19.081 Message concernant la révision du code civil suisse (Changement de sexe à l'état civil) du 6 décembre 2019

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, le projet de révision du code civil (Changement de sexe à l'état civil).

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

6 décembre 2019

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé Le présent projet tend à simplifier le changement de sexe à l'état civil et, corollairement, de prénom des personnes transgenres ou présentant une variation du développement sexuel, en remplaçant les procédures actuelles par une déclaration faite devant l'officier de l'état civil, sans interventions médicales ou d'autres conditions préalables.

Contexte Dans les trois jours à compter de sa naissance, chaque enfant doit être annoncé à l'état civil avec ses nom(s) et prénom(s), sa filiation et son sexe. Dans la pratique, ce délai est appliqué avec souplesse lorsque le personnel médical n'est pas en mesure de déterminer le sexe du nouveau-né présentant une variation du développement sexuel. La modification de l'inscription du sexe et du prénom exige toutefois selon les dispositions en vigueur une procédure formelle de rectification.

Les personnes transgenres sont également confrontées à des difficultés. Jusqu'à récemment, elles ne pouvaient faire reconnaître leur identité sexuelle qu'après avoir divorcé et dû se soumettre à des interventions chirurgicales conduisant à leur stérilité et à la construction de nouveaux organes génitaux. Même si de telles exigences sont aujourd'hui réprouvées, des obstacles importants subsistent du fait de l'absence de dispositions légales claires. Selon la jurisprudence, la reconnaissance juridique du changement de sexe nécessite une action portée devant un tribunal. Disparates, ces procédures sont considérées comme inutilement longues et coûteuses.

Contenu du projet La simplification de la procédure de changement de sexe et de prénom a été largement soutenue lors de la consultation sur l'avant-projet. En conséquence, la proposition est conforme aux principes énoncés dans l'avant-projet. En particulier, la compétence confiée à l'officier de l'état civil est maintenue même si une partie des cantons auraient préféré une procédure analogue à celle du changement de nom (cf. art. 30 CC).

La réforme est basée sur l'autodétermination, principe qui a été approuvé lors de la procédure de consultation. Nonobstant certaines critiques formulées quant à l'exigence du consentement du représentant légal, notamment pour les personnes mineures capables de discernement, le présent projet s'en tient à cette exigence afin d'assurer la protection due aux personnes particulièrement
vulnérables.

Le projet laisse inchangés les liens de famille (mariage, partenariat enregistré, parenté et filiation) et ne remet pas en cause le caractère binaire des sexes (masculin / féminin). Il est renoncé en particulier à introduire une troisième option de genre (question qui fera l'objet d'un rapport séparé du Conseil fédéral dans le cadre du traitement des postulats Arslan 17.4121 et Ruiz 17.4185). A noter enfin que les déclarations de changement de sexe abusives ou faites à la légère pourront être refusées, laissées dénuées d'effet et sanctionnées.

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Table des matières Condensé

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Contexte 1.1 Enfants et adultes présentant une variation du développement sexuel 1.2 Personnes transgenres

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Grandes lignes de la révision

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Appréciation de la solution retenue 3.1 Autorité compétente 3.2 Maintien du système binaire (masculin / féminin) 3.3 Loi sur la stérilisation 3.4 Loi sur les documents d'identité

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Comparaison avec le droit étranger, notamment européen 4.1 Droit international 4.1.1 Nations Unies (ONU) 4.1.2 Commission internationale de l'état civil (CIEC) 4.2 Rapport avec le droit européen 4.2.1 Arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme 4.2.2 Travaux du Conseil de l'Europe 4.2.3 Union européenne 4.3 Droit comparé 4.3.1 Malte 4.3.2 Allemagne 4.3.3 Autriche 4.3.4 France 4.3.5 Italie 4.3.6 Luxembourg

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Mise en oeuvre

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Interventions parlementaires

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Avis exprimés en consultation

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Commentaire des dispositions 8.1 Modifications du code civil: art. 30b P-CC 8.1.1 Déclaration de modification de l'inscription du sexe devant l'officier de l'état civil (al. 1) 8.1.2 Choix de nouveaux prénoms en lien avec la déclaration de modification de l'inscription du sexe (al. 2) 8.1.3 Maintien des liens du droit de famille (al. 3) 8.1.4 Consentement du représentant légal (al. 4) 8.2 Modifications de la loi fédérale sur le droit international privé: art. 40a P-LDIP

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Conséquences 9.1 Conséquences pour la Confédération 9.2 Conséquences pour les cantons et les communes 9.3 Conséquences sociales et économiques 9.4 Conséquences sous l'angle de l'égalité entre femmes et hommes 9.5 Conséquences pour les infrastructures informatiques

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10 Liens avec le programme de la législature

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11 Aspects juridiques 11.1 Constitutionnalité 11.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 11.3 Forme de l'acte à adopter 11.4 Frein aux dépenses 11.5 Délégation de compétences législatives 11.6 Conformité à la législation sur la protection des données

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12 Bibliographie

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Code Civil suisse (Changement de sexe à l'état civil) (Projet)

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Message 1

Contexte

Le présent projet concerne la révision du code civil (CC)1 devant faciliter la modification de l'inscription officielle du sexe et du nom. Cette révision vise principalement à faciliter la situation des personnes transgenres mais elle profitera également aux enfants, adolescents ou adultes présentant une variation du développement sexuel.

1.1

Enfants et adultes présentant une variation du développement sexuel

Une quarantaine d'enfants dont le sexe est difficile à établir avec certitude naissent chaque année en Suisse. A noter que selon la définition que l'on donne, la prévalence des enfants présentant une variation du développement sexuel pourrait être plus ou moins importante2.

1 2

RS 210 Ce taux est mentionné dans le communiqué de presse du Conseil fédéral du 6 juillet 2016 «Personnes aux caractéristiques sexuelles ambiguës: sensibiliser davantage». De 2006 à 2010, l'AI a remboursé des mesures médicales pour intersexualité pour 30 enfants en moyenne par année (avis du Conseil fédéral du 6 juin 2011 en réponse à l'Ip. Kiener Nellen 11.3265 «Intersexualité. Modifier la pratique médicale et administrative» du 18 mars 2011, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 11.3265). Le Centre de compétence pour les droits humains (CSDH) évoque pour sa part un chiffre de 20 à 100 nouveau-nés présentant une variation du développement sexuel par année («Teilstudie 3: LGBTI ­ Juristische Analyse», p. 55, disponible sur www.csdh.ch > Politique genre > Publication > Accès à la justice en cas de discrimination). En 2010, la Suisse comptait 80 290 naissances; en 2017, ce chiffre était de 87 381 (Office fédéral de la statistique, Annuaire statistique de la Suisse 2019, p. 44). Les naissances d'enfants présentant une variation du développement sexuel représentent donc une proportion d'1 sur 800 à 4400; cette prévalence serait d'1 sur 3000 à 1 sur 5000 selon la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine (CNE; voir sa prise de position «Attitude à adopter face aux variations du développement sexuel. Questions éthiques sur l'», ch. 1.1, disponible sur www.nek-cne.ch > Publications > Prises de position > No 20/2012). Le document thématique «Droits de l'homme et personnes intersexes», publié en 2015 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe (disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications), indique un taux d'une naissance sur 1500 à 2000. Ce document évoque également des formes de variations sexuelles plus subtiles, présentant une prévalence de 1,7 % des naissances (p. 16 s). D'autres sources mentionnent des taux de 0,05 à 4 %; voir Büchler / Cottier, Legal Gender Studies, Rechtliche Geschlechterstudien, Eine kommentierte Quellensammlung, Zurich / St-Gall, 2012, p. 395. Selon une enquête menée durant le second semestre 2018 par l'Office fédéral de l'état civil (OFEC) auprès des organisations concernées, du personnel médical et des autorités de l'état civil, celles-ci reçoivent chaque année l'annonce de la naissance de 8 à 10 enfants présentant une variation du développement sexuel.

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Egalement désignées par les dénominations «intergenres», «intersexes» ou «intersexuées»3, ces personnes présentent des caractéristiques chromosomiques, génitales ou de niveau hormonal qui ne correspondent pas à la norme admise des catégories «masculin» et «féminin» telles qu'utilisées en médecine. Ces termes ont remplacé celui d'«hermaphrodite», utilisé par les médecins au XVIII e et au XIXe siècles. De telles variations du développement sexuel4 peuvent être constatées au stade prénatal, après la naissance, à la puberté ou même plus tardivement à l'âge adulte. La médecine contemporaine utilise cette notion comme un terme générique pour désigner une pluralité de diagnostics qui diffèrent dans leurs causes, leurs manifestations et leurs évolutions5.

Dans les trois jours à compter de sa naissance, chaque enfant doit être annoncé pour enregistrement à l'état civil, avec son identité complète, soit en particulier ses nom de famille et prénoms, sa filiation et son sexe6. Le droit suisse connaît un système binaire7; en fonction des constatations médicales8, le nouveau-né doit ainsi se voir attribuer soit au sexe féminin, soit au sexe masculin. Ainsi que l'a décrit la Commission nationale d'éthique pour la médecine humaine (CNE) dans sa prise de position de novembre 20129, commandée par le Conseil fédéral suite aux interpellations parlementaires Kiener Nellen et Glanzmann de 201110, des interventions chirurgicales ont parfois été pratiquées sur des nourrissons et de très jeunes enfants qui étaient pourtant en bonne santé.

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Le terme «intersexué» est utilisé en particulier par la Commission européenne, dans la version française du document thématique «Les personnes trans et intersexuées, La discrimination fondée sur le sexe, l'identité de genre et l'expression de genre envers», Luxembourg, 2012; disponible sur www.publications.europa.eu > Publications de l'UE.

La CNE préfère ce terme à celui de «troubles du développement sexuel» ou «disorder of sex development» (DSD), qui peut revêtir une dimension stigmatisante pour les personnes concernées. Voir également Werlen / Shaha / Streuli, Unterstützung der Eltern nach IVG bei Geschlechtsvarianten (DSD/VSD - ), in: Jusletter 29.8.2016, p. 5.

CNE, «Attitude à adopter face aux variations du développement sexuel. Questions éthiques sur l'», ch. 1.1, disponible sur www.nek-cne.ch > Publications > Prises de position > No 20/2012. Voir aussi «La discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre en Europe», édité en 2011 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, p. 141 s., disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications.

Art. 39 CC et art. 8, 35 et 91 de l'ordonnance du 28 avril 2004 sur l'état civil (OEC, RS 211.112.2).

Thomas Geiser, Amtliches Geschlecht, Die Natur ist bunter als das Recht, in: NZZ du 11 septembre 2015, p. 10.

A ce jour, il n'existe en Suisse aucune recommandation sur la détermination du sexe, qui est donc une donnée d'expérience laissée à l'appréciation du médecin. Dans sa prise de position concernant les «variations du développement sexuel», du 16 décembre 2016 (disponible sur www.assm.ch > Publications > Prises de position), la Commission Centrale d'Ethique de l'Académie suisse des sciences médicales a renoncé à élaborer des directives médico-éthiques sur le sujet.

«Attitude à adopter face aux variations du développement sexuel, Questions éthiques sur l'», p. 21 (recommandation no 11); disponible sur www.nek-cne.ch > Publications > Prises de position > No 20/2012.

Ip. Kiener Nellen 11.3265 «Intersexualité. Modifier la pratique médicale et administrative» du 18 mars 2011, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 11.3265, et Ip. Glanzmann 11.3286 «Enfants nés avec une anomalie de la différenciation sexuelle.

Chirurgie plastique des organes génitaux», du même jour, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 11.3286.

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Sur le plan juridique, la CNE a recommandé de permettre aux autorités de l'état civil de modifier l'indication du sexe dans l'acte de naissance sans complication bureaucratique. Dans ce sens, le 1er février 2014, l'Office fédéral de l'état civil (OFEC) a adopté une Communication officielle11 qui enjoint aux autorités de l'état civil d'admettre plus facilement la rectification de la mention du sexe sur la base d'attestations médicales fournies. A noter que la Communication officielle précitée ne lie pas les autorités en dehors de l'état civil ni les particuliers. Le droit en vigueur impose la mise en oeuvre d'une procédure de rectification administrative, voire judiciaire12. La Communication officielle a certes simplifié la vie des personnes concernées13. Néanmoins, notamment le Centre de compétence pour les droits humains (CSDH), dans son étude «Accès à la justice en cas de discrimination» publiée en juillet 2015, la juge insuffisante14.

Dans cette étude, le CSDH met l'accent sur les droits fondamentaux des personnes présentant une variation du développement sexuel, en particulier leur droit au respect de la dignité humaine et de l'intégrité physique ainsi que d'être traitées de manière non discriminatoire15. Le Centre relaie les préoccupations de la CNE, et condamne en particulier les opérations chirurgicales précipitées. Il rappelle aussi la nécessité de pouvoir modifier l'indication du sexe à l'état civil sans complication bureaucratique, l'élément décisif étant, avant les caractéristiques sexuelles du corps, l'appréciation de la personne concernée. Le Centre évoque en outre la possibilité de surseoir temporairement à l'inscription du sexe à l'état civil.

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«Intersexualité: Inscription et modification du sexe et des prénoms dans le registre de l'état civil», Communication officielle OFEC no 140.15 du 1er février 2014; disponible sur www.ofec.admin.ch > Directives > Communications officielles OFEC.

S'il s'avère que le sexe attribué à la naissance est incorrect, il y a lieu de procéder à la rectification de la mention dans le registre de l'état civil. Si l'inexactitude résulte d'une inadvertance ou d'une erreur manifeste, la rectification intervient d'office par les autorités de l'état civil (art. 43 CC). Dans les autres cas, elle est ordonnée par le juge, à la demande de l'intéressé, ou le cas échéant de ses parents ou de ses autres représentants légaux.

Les autorités cantonales de surveillance de l'état civil peuvent également en faire la demande au juge (art. 42 CC). La décision sera ensuite enregistrée dans le registre de l'état civil et l'inscription concernant le sexe sera modifiée.

Dans le courant du second semestre 2018, l'OFEC a mené une enquête auprès des organisations concernées, du personnel médical et des autorités de l'état civil pour déterminer les besoins éventuels d'adapter la réglementation en vigueur suite à l'adoption de la Communication officielle du 1er février 2014. Il est apparu que les officiers de l'état civil étaient en mesure de trouver des solutions pragmatiques pour enregistrer la naissance des enfants présentant une variation du développement sexuel, au nombre de 8 à 10 par année.

Ch. 3.4 à 3.7; disponible sur www.csdh.ch > Politique genre > Publication > Accès à la justice en cas de discrimination. Voir aussi l'étude spécifique «Teilstudie 3: LGBTI ­ Juristische Analyse», p. 25 ss et 54 s. (disponible à la même adresse) ainsi que la prise de position concernant les «variations du développement sexuel», du 16 décembre 2016 de la Commission Centrale d'Ethique de l'Académie suisse des sciences médicales (disponible sur www.assm.ch > Publications > Prises de position) ainsi que Balzaretti, Les opérations non consenties d'assignation sexuelle sur les enfants intersexes: enjeux actuels en droit suisse, in: Le consentement en droit, Schulthess éditions romandes, Genève 2018, p. 135 ss, et Werlen, Persönlichkeitsschutz und höchstpersönliche Rechte bei Kindern mit einer Geschlechtsvariante (DSD), in: Jusletter 24 août 2015, p. 15 ss.

Art. 7, 8, al. 2, et 10, al. 2, Cst.

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Le Conseil fédéral a pris connaissance de cette étude dans son rapport du 25 mai 2016 en réponse au postulat Naef 12.354316, et s'est engagé à approfondir ces recommandations17. Dans le sens des recommandations précitées, la présente réforme doit débureaucratiser le changement de sexe et de prénoms des enfants et adultes présentant une variation du développement sexuel.

1.2

Personnes transgenres

Par personnes transgenres ou personnes concernées par la transidentité, l'on entend les personnes qui ont une identité de genre différente du genre qui leur a été attribué à la naissance18. Selon des extrapolations basées sur les données fournies par la littérature spécialisée, il existe en Suisse entre 100 et 200 personnes transgenres qui ont subi une opération ou pour qui une opération est envisagée 19. Les personnes transgenres opérées passées du sexe masculin au sexe féminin représentent une personne sur 30 000; les transgenres opérés passés du sexe féminin au sexe masculin concernent une personne pour 100 000. Mais, globalement, les personnes transgenres forment une proportion de la population plus importante20; en effet, les chiffres précités ne couvrent pas les personnes pour qui une intervention chirurgicale ne peut être effectuée, notamment en raison de leur âge ou de leur état de santé21.

Dans ce domaine, l'on observe ces dernières années une évolution importante des mentalités et des conceptions. L'on assiste ainsi à une dépathologisation par la re-

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Ch. 2.3 et 2.3.2; disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 12.3543.

Ch. 4.3.7 et 5.

Pour une définition complète, voir «La discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre en Europe», édité en 2011 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, p. 142 s.; disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications.

Avis du Conseil fédéral relatif à l'Ip. Kiener Nellen 11.3265 «Intersexualité. Modifier la pratique médicale et administrative», disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 11.3265. Dans sa prise de position du 25 septembre 2018, la Commission fédérale pour les questions féminines (CFQF) regrette qu'il n'existe en Suisse aucune statistique fiable.

Aux yeux de la Commission, le chiffre de 100 à 200 personnes transgenres opérées mentionné dans l'avis du Conseil fédéral de 2011 est au moins 10 fois plus élevé. La CFQF relève qu'un cabinet spécialisé zurichois prend à lui seul en charge 500 personnes transgenres; la moitié d'entre elles a obtenu un changement de sexe officiel et 80 % au moins ont subi des opérations d'assignation sexuelle.

«Protection des droits de l'homme des personnes transgenres, Petit guide sur la reconnaissance juridique du genre», Editions du Conseil de l'Europe 2016, p. 5, note de bas de page 2; disponible sur www.coe.int > Droits de l'homme > Orientation sexuelle et identité de genre ­ LGBT > Ressources > Publications.

Selon des études américaines, les personnes transgenres représenteraient 1%, voire 2% de la population; Le Temps, «Etats-Unis, Les transgenres au coeur de la bataille des toilettes», 22 décembre 2016; disponible sur www.letemps.ch.

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mise en cause du classement du transsexualisme parmi les maladies mentales 22. Sur le plan juridique, la reconnaissance du changement de sexe supposait jusque récemment que la personne concernée ne soit pas mariée et qu'elle se soumette à une intervention chirurgicale visant la stérilisation et la construction d'organes génitaux du sexe désiré. Le divorce et les gestes médicaux imposés comme conditions préalables au changement de sexe officiel sont aujourd'hui considérés comme des exigences contraires aux droits fondamentaux non seulement des personnes concernées mais également de leurs proches.

Dans un arrêt de principe rendu le 1er février 2011, le Tribunal suprême du canton de Zurich a écarté l'exigence d'une intervention chirurgicale comme préalable à la reconnaissance du changement de sexe23. Suivant ces évolutions, le 1er février 2012, l'OFEC a adressé un avis de droit24 aux autorités cantonales de surveillance de l'état civil. Celles-ci ont reçu l'instruction d'informer les tribunaux saisis d'une demande de changement de sexe de l'abandon des exigences précitées et de communiquer les éventuels jugements contraires pour que l'Office fédéral de la justice (OFJ) puisse au besoin les contester25. De manière réjouissante, l'on constate que les tribunaux ont généralement suivi ce changement de pratique, ce qui peut être constaté aussi

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Voir la Résolution 2048 (2015) de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe», ch. 6.3.3, (disponible sur www.assembly.coe.int > FR > Travaux > Documents > Textes adoptés > 2048), la brochure «La discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre en Europe», éditée en 2011 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, p. 25 (disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications) ainsi que Recher / Garcia Nunez, Frau, Mann ­ Individuum, Die neuen medizinischen Empfehlungen zur Begleitung von Transmenschen und ihre Auswirkungen auf die Leistungspflicht nach KVG, in: Jusletter 18 août 2014, p. 5 et 7. En ce qui concerne les développements auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), voir sous ch. 4.1.1.

L'arrêt portant les références NC090012 est disponible sur www.gerichte-zh.ch > Entscheide. Il est reproduit dans la Revue de la protection des mineurs et des adultes 2012, p. 55 ss. Il est également cité et partiellement reproduit dans Büchler / Cottier, Legal Gender Studies, Rechtliche Geschlechterstudien, Eine kommentierte Quellensammlung, Zurich/Saint-Gall, 2012, p. 405 ss.

«Transsexualisme», avis de droit du 1er février 2012; disponible sur www.ofec.admin.ch > Documentation > Pratique de l'OFEC.

Art. 42, 45, al. 3, CC et 90 OEC.

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bien par le contenu26 que par l'augmentation du nombre de décisions rendues et communiquées pour enregistrement à l'état civil depuis 201127.

A l'instar de la Communication officielle adoptée en matière d'intersexualité (voir ch. 1.1), l'avis de droit sur le transsexualisme 28 ne lie pas les autorités en dehors de l'état civil ni les particuliers. En particulier, cet avis ne remet pas en cause le prin-

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Voir entre autres les décisions de la Cour suprême du Canton de Soleure, du 2 février 2017, publié dans FamPra.ch 2017, p. 526 ss, et résumé dans Fountoulakis, Entretien de l'enfant et prévoyance professionnelle, Genève 2018, p. 233 s., du Tribunal régional de Berne, du 22 août 2016, publié dans FamPra.ch 2017, p. 286 ss et résumé dans Fountoulakis, Entretien de l'enfant et prévoyance professionnelle, Genève 2018, p. 233, du Tribunal de district de Zurich, du 25 juillet 2016, publié dans FamPra.ch 2017, p. 289 ss, et résumé dans Fountoulakis, Entretien de l'enfant et prévoyance professionnelle, Genève 2018, p. 233, de la Cour d'appel civile du Canton de Vaud, du 13 juillet 2015, publié dans le JdT 2015 III 237, avec note de Piotet, du Tribunal civil du canton de Bâle-Ville, du 16 février 2015, publié dans FamPra.ch 2015, p. 671 ss, ainsi que divers jugements cités dans la note de bas de page 142 de Büchler, Reproduktive Autonomie und Selbstbestimmung, Dimensionen, Umfang und Grenzen an den Anfängen menschlichen Lebens, Bâle, 2017, p. 39. Voir également les jugements cités dans les contributions de Bertholet / Sheybani, Quels droits pour les personnes transgenres en 2019, publié dans la Revue de l'avocat 2019, p. 203 ss, de Papaux van Delden, Mariage, partenariat enregistré, concubinage: évolutions récentes en matière de conclusion et validité, publié dans FamPra.ch 2017, p. 913 ss (note de bas de page 29) et de Patry, L'impact en Suisse de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme «Y. Y. c. Turquie» sur la question de la stérilisation prévue par le régime suisse actuel en matière de reconnaissance officielle de changement de sexe, in: L'influence du droit de l'Union européenne et de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit suisse, Genève 2016. p. 89 ss (p. 104 s).

Selon les informations transmises par les autorités de surveillance de l'état civil à l'OFEC, l'on constate une progression du nombre de changements de sexe, vraisemblablement due en partie du moins à la suppression de l'exigence de stérilisation. En 2011, 25 changements de sexe ont été inscrits dans le registre informatisé de l'état civil (système Infostar). Ces chiffres étaient de 52 en 2012, de 39 en 2013, de 89 en 2014, de 75 en 2015, de 92 en 2016, de 131 en 2017 et de 173 en 2018. A noter que ces chiffres
comprennent non seulement les décisions rendues par des tribunaux suisses durant l'année en cours mais aussi les changements de sexe qui se rapportent à des personnes suisses et qui sont survenus à l'étranger. Ces cas sont parfois transmis et donc transcrits en Suisse plusieurs mois ou années après la décision étrangère.

L'association Transgender Network Switzerland propose de ne plus utiliser ce terme qui a une connotation médicale et de lui préférer celui de «transidentité»; voir la brochure «Trans* Brochure d'information rédigée par des personnes trans* pour les personnes trans* et pour toutes les autres», 2016/2017, p. 7 et 74; disponible sur www.transgendernetwork.ch/fr/ > Information.

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cipe selon lequel le changement de sexe doit être prononcé par un tribunal29. Quand bien même l'avis précité est vu comme une évolution positive, cette mesure reste insuffisante. Dans son étude «Accès à la justice en cas de discrimination» rendue publique en juillet 201530, le CSDH rappelle les droits fondamentaux des personnes transgenres, concrètement leur droit d'être traitées de manière non discriminatoire, leur droit au respect de l'intégrité physique et leur droit à l'autodétermination comme élément de la protection de la sphère privée31. Le Centre salue le fait que la reconnaissance juridique du changement de sexe est désormais débarrassée d'exigences médicales et de divorce. Néanmoins, il relève la nécessité d'introduire dans la loi une procédure de changement de sexe, fondée sur l'autodétermination, qui soit à la fois plus simple, plus rapide et moins onéreuse, et souhaite que soit examinée en outre l'opportunité d'inscrire une troisième option de genre.

Comme indiqué plus haut au ch. 1.1, le Conseil fédéral a envisagé ces réformes dans son rapport du 25 mai 2016 en réponse au postulat Naef 12.354332.

2

Grandes lignes de la révision

La réforme envisagée vise à inscrire dans la loi une procédure simple de modification de l'inscription du sexe et, corollairement, de prénom, fondée sur l'autodétermination des personnes concernées.

Outre la simplification de la procédure, la réforme est fondée sur trois axes: ­

maintien de l'inscription du sexe à la naissance;

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maintien de la binarité des genres;

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prise en compte des intérêts des proches et de la situation spécifique des enfants.

Les propositions faites peuvent être résumées comme suit.

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30

31 32

ATF 143 III 284, 119 II 264, 92 II 128. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le changement de sexe constitue une action sui generis. La pratique judiciaire plus récente se fonde également sur l'art. 42 CC en vigueur depuis 2000. Relevons encore que contrairement à d'autres Etats (comme l'Allemagne, cf. ch. 4.3.2), la Suisse n'a pas adopté de loi en la matière (Bohnet, Actions civiles, Volume I: CC et LP Personnes, famille, successions, droits réels, poursuite pour dettes et faillite, 2 e éd., Bâle, 2019, § 8 Changement de sexe et rectification de l'état civil, p. 105 ss; Kuzniar / Savary, Änderung von Namen und amtlichen Geschlecht bei Transmenschen in der Schweiz, Der lange Weg zur staatlichen Anerkennung , in ex/ante 1/2017, p. 40; Graf-Gaiser / Montini, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, Bâle 2018, art. 42 no 4; Montini, Commentaire romand, Code civil I, 2010, art. 42 no 5; Recher, «Les droits des personnes trans*», in: Ziegler / Montini / Ayse Copur (éd.), Droit LGBT, Droits des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres en Suisse, Bâle 2015, p. 124 et 138). L'inscription du sexe et sa modification au registre de l'état civil sont uniquement mentionnées dans l'ordonnance sur l'état civil (art. 7, al. 2, let. o, 8, let. d, 20, al. 3, 20a, al. 5, 40, al. 1, let. j, 55, al. 2, let. c, 64, al. 2, let. b, 75c, al. 1, let. b, et 98, al. 1, let. h, et al. 2, let. c).

Ch. 3.4 à 3.7; disponible sur www.csdh.ch > Politique genre > Publication > Accès à la justice en cas de discrimination. Voir aussi l'étude spécifique «Teilstudie 3: LGBTI ­ Juristische Analyse», p. 25 ss et 54 s. (disponible à la même adresse).

Art. 8, al. 2, 10, al. 2, et 13 Cst.

Ch. 2.3, 2.3.2, 4.3.7 et 5; disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 12.3543.

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Le code civil et ses dispositions d'exécution sont adaptés de manière à permettre aux personnes qui ont la conviction intime et constante de ne pas appartenir au sexe inscrit dans le registre de l'état civil de modifier cette inscription par une déclaration faite devant l'officier de l'état civil. A cette occasion, la personne concernée choisit un ou des prénoms en conformité avec son nouveau sexe; si elle porte un nom de famille à flexion (par ex. un patronyme slave 33), celui-ci est également adapté au nouveau sexe. Le choix d'un nouveau prénom est soumis aux mêmes principes que ceux qui sont imposés aux parents d'un nouveau-né (voir ch. 8.1.2). Le changement de nom en tant que tel ne sera pas libéralisé. En particulier, la procédure actuelle de l'art. 30 CC reste applicable au changement de patronyme motivé par la protection d'une personne harcelée du fait de son identité de genre34.

Si la personne concernée par un changement de sexe est mariée, le couple reste uni par le mariage. Un divorce est toujours possible selon les dispositions légales en vigueur, qui restent inchangées. Les partenaires enregistrés sont soumis à des règles analogues. Les liens de filiation ne sont pas modifiés non plus.

La révision s'en tient au principe de l'inscription du sexe à la naissance, dans un système binaire (masculin / féminin)35. Elle n'examine pas l'idée de l'introduction d'un troisième genre ni celle de la renonciation à toute inscription du sexe à l'état civil. Cette question fait, en revanche, l'objet des trois postulats Arslan (17.4121), Ruiz (17.4185) et Flach (18.3690)36 qui ont pour but de charger le Conseil fédéral d'analyser dans un rapport les adaptations du registre informatisé de l'état civil en cas d'introduction d'un troisième genre. C'est le lieu de préciser que le Conseil national a accepté les deux premiers postulats le 17 septembre 2018 et rejeté le troisième le 13 juin 2019. Celui-ci demandait d'étudier les modifications qu'il faudrait apporter au droit suisse pour éliminer toutes les dispositions qui se réfèrent 33

34

35

36

790

ATF 131 III 201. Afin de tenir compte de l'identité sexuelle de l'intéressé, le Tribunal fédéral a donné droit à la demande d'inscrire un garçon né hors mariage non pas avec le nom de sa mère «Dzieglewska», correspondant à la forme féminine de ce patronyme polonais, mais sous la version masculine «Dzieglewski».

Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, une association a émis le souhait qu'une déclaration auprès de l'officier de l'état civil puisse également être effectuée pour modifier le nom de famille dans une telle situation.

Dans la mesure où il existe des personnes présentant des variations du développement sexuel, le caractère binaire des sexes est remis en cause et considéré parfois comme une construction sociale; voir Werlen, Persönlichkeitschutz des Kindes, höchstpersönliche Rechte und Grenzen elterlicher Sorge im Rahmen medizinischer Praxis, Das Beispiel von Varianten der Geschlechtsentwicklung und DSD, Berne, 2014, p.19, 100 ss, 515 s. Voir également Büchler / Cottier, Legal Gender Studies, Rechtliche Geschlechterstudien, Eine kommentierte Quellensammlung, Zurich / Saint-Gall, 2012, p. 394 ss, Montini, Garçon ou fille? Tertium non datur ? ­ Ce que la loi dit lorsque le sexe d'une personne est ambivalent. Développements récents en Suisse et à l'étranger, in: Brennpunkt Familienrecht, Festschrift für Thomas Geiser zum 65. Geburtstag, Zurich / Saint-Gall 2017, p. 403 ss, et Geiser, Amtliches Geschlecht, Die Natur ist bunter als das Recht, in: NZZ du 11 septembre 2015, p. 10.

Po. Arslan 17.4121 «Introduction d'un troisième sexe à l'état-civil.» du 13 décembre 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 17.4121; Po. Ruiz 17.4185 «Introduction d'un troisième genre. Conséquences pour l'ordre juridique et pour Infostar» du 14 décembre 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 17.4185; Po.

Flach 18.3690 «Supprimer en droit toute référence au sexe, pour assurer l'égalité de tous devant la loi» du 15 juin 2018, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 18.3690.

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uniquement au sexe, en remplaçant ce critère par d'autres différences pertinentes (par ex. la grossesse).

La loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) 37 est adaptée par un renvoi aux dispositions sur le nom (voir ch. 8.2). Il n'est pas proposé d'autres réformes législatives; en particulier, il est renoncé à modifier la loi du 17 décembre 2004 sur la stérilisation38 et la loi du 22 juin 2001 sur les documents d'identité (LDI)39 (voir ch. 3.3 et 3.4).

Il est possible que la mention du sexe doive être modifiée dans une vie plus d'une fois40. Dans les cas de variations du développement sexuel, la mention du sexe est généralement déterminée provisoirement à la naissance, et peut devoir être modifiée en fonction du comportement montré lors de la petite enfance avant d'être fixée à la puberté ou à l'âge adulte.

La modification de l'inscription du sexe est réservée aux personnes qui ont la conviction intime et constante de ne pas appartenir au sexe inscrit dans le registre de l'état civil. D'éventuelles déclarations non véridiques pourront être combattues avec les instruments existants. L'officier de l'état civil est tenu de refuser les déclarations effectuées par plaisanterie. Conformément au devoir de vérification imposé aux autorités de l'état civil, l'officier de l'état civil devra à chaque fois vérifier sa compétence, l'identité et la capacité civile des comparants (voir ch. 8.1.1), mettre en oeuvre au besoin des recherches supplémentaires et exiger la collaboration des personnes concernées41. La remise d'une déclaration de modification de l'inscription du sexe devra s'effectuer en personne devant l'officier de l'état civil. En cas de doutes, typiquement sur la capacité de discernement, l'officier de l'état civil devra mener des investigations complémentaires, en exigeant par exemple la production d'un certificat médical. Si les doutes persistent, l'officier de l'état civil devra refuser de recevoir la déclaration. Comme toute décision, le refus de l'officier de l'état civil sera susceptible de recours42. A noter que le consentement du représentant légal sera nécessaire pour les déclarations données par des personnes mineures ou sous curatelle de portée générale (voir ch. 8.1.4).

Conformément aux principes de la bonne foi et de la prohibition de l'abus de droit,
applicables dans tous les domaines43, les autorités compétentes pourront dénier toutes conséquences à une déclaration de modification de l'inscription du sexe frauduleuse. Dans le cadre de l'examen des conditions d'octroi d'une rente, les autorités d'assurances sociales pourront notamment refuser les effets positifs escomptés s'il apparaît que la déclaration de changement de sexe vise uniquement à obtenir une 37 38 39 40

41 42 43

RS 291 RS 211.111.1 RS 143.1 Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, deux partis ont demandé à limiter la faculté de changer l'inscription du sexe par déclaration devant l'officier de l'état civil à une seule fois. La faculté de changer l'inscription du sexe plus d'une fois a en revanche été expressément saluée par la CNE. Vu son utilité en particulier pour les enfants, cette possibilité, qui n'a pas fait l'objet de critiques par ailleurs, est ici maintenue.

Art. 16, al. 1 et 5, OEC.

Art. 90 OEC Art. 5, al. 3, Cst. et 2, al. 2, CC.

791

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rente de vieillesse à un âge antérieur. De même, les autorités militaires pourront ne pas prendre en compte une telle déclaration si celle-ci est exclusivement motivée par le souhait d'éviter de servir dans l'armée. Afin d'assurer la cohérence de l'ordre juridique suisse, les autorités compétentes aviseront les autorités d'état civil, pour leur permettre de rectifier et modifier le cas échéant d'office une inscription déjà effectuée. Jusqu'à preuve du contraire, l'inscription portée au registre de l'état civil fait foi (art. 9 CC) et lie les autorités et particuliers (voir ch. 3.1).

Sur le plan pénal, un tel comportement est susceptible de constituer un cas d'obtention frauduleuse d'une constatation fausse44. A noter que l'autorité de l'état civil est tenue le cas échéant de dénoncer aux autorités de poursuites cantonales compétentes les infractions pénales qu'elle constate dans l'exercice de ses fonctions45.

3

Appréciation de la solution retenue

3.1

Autorité compétente

Pour enregistrer la modification de l'inscription du sexe et, corollairement, de prénom, il n'apparaît aucune variante sérieuse à la réception d'une déclaration par l'officier de l'état civil, qui est le spécialiste pour ce type d'opération correspondant à ses attributions ordinaires46.

En particulier, il n'est pas indiqué de laisser cette compétence aux tribunaux dans la mesure où il s'agira désormais de recevoir et d'enregistrer une déclaration faite sans conditions.

Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, cette appréciation a été soutenue par tous les partis politiques sauf deux, opposés à toute réforme. La procédure de déclaration devant l'officier de l'état civil a également été approuvée par la très grande majorité des organisations, en particulier l'Association suisse des officiers de l'état civil et les associations qui défendent les personnes LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, intersexes).

Quoique favorables à la révision et à un transfert de compétence des tribunaux à l'administration, les cantons ont formulé des avis partagés sur le service à désigner.

Plusieurs d'entre eux et la Conférence des autorités cantonales de surveillance de l'état civil auraient préféré que la procédure soit confiée à ces autorités dans le cadre d'une procédure analogue à celle existant en matière de changement de nom (cf.

art. 30 CC). Il a été objecté à la compétence des officiers de l'état civil un prétendu affaiblissement de la force probante du registre de l'état civil.

Cette objection ne paraît pas pertinente. En effet, par principe, toute autorité et les particuliers sont liés par les inscriptions portées au registre de l'état civil, ce qui comprend la mention du sexe. Or, ces inscriptions sont dotées de la force probante

44 45 46

792

Art. 253 CP; ATF 101 Ib 9 Art. 43a, al. 3bis, CC et 16, al. 7, OEC Art. 44, al. 1, ch. 4, CC et 37c OEC

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accrue de l'art. 9 CC; en cas de contestation, une rectification formelle devra le cas échéant intervenir.

Le Conseil fédéral reste convaincu que la solution de l'avant-projet présente l'avantage de confier la réception de la déclaration de changement de sexe à l'officier de l'état civil, qui est l'autorité en charge de la tenue du registre de l'état civil et qui est spécialisée dans la réception de déclarations dans ce domaine.

La variante retenue permet par ailleurs d'uniformiser la procédure et les émoluments sur tout le territoire de la Confédération, à l'inverse d'une procédure de changement de sexe calquée sur l'article 30 CC. Cette disposition attribue en effet la compétence au «gouvernement du canton de domicile» mais, dans la pratique, cette tâche est déléguée à différentes entités dans les cantons qui connaissent par ailleurs des tarifs disparates. Au surplus, la procédure régie par l'art. 30 CC intervient en règle générale en la forme écrite. En conséquence, les services compétents ne disposent pas nécessairement de locaux adaptés pour recevoir personnellement les personnes concernées (voir ch. 8.1.1).

3.2

Maintien du système binaire (masculin / féminin)

Le Conseil fédéral propose de maintenir la binarité des sexes (masculin / féminin).

Ce faisant, il se base sur les prises de position récentes de divers comités d'experts suisses.

Dans son étude «Accès à la justice en cas de discrimination» de 201547, le CSDH évoque la possibilité de surseoir temporairement à l'inscription du sexe à l'état civil tout comme l'examen de l'opportunité d'introduire une troisième option de genre (voir également les ch. 1.1 s.). La Commission Centrale d'Ethique de l'Académie suisse des sciences médicales (ASSM), dans une prise de position de 2016 48, recommande pour sa part de prolonger à 30 jours le délai pour l'inscription à l'état civil en cas d'incertitude quant au sexe de l'enfant. La Commission nationale d'éthique (CNE) avait, quant à elle, déjà mentionné la possibilité d'introduire un troisième genre, voire de supprimer la mention du sexe au registre des naissances dans sa prise de position de 201249. La CNE avait toutefois conclu au maintien des deux catégories existantes (masculin / féminin), du fait qu'elles sont profondément ancrées dans la culture et la société.

47

48 49

Ch. 3.4 à 3.7; disponible sur www.csdh.ch > Politique genre > Publication > Accès à la justice en cas de discrimination. Voir aussi l'étude spécifique «Teilstudie 3: LGBTI ­ Juristische Analyse», p. 25 ss et 54 s. (disponible à la même adresse). Voir également la prise de position concernant les «variations du développement sexuel» du 16 décembre 2016 de la Commission Centrale d'Ethique de l'Académie suisse des sciences médicales, disponible sur www.assm.ch > Publications > Prises de position), et Werlen, «Persönlichkeitsschutz und höchstpersönliche Rechte bei Kindern mit einer Geschlechtsvariante (DSD)», in: Jusletter 24 août 2015, p. 15 ss.

Disponible sur www.assm.ch > Publications > Prises de position.

CNE, «Attitude à adopter face aux variations du développement sexuel. Questions éthiques sur l'», p. 15 ss, disponible sur www.nek-cne.ch > Publications > Prises de position > No 20/2012.

793

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Même si différents participants à la procédure de consultation relative à l'avantprojet ont formulé un souhait en ce sens, le Conseil fédéral renonce, dans le cadre de cette révision, à introduire une troisième catégorie de genre ou à supprimer toute mention officielle du sexe. Ce faisant, il s'aligne d'une part sur la décision des Chambres fédérales qui n'ont pas donné suite à la pétition «Pour la création d'un troisième sexe. Intersexualité»50 adressée au Parlement en 2012. D'autre part, il note que les postulats Arslan (17.4121) et Ruiz (17.4185) ont été acceptés par le Conseil national le 17 septembre 2018. Ces postulats ont précisément pour but de charger le Conseil fédéral d'analyser dans un rapport les changements légaux et les adaptations du registre informatisé de l'état civil en cas d'introduction d'un troisième genre ou d'abandon de toute mention de genre à l'état civil. Le Conseil fédéral ne souhaite pas anticiper les résultats de ce mandat d'examen par cette révision.

3.3

Loi sur la stérilisation

La loi sur la stérilisation ne doit pas être adaptée. Cette loi règle les conditions auxquelles une stérilisation est autorisée à des fins contraceptives, ainsi que la procédure applicable (art. 1) et soumet cette intervention au consentement libre et éclairé de l'intéressé, donné par écrit (art. 5).

Selon la révision proposée, la déclaration de modification de l'inscription du sexe ne sera soumise à aucune condition. La condition d'une stérilisation préalable sera donc prohibée (voir ch. 8.1.1).

3.4

Loi sur les documents d'identité

Il n'est pas nécessaire de modifier la LDI. Cette loi précise que chaque document d'identité doit notamment indiquer les noms, prénoms et le sexe de son titulaire51; ces trois données ainsi que la date de naissance, la nationalité et la taille figurent également sur le document d'identité sous une forme qui permet une lecture automatisée52. A noter enfin que sur demande, d'autres éléments du nom, comme le nom d'alliance et le nom de partenariat, peuvent figurer sur le document d'identité53.

L'ordonnance du Conseil fédéral prévoit que cette donnée et d'autres sont reprises du registre informatisé de l'état civil54 et précise qu'il n'y a pas de regroupement de données dans le système d'information relatif aux documents d'identité (ISA) en cas de changement de sexe ou d'adoption contrairement aux cas de changements de nom55. Il suit que la délivrance de nouveaux documents d'identité après une modification de l'inscription du sexe est garantie. Aucune modification législative n'est nécessaire.

50 51 52 53 54 55

794

Pétition 12.2018 «Pour la création d'un troisième sexe. Intersexualité».

Art. 2, al. 1, LDI Art. 2, al. 2, LDI Art. 2, al. 4, LDI Art. 10 et 14 OLDI Art. 35, al. 2 et 3, OLDI

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4

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

4.1

Droit international

4.1.1

Nations Unies (ONU)

Dans son rapport du 4 mai 201556, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU rappelle que les mécanismes de l'ONU demandent aux Etats de reconnaître en droit le genre avec lequel les transgenres s'identifient, sans prescriptions abusives telles que la stérilisation, les traitements médicaux sous contrainte ou le divorce (ch. 17) et formule une recommandation expresse à cet égard (ch. 79, let. i). Dans ce contexte, le rapport salue les législations permettant la reconnaissance juridique de l'identité de genre sur la base de l'autodétermination des personnes concernées tout comme l'introduction dans certains Etats d'un troisième genre ou d'un sexe indéterminé (ch. 73)57.

La Haut-Commissaire aux droits de l'homme avait déjà demandé aux Etats dans un premier rapport adopté le 17 novembre 201158 de faciliter la reconnaissance juridique du genre avec lequel les personnes transgenres s'identifient (ch. 84, let. h).

Pour la définition de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre (ch. 7), ce rapport renvoie aux Principes de Jogjakarta (ou Yogyakarta)59 qui consacrent notamment le droit à la reconnaissance devant la loi et le plein respect de l'identité de genre (principes 3 et 31).

Dans le cadre de la présentation en octobre 2018 du 4e rapport périodique sur la mise en oeuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels60, la Suisse a notamment été invitée à indiquer les mesures prises pour assurer l'autonomie et la liberté de choix des personnes intersexuées et à donner des informations sur l'impact des mesures concrètes prises pour lutter contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre.

Lors de l'Assemblée générale de mai 2019, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a révisé la classification internationale des maladies. Cette révision a conduit à l'abandon du «transsexualisme» («Transsexualism»), anciennement rangé dans la catégorie des maladies et troubles mentaux («Mental health and disorders»), avec une reclassification en incongruence du genre («Gender incongruence») dans la

56

57 58 59

60

Discrimination et violence à l'encontre de personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre; disponible sur www.un.org > Français > Documents > Recherche > A/HRC/29/23.

Voir à cet égard le ch. 3.2. Sur les évolutions à Malte ainsi qu'en Allemagne, en Autriche et en France, l'on renvoie aux ch. 4.3.1 à 4.3.4.

Disponible sur www.un.org > Français > Documents > Recherche > A/HRC/19/41.

Principes sur l'application de la législation internationale des droits humains en matière d'orientation sexuelle et d'identité de genre; disponible sur www.yogyakartaprinciples.org > Français > Version officielle (PDF).

RS 0.103.1; disponible sur www.un.org > Français > Documents > Recherche > E/C.12/CHE/Q4.

795

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catégorie des conditions en rapport avec la santé sexuelle («Conditions related to sexual health»)61.

Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU, qui surveille la mise en oeuvre de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant 62, a adressé ses observations finales à la Suisse le 4 février 2015, lesquelles font notamment référence aux recommandations de la CNE63.

Le Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, organe qui surveille la mise en oeuvre de la Convention du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes 64, demande à la Suisse de veiller à reconsidérer les décisions de justice imposant aux personnes transgenres de se soumettre à une intervention chirurgicale ou à un traitement hormonal avant d'obtenir la reconnaissance du changement de sexe officiel 65.

Institution spécialisée de l'ONU, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a adopté de longue date les normes régissant les documents d'identité qui prévoient la mention possible d'une troisième option de genre («unspecified gender» avec le sigle «X»; voir le ch. 3.2)66.

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62 63

64 65

66

796

Voir la classification internationale des maladies (ICD-11), dont la liste est diffusée sur le site de l'OMS; disponible sur www.who.int > Health Topics > C > Classifications; voir également l'article «Ensuring an inclusive global health agenda for transgender people», in: Bulletin of the World Health Organization 2017/95, p. 154; disponible sur www.who.int > Programmes > Bulletin of the World Health Organization > Part Issues > Volume 95, 2017.

RS 0.107 Convention relative aux droits de l'enfant. Observations finales concernant les deuxième à quatrième rapports périodiques de la Suisse, soumis en un seul document, 2015; disponible sur www.un.org > Français > Documents > Recherche > CRC/C/CHE/ CO/2­4; voir également ch. 1.1.

RS 0.108 Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Observations finales concernant les quatrième et cinquième rapports périodiques de la Suisse, soumis en un seul document, 2016, recommandation no 39d; disponible sur www.un.org > Français > Documents > Recherche > CEDAW/C/CHE/CO/4­5.

Voir «Documents de voyage lisibles à la machine», 7 e éd., 2015, partie 4, p. 15, ch. 11/II; disponible sur www.icao.int > Sources d'information > Publications > Séries des documents > Doc 9303 > Part 4.

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4.1.2

Commission internationale de l'état civil (CIEC)

La CIEC est une organisation intergouvernementale 67 dont le but est de promouvoir la coopération internationale en matière d'état civil. Dans le domaine du transsexualisme ou de la transidentité68, la CIEC a élaboré la Convention (no 29) relative à la reconnaissance des décisions constatant un changement de sexe 69. Cette Convention a été ouverte à la signature à Vienne le 12 septembre 2000. Différents rapports ont en outre été publiés sur le sujet, en partie en collaboration avec le Conseil de l'Europe70.

La CIEC a adopté en son sein la Convention (no 16) relative à la délivrance d'extraits plurilingues d'actes de l'état civil, conclue à Vienne le 8 septembre 1976 71, qui prévoit exclusivement l'inscription du sexe masculin et féminin (par les symboles M et F; art. 5). Les formules actuellement prévues dans la Convention (no 34) relative à la délivrance d'extraits et de certificats plurilingues et codés d'actes de l'état civil, signée à Strasbourg le 14 mars 201472, ne remettent pas en cause le caractère binaire du sexe; dans l'hypothèse d'une personne de sexe indéterminé, les cases «Sexe masculin» et «Sexe féminin» sont toutefois laissées en blanc (annexe 3, ch. 12, let. c)73. Ces conventions de la CIEC sont citées dans le règlement (UE) 2016/119174. Ce règlement introduit différents formulaires multilingues, servant d'aides à la traduction d'extraits d'état civil nationaux ou délivrés en vertu des conventions de la CIEC (voir aussi ch. 3.2 et 4.2.3).

67 68

69 70

71 72 73 74

Fondée en 1948. Des informations sur la CIEC sont diffusées sur son site Internet www.ciec1.org.

L'association Transgender Network Switzerland propose de ne plus utiliser ce terme qui a une connotation médicale et de lui préférer celui de «transidentité»; voir la brochure «Trans* Brochure d'information rédigée par des personnes trans* pour les personnes trans* et pour toutes les autres», 2016/2017, p. 7 et 74; disponible sur www.transgendernetwork.ch/fr/ > Information.

La convention est entrée en vigueur le ler mars 2011 entre l'Espagne et les Pays-Bas.

Elle est disponible sur www.ciec1.org > Conventions > 29.

«Les conséquences juridiques du changement de sexe en droit comparé» et «Aspects internationaux des questions liées au transsexualisme», in: Transsexualisme, médecine et droit, Actes du XXIIIe colloque de droit européen, Vrije Universiteit Amsterdam, 14­16 avril 1993, Editions du Conseil de l'Europe, 1995; «Transsexualisme, état civil, vie privée et familiale dans les Etats de la CIEC», in: Revue Droit de la Famille, Editions Juris-Classeur, Paris, 1998, no 12, p. 3­9, «Le transsexualisme en Europe» in: Editions du Conseil de l'Europe, juin 2000.

RS 0.211.112.112. La Convention est entrée en vigueur pour la Suisse le 18 avril 1990; elle lie actuellement 24 Etats.

La convention a été signée par 5 Etats, dont la Suisse. Elle n'est pas entrée en vigueur.

Elle est disponible sur www.ciec1.org > Conventions > 34.

Sur la question d'un troisième genre, voir également le ch. 3.2.

Règlement (UE) 2016/1191 du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 2016 visant à favoriser la libre circulation des citoyens en simplifiant les conditions de présentation de certains documents publics dans l'Union européenne, et modifiant le règlement (UE) no 1024/2012, JO L 200 du 26 juillet 2016.

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4.2

Rapport avec le droit européen

4.2.1

Arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme

Dans sa jurisprudence déduite de l'art. 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH)75, la Cour européenne des droits de l'homme a reconnu un droit pour les personnes transgenres à obtenir des documents d'état civil en adéquation avec leur nouveau genre76. Sous l'angle de cette disposition et de l'art. 6, par. 1, CEDH (droit à un procès équitable), la Cour a par ailleurs estimé disproportionné le fait d'exiger d'une personne qu'elle prouve la nécessité médicale d'un traitement dans un domaine concernant l'un des aspects les plus intimes de sa vie privée77.

Plus récemment, la Cour a jugé que le refus des juridictions internes d'accorder à une personne transgenre l'autorisation de changer de sexe ou de prénom au motif qu'elle n'avait pas subi une opération de stérilisation portait atteinte à son droit au respect de sa vie privée78. La Cour a également condamné le fait de conditionner la reconnaissance de l'identité sexuelle des personnes transgenres à la réalisation d'une opération ou d'un traitement stérilisant qu'elles ne souhaitaient pas subir, ce qui revenait à conditionner le plein exercice du droit au respect de la vie privée à la renonciation au plein exercice du droit au respect de l'intégrité physique; elle a aussi considéré comme incompatible avec les garanties de la CEDH une réglementation nationale insuffisamment claire n'instaurant pas de procédure rapide, transparente et accessible de changement de sexe, comme énoncé dans la Résolution 2048 «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe» adoptée en 2015 par le Conseil de l'Europe (voir ch. 4.2.2 ci-dessous)79. Elle a estimé dans une autre affaire que la transformation du mariage d'une femme transgenre en un partenariat enregistré comme condition préalable à la reconnaissance juridique de son genre féminin n'était pas disproportionnée dans l'État en cause puisque les concepts de mariage et de partenariat enregistré y étaient quasiment identiques80.

75 76 77 78

79 80

798

RS 0.101 Arrêts de la Cour B. c. France, Requête no 13343/87 (1992); Goodwin c. Royaume-Uni et I. c. Royaume-Uni, Requêtes nos 28957/95 et 25680/94 (2002).

Arrêt Van Kück c. Allemagne, Requête no 35968/97 (2003).

Arrêts Y.Y. c. Turquie, Requête no 14793/08 (2015) et S.V. c. Italie, Requête no 55216/08 (2018). Voir aussi Patry, L'impact en Suisse de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme «Y. Y. c. Turquie» sur la question de la stérilisation prévue par le régime suisse actuel en matière de reconnaissance officielle de changement de sexe, in: L'influence du droit de l'Union européenne et de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit suisse, Genève 2016, p. 89 ss.

Arrêts A.P., Garçon et Nicot c. France, Requête no 79885/12 (2017) et X c.

«l'ex-République yougoslave de Macédoine», Requête no 29683/16 (2019).

Arrêt Hämäläinen c. Finlande, Requête no 37359/09 (2014).

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4.2.2

Travaux du Conseil de l'Europe

La Recommandation CM/Rec(2010)5 du Comité des Ministres, du 31 mars 2010, sur des mesures visant à combattre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre81 exhorte les Etats à vérifier les conditions préalables de la reconnaissance juridique du changement de sexe et d'enlever les conditions abusives, y compris les modifications physiques. Cette recommandation invite par ailleurs les Etats à prendre toutes les mesures appropriées pour garantir la reconnaissance juridique intégrale du changement de sexe, en permettant en particulier d'obtenir de nouveaux documents rapidement. Elle invite en outre les Etats à permettre d'épouser une personne du sexe opposé une fois le changement de sexe accompli et juridiquement reconnu (ch. 20 à 22). La Déclaration d'intention adoptée le 14 mai 2014 à la Valette étend expressément la protection due aux personnes intersexuées en leur garantissant en particulier la pleine reconnaissance de l'identité de genre (ch. 6, 7); le Conseil fédéral a approuvé ce texte le 29 avril 201582.

La Résolution 2048 «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe»83, adoptée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe le 22 avril 2015, enjoint les Etats membres du Conseil de l'Europe à combattre la discrimination des personnes transgenres (ch. 6.1 ss), à leur garantir l'accès aux soins nécessaires (ch. 6.3 ss) et à sensibiliser le public et les milieux intéressés (ch. 6.4 ss).

Citant en exemple la législation de Malte84 adoptée le 14 avril 2015 (ch. 5), la Résolution salue l'émergence d'un droit à l'identité de genre et appelle les Etats à instaurer des procédures rapides, transparentes et accessibles de changement de nom et de sexe, fondées sur l'autodétermination et ouvertes à toutes les personnes indépendamment de l'âge, de l'état de santé, de la situation financière ou d'une incarcération présente ou passée. La Résolution entend en outre abolir les dispositions limitant le droit des personnes transgenres à demeurer mariées, tout comme la stérilisation, les autres traitements médicaux et tout diagnostic de santé mentale en tant qu'obligations préalables à la reconnaissance de l'identité de genre. La résolution appelle les Etats membres à envisager de faire figurer une troisième option de genre sur les documents des personnes
qui le souhaitent et rappelle que l'intérêt supérieur de l'enfant est une considération primordiale dans toutes les décisions le concernant (ch. 6.2 ss). La Résolution 2191 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe «Promouvoir les droits humains et éliminer les discriminations à l'égard des personnes intersexes» adoptée le 12 octobre 2017 prévoit également de simplifier les procédures de reconnaissance juridique du genre conformément aux recommandations de la Résolution 2048 précitée (ch. 7.3. ss)85. Ces recommandations sont

81

82 83 84 85

Disponible sur www.coe.int > Explorer > Comité des Ministres > Documents > Textes adoptés > Recommandations du Comité des Ministres aux Etats membres > Générales > CM/Rec(2010)5.

Voir communiqué du 29 avril 2015, disponible sur www.admin.ch > Documentation > Communiqués.

Disponible sur www.assembly.coe.int > FR > Travaux > Documents > Textes adoptés > 2048.

«Gender Identity, Gender Expression and Sex Characteristics Act» (voir ch. 4.3.1) Disponible sur www.assembly.coe.int > FR > Travaux > Documents > Textes adoptés > 2191.

799

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précisées par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe dans différents documents thématiques86.

4.2.3

Union européenne

L'UE n'a pas de compétences propres en droit matériel de la famille mais elle peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée notamment sur le sexe87. Afin d'assurer la libre circulation des documents publics, le Parlement européen et le Conseil de l'UE ont néanmoins adopté en 2016 le règlement (UE) 2016/1191 visant à favoriser la libre circulation des citoyens en simplifiant les conditions de présentation de certains documents publics dans l'Union européenne. Ce règlement introduit notamment des formulaires d'aide à la traduction des extraits de l'état civil nationaux ou de la CIEC88.

4.3

Droit comparé

4.3.1

Malte

La législation de Malte, «Gender identity, gender expression and sex characteristics act», adoptée le 14 avril 201589, garantit aux citoyens maltais et aux réfugiés le droit à la reconnaissance de leur identité de genre sans traitement ou examen médical préalables dans le respect de l'intégrité physique et des relations familiales et conjugales des personnes concernées (art. 3 et 4, al. 8). Le changement de genre intervient par une déclaration faite devant notaire sur la base de l'identité perçue par l'intéressé (art. 4). Le notaire ne peut exiger de certificats médicaux ou d'attestations délivrées par un psychologue ou un psychiatre (art. 5, al. 2). Le changement de la mention du nom et du sexe des mineurs fait l'objet d'une procédure gracieuse sur initiative du 86

87

88 89

800

«La discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre en Europe», édité en 2011 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, p. 13 s., ch. 5.1 à 5.4, disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications; «Droits de l'homme et personnes intersexes», édité en 2015 par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, p. 39 ss, disponible sur www.coe.int > Explorer > Commissaire aux droits de l'homme > Documents > Publications; «Protection des droits de l'homme des personnes transgenres, Petit guide sur la reconnaissance juridique du genre», édité en 2016 par le Conseil de l'Europe, disponible sur www.coe.int > Droits de l'homme > Orientation sexuelle et identité de genre ­ LGBT > Ressources > Publications.

Art. 19 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'UE, la discrimination contre les personnes transgenres peut être assimilée à une discrimination fondée sur le sexe; voir Commission européenne, Les personnes trans et intersexuées, La discrimination fondée sur le sexe, l'identité de genre et l'expression de genre envers, Luxembourg 2012, p. 5 ss; disponible sur www.publications.europa.eu > Publications de l'UE. Dans ce contexte, l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne a publié en 2013 les résultats en bref d'une enquête LGBT dans l'UE; disponible sur www.fra.europa.eu > Publications et ressources > Publications (sélectionner, sous Année, «2013» et «2013» et, sous Thème, «LGBT»).

Voir ch. 4.1.2.

Voir ch. 4.2.2.

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titulaire de l'autorité parentale ou du tuteur de l'enfant; son intérêt supérieur est vérifié par le tribunal (art. 7).

Les décisions relatives à l'identité de genre valablement prononcées à l'étranger, y compris les décisions constatant un genre autre que masculin ou féminin ou ne spécifiant aucune option de genre sont reconnues à Malte (art. 9). Le 24 février 2017, le Gouvernement maltais a annoncé la délivrance de documents d'identité avec une troisième option de genre «X»90. Les cartes d'identité et autres documents officiels sont adaptés à brève échéance (art. 10). Des sanctions pénales sont prévues en cas de violation de la loi (art. 11) qui renvoie en outre aux règles de protection des données (art. 12).

Enfin et de manière générale, la réglementation maltaise interdit toute discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, l'identité de genre ou les caractéristiques sexuelles, impose la promotion de l'égalité dans les services étatiques (art. 13) et garantit le droit à l'intégrité physique (art. 14) et l'accès aux soins nécessaires (art. 15).

4.3.2

Allemagne

Historiquement, il est intéressant de noter que le code prussien (Allgemeines Landrecht für die Preußischen Staaten) de 1794, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1899, comportait des dispositions sur les enfants hermaphrodites («Zwitter»). Cette réglementation prévoyait que l'enfant était élevé dans le sexe défini par ses parents.

A 18 ans, l'intéressé choisissait librement son sexe. Etait réservé le droit des tiers qui pouvaient solliciter l'avis d'un expert, dont les constatations l'emportaient le cas échéant sur le choix de l'intéressé ou de ses parents91.

Depuis novembre 2013, la loi sur l'état civil («Personenstandsgesetz») comporte un § 22, al. 3, qui prévoit l'inscription de la naissance sans mention du sexe lorsque l'enfant ne peut être assigné au sexe masculin ou féminin. Dans le cadre d'une réforme adoptée le 18 décembre 2018 à la suite d'un arrêt du Tribunal constitutionnel fédéral d'octobre 2017, cette loi permet d'inscrire la naissance d'une personne présentant une variation du développement sexuel avec la mention «divers» dans le champ relatif au sexe ou de laisser ce champ non renseigné. La variation du développement sexuel doit être attestée médicalement (§ 45b, al. 3, du «Personens90

91

Voir l'information « gender option to be added to passports and ID cards» du 24 février 2017, disponible sur www.timesofmalta.com. Sur la question d'un troisième genre, voir également le ch. 3.2.

Les dispositions avaient le contenu suivant: Ǥ 19. Wenn Zwitter geboren werden, so bestimmen die Aeltern (=Eltern), zu welchem Geschlechte sie erzogen werden sollen.

§ 20. Jedoch steht einem solchen Menschen, nach zurückgelegtem achzehnten Jahre, die Wahl frey, zu welchem Geschlecht er sich halten wolle. § 22. Sind aber Rechte eines Dritten von dem Geschlecht eines vermeintlichen Zwitters abhängig, so kann ersterer auf Untersuchung durch Sachverständige antragen. § 23. Der Befund der Sachverständigen entscheidet, auch gegen die Wahl des Zwitters, und seiner Aeltern.».

Le Code bavarois (Bayrisches Gesetzbuch) de 1756 comportait des dispositions analogues; voir Recher, «Les droits des personnes trans*», in: Ziegler / Montini / Ayse Copur (éd.), Droit LGBT, Droit des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres en Suisse, Bâle 2015, p. 109, et Reithofer, «Fehlende Angabe eines Geschlechtes in der Geburtsanzeige (Intersexualität)», in: Österreichisches Standesamt 5/2016, p. 72.

801

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tandsgesetz»). Cette attestation peut être remplacée exceptionnellement par une confirmation solennelle. Ces inscriptions ne sont donc possibles qu'en cas de variations médicales et biologiques d'intersexualité et non pas pour des questions psychosociales liées à l'identité de genre. La loi ne règle pas les conséquences des inscriptions, en particulier s'agissant du mariage des personnes sans mention de sexe ou de la parentalité de ces personnes ou des personnes avec la mention «divers». D'autres réformes sont envisagées, notamment le droit de la filiation qui est révisé dans son ensemble et doit englober les personnes précitées92.

Adoptée le 10 septembre 1980, la loi sur le changement de prénom et de sexe des personnes transsexuelles93 a instauré deux procédures distinctes permettant de modifier le prénom seul («kleine Lösung», soit «petite solution») ou le sexe et le prénom à la fois («grosse Lösung», soit «grande solution»). Différentes dispositions de la loi ont été jugées contraires à la loi fondamentale («Grundgesetz»), par le Tribunal constitutionnel fédéral. Ainsi, par un arrêt rendu le 16 mars 1982 (BVerfGE 60, 123), la limite d'âge, précédemment fixée à 25 ans, a été supprimée et le législateur a prévu que les actions des personnes dépourvues de la capacité civile soient engagées par leurs représentants légaux, ce qui correspond pour les mineurs généralement aux parents. Depuis un arrêt rendu le 27 mai 2008 (1 BvL 10/05) qui a conduit à l'abrogation du § 8, al. 1, ch. 2, de la loi, la reconnaissance juridique du changement de sexe n'est plus soumise à la condition que l'intéressé n'est pas marié, respectivement qu'il divorce. Suite à un arrêt rendu le 11 janvier 2011 (1 BvR 3295/07), les exigences de stérilité permanente et d'interventions chirurgicales de réassignation sexuelle figurant au § 8, al. 1, ch. 3 et 4, de la loi ne sont plus applicables. A l'heure actuelle, les deux procédures (changement de sexe et prénom ou de prénom seulement) sont soumises à la même condition que deux expertises confirment le souhait sérieux et durable de l'intéressé de vivre dans l'autre sexe. Des réformes sont envisagées; en particulier, la procédure probatoire est critiquée en 92

93

802

Le § 22, al. 3, de la loi sur l'état civil a le libellé suivant: «Kann das Kind weder dem weiblichen noch dem männlichen Geschlecht zugeordnet werden, so ist der Personenstandsfall ohne eine solche Angabe in das Geburtenregister einzutragen.» (Si l'enfant ne peut être assigné ni au sexe féminin ni au sexe masculin, la naissance sera inscrite au registre sans mention du sexe.). Voir l'arrêt du Tribunal constitutionnel fédéral du 10.10.2017 (1BvR 2019/16) saisi d'un recours contre l'arrêt du Tribunal fédéral du 22.6.2016 (XII ZB 52/15), in: Das Standesamt 9/2016, p. 269 s., et in: Zeitschrift für das gesamte Familienrecht, 18/2016, p. 1580 ss. Voir également la circulaire du 10.4.2019 du Ministère fédéral allemand de l'intérieur (Rundschreiben des BMI zum Gesetz zur Änderung der in das Geburtenregister einzutragenden Angaben; Az. VIII-20103/27 #17, dont le contenu a été publié in: Das Standesamt 5/2019, p. 151) ainsi que Hepting / Dutta, «Familie und Personenstand, Ein Handbuch zum deutschen und internationalen Privatrecht», 3e éd., Francfort-sur-le-Main / Berlin 2019, p. 433 ss, p. 664 ss; Dutta / Helms, «Geschlechtseintrag im Geburtenregister? Stellungnahme für den Wissenschaftlichen Beirat des Bundesverbandes der Deutschen Standesbeamtinnen und Standesbeamten», in: Das Standesamt 4/2017, p. 98 ss; Theilen, «Intersexualität bleibt unsichtbar: Kritische Anmerkungen zum Beschluss des Bundesgerichtshofs zu nicht-binären Eintragungen im Personenstandsrecht», in: Das Standesamt 10/2016, p. 295 ss. Voir enfin la brochure «Situation von trans- und intersexuellen Menschen im Fokus», publiée en octobre 2016 par le Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, p. 25, disponible sur www.bmfsfj.de > Aktuelles > Alle Meldungen > 26 octobre 2016.

«Gesetz über die Änderung der Vornamen und die Feststellung der Geschlechtszugehörigkeit in besonderen Fällen», abrégée «Transsexuellengesetz» ou «TSG».

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raison de ses longueurs, de ses coûts, de son caractère intrusif et peu compatible avec le respect de la dignité humaine et de la dépathologisation en cours du transsexualisme, dont l'appréciation par des tiers est remise en cause au profit de l'autodétermination94.

4.3.3

Autriche

La loi autrichienne prévoit que l'enfant soit inscrit à l'état civil avec la mention du sexe, du nom de famille et des prénoms. En règle générale, l'annonce de la naissance qui comprend l'indication du sexe du nouveau-né est transmise à l'office de l'état civil par la direction de l'hôpital, par le médecin ou par la sage-femme95. Le sexe résulte donc de constatations médicales. L'inscription constitue la preuve complète («vollen Beweis») et est soumise à la présomption d'exactitude96.

L'officier de l'état civil est lié par l'indication du sexe figurant dans l'annonce de la naissance qui doit donc être portée au registre de l'état civil 97. Le champ relatif au sexe peut aussi rester non renseigné98. Dans tous les cas, il pourra être rectifié ou modifié selon que la mention était inexacte dès le début ou qu'elle l'est devenue par la suite99.

La situation des enfants présentant une variation du développement sexuel n'est pas envisagée expressément par la loi. En ce qui concerne le prénom qui revêt une importance fondamentale pour individualiser une personne au sein de sa famille, la doctrine suggérait que les parents choisissent un ou des prénoms épicènes 100. Selon 94

Voir «Situation von trans- und intersexuellen Menschen im Fokus», publié en octobre 2016 par le Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, p. 13 et 26 et annexe 4; disponible sur www.bmfsfj.de > Aktuelles > Alle Meldungen > 26 octobre 2016. Voir également Dutta, The legal status of transsexual and transgender persons in Germany, in: The Legal Status of Transsexual and Transgender Persons, Cambridge 2015, p. 207 ss; Hepting / Dutta, «Familie und Personenstand, Ein Handbuch zum deutschen und internationalen Privatrecht», 3e éd., Francfort-sur-le-Main / Berlin 2019, p. 664 ss; Theile, «Transsexualität im Familienrecht, Eine vergleichende Untersuchung der rechtlichen Anerkennung des Geschlechtswechsels und ihrer Rechtsfolgen insbesonder auf die Ehe und Lebenspartnerschaft im deutschen, englischen und französischen Recht», Regensburg 2013, p. 83 ss, 103 s., 117 ss et 185 ss, et Wiggerich, «Rechtsvergleichende Impulse zur Reform des Transsexuellengesetz ­ Zugleich Besprechung von Scherpe (Hrsg.), The Legal Status of Transsexual and Transgender Persons», publié in: Das Standesamt 1/2017, p. 8 ss. Voir aussi l'arrêt de l'Oberlandsgericht Hamm, du 22.2.2017, publié in FamRz 2017, n. 14, p. 1185 ss, ainsi que l'arrêt du Tribunal fédéral allemand du 6.9.2017, publié in: Das Standesamt 12/2017, p. 369 ss. Selon cet arrêt, une personne transgenre qui met au monde un enfant après avoir été reconnue comme étant de sexe masculin à l'état civil doit être inscrite au registre des naissances comme la mère de l'enfant.

95 § 2, al. 2, ch. 3, § 9 et § 11, al. 1, de la loi sur l'état civil («Personenstandsgesetz») 96 § 40, al. 3, de la loi sur l'état civil («Personenstandsgesetz»).

97 Kutscher/Wildpert, Das österreichische Personenstandsrecht, 2 e éd., Vienne 2018, commentaires relatifs au § 2 PStG 2013, n. 7.

98 § 9, al. 3, en relation avec le § 40, al. 1, 2e phrase de la loi sur l'état civil («Personenstandsgesetz»).

99 §§ 41 s de la loi sur l'état civil («Personenstandsgesetz»).

100 Reithofer, «Fehlende Angabe eines Geschlechtes in der Geburtsanzeige (Intersexualität)», in: Österreichisches Standesamt 5/2016, p. 72.

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la pratique observée jusque récemment, lorsque le sexe d'un enfant ne pouvait être déterminé comme masculin ou féminin à la naissance, cette inscription devait néanmoins intervenir dans l'une ou l'autre de ces catégories sexuelles. Cette pratique a dû être revue. En effet, la loi ne prévoit pas qu'il y aurait uniquement les sexes masculin et féminin et que seules ces deux catégories devraient être inscrites à l'état civil. La loi considère bien plus le sexe comme un élément de fait, dont l'enregistrement à l'état civil peut être correct ou erroné sans que cette inscription n'ait de portée (constitutive) sur le sexe (juridique)101.

En conséquence, dans son arrêt de principe du 15 juin 2018, le Tribunal constitutionnel autrichien («Verfassungsgerichtshof») a constaté que l'Etat avait le droit mais non l'obligation d'enregistrer le sexe et que s'il décidait de le faire, il devait alors respecter l'art. 8 CEDH. Cette disposition englobe le droit pour les personnes présentant une variation du développement sexuel de se voir reconnaître une identité sexuelle autonome, distincte des genres masculin et féminin. Cette norme protège en particulier les personnes ayant une identité sexuelle alternative contre une attribution dans une catégorie qui leur est étrangère. Pour le tribunal, la notion de sexe utilisée dans la loi sur l'état civil autrichienne («Personenstandsgesetz») est à ce point générale qu'elle permet sans difficulté, par la voie de l'interprétation conforme à la constitution, d'englober des identités sexuelles alternatives 102, en utilisant une désignation sexuelle conforme à la réalité sociale des personnes concernées, où en plus de «masculin» et «féminin», en particulier «divers», «inter» ou «non déterminé» («offen») peuvent être indiqués. Le Tribunal constitutionnel a en outre reconnu le droit pour les enfants de laisser l'inscription du sexe ouverte jusqu'à ce que ceuxci puissent déterminer eux-mêmes leur attribution dans une catégorie sexuelle. Le Tribunal administratif autrichien («Verwaltungsgerichtshof») a interprété l'arrêt du Tribunal constitutionnel en ce sens que la possibilité d'indiquer la troisième option (au-delà de «masculin», «féminin» ou «non déterminé») est réservée exclusivement aux personnes intersexuelles, c'est-à-dire aux personnes dont le sexe biologique n'est ni masculin
ni féminin103. En décembre 2018, le Ministère de l'Intérieur a enjoint les offices de l'état civil d'inscrire le sexe des nouveau-nés uniquement avec les mentions «masculin», «féminin» ou (lorsque l'on ne peut pas procéder à une attribution médicale du sexe) «non déterminé» («offen»). L'utilisation de la mention «divers» comme troisième option sexuelle exige une requête des personnes concernées et la présentation d'une attestation pluridisciplinaire confirmant l'existence d'une variation du développement sexuel.104.

101

Arrêts du Tribunal constitutionnel autrichien («Verfassungsgerichtshof»), du 8 juin 2006 (V4/06) et du 22 juin 1983 (B578/80).

102 Arrêt du Tribunal constitutionnel autrichien («Verfassungsgerichtshof»), du 15 juin 2018 (E2918/2016). Voir Kieck, Das Erkenntnis des österreichischen VfGH zur personenstandsrechtlichen Erfassung des Geschlechts, in: Das Standesamt 10/2018, p. 302 ss et 318 ss.

103 Arrêt du Tribunal administratif autrichien («Verwaltungsgerichtshof»), du 14 décembre 2018 (Ro 2018/01/0015).

104 Circulaire du Ministère de l'Intérieur du 20 décembre 2018, BMI-VA1300/0528-III/4/b/2018.

804

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La loi ne règle pas spécifiquement non plus les cas de transsexualisme. L'inscription du sexe est modifiée par les autorités d'état civil selon une procédure administrative.

La pratique n'exige ni une intervention chirurgicale préalable ni le divorce de la personne concernée105.

4.3.4

France

L'acte de naissance comporte une indication expresse relative au sexe du nouveauné106. Selon la pratique en vigueur, l'état civil français n'admet que la référence au sexe masculin ou féminin. Dans une affaire mettant en cause une personne née avec une ambiguïté sexuelle, la Cour de cassation française a confirmé dans son arrêt no 531 du 4 mai 2017 que la loi française, contrairement à ce qu'avait retenu une circulaire du Ministère de la justice du 28 octobre 2011, ne permettait pas de faire figurer dans les actes de l'état civil l'indication d'un sexe autre que masculin ou féminin107.

Suite à l'adoption de la loi no 2016­1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, la modification de la mention du sexe figure désormais aux art. 61­5 et suivants du code civil français. La demande est présentée devant le tribunal de grande instance par toute personne majeure ou mineure émancipée qui démontre que la mention relative à son sexe dans les actes de l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue. A relever que le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande. En outre, les modifications de prénoms corrélatives à une décision de modification de sexe ne sont portées en marge des actes de l'état civil des conjoints et enfants qu'avec le consentement des intéressés ou de leurs représentants légaux. Par ailleurs, la modification de la mention du sexe est sans effet sur les obligations contractées à l'égard de tiers ni sur les filiations établies avant cette modification 108.

La novelle a également simplifié le changement de prénom. L'art. 60 du code civil français prévoit désormais que toute personne peut faire une demande en ce sens non plus au tribunal mais à l'officier de l'état civil. S'il s'agit d'un mineur ou d'un 105

Arrêts du Tribunal constitutionnel autrichien («Verfassungsgerichtshof»), du 8 juin 2006 (V4/06), et du Tribunal administratif autrichien («Verwaltungsgerichtshof»), du 27 février 2009 (2008/17/0054).

106 Art. 57 et 62 du code civil français.

107 L'arrêt est disponible sur www.courdecassation.fr. Voir également Libération, «Ni XX ni XY, La cour d'appel d'Orléans opposée au », 22 mars 2016, et « pour l'état civil devant la Cour de cassation», 21 mars 2017, disponibles sur www.liberation.fr, et Le Monde, «, la question du sexe neutre pour l'état civil devant la Cour de cassation», 22 mars 2017, disponible sur www.lemonde.fr.

108 Le statut d'une personne ayant donné naissance à un enfant après avoir changé de sexe a fait l'objet d'un arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la Cour d'appel de Montpellier (no 16/06059). Cette Cour a reconnu que l'intérêt de l'enfant commandait que la personne transgenre qui était passée de masculin en féminin sans perdre les attributs de son sexe de naissance soit mentionnée sur l'acte de naissance de l'enfant en tant que «parent biologique» plutôt qu'en tant que mère non gestatrice. L'arrêt est reproduit et commenté dans: Actualité Juridique Famille, décembre 2018, p. 684 s.

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majeur en tutelle, la demande est remise par son représentant légal. Si l'enfant est âgé de plus de treize ans, son consentement personnel est requis. Si l'officier de l'état civil estime que la demande ne revêt pas un intérêt légitime, en particulier lorsqu'elle est contraire à l'intérêt de l'enfant ou aux droits des tiers à voir protéger leur nom de famille, il saisit sans délai le procureur de la République et en informe le demandeur. Si le procureur de la République s'oppose à ce changement, le demandeur, ou son représentant légal, peut alors saisir le juge aux affaires familiales.

4.3.5

Italie

En Italie, l'enfant est inscrit au registre des naissances, avec son sexe et ses prénoms qui doivent être en adéquation109.

La rectification de ces mentions en cas d'intersexualité est connue et réglée selon les dispositions générales de l'état civil, avant même l'adoption de la loi n o 164 du 14 avril 1982110 qui permet d'obtenir la rectification des registres en cas de transsexualisme, lorsque des modifications des caractéristiques sexuelles se sont produites.

Cette loi ne précise pas si ces modifications doivent être la conséquence d'une intervention chirurgicale pour changer de sexe, d'un traitement hormonal ou d'une évolution naturelle. Selon la jurisprudence aujourd'hui bien établie111, une intervention chirurgicale ne peut être exigée comme condition préalable à la reconnaissance juridique du changement de sexe. Pour les personnes qui ont subi une telle intervention et sollicitent la rectification de leur état civil, une procédure spécifique est toutefois prévue112.

Les mineurs agissent par leurs parents, respectivement un curateur désigné par le Juge tutélaire (Giudice tutelare)113.

En outre, par la loi no 76 du 20 mai 2016114, l'on a offert aux couples de convertir le mariage en union civile, dans le contexte du changement de sexe d'un conjoint. Il

109

110

111

112

113

806

Art. 29 et 35 du Décret no 396/2000 du Président de la République sur l'état civil (Regolamento per la revisione e la semplificazione dell'ordinamento dello stato civile), du 3 novembre 2000l.

«Legge 14 aprile 1982, n. 164, Norme in materia di rettificazione di attribuzione di sesso». Voir également La nuova giurisprudenza civile commentata 2012, I, 253 con nota Schuster, Identità di genere: tutela della persona o difesa dell'ordinamento?

(voir plus particulièrement la p. 260).

Sentence n. 15138 de la Cour de cassation, Section Civile I, 21 mai ­ 20 juillet 2015; voir également la sentence n. 5896, du Tribunal civil de Rome du 22 mars 2011 et dans le même sens la sentence 221/2015 de la Cour constitutionnelle.

La nuova giurisprudenza civile commentata 2012, I, 253 con nota Schuster, «Identità di genere: tutela della persona o difesa dell'ordinamento?» in: Famiglia e Diritto 2012, 184 con nota Trimarchi, «L'attribuzione di una nuova identità sessuale in mancanza di intervento chirurgico»; «Le transsexualisme en Europe», Editions du Conseil de l'Europe, 2000, p. 49 s.

Cubeddu Wiedemann, The legal status of transsexual and transgender persons in Italy, in: The Legal Status of Transsexual and Transgender Persons, Cambridge 2015, p. 249 ss, n. 2.1.2.

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n'est en revanche pas possible de convertir l'union civile en mariage. Une telle hypothèse conduit donc à la fin de l'union civile et le cas échéant à la célébration d'un mariage.

4.3.6

Luxembourg

Le 10 août 2018, le Parlement luxembourgeois a adopté la loi relative à la modification de la mention du sexe et du ou des prénoms à l'état civil et portant modification du code civil. La réforme a remplacé la procédure judiciaire qui avait cours 115 par une procédure administrative, rapide, facilement accessible et basée sur l'autodétermination. Désormais, toute personne majeure capable peut demander au ministre de la justice de modifier la mention du sexe et de son ou ses prénoms en démontrant par une réunion suffisante de faits que cette mention ne correspond pas au sexe dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue; cette faculté est donnée aux citoyens du Luxembourg ainsi qu'aux étrangers qui y résident depuis au moins une année avant le dépôt de la demande, qui sont apatrides ou qui bénéficient du statut de réfugié ou d'un statut assimilé (art. 1, 5 et 7). Le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande (art. 2). Celle-ci doit être accompagnée du consentement libre et éclairé de l'intéressé, et préciser le ou les prénoms corrélatifs demandés. Le conjoint ou partenaire doit être informé au préalable de l'intention de demander une modification de la mention du sexe (art. 17). En cas de tutelle ou de curatelle, la demande est introduite au tribunal d'arrondissement par le tuteur, respectivement le curateur (art. 8). En ce qui concerne les mineurs de cinq ans accomplis, la demande de modification du sexe et des prénoms est adressée au ministère de la justice par les titulaires de l'autorité parentale ou du représentant légal et doit être accompagnée de leur accord. Lorsque le mineur est âgé de douze ans accomplis, celui-ci doit également donner son accord. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le tribunal d'arrondissement qui statue dans l'intérêt de l'enfant. Avant l'âge de cinq ans, c'est toujours au tribunal d'arrondissement qu'il incombe de statuer dans l'intérêt de l'enfant (art. 3 et 4).

114

«Legge 20 maggio 2016, n. 76, Regolamentazione delle unioni civili tra persone dello stesso sesso e disciplina delle convivenze». Précédemment, la Cour Constitutionnelle avait déclaré l'inconstitutionnalité de deux dispositions de la loi de 1982 dans la mesure où la réglementation ne prévoyait pas que la décision de changement de sexe d'un époux, qui avait pour effet la dissolution du mariage, permette, lorsque les deux partenaires le souhaitaient, le maintien d'une union autre que le mariage (sentence n. 170 du 10 juin 2014).

115 Conformément à la pratique antérieure, l'art. 99 du code civil luxembourgeois sur la rectification de l'acte de l'état civil permettait de demander la modification de l'inscription du sexe et, de manière accessoire, du ou des prénoms par une procédure judiciaire devant le tribunal d'arrondissement compétent qui statuait sur les conclusions du procureur d'Etat. La procédure était applicable aussi bien aux personnes transgenres qu'aux personnes intersexes. A défaut de cadre législatif spécifique, les conditions et critères pour obtenir la modification de la mention du sexe avaient été établis par la jurisprudence.

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5

Mise en oeuvre

La réforme devra être mise en oeuvre en adaptant les dispositions d'exécution en matière d'état civil [ordonnance du 28 avril 2004 sur l'état civil (OEC)116 et ordonnance du 27 octobre 1999 sur les émoluments en matière d'état civil (OEEC) 117; cf. l'art. 48 CC], et au besoin dans le domaine des documents d'identité [ordonnance sur les documents d'identité (OLDI)118 et ordonnance du DFJP du 16 février 2010 sur les documents d'identité des ressortissants suisses119; voir ch. 3.4]. Il y aura lieu également d'adapter le registre informatisé de l'état civil (voir ch. 9.5)120, ainsi que les formules et directives en vigueur de l'Office fédéral de l'état civil121 et de l'Office fédéral de la police122.

Le changement de sexe inscrit dans les registres de l'état civil est connu depuis des décennies. La présente réforme poursuit l'objectif, limité, de simplifier la procédure applicable.

6

Interventions parlementaires

La question de l'inscription du sexe des personnes transgenres ou présentant une variation du développement sexuel a fait l'objet de plusieurs interventions parlementaires: En 1997, un postulat Sandoz123 invitait le Conseil fédéral à examiner l'opportunité de déposer un projet de loi ou de modifier le code civil de manière à régler les conséquences juridiques du changement de sexe de l'un des époux en cours de mariage.

En 2011, les interpellations Kiener Nellen et Glanzmann124 s'interrogeaient sur la pratique médicale et administrative relative aux enfants nés avec une anomalie de la différenciation sexuelle et amenaient le Conseil fédéral à solliciter l'avis de la CNE (voir ch. 1.1). Dans son communiqué de presse du 6 juillet 2016125, le Conseil fédéral annonçait que les recommandations de la CNE étaient pour la plupart mises en oeuvre ou en passe de l'être, en particulier la simplification des démarches pour modifier la mention du sexe dans le registre d'état civil.

116 117 118 119 120 121 122 123

RS 211.112.2 RS 172.042.110 RS 143.11 RS 143.111 Art. 39, 45a CC et 76 ss OEC Art. 6 et 84 OEC Art. 41 OLDI Po. Sandoz 97.3570 «Mariage et changement de sexe» du 4 décembre 1997, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 97.3570.

124 Ip. Kiener Nellen 11.3265 «Intersexualité. Modifier la pratique médicale et administrative» du 18 mars 2011, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 11.3265, et Ip. Glanzmann 11.3286 «Enfants nés avec une anomalie de la différenciation sexuelle.

Chirurgie plastique des organes génitaux» du 18 mars 2011, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 11.3286.

125 «Personnes aux caractéristiques sexuelles ambiguës: sensibiliser davantage», disponible sur www.admin.ch > Documentation > Communiqués > 6 juillet 2016.

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La question de la mise en oeuvre des recommandations de la CNE a également été reprise dans l'interpellation Maury Pasquier126 de 2016. Quant à la question JohnCalame127 de 2013, elle invitait le Conseil fédéral à prendre des mesures pour simplifier les démarches administratives et à sensibiliser les autorités de l'état civil, ce qui était fait en février 2014 par l'envoi d'une Communication officielle de l'OFEC (voir ch. 1.1).

Répondant au postulat Naef128 de 2012, qui se référait notamment aux discriminations liées à la transsexualité et à l'intersexualité, le Conseil fédéral adoptait un rapport le 25 mai 2016 mentionnant entre autres mesures l'examen de l'opportunité de modifier la loi en vue d'introduire une procédure simple de changement de sexe à l'état civil (voir ch. 1.1 s.)129. Le postulat Reynard de 2016130 fait suite à ce rapport et demande au Conseil fédéral d'examiner la possibilité de collecter des données sur les discriminations dans le domaine LGBTI131.

En 2014, l'interpellation Trede132 s'enquerrait des démarches envisagées par le Conseil fédéral pour mettre en oeuvre le rapport de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), en particulier pour supprimer l'obligation pour les personnes transgenres de se soumettre à des traitements médicaux pour pouvoir changer de nom et d'état civil. En 2015, l'interpellation Fiala133 invitait le Conseil fédéral à combler les lacunes de la législation et de la pratique suisses au regard de la Résolution «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe», adoptée la même année au sein du Conseil de l'Europe (voir ch. 1.2 et 4.2.2). L'interpellation Maury Pasquier134 de 2017 revenait à nouveau sur la mise en oeuvre de cette Résolution ainsi que sur le rapport adopté par le Conseil fédéral en réponse au postulat Naef précité. Dans sa réponse du 10 mai 2017, le Conseil fédéral indiquait attendre les propositions du DFJP chargé d'examiner la création d'une base légale visant à simplifier la procédure de changement de l'inscription du sexe dans le

126 127 128 129 130

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134

Ip. Maury Pasquier 16.3148 «Personnes intersexuées. L'interlude a assez duré» du 17 mars 2016, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 16.3148.

Qst. John-Calame 13.5300 «Intergenre. Eviter la stigmatisation» du 10 septembre 2013, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 13.5300.

Po. Naef 12.3543 «Rapport sur le droit à la protection contre la discrimination» du 14 juin 2012, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 12.3543.

Ch. 4.3.7; disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 12.3543.

Po. Reynard 16.3961 «Collecter des données sur les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, en couvrant les discriminations multiples» du 8 décembre 2016, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia n o 16.3961.

Dans ce contexte, voir également l'interpellation du groupe socialiste 16.3679 «Que fait la Confédération pour lutter efficacement contre la discrimination multiple?» du 21 septembre 2016, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 16.3679.

Acronyme pour lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes.

Ip. Trede 14.4159 «Rapport de l'ECRI. Critiques relatives aux droits des personnes LGBTI» du 11 décembre 2014, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 14.4159.

Ip. Fiala 15.3521 «Personnes transgenres. Cohérence de la législation suisse et de la pratique dans le cas de la résolution 13742 du Conseil de l'Europe» du 4 juin 2015, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 15.3521, voir ch. 4.2.2.

Ip. Maury Pasquier 17.3032 «Garantir les droits des personnes transgenres» du 28 février 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 17.3032, voir ch. 4.2.2.

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registre de l'état civil. En décembre, une interpellation Ruiz135 visait la mise en oeuvre des recommandations de la CNE. En outre, les postulats Arslan136 et Ruiz137 ont été acceptés au Conseil national le 17 septembre 2018. Ces postulats ont pour but de charger le Conseil fédéral d'analyser dans un rapport les changements légaux et les adaptations du registre informatisé de l'état civil en cas d'introduction d'un troisième genre ou d'abandon de toute mention de genre à l'état civil. A noter enfin que le postulat Flach138 a été rejeté par le Conseil national le 13 juin 2019. La motion Herzog139 déposée le même jour n'a pas été traitée.

7

Avis exprimés en consultation

La procédure de consultation relative à l'avant-projet a eu lieu du 23 mai au 30 septembre 2018. Les cantons, les partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, les associations faîtières qui oeuvrent au niveau national, des communes, des villes et des régions de montagnes et de l'économie ainsi que d'autres organisations intéressées ont été invités à y prendre part.

A l'exception de quelques partis et organisations, la réforme a été accueillie favorablement par tous les participants à la procédure de consultation, qui ont reconnu la nécessité de simplifier le changement de sexe à l'état civil.

A noter des avis partagés quant à la désignation des officiers de l'état civil comme autorité administrative habilitée à recevoir les déclarations de changement de sexe (voir les ch. 3.1 et 8.1.1).

Certains cantons et partis de même que plusieurs organisations ont proposé que les mineurs capables de discernement puissent déposer ces déclarations sans recueillir le consentement du représentant légal (voir le ch. 8.1.4).

De manière isolée, des participants ont souhaité que le changement de prénom et de nom de famille soit réglé généralement de manière plus libérale, pour profiter à toute personne indépendamment d'un changement de sexe.

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138

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Ip. Ruiz 17.4183 «Personnes intersexuées. Mise en oeuvre de la protection des enfants, statistiques et information auprès du corps médical et des parents» du 14 décembre 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 17.4183.

Po. Arslan 17.4121 «Introduction d'un troisième sexe à l'état-civil.» du 13 décembre 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 17.4121. Voir également ch. 3.2.

Po. Ruiz 17.4185 «Introduction d'un troisième genre. Conséquences pour l'ordre juridique et pour Infostar» du 14 décembre 2017, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 17.4185. Voir également ch. 3.2.

Po. Flach 18.3690 «Supprimer en droit toute référence au sexe, pour assurer l'égalité de tous devant la loi» du 15 juin 2018, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 8.3690. Voir également ch. 3.2.

Mo. Herzog 18.3696 «Changement de sexe à l'état civil. Restons factuels» du 15 juin 2018, disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 18.3696.

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Commentaire des dispositions

8.1

Modifications du code civil: art. 30b P-CC

8.1.1

Déclaration de modification de l'inscription du sexe devant l'officier de l'état civil (al. 1)

Instauration d'une procédure de déclaration devant l'officier de l'état civil, fondée sur l'autodétermination Conformément à la prise de position de la CNE140, aux recommandations du CSDH141 ainsi qu'aux Résolutions du Conseil de l'Europe de 2015 et 2017142, il est proposé de mettre en place une procédure simple et rapide de changement de sexe à l'état civil, fondée sur l'autodétermination. A l'avenir, toute personne ayant la conviction intime et constante de ne pas appartenir au sexe inscrit dans le registre de l'état civil pourra faire une déclaration de changement de sexe devant l'officier de l'état civil.

La déclaration est fondée sur l'autodétermination de la personne concernée, ce qui signifie qu'elle se base sur sa perception intime. La conviction doit en outre être constante, ce qui suppose que la personne concernée soit persuadée de son caractère durable143.

140

«Attitude à adopter face aux variations du développement sexuel. Questions éthiques sur l'», p. 21 (recommandation no 11); disponible sur www.nek-cne.ch > Publications > Prises de position > No 20/2012. Voir également ch. 1.1.

141 «Accès à la justice en cas de discrimination», juillet 2015, ch. 3.4 à 3.7; disponible sur www.csdh.ch > Politique genre > Publication > Accès à la justice en cas de discrimination. Voir aussi l'étude spécifique «Teilstudie 3: LGBTI ­ Juristische Analyse», p. 25 ss et 54 s. (disponible à la même adresse). Voir également ch. 1.1 s.

142 Résolution 2048 (2015) de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe», ch. 3 et 6.2.1 ss, et Résolution 2191 «Promouvoir les droits humains et éliminer les discriminations à l'égard des personnes intersexes», ch. 5 et 7.3.1 ss; textes disponibles sur www.assembly.coe.int > FR > Travaux > Documents > Textes adoptés > 2048, resp. 2191.

143 Lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, un canton a suggéré qu'on fasse précéder la déclaration devant l'officier de l'état civil par une déclaration écrite qui permettrait d'apprécier la conviction intime de l'intéressé tandis qu'un autre canton a proposé d'introduire un délai de réflexion, par ex. de 6 mois, pour mesurer la constance de la conviction. Ces propositions vont à l'encontre de l'objectif de simplifier et raccourcir les procédures et sont rejetées. Du reste, en règle générale, le changement de sexe à l'état civil constitue l'une des dernières étapes d'un long parcours. Un troisième canton a proposé de renoncer à la formulation «conviction intime» au profit d'une expression plus claire. Cette proposition est également écartée. En effet, mis ensemble, les termes «conviction intime et constante» ne laissent pas d'ambiguïté. Ils font référence à la perception du déclarant, soit à un élément qui est certes par essence personnel. L'exigence de constance, soit de durabilité permet toutefois d'objectiver la perception. Durant la procédure de consultation, deux organisations ont en outre suggéré de remplacer «conviction intime» par la notion d'«identité de genre», à intégrer également dans le libellé du titre marginal, en substituant les termes «IV. Relativement à l'identité de genre» à
ceux «IV.

Relativement au sexe». Cette proposition n'a pas été retenue car la déclaration faite à l'officier de l'état civil a pour effet de modifier l'inscription du sexe portée au registre de l'état civil, lequel ne connaît en revanche pas la notion d'identité de genre (voir l'art. 8, let. d, OEC).

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Quoique discutée par divers cantons, l'attribution de la compétence à l'officier de l'état civil a été largement soutenue lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet. La présente réforme s'en tient donc à la variante mise en consultation (pour les détails, voir le ch. 3.1). Dans la mesure où la modification de l'inscription du sexe sera immédiatement portée au registre de l'état civil et communiquée aux services administratifs concernés144, l'intéressé pourra rapidement obtenir des extraits de l'état civil, une carte d'identité ou un passeport avec le nouveau sexe inscrit, et demander l'adaptation des diplômes et autres documents similaires, comme postulé dans la Résolution précitée de 2015145. Ces questions ne nécessitent pas d'être réglées au niveau du code civil qui consacre déjà le principe de la force probante accrue des registres publics (art. 9) et comporte des normes relatives à la modification des inscriptions portées au registre de l'état civil (art. 42 s.) et à la protection de la personnalité (art. 27 ss)146; conformément au souhait exprimé par différents participants à la procédure de consultation, des dispositions claires seront fixées dans la réglementation d'exécution, soit en particulier dans l'ordonnance du 28 avril 2004 sur l'état civil (OEC)147 et les directives d'application. Afin de clarifier un point évoqué lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, les documents d'état civil délivrés après le changement de sexe présentent selon la pratique ou bien la nouvelle identité inscrite ou celle qui prévalait au moment de la survenance de l'évènement d'état civil à la base de l'enregistrement (cf. art. 98 OEC). Au besoin, l'officier de l'état civil peut délivrer une attestation à propos du changement de sexe et prénom(s) intervenu. Une telle attestation peut notamment être requise par la personne concernée pour établir la modification de l'identité vis-à-vis d'un particulier, par exemple un institut bancaire ou une compagnie d'assurance.

Conditions de réception d'une déclaration de changement de sexe Par principe, il n'est pas permis de poser des conditions quelconques pour recevoir une déclaration de changement de sexe. Sont en particulier prohibées les exigences d'âge et de santé ainsi que les interventions chirurgicales, en particulier la
stérilisation et d'autres traitements médicaux, un diagnostic de maladie mentale 148 ou le divorce. Contrairement à deux avis isolés exprimés lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, l'on ne saurait en conséquence exiger une attestation 144

145

146

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812

Lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, l'Association suisse des services des habitants et l'Union des villes suisses ont mis l'accent sur l'importance que les différents services administratifs, dont le contrôle des habitants, soient informés des changements de sexe et de nom saisis au registre informatisé de l'état civil, dans le respect des droits des personnes concernées.

Résolution 2048 (2015) de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe», ch. 6.2.1; disponible sur www.assembly.coe.int > FR > Travaux > Documents > Textes adoptés > 2048.

Sous réserve d'une rectification formelle ultérieure, les inscriptions portées au registre de l'état civil, dont le sexe, lient les particuliers et autorités. Les normes sur la protection de la personnalité imposent en particulier aux écoles et employeurs de délivrer sur demande de nouveaux diplômes et certificats de travail avec le nouveau sexe inscrit.

RS 211.112.2 Dans le même sens, une association a relevé que la classification internationale de l'OMS (voir ch. 4.1.1) était révisée en sorte qu'elle a préconisé lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet d'abandonner toute expertise psychiatrique ou psychologique des personnes transgenres.

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médicale de manière systématique. Néanmoins, en cas de doutes sur la capacité de discernement, qui est présumée mais qui doit être vérifiée d'office à l'instar de l'identité, des investigations complémentaires seront effectuées conformément à l'art. 16 OEC. Dans ce cadre, l'officier de l'état civil pourra exiger la collaboration de la personne concernée et l'inviter à présenter un certificat médical établissant sa capacité nécessaire pour déposer une déclaration de changement de sexe. Lors de la procédure de consultation précitée, l'Association suisse des officiers de l'état civil a indiqué que ses membres ne pouvaient être tenus d'effectuer des investigations allant au-delà de cette norme. L'association a fondé cette position sur le fait que les officiers de l'état civil n'ont pas à vérifier la volonté des déclarants, ce qui est correct.

Conformément aux règles générales découlant du principe de la bonne foi selon l'art. 2 CC, la sincérité des déclarations de modification d'inscription du sexe à l'état civil sera en effet présumée mais l'officier de l'état civil devra refuser les déclarations manifestement abusives (art. 2, al. 2, CC; voir aussi le ch. 2) ou émanant de personnes dénuées de capacité de discernement. Comme dit plus haut, cette dernière devra être vérifiée d'office (voir aussi le ch. 8.1.4). La sécurité du droit et des transactions est garantie par les dispositions générales du droit civil, du droit administratif et du droit pénal. Ces normes offrent des instruments efficaces contre d'éventuels abus, en permettant de refuser les déclarations abusives et de rectifier les inscriptions non véridiques (voir ch. 2).

Comparution personnelle de la personne déclarante Durant la procédure de consultation relative à l'avant-projet, le principe selon lequel la déclaration de changement du sexe devra être faite en personne devant les officiers de l'état civil a été expressément soutenue par l'association professionnelle compétente. D'autres participants à la procédure de consultation ont suggéré que le changement de sexe puisse également s'effectuer par écrit, dans le but de garantir l'accès de l'institution à toute personne, notamment dans les situations de handicap.

Pour des raisons de sécurité du droit, il n'est pas prévu de déroger à la comparution personnelle, qui permet de vérifier
l'identité des personnes concernées et d'apprécier leur capacité de discernement. Cela étant, les dispositions d'exécution seront aménagées afin d'assurer à chaque personne l'exercice effectif du droit à faire adapter l'inscription de son sexe à l'état civil. Selon les dispositions en vigueur, qui s'appliqueront aux déclarations de changement de sexe, les personnes malentendantes bénéficient de la traduction gratuite en langage des sourds (voir art. 3, al. 2, OEC); d'autre part, si une personne disposée à signer n'est pas en état de le faire, le fonctionnaire compétent atteste cette disposition par écrit en indiquant le motif du défaut de signature (voir art. 18, al. 2, OEC).

Délai de traitement des déclarations de changement de sexe Des participants isolés à la procédure de consultation relative à l'avant-projet ont demandé à ce qu'un délai maximal (8 jours, resp. 1 mois) soit fixé pour le traitement du changement de sexe. La fixation d'un tel délai n'est ni opportune ni nécessaire.

Le traitement du dossier par l'officier de l'état civil dépend dans la pratique de la remise des documents nécessaires, soit en particulier des pièces d'état civil des per813

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sonnes non encore saisies dans le registre informatisé de l'état civil, soit en règle générale des personnes en provenance de l'étranger149 (voir art. 15a OEC). Une fois reçue, la déclaration de changement de sexe devra être enregistrée par l'officier de l'état civil sans délai (art. 19 OEC).

Formation des officiers de l'état civil Plusieurs participants à la procédure de consultation ont insisté sur la nécessité d'une formation adéquate des officiers de l'état civil. Avant l'entrée en vigueur de la réforme, et conformément à la pratique, l'OFEC établira les directives nécessaires et présentera les innovations aux cantons. Ceux-ci veilleront à leur tour à la formation continue de leur personnel (voir art. 45, al. 2, ch. 5, CC). A noter que, selon le projet, les déclarations de changement de sexe ne pourront être reçues que par un officier de l'état civil, soit un fonctionnaire au bénéfice de connaissances théoriques et pratiques approfondies, sanctionnées par un brevet fédéral (cf. art. 4 OEC)150.

Compétence territoriale pour la réception des déclarations de changement de sexe Sur le plan de la compétence territoriale (compétence ratione loci), il est prévu d'adapter l'ordonnance sur l'état civil de manière à ce que les déclarations de changement de sexe puissent être reçues en Suisse par tout officier de l'état civil et à l'étranger par toute représentation de la Suisse sur la base des instructions des autorités internes (cf. art. 13, 13a et 14a OEC). Il est renvoyé au surplus aux commentaires relatifs à l'art. 40a P-LDIP (ch. 8.2).

Siège de la matière et application de la réglementation dans le temps Théoriquement, il aurait été envisageable de régler la matière ailleurs que dans le code civil en créant une législation spécifique. Une telle variante a cependant été rejetée car elle entraverait la cohérence du système et l'application du droit151. Sous réserve d'une modification de la loi fédérale sur le droit international privé (voir ch.

8.2), point n'est besoin de modifier d'autres textes légaux, en particulier la loi fédérale sur les conditions et la procédure régissant la stérilisation de personnes152.

Il n'est pas nécessaire non plus de prévoir de dispositions transitoires particulières.

Conformément aux principes généraux (art. 1 ss du titre final CC), la novelle n'aura pas d'effet
rétroactif. Dès son entrée en vigueur, les personnes concernées seront en droit de déposer une déclaration de modification de l'inscription du sexe devant l'officier de l'état civil. Le cas échéant, les procédures de changement ou de rectification de sexe ouvertes sous l'ancien droit pourront alors être classées comme devenues sans objet.

149

A noter que l'existence d'une inscription préalable dans le registre de l'état civil suisse ne constitue pas une condition pour admettre la compétence de l'officier de l'état civil suisse. Celle-ci est fondée en cas de domicile ou de nationalité suisses (art. 37 LDIP en relation avec l'art. 40a P-LDIP; voir ch. 8.2).

150 La réception d'une déclaration de changement de sexe par une représentation à l'étranger ne fait pas exception au système puisqu'elle intervient selon les instructions des autorités internes de l'état civil.

151 Durant la procédure de consultation relative à l'avant-projet, ce choix a été expressément salué par la CNE ainsi que par un canton, un parti et une association.

152 Voir ch. 3.3.

814

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Au surplus, il est également renvoyé aux développements figurant au ch. 2.

8.1.2

Choix de nouveaux prénoms en lien avec la déclaration de modification de l'inscription du sexe (al. 2)

En lien avec la déclaration de modification de l'inscription du sexe, la personne déclarante pourra choisir un ou plusieurs nouveaux prénoms qui seront inscrits dans le registre de l'état civil. De fait, le prénom fait généralement référence au sexe de son titulaire. Suite aux interrogations formulées dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, il y a lieu de préciser que cette règle n'est pas absolue. Ainsi, pour les enfants présentant des variations du développement sexuel, il est le cas échéant indiqué de choisir un prénom épicène, soit un prénom qui peut être utilisé pour les deux sexes153. Un tel choix restera évidemment possible lors du dépôt d'une déclaration de changement de sexe. Conformément au postulat d'égalité, cette faculté sera admise non seulement aux enfants présentant des variations du développement sexuel mais également offerte aux personnes transgenres qui sont concernées par une identité sexuelle ambivalente, soit pour des motifs non strictement biologiques. A noter qu'une telle solution correspond à la pratique actuelle des tribunaux et autorités de changement de nom.

Cela étant, le choix du prénom ne sera pas laissé à la discrétion de l'ayant-droit.

L'officier de l'état civil devra refuser d'inscrire les prénoms manifestement préjudiciables aux intérêts d'un enfant, comme il le fait d'ailleurs déjà lors de l'annonce d'un prénom à l'occasion de la naissance d'un enfant154.

A noter que contrairement à la proposition formulée par une minorité de participants à la procédure de consultation relative à l'avant-projet, le changement de prénom indépendant d'une déclaration de modification de l'inscription du sexe restera soumis à la procédure de l'art. 30 CC, disposition qui reste inchangée155. De manière générale, il est reconnu que la situation de transsexualisme ou de transidentité156

153

«Intersexualité: Inscription et modification du sexe et des prénoms dans le registre de l'état civil», Communication officielle OFEC no 140.15 du 1er février 2014; disponible sur www.ofec.admin.ch > Directives > Communications officielles OFEC.

154 Art. 37c, al. 3, OEC 155 Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, un parti a émis le souhait de simplifier l'ensemble de la procédure de changement de nom; cette proposition qui va bien au-delà de l'objectif de la présente réforme ne peut être suivie dans ce cadre. A cet égard, il faudrait le cas échéant engager une nouvelle réforme, étant rappelé que les conditions de changement de nom ont déjà été assouplies lors de la modification de l'art. 30 CC, entrée en vigueur le 1.7.2013.

156 L'association Transgender Network Switzerland propose de ne plus utiliser ce terme qui a une connotation médicale et de lui préférer celui de «transidentité»; voir la brochure «Trans* Brochure d'information rédigée par des personnes trans* pour les personnes trans* et pour toutes les autres», 2016/2017, p. 7 et 74; disponible sur www.transgendernetwork.ch/fr/ > Information.

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présente un motif légitime qui justifie un changement de prénom157. La disposition précitée peut aussi être invoquée pour obtenir un changement de patronyme motivé par la protection d'une personne harcelée du fait de son identité de genre158.

Au surplus, il est également renvoyé aux développements figurant au ch. 2.

8.1.3

Maintien des liens du droit de famille (al. 3)

Conformément aux standards internationaux (voir ch. 1.2, 4.2.1 et 4.2.2), l'existence d'un mariage ou d'un partenariat ne fait plus obstacle au changement de sexe d'un des partenaires. En d'autres termes, l'union légalement conclue devant l'officier de l'état civil sera maintenue nonobstant la déclaration de modification de l'inscription du sexe d'un conjoint ou partenaire enregistré. Cela étant, une éventuelle conversion du mariage en partenariat enregistré ou l'inverse devant l'officier de l'état civil n'est pas prévue dans le cadre de la présente réforme. L'intervention du juge, compétent pour prononcer la dissolution du mariage159, respectivement du partenariat enregistré160, restera le cas échéant nécessaire pour prononcer la conversion de l'institution.

Cette procédure judiciaire permet en outre de régler les effets accessoires du changement d'institution, notamment patrimoniaux161, dans le plein respect des intérêts de chaque époux ou partenaire. Il n'est pas nécessaire de revoir ou de compléter la norme ici proposée.

Cette solution a été largement soutenue lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet. La question de la conversion du partenariat enregistré en mariage devant les autorités de l'état civil fait l'objet de la modification du code civil con157

158

159 160 161

816

Büchler / Cottier, Transsexualität und Namensänderung, in: REC 2006, p. 2 ss et références citées; voir également Bühler, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 6e éd., Bâle 2018, art. 270 à 270b, no 41; Recher, «Les droits des personnes trans*», in: Ziegler / Montini / Ayse Copur, Droit LGBT, Droits des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres en Suisse, Bâle 2015, p. 131 ss.

Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, une association a émis le souhait qu'une déclaration auprès de l'officier de l'état civil puisse également être effectuée pour modifier le nom de famille dans une telle situation, proposition qui est rejetée pour des raisons d'égalité avec d'autres circonstances pouvant justifier un changement de nom de famille.

Art. 111 ss CC Art. 29 s. LPart A cet égard, les effets du mariage et du partenariat enregistré diffèrent passablement. Ces différences ont des conséquences essentiellement au moment de la dissolution de l'union.

Le mariage est plus marqué par un principe de solidarité alors que le partenariat enregistré est à l'inverse davantage régi par le principe d'indépendance économique des partenaires.

Ainsi, le droit à l'entretien est réglé plus restrictivement pour les ex-partenaires; à cet égard, voir les art. 130 ss CC et l'art. 34 LPart qui renvoie dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2018 de manière plus large aux dispositions du CC. Par ailleurs, les conjoints mariés sont soumis au régime ordinaire de la participation aux acquêts.

Par contrat de mariage, reçu en la forme authentique, ils peuvent opter pour le régime de la séparation des biens ou de la communauté de biens (art. 181 ss, 221 ss et 247 ss CC). Ce dernier régime ne peut être choisi par les partenaires enregistrés qui sont d'office soumis à des rapports patrimoniaux analogues à la séparation de biens sauf convention reçue en la forme authentique qui permet notamment d'opter pour le régime de la participation aux acquêts (art. 18 et 25 LPart).

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cernant le mariage civil pour tous (13.468)162. Selon le projet adopté par la Commission des affaires juridiques du Conseil national en date du 30 août 2019, il est prévu d'ouvrir le mariage aux couples de même sexe et d'abroger l'institution du partenariat enregistré, en permettant aux partenaires déjà enregistrés de déclarer à l'office de l'état civil vouloir convertir leur partenariat en mariage. Dès le dépôt de la déclaration, les partenaires seront considérés comme mariés, la durée du partenariat enregistré préexistant étant comptée comme mariage. Sauf contrat de mariage ou convention sur les biens, le régime ordinaire de la participation aux acquêts sera appliqué dès le moment de la conversion. Si elle est adoptée, cette réforme aura pour effet de permettre la conversion d'un partenariat enregistré en mariage (et non l'inverse) par une déclaration conjointe des partenaires devant l'officier de l'état civil, indépendamment du changement de sexe des personnes concernées (cf. art. 35 et 35a P-LPart).

A noter que les conjoints (devenus homosexuels suite au changement de sexe de l'un d'eux) conservent la faculté de se séparer ou de divorcer à tout moment. La séparation peut être convenue ou ordonnée par le juge dans le cadre de mesures protectrices de l'union conjugale163. Le divorce est le cas échéant prononcé sur requête commune des époux164 ou sur demande unilatérale de l'un d'eux au terme d'une suspension de la vie commune de deux ans au moins165 ou sans délai d'attente lorsque des motifs sérieux qui ne sont pas imputables à l'époux demandeur rendent la continuation du mariage insupportable166. La situation des partenaires enregistrés est réglée de manière comparable sous réserve que ce cas de dissolution n'est pas prévu et qu'une demande unilatérale de dissolution peut être engagée par un partenaire au terme d'une séparation d'une année167. Ainsi, la novelle qui ne modifie à cet égard en rien le droit en vigueur prend également dûment en compte l'intérêt des personnes qui ne peuvent envisager de poursuivre une vie commune après le changement de sexe officiel de leur conjoint ou partenaire.

En résumé, la déclaration de modification de l'inscription du sexe restera sans effet sur les liens du mariage et du partenariat enregistré, ainsi que sur les autres liens de famille, soit en particulier
les liens de parenté168 et de filiation169. A l'égard de l'enfant d'une personne qui a changé de sexe à l'état civil, celle-ci apparaîtra par principe dans les documents officiels avec le sexe qui était inscrit à sa naissance.

Lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, quelques organisations ont suggéré d'inscrire le sexe actuel des parents, en prenant en compte le changement de sexe intervenu le cas échéant ou de renoncer à toute mention du sexe. En soi, il n'est pas exclu de délivrer des documents d'état civil avec le nouveau sexe des parents si cela est conforme au bien de l'enfant. A noter qu'en l'état, les modes 162 163 164 165 166 167

Disponible sur www.parlement.ch, objet Curia no 13.468.

Art. 172 ss CC Art. 111 s CC Art. 114 CC Art. 115 CC Art. 29 s. LPart. A noter que l'union des partenaires n'est pas protégée spécialement comme la communauté conjugale mais les mesures nécessaires pour les protéger seront ordonnées en cas de suspension de la vie commune dans le cadre d'une procédure analogue (art. 171 ss CC, 17 LPart et 271 ss et 305 s. CPC).

168 Art. 20 s. CC 169 Art. 270 ss CC, auquel renvoie du reste l'art. 27a LPart.

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d'établissement de la filiation restent inchangés, ce qui signifie en particulier que vis-à-vis de l'enfant, la personne qui l'a mis au monde est considérée comme sa mère et que le mari de celle-ci est présumé être le père (art. 252 et 255 CC).

8.1.4

Consentement du représentant légal (al. 4)

La faculté d'obtenir le changement de l'inscription du sexe par déclaration à l'officier de l'état civil est reconnue à toute personne capable de discernement. Selon le projet, toutefois, les personnes mineures et les personnes sous curatelle de portée générale nécessitent le consentement du représentant légal (ch. 1 et 2); le consentement du représentant légal est également nécessaire si l'autorité de protection de l'adulte en a décidé ainsi (ch. 3). Lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, cette disposition a été soutenue par la majorité des participants. Certains participants ont proposé de renoncer au consentement du représentant légal pour les mineurs, et plus généralement pour les personnes capables de discernement, indépendamment de l'existence d'une mesure tutélaire. A cet égard, une limite d'âge minimale (12, respectivement 16 ans) a parfois été évoquée. Ces propositions soulignent le caractère éminemment personnel de la déclaration de changement de sexe.

Cette déclaration n'est donc pas susceptible de représentation170. Le Conseil fédéral considère toutefois que, dans le cadre de la procédure simplifiée proposée ici, l'on ne saurait renoncer au consentement du représentant légal, qui apparaît comme une mesure nécessaire pour protéger les personnes particulièrement vulnérables, en particulier des mineurs, contre des déclarations faites à la légère ou sous l'influence de tiers.

La prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant est une considération primordiale, conformément à la Résolution 2048 «La discrimination à l'encontre des personnes transgenres en Europe» du Conseil de l'Europe (ch. 6.2 ss). Cette résolution cite en exemple la législation de Malte qui prévoit une procédure spécifique pour les mineurs (voir ch. 4.3.1). La législation luxembourgeoise, plus récente encore (voir ch. 4.3.6), a également instauré une réglementation protégeant spécialement les mineurs et les personnes sous tutelle. Des dispositions particulières sont aussi connues en Allemagne, en France et en Italie, Etats qui ont conservé une procédure judiciaire (voir ch. 4.3.2 à 4.3.4).

La solution proposée est inspirée de l'actuel art. 260 CC (consentement du représentant légal en cas de reconnaissance d'enfant). Elle permet à la fois de respecter l'autodétermination de la personne concernée,
tout en la protégeant de manière adéquate contre des déclarations faites de manière inconsidérée. La procédure envisagée est bien connue des praticiens de l'état civil qui sont déjà chargés de recevoir le consentement du représentant légal de l'auteur d'une déclaration de paternité (voir l'art. 260, al. 2, CC à combiner avec l'art. 11, al. 4, OEC) et qui pourront sans autre procéder à l'avenir de manière analogue pour la réception du consentement des représentants légaux à la déclaration de modification de l'inscription du sexe par des personnes mineures.

170

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Art. 19c, al. 2, CC

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La pratique en matière de déclaration de paternité peut être résumée comme suit. Le refus de consentement peut faire l'objet d'un recours à l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (APEA) si le représentant légal est un tuteur, respectivement un curateur171. Si le refus émane d'un parent, il n'y a pas de recours possible.

L'APEA peut néanmoins rappeler ce parent à ses devoirs172 et l'inviter le cas échéant à revenir sur son refus. A défaut, il faut passer par une action en paternité étant précisé que la procédure est engagée par le curateur qui sera désigné par cette autorité173, à moins que l'intéressé puisse agir seul parce qu'il est capable de discernement. Pour les personnes incapables de discernement, l'action en paternité s'impose toujours, dès lors que la déclaration de paternité qui a un caractère éminemment personnel (art. 19c, al. 2, CC) n'est pas susceptible de représentation. Le consentement ne supplée pas l'absence de discernement 174.

A l'avenir, ces principes pourront être transposés de manière analogue à la déclaration concernant l'inscription du sexe. Dans l'hypothèse où une déclaration ne pourrait être envisagée, soit que le consentement requis fait défaut, soit que l'intéressé est incapable de discernement (le dépôt d'une déclaration par le représentant légal est en particulier aussi exclu), il y aura lieu de procéder conformément aux dispositions générales en vigueur, soit par une procédure judiciaire ou une rectification administrative de l'inscription du sexe portée au registre. Conformément à la Communication officielle OFEC no 140.15 «Intersexualité: Inscription et modification du sexe et des prénoms dans le registre de l'état civil», les autorités de l'état civil sont habilitées dans un cadre limité à rectifier l'inscription de naissance sur présentation d'une annonce rectificative, émanant du personnel médical (art. 43 CC). En dehors de ce cas, une procédure judiciaire restera nécessaire (art. 42 CC)175.

Ces principes signifient concrètement qu'en l'absence du consentement du représentant légal, le déclarant, pour peu qu'il soit capable de discernement, aura toujours la faculté d'en référer à l'APEA.

Si le refus du consentement émane d'un curateur ou d'un tuteur, la personne concernée pourra saisir l'autorité précitée d'un recours contre le refus de consentement
pour faire annuler cette décision et obtenir que le représentant légal soit enjoint de déposer le consentement requis à l'appui de la déclaration de changement de sexe qui sera reçue par l'officier de l'état civil. Conformément au droit de procédure en vigueur, la décision y relative de l'APEA sera susceptible de recours jusqu'au Tribunal fédéral.

171 172 173 174

Art. 297 s., 298b, 311, 327a, 327c et 419 CC Art. 307 CC Art. 306, 308 et 408 CC Voir Fountoulakis / Affolter-Fringeli / Biderbost / Steck, Fachhandbuch Kindes- und Erwachsenenschutzrecht, Expertenwissen für die Praxis, Zurich 2016, ch. 11.41 s et 11.61 ss; Guillod, Commentaire romand, Code civil I, Bâle 2010, art. 260, N. 8 ss; Meier / Stettler, Droit de la filiation, 6e éd., Genève / Zurich / Bâle 2019, ch. 124 ss, 1175 et 1229; Schwenzer / Cottier, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 6 e éd., Bâle 2018, Art. 260, N. 8 s.; Stettler, Le droit suisse de la filiation, Traité de droit privé suisse, vol. III, tome II, 1, Fribourg 1987, p. 39 ss.

175 Voir ch. 1.1 s. Voir aussi Recher, Änderung von Name und amtlichem Geschlecht: einfach zum rechtskonformen Entscheid, in: FamPra.ch 2015, p. 623 ss, ch. III, 3.

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Si le consentement est refusé à une personne mineure sous autorité parentale, l'enfant pourra demander à l'APEA d'inviter le ou les parents à revoir cette position en vue de recueillir le consentement manquant. Si celui-ci ne peut néanmoins être obtenu devant cette autorité, l'enfant conservera son droit de déposer personnellement une requête au tribunal en vue de l'adaptation, respectivement la rectification du sexe inscrit au registre de l'état civil. Au besoin, un curateur ad hoc sera désigné176.

Ainsi, par la présente réforme, toute personne capable de discernement bénéficiera à l'avenir de la simplification de la procédure de changement de sexe, étant précisé que les mineurs et personnes sous curatelle de portée générale seront protégés spécialement, tout en conservant la possibilité d'agir personnellement devant le tribunal compétent en cas de refus de consentement du représentant légal. Le tribunal saisi veille en particulier au respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Conformément à la pratique en vigueur, la légitimation active pour déposer une action en changement de sexe dépend déjà, comme en matière de requête de changement de nom, non pas de la majorité mais de la capacité de discernement177.

A cet égard, la loi ne fixe pas d'âge déterminé à partir duquel les personnes mineures sont censées détenir la capacité de discernement. Il faut apprécier dans chaque cas si l'enfant dispose de la capacité d'agir raisonnablement au sens de la loi178. Présumée à partir de 12 ans par analogie avec l'art. 270b CC179, la capacité de discernement peut le cas échéant être admise à un âge plus précoce, dans la mesure où l'enfant prend souvent conscience d'être un garçon ou une fille au moment d'entrer à l'école180. Par ailleurs, les maladies, en particulier les déficiences psychiques, n'atteignent pas nécessairement la capacité de discernement.

176 177

Art. 308 CC ATF 140 III 577 et décision du Tribunal régional d'Emmental-Oberaargau, du 27 mars 2018 (CIV 18 504 KAS / BOD); voir également Recher, Änderung von Name und amtlichem Geschlecht: einfach zum rechtskonformen Entscheid, in: FamPra.ch 2015, p. 623 ss, ch. III, 3.

178 ATF 134 II 235 179 Cette disposition figure dans les normes sur les effets de la filiation et concerne donc l'attribution du nom de famille des parents à l'enfant; l'on considère toutefois qu'elle doit également s'appliquer aux changements de nom par décision de l'autorité (ATF 140 III 577, cons. 3.1.2 et réf. cit.; voir aussi Geiser, «Das neue Namensrecht», conférence donnée le 27 avril 2012 à Lucerne, ch. 3.24 ss; disponible sur le site de la Conférence des autorités de surveillance de l'état civil sous www.kaz-zivilstandswesen.ch > Publications).

180 Voir Nehmiz, «Aus Paul wird Paula», article paru dans Ostschweiz am Sonntag, du 19 novembre 2017, p. 10, et Zürcher, «Vaud et Genève se mobilisent pour les jeunes transgenres. Brochure pour le personnel scolaire, groupes pour les parents... La prise de conscience est générale, avec plusieurs projets», article paru dans 24 heures, du 15 novembre 2017. Voir également le document de la Fondation Agnodice «Elèves transgenres Guides de bonnes pratiques lors d'une transition de genre dans un établissement scolaire et de formation», 2017, qui mentionne une prise de conscience de l'enfant de son identité trans* dès l'âge de 3 ans, avec un pic à 5 ans, p. 8; disponible sur www.agnodice.ch/fr > Portail Enfants Adolescents Proches. La brochure de Transgender Network Switzerland «Trans* Brochure d'information rédigée par des personnes trans* pour les personnes trans* et pour toutes les autres», 2016/2017, évoque un âge de 3 ou 4 ans, p. 37; disponible sur www.transgender-network.ch/fr > Information. Voir aussi Recher, Änderung von Name und amtlichem Geschlecht: einfach zum rechtskonformen Entscheid, in: FamPra.ch 2015, p. 623 ss, ch. I.

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Ici aussi, l'autorité doit apprécier dans chaque cas concret si l'intéressé a la capacité nécessaire pour se déterminer sur son identité et partant pour faire la déclaration devant l'officier de l'état civil, respectivement engager une action ou une demande de rectification181. En cas de doute, l'autorité effectue les vérifications nécessaires, en sollicitant notamment l'avis d'un expert médical, dans le cadre de l'obligation de collaborer de la personne intéressée182.

8.2

Modifications de la loi fédérale sur le droit international privé: art. 40a P-LDIP

La révision nécessite l'adaptation de la LDIP. L'art. 40a P-LDIP prévoit l'application par analogie des art. 37 à 40 LDIP sur le nom vu la similitude des questions juridiques qui se posent. Un renvoi permet d'éviter l'adjonction de plusieurs articles.

La pratique actuelle admet la compétence des tribunaux suisses pour constater un changement de sexe sur le fondement de l'art. 33 LDIP. Les décisions étrangères sont reconnues en vertu de l'art. 32 LDIP183. Les Suisses domiciliés à l'étranger peuvent invoquer le for de nécessité des tribunaux suisses, fondé sur l'art. 3 LDIP184.

A l'avenir, le renvoi aux art. 37 et suivants LDIP aura pour effet de fixer plus clairement, tant pour la détermination du sexe à la naissance que pour la modification ultérieure de son inscription, la compétence, le droit applicable et la reconnaissance de décisions et actes étrangers en la matière.

Le cas échéant, la saisie d'une personne au registre de l'état civil suisse avec la mention de son sexe, de son prénom et de ses autres données relève de la compétence des autorités suisses, plus précisément des officiers de l'état civil 185. La détermination du sexe à la naissance sera en principe soumise au droit suisse pour les personnes domiciliées en Suisse186. Pour les personnes domiciliées à l'étranger, le droit applicable sera celui que désignent les règles de droit international privé de l'Etat de domicile187. Dans les deux hypothèses, le choix de la loi nationale sera admis en sus. La question joue concrètement un rôle en ce qui concerne l'inscription d'un troisième genre dans les registres, option qui n'est actuellement connue que

181 182

183 184

185 186 187

ATF 98 Ia 324 et 88 IV 111 En ce qui concerne les autorités d'état civil, voir l'art. 16 OEC (voir le ch. 8.1.1).

S'agissant d'une procédure judiciaire, voir l'art. 160 CPC, qui comporte entre autres l'obligation de produire des titres, tels qu'un certificat médical, ou l'obligation de tolérer un examen sur la personne par un expert.

Bucher, Commentaire romand / Loi sur le droit international privé, Convention de Lugano, Bâle 2011, ad art. 33, N. 4.

ATF 143 III 284, consid. 5.3 et 119 II 264, consid. 7. Dans l'ATF 143, le Tribunal fédéral citant une partie de la doctrine évoque aussi de s'inspirer pour la compétence directe des art. 39 à 42 LDIP.

Art. 8, let. d, 9, 15, 15a, 20, 20b et 37c OEC Art. 37, al. 1, première hypothèse, en relation avec l'art. 40a P-LDIP.

Art. 37, al. 1, deuxième hypothèse, en relation avec l'art. 40a P-LDIP.

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dans certains Etats, notamment en Allemagne et en Autriche (voir les ch. 3.2, 4.3.2 et 4.3.3)188.

En ce qui concerne la modification de l'inscription du sexe en Suisse, la réforme prévoit la faculté de faire une déclaration auprès de l'officier de l'état civil suisse, étant précisé qu'une procédure judiciaire ou une rectification administrative reste nécessaire pour les personnes incapables, respectivement lorsque le consentement du représentant légal fait défaut (voir le ch. 8.1.4). Sur le plan international, la compétence sera donnée à l'autorité du lieu de domicile de la personne concernée 189. Les Suisses sans domicile en Suisse (y compris les personnes bi- ou plurinationales) auront la faculté de faire la déclaration auprès d'un officier de l'état civil en Suisse (il est prévu que ces déclarations puissent être déposées devant tout officier de l'état civil; voir ch. 8.1.1), respectivement d'engager auprès des autorités compétentes du canton d'origine l'action ou la demande de rectification nécessaires 190. Suite aux réactions intervenues dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avantprojet, il est ici précisé que la déclaration pourra également être reçue auprès d'une représentation suisse à l'étranger (voir le ch. 8.1.1). Par ailleurs, l'existence d'une inscription préalable dans le registre de l'état civil suisse ne constitue pas une condition pour admettre la compétence de la réception d'une déclaration par les autorités suisses. Celle-ci est donc donnée pour les personnes en provenance de l'étranger qui sont domiciliées en Suisse même si elles n'ont pas encore été saisies au registre de l'état civil suisse, étant précisé qu'une telle saisie suppose la présentation des documents d'état civil étrangers nécessaires (art. 15a OEC; voir le ch. 8.1.1). A noter que, conformément aux règles ordinaires, l'adaptation des données personnelles dans les registres et documents officiels étrangers (en particulier le passeport et la carte d'identité) incombe aux personnes concernées. Lors de l'établissement des livrets pour étranger, il y a lieu d'observer que les nom et prénom de leur titulaire sont mentionnés conformément aux documents de voyage de l'Etat d'origine. L'on relèvera enfin que, dans sa conception actuelle, qui pourrait être modifiée à l'avenir, le registre informatisé de
l'état civil suisse est fondé sur la binarité des sexes. Toute personne est ainsi impérativement saisie avec le sexe «masculin» ou «féminin», à l'exclusion de toute autre mention. Cela exclut de laisser le champ «sexe» vide et empêche d'inscrire une troisième option de genre. En conséquence, il n'est aujourd'hui pas possible de refléter à l'état civil suisse pareilles situations qui seraient créées en vertu d'une législation étrangère. Le renvoi aux dispositions sur le nom a pour effet de soumettre la détermination du sexe, sa modification à l'état civil, y compris les conditions et les effets d'un tel changement, au droit suisse191. A noter que conformément à la novelle (voir le ch. 8.1.1), la déclaration de modification de l'inscription du sexe ne sera en soi plus soumise à une quelconque condition. Le changement de sexe n'influera pas sur les rapports de filiation existants, l'autorité parentale ou le droit de garde, questions qui continueront à obéir aux règles en la matière192.

188 189 190 191 192

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Selon les principes suisses applicables en matière de tenue des registres (art. 40 LDIP), un troisième sexe ne peut être inscrit au registre de l'état civil en Suisse.

Art. 38, al. 1, en relation avec l'art. 40a P-LDIPl.

Art. 38, al. 2, et art. 23, al. 1, en relation avec l'art. 40a P-LDIPl.

Art. 38, al. 3, en relation avec l'art. 40a P-LDIPl.

Art. 66 ss et 85 LDIPl

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La modification de la mention du sexe intervenue à l'étranger sera reconnue en Suisse (dans les catégories de sexe connues ici) pour peu qu'elle soit valable dans l'Etat du domicile ou dans l'Etat national de l'intéressé 193. La nouvelle réglementation concerne la reconnaissance de la seule modification de la mention du sexe sans couvrir d'éventuels effets accessoires d'une décision étrangère, comme la dissolution d'un mariage ou d'un partenariat existant qui interviendrait en même temps que le changement de sexe d'un conjoint ou partenaire. La reconnaissance de tels effets restera soumise aux normes spécifiques194.

La transcription du sexe dans le registre de l'état civil suisse a lieu conformément aux principes suisses sur la tenue des registres195. Le renvoi à l'art. 40 LDIP donnera une assise légale à l'inscription du sexe selon les principes suisses sur la tenue des registres, comme cela se pratique déjà pour les noms, qui doivent impérativement être inscrits en caractères latins (selon le jeu de caractères ISO 8859­15) et dans l'une des catégories prévues, soit noms de famille, prénoms et autre nom officiels (art. 24 et 80 OEC). L'application des principes suisses sur la tenue des registres, par le renvoi du nouvel art. 40a à l'art. 40 LDIP, permettra d'éviter qu'on doive transcrire une catégorie de sexe inconnue de notre système juridique. Notre ordre juridique est binaire (masculin / féminin) et le projet ne prévoit pas d'introduire un troisième genre en Suisse. A l'instar des systèmes du contrôle des habitants, il se peut toutefois que le registre et les formules de l'état civil soient adaptés à l'avenir pour permettre que les ressortissants étrangers, provenant en particulier d'Allemagne ou d'Autriche, dont le sexe n'est pas défini comme masculin ou féminin, soient inscrits au registre sans aucune indication quant au sexe (voir les ch. 3.2, 4.3.2 et 4.3.3). Une telle adaptation, essentiellement technique, nécessitera le cas échéant de modifier les dispositions d'exécution et permettra d'éviter des situations boiteuses, en ayant en Suisse une inscription identique à celle de l'Etat d'origine de l'intéressé.

Elle permettra aussi de se prémunir contre la multiplication de mentions sexuelles qui seraient totalement inconnues des conceptions occidentales. En effet, il existe des cultures
qui connaissent plus de trois sexes. Si de telles typologies étaient prévues dans la législation d'un Etat étranger, il est important qu'une norme de rang légal permette de refuser la transcription d'une telle catégorie sexuelle dans le registre d'état civil suisse.

9

Conséquences

9.1

Conséquences pour la Confédération

Sous réserve de l'adaptation d'ordonnances en matière d'état civil et de documents d'identité (voir le ch. 5) et de l'adoption de directives et informations y relatives, l'introduction d'une déclaration concernant le sexe à l'état civil, avec choix corrélatif d'un ou plusieurs nouveaux prénoms, n'aura pas de conséquences pour la Confédération. Ces travaux seront effectués dans le cadre des ressources existantes.

193 194 195

Art. 39 en relation avec l'art. 40a P-LDIP.

Art. 32, 45a, 65 et 65d LDIP.

Art. 40 en relation avec l'art. 40a P-LDIP.

823

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9.2

Conséquences pour les cantons et les communes

La mise en oeuvre de la présente réforme n'entraînera pour les offices de l'état civil que peu de changements en ce qui concerne la tenue du registre informatisé de l'état civil (Infostar). En effet, aujourd'hui déjà, les décisions en matière de changement de sexe et de prénom(s) doivent être enregistrées dans Infostar, respectivement inscrites dans un registre des naissances tenu sous forme papier (art. 98, al. 1, let. g et h, OEC). Les tribunaux seront quelque peu déchargés puisque les officiers de l'état civil seront généralement tenus de recevoir les déclarations de modification de l'inscription du sexe avec choix de nouveaux prénoms. En ce qui concerne le devoir de conseil des officiers de l'état civil, il sera limité aux opérations d'état civil, en lien notamment avec la procédure de réception de la déclaration de changement de sexe. Pour toute autre question, les personnes concernées seront renvoyées aux institutions et organisations spécialisées196.

Dans la mesure où l'activité des services de l'état civil sera couverte par des émoluments appropriés, la réforme sera financièrement neutre. Lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, différentes organisations ont demandé l'exonération ou la réduction des émoluments pour le changement de sexe, à tout le moins pour les personnes mineures. Ces entités ont en particulier mis en avant la nécessité de garantir l'accès à l'institution et la précarité des personnes concernées, souvent sans emploi. Une association professionnelle locale a exigé que les frais relatifs à la rectification des déclarations abusives soient supportés par les responsables.

Conformément au mandat du législateur, les émoluments dans le domaine de l'état civil sont soumis aux principes de couverture des coûts et de l'équivalence 197.

Toutes les personnes concernées ne sont pas indigentes. Aussi, il ne paraît pas justifié de prévoir une réduction systématique d'émoluments. Dans un souci d'égalité, il conviendra de percevoir des émoluments équivalents à ceux perçus en matière de déclarations concernant le nom et de déclarations de paternité198. Ces émoluments ont en effet été fixés de manière à garantir l'exercice effectif des droits. Conformément à la pratique en vigueur, si une personne est dans le besoin, l'officier de l'état civil peut réduire ou remettre
l'émolument199. Par ailleurs, si l'autorité cantonale de surveillance doit rejeter un recours suite au refus par un officier de l'état civil de recevoir une déclaration abusive ou si cette autorité doit rectifier un tel enregistre196

Dans le cadre de la procédure de consultation relative à l'avant-projet, l'Association suisse des officiers de l'état civil a indiqué que le traitement d'une déclaration concernant le changement de sexe devrait être analogue à la réception d'une déclaration concernant le nom après divorce (art. 119 CC et 13 OEC), sans obligation de conseil à charge des officiers de l'état civil. Si un tel devoir existe effectivement de manière générale pour les autorités d'état civil (cf. art. 16, al. 5, OEC), il ne porte néanmoins que sur leurs attributions propres, c'est-à-dire sur les tâches liées strictement à l'activité desdites autorités et non sur le contexte social ou juridique plus général.

197 Voir le message concernant la révision du Code civil suisse du 15 novembre 1995, état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asiles de famille, tutelle et courtage matrimonial (FF 1996 I 1 ss), ch. 213.12.

198 En faisant référence aux émoluments perçus actuellement dans le domaine des déclarations concernant le nom et les déclarations de reconnaissance d'enfant, cela représenterait 75 francs pour la déclaration de changement de sexe et 30 francs pour le consentement du représentant légal (voir l'annexe 1, ch. 4 ss et 5 ss OEEC).

199 Art. 13 OEEC

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ment obtenu frauduleusement, les frais sont mis à la charge de la personne fautive200. Ces principes seront également applicables en ce qui concerne la réception des déclarations de changement de sexe.

9.3

Conséquences sociales et économiques

La réforme envisagée améliore la situation des personnes transgenres ou présentant une variation du développement sexuel. A l'avenir, l'adaptation de leur état civil (mention du sexe et du prénom) sera à la fois plus simple et plus rapide.

Par ailleurs, la réforme ici présentée ne remet pas en cause le principe binaire des sexes (masculin / féminin) et respecte également la sécurité du droit dès lors que différentes cautèles permettent de rectifier une inscription d'office et de lutter contre d'éventuels abus (voir ch. 2).

9.4

Conséquences sous l'angle de l'égalité entre femmes et hommes

La présente réforme vise à simplifier la modification de l'inscription du sexe et des prénoms dans les registres de l'état civil. Elle profite de manière égale aux femmes et aux hommes et protège spécifiquement les personnes qui ne s'identifient pas avec les catégories courantes ainsi qu'aux rôles et normes de comportement y relatifs 201.

9.5

Conséquences pour les infrastructures informatiques

La réforme ne suscite pas de conséquences directes obligatoires sur l'infrastructure informatique.

En soi, le changement de sexe qui est actuellement communiqué par les tribunaux qui l'ont prononcé est déjà inscrit dans Infostar, respectivement au registre des naissances. Au vu du nombre relativement restreint de cas, il serait tout à fait envisageable de ne pas modifier le registre Infostar et de s'en tenir aux modes actuels d'enregistrement de changement de sexe. A noter que ceux-ci sont aujourd'hui relativement fastidieux. L'officier de l'état civil doit actuellement procéder en plusieurs étapes, en particulier si la personne concernée par un changement de sexe est mariée ou a des enfants. De ce fait, des simplifications sont prévues.

200 201

Annexe 2, ch. 2 et 6, OEECl.

Voir le Guide sur l'analyse d'impact sur l'égalité entre femmes et hommes dans les projets législatifs du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG), p. 17; disponible sur www.ebg.admin.ch > Thèmes > Droit > Analyse d'impact sur l'égalité.

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Liens avec le programme de la législature

Le présent projet ne figure pas dans le Programme de la législature 2015 à 2019 202.

Conformément au Guide sur l'analyse d'impact sur l'égalité entre femmes et hommes dans les projets législatifs du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG)203, la situation des personnes transgenres ou présentant une variation du développement sexuel doit être prise soigneusement en considération.

11

Aspects juridiques

11.1

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 122 de la Constitution (Cst.)204, qui confère à la Confédération la compétence de légiférer en matière de droit civil. Conformément au mandat de l'art. 35 Cst., le projet met en oeuvre différents droits fondamentaux (droit au respect de la dignité humaine et de l'intégrité physique, droit à l'autodétermination comme élément de la protection de la sphère privée, droit d'être traité de manière non discriminatoire205). Pour les détails, l'on renvoie aux ch. 1.1, 1.2, 3.3, 4.1.1, 4.2.1 et 4.2.2 ci-avant.

En particulier, le législateur peut se fonder sur sa compétence législative en matière de droit civil (art. 122 Cst.) pour prévoir le maintien d'un mariage après le changement de sexe d'un des conjoints. Le maintien d'une telle union n'est pas contraire à la garantie de l'institution du mariage par l'art. 14 Cst.

11.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La présente réforme est en tous points compatible avec les obligations internationales de la Suisse, telles que décrites aux ch. 4.1 à 4.2.2.

11.3

Forme de l'acte à adopter

Le présent projet définit des dispositions importantes fixant des règles de droit. Ces dispositions concernent les droits et les obligations des personnes, les tâches et les compétences des autorités et les obligations des cantons lors de la mise en oeuvre et de l'exécution du droit fédéral. De telles dispositions doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale (art. 164, al. 1, Cst.).

202 203

FF 2016 4999 P. 8; disponible sur www.ebg.admin.ch > Thèmes > Droit > Analyse d'impact sur l'égalité.

204 RS 101 205 Art. 7, 8, al. 2, 10, al. 2, et 13 Cst.

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11.4

Frein aux dépenses

Le projet n'est pas soumis au frein à l'endettement au sens de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., car il ne contient pas de dispositions relatives à des subventions, des crédits d'engagement ou des plafonds de dépenses.

11.5

Délégation de compétences législatives

Le droit en vigueur comporte les normes de délégation de compétences législatives qui obligent le Conseil fédéral à édicter des règles par voie d'ordonnance (art. 43a, 45a et 48 CC; voir ch. 5, 8.1.1 et 11.6).

11.6

Conformité à la législation sur la protection des données

Le projet est conforme aux normes de protection des données. L'art. 43a, al. 1 à 3, CC charge le Conseil fédéral de régler ces questions206. Les dispositions nécessaires de protection des données des personnes transgenres ou présentant une variation du développement sexuel, ainsi que de leurs proches seront aménagées dans l'ordonnance sur l'état civil qui consacre le secret de fonction des autorités de l'état civil et un droit d'accès très limité aux données personnelles207. Différents participants à la procédure de consultation relative à l'avant-projet ont demandé à ce que la divulgation du changement de sexe à des tiers soit formellement prohibée, ce qui correspond déjà au droit actuel. Les dispositions d'exécution seront par ailleurs complétées pour garantir que la déclaration de changement de sexe soit reçue dans une pièce séparée de l'office de l'état civil pour des raisons de discrétion, comme demandé par la Commission fédérale pour les questions féminines.

206

A noter qu'une réforme est en cours (voir le message concernant la loi fédérale sur la révision totale de la loi fédérale sur la protection des données et sur la modification d'autres lois fédérales, du 15 septembre 2017, FF 2017 6565).

207 Voir le chap. 6 de l'OEC (art. 44 à 61).

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