9.2.3

Message concernant l'approbation de l'accord avec la Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences du 15 janvier 2020

2019-3044

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Condensé L'accord sous forme d'échange de lettres avec la Turquie dans le cadre du Système généralisé de préférences permet aux entreprises des pays en développement d'utiliser des matières (intrants) d'origine turque ou suisse sans que leurs produits ne perdent leur caractère originaire et, ce faisant, le droit au traitement douanier préférentiel. Il comble ainsi la lacune existant dans le système de cumul de l'origine entre l'Union européenne, la Norvège, la Suisse et la Turquie. Le champ d'application matériel de l'accord se limite aux produits industriels (biens de production).

Contexte Le droit de l'Organisation mondiale du commerce prévoit des dispositions spéciales en faveur des pays en développement, la plus importante étant le Système généralisé de préférences (SGP). Ce système permet d'accorder un traitement douanier préférentiel aux pays en développement, autrement dit de réduire ou de supprimer les droits de douane à l'importation sur les marchandises originaires des pays en développement.

Contenu du projet Dans le cadre du SGP, l'Union européenne (UE), la Norvège et la Suisse se présentent comme une unité lorsqu'il s'agit de déterminer l'origine des marchandises. Des accords sous forme d'échange de lettres ont été conclus en ce sens par la Suisse avec l'UE et la Norvège respectivement en 2000 et en 2001.

À ce jour, il n'existe pas d'accord équivalent avec la Turquie. Or, depuis 1996, celle-ci forme une union douanière avec l'UE en ce qui concerne les produits industriels, de sorte que le cumul de l'origine est possible entre ces deux partenaires sans qu'un accord ne soit nécessaire. Grâce à l'accord conclu entre la Suisse et la Turquie, les entreprises des pays bénéficiaires du SGP de la Suisse et les entreprises suisses qui ont des processus de production dans un pays en développement profiteront des mêmes conditions: dans la détermination du caractère originaire d'un produit, elles pourront assimiler les matières d'origine turque à celles des pays en développement. L'accord prévoit également l'harmonisation des preuves d'origine, ce qui allégera la charge administrative des entreprises lors du dédouanement. Les entreprises helvétiques auront elles aussi la possibilité de transformer des matières d'origine suisse dans un pays en développement et de bénéficier du traitement préférentiel
à l'importation du produit fini dans l'UE, la Norvège ou la Turquie.

L'accord avec la Turquie n'a aucune incidence sur la politique agricole suisse, étant donné que son champ d'application matériel se limite aux produits industriels

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Message 1

Contexte

L'octroi de préférences tarifaires aux pays en développement remonte à une décision adoptée par la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) en 1968. Plusieurs États industrialisés s'étaient alors mis d'accord pour instaurer un système de préférences tarifaires unilatérales en faveur des pays en développement, le Système généralisé de préférences (SGP).

Ces préférences tarifaires, accordées sans contrepartie, visent à concilier la politique commerciale avec la politique de développement et à permettre aux pays en développement de participer au commerce mondial.

Le potentiel de croissance économique des pays en développement continue d'être entravé par des droits de douane, qui entraînent un surcoût important pour les exportateurs de ces pays. Les préférences tarifaires accordées aux pays en développement permettent de réduire cette charge financière. Pour fabriquer leurs produits, les entreprises des pays en développement doivent parfois mettre en oeuvre des matières (intrants) de pays industrialisés. Or l'utilisation de telles matières fait souvent perdre leur caractère originaire («nationalité» économique) aux produits finis, dans la mesure où elle ne permet plus de remplir les critères d'origine du SGP.

Grâce au cumul de l'origine, les pays de développement peuvent assimiler les matières originaires de l'Union européenne (UE), de la Norvège ou de la Suisse à des matières indigènes.

La Norvège a conclu un accord identique avec la Turquie, ce qui permettra de combler la lacune existante en matière de cumul de l'origine entre l'UE, la Norvège, la Turquie et la Suisse dans le cadre du SGP. Le système de cumul de l'origine entre les quatre partenaires permettra une utilisation effective du SGP et favorisera l'intégration des pays en développement dans l'économie mondiale.

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

La Turquie et l'UE forment une union douanière en ce qui concerne les produits industriels (biens de production) depuis 1996. De ce fait, les marchandises entièrement obtenues sur le territoire de l'union douanière y circulent librement (elles ne sont soumises à aucun droit de douane ni restriction quantitative), de même que les marchandises importées de pays tiers qui ont été mises en libre pratique sur le territoire douanier. L'UE et la Turquie n'ont pas besoin de conclure un accord régissant le cumul de l'origine aux fins du traitement préférentiel dans le cadre du SGP. En effet, l'UE a, en 2016 déjà, modifié en conséquence son code des douanes, lequel s'applique aussi à la Turquie pour ce qui est des produits industriels.

L'accord sous forme d'échange de lettres entre la Suisse et la Turquie vise à créer des conditions analogues pour les entreprises des pays en développement bénéficiaires du SGP de la Suisse. Il permet d'utiliser des matières d'origine turque pour 2105

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fabriquer un produit dans un pays bénéficiaire du SGP tout en préservant le caractère originaire du produit fini et, ce faisant, le droit au traitement préférentiel prévu par le SGP lors de l'importation de ce produit en Europe. La Norvège a conclu un accord identique avec la Turquie, ce qui permet de combler la lacune existante en matière de cumul de l'origine entre l'UE, la Norvège, la Turquie et la Suisse. Pour déterminer le caractère originaire d'un produit, les entreprises des pays en développement pourront ainsi assimiler les matières originaires des quatre partenaires (UE, Norvège, Suisse et Turquie) à des matières indigènes. Par ailleurs, l'accord prévoit l'harmonisation des preuves d'origine des marchandises afin de simplifier les formalités douanières.

Il est prévu que l'accord sous forme d'échange de lettres avec la Turquie entre en vigueur en été 2020, à l'issue des procédures d'approbation nationales des deux parties.

1.2

Déroulement et résultat des négociations

Après avoir rédigé un premier projet d'accord en mars 2019 et consulté l'UE et la Norvège, les parties, en l'absence de divergence sur le champ d'application matériel, sont rapidement convenues d'un accord sous forme d'échange de lettres.

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 20191 ni dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 20192. L'accord sous forme d'échange de lettres avec la Turquie s'inscrit cependant dans les objectifs du Conseil fédéral pour 2020 (volume I), plus particulièrement dans le renforcement de la coopération internationale.

La Norvège et la Turquie ayant conclu un accord en matière de cumul de l'origine, la Suisse et la Turquie devaient elles aussi conclure un tel accord pour combler la lacune existante dans le cumul de l'origine entre les quatre partenaires.

1 2

FF 2016 981 FF 2016 4999

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Présentation de l'accord

En vertu de l'accord qu'elles ont conclu par échange de lettres, les deux parties s'engagent à reconnaître comme produits originaires d'un pays bénéficiaire du SGP les produits qui y ont été obtenus en utilisant des matières originaires de la Turquie, de la Suisse, de l'UE ou de la Norvège. Ainsi, les entreprises des pays en développement pourront mettre en oeuvre des matières originaires des quatre partenaires dans leurs processus de production, sachant que ces matières seront assimilées aux matières indigènes dans la détermination du caractère originaire du produit fini.

L'accord avec la Turquie, tout comme ceux conclus respectivement avec l'UE et la Norvège, repose sur le principe de la réciprocité et exige que les parties aient des bases juridiques similaires. Celles-ci énoncent les principes essentiels communs aux prescriptions nationales régissant les SGP: l'équivalence des règles d'origine, la règle de tolérance, les conditions de transport, l'établissement et la reconnaissance mutuelle des preuves d'origine, et l'assistance administrative. L'accord avec la Turquie s'inspire des accords actualisés avec l'UE et la Norvège, qui sont entrés en vigueur le 1er février 2019.

Le champ d'application matériel de l'accord se limite au domaine industriel (chap. 25 à 97 du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [SH] de l'Organisation mondiale des douanes [OMD]3). Les produits agricoles et les denrées alimentaires (chap. 1 à 24 SH) en sont exclus.

L'accord s'articule autour de trois éléments principaux.

1. Règles d'origine équivalentes: outre le champ d'application matériel, les deux parties doivent avoir des règles d'origine similaires (et les mêmes règles spécifiques aux produits des chap. 25 à 97 SH) dans le cadre du SGP. Les dispositions relatives aux règles d'origine s'appuient sur les principes généralement reconnus susmentionnés en ce qui concerne la définition de la notion de produit originaire, le cumul régional, la règle de tolérance générale et l'assistance administrative. L'accord avec la Turquie a la même teneur que les accords actualisés avec l'UE et la Norvège.

2. Règle en matière de transport: comme dans les accords actualisés avec l'UE et la Norvège, le principe de non-modification s'applique. Il sera dès lors possible, dans les pays de transit, de
fractionner les envois de marchandises sous contrôle douanier.

Comme les envois, dans les réseaux logistiques mondiaux d'aujourd'hui, passent le plus souvent par des centres de distribution régionaux, ces conditions de transport favoriseront les objectifs économiques du SGP.

3. Preuve de l'origine: depuis le 1er janvier 2017, de nouvelles preuves d'origine s'appliquent dans le commerce des marchandises avec les pays en développement. À cette fin, les accords actualisés avec l'UE et la Norvège prévoient le recours au système électronique des exportateurs enregistrés. Celui-ci simplifie les procédures douanières sous les angles administratif et technique, ce qui profite aux entreprises, et accroît la sécurité lors du dédouanement. Il s'appliquera aussi au commerce des marchandises avec la Turquie dans le cadre du SGP.

3

www.wcoomd.org

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3

Conséquences

L'extension du cumul de l'origine à la Turquie permettra de satisfaire plus facilement aux critères d'origine du SGP de la Suisse et de combler la lacune existante dans la zone de cumul formée par l'UE, la Norvège, la Turquie et la Suisse. Grâce à l'accord, les entreprises des pays en développement pourront, pour déterminer le caractère originaire d'un produit, assimiler les matières originaires des quatre partenaires (UE, Norvège, Turquie et Suisse) à des matières indigènes. Par ailleurs, l'accord favorisera la division internationale du travail économiquement pertinente entre les pays en développement et les pays industrialisés et, ce faisant, facilitera l'accès des produits originaires des pays bénéficiaires du SGP au marché européen.

En outre, l'harmonisation des preuves d'origine et la mise en place du système des exportateurs enregistrés entraîneront une simplification administrative et technique à l'exportation, et ce, aussi bien pour les entreprises des pays en développement que pour les entreprises des quatre partenaires. Ainsi, les entreprises suisses auront elles aussi la possibilité de faire transformer des matières indigènes dans des pays en développement pour ensuite bénéficier des préférences tarifaires lors de l'importation de leurs produits finis dans l'UE, la Norvège ou la Turquie.

L'accord avec la Turquie n'a aucune conséquence sur les finances et le personnel de la Confédération, des cantons et des communes.

4

Aspects juridiques

4.1

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.)4, qui dispose que les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. Par ailleurs, l'art. 184, al. 2, Cst. confère au Conseil fédéral la compétence de signer des traités internationaux et de les ratifier. Enfin, l'art. 166, al. 2, Cst. confère à l'Assemblée fédérale la compétence de les approuver, sauf si leur conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité international (art. 24, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement5: art. 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration6).

4 5 6

RS 101 RS 171.10 RS 172.010

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4.2

Modalités de dénonciation

Par sa nature, l'accord avec la Turquie est étroitement lié aux SGP des parties.

Conformément à l'art. 12, il peut être dénoncé à tout moment par l'une des parties, à condition que l'autre partie ait été avertie par écrit trois mois à l'avance.

L'accord avec la Turquie entrera en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la date à laquelle les parties se seront notifié mutuellement l'achèvement de leurs procédures internes de ratification respectives.

4.3

Forme de l'acte à adopter

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales.

L'accord avec la Turquie contient des dispositions importantes fixant des règles de droit. L'arrêté fédéral à approuver est donc assujetti au référendum prévu à l'art. 141, al. 1, let. d, Cst.

Les traités internationaux qui sont assujettis au référendum conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. font l'objet d'une procédure de consultation. Conformément à l'art. 3a, al. 1, let. b, de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation7, il peut être renoncé à une telle procédure si aucune information nouvelle n'est attendue parce que les positions des parties intéressées sont déjà connues. Étant donné que le présent accord ne contient pas de nouvelles obligations et de nouveaux coûts pour les participants économiques et se limite uniquement à des simplifications administratives, à une plus grande flexibilité dans la preuve de l'origine et dans le transport des marchandises ainsi qu'aux possibilités de cumul avec des matières premières originaires de Turquie, aucune position contraire n'est à prévoir. En outre, dans le cadre de l'actualisation des accords SPG avec l'UE et la Norvège, les opérateurs économiques suisses ont déjà été informés de la conclusion d'un accord SPG correspondant avec la Turquie par lettre de l'Administration fédérale des douanes du 19 décembre 2016 (circulaire D31; point 2.2.2)8. Il a donc été renoncé à une procédure de consultation.

7 8

RS 172.061 www.ezv.admin.ch > EZV > Dokumentation > Richtlinien

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4.4

Compatibilité avec les autres obligations internationales de la Suisse

L'accord avec la Turquie, qui complète les échanges de lettres instaurant un système de cumul de l'origine dans le cadre du SGP, est compatible avec les obligations de la Suisse au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Il est également compatible avec les obligations commerciales de la Suisse vis-à-vis de l'UE et les autres accords bilatéraux conclus entre la Suisse et l'UE.

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Glossaire SGP

Système généralisé de préférences. Au titre du SGP, la Suisse accorde des conditions préférentielles sous la forme d'un accès au marché en franchise de douane ou d'une réduction des droits de douane à l'importation pour les produits originaires de pays en développement.

SH

Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises de l'OMD. Cette nomenclature internationale permet de classer les marchandises de manière uniforme et logique sur la base de numéros tarifaires à six chiffres. Les États membres sont libres d'ajouter à ces chiffres harmonisés au niveau international des chiffres supplémentaires (deux, p. ex.) pour composer des numéros nationaux.

Cumul Opération permettant d'utiliser des matières originaires de différents de l'origine pays, à condition que tous les pays impliqués dans le processus appliquent entre eux des accords préférentiels prévoyant les mêmes règles d'origine. Pour pouvoir bénéficier des conditions d'importation préférentielles au titre du cumul, il faut prouver l'origine des matières.

Preuve d'origine

Document servant à attester le respect des règles d'origine pour pouvoir bénéficier de préférences tarifaires au titre d'un accord préférentiel (accord de libre-échange ou SGP). La preuve d'origine peut prendre la forme d'une déclaration d'origine ou d'un certificat d'origine.

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