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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un arrêté fédéral concernant l'octroi d'une subvention extraordinaire aux caisses-maladie reconnues.

(Du 18 juin 1923.)

1. Conformément aux articles 35, 36 et 37 de la loi fédérale du 13 juin 1911 sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents, la Confédération paie aux caisses qui satisfont aux dispositions de la dite loi, par assuré et par année entière, une subvention de fr. 3.50 pour les enfants assurés, jusques et y compris l'année où ils atteignent l'âge de 14 ans, de même que pour les assurés du sexe masculin qui ont dépassé 14 ans et auxquels la caisse assure les soins médicaux et pharmaceutiques ou une indemnité journalière de chômage d'au moins fr. 1; fr. 4 pour les assurés du sexe féminin qui ont plus de 14 ans, aux mêmes conditions que les hommes; fr. 5 pour les membres auxquels la caisse assure à la fois les soins médicaux et pharmaceutiques et une indemnité journalière de chômage d'au moins fr. 1.

Les subsides précités sont majorés de 50 centimes pour les membres auxquels la caisse assure les prestations en cas de maladie non seulement durant 180 journées dans une période de 360 jours consécutifs, mais pendant 360 jours dans une période de 540 jours consécutifs.

En outre, dans les contrées montagneuses, où la population est clairsemée et les communications difficiles, la Confédération paie aux caisses un supplément de montagne allant jusqu'à fr. 7 par assuré et par année entière. Dans

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ces contrées, la Confédération alloue aux cantons, pour euxmêmes ou pour leurs communes, des subsides en faveur des institutions qui visent à diminuer les frais de traitement des malades ou des accouchées. Ces subsides ne peuvent excéder le total des sommes fournies par les cantons, les communes ou des tiers, non plus que fr. 3 au maximum par an et par tête de la population intéressée. Enfin, si des cantons et communes déclarent obligatoire l'assurance en cas de maladie, en général ou pour certaines catégories de personnes, et s'ils prennent à leur charge tout ou partie des contributions d'assurés indigents, la Confédération leur accorde des subsides jusqu'à concurrence du tiers de leurs dépenses.

2. Grâce à l'application donnée à la loi par les autorités de surveillance, le système adopté pour l'assurance-maladie sous forme de subsides aux caisses remplissant certaines obligations légales (prestation minimum, réciprocité, sûreté), a eu généralement les résultats que l'on escomptait. Il a permis notamment aux caisses-maladie de s'affermir et de se consolider, il a mis un certain ordre, au point de vue légal, dans le régime des caisses et a répandu dans de nombreux milieux l'idée de l'assurance en cas de maladie.

Alors que l'on comptait, le 31 décembre 1914, année do l'entrée en vigueur de la loi, 453 caisses-maladie comprenant 361621 membres, le nombre des caisses était de 963 à fin 1921. Il existe des données statistiques pour 959 de ces dernières, avec un nombre d'assurés de 984(572. Le total des prestations fédérales, en vertu de l'article 35 de la loi, est monté de fr. 1414094.50 en 1914 à fr. 4381596. A cette somme viennent s'ajouter fr. 285 £49 de suppléments de montagne. Au point de vue du genre d'assurance, c'est l'assurance pour frais médicaux et pharmaceutiques, d'une valeur sociale et économique incontestable, qui accuse la plu® forte augmentation du nombre des assurés. Lorsque fut établie la statistique des caisses de secours en 1903, les petites caisses, comprenant 1 à 50 membres, représentaient le 22,5% de toutes les caisses. Le fait que cette proportion est descendue à 6,6% en 1916 montre combien l'assurance est appliquée d'une manière plus rationnelle aujourd'hui. Le chiffre moyen des assurés affiliés aux caisses qui sont reconnues chaque année, a aussi continuellement augmenté. Tandis
qu© cette moyenne se montait à 577 membres en 1920, elle était de 924 membres en 1921. Les ressources financières des caisses ne se sont pas accrues dans la même mesure. La fortune des

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453 caisses reconnues à fin 1914, avec 361-621 membres, était de fr. 9i632569.37, soit un peu moins de fr. 27 par assuré.

L'avoir des 959 caisses-maladie reconnues à fin 1921, avec 984572 assurés, s'élevait à fr. 28324724.32, soit environ fr. 29 par membre. Ces chiffres peuvent faire croire à un développement normal et prospère; es n'est toutefois pas le cas si l'on songe à la forte dépréciation de la valeur de l'argent depuis 1914.

3. Les Chambres ayant exprimé aussi, au cours des dernières années, des voeux relatifs à une revision de la loi du 13 juin 1911, tant en es qui concerne l'a&surance-maladie que l'assurance-accidents, le Conseil fédéral chargea le département de l'économie publique, le 10 février 1919, de lui présenter pour une époque déterminée, par les soins de l'office fédéral des assurances sociales et de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, un projet de revision de la dite loi. La nécessité de préparer une revision de l'aasurance-maladie se faisait avant tout sentir par le fait que des travaux préliminaires avaient été entrepris en vue d'introduire l'assurance-vieillesse, invalidité et survivants en matière fédérale. Les travaux de revision entrepris par l'Office fédéral des assurances sociales d'entente avec une commission d'experts composée de représentants de tous les milieux intéressés, furent achevés provisoirement en été 1922.

Ils aboutirent à un avant-projet qui prévoit une assurance obligatoire limitée à certaines catégories de citoyens, un revirement de l'opinion, primitivement favorable à l'assurance obligatoire générale, s'étant produit spécialement dans les milieux des caisses-maladie et le Conseil fédéral, dans ces circonstances, ayant décidé de renoncer à son idée d'introduire une assurance englobant la population tout entière.

4. Les discussions qui eurent lieu au sein de la commission d'experts dévoilèrent d'ailleurs de profondes divergences d'opinions relativement à l'application d'une assurance-maladie fédérale obligatoire. Il est probable que ces divergences se manifesteront également au sein des Chambres lorsque le projet leur sera soumis, et il est possible qu'elles empêcheront celui-ci d'aboutir rapidement. D'autre part, la crise économique commença à faire sentir aussi ses effets sur les caisses-maladie. H y eut non seulement un arrêt
dans le développement de celles-ci, mais la situation incertaine de nombreux assurés, dont beaucoup étaient en .retard pour le paiement des primes, alors que les caisses étaient mises davantage

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à contribution, rompit chez nombre d'entre elles l'équilibre des recettes et des dépenses. Il en résulta de fréquents déficits qui menacèrent d'ébranler dans sa solidité la situation financière de l'assurance-maladie. A côté de ces dangers, il y a lieu de considérer que les subsides fédéraux n'ont pasi été modifiés depuis 1911, malgré la forte dépréciation de la valeur de l'argent, et qu'ils ne .remplissent plus du tout, dans la mesure prévue, le but d'assistance qui leur a été assigné. Aussi le voeji a-t-il été exprimé, dans des milieux toujours plus nombreux, qu'on mît cependant tout de suite le système de subvention en harmonie avec les circonstances actuelles, sur la base de la loi en vigueur, afin de ne pas compromettre l'existence des caisses-maladie et perdre le fruit des longs et précieux travaux exécutés dans ce domaine social.

5. Conformément à ces voeux, lesi trois grandes associations des caisses-maladie: le «(Concordat de caisses-maladie suisses », la « Fédération des sociétés de secours mutuels » et la « Federazione Ticinese delle Casse malati », groupant un total de 900'000 membres environ, adressèrent, le 11 mars 1922, au Conseil fédéral une requête demandant que les articles S5 et 36 de la loi fédérale sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents, .fussent revisés dans le sena d'une augmentation notable des subventions fédérales.

La requête exprimait aussi le désir qu'au calcul des subsides sur le nombre des assurés, on substituât une participation de la Confédération d'après un pourcent déterminé des dépenses occasionnées aux caisses. Les requérants font valoir en substance que les frais médicaux et pharmaceutiques ont subi une hausse de 70 à 80% au moins, que, d'autre part, en ce qui concerne l'assurance pour une indemnité de chômage, l'allocation journalière de fr. l admise encore par la loi comme prestation minimum n'a pour ainsi dire plus aucune valeur, vu la forte dépréciation die l'argent, que les subsides versés par assuré n'ont pas été fixés arbitrairement lors de la promulgation de la loi, mais d'après un rapport déterminé avec les frais probables de l'assurance et l'indemnité minimum et que, par conséquent, lest subsides demeurés les mêmes aujourd'hui ne correspondent plus en aucune manière à la proportion devant faire règle actuellement.

Relativement à l'introduction d'un système de participation calculée d'après un pourctent déterminé, les requérants

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déclarent que les subsides alloués par assuré ne tiennent pas suffisamment compte de la valeur très diverse des prestations assurées par les caisses, et que la disposition d'après laquelle la subvention fédérale, en cas. d'affiliation multiple, n'est payée qu'à la caisse dont l'assuré a fait' partie le plus longtemps, sans considération des prestations de« différentes caisses, est tout à fait injuste.

La démarche des caisses trouva un appui aux Chambres.

Avant que la requête des associations de caisses-maladie eût été présentée, un «postulat» de M. WebeT, conseiller national, avait déjà invité le Conseil fédéral, au commenceme;nt de l'année 1922, à examiner préalablement à la revision de la loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents, la question de l'augmentation des subsides fédéraux pour les personnes assurées du sexe féminin. Dans la suite», M. Joseph Scherrer, conseiller national, déposa une motion ainsi conçue: « Le Conseil fédéral est invité à soumettre, au plus tôt aux Conseils législatifs un projet de revision das articles 35 et 36 de la loi du 13 juin 1911 sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents dans le sans de la pétition du 11 mars 1922 du Concordat des caisses-maladie suisses. » Enfin, en date du 22 décembre 1922, M. IIunzLker, conseiller national, a présenté le postulat suivant: «Le Conseil fédéral est invité à examiner s'il n'y a pa& lieu d'allouer temporairement aux caisses-maladie reconnues un subside extraordinaire de 2 % millions e,uviron qui serait réparti par les soins du département de l'économie publique; ce subside servirait à compense.!' l'effet de la, dépréciation de 1'ar.gent sur les subventions ordinaires ainsi que l'augmentation des risques de l'assurance-maladie spécialement en ce qui concerne les enfants et les femmes. » Tout d'abord, le département ne crut pas pouvoir accueillir favorablement la requête des caisses-maladie. Sur son ordre, l'office fédéral des assurances sociales en informa les associations intéressées. Il attira leur attention sur l'état des travaux pour la revision totale de la loi et spécialement sur le fait que le système actuel de subvention, d'après lequel les caisses reçoivent le même subside pour chaque assuré, sans considération de la situation économique de ce dernier, ne correspond pas au caractère social de la législation en vigueur. Il ajouta que la revision des dispositions régissant les subsides retarderait la revision de la loi actuelle, revision

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·que d'autres raisons encore justifient, et que, d'autre part, en relevant simplement les subventions, on (Sanctionnerait un système qui n'est pas- conçu dams un esprit social. Paj?

lettre du 20 juillet 1922, les caisses-maladie maintinrent leur demande en tous points. Dans la suite, l'office fédéral des assurances- sociales chercha, par des conférences, à apprendre quelle attitude les caisses' adopteraient à l'égard d'un projet ·visant à augmenter les subventions, tout (en ,,tenant spécialement compte des assurés dont la (Situation économique estö difficile. Alors que les caisses de ,la Suisse occidentale ne paraissaient pas absolument hostiles à cette solution, le Concordat s'y opposa.

6. Est-il justifié, avant d'introduire l'assurance-maladie obligatoire, d'augmenter les subsides fédéraux dans l'assurance-maladie facultative ou simplement d'allouer un supplément extraordinaire? A ce propos, il faut reconnaître que la proportion entre les subsides et l'ensemble des dépenses, des caisses-maladie s'est modifiée au grand détriment do ces dernières. Dans son message du 10 décembre 1906, lo Conseil fédéral se base encore sur une dépense annuejle poun soins médicaux et pharmaceutiques de fr. ,6.12 pas assuré (voir Feuille fédérale, 1906, VI, page #74). Les dépenses occasionnées par l'octroi d'une indemnité de tchômage de fr. l par jour y sont supputées à fEr. 7 par année et par assuré (fr. 7.65 avec les frais d'accouchement). Ole subside fédéral, fixé par la loi à fr. 3.50 pour les hommes et à fr. 4 pour les femmes, si la caisse assure l'une ou l'autre prestation durant 180 jours dans une période de 360 jours consécutifs, représente donc, pour la première catégorie de prestation, le 57 ou le 65%, et, pour la 2« catégorie, le 50 ou le 57% du chiffre moyen des dépenses. 'En 1916, par contre, le coût moyen des frais médicaux et 'pharmaceutiques est de f r. 10. 20 pour les caisses qui assurent ce genre de prestation, soit f r. 8. 40 pour les hommes et f r. 12. 37 poux les femmes (voir rapport du département de l'économie publique sur sa gestion en 1917, Feuille fédérale, 1918, II, pages 499 et 500).

En 1921, la moyenne de ces frais est de f r. 20.12 pour toutes les caisses, soit fr. 18.09 pour les hommes et fr. 22. 46 pour les femmes (rapport de gestion du département pour l'année 1922, office fédéral
des assurances sociales, page 14).

Relativement à l'assurance pour une indemnité de chômage) les données recueillies en 1921 correspondent encore avec le message du Conseil fédéral. On a en effet calculé qu'en 1921 le nombre des jours de maladie a été en moyenne de 7,01

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pour les hommes et de 8,59 pour les femmes, soit une moyenne de 7,56 jours de maladie pour les deux sexes, ce gui représente, sur la base d'une indemnité de chômage de fr. l par jour, une dépense de f r. 7.56 par assuré et par année.

Ces chiffres montrent que si la morbidité n'a pas augmenté, le coût des soins médicaux et pharmaceutiques a subì une hausse très considérable. Ils prouvent, par conséquent,, que la proportion entre les subsides fédéraux et la moyenne des dépenses des caisses assurant les soins médicaux et pharmaceutiques n'est plus de 57 et 65%, mais seulement de 2ff et 18% au maximum, c'est-à-dire ne représente plus qu'un: tiers ou un quart de ce qu'elle était autrefois.

La Confédération verse en outre aux caisses reconnues un?

subside de fr. 20 pour chaque accouchement, de même qu'une indemnité de fr. 20 pour les accouchées qui allaitent leur enfant encore 4 semaines après l'expiration des six semaines entrant en ligne de compte pour la période de secours, soit durant dix semaines au total. Les frais d'accouchement ont été calculés pour la première fois dans le rapport de gestion du département de l'économie publique pour l'aimée 1918; ils ont alors été évalués à fr. 27. 45 en moyenne. Lee caisses doivent donc verser sur leurs propres ressources une somme de fr. 7.45 par accouchement (voir Feuille fédérale 1919, II, page 736). En 1921, la charge imposée à une caisse par un accouchement s'élève à fr. 30.78 en moyenne. Sî l'on songe que le subside de la Confédération en faveurdés assurés du sexe féminin ne dépasse que de fr:. 0.50 celui pour les assurés du sexe masculin, que, d'autre part, les conditions de morbidité sont, très différentes pour les deux sexes et que les caisses-maladie doivent traiter les hommes et les femmes sur un pied d'égalité, on comprendra parfaitement que le subside de fr. 20 prévu par la loi n'est pas suffisant en présence des frai» actuels d'accouchement. Dans leurs rapports annuels, les caisses-maladie insistent à plusieurs reprises sur 1© caractère ruineux de ces dépenses.

7. Nous avons dit plus haut que si l'on tient compte de la diminution de la valeur de L'argent» la fortune des caissesmaladie ne s'est pas développée dans la même mesure que les caisses en général. En confrontami les dépenses et la^ fortune des caisses pendant ces dernières années,
on se rend, compte d'une situation qui E.e laisse pas d'être précaire et.

demande un examen attentif. Relativement aux sûretés à réclamer lors de la reconnaissance d'une caisse, l'office

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fédéral des assurances sociales est parti de l'idée qu'il y ai.

lieu d'exiger la création d'un fonds de réserve représentant au moins le montant des dépenses d'une année. Vu la, pratique suivie par les caisses-maladie et l'opposition manifestée à l'égard de l'établissement de bases techniques, on a renoncé à insérer dans la loi et dans la règlement d'exécution des dispositions plus détaillées concernant les sûretés et à demander l'établissement régulier de bilans. On s'est, contenté d'une règle générale*, d'après laquelle les caisses doivent fournir des sûretés qui leur .permettent de faire face à leurs engagements (voir message du 10 décembre 1906, Feuille fédérale 1906, VI, page 240).

L'obligation en vertu de laquelle les caisses sont tenues, par l'office fédéral des assurances sociales, de mettre en réserve le montant des dépenses d'une année, correspond aux prescriptions du § 364 du code des assurances applicables aux caisses-maladie allemandes. Celles-ci doivent constituer une réserve d'un montant au moins égal aux dépenses d'une année, en se basant sur la moyenne des trois dernières années, et maintenir la réserve à ce niveau. Naturellement, l'office fédéral des assurances sociales n'a pas pu demanderque des caisses nouvellement fondées satisfassent entièrement» dès le début, à cette obligation. En pareil cas, il exige et exigera que les caisses sollicitant la reconnaissance du droit aux subsides fédéraux remplissent certaines conditions relatives à la création du fonds de réserve. Mais, alors que dans le rapport de gestion du département pour l'année 1915 (Feuille fédérale 1916, II, page 406) les dépenses de toutes les caisses étaient de fr. 7 503 291.01 au total pour unefortune globale de fr. 9'632 569.37, nous ne trouvons plus en 1921 qu'une fortune de fr. 28224724.32 pour un total dedépenses de fr. 32 298 815 L'excédent de l'avoir sur les dépenses annuelles en 1914 -- il était d'environ 27% -- s'est transformé en 1921 en, un déficit de 12% approximativement.

D'une enquête à laquelle l'office, fédéral des assurances sociales a procédé au commencement de 1923 il ressort que-les réserves de 198 caisses n'atteignent pas le montant des.

dépenses annuelles et qu'une série de ces caisses accusent un déficit considérable. Pour 78 de ces mêmes caisses, l'année 1921 a apporté encore une diminution
fort sensible de l'avoir Dans la majorité des cas, cette diminution est due à la forte hausse des frais médicaux et pharmaceutiques et aux prestations pour accouchées; pour d'autres caisses, elle a été-

.558 provoquée par la réduction des recettes. Les aontributions des chefs d'entreprises ne rentrent pas; par suite du chômage, nombre d'assurés ne peuvent plus payer les primes pour les membres de leur famille ou pour eux-mêmes. Dans beaucoup de cas, les caisses préfèrent user de patience à l'égard de ces membres, car' leur exclusion aurait souvent des effets trop durs, surtout lorsqu'il s'agit de personnes âgées. La.

situation économique défavorable dans laquelle se trouvent les assurés, entrave fréquemment l'adaptation, des primes aux charges actuelles des caisses. Une réduction des prestations n'est possible que dans un© mesure limitée. Les soins médicaux et pharmaceutiques forment un tout et les charges qui en résultent ne peuvent être allégées -- abstraction faite de la réduction problématique des frais médicaux -- qu'en, faisant supporter à l'assuré un quart des dépenses et en prolongeant la durée de la prestation au sens, de l'article 13, alinéa 4, de la loi,. Mais ici encore, on ne; sert pas les intérêts des éléments pauvres de la population. La dépréciation constante de l'argent oblige les caisses assurant une indemnité de chômage à élever cette dernière, bien que l'augmentation des primes qui eai résulte se heurte également à des difficultés. Mais néanmoins, la règle que les réserves doivent pour le moins atteindre la moyenne des dépenses d'une année doit être considérée comme le minimum de ce qu'on est en droit d'exiger des caisses pour qu'elles offrent toute sécurité quant à l'exécution de leurs engagements. Il importe en conséquence de veiller par tous les moyens possibles à ce que les caisses qui ne remplissent pas cette condition, prennent les mesures nécessaires pour rétablir leur équilibre financier. Mais il ne suffit pas d'intervenir immédiatement auprès des caisses -- heureusement peu nombreuses -- dont la situation est franchement mauvaise, il convient aussi de faire en sorte que la situation des autres caisses ne s'aggrave pas. Cette aggravation ou même l'effondrement de l'une ou l'autre caisse porterait préjudice à l'idée de l'assurance. D'autre part, on travaillant à l'assainissement ·de la situation économique des caisses, il ne faut pas non plus perdre de vue que celles-ci ont la faculté de renoncer à la reconnaissance et partant de s© soustraire à la surveillance de la
Confédération. On conçoit dès lors que,, dans, cie> travail, il faudra procéder avec circonspection et par étapes, sinon on risque de mettre en question les résultats acquis j?ar l'application de la loi, qui a eu pour effet de réglementer et d'affermir l'assurance-maladie. En cette matière,

tout retour à l'ancien état de choses ne manquerait pas d'avoir une fâcheuse influence sur le développement des assurances sociales. On comprendra d'ailleurs aisément que cela, facilitera sensiblement les travaux d'assainissement si la Confédération, au lieu de se borner à prêter assistance aux caisses par de simples conseils, leur vient en aide financièrement, ne serait-ce que par une augmentation temporaire de ses subsides. Autrement, il est à craindre que de nombreuses caisses décideront soit de substituer aux soins médicaux et pharmaceutiques une indemnité de chômage, prestation infiniment moins précieuse au point de> vue social, soit de se refuser à toute augmentation de cotisations en préférant ou renoncer à la reconnaissance ou s'exposer au retrait do celleci, conséquences qu'il faut si possible évite*. A cela vient encore s'ajouter la considération suivante. A teneur de l'article 12 de la loi, les caisses-maladie qui prennent à leur charge les frais du médecin et an pharmacden, doivent assurer à leurs membres « au moins les soins médicaux et pharmaceutiques ». La délimitation de ces prestations ressortit aux autorités de surveillance qui, à cet égard, doivent tenir compte des données actuelles de la science médicale. Depuis quelques années, la médecine fait usage de nouvelles méthodes thérapeutiques tant physiques que chimiques, qui, tels que la radiologie et le salvarsan, constituent le seul ou tout au moins l'un des remèdes les plus efficaces pour combattre certaines maladies très répandues. Ces nouveaux moyens thérapeutiques devant souvent être appliqués par le médecin personnellement, il en résulte une augmentation sensible des frais, ce qui explique pourquoi jusqu'à présent ces traitements curatifs n'ont pas été considérés comme compris dans les prestations à fournir par les caisses-maladie. Mais il va de soi qu'à la longue cette restriction devra disparaître et que tôt ou tard, les méthodes thérapeutiques nouvelles définitivement consacrées par l'expérience médicale devront être mises à la charge des caisses. Or il sera beaucoup plus facile de leur imposer de nouvelles obligations si la Confédération participe aux conséquences financières d'une extension des soins médicaux et pharmaceutiques. En outre, une aide financière extraordinaire de la part de la Confédération leur montrera
que celle-ci s'intéresse à leur sort et «et intérêt les engagera à envisager l'avenir avec plus d'optimisme tout en raffermissant en elles la volonté de chercher dans l'effort personnel les moyens de subvenir à lexirs besoins. Et finalement cette aide aura également pour effet de faciliter la surveil-

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lance des caisses, notamment en. ce qui concerne l'exécution de leurs obligations statutaires à l'égard des assurés malades, cette surveillance étant entravée par les circonstances actuelles et souvent aussi par l'opposition qu'elle rencontre.

Ce sont donc non seulement des considérations techniques, mais aussi des raisons inhérentes au bon fonctionnement de l'assurance qui justifient amplement l'octroi d'une subvention tout au moins temporaire en faveur des caisses pendant la périocle critique qu'elles traversent actuellement.

8. Si, dans ces conditions, une aide financière en faveur dea caisses s'impose, si, d'autre part, leur situation ne doit pa,s empirer et compromettre en même temps la forme actuelle de l'application de l'article 34bis de la constitution fédérale, on ne pourrait faire abstraction de cette aide que s'il était possible de réaliser dans un avenir rapproché l'idée d'une assurance fédérale obligatoire en cas de maladie qui serait appelée, par une voie détournée, à consolider les caisses-maladie et à donner un nouveau développement à l'assurance-maladie. Mais cette éventualité n'entre pas en ligne de compte. La commission d'experts, ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, a, il est vrai, achevé provisoirement ses travaux en 1922. Mais l'élaboration du projet de loi a démontré que bon nombre de points demandaient encore à être éclaircis au point de vue financier et juridique. Pou,!* ce qui est des autres points, notamment de la réglementation du service médical, une vive opposition s'est d'ores et déjà manifestée. D'autre part, la question de savoir quel système il conviendra d'adopter pour lutter efficacement contre les abus incontestables et incontestés de traitement médical demande encore à être examinée de très près. Puis il faudra aussi voir s'il y a lieu de maintenir la décision du Conseil fédéral portant que l'assurance-maladie et l'assurance-accidents devront être revisées simultanément ou s'il ne seraitpas préférable de se borner tout d'abord à une revision de l'assurance-maladie. Dans cette dernière alternative, il faudra probablement aussi modifier la partie de la loi en vigueur* ayant trait à l'assurance-accjidents, puisque, pour ce qui concerne la réglementation du service médical et la collaboration des caisses à l'assurance-aecidents, cette partie de la loi se réfère
à l'assurance-maladie. Et finalement, une révision totale, telle qu'elle est demandée, de la loi actuelle, ne peut ignorer les travaux parlementaires en cours concernant l'attribution à la Confédération du droit de légiférer eri

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matière d'assurance-vieillesse, invalidité et survivants, travaux qui touchent à leur fin. Toutes ces considérations militent contre une solution trop précipitée et justifient pour le moment une mesure simplement temporaire.

9. Les caisses-maladie désirent que la Confédération améliore les conditions de sa participation financière à l'assurance-maladie par une modification du système aatuel des subventions. Cependant, si les mesures préconisées par les intéressés doivent produire leur effet le plus rapidement possible sans préjuger dans un sens ou dans l'autre la solution à apporter au problème des assurances sociales, il convient de faire abstraction aujourd'hui d'une revision complète du régime des subventions. Mais indépendamment de ces considérations, il ne faut pas perdre de vue qu'une revision des dispositions relatives aux subventions fédérales impliquerait la reconnaissance d'un rapport pour ainsi dire invariable entre les subsides fixés par la loi et la valeur des prestations assurées et sanctionnerait en dernière analyse le principe que les subsides fédéraux doivent forcément s'adapter à la. valeur de l'argent. Or ces conséquences ne semblent pas se justifier, car là où des circonstances extraordinaires, telles que celles que nous constatons aujourd'hui, ne sont plus en jeu, la diminution de la valeur de l'argent entraîne dans la règle une augmentation effective du revenu des assurés, ce qui permet aux caisses de s'adapter par leur propre effort aux exigences d'une nouvelle situation.

D'autre part, les subventions de l'Etat doivent s'inspirer de considérations sociales et financières- qui, le cas échéant, ne permettront pas de maintenir le taux des subsides à un niveau stable et invariable.

Une revision des dispositions actuelles relatives aux subsides fédéraux dans le sens d'une augmentation des subsides calculés par assuré équivaudrait à une confirmation du système actuel, injuste au point de vue social, puisqu'il place sur le même pied tous les assurés sans tenir compte de leur situation économique.

D'un autre côté, une revision modifiant le système actuel des subventions en ce sens par exemple que les deniers de la Confédération seraient consacrés uniquement en faveur de l'assurance - maladie des personnes de situation modeste ne serait guère réalisable sans un changement complet du régime légal tel qu'il existe actuellement; de plus, il est probable que, sans l'obligation d'assurance

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englobant tout au moins ces catégories de personnes, le but désiré ne sera pas atteint entièrement.

Enfin, une refonte complète des dispositions sur l'assurance-maladie entraînerait la suppression des subsides versés par assuré et l'introduction d'une participation financière de la Confédération, proportionnée aux dépenses des caisses-maladie, comme le demandent les fédérations de sociétés de secours mutuels. Or, à teneur de l'article premier, alinéa 2, de la loi, les caisses s'organisent à leur gré, en tant que la loi ne contient pas de dispositions contraires. Elles ont la faculté en particulier d'établir leur budget comme bon leur semble, abstraction faite de restrictions légales ayant pour objet de sauvegarder leur solvabilité ainsi que le principe de la mutualité. En faisant correspondre les subsides de la Confédération aux dépenses des caisses, la; gestion de celles-ci influerait directement sur le montant des subsides, en sorte que la Confédération, pour éviter que ses intérêts ne fussent à la merci des caisses, devrait instituer un contrôle très serré de leur gestion; on aboutirait ainsi à une situation tout à fait anormale, contraire au régime de liberté dont le législateur a, en principe, voulu faire bénéficier les caisses-maladie reconnues.

10. Par rapport à toute revision totale, l'octroi d'une subvention unique extraordinaire de la part de la Confédération revêt le caractère d'une mesure d'assainissement financier. Cette aide permettra aux caisses qui, par suite de déficits, n'offrent plus la sécurité voulue, de rétablir leur situation économique. 'Ailleurs, où il y a disproportion complète entre les cotisations et les prestations, elle constituera un sérieux encouragement à persévérer jusqu'au moment où les circonstances autoriseront une réduction des charges de l'assurance ou une augmentation, des cotisations. Enfin, l'aide sollicitée est la seul© solution qui permette, mieux que toute autre mesure, de tenir compte du fait qu'actuellement la situation n'est pas encore éclaircie ein ce qui concerne la réglementation future du régime dep assurances sociales.

Si l'allocation d'une subvention, extraordinaire doit avoir spécialement pour effet de maintenir l'équilibre financier des caisses jusqu'à ce qu'une amélioration de la situation économique leur permette de se réorganiser par
leurs propres forces, il est indiqué d'octroyer la première partie de la subvention en 1924 et la seconde en 1925. ' 11. Pour ce qui est de la répartition de la subvention^.

563;

le mieux est de laissai' au Conseil fédéral le soin d'en fixer les conditions et modalités, d'abord parce qu'il s'agit d'une mesure simplement temporaire et ensuite parce que cette répartition devra, dans la mesure du possible, tenir compte de nombreuses circonstances particulières, notamment du surcroît des dépenses provenant de l'assurance des soins médicaux, et pharmaceutiques et des prestations dues en cas d'accouchement. Etant donné le caractère spécial de l'aide financière de la Confédération, il conviendra de faire dépendre l'octroi de la subvention extraordinaire à chaque caisse de certaines conditions déterminées dont la fixation doit également êtreabandonnée à la compétence du Conseil fédéral.

12. L'arrêté fédéral proposé comporte une extension du système légal des subventions aux caisses-maladie reconnues et est en conséquence soumis au referendum.

Nous basant sur cet exposé, nous vous recommandons l'adoption du projet ci-joint d'un aa-rêté fédéral concernant l'octroi d'une subvention extraordinaire aux caisses-maladie reconnues.

Berne, le 18 juin 1923.

Au nom du Conseil fédéral suisse : \

Le président de la Confédération, SCHEUEEE.

Le chancelier de la Confédération^.

STEIGER.

.'564 ^Projet.)

Arrêté fédéral concernant

l'octroi d'une subvention extraordinaire aux caissesmaladie reconnues.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION

SUISSE,

bis

en exécution de l'article 34 de la constitution fédérale; vu le message du Conseil fédéral du 18 juin 1923, an'ête: Article premier. La Confédération alloue aux caissesmaladie reconnues conformément à la loi fédérale du 13 juin 1911 sur l'assurance en cas de maladia et d'accidents .un.® subvention unique extraordinaire de deux millions de francs, à prélever sur le fonds fédéral d'assurance. Ce'tte subvention sera répartie par parts égales en 1924 et 1925.

Art. 2. Le Conseil fédéral déterminera, le mode de répartition de cette subvention aux diverses caisses-maladie en tenant compte spécialement des besoins des caisses-maladie assurant les soins médicaux et pharmaceutiques; il pst autorisé à faire dépendue l'octroi de la subvention à telle caisse de conditions déterminées, notamment de mesures financières à prendre par cette caisse, comme aussi à édicter ·des dispositions spéciales au sujet de l'emploi de la subvention.

Art. 3. Le Conseil fédéral est chargé de la publication du présent arrêté fédéral en vertu de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et les ^arrêtés fédéraux et de fixer la date de son entrée en vigueur.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un arrêté fédéral concernant l'octroi d'une subvention extraordinaire aux caisses-maladie reconnues. (Du 18 juin 1923.)

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Jahr

1923

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

25

Cahier Numero Geschäftsnummer

1759

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

20.06.1923

Date Data Seite

550-564

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