10.067 Message concernant un crédit-cadre destiné à des engagements conditionnels pour l'encouragement de l'offre de logements du 18 août 2010

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral allouant un crédit-cadre destiné à financer des engagements conditionnels pour l'encouragement de l'offre de logements et vous proposons de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 août 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-1426

5041

Condensé Le Conseil fédéral propose au Parlement d'adopter un crédit de 1400 millions de francs destiné à financer des engagements conditionnels, grâce auxquels la Confédération pourra cautionner chaque année, de l'été 2011 à 2015, trois ou quatre émissions d'emprunts de la Centrale d'émission pour la construction de logements (CCL) pour quelque 350 millions de francs en moyenne. Les engagements pour des garanties diminueront dans le même temps de quelque 600 millions de francs à mesure du remboursement des emprunts échus.

L'art. 108 de la Constitution donne mandat à la Confédération de prendre des mesures pour encourager la construction de logements. Ce mandat est rempli pour l'essentiel par la loi fédérale du 21 mars 2003 encourageant le logement à loyer ou à prix modérés (loi sur le logement, LOG, RS 842). Les prêts directs de la Confédération prévus par la LOG ont toutefois été suspendus jusqu'à la fin de 2008 par le programme d'allégement 2003 du budget de la Confédération. En février 2007, le Conseil fédéral a décidé de supprimer les prêts directs et de limiter l'encouragement à des aides indirectes à la construction de logements d'utilité publique. Celles-ci comprennent d'une part l'alimentation d'un fonds de roulement, géré à titre fiduciaire sur mandat de la Confédération par les organisations faîtières des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, qui permet d'octroyer des prêts à des taux d'intérêt avantageux pour les projets de construction et de rénovation des maîtres d'ouvrage d'utilité publique. D'autre part, la Confédération continue de fournir des garanties aux instruments de financement mis en place par les maîtres d'ouvrage d'utilité publique: elle soutient en premier lieu la CCL, dont les emprunts sont cautionnés en vertu de l'art. 35 LOG, et accessoirement la Société coopérative de cautionnement hypothécaire pour coopératives suisses de construction et d'habitation (CCH), dont les cautions bénéficient d'arrière-cautionnements de la Confédération en vertu de l'art. 36 LOG.

Parallèlement à la LOG, le Parlement a adopté en 2003 un crédit-cadre d'un montant total de 2075 millions de francs, dont 300 millions étaient destinés à des prêts et 1775 millions à des engagements conditionnels. A la fin de 2010, les fonds alloués pour les prêts s'élèveront encore à 105 millions de francs;
le programme de consolidation 2012 à 2013 prévoit de verser le solde au fonds de roulement en tranches annuelles d'ici à 2017. Aucun autre crédit-cadre ne sera adopté pour financer des prêts. Par contre, la part destinée au financement d'engagements conditionnels doit être réalimentée d'urgence. Au début 2011, les fonds alloués à cette fin devraient encore s'élever à quelque 200 millions de francs, ce qui devrait couvrir les besoins jusqu'au deuxième semestre 2011.

Le Conseil fédéral propose de soutenir par la suite les activités de la CCL et, à un degré moindre, celles de la CCH, par des garanties. Cet effort financier s'impose non seulement en raison du mandat constitutionnel, mais aussi en raison de la situation sur le marché du logement. En effet, même si le secteur de la construction a connu une activité supérieure à la moyenne, la demande élevée, nourrie par la croissance de la population, a fait considérablement grimper les prix et les loyers

5042

dans certaines régions. Les gens à faibles revenus et même la classe moyenne souffrent de cette tension sur le marché. Dans un tel contexte, la construction de logements d'utilité publique, dont les loyers sont calculés en fonction des coûts, est un complément indispensable aux investissements immobiliers à but lucratif, qui se sont concentrés ces derniers temps sur le logement en propriété et les logements locatifs du segment supérieur. L'extension de l'offre n'est toutefois pas le seul but de l'encouragement à la construction de logements d'utilité publique: le soutien à la rénovation et à l'assainissement énergétique de vieux bâtiments joue un rôle tout aussi important.

Les émissions d'emprunts de la CCL visent, conjointement aux prêts du fonds de roulement, à ce que le secteur d'utilité publique préserve sa part de marché d'environ 8 % des logements occupés en permanence. Une récente évaluation externe des activités de la CCL recommande la poursuite du cautionnement des emprunts par la Confédération. La solvabilité de la CCL souffrirait en effet d'un retrait de la Confédération, au détriment des taux avantageux qu'elle propose.

Notons enfin que, depuis l'entrée en vigueur de la LOG en 2003, la Confédération n'a jamais dû honorer de cautions accordées à la CCL.

5043

Message 1

Contexte

1.1

Loi sur le logement

L'art. 108 de la Constitution (Cst.)1 charge la Confédération d'encourager à titre permanent la construction de logements, principe qui a été réaffirmé lors de la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons. Après un examen approfondi par la Commission fédérale du logement des enjeux de la future politique du logement, le Conseil fédéral a présenté au Parlement, le 27 février 2002, un message relatif à une nouvelle loi sur le logement2, qui était destinée à prendre le relais de la loi fédérale du 4 octobre 1974 encourageant la construction et l'accession à la propriété de logements (LCAP)3. La loi sur le logement (LOG)4 a été adoptée par les Chambres fédérales le 21 mars 2003 et est entrée en vigueur le 1er octobre 2003.

La LOG prévoit quatre formes d'encouragement, définies pour résoudre les problèmes de l'époque: ­

augmenter l'offre de logements à loyer modéré pour les personnes défavorisées sur le plan économique ou social,

­

encourager la construction, la rénovation et l'accession à la propriété de logements à prix modérés,

­

renforcer les activités des maîtres d'ouvrage et des organisations d'utilité publique, et

­

soutenir les travaux de recherche visant à améliorer les connaissances et les bases de décision dans le domaine de l'habitat.

Parallèlement à la LOG, le Parlement a adopté un crédit-cadre d'un montant total de 2075 millions de francs, dont 300 millions étaient destinés à des prêts et 1775 millions à des engagements conditionnels. Ces engagements servent principalement à garantir les emprunts de la Centrale d'émission pour la construction de logements (CCL) et, à un degré moindre, à financer des arrière-cautionnements pour la Société coopérative de cautionnement hypothécaire pour coopératives suisses de construction et d'habitation. En outre, quelques rares cautions de coopératives de cautionnement hypothécaire oeuvrant en faveur de l'accession à la propriété ont bénéficié d'arrière-cautionnements. Faute de demande, cette mesure d'encouragement a toutefois été suspendue jusqu'à nouvel avis.

En ce qui concerne les prêts, l'idée était de mettre en place deux voies d'encouragement, l'une directe et l'autre indirecte. La première devait permettre à l'Office fédéral du logement d'octroyer des prêts directs aux maîtres d'ouvrage en vue de promouvoir des logements en location ou en propriété à prix modérés. Les prêts indirects alimentent pour leur part un fonds de roulement géré à titre fiduciaire sur mandat de la Confédération par les organisations faîtières des maîtres d'ouvrage 1 2 3 4

RS 101 FF 2002 2649 RS 843 RS 842

5044

d'utilité publique. Ces fonds contribuent ainsi indirectement à financer les besoins des maîtres d'ouvrage d'utilité publique affiliés aux organisations faîtières, à savoir des coopératives d'habitation traditionnelles, mais aussi, à un degré moindre, des fondations et diverses coopératives d'habitation du personnel de la Confédération.

Le programme d'allégement 2003 du budget de la Confédération5, adopté quelques mois seulement après la LOG, a toutefois limité les prêts aux prêts indirects et les a totalement suspendus entre 2006 et fin 2008. Le Conseil fédéral a alors réexaminé la situation et décidé, en février 2007, de réinscrire au plan financier des fonds destinés à l'aide au logement à compter de 2009. Les aides étaient cependant définitivement limitées aux mesures d'encouragement indirectes en faveur des maîtres d'ouvrage d'utilité publique (par des prêts du fonds de roulement et des prestations de garantie) et tous les nouveaux crédits-cadre devaient prendre la forme d'engagements conditionnels. Les organisations faîtières des maîtres d'ouvrage d'utilité publique et leurs membres ont donc dû se contenter d'un fonds s'élevant tout de même à près d'un demi-milliard de francs. Celui-ci aura permis, une fois l'ancien crédit-cadre épuisé, d'octroyer chaque année des prêts pour quelque 25 millions de francs.

1.2

Utilisation du crédit-cadre

1.2.1

Prêts

A la levée de sa suspension fin 2008, la part du crédit-cadre destinée aux prêts contenait 185 millions de francs sur les 300 millions initiaux. Lors de la première phase des mesures de stabilisation de l'économie décidée par le Conseil fédéral le 12 novembre 2008, le montant de 5 millions de francs budgétisé pour 2009 a été porté à 50 millions et engagé dans un programme spécial d'assainissement des bâtiments pour les maîtres d'ouvrages d'utilité publique. Trente millions de francs étant inscrits au budget 2010, le solde de la part du crédit-cadre affectée aux prêts sera finalement de 105 millions à la fin de 2010. Le programme de consolidation 2012 à 20136 prévoit cependant de compenser les crédits anticipés versés en 2009 au cours des deux années suivantes; les crédits annuels inscrits au budget 2011 et dans le plan financier 2012 ne s'élèveront dès lors qu'à 6,75 millions de francs au lieu de 30 (montant corrigé du renchérissement). Par ailleurs, le versement du solde à la fin de 2012 (plus de 90 millions de francs) sera réparti sur plusieurs années et attribué au fonds de roulement par tranches de 20 millions de francs. La dernière tranche de la part du crédit-cadre de 2003 affectée aux prêts ne sera donc allouée qu'en 2017.

1.2.2

Engagements conditionnels

Fin avril 2010, la part du crédit-cadre affectée aux engagements conditionnels (1775 millions de francs) avait été utilisée à hauteur de 1324,2 millions de francs pour cautionner les emprunts de la CCL et de 23,12 millions pour financer des arrière-cautionnements. Quelque 200 millions de francs devraient être disponibles au début de 2011, ce qui devrait couvrir les besoins jusqu'au deuxième semestre 2011.

5 6

RO 2004 1633 1645 Message en cours d'élaboration.

Cf. www.efd.admin.ch/dokumentation/zahlen/00579/00595/01658/index.html?lang=fr

5045

Jusqu'à présent, aucune des cautions octroyées dans le cadre de la LOG n'a dû être payée. Les pertes sur cautions enregistrées dans le fil de la crise immobilière des années 90 ne sont dues que pour une part infime à la CCL. En effet, les objets concernés avaient été cautionnés dans le cadre de la LCAP avant d'être refinancés par la CCL. Il aurait donc fallu de toute manière honorer ces cautions. La nécessité de leur refinancement découlait de l'importante différence entre les taux d'intérêts hypothécaires pratiqués par les banques et ceux de la CCL: en abaissant les coûts de capital des objets en difficulté, on espérait faciliter leur assainissement.

2

Nécessité d'un nouveau crédit-cadre pour des engagements conditionnels

2.1

Situation et évolution du marché du logement

Avant que la Suisse n'entre, à l'automne 2008, dans une récession qui s'est prolongée jusqu'au troisième trimestre 2009, le marché du logement connaissait une forte hausse. Celle-ci était due à la bonne situation économique, qui a entraîné non seulement des augmentations de salaire réel certaines années, mais aussi une croissance marquée de la population. En 2007, année de l'introduction de la libre circulation des personnes pour les ressortissants de dix-sept Etats de l'Union européenne et des Etats de l'AELE, la population résidante a augmenté de près de 85 000 personnes.

En 2008, la hausse a été de 1,4 % (plus de 108 000 personnes), soit la croissance annuelle la plus importante depuis 1963. En 2009, l'immigration a certes fléchi, mais l'augmentation de la population est restée à un niveau élevé (plus de 80 000).

Avec l'amélioration de la situation économique, le phénomène devrait se poursuivre à moyen terme.

Le secteur de la construction a répondu à la hausse de la demande: si, en 2002, 29 000 nouvelles unités de logements ont été construites, il y en a eu plus de 40 000 par an ces trois dernières années.

Graphique 1 Nouveaux logements construits et taux de vacance Logements dans d'autres bâtiments

60000

2.5

Maisons individuelles Taux de logements vacants

2

40000 1.5 30000 1 20000

0.5

10000

0

5046

Année

2009

2008

2007

2006

2005

2004

2003

2002

2001

2000

1999

1998

1997

1996

1995

1994

1993

1992

1991

1990

1989

1988

1987

1986

1985

1984

1983

1982

1981

1980

1979

1978

1977

1976

1975

année

0

Taux de logements vacants en pour-cent

Nouveaux logements contruits

50000

Avec près de 12 000 unités par an, la proportion de maisons individuelles est restée stable ces dernières années par rapport à l'ensemble des nouveaux logements; la construction de logements en propriété a pour sa part considérablement augmenté.

L'un dans l'autre, entre deux tiers et trois quarts des nouveaux logements construits étaient destinés à la propriété. Ce bond n'est pas resté sans effet sur le taux de logements en propriété, qui est passé de tout juste 35 % en 2000 à plus de 40 %. Tout cela s'explique notamment par le très bas niveau des taux d'intérêts hypothécaires depuis des années.

Malgré le dynamisme du secteur de la construction, la pénurie règne dans les villes et les agglomérations. Celles-ci cumulent en effet les emplois et les lieux d'habitation attrayants; le corollaire est un taux de logements vacants très bas et des prix qui prennent l'ascenseur. Depuis 2003, le taux de vacance se situe autour de 1 %, et même à moins de 0,5 % en 2009 dans les cantons de Genève, de Vaud et de Zoug et dans la plupart des localités importantes. Depuis plus de neuf ans, les prix augmentent pour toutes les catégories de logements, en particulier pour les maisons individuelles et les logements en propriété bien situés. Ces quatre dernières années, à l'exception de 2008, les augmentations de loyers ont été nettement plus élevées que la progression de l'indice des prix à la consommation. A titre d'exemple, l'augmentation moyenne des loyers a été de 2,5 % en 2009. On ne s'étonnera pas dès lors que la part du revenu des ménages consacrée au loyer et aux frais accessoires ait augmenté ces dernières années, en particulier pour les gens à faible revenu.

Graphique 2 Charge locative moyenne par classe de revenu 40.0%

Part du revenu brut consacrée au logement

35.0%

30.0%

25.0%

20.0%

ERC 2000 ERC 2004

15.0%

EBM 2007

10.0%

5.0%

0.0%
4000

4001-6000

6001-8000

8001-10 000 10 001-12 000

>12 000

total

Revenu brut des ménages en francs

Charge locative moyenne par classe de revenus selon l'enquête sur les revenus et la consommation et l'enquête sur le budget des ménages

5047

2.2

Rôle des maîtres d'ouvrage d'utilité publique pour la construction de logements

En 2000, quelque 8 % des logements occupés en permanence appartenaient à des sociétés construisant des logements d'utilité publique. Les coopératives d'habitation, qui possèdent plus de 5 % du parc de logements, sont les principaux acteurs de ce secteur, mais leur part de marché a diminué. En ne construisant qu'un millier de nouveaux logements par an, les coopératives d'habitation sont restées nettement en dessous du volume nécessaire pour défendre leur part de marché.

Les maîtres d'ouvrage d'utilité publique gèrent un parc de logements dont le loyer est fixé sur la base des coûts. Ces logements sont ainsi avantageux à long terme, ce qui atténue la hausse générale des loyers. Par ailleurs, ces constructeurs mettent davantage l'accent sur la qualité de l'habitat, sur les infrastructures communautaires, sur le développement durable et sur les logements pour les familles. Enfin, ils favorisent la cohésion et la mixité sociales, l'engagement et le sens des responsabilités des habitants, tout en conciliant les avantages du logement en propriété (par ex.

sécurité de l'habitat et codécision) avec ceux de la location (par ex. mobilité accrue).

Traditionnellement, les maîtres d'ouvrage d'utilité publique sont présents dans les villes. A Zurich, Bâle, Lucerne, Bienne ou Thoune, ils détiennent une part de marché supérieure à 10 %. Or, ce sont justement les villes qui sont le plus durement frappées par la pénurie de logements et l'envolée des prix et qui doivent renforcer une offre de qualité et avantageuse à long terme pour éviter le risque de ségrégation sociale. Par ailleurs, l'utilité de la construction de logements d'utilité publique a été récemment reconnue au-delà de ses tenants traditionnels. Sur le plan local, l'évolution du marché du logement est observée avec inquiétude, en particulier dans les communes bien situées, susceptibles d'accueillir des pendulaires occupant des emplois bien rémunérés dans le secteur des services, et dans les communes touristiques. L'arrivée de ménages à hauts revenus et fortunés gonfle les prix du terrain, des maisons et des logements, au point que la classe moyenne, nécessaire au bon fonctionnement des communes, ne peut plus suivre. Dès lors, les initiatives prises par la population ou les autorités se multiplient afin de réduire, en collaboration avec des organismes
de construction de logements d'utilité publique, les carences du marché.

Rejoints par la classe moyenne, les ménages à revenus modestes et les personnes ayant des besoins particuliers (les retraités. par ex.) ne sont en effet plus les seuls à souffrir de la situation.

Les bénéfices sociaux et économiques évoqués ci-dessus justifient la poursuite du soutien indirect de la Confédération à la construction de logements d'utilité publique et de sa contribution à l'augmentation, ou, du moins, au maintien de la modeste part occupée par ce secteur sur le marché. Toutefois, l'enjeu ne se résume pas à l'élargissement de l'offre. Le soutien à la rénovation et à l'assainissement énergétique de vieux bâtiments est un aspect tout aussi important. A défaut, les ménages modestes risquent de devoir quitter leur logement en raison des augmentations de prix entraînées par les rénovations; en outre, les améliorations à apporter d'urgence aux bâtiments ne seront peut-être pas réalisées, parce que le niveau des loyers dans les vieux quartiers ne permettrait pas un report, même minime, des coûts.

5048

2.3

Importance de la CCL en tant qu'instrument de financement pour la construction de logements d'utilité publique

Comme exposé ci-dessus, le Conseil fédéral n'entend pas proposer de nouveaux crédits pour des prêts en faveur des maîtres d'ouvrage d'utilité publique. En revanche, l'aide indirecte qui leur est apportée nécessite l'adoption d'un nouveau créditcadre pour financer des engagements conditionnels. Le crédit-cadre existant sera en effet épuisé en 2011, d'où le besoin urgent d'injecter des fonds, essentiellement en vue de cautionner les emprunts de la CCL. Une très petite partie du crédit sera de nouveau réservée au financement d'arrière-cautions pour des établissements de cautionnement hypothécaire.

Le crédit-cadre en faveur de la CCL vise à pérenniser un instrument éprouvé permettant de financer tous ceux qui oeuvrent à la construction de logements d'utilité publique. Grâce au cautionnement de la Confédération, la CCL peut lever directement des fonds pour ses membres sur le marché des capitaux et les mettre à leur disposition à des conditions avantageuses à long terme. Le Conseil fédéral respecte ainsi l'obligation de la Confédération de s'engager en faveur de la construction de logements à prix modérés et confirme la politique engagée avec la LOG. La promotion du logement ne doit en effet plus être envisagée comme une incitation à construire davantage de logements, mais comme une aide ciblée destinée aux maîtres d'ouvrage d'utilité publique qui s'efforcent tout particulièrement de satisfaire les besoins en logements des couches moins favorisées de la population sur les plans économique et social.

2.4

Activité de la CCL

2.4.1

Organisation et emprunts

Avec la CCL, la construction de logements d'utilité publique s'est dotée d'un instrument sur mesure. La CCL a été fondée en 1990 par les organisations faîtières de la construction d'utilité publique et 26 maîtres d'ouvrage après que les taux hypothécaires eurent grimpé jusqu'à 8 % en peu de temps. Cette coopérative lève directement des fonds sur le marché des capitaux pour ses membres afin d'encourager, par des financements à des taux d'intérêt modérés, la construction de logements bon marché. En avril 2010, elle comptait 361 membres.

Depuis l'entrée en vigueur de la LOG, la CCL a procédé à 26 émissions d'emprunts, qui portent généralement sur une durée de huit à douze ans. Grâce au cautionnement de la Confédération, prévu par l'art. 35 LOG, la CCL jouit d'une bonne solvabilité, ce qui se traduit par des intérêts avantageux. Pour financer leurs immeubles, les maîtres d'ouvrage prennent une quote-part à un emprunt de la CCL. Celle-ci ne finance donc aucun crédit de construction.

5049

2.4.2

Evaluation

Le cautionnement par la Confédération des emprunts de la CCL vient d'être soumis à une évaluation par des spécialistes externes7, conformément à l'art. 48 LOG.

L'étude, fondée entre autres sur la banque de données de la CCL, sur des entretiens avec des experts et sur une enquête écrite réalisée auprès des membres de la CCL, porte sur la période allant du premier emprunt réalisé après l'entrée en vigueur de la LOG, en décembre 2003, à juin 2009. Ses conclusions principales sont résumées ci-après.

­

Pendant la période sous revue, 201 maîtres d'ouvrage d'utilité publique ont contracté au moins une quote-part d'emprunt. Ces promoteurs possèdent près du tiers de tous les logements d'utilité publique. Les quotes-parts d'emprunt de la CCL leur ont permis de financer plus de 15 100 logements.

Les maîtres d'ouvrage de taille moyenne ou réduite (parc immobilier de moins de 100 logements) constituent les deux tiers des emprunteurs. Les logements qui ont bénéficiés de ce soutien se situent dans 22 cantons, Vaud, Zurich, Lucerne et Berne étant ceux qui en comptent le plus.

­

Tous frais compris, les emprunts affichaient en moyenne un taux d'intérêts de 1 % inférieur au taux des hypothèques fixes d'une durée équivalente.

Cette différence représente une économie de quelque 119 millions de francs d'intérêts sur l'ensemble de la période sous revue et permet de proposer des logements quelque 6 % moins cher.

­

Une petite moitié des quotes-parts d'emprunt a servi à refinancer des emprunts auxquels les maîtres d'ouvrage avaient participé et qui arrivaient à échéance (financements relais). Une autre petite moitié a permis de modifier le mode de financement (dissolution de crédits de construction ou d'hypothèques). Le solde a été affecté à des achats.

­

Si les maîtres d'ouvrage participent aux emprunts de la CCL, c'est principalement en raison des conditions favorables de financement et de la longue durée des emprunts, qui leur offrent une sécurité accrue dans leur planification et une stabilité à long terme de leurs loyers.

­

D'une manière générale, les maîtres d'ouvrage sont très satisfaits des prestations de la CCL et envisagent dans leur grande majorité de participer à de futurs emprunts. Ils déplorent toutefois le lourd travail administratif que requiert le traitement de la demande. Depuis lors, la CCL l'a réduit au strict minimum. Les suggestions d'amélioration concernent entre autres les termes des intérêts, la durée des emprunts et le montant minimal d'une quote-part d'emprunt (0,5 million de francs actuellement).

La CCL répondant à un besoin avéré, ses activités permettant indéniablement de réduire le loyer d'un nombre considérable de logements du secteur d'utilité publique et ses coûts étant largement compensés par son utilité, les auteurs de l'évaluation recommandent à la Confédération de continuer à cautionner les emprunts de la CCL.

Si la Confédération ne le faisait plus, la solvabilité de la CCL en souffrirait, au 7

Daniel Hornung et Thomas Röthlisberger, Evaluation Emissionszentrale für gemeinnützige Wohnbauträger EGW, avril 2010 (un résumé du rapport est disponible en français sur le site de l'Office fédéral du logement, à l'adresse suivante: www.ofl.admin.ch).

5050

détriment des taux avantageux qu'elle propose ­ au point qu'elle devrait sans doute mettre un terme à ses activités. Les quotes-parts d'emprunt arrivant à échéance seraient vraisemblablement remplacées par des hypothèques financées par les banques, ce qui entraînerait une hausse des loyers pour les logements concernés. Par ailleurs, un certain nombre de maîtres d'ouvrage rencontreraient des difficultés à rembourser les quotes-parts à terme si leurs nouveaux créanciers fixent des limites de prêt plus basses. Une partie des 8 % des maîtres d'ouvrage relativement mal notés pourraient se trouver dans ce cas. Bien que ces propriétaires s'acquittent des intérêts, la Confédération se trouverait contrainte d'honorer la caution, sans véritable nécessité, pour couvrir le défaut de financement à l'échéance de l'emprunt.

2.5

Rapports avec le droit européen

La politique du logement est de la compétence des Etats de l'UE. Tous ou presque disposent de bases légales régissant l'aide au logement des groupes de population défavorisés sur le plan économique.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

3.1.1

Conséquences financières

Le montant du crédit-cadre en faveur de la CCL dépend du volume des financements relais nécessaires lorsque les emprunts arrivent à échéance, du volume des nouveaux emprunts et des conditions des prêts. L'engagement étant conditionnel, la demande de crédit n'entraînera une dépense effective que si une caution devait être honorée.

Comme précisé au ch. 1.2.2, cela n'est jamais arrivé pour les cautions relevant du régime de la LOG.

Si on considère la pratique actuelle de la CCL, qui émet en moyenne trois ou quatre emprunts par an pour un montant total de quelque 350 millions de francs, le crédit de cautionnement nécessaire pour quatre nouvelles tranches annuelles devrait s'élever à 1400 millions de francs. Selon la manière dont les anciens crédits et les nouveaux crédits seront proposés, les besoins devraient être couverts jusqu'à la fin de 2015 au moins. Dans le même temps, les cautionnements diminueront de quelque 600 millions de francs à mesure du remboursement des emprunts échus. Le montant total des engagements conditionnels pris par la Confédération passerait dès lors, avec le nouveau crédit-cadre, de quelque 1990 millions de francs en 2011 à environ 2790 millions de francs en 2015.

3.1.2

Conséquences pour le personnel et l'informatique

Le crédit-cadre n'entraînera aucune charge supplémentaire sur le plan du personnel ou de l'informatique.

5051

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Le nouveau crédit-cadre n'aura aucune conséquence directe pour les cantons et les communes.

3.3

Conséquences économiques

3.3.1

Conséquences pour l'économie dans son ensemble

Le cautionnement des emprunts par obligations de la CCL est un instrument efficace et avantageux de l'aide au logement. En poursuivant la politique adoptée, la Confédération permettra à de nombreux maîtres d'ouvrage d'utilité publique de continuer à financer de manière avantageuse une part non négligeable de leur parc immobilier et de contribuer ainsi à la stabilité des loyers d'un grand nombre de logements.

Renoncer au cautionnement des emprunts entraînerait une hausse des loyers. Les charges supplémentaires s'élèveraient à quelque 12 millions de francs par an rien que pour les ménages occupant les plus de 15 000 logements financés par les quotesparts d'emprunt de la CCL depuis l'entrée en vigueur de la LOG.

L'action de la CCL ne représente que 0,25 % de l'ensemble des prêts hypothécaires octroyés par les banques en Suisse: elle n'entraîne donc pas de distorsion de la concurrence et ne contribue pas à maintenir des structures indésirables sur le marché du crédit. Pour la même raison, elle n'entraîne pratiquement pas d'effets d'éviction.

Toutefois, on ne saurait exclure que des petites banques régionales souffrent de la résiliation de prêts hypothécaires si des maîtres d'ouvrage résilient leur prêt hypothécaire pour se financer avec l'aide de la CCL. Les conséquences seraient alors proportionnelles au volume de ces prêts. Cependant, les banques peuvent elles aussi tirer profit de l'activité de la CCL, puisqu'elles peuvent réaliser des affaires supplémentaires en finançant des projets qui ne verraient pas le jour sans les emprunts de la CCL. De plus, l'efficacité du marché est meilleure si les banques, soumises à la concurrence de la CCL, améliorent nettement les offres de financement des maîtres d'ouvrage d'utilité publique.

Les logements soutenus de manière indirecte doivent satisfaire à des normes énergétiques élevées et aux critères de qualité du système d'évaluation de logements. Ils jouent donc le rôle de modèle pour la construction de logements bon marché, de qualité, adaptés aux personnes à mobilité réduite et répondant aux critères du développement durable.

Notons enfin que, pour la Confédération, la cessation des activités d'emprunts de la CCL entraînerait un manque à gagner sur les droits d'émission. Depuis l'entrée en vigueur de la LOG, ceux-ci se sont élevées à près de 16 millions de francs.

3.3.2

Conséquences pour les destinataires de l'aide fédérale

Contrairement à des prêts à taux avantageux, le cautionnement des emprunts de la CCL ne contribue pas prioritairement à abaisser les loyers, mais à faciliter l'acquisition de capitaux par les maîtres d'ouvrage d'utilité publique. Ces promoteurs se voient souvent imposer des conditions d'intérêt moins favorables et des limites de 5052

prêt plus basses sur le marché hypothécaire en raison de leur manque de fonds propres et, par conséquent, de leur solvabilité moindre La garantie de la Confédération leur permet d'opérer sur un pied d'égalité et de bénéficier de crédits à long terme à des taux d'intérêt stables et comparativement avantageux. Les bénéficiaires directs sont donc les bailleurs de logements d'utilité publique. Etant donné que leurs logements sont davantage occupés par des familles, des retraités et, d'une manière générale, des ménages dont le revenu est relativement modeste, l'aide fédérale a un effet indirect sur les groupes de population visés par la politique du logement. Les loyers de ces logements étant fixés sur la base des coûts, ces groupes bénéficient en effet d'un loyer qui est généralement de 10 à 20 % inférieur par rapport à des logements comparables de bailleurs privés ou institutionnels.

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Programme de la législature

Le présent projet a été annoncé dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20118.

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Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

L'arrêté fédéral se fonde sur l'art. 43, let. b, LOG. Celui-ci repose sur l'art. 108 Cst., en vertu duquel la Confédération encourage la construction de logements et l'acquisition d'appartements et de maisons familiales destinés à l'usage personnel de particuliers, ainsi que les activités des maîtres d'ouvrage et des organisations oeuvrant à la construction de logements d'utilité publique. L'art. 108 Cst. prévoit également que la Confédération prenne notamment en considération les intérêts des familles et des personnes âgées, handicapées ou dans le besoin.

5.2

Forme de l'acte à adopter

Conformément à l'art. 167 Cst. et à l'art. 43 LOG, le crédit-cadre doit prendre la forme d'un arrêté fédéral simple.

5.3

Frein aux dépenses

Afin de limiter les dépenses, l'art. 159, al. 3, let. b, Cst. prévoit que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs. Le crédit d'engagement excédant ces montants, son adoption est soumise au frein aux dépenses.

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FF 2008 706

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