premier et sur le deuxième rapport des Etats, le Comité invite la Suisse à intensifier ses efforts de lutte contre la violence envers les femmes, et tout particulièrement contre la violence domestique. Il encourage la Suisse à «adopter des lois et à mettre en oeuvre des politiques conformes à la recommandation générale 19 du Comité afin de prévenir la violence,
de fournir protection, appui et services aux victimes et de châtier et réhabiliter les délinquants.»5 L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié en 2002 un rapport mondial sur la violence et la santé. Elle constate que tous les pays ont à faire face à la violence dans les relations de couple et que les femmes en sont très majoritairement les victimes et les hommes les auteurs. Le rapport recense en outre divers facteurs qui accroissent le risque de violence dans les relations de couple.

La Commission européenne mène depuis 1997 le programme Daphné6 dont l'objectif est de soutenir les organisations qui entreprennent des actions destinées à prévenir ou à combattre la violence envers les enfants, les jeunes et les femmes. Le programme a patronné 420 projets entre 1997 et 2005. Le programme Daphné III, actuellement en cours, couvre la période 2007 à 2013 et est doté d'un budget de 116 millions d'euros. Les organisations et institutions publiques ou privées des Etats de l'UE et des Etats de l'EEE peuvent déposer des projets de soutien aux victimes, de promotion des échanges, de réseautage, de formation, de sensibilisation et de recherche.

4 5 6

RS 0.108. La Suisse a ratifié cette Convention le 27 mars 1997.

CEDAW/C/2003/I/CRP.3/Add.1/Rev.1, par. 31 http://ec.europa.eu/justice_home/funding/2004_2007/daphne/funding_daphne_fr.htm

3617

Entre novembre 2006 et mars 2008, le Conseil de l'Europe a mené une campagne pour combattre la violence envers les femmes, y compris la violence domestique. Le Service de lutte contre la violence du BFEG y a participé en informant de nombreux services cantonaux et municipaux ainsi que les services-clés de l'administration fédérale au sujet de cette campagne et en diffusant les documents y relatifs. A la fin 2008, le Conseil de l'Europe a chargé un groupe d'expertes et d'experts d'élaborer des instruments juridiques contraignants pour combattre la violence domestique et toute autre forme de violence envers les femmes. Tous les comités et groupes impliqués sont unanimes sur le fait qu'un instrument juridique contraignant est fondé dans son principe et nécessaire, qu'il doit être assorti d'une stratégie globale (prévention de la violence, protection des victimes et poursuite des personnes auteures) et soumis à un controlling externe et efficace. En juin 2009, le groupe d'expertes et d'experts fournira un rapport intermédiaire décrivant les catégories de personnes et les formes de violence concernées par l'accord et indiquant le nombre d'instruments à prévoir.

1.4.2

La lutte contre la violence domestique en Suisse

Outre le BFEG, qui s'investit dans la lutte contre la violence envers les femmes depuis son instauration, divers offices et services fédéraux ont développé des activités en relation avec certains aspects de la violence domestique (nommément OFJ, OFAS, OFSP, ODM, OFS, fedpol, DFAE, DDC). La mise sur pied du Service de lutte contre la violence (SLV) en 2003 a permis de renforcer les mesures fédérales de lutte contre la violence envers les femmes. Pour des raisons d'économies, le pourcentage de poste prévu a cependant subi une réduction dès sa mise en fonction, passant à 220 % lors de l'institution du Service puis à 130 % peu après.7 Par conséquent, les activités du SLV se concentrent sur la forme de violence envers les femmes la plus répandue: la violence faite aux femmes dans les relations de couple et dans les situations de séparation. Malgré ses modestes ressources, le SLV a réussi à se profiler en devenant une «centrale d'information» pour les spécialistes et le grand public et en soutenant les institutions actives dans la prévention et la lutte contre la violence domestique aux niveaux fédéral et cantonal. Il collecte et met à disposition ses connaissances, il encourage la coopération et le réseautage et donne des impulsions pour des projets de formation initiale, de perfectionnement et de recherche.8 Différentes facettes de la violence domestique ont fait l'objet de nombreuses interventions parlementaires dans le cadre du vaste débat public qui a mûri au cours de ces dernières années.9 Le changement de paradigme dans la prise en considération de la violence domestique se traduit d'une part par une évolution de la législation aux niveaux fédéral et cantonal. Ces modifications législatives visent à combattre plus efficacement la violence domestique, à optimiser la protection des victimes et à amener les personnes violentes à assumer leur responsabilité. D'autre part, la pratique atteste des améliorations majeures en ce qui concerne le soutien concret en faveur des victimes 7 8 9

Cf. note d'information du Département fédéral de l'intérieur du 4 octobre 2007 à l'attention des membres du Conseil fédéral.

Cf. www.egalite-suisse.ch: Service de lutte contre la violence.

En annexe figure une liste des interventions parlementaires sur le thème de la violence envers les femmes et dans l'environnement social proche (1985­2008).

3618

et des personnes auteures de violence. L'étude mandatée fournit, dans sa deuxième partie, une vue d'ensemble des mesures législatives et structurelles mises en oeuvre aux niveaux fédéral et cantonal ces dernières années (cf. ch. 3.3)

1.5

Structure du rapport

Le ch. 2 expose l'objectif, le mandat et la démarche de l'étude. Le ch. 3 reprend la synthèse du rapport final et présente les recommandations que les auteures ont formulées sur la base des conclusions de l'étude et des résultats des enquêtes. Le ch. 4 présente la position du Conseil fédéral et les mesures qu'il propose au niveau fédéral. Le ch. 5 décrit la situation dans les cantons et dégage des exemples de bonnes pratiques.

2

Objectif et conception de l'étude

Cette étude a pour objectif de présenter aux autorités, spécialistes et autres milieux intéressés une synthèse des causes possibles de la violence dans les relations de couple, une vue d'ensemble de l'état actuel de la recherche ainsi qu'un tour d'horizon et une appréciation des mesures législatives et institutionnelles prises en Suisse ces dernières années. Elle doit permettre d'alimenter un débat approfondi sur la prévention de la violence domestique et de soutenir les actrices et les acteurs aux différents niveaux dans la planification et la mise en oeuvre de modifications législatives et de nouvelles mesures.

2.1

Définition de l'objet de l'étude

L'étude se concentre sur la violence dans les relations de couple en tant que forme spécifique de violence dans l'environnement social proche (cf. ch. 1.3 Mandat d'étude). L'expression de «violence dans les relations de couple» recouvre toutes les formes de violence entre adultes dans tous les types de relations de couple. La violence peut être physique, sexuelle ou psychique. Elle peut intervenir dans un couple marié ou non, hétérosexuel ou homosexuel, partageant un domicile commun ou non, en phase de séparation ou après la séparation. Elle exclut les autres formes de violence familiale (telles que violence des parents envers les enfants, violence envers les parents, violence entre frères et soeurs), le harcèlement sexuel sur le lieu travail, la violence dans les écoles, la violence dans les homes médicalisés ou autres institutions et la violence dans les lieux publics.

2.2

Démarche

L'étude repose sur le recensement et l'analyse de différentes données. En font partie une recherche et analyse bibliographique de grande envergure, une enquête menée dans l'ensemble des 26 cantons permettant la compilation des législations et structures cantonales (réseautage, consultation, soutien), des entretiens avec sept expertes ou experts ainsi qu'un examen approfondi de la situation dans six cantons choisis 3619

dans toutes les régions linguistiques (Bâle-Campagne, Genève, Lucerne, Vaud, Tessin et Zurich). L'analyse approfondie englobe une évaluation des documents fournis par les cantons et des entretiens avec deux personnes-clés par canton.

3

Résultats10

3.1

Faits et chiffres

Il n'existe pas encore de statistique à l'échelle nationale ni de système de saisie des données sur la violence domestique, ou la violence dans les relations de couple.

L'enquête sur les homicides effectuée par l'Office fédéral de la statistique (OFS)11 révèle que, entre 2000 et 2004, 250 femmes ont été victimes d'homicides ou de tentatives d'homicide commis par leur partenaire ou ex-partenaire. Durant la même période, on compte 54 hommes victimes d'homicides dans le contexte d'une relation de couple, dont un couple homosexuel. La statistique d'aide aux victimes d'infractions effectuée par l'OFS recense plus de 29 000 consultations en 2007. Dans plus de la moitié des cas, on constate une relation familiale entre la victime et la personne auteure de violence. Les trois quarts des victimes qui consultent sont de sexe féminin.12 Les statistiques recensent uniquement les actes de violence dénoncés aux autorités compétentes et ne reflètent ainsi que la réalité visible de la violence. Les études de prévalence13 et les enquêtes de victimation examinent par contre les zones grises de la violence et intègrent les actes de violence qui n'ont pas fait l'objet d'une procédure pénale ou administrative. On dispose actuellement de deux enquêtes représentatives suisses sur la violence envers les femmes. Les résultats du sondage réalisé par Gillioz, De Puy & Ducret14 en 1993 indiquent qu'une femme interrogée sur cinq15 (20,7 %) a subi de la violence physique et/ou sexuelle par son partenaire au cours de sa vie. En y ajoutant la violence psychique, le pourcentage des femmes victimes de violences s'élève à 40,3 %. L'enquête menée par Killias, Simonin & De Puy16 en 2003 met en évidence qu'une femme interrogée sur dix17 (10,5 %) subit des violences physiques ou sexuelles dans une relation de couple au cours de sa vie d'adulte.

Une femme sur trois (32 %) est victime de violences physiques ou sexuelles commises par un proche ou un inconnu au minimum une fois au cours de sa vie d'adulte.

Plusieurs hôpitaux de Suisse ont en outre réalisé des sondages auprès de patientes dans le cadre de projets précis. Des difficultés méthodologiques empêchent une 10 11 12 13

14 15 16

17

Le ch. 3 s'inspire pour l'essentiel de la partie IV de l'étude (synthèse et conclusion).

Zoder Isabel (2008): Homicides dans les couples. Affaires enregistrées par la police de 2000 à 2004, Neuchâtel: OFS.

http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/19/03/01/key/beratungsfaelle/01.html Les études de prévalence et les enquêtes de victimation examinent la fréquence de la violence au sein d'un groupe cible (femmes, femmes et hommes, enfants, etc.) au moyen d'un sondage représentatif.

Gillioz Lucienne, Jacqueline De Puy et Véronique Ducret (1997): Domination et violence envers la femme dans le couple. Lausanne: Payot.

Les femmes de 20 à 60 ans engagées au cours des 12 derniers mois dans une relation de couple.

Killias Martin, Matthieu Simonin & Jacqueline De Puy (2005): Violence experienced by women in Switzerland over their lifespan: Results of the International Violence against Women Survey (IVAWS), Berne: Stämpfli.

Toutes les femmes de 18 à 70 ans.

3620

comparaison pertinente des taux de violence fournis par les différentes études de prévalence. Les résultats démontrent cependant clairement que la violence est un phénomène extrêmement répandu.

3.2

Connaissances scientifiques sur les causes de la violence

A l'origine des mesures prises en Suisse pour prévenir et lutter contre la violence dans les relations de couple se trouve l'hypothèse implicite ou explicite qu'il existe des facteurs qui accroissent la probabilité d'actes de violence. De ce fait et pour garantir le succès des interventions, il importe que la recherche et la pratique traitent de façon différenciée les causes de la violence ainsi que les circonstances favorisant la non-violence. Les études sur la violence n'abordent la question de la non-violence que depuis peu.

3.2.1

L'insuffisance d'une approche unidimensionnelle

Il est aujourd'hui largement admis par les spécialistes dans la pratique et la recherche que plusieurs causes, qui interagissent de diverses façons, expliquent l'apparition de la violence dans les relations de couple.

Causes, facteurs de risque et situations à risque L'étude des causes de la violence fait apparaître la nécessité d'une certaine vigilance par rapport à la notion de «cause». Une pluralité de facteurs sont corrélés à l'apparition de la violence. L'analyse de cas concrets démontre qu'aucun facteur n'explique à lui seul l'apparition de comportements violents. Etablir une relation causale, c'est-à-dire dégager les véritables fondements de la violence des facteurs d'amplification (comme la consommation d'alcool) et des caractéristiques purement descriptives (comme l'âge) est extrêmement difficile et même impossible au sens strict du terme. Il est ainsi largement admis dans les milieux spécialisés et empiriquement démontré que les victimes directes ou indirectes de violence familiale dans leur enfance ont particulièrement tendance à devenir victimes ou auteures d'actes de violence à l'âge adulte. Comment s'explique-t-on alors que la majorité d'entre elles ne reproduisent pas la violence vécue? Les facteurs d'influence qui concourent à l'apparition de la violence ou au maintien d'une situation de non-violence se situent à différents niveaux. De simples relations de cause à effet ne permettent pas de comprendre le phénomène complexe de la violence. Aucun facteur ne détermine à lui seul l'apparition de comportements violents.

Contribution de la recherche Plusieurs courants scientifiques travaillant avec des hypothèses et des axes de recherche différents tentent d'expliquer pour quelles raisons et dans quelles circonstances la violence apparaît dans les relations de couple. On retiendra notamment les théories de l'apprentissage social, les théories des ressources et du pouvoir et les théories féministes, celles du contrôle social, celles de l'échange social et les théories criminologiques.

3621

L'analyse bibliographique réalisée dans le cadre de la présente étude se fonde sur diverses enquêtes représentatives menées en Suisse et dans d'autres pays. Elles examinent habituellement la violence commise par les hommes envers les femmes, seul un petit nombre s'intéresse aussi à la violence envers les femmes et les hommes.18 On ne peut donc pas sans autres généraliser et parler de «facteurs de risque associés à la violence dans les relations de couple». Il importe par conséquent d'éclairer la perspective scientifique adoptée pour déterminer les facteurs de risque.

Les travaux de recherche qui examinent la violence dans les relations de couple commise aussi bien envers les femmes qu'envers les hommes amènent à constater que certains facteurs (sociodémographiques) accroissent la probabilité d'être victime de violence domestique chez les femmes, mais que cette corrélation n'intervient pas chez les hommes. Ces études confirment l'importance d'un examen différencié sexospécifique des facteurs de risque.

La présente étude expose prioritairement les facteurs de risque associés à la violence envers les femmes dans les relations de couples hétérosexuels.

L'état des connaissances scientifiques ne permet pas de dire s'il existe des facteurs de risque spécifiques à certaines formes de violence ou s'il existe une relation déterminante entre certains facteurs et certaines formes de violence.

3.2.2

Causes de la violence dans les relations de couple et facteurs de risque

Un noyau de causes et de facteurs de risque étroitement associés à l'apparition de comportements violents se dégage de la multitude des facteurs identifiés par la recherche et observés dans la pratique. Le présent chapitre les décrit succinctement.

Le graphique 1 en fin de section présente un aperçu des facteurs les plus importants.

Facteurs individuels: les enquêtes représentatives révèlent que les caractéristiques de l'auteur de violence influent de façon prépondérante sur le risque de violence dans les relations de couple et que les caractéristiques des femmes victimes ont un impact nettement moins important. Lorsque l'homme présente des caractéristiques telles que des expériences de violence vécues dans la famille d'origine, une consommation élevée d'alcool, un comportement antisocial ou criminel hors du contexte familial, le risque qu'il agresse sa partenaire augmente significativement.

Relation de couple, communauté et société: la répartition inégale du pouvoir dans une relation de couple est un facteur de risque. A ce propos, les études indiquent une forte corrélation entre des comportements violents et des comportements systématiques tendant à dominer et à contrôler. Des conflits fréquents dans le couple et notamment la manière dont les protagonistes les règlent sont également des caractéristiques qui influent de façon marquante sur le risque de violence. Les facteurs de stress accroissent la probabilité de violence surtout lorsque les personnes concernées ne parviennent pas à y faire face et à trouver des solutions constructives.

18

La majorité des études ne recensent pas d'informations sur la violence dans les couples homosexuels ou les excluent.

3622

Les événements marquants de la vie comme la grossesse, la naissance ou la séparation du couple augmentent aussi significativement le risque de violence dans le couple.

L'isolement social aussi bien qu'une attitude du ou de la partenaire ou encore un milieu tolérant la violence favorisent l'apparition de comportements violents.

Il n'existe qu'un petit nombre d'analyses qui s'intéressent à l'influence des valeurs et attitudes véhiculées par la société. Elles montrent que l'état de l'égalité entre femmes et hommes et la tolérance de la société face à la violence domestique sont des facteurs importants d'apparition de la violence.

Les entretiens avec les spécialistes ont permis de dégager les différentes situations qui accroissent le risque de violence dans les relations de couple. Ils mentionnent notamment deux facteurs intervenant au niveau de la société: des relations entre femmes et hommes ancrées dans une culture patriarcale et une socialisation liée à la vision stéréotypée du rôle des deux sexes. Comme facteur individuel interviennent les processus d'apprentissage social. La banalisation et la tolérance de la violence sont vus comme facteurs importants sur le plan social et politique.

Causes et facteurs de risque les plus importants associés à la violence envers les femmes dans les relations de couple Le modèle présenté ci-après s'inspire du modèle explicatif de la violence du rapport mondial 2002/03 de l'OMS19. La recherche sur la violence l'a repris et développé par la suite. Ce modèle complexe tient compte du fait qu'aucun facteur n'explique à lui seul l'apparition ou l'absence de violence et que chaque facteur est renforcé ou modifié par plusieurs autres facteurs. En distinguant quatre niveaux, il permet de différencier systématiquement entre les multiples facteurs qui favorisent l'apparition d'actes de violence dans les relations de couple et dans les familles, et de comprendre comment ces facteurs agissent les uns sur les autres. Il y a à chaque niveau (individu, relation, communauté, société) des facteurs qui, en interagissant avec d'autres facteurs au même niveau ou à d'autres niveaux, influencent le comportement des individus, voire augmentent la probabilité qu'une personne soit violente ou devienne victime directe ou indirecte d'un comportement violent.20

19 20

OMS Organisation mondiale de la santé (éd.) (2003): Rapport mondial sur la violence et la santé. Résumé. Copenhague: OMS, 13ss (publication Internet sous: www.who.int).

Cf. Heise Lori L. (1998): «Violence against women: An integrated, ecological framework», Violence against Women, 4(3), 262­290, 266 ss.

3623

Graphique 1: Modèle expliquant l'apparition de comportements violents dans les relations de couple

3.3

Mesures contre la violence

Les travaux scientifiques et les expertes et experts interviewés sont unanimes; à leur avis, des mesures doivent être prises simultanément à différents niveaux si l'on veut enrayer la violence dans le couple. Le recensement des mesures effectué dans le cadre de l'étude montre que des mesures ont été mises en place à tous les niveaux ces dernières années en Suisse. Les lacunes sont particulièrement importantes dans l'approche spécifique des migrantes et migrants, dans la sensibilisation et la formation du personnel médical et judiciaire, dans l'encadrement des enfants touchés indirectement par la violence domestique, dans la prise en charge des jeunes qui commettent des actes de violence ainsi que, plus généralement, dans la prévention primaire, le dépistage et l'intervention précoce de la violence dans les relations de couple. La nécessité d'agir est certes admise, mais la mise en oeuvre est entravée par l'insuffisance des ressources. Cette tension touche particulièrement les services de consultation et d'aide aux victimes et ceux qui s'adressent aux personnes auteures de violence.

3624

3.3.1

Mesures législatives

Au niveau fédéral: depuis le 1er avril 2004, les lésions corporelles simples (art. 123, ch. 2, CP)21, les voies de fait (art. 126, al. 2, CP), les menaces (art. 180, al. 2, CP), la contrainte sexuelle (art. 189 CP) et le viol (art. 190 CP) commis dans une relation de couple constituent des délits poursuivis d'office. Depuis le 1er janvier 2007, la poursuite d'office s'applique aussi aux partenaires enregistrés. Dans certaines circonstances, la procédure peut être suspendue si la victime le demande (art. 55a CP).

La norme de protection contre la violence, qui donne la possibilité à la demanderesse ou au demandeur de requérir des mesures de protection (interdiction de prise de contact, expulsion du domicile, etc.) est en vigueur dans le code civil depuis le 1er juillet 2007 (art. 28b CC). Les cantons sont par ailleurs tenus de déterminer une procédure d'expulsion immédiate de la personne menaçante en cas de crise. La loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI)22 oblige les cantons à mettre sur pied des antennes et des centres de consultation pour les victimes d'infractions.

Il importe de relever encore sur le plan fédéral que la loi sur les étrangers23 prévoit que les étrangères et étrangers dont l'autorisation de séjour est liée au mariage ont la possibilité de solliciter une autorisation de séjour individuelle en cas de séparation pour des motifs graves, en particulier en cas de violence domestique.

Au niveau cantonal: les cantons ont introduit dans leur législation, de diverses manières, de nouvelles possibilités d'intervention dans les cas de violence domestique. L'introduction dans presque tous les cantons de normes policières qui prévoient des mesures de protection de durée limitée, comme l'expulsion du domicile, l'interdiction de contacter la victime ou de pénétrer dans le domicile, a permis de combler les lacunes de la protection des victimes à court terme. Les mesures d'accompagnement comportent dans la plupart des cantons l'obligation d'informer les victimes et les personnes auteures de violence de leurs droits et de leur indiquer les antennes et centres de consultation. Quelques cantons disposent de modèles de centres de consultation spécialisés, qui ont le mandat (proactif) de contacter directement et de recevoir les victimes et les personnes auteures de violence; il y
a même un canton qui prévoit la possibilité de contraindre les personnes expulsées à venir au centre de consultation pour quelques heures d'entretien-conseil. Les expériences sont positives dans les deux cas. L'entrée en vigueur en 2007 de la norme de droit civil de protection contre la violence (art. 28b CC), qui prévoit des mesures de protection durables, entraîne une amélioration sensible de la protection à moyen terme des victimes.

Les nouveautés normatives aux niveaux fédéral et cantonal expriment un changement paradigmatique de l'approche de la violence dans les relations de couple et elles sont accueillies favorablement par la majorité des cantons et des spécialistes.

La manière dont les cantons font usage de la marge de manoeuvre dont ils disposent dans l'application des mesures est considérée comme décisive. Les dispositions sur la suspension provisoire de la procédure sont jugées en partie problématiques en cas de délits commis dans le cadre du couple poursuivis d'office puisque la suspension de la procédure dépend uniquement de la victime et qu'aucune contrainte n'est imposée à la personne auteure de violence. Les nouvelles dispositions pénales prévoyant le remplacement de courtes peines privatives de liberté conditionnelles ou 21 22 23

RS 311.0 RS 312.5 RS 142.20

3625

inconditionnelles par des peines pécuniaires conditionnelles ou inconditionnelles sont considérées de façon ambivalente par les expertes et experts interviewés. Dans le cas de violence domestique, la condamnation à une peine pécuniaire peut représenter une charge supplémentaire difficile à gérer pour la famille. Des mesures s'imposent par ailleurs dans le cadre de l'application de la réglementation des cas de rigueur du droit des étrangers. En ce qui concerne les dispositions de droit civil, les contraintes procédurales de type juridique (fardeau de la preuve) ou financier (coûts) sont jugées relativement lourdes.

3.3.2

Mesures de coordination et de coopération

Divers cantons disposent de services d'intervention, de bureaux spécialisés ou de déléguées ou délégués à la violence domestique. Outre une fonction de coordination, ces organes assument souvent la tâche d'informer, de sensibiliser et d'organiser les cours de perfectionnement. En outre, des commissions permanentes et des tables rondes assurent la coordination et la collaboration entre les différents actrices et acteurs publics et privés (police, justice, centres de consultation, etc.). Les modèles de coordination et de coopération varient d'un canton à l'autre. Un ancrage solide des structures de coordination et de coopération est considéré comme primordial dans les cantons examinés ainsi que par les expertes et experts. Ces structures fournissent un apport déterminant à la sensibilisation sur le sujet et assurent un travail de prévention efficace et fonctionnel. Dans l'ensemble, il est considéré comme indispensable d'ancrer plus fortement la prévention de la violence au niveau institutionnel pour éviter que les résultats ne dépendent surtout de l'engagement personnel des personnes impliquées.

Les services d'intervention et autres services spécialisés sont regroupés dans la Conférence des services et des projets d'intervention cantonaux de lutte contre la violence domestique en Suisse (CSPI) et dans la Conférence latine contre la violence domestique. La Suisse centrale a un centre de coordination et de coopération des mesures, «Zentralschweizer Fachgruppe häusliche Gewalt». Il existe par ailleurs des structures fédérales et supracantonales de coordination spécifiques à un domaine (conférences des services d'aide aux victimes, organisation faîtière des maisons d'accueil pour femmes, rencontre nationale des centres de consultation et des programmes de lutte contre la violence destinés aux personnes violentes, Fédération romande des intervenant-e-s auprès des auteur-e-s de violence domestique FRIAVD).

Pour améliorer l'efficacité de la prévention, on estime qu'il faudra à l'avenir, aussi au niveau national, garantir et financer en suffisance les structures qui mettent actuellement déjà en réseau les acteurs et les actrices et les coordonnent, favorisant ainsi les synergies. Une telle fonction est par exemple assumée en Suisse par le Service de lutte contre la violence du BFEG, qui est opérationnel
depuis 2003. Il se concentre sur la prévention et la lutte contre la violence dans les relations de couple et dans les situations de séparation. Ses tâches sont les suivantes: informer et mettre à disposition ses connaissances sur l'ampleur, les causes et les séquelles de la violence; favoriser la collaboration et le réseautage au sein de l'administration fédérale ainsi qu'entre la Confédération et d'autres actrices et acteurs; intégrer le thème de la violence dans la formation initiale et le perfectionnement des catégories professionnelles concernées; intervenir dans le cadre des procédures administratives, notam3626

ment participer aux consultations des offices et mettre à disposition ses connaissances spécialisées dans le cadre du processus législatif. De nombreuses informations et publications sont disponibles sur le site Internet du service.24

3.3.3

Intervention et poursuite pénale

Encouragée par la Campagne de prévention suisse de la criminalité (PSC) menée entre 2003 et 2005, la police poursuit une nouvelle stratégie d'intervention («Du médiateur à l'enquêteur»). Dans la plupart des cantons, il est possible d'expulser du domicile une personne susceptible de recourir à la violence ou d'ordonner d'autres mesures de protection. Il va de soi que cette nouvelle stratégie d'intervention ne pourra être mise en oeuvre uniformément d'un jour à l'autre et que les nouvelles mesures ne seront pas toutes appliquées entièrement sur le champ. La sensibilisation de la police est globalement reconnue comme bonne, et son travail, qui est dépeint comme très exigeant et astreignant, a été évalué de satisfaisant à très satisfaisant.

Ces résultats s'expliquent en partie par la présence de spécialistes de la violence et l'introduction de services spécialisés dans le domaine de la violence domestique dans certains corps de police. Les ressources de la police et de ses services ne suffisent cependant pas dans un environnement aux exigences accrues. La police genevoise a introduit en 2007 un programme informatique en vue d'optimiser le dépistage précoce de la violence, programme qui est actuellement évalué.

Dans de nombreuses interventions contre la violence domestique ­ dans le canton de Zurich plus de 50 % ­ les enfants subissent directement des violences ou en sont témoins. Dans de tels cas, les autorités de tutelle peuvent ou doivent en être informées, suivant les cantons. La situation des enfants affectés est jugée par beaucoup insatisfaisante. D'une part, les autorités de tutelle (souvent de milice en Suisse alémanique) sont fréquemment débordées. On constate d'autre part un manque de stratégies et d'offres spécifiques de soutien aux enfants affectés. Le soutien aux victimes et aux personnes expulsées est aussi très insuffisant. Ceci ressort des expériences faites avec le modèle proactif de prise de contact avec les victimes et les personnes susceptibles de violence, qui ont d'ailleurs souvent volontairement recours à ces offres de consultation.

3.3.4

Mesures de protection des victimes directes et indirectes

Les cantons ont été tenus d'installer des centres d'accueil et de consultation pour les victimes d'actes de violence en vertu de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infraction (LAVI)25, entrée en vigueur en 1993. Toutefois, les offres LAVI varient fortement d'un canton à l'autre dans leur étendue et leur spécialisation (pour les femmes, pour les victimes de violences sexuelles, pour les hommes victimes de violences, etc.) Outre les centres LAVI, il existe des offres de consultation ambulatoires spécialisées dans la violence domestique aussi bien pour les femmes que pour les hommes touchés ou menacés par la violence ou pour les deux à la fois. La Suisse 24 25

www.egalite-suisse.ch RS 312.5

3627

romande dispose d'un service de consultation spécialisé sur Internet et, en Suisse alémanique, diverses institutions offrent un conseil spécialisé sur Internet. Dans tous les cantons, les services médicaux d'urgence des hôpitaux et des médecins se tiennent à la disposition des victimes. Dans quelques cantons, les hôpitaux ont introduit des services de soins médicaux et thérapeutiques d'urgence spécialisés dans les questions de la violence. Plusieurs cantons disposent de maisons d'accueil pour femmes qui assurent protection, encadrement et conseil aux femmes et aux mères avec leurs enfants.

Le financement des offres est souvent ressenti comme un problème majeur. Le besoin est certes reconnu, mais la volonté de mettre en place des structures solides fait défaut. La pression financière peut être si grande que le travail en pâtit et qu'une concurrence se fait jour entre les centres, notamment ceux qui sont ouverts aux victimes et ceux qui le sont aux personnes auteures de violence. Il ressort très clairement que les maisons d'accueil pour femmes remplissent une fonction centrale malgré la possibilité d'expulser un ou une partenaire violent du domicile. Différents organes signalent qu'il est grand temps de s'occuper des enfants touchés indirectement par la violence domestique. Le soutien des victimes dans les hôpitaux et par les médecins doit, d'une manière générale, aussi être développé. Divers spécialistes demandent l'introduction d'une statistique de la violence domestique, qui permettrait d'optimiser le dépistage précoce, de diminuer le nombre de cas graves de violence et d'améliorer la qualité de la documentation de médecine légale (constats médicaux).

D'après divers spécialistes, les offres d'aide aux victimes se concentrent sur la gestion des situations aiguës de crise (prévention secondaire). Pour des questions de financement, il est quasiment impossible d'offrir un accompagnement sur le long terme aux victimes de violence (prévention tertiaire); la loi prévoit pourtant que les centres LAVI reconnus proposent des services d'aide aux victimes à plus long terme.

3.3.5

Mesures en faveur des personnes auteures de violence

De nombreux cantons disposent d'offres de consultation et de soutien pour les personnes auteures de violence dans une relation de couple ou les personnes qui craignent de ne pouvoir se maîtriser. Quelques-unes de ces offres ont été mises sur pied il y a une dizaine d'années, mais la plupart sont nouvelles. On distingue celles auxquelles on fait appel librement en situation de crise ou d'acte de violence et celles à caractère obligatoire dans un contexte pénal. Depuis peu, on dispose également d'offres spécifiques qui proposent une approche proactive de la personne ayant recours à la violence (Bâle-Campagne, Zurich) ou une prise en charge lors d'une expulsion du domicile. Le canton de Lucerne a mis sur pied une offre de conseil à caractère obligatoire pour les personnes expulsées du domicile. Le canton de Genève mène un projet-pilote avec offre de logement pour les hommes auteurs d'actes de violence.

Les programmes volontaires de certains cantons couvrent la consultation en cas de crise, la consultation en cas de violence et les thérapies collectives. La Suisse romande dispose d'une offre de consultation interactive par Internet. Certains cantons alémaniques et romands ont des programmes d'apprentissage de la non3628

violence et des groupes thérapeutiques plus importants dans le domaine obligatoire.

Les offres volontaires et obligatoires pour femmes sont encore assez rares. En Suisse romande, on trouve un centre qui travaille depuis longtemps avec les femmes. Le canton de Bâle-Campagne a aussi un programme d'apprentissage pilote pour femmes depuis 2008.

Il n'y a pas d'offre actuellement en Suisse italienne, qui reconnaît cette lacune et compte y remédier. Différents avis dénoncent un problème majeur dans le manque de garanties financières pour réaliser les offres, surtout dans les programmes volontaires. La nécessité de mesures est aussi constatée en raison de la difficulté d'entrer en contact avec les migrantes et migrants allophones. Les cantons font un usage très divers de la possibilité d'ordonner une participation obligatoire à des programmes d'apprentissage et thérapeutiques. La sensibilisation des autorités judiciaires compétentes est considérée comme décisive à cet égard. Le dépistage et l'intervention précoces sont jugés essentiels. Les offres de consultation volontaire à bas seuil sont particulièrement importantes. Elles doivent être largement diffusées pour que les groupes-cibles y aient recours. De plus, les médecins et le personnel hospitalier doivent être sensibilisés; la perspective des personnes auteures de violence doit être centrale dans les dépistages systématiques.

3.3.6

Services de consultation et de soutien pour les questions conjugales et familiales

Tous les cantons ont des centres de consultation et de soutien pour les questions familiales, les relations et les problèmes au quotidien. En font partie les services sociaux et un réseau plus ou moins étendu d'offres générales, psychosociales, médicales, thérapeutiques et juridiques de consultation et de soutien. Ces services ne sont pas spécialisés dans la prévention de la violence conjugale, mais sont confrontés directement ou indirectement à ce problème.

Les spécialistes sont unanimes sur l'importance d'atteindre le plus tôt possible les couples et les familles, ce qui présuppose un certain degré de notoriété des offres.

Les spécialistes attachent beaucoup d'importance à ce que les centres d'information et de consultation soient capables de conseiller les futurs parents pendant la grossesse, au moment de la naissance et lors des consultations pour parents. Ces centres permettent d'atteindre de nombreuses personnes dans des situations de vie dont on sait qu'elles présentent des facteurs de risque de violence dans les relations de couple.

3.3.7

Mesures de formation initiale et de perfectionnement

Les cantons font des efforts pour améliorer la formation initiale et le perfectionnement des catégories professionnelles confrontées à des situations de violence domestique. Les initiatives de formation et de perfectionnement émanent soit des services de coordination compétents et d'autres offices, soit directement des centres de formation. Il s'agit surtout d'offres de perfectionnement destinées à plusieurs catégories professionnelles ou à des groupes-cibles (police, milieu médical, services sociaux, etc.) Dans quelques cantons, des guides et des manuels plus détaillés ont été

3629

conçus. Dans plusieurs cantons, ce thème est intégré dans la formation initiale de certaines professions.

La police a intégré ce thème spécifique dans la formation initiale dans toute la Suisse. Des connaissances de base étendues et la volonté de suivre des cours de perfectionnement lui sont généralement reconnues. Les connaissances et la sensibilisation de la magistrature sont très variables; on perçoit souvent un manque de sensibilisation. Outre la police, le personnel qualifié de la santé (médecins, personnel soignant) est considéré comme un groupe professionnel important dans le cadre de la prévention de la violence. On constate toutefois dans divers cantons que le personnel médical est peu informé et peu sensibilisé à cette problématique. Il est urgent de prendre des mesures dans le domaine médical, d'une part vu la grande responsabilité des médecins dans la constitution de dossiers cliniques de bonne qualité sur des cas de violence domestique. On regrette d'autre part que le potentiel du dépistage précoce soit très mal utilisé par manque de connaissance et de données statistiques.

3.3.8

Campagnes de sensibilisation et relations publiques

Jusqu'à maintenant, trois grandes campagnes de sensibilisation ont été menées à l'échelle nationale concernant la violence conjugale, respectivement la violence domestique: «Stop violence» de la Conférence Suisse des Déléguées à l'Egalité entre Femmes et Hommes (1997), «Stop! Violence domestique» de la Prévention Suisse de la Criminalité (2003 à 2005) et la tournée «En route contre la violence domestique» d'Amnesty International Suisse (2006). Au niveau international, le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes a participé à la campagne du Conseil de l'Europe qui avait pour objectif de combattre la violence à l'égard des femmes, y compris la violence domestique (2004 à 2008).

Divers cantons intensifient le travail de relations publiques à l'occasion de l'introduction de nouvelles dispositions légales et soutiennent la Journée internationale contre la violence à l'égard des femmes (25 novembre). Les organes cantonaux (centres de coordination, bureaux de l'égalité, antennes et bureaux d'information, police) ont élaboré et distribué un grand nombre de brochures sur ce thème ainsi que du matériel d'information et de sensibilisation. Les groupes-cibles à informer et sensibiliser en premier lieu sont les migrantes et les migrants, les jeunes et les enfants. Le canton de Vaud a fourni un énorme travail de prévention en lançant le projet «L'école de l'égalité», qui a pour objectif de promouvoir le respect mutuel entre les sexes. Il importe pour beaucoup d'intensifier le travail auprès des écoles, considéré comme un axe prioritaire dans le cadre de la prévention primaire.

On a constaté qu'une sensibilisation permanente à ce thème était nécessaire; il faut donc rester vigilant et ne pas relâcher les efforts. Les spécialistes de la violence considèrent très important que la population soit bien informée, compte tenu de deux objectifs. D'une part, il s'agit de faire passer le message que la violence dans les relations conjugales ne peut être tolérée et n'est pas licite. D'autre part, il convient d'atteindre aussi bien les victimes directes et indirectes que les personnes auteures de violence, de les aider et de les encourager à s'adresser aux services d'aide spécialisés. La responsabilité de la Confédération est souvent mentionnée dans ce contexte.

3630

3.4

Recommandations

Les recommandations exposées ci-après reprennent brièvement les résultats de l'étude ayant trait à la nécessité d'agir et aux possibilités d'optimisation. Leur faisabilité politique n'est pas considérée ici. Ces propositions serviront de base de discussion sur le prolongement des efforts de prévention et de lutte contre la violence dans les relations de couple, aussi bien aux actrices et acteurs aux niveaux fédéral, cantonal et communal qu'aux chercheuses et chercheurs.

3.4.1

26

Examiner les bases légales et les appliquer rigoureusement

­

Les actrices et acteurs aux niveaux fédéral et cantonal doivent faire tout leur possible pour appliquer les dispositions légales rigoureusement et conformément aux objectifs fondamentaux (éviter la violence, protéger les victimes, amener les personnes auteures de violence à assumer leur responsabilité).

­

Conformément aux objectifs fondamentaux, les effets de la disposition pénale sur la suspension provisoire de la procédure en cas d'actes de violence conjugale poursuivis d'office (art. 55a CP) et les effets du nouveau droit des sanctions (peines pécuniaires au lieu de courtes peines privatives de liberté) devraient être débattus en profondeur.

­

Il conviendrait d'analyser l'influence d'éventuelles contraintes procédurales (fardeau de la preuve, coûts) sur la portée de la norme de droit civil de protection contre la violence (art. 28b CC) et l'évaluation de sa mise en oeuvre dans les cantons. Il y aurait alors peut-être lieu de prendre des mesures.

­

Il serait bon d'examiner l'application de la réglementation des cas de rigueur du droit des étrangers (art. 50, al. 1, let. b, LEtr26) et d'évaluer dans quelle mesure les autorités fédérales et cantonales exploitent la marge d'interprétation possible pour protéger les victimes.

­

Conjointement aux interventions policières, il serait pertinent de transmettre systématiquement les données des victimes aux centres de consultation en utilisant les canaux existants tout en garantissant que les centres de consultation disposent des ressources nécessaires pour que le contact avec les victimes puisse être établi. Les modèles proactifs (transmission automatique des données des victimes et des personnes auteures de violence, mandat de conseil) devraient en outre être soigneusement examinés et leur potentiel comme leurs limites évalués dans chacun des contextes étudiés.

RS 142.20

3631

3.4.2

Assurer le réseautage et la coopération

­

Exploiter les synergies des efforts de prévention et de lutte contre la violence dans les relations de couple en intensifiant la coordination et le réseautage des mesures, ainsi que la collaboration entre les actrices et les acteurs chargés de les appliquer est incontournable pour obtenir une efficacité maximale.

A cet égard, il importe d'utiliser de manière optimale les possibilités de collaboration et d'apprentissage réciproques, même au-delà des régions linguistiques.

­

Les réseaux existant à l'échelle nationale jouent un rôle essentiel dans l'optimisation de l'efficacité de la prévention contre la violence. Ils devraient être assurés de disposer des ressources nécessaires pour assumer leur tâche.

­

Il importe de favoriser les structures de coordination et de coopération et de viser leur institutionnalisation dans tous les cantons.

3.4.3

Soutenir et protéger les victimes directes et indirectes

­

La protection des victimes est un objectif prioritaire. Tous les cantons doivent disposer d'offres adéquates pour les victimes directes, les victimes indirectes et les personnes menacées de violence dans une relation de couple. Il y a en partie nécessité d'agir dans l'accompagnement à moyen et à long termes des victimes suite à l'intervention dans une situation de violence.

­

Pour protéger efficacement les victimes, une offre suffisante et répondant aux besoins des femmes et des enfants victimes de violence domestique doit être assurée. Les mesures de protection policières ne suppléent pas les services spécialisés en matière de protection des victimes.

­

Les centres de consultation et notamment les maisons d'accueil pour femmes reçoivent un nombre important de migrantes. Afin de résoudre les problèmes de compréhension au niveau de la langue et de la culture, il importe de développer des compétences additionnelles et de recruter des spécialistes provenant de l'immigration.

­

Il importe absolument de prendre en compte les intérêts des enfants touchés indirectement par la violence dans les relations de couple dans le cadre des interventions. En termes de prévention primaire, il serait indiqué de favoriser la mise en place de services spécialisés dans le soutien des enfants.

3.4.4 ­

3632

Soutenir les personnes auteures de violence ou susceptibles de l'être La prévention de la violence et des récidives est un objectif prioritaire. Tous les cantons doivent disposer de mesures adéquates pour les personnes auteures de violence ou qui craignent de ne pouvoir se maîtriser. Il faudrait en outre amener ces personnes à s'adresser aux structures de soutien existantes et les encourager à accepter de l'aide.

­

Pour optimiser les effets de la prévention, la promotion de programmes thérapeutiques volontaires à bas seuil et une meilleure mise à profit des possibilités offertes par les programmes thérapeutiques obligatoires seraient souhaitables.

­

Des compétences linguistiques insuffisantes empêchent de bénéficier d'une consultation. Il faut trouver une solution pour atteindre plus efficacement les personnes allophones auteures d'actes de violence. La mise à disposition de ressources supplémentaires est incontournable pour que les services de consultation et de soutien puissent développer des stratégies et acquérir des compétences appropriées. Il faut veiller à ce que les conseillères et conseillers en matière de violence aient les compétences linguistiques et culturelles adéquates.

3.4.5

Prendre des mesures de formation initiale et de perfectionnement pour les catégories professionnelles concernées

­

Le dépistage et l'intervention précoce sont des éléments-clés de la réduction de la violence. Dans ce domaine, le personnel qualifié de la santé tient un rôle central. Les organes fédéraux et cantonaux de la santé devraient endosser plus de responsabilités.

­

Les thèmes de la violence, de la violence domestique et de la dynamique de la violence doivent être intégrés comme matière d'enseignement dans toutes les filières de formation et d'études déterminantes (santé, sécurité sociale, enseignement, droit et justice). Il y a lieu de rechercher, dans la mesure du possible, des solutions à l'échelle nationale, qui utilisent les réseaux existants.

3.4.6

Informer, sensibiliser et procéder au travail de relations publiques en permanence

­

La sensibilisation aux problèmes de la violence domestique représente un processus et présuppose un effort régulier. Une sensibilisation optimale du grand public nécessite un engagement au niveau de la Confédération.

­

Une intensification des activités de prévention primaire dans les écoles est nécessaire. Les thèmes de la vision du rôle des deux sexes, de la violence domestique et de la gestion des conflits dans le couple devraient faire partie de l'enseignement (école et formation des enseignantes et enseignants).

­

Il faut prendre des mesures pour informer le groupe-cible des migrantes et migrants et les amener à s'adresser aux services de consultation. Les mesures doivent être élaborées en collaboration avec les communautés de migrants et migrantes directement concernés pour s'assurer leur soutien.

3633

3.4.7

Combler les lacunes de la recherche

­

Il serait utile de poursuivre les travaux de recherche sur les causes de la violence (recherche sur la résilience, étude des conditions favorisant la nonviolence, exploration de la dimension sexospécifique de la violence, évaluation des situations à risque et des contextes d'apparition de la violence au moyen d'études qualitatives).

­

Il serait nécessaire de disposer d'une étude de prévalence au niveau suisse pour approfondir l'analyse de la violence dans les relations de couple (violence envers les femmes et les hommes et actes de violences commis par des femmes et des hommes). Il faudrait accélérer l'harmonisation des diverses statistiques.

­

Il serait indiqué de réaliser une étude circonstanciée sur les coûts économiques occasionnés par la violence dans les relations de couple.

­

L'instrument que représentent les évaluations pourrait être renforcé de façon à optimiser l'application des dispositions légales cantonales de protection contre la violence. Les études comparatives sont aussi judicieuses; elles permettent de fixer les mesures prises et de dégager des bonnes pratiques.

4

La position du Conseil fédéral et les mesures planifiées au niveau fédéral

Un tableau synoptique des mesures planifiées par la Confédération se trouve au ch. 4.4.

4.1

Appréciation générale

Diverses enquêtes sur la violence dans les relations de couple ont été menées en Suisse. Elles se limitent toutefois en général à l'examen de la violence des hommes envers les femmes et démontrent que cette forme de violence est très fréquente: de 10 à 20 % des femmes subissent des sévices corporels et/ou sexuels d'un partenaire; si on y inclut la violence psychologique, le pourcentage est encore bien plus élevé.27 On dispose de peu d'études sur la violence domestique envers les hommes, la Suisse ne dispose jusqu'ici d'aucune enquête représentative.

Seule une petite partie des cas recensés dans les études de prévalence est enregistrée officiellement: uniquement si la police est intervenue et que les victimes ont porté plainte ou se sont rendues dans un service d'aide aux victimes. Mais il n'existe à l'heure actuelle aucune saisie globale des cas de violence domestique pour toute la 27

Cf. Gillioz Lucienne, Jacqueline De Puy et Véronique Ducret (1997): Domination et violence envers la femme dans le couple. Lausanne: Payot; Killias Martin, Mathieu Simonin and Jacqueline De Puy (2005): Violence experienced by women in Switzerland over their lifespan: Results of the International Violence against Women Survey (IVAWS), Berne: Stämpfli; Gloor Daniela et Hanna Meier (2004): Frauen, Gesundheit und Gewalt im sozialen Nahraum. Repräsentativbefragung bei Patientinnen der Maternité Inselhof Triemli, Klinik für Geburtshilfe und Gynäkologie sur mandat du Bureau de l'égalité de la ville de Zurich et de la Maternité Inselhof Triemli, Berne: Edition Soziothek.

3634

Suisse. La statistique d'aide aux victimes de ces dernières années montre que plus de la moitié des consultations est en relation avec la violence domestique et que trois quarts des personnes qui cherchent conseil sont des femmes.28 La révision en cours de la Statistique policière de la criminalité (SPC) vise entre autres à recenser les dépôts de plainte et les interventions de la police pour violence domestique sur l'ensemble du territoire suisse. La Suisse aura ainsi dès 2010 une statistique complète des cas de violence dans le couple enregistrés par la police.

La violence dans l'environnement social proche, la violence domestique et la violence dans les relations de couple sont des phénomènes sociaux impossibles à expliquer par des relations de cause à effet. La recherche parle donc plutôt de facteurs favorisant la violence (facteurs de risque) et de facteurs protégeant de la violence (facteurs de protection). Elle part de l'idée que de nombreux facteurs interagissant à plusieurs niveaux déterminent l'apparition de comportements violents ou non violents (individu, relation, communauté, société). Des mesures devront être prises parallèlement à différents niveaux si l'on veut enrayer la violence. La prévention primaire, qui a pour but d'anticiper la violence, intervient directement au niveau des facteurs de risque ou de protection. La prévention secondaire s'attache à dépister précocement les situations de crise et la violence imminente et à empêcher leur déclenchement. La prévention tertiaire débute quand il y a eu acte de violence. Elle a pour but d'empêcher la reproduction de tels actes et d'en limiter les conséquences négatives.

De nombreuses mesures ont été prises pour lutter contre la violence domestique et ses conséquences au niveau fédéral et au niveau cantonal suite à une large réflexion sur la violence domestique. Il convient de mentionner à ce sujet les mesures législatives prises par la Confédération (poursuite d'office des actes de violence dans le couple, norme de protection contre la violence de droit civil ainsi que la révision de la loi sur les étrangers et de celle sur l'aide aux victimes) et celles prises par les cantons (possibilités d'intervention de la police pour protéger les victimes et informations complémentaires données aux victimes et aux personnes auteures de
violence). Ces nouvelles dispositions légales ont permis de faire un pas en direction du but visé, qui est d'optimiser la protection des victimes et de responsabiliser les personnes auteures d'actes de violence. Les expertes et les experts questionnés dans le cadre de cette étude ont constaté que des problèmes se posent dans l'application de certaines dispositions. Il faut attendre les résultats d'autres expériences et les évaluer avec soin.

En outre, le réseautage, la coopération et la coordination ont été renforcés au niveau fédéral et au niveau local, la formation initiale et le perfectionnement des forces de police intensifiés, les offres pour victimes et pour personnes auteures de violence étendues. Ces mesures sont primordiales pour prévenir la violence domestique. Les expertes et les experts les trouvent très utiles. Leur financement insuffisant est souvent la pierre d'achoppement qui en freine la réalisation.

Une des préoccupations fondamentales d'un Etat de droit est de protéger l'intégrité individuelle de tout être humain. La violence envers les femmes est une atteinte au droit à l'intégrité corporelle et à l'autodétermination. Elle est punissable. De plus, la violence envers les femmes est un obstacle important sur le chemin de l'égalité des sexes. En Suisse, l'obligation de mettre en place des mesures efficaces pour combat28

http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/19/03/01/key/beratungsfaelle/01.html

3635

tre la violence dans les relations de couple ressort aussi bien de l'ordre juridique suisse (Cst., CP, CC, LAVI, LEg) que des traités de droit international (notamment Convention de l'ONU sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et Convention de l'ONU sur les droits de l'enfant).

La collaboration et la coordination entre les différents offices et services qui s'occupent, au sein de l'administration fédérale, de divers aspects de la violence conjugale seront renforcées par un groupe de travail interdépartemental sous la conduite du BFEG.

Le BFEG est également chargé de mettre ses connaissances spécifiques et ses contacts avec des expertes et des experts à la disposition des autres offices et autres services en vue de la mise en oeuvre des mesures qui leur incombent.

Mesures planifiées par la Confédération A)

Mise à disposition de connaissances spécifiques et de contacts avec des expertes et des experts pour exécuter les mesures planifiées par les offices et services de l'administration fédérale (BFEG)

4.2

Commentaires sur les recommandations de l'étude

4.2.1

Examiner les bases légales et les appliquer rigoureusement

Au cours de ces dernières années, la Confédération et les cantons ont légiféré pour lutter plus efficacement contre la violence dans les relations de couple, pour améliorer la protection des victimes et pour accroître la responsabilisation des personnes auteures de violence. Les auteures de l'étude voient des possibilités d'amélioration dans l'application des nouvelles dispositions légales. Il importe de prêter une attention toute particulière à ce que l'exécution des lois aille dans le sens des objectifs fondamentaux. Les auteures recommandent de vérifier concrètement l'exécution de la norme civile de protection contre la violence (art. 28b CC), de la possibilité de suspension provisoire de la procédure en cas de poursuite d'office d'actes de violence conjugale ou dans les relations de couple (art. 55a CP) et de la réglementation des cas de rigueur du droit des étrangers (art. 50 LEtr). En outre, le nouveau droit des sanctions (peines pécuniaires au lieu de courtes peines privatives de liberté) doit être examiné du point de vue de son effet préventif dans les cas de violence domestique.

Comme il l'expose dans sa prise de position sur la motion Fiala29, le Conseil fédéral a l'intention de suivre de près l'application pratique de l'art. 28b, al. 1, CC et d'évaluer son efficacité. Une éventuelle évaluation est du ressort de l'Office fédéral de la justice (OFJ) et devrait être effectuée cinq ans après l'entrée en vigueur de la

29

La motion Fiala demande au Conseil fédéral de pénaliser le harcèlement (stalking) et d'ajouter un article adéquat au code pénal. Le Conseil fédéral a demandé le rejet de la motion suite à l'introduction de l'art. 28b CC. Selon lui, la protection de la victime contre le harcèlement est réglée de façon complète dans ce nouvel article (voir prise de position du Conseil fédéral du 19 novembre 2008 sur la motion Fiala 08.3495). Le Parlement n'a pas encore traité la motion.

3636

nouvelle disposition; c'est-à-dire quand on disposera d'assez d'expérience. Les premiers résultats sont donc attendus pour 2013 au plus tôt.

Parallèlement à l'évaluation mentionnée, l'application de l'art. 55a CP (suspension de la procédure) et ses effets sur la prévention de la violence conjugale et dans les relations de couple devront être analysés.

Dans le cadre d'une évaluation de la partie générale du code pénal révisé, l'OFJ examine les peines pécuniaires qui sont prononcées désormais en lieu et place de courtes peines privatives de liberté. Sur la base de cette analyse, aucune observation ne peut toutefois être faite sur les conséquences de cette nouveauté dans les cas de violence domestique, car on ne peut pas encore actuellement différencier entre violence conjugale ou dans les relations de couple et en dehors des relations de couple.30 L'Office fédéral de la statistique (OFS) est donc chargé d'éclaircir, en prennant un ou deux cantons à titre d'exemple, quels sont les documents que peuvent fournir les tribunaux pour la réalisation d'une enquête sur les peines pécuniaires dans les cas de violence domestique.

Les cantons disposent d'une certaine marge de manoeuvre en ce qui concerne la prolongation de l'autorisation de séjour des victimes de violence domestique (art. 50 LEtr). La conférence tripartite sur les agglomérations a demandé dès 2004 dans son rapport «Entraves juridiques à l'intégration» une harmonisation des pratiques cantonales en matière de prolongation des permis de séjour dans les cas de rigueur.

L'Office fédéral des migrations (ODM) est actuellement occupé à rédiger une directive sur la base de l'art. 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative31, qui concrétise les critères de prolongation d'autorisation de séjour mentionnés dans l'ordonnance.

Les auteures de l'étude proposent en outre de mettre systématiquement à profit les possibilités de transmission des données des victimes aux centres de consultation par le biais des services de police ainsi que de mettre à la disposition de ces centres de consultation les ressources nécessaires pour contacter les victimes et les personnes auteures de violence (modèles proactifs).

La police est obligée, de par la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI)32 et de
par le code de procédure pénale (CPP)33, d'informer les personnes concernées qu'il existe une aide aux victimes et que les données peuvent être transmises pour autant que la victime soit d'accord ou qu'elle ne s'y oppose pas; les services de consultation sont de leur côté obligés de contacter les personnes concernées après que la police leur a signalé un cas. L'application de la LAVI est du ressort des cantons. L'OFJ informera la Conférence suisse des offices de liaison de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (CSOL-LAVI) sur les recommandations des auteures de l'étude. Dans le cadre de l'évaluation de la nouvelle LAVI et du CPP, l'OFJ portera une attention appropriée à l'application cantonale des prescriptions fédérales.

30

31 32 33

Il faudra attendre 2013 pour avoir des résultats qui permettront de faire le lien entre les données de la Statistique policière de la criminalité et celles de la Statistique des condamnations pénales. A partir de cette date, il sera possible de suivre les cas de violence domestique depuis le rapport de police jusqu'à la condamnation.

RS 142.201 RS 312.5 FF 2007 6583

3637

Mesures planifiées par la Confédération B)

Evaluer l'application de l'art. 28b CC (y compris celle de l'art. 55a CP) (OFJ)

C)

Concrétiser les critères de réglementation des cas de rigueur (art. 31 OASA) dans les cas de violence domestique (art. 50, al. 1, let. b, LEtr) (ODM)

D)

Examiner la transmission des données aux termes des art. 8 LAVI et 305 CPP dans le cadre de l'évaluation de la LAVI révisée et du nouveau CPP (OFJ)

E)

Travaux préparatoires en vue d'une enquête sur l'application des peines pécuniaires dans les cas de violence domestique (OFS)

4.2.2

Réseautage et coopération

Les auteures considèrent le réseautage et la coopération entre les différentes actrices et les différents acteurs comme primordiaux pour assurer une prévention efficace et fonctionnelle dans la lutte contre la violence conjugale. Elles plaident pour l'encouragement et le renforcement aussi bien des réseaux nationaux, notamment au-delà des frontières linguistiques, que des conférences cantonales de coordination (tables rondes).

Au niveau national, le Service de lutte contre la violence (SLV) du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG) a entrepris l'édification de ces structures de coopération. Il organise chaque année depuis 2004 une rencontre nationale de toutes les institutions qui proposent des conseils ou des programmes de lutte contre la violence destinés aux personnes auteures de violence. Depuis 2003, ce même service participe à la Conférence des services d'intervention de Suisse alémanique et il organise, depuis 2007, une rencontre nationale des services d'intervention et de lutte contre la violence domestique. En 2007, il a aussi soutenu la création de la Conférence latine contre la violence domestique, une réunion des services d'intervention et de lutte contre la violence domestique de Suisse romande et du Tessin. Il s'engage aussi dans l'information et la documentation des activités des diverses actrices et des divers acteurs. Il a ainsi publié en 2006 un rapport national sur les mesures juridiques existant dans les cantons34 et, en 2008, un état des lieux sur le travail avec les personnes auteures de violence.35 Divers offices et services de l'administration fédérale s'occupent également des nombreuses facettes de la violence domestique. Le Service de lutte contre la violence domestique du BFEG va mettre sur pied un groupe de travail interdépartemental pour renforcer la coordination et suivre l'application des mesures planifiées; ce

34 35

Violence domestique: analyse juridique des mesures cantonales, publiée par le Bureau de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG), Berne 2006.

Travail de consultation et programmes de lutte contre la violence destinés aux auteur-e-s de violences conjugales en Suisse, édité par le Bureau de l'égalité entre femmes et hommes, Berne 2008.

3638

groupe de travail assurera l'information mutuelle sur les affaires en cours et discutera des mesures qui s'imposent.

Dans son rapport «Les jeunes et la violence», le Conseil fédéral examinera des propositions relatives à la collaboration entre la Confédération, les cantons, les communes et les organisations privées en matière de prévention de la violence des jeunes. Cet aspect peut se révéler significatif pour lutter efficacement contre la violence dans les relations de couple.

Mesures planifiées par la Confédération F)

Poursuivre les activités de coordination dans le domaine des services cantonaux d'intervention et du travail avec les personnes auteures de violence (BFEG)

G)

Recommandation de l'OFJ à la Conférence suisse des offices de liaison LAVI (CSOL-LAVI) d'examiner les possibilités de réseautage et de les soutenir.

H)

Renforcement de la coordination au niveau national en mettant sur pied un groupe de travail interdépartemental (BFEG)

4.2.3

Protection des personnes concernées

Les auteures de l'étude estiment très important que tous les cantons disposent d'un nombre suffisant d'offres pour les victimes directes et indirectes et pour les personnes menacées de violence domestique avec des mesures qui répondent à leurs besoins. Ceci n'est pas encore le cas partout, notamment en matière d'accompagnement à long terme. Selon les auteures de l'étude, il faut particulièrement veiller à un accompagnement des migrantes et des enfants.

L'offre en consultation, accompagnement et hébergement des victimes et des personnes menacées de violence est en principe du ressort des cantons. La LAVI révisée prévoit que les cantons tiennent compte des besoins des différentes catégories de victimes lors de la mise sur pied de centres de consultation. L'OFJ portera, dans le cadre de l'évaluation de la nouvelle loi, une attention appropriée à l'application des prescriptions du droit fédéral.

L'ODM examine actuellement si et comment la thématique de la violence (domestique) peut être mieux ancrée dans la formation continue des spécialistes de la migration.

Il examine également le moyen de thématiser la violence domestique dans la mise en oeuvre de son mandat d'information (art. 56 LEtr), notamment quand il s'agit de mariages forcés. A ce propos, on examine actuellement si la diffusion de l'information sur les mariages forcés pourrait être confiée à des organisations privées, qui seraient alors soutenues financièrement par l'ODM.

L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) soutient différentes activités et divers projets dans le domaine de la prévention de la maltraitance envers les enfants.

Il participe depuis 2008, dans le cadre d'un partenariat d'organisations publiques et privées, à la phase préparatoire d'un programme national pour la protection de 3639

l'enfant, qui devrait être lancé en 2010. La thématique des violences domestiques en fait aussi partie.

Mesures planifiées par la Confédération I)

Examiner dans le cadre de l'évaluation de la LAVI si les offres LAVI recouvrent bien les besoins des groupes de victimes (OFJ)

J)

Intégrer le thème de la violence domestique dans les cours de formation initiale et de perfectionnement des spécialistes de la migration (ODM)

K)

Thématiser la violence domestique dans le cadre de l'information des étrangères et des étrangers sur leurs droits et leurs obligations (ODM)

L)

Poursuivre le soutien des activités de prévention de la maltraitance envers les enfants (OFAS)

4.2.4

Offres à l'intention des personnes auteures de violence

Depuis un certain temps, divers groupes professionnels veillent de manière renforcée à ce qu'un comportement violent ne se reproduise pas; pour cela ils s'occupent particulièrement des personnes qui ont commis un acte de violence ou qui sont susceptibles d'en commettre un. Presque tous les cantons ont maintenant des offres volontaires ainsi que des programmes d'apprentissage adéquats, et ils peuvent contraindre les personnes auteures de violence à les suivre. Les chercheuses jugent primordial que les offres volontaires soient faciles d'accès dans l'ensemble du territoire et que les programmes socio-éducatifs obligatoires soient développés et mieux mis à profit. Elles attachent une grande importance à la création d'offres pour les personnes allophones auteures de violence.

Le rapport du BFEG sur les offres pour personnes auteures de violence domestique36 montre que de telles institutions n'existent pas dans toutes les régions et que les offres ne couvrent pas tous les besoins. Les bases légales et le financement de ces programmes diffèrent fortement d'un canton à l'autre; en général, ils sont soutenus par des conventions de prestation des pouvoirs publics et/ou par des dons privés ou des contributions de tiers, rarement par un financement fondé sur une loi.

La délivrance d'une autorisation de séjour ou sa prolongation pour les étrangères et étrangers d'un Etat tiers peut être liée à la fréquentation d'un cours de langue ou d'un cours d'intégration. Cette obligation peut être consignée dans une convention d'intégration (art. 54 LEtr). L'ODM recommande par ailleurs de conclure des conventions d'intégration dans le cas de personnes résidentes d'Etats tiers qui présentent un déficit en matière d'intégration. Si elles manifestent un comportement violent, elles pourront être astreintes à suivre une offre en matière d'intégration.

Toutefois, la décision d'application de cette mesure est du ressort des cantons.

36

Voir note en bas de page 35.

3640

Mesures planifiées par la Confédération M)

4.2.5

Examiner si l'on peut mentionner des programmes antiviolence pour personnes d'origine étrangère auteures de violence dans le cadre des recommandations aux cantons (ODM)

Mesures de formation initiale et de perfectionnement

Divers groupes professionnels de la santé, de la formation et de l'aide sociale participent à la prévention et au dépistage précoce de la violence et des situations à risque. Pour remplir leurs tâches efficacement, ils doivent acquérir les compétences nécessaires en suivant une formation initiale et de perfectionnement. Selon les auteures de l'étude, le rôle du personnel qualifié de la santé est prépondérant.

L'OFJ et le BFEG examinent si, et avec quels partenaires, ils pourraient proposer aux juges des cours de perfectionnement sur le thème de la violence domestique.

L'OFJ participe financièrement non seulement à la formation dans le cadre de l'aide aux victimes de violence, mais notamment aussi au perfectionnement des professionnelles et professionnels dans le domaine de la violence domestique. Il subventionne par exemple une filière de perfectionnement à l'Université de Zurich qui traite de l'intervention et de la prévention lors de sévices sexuels.

Mesures planifiées par la Confédération N)

Examiner les offres de perfectionnement pour les juges (OFJ et BFEG)

O)

Poursuivre la participation financière dans le domaine de l'aide aux victimes de violence (OFJ)

4.2.6

Information, sensibilisation et relations publiques

Le Conseil fédéral partage l'avis des chercheuses qui considèrent que l'information et la mise au courant de la population sur le thème de la violence domestique sont des tâches permanentes et que la Confédération a un rôle important à jouer dans ce contexte.

L'OFAS a participé financièrement à plusieurs projets et campagnes d'information et de sensibilisation en rapport avec la violence ou les abus sexuels envers les enfants ainsi qu'à la promotion de l'éducation non violente. Ces projets, grand public ou ciblés sur des groupes bien précis (p. ex. les écoles) ont été réalisés par des organisations non gouvernementales.

Le Programme National Alcool (PNA) 2008 à 201237 adopté par le Conseil fédéral le 18.6.2008 expose les objectifs et les stratégies de la politique suisse en matière d'alcool. Il souligne que la consommation d'alcool fonctionne comme un catalyseur 37

www.alkohol.bag.admin.ch

3641

qui augmente fortement le risque de violence domestique.38 L'objectif E1 a de ce fait été inclus dans le programme: «les conflits conjugaux et familiaux ainsi que les violences domestiques liés à l'alcool ont notablement diminué.» Dans le domaine de la réduction des dommages dus à l'alcool sur les individus et sur la vie sociale, la protection des proches contre les conséquences négatives de la consommation d'alcool se trouve au centre des préoccupations. L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) coordonne le déroulement du programme.

Dès 2010, les cas de violence domestique enregistrés par la police seront intégrés dans la nouvelle statistique policière de la criminalité (SPC) publiée annuellement.

L'OFS envisage par ailleurs de nouvelles publications spéciales pour sensibiliser le public à ces problèmes.

Dans le cadre de son mandat d'information et en collaboration avec la Commission pour les questions de migration, l'ODM examine des mesures spécifiques pour atteindre les migrantes et les migrants et promouvoir des projets adaptés à leurs besoins (p. ex. cours de prévention de la violence).

En application du mandat d'information dont l'ODM est chargé en vertu de l'art. 56 LEtr, les étrangères et les étrangers doivent être informés de notre ordre juridique et des conséquences qu'entraîne son inobservation. Ils doivent être mis au courant des normes et des règles fondamentales à respecter pour participer à la vie sociale, économique et culturelle du pays. Ces informations peuvent comprendre des thèmes tels que l'interdiction des mariages forcés ou la violence domestique.

Mesures planifiées par la Confédération P)

Développer et mettre en oeuvre des mesures pour protéger les proches contre des actes de violence liés à l'alcool dans le cadre du Programme National Alcool 2008 à 2012 (OFSP)

Q)

Publier des analyses de cas enregistrés par la police basées sur la SPC (OFS)

R)

Examiner les offres spécifiques pour migrantes et migrants (ODM)

4.2.7

Combler les lacunes de la recherche

Ces dernières années, divers projets de recherche ont été initiés sur les causes, l'étendue et les conséquences de la violence domestique.39 Selon les auteures de l'étude, il manque tout particulièrement des études qualitatives sur les causes et le déclenchement d'actes de violence domestique, des études de prévalence qui englobent toutes les formes de violence dans les relations de couple ou encore des études 38

39

Plusieurs études dégagent des relations causales entre la consommation d'alcool et l'émergence de violence. Babor T. et al. (2003): Alcohol: No Ordinary Commodity.

Research and Public Policy. Oxford: Oxford University Press. Gmel G., Kuendig H., Kuntsche S., Daeppen J.-B. (2007): Alkohol und Verletzungen; Traumatismes dus à l'alcool: Une étude aux départements des urgences du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV). Rapport de recherche. Lausanne: SFA. www.sfa-ispa.ch.

Voir note en bas de page 27, études mentionnées telles que celle de Godenzi Alberto (1993): Gewalt im sozialen Nahraum. Bâle: Helbling & Lichtenhahn.

3642

sur les coûts de ces formes de violence. Elles recommandent en outre de renforcer les évaluations de suivi visant à optimiser l'application des dispositions légales de protection contre la violence et d'harmoniser les statistiques policières de la criminalité.

La révision en cours de la statistique policière de la criminalité remplit déjà en bonne partie ce dernier point. Elle offre une harmonisation des statistiques d'infractions dans le domaine domestique et permet de recenser le nombre d'interventions de la police sans dépôt de plainte. Les cantons ne sont pas tenus de recenser les données des interventions policières. Toutefois, ils devraient saisir les cas de violence domestique dans leur canton pour que l'on dispose d'une statistique globale à ce sujet.

Le BFEG effectuera, conjointement avec l'OFS et d'autres offices (OFSP, SECO), une étude sur les coûts occasionnés par la violence dans les relations de couple (en particulier les conséquences sur l'économie, la santé et les assurances sociales).

Il établira en outre un rapport sur les lacunes de la recherche dans le domaine de la violence domestique et adressera les résultats de son enquête aux instituts de recherche intéressés.

En outre, une partie des besoins de la recherche, dont l'exploration de la dimension sexospécifique de la violence dans les relations de couple, ainsi qu'une étude complète de prévalence pourraient être réalisées dans le cadre de l'encouragement de projets de recherche du Fonds national suisse (recherche fondamentale libre).

Une analyse sur le thème de la violence dans le couple peut aussi être envisagée dans le cadre du programme national de recherche 60 «Egalité entre hommes et femmes». La direction du programme sélectionne les projets à soutenir et les soumet au Conseil de la recherche du FNS qui décide.

Mesures planifiées par la Confédération S)

Réaliser une étude sur les coûts économiques occasionnés par la violence dans les relations de couple (BFEG en coopération avec d'autres offices)

T)

Réaliser une étude sur les lacunes de la recherche en matière de violence domestique, prise de contact ciblée avec des instituts de recherche (BFEG)

4.3

Conséquences financières pour la Confédération et les cantons

Le Conseil fédéral veut financer la mise en oeuvre des mesures mentionnées dans le rapport en fixant des priorités en fonction des moyens alloués dans le budget et le plan financier. Par conséquent, la réalisation des mesures n'alourdira pas le budget de la Confédération.

Les mesures mentionnées n'entraîneront pas de coûts supplémentaires pour les cantons.

3643

4.4

Tableau synoptique des mesures planifiées par les offices concernés

Mesures

A) B) C) D) E) F) G) H) I) J) K) L) M) N) O) P) Q) R) S)

T)

3644

Responsables

Mise à disposition de connaissances spécifiques et de contacts avec des expertes et des experts pour exécuter les mesures planifiées par les offices et services de l'administration fédérale Evaluer l'application de l'art. 28b CC (y compris celle de l'art. 55a CP) Concrétiser les critères de réglementation des cas de rigueur (art. 31 OASA) dans les cas de violence domestique (art. 50, al. 1, let. b, LEtr) Examiner la transmission des données aux termes des art. 8 LAVI et 305 CP dans le cadre de l'évaluation de la LAVI révisée et du nouveau CPP Travaux préparatoires en vue d'une enquête sur l'application des peines pécuniaires dans les cas de violence domestique Poursuivre les activités de coordination dans le domaine des services cantonaux d'intervention et du travail avec les personnes auteures de violence Recommandation de l'OFJ à la Conférence suisse des offices de liaison LAVI (CSOL-LAVI) d'examiner les possibilités de réseautage et de les soutenir Renforcement de la coordination au niveau national en mettant sur pied un groupe de travail interdépartemental Examiner dans le cadre de l'évaluation de la LAVI si les offres LAVI recouvrent bien les besoins des groupes de victimes Intégrer le thème de la violence domestique dans les cours de formation initiale et de perfectionnement des spécialistes de la migration Thématiser la violence domestique dans le cadre de l'information des étrangères et des étrangers sur leurs droits et leurs obligations Poursuivre le soutien des activités de prévention de la maltraitance envers les enfants Examiner si l'on peut mentionner des programmes antiviolence pour personnes d'origine étrangère auteures de violence dans le cadre des recommandations aux cantons Examiner les offres de perfectionnement pour les juges Poursuivre la participation financière dans le domaine de l'aide aux victimes de violence Développer et mettre en oeuvre des mesures pour protéger les proches contre des actes de violence liés à l'alcool dans le cadre du Programme National Alcool 2008 à 2012 Publier des analyses basées de cas enregistrés par la police basées sur la SPC Examiner les offres spécifiques pour migrantes et migrants Réaliser une étude sur les coûts économiques occasionnés par la violence dans les relations de couple Réaliser une étude sur les lacunes de la recherche en matière de violence domestique, prise de contact ciblée avec des instituts de recherche

BFEG OFJ ODM OFJ OFS BFEG OFJ BFEG OFJ ODM ODM OFAS ODM OFJ et BFEG OFJ OFSP OFS ODM BFEG en coop. avec d'autres offices BFEG

5

Besoin d'agir et bonnes pratiques dans les cantons

Les auteures de l'étude ont analysé la situation dans tous les cantons au moyen d'enquêtes, d'analyses de documents et d'interviews avec des expertes et des experts et ont procédé à des analyses approfondies dans six cantons (Bâle-Campagne, Genève, Lucerne, Tessin, Vaud et Zurich). Sur cette base, elles ont formulé des recommandations à l'attention de la Confédération (cf. ch. précédent) d'une part, et des cantons d'autre part.

Les recommandations les plus importantes pour les cantons sont énumérées ci-après et des propositions de solutions sont exposées sur la based'exemples puisés dans ces six cantons.40

5.1

Bases légales et leur application

Transmission des données et consultation proactive Les auteures recommandent d'examiner et d'appliquer les modèles dits proactifs de transmission automatique des données des victimes et des personnes auteures de violence aux centres de consultation pour assurer une prise de contact systématique avec les personnes concernées.

Le canton de Zurich dispose d'un modèle proactif depuis l'introduction de la loi cantonale de protection contre la violence le 1er avril 2007. Les services de consultation pour les victimes de violence et ceux qui s'adressent aux personnes auteures de violence reçoivent immédiatement une copie de la décision ordonnant des mesures de protection prise dans le cadre d'une intervention policière.

Ils contactent les personnes concernées dans les trois jours qui suivent et leur proposent une consultation. La première année, 90 % des victimes et 28 % des hommes ainsi que 54 % des femmes ayant commis des actes de violence ont eu recours à cette offre.41

5.2

Assurer le réseautage et la coopération

Encouragement et institutionnalisation des structures de réseautage et de coopération Tous les cantons disposent aujourd'hui de structures de coopération (commissions ou tables rondes) et la plupart d'entre eux ont aussi un service spécialisé qui coordonne les activités des différents acteurs. Les auteures recommandent aux cantons qui n'en disposent pas encore de les introduire, de mettre à disposition des ressources en suffisance et d'institutionnaliser ces structures.

40 41

Le choix des exemples de bonnes pratiques rentenu ne signifie nullement que d'autres cantons n'ont pas pris des mesures similaires.

Autres informations sous www.ist.zh.ch

3645

Le projet lucernois d'intervention contre la violence domestique (Luzerner Interventionsprojekt gegen häusliche Gewalt) LÎP42 a été lancé en 2001. Limité à deux ans à l'origine, il a été prolongé et rattaché aux services pénitentiaires et de probation en 2006, doté d'un poste de coordination à 30 %. Au début, la table ronde était l'élément principal; par la suite, divers groupes de travail traitant des problèmes des personnes auteures de violence, des victimes, de la migration, des relations publiques et de l'introduction de la norme d'expulsion du domicile l'ont complétée. La coopération fonctionne bien maintenant et la table ronde dirigée par les services centraux du Département de justice et police ne se réunit plus que deux fois par an. Le groupe de travail «assurance de la qualité», créé lors de l'introduction de la norme sur l'expulsion du domicile, se réunit de quatre à six fois par an et discute de questions charnières de façon constructive et ouverte.

5.3

Protéger les victimes directes et indirectes

Mise à disposition d'une offre suffisante pour les femmes et les enfants et prise en compte des intérêts des enfants touchés indirectement par la violence dans les relations de couple Dans le cadre de la protection des victimes, il faut garantir une offre diversifiée et aussi généralisée que possible aux victimes de violence domestique. Les auteures recommandent à tous les cantons de mettre à la disposition des femmes et des enfants des offres en suffisance. Il faut en outre assurer un accompagnement à long terme des victimes après les crises et tenir compte des intérêts des enfants touchés indirectement par la violence dans le couple.

La Maison d'accueil pour femmes des deux Bâles est soutenue financièrement par Bâle-Campagne et Bâle-Ville selon la loi pour maisons d'accueil pour femmes. Elle peut accueillir de 8 à 10 femmes et leurs enfants. Ouverte 24 heures sur 24, elle garantit protection, toit et conseil aux victimes de violence. En 2007, les offres de consultation selon la LAVI des deux cantons, y compris celle de la maison d'accueil, ont été réunies sous un même toit43. Des conventions de prestations existent entre les deux cantons et l'association d'aide aux victimes, qui couvrent quatre domaines:

42 43

­

«limit» pour les femmes touchées par la violence, les femmes y reçoivent des conseils après avoir été accueillies dans une maison d'accueil pour femmes ou avoir subi un traumatisme.

­

«triangel» conseille les enfants et les jeunes (jusqu'à 16 ou 18 ans), s'occupe aussi des enfants qui ont été témoins de violence domestique.

www.lu.ch/lip www.opferhilfe-bb.ch

3646

­

«männer plus» pour les hommes et les jeunes dès 16 ans qui ont été victimes de violence

­

«bo» pour les autres victimes d'infractions.

5.4

Offres à l'intention des personnes auteures de violence

Proposer des mesures adéquates et facilement accessibles Des mesures doivent être prises pour éviter d'en arriver à la violence en encourageant les personnes concernées à modifier leur comportement. Les auteures considèrent que tous les cantons devraient avoir des offres aussi bien sur le plan volontaire qu'obligatoire et prendre des mesures pour que les personnes auteures de violence y aient plus fréquemment recours.

L'Association Vires44, créée en 1994 à Genève, propose une offre thérapeutique pour les personnes qui exercent la violence domestique ou dans leur relation de couple. A l'heure actuelle, elle organise des thérapies volontaires et des thérapies imposées par décision judiciaire (individuelles ou collectives). En 2007, Vires a soigné 94 hommes et 2 femmes dont 34 sur ordonnance judiciaire. Les thérapies imposées ont augmenté, les juges reçoivent une information spécifique sur l'existence de ce modèle. En outre, Vires propose depuis 2006 un hébergement pour les hommes auteurs de violence. En 2007, 19 hommes ont été hébergés, dont la moitié suite à une expulsion du domicile.

L'Association Face à Face45 a été créée en 2001; elle propose des thérapies individuelles et collectives aux femmes et aux adolescentes qui exercent des violences dans le milieu familial ou professionnel. En 2007, elle a dispensé ses services à 19 femmes et adolescentes.

5.5

Formation initiale et perfectionnement des catégories professionnelles concernées

Formation du personnel qualifié de la santé Le dépistage précoce et l'intervention rapide sont des éléments essentiels de prévention, phases dans lesquelles le personnel qualifié de la santé tient un rôle central.

Selon les auteures, les organes cantonaux de la santé devraient endosser plus de responsabilités.

44 45

www.vires.ch www.face-a-face.info

3647

En 2002, le Bureau de l'égalité de la ville de Zurich et la clinique et maternité Inselhof Triemli à Zurich ont lancé conjointement le projet «Violence domestique ­ reconnaître et réagir». Une enquête représentative a eu lieu auprès des patientes de la clinique; le personnel médical de la clinique a suivi une formation interne et des lignes directrices décrivant la procédure à suivre en présence de cas concrets ont été élaborées. Celles-ci sont appliquées concrètement depuis 2006 par la clinique. L'autre volet du projet est constitué par le manuel «Reconnaître la violence domestique et bien réagir» (Häusliche Gewalt erkennen und richtig reagieren)46 pour les professionnels de la santé externes à l'hôpital (p.ex.

les cabinets médicaux, psychologues, services de soins extra-hospitaliers ou centres de consultation). Des cours de perfectionnement pour le personnel qualifié de la santé sont régulièrement organisés depuis 2007 avec le Centre de formation «Violence domestique» de Lucerne.

Un projet similaire a été mis sur pied au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) à Lausanne. Un protocole de dépistage et d'intervention auprès des adultes victimes de violence a été élaboré (DOTIP) et mis en oeuvre entre 2000 et 2006 dans le cadre d'un programme interdisciplinaire de dépistage et de prise en charge d'adultes victimes de violence. Le protocole DOTIP inclut plusieurs démarches: détecter la violence, établir le constat médical de coups et blessures, dispenser les soins médicaux requis, informer la victime de ses droits, assurer sa sécurité et organiser le suivi. Les personnels concernés sont formés et conseillés par des spécialistes.

5.6

Information et sensibilisation en permanence

Prévention primaire en milieu scolaire Les cantons tiennent un rôle important dans l'information et la sensibilisation en milieu scolaire. Les auteures recommandent d'intensifier la prévention précoce dans les écoles (en parlant des clichés concernant les rôles femme-homme, de la violence domestique et des conflits dans les relations de couple).

Le Bureau de l'égalité du canton de Vaud a lancé le projet «L'école de l'égalité» et recueilli avec des enseignantes et enseignants de Suisse romande du matériel didactique qui permet de thématiser l'égalité entre femme et homme pendant tout le cursus scolaire.47 Ce support didactique doit promouvoir le respect mutuel entre femmes et hommes. Ce matériel a été distribué à l'ensemble du corps enseignant du canton de Vaud et mis à la disposition des autres cantons romands. En outre la question de la violence a été intégrée dans le programme d'éducation sexuelle.

46 47

Le Bureau de l'égalité de la ville de Zurich/la clinique et maternité Inselhof Triemli à Zurich/Association Inselhof Triemli, Zurich (2007).

www.vd.ch/fr/organisation/services/bureau-de-legalite/projets/lecole-de-legalite/

3648

Information des migrantes et aux migrants Les migrantes et les migrants doivent être abordés et informés de façon ciblée pour leur faire connaître les réglementations légales et les offres de soutien en ce qui concerne la violence domestique. Les auteures recommandent de développer du matériel d'information et le travail de sensibilisation avec les communautés de migrantes et migrants concernées.

Entre 2003 et 2006, le Bureau de l'égalité de Genève a mené une campagne de sensibilisation auprès des communautés étrangères sur le thème de la violence dans le couple et la violence sexuelle.48 Des brochures et diverses publications ont été rédigées dans les langues les plus répandues et distribuées dans ces groupes cibles. D'autre part, des femmes de ces communautés ont pris le relais après avoir suivi une formation ciblée et poursuivent ainsi la sensibilisation des membres de leur communauté.

5.7

Combler les lacunes de la recherche

Au niveau cantonal, il s'agit surtout d'évaluer avec soin les mesures prises et de les optimiser sur la base des constatations faites. Les auteures recommandent de multiplier ces évaluations d'accompagnement effectuées en observant l'application des dispositions cantonales et de réaliser des études comparatives portant sur l'efficacité des différentes mesures.

Les cantons de Bâle-Campagne et de Bâle-Ville ont fait évaluer plusieurs projets d'intervention par des expertes et experts externes.49 Pour l'introduction de l'expulsion policière, le canton de Bâle-Campagne s'est appuyé sur les expériences faites dans les cantons de St-Gall et d'Appenzell Rhodes-Extérieures et a pu, grâce à un léger report de mise en vigueur, profiter de ces expériences. Le programme d'aprentissage pilote destiné aux hommes ayant recours à la violence dans le contexte familial, conjointement mis sur pied en 2001 par le projet d'intervention «Halt Gewalt Basel-Stadt» et le service d'intervention de BâleCampagne, a lui aussi été évalué.50 Actuellement, le service d'intervention de Bâle-Campagne, en collaboration avec les Universités de Bâle et de Berne, pro-

48 49

50

www.geneve.ch/egalite/violence/violence-conjugale/?rubrique=campagnesmigrantes%20 Gloor Daniela, Hanna Meier, Pascale Baeriswyl et Andrea Büchler (2000): Interventionsprojekte gegen Gewalt in Ehe und Partnerschaft. Grundlagen und Evaluation zum Pilotprojekt Halt-Gewalt. Berne: Haupt.

Gloor Daniela et Hanna Meier (2002): Erste Evaluation des Pilotprojekts «Soziales Trainingsprogramm für gewaltausübende Männer», sur mandat du Projet d'intervention bâlois contre la violence conjugale et dans les relations de couple «Halt-Gewalt» et du Service d'intervention contre la violence domestique du canton de Bâle-Campagne, Bâle.

Gloor Daniela et Hanna Meier (2003): Zweite Evaluation des Pilotprojekts «Soziales Trainingsprogramm für gewaltausübende Männer», sur mandat du Projet d'intervention bâlois contre la violence conjugale et dans les relations de couple «Halt-Gewalt» et du Service d'intervention contre la violence domestique du canton de Bâle-Campagne, Bâle.

3649

cède à l'évaluation de la directive policière d'expulsion du domicile compte tenu de ses objectifs centraux (protection des victimes, interruption des actes de violence, conseil aux personnes concernées).

3650

Annexe

Liste des interventions parlementaires sur le thème de la violence envers les femmes et dans l'environnement social proche 1985 à 2008 Titre

Type

No

Violence structurelle et violence directe à l'égard des femmes Traitement pour les personnes étrangères victimes de violences domestiques Non aux abus de l'hospitalité

Interpellation

08.3791 Frösch Therese

Question

08.1102 John-Calame Francine 08.449 Groupe radicallibéral 08.5071 Steiert JeanFrançois

Violence domestique contre des migrantes.

Décision défavorable aux victimes en cas de doute?

Commission fédérale contre le racisme et violence domestique Pour que les droits et les obligations attachés au mariage soient connus et compris de tous Participation de la Suisse à Daphné III, programme de l'UE de prévention de la violence Loi sur les étrangers et violence conjugale

Initiative parl.

Question

Auteur/auteure

Question

07.5164 Schlüer Ulrich

Motion

07.3116 Haller Ursula

Interpellation

06.3869 Schenker Silvia

Interpellation

06.3781 Menétrey-Savary Anne-Catherine 06.3749 Haller Ursula

Etude scientifique sur les drogues et les actes de violence criminels Campagne contre la violence à l'égard des femmes Suivi obligatoire des délinquants sexuels

Interpellation

Mieux protéger les enfants contre la maltraitance Violence contre les enfants Mauvais traitements envers les enfants.

Création d'un organe de prévention Identifier les causes de la violence et engager la lutte contre ce phénomène Combattre la violence dans l'environnement social proche Loi sur l'aide aux victimes d'infractions.

Allonger le délai de péremption La violence, une affaire d'hommes Violence à l'encontre des femmes. Mesures Soutien des maisons pour les femmes victimes de violence La violence exercée par des organismes privés comme cause de conflit et d'affaiblissement des Etats

Initiative parl.

Motion

Postulat

06.3725 Maria RothBernasconi 06.481 Groupe de l'Union démocratique du Centre 06.419 Vermot-Mangold Ruth-Gaby 05.3882 Savary Géraldine 05.3846 Vermot-Mangold Ruth-Gaby 05.3694 Stump Doris

Interpellation

05.3412 Stump Doris

Motion Question Question Motion

05.3409 Markwalder Bär Christa 04.5039 Lang Josef 04.5023 Hollenstein Pia 03.3114 Goll Christine

Interpellation

02.3727 Hess Walter

Initiative parl.

Motion Motion

3651

Titre

Type

No

Lutte contre les abus sexuels envers les enfants. Davantage de moyens Statistique des crimes et délits par les armes L'arme et la munition de guerre à domicile Protection contre la violence dans la famille et dans le couple Mesures destinées à lutter contre la violence à l'encontre des femmes

Motion

02.3716 Aeppli Wartmann Regine 02.3441 Berger Michèle 02.3028 Berger Michèle 00.419 Vermot-Mangold Ruth-Gaby 00.3221 Commission 00.016-CN (00.016-CN) 00.3055 Vermot-Mangold Ruth-Gaby 98.1178 Hubmann Vreni 96.465 von Felten Margrith

Postulat Interpellation Initiative parl.

Motion

Traite des femmes. Programme de protection pour les victimes Encourager les femmes Classification parmi les infractions poursuivies d'office des actes de violence à caractère sexuel commis sur un conjoint. Modification des articles 189 et 190 CP.

Classification parmi les infractions poursuivies d'office des actes de violence commis sur des femmes. Révision de l'article 123 CP.

Droits spécifiques accordés aux migrantes Exploitation sexuelle des enfants

Motion

Campagne d'information contre la violence quotidienne dans le milieu social immédiat

Postulat

Disposition relative à la protection de l'enfance dans la Constitution fédérale

Motion

Concept de prévention contre la violence au sein de la famille

Postulat

Disposition relative à la protection de l'enfance dans la Constitution fédérale

Postulat

Interdiction légale des châtiments corporels et des traitements dégradants envers les enfants

Motion

Amélioration de la protection des victimes d'abus sexuels, en particulier dans les cas d'exploitation sexuelle des enfants

Postulat

Exploitation sexuelle des enfants.

Meilleure protection

Initiative parl.

3652

Question ord.

Initiative parl.

Auteur/auteure

Initiative parl.

96.464

von Felten Margrith

Initiative parl.

Postulat

96.461 Goll Christine 96.3398 Hochreutener Norbert 96.3180 Commission des affaires juridiques CN 93.034. Minorité von Felten) 96.3179 Commission des affaires juridiques CN 93.034 (CJ-CN 93.034) 96.3178 Commission des affaires juridiques CN 93.034 (CJ-CN 93.034) 96.3177 Commission des affaires juridiques CN 93.034 (CJ-CN 93.034) 96.3176 Commission des affaires juridiques CN 93.034 (CJ-CN 93.034) 96.3199 Commission des affaires juridiques CN 94.441 (CJ-CN 94.441) 94.441 Goll Christine

Titre

Type

No

Droit du mariage. Jouissance du domicile

Motion

Droit pénal et enfancevictime d'abus sexuels Soutien des maisons pour femmes battues Cours d'autodéfense pour jeunes filles Code pénal. Révision de l'article 187 (viol)

Motion Motion Motion Motion

94.3294 von Felten Margrith 94.3210 Goll Christine 93.3593 Goll Christine 88.734 Nabholz Lili 85.544 Gurtner Barbara

Auteur/auteure

3653

3654