10.098 Message concernant la prolongation de la participation suisse à la Kosovo Force multinationale (KFOR) du 17 novembre 2010

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons le message à l'appui du projet d'arrêté fédéral simple concernant la prolongation de la participation suisse à la Kosovo Force multinationale (KFOR), en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

17 novembre 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

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Condensé Le présent arrêté fédéral simple doit permettre de prolonger jusqu'au 31 décembre 2014 l'engagement de la «Swiss Company» (SWISSCOY), mandaté le 11 juin 20081 par l'Assemblée fédérale jusqu'au 31 décembre 2011, en faveur de la Kosovo Force multinationale (KFOR), avec une légère augmentation possible de son effectif. Vu les changements opérés dans la structure de la KFOR et ceux qui doivent encore l'être, la possibilité d'augmenter temporairement le contingent de 50 personnes pendant deux mois au plus, déjà prévue dans l'arrêté fédéral du 11 juin 2008, devrait désormais permettre une augmentation à 80 personnes au maximum pour une période limitée, à chaque fois, à douze mois au plus.

Depuis que le Kosovo a déclaré son indépendance, le 28 février 2008, l'entrée en vigueur de sa Constitution et de nombreuses lois a permis la création de bases juridiques et institutionnelles favorables à la mise sur pied d'un Etat aux structures politiques, économiques et sociales stables et facilitant l'objectif à long terme visé par le Kosovo, soit le rattachement du pays à l'Union européenne.

Bien que les conditions juridiques permettant de progresser durablement soient actuellement remplies, des difficultés considérables doivent encore être surmontées dans un proche avenir.

En matière de sécurité, la situation s'est améliorée au Kosovo après la déclaration d'indépendance de février 2008 et est considérée comme calme et relativement stable. Une exception toutefois: le nord du pays, majoritairement peuplé de SerboKosovars, où la situation, bien que calme en surface, reste néanmoins très instable.

A court terme, la présence de la KFOR est indispensable à la stabilité du Kosovo.

Sa présence sur l'ensemble du territoire et sa capacité éprouvée d'intervention, au besoin en engageant des réserves rapidement disponibles, ont un effet stabilisant.

C'est pourquoi, la communauté internationale n'envisage actuellement pas la possibilité de renoncer à la KFOR en tant qu'instrument solide destiné à assurer la stabilité au Kosovo. Le processus visant la réduction par étapes de l'effectif de la KFOR est néanmoins engagé depuis un certain temps déjà.

Les constatations actuelles se fondent sur le fait que la KFOR doit encore conserver sa capacité d'intervention pendant quelques années, même avec un effectif réduit.
Actuellement, les conceptions sur l'avenir de la KFOR entrevoient sa restructuration en une mission de conseil et d'instruction servant au développement de forces armées contrôlées démocratiquement et respectueuses des principes de l'Etat de droit.

La Suisse reste très intéressée à un Kosovo pacifié, car la stabilité des Balkans occidentaux ­ principalement du Kosovo ­ influe directement sur la situation en matière de sécurité en Suisse. Une détérioration de la situation au Kosovo peut entraîner des conséquences directes pour la Suisse. La prolongation de la présence

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de la KFOR en tant qu'élément d'un engagement international continu au Kosovo revêt par conséquent un intérêt tout particulier pour la Suisse.

Il est dès lors logique de prolonger l'engagement de la SWISSCOY, pour autant que ses prestations répondent à un besoin de la KFOR. Tel est actuellement le cas.

L'éventail futur des prestations de la SWISSCOY se concentrera sur les prestations à fournir à la KFOR, indépendamment de la taille de cette dernière. Pour toutes ces raisons, l'effectif de la SWISSCOY doit rester de 220 militaires.

Chaque 31 décembre, le DDPS présente un rapport intermédiaire sur l'engagement de la SWISSCOY aux Commissions de politique de sécurité et de politique extérieure de l'Assemblée fédérale.

Toutes les informations contenues dans le présent message se réfèrent à la situation constatée fin octobre 2010. Il n'est pas possible, à ce moment précis, de prévoir l'évolution politique de la situation. Les Chambres fédérales en seront informées au moment de l'examen du présent message.

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Message 1

Evaluation de la situation au Kosovo

1.1

Contexte

Le 23 juin 1999, le Conseil fédéral prenait la décision de principe de participer militairement à la mission de la force de maintien de la paix au Kosovo (KFOR). Cet engagement, qui fait partie intégrante d'un paquet de mesures impliquant le traitement du problème des réfugiés et des personnes déplacées en Suisse, prévoit d'apporter de l'aide au Kosovo et de contribuer à la stabilisation de la région. Par l'arrêté fédéral du 12 septembre 2001, l'Assemblée fédérale a approuvé la participation de la Suisse à la KFOR et, subséquemment, sa prolongation jusqu'au 31 décembre 2011 dans le cadre d'autres arrêtés fédéraux.

Tenant compte de ces éléments, les organes politiques ont décidé, à l'échelon international, de poursuivre jusqu'à nouvel ordre l'engagement de la KFOR afin d'assurer la stabilité au Kosovo, malgré la réduction par étapes des effectifs. De l'avis général, ce processus de réduction devrait prendre quelques années.

La sécurité intérieure de la Suisse pouvant directement dépendre de la stabilité dans les Balkans ­ principalement dans la République du Kosovo ­, notre pays a tout intérêt à voir cette dernière vivre en paix et en sécurité. Quelque 200 000 personnes venues de la République de Serbie et du Kosovo sont domiciliées en Suisse2. Une dégradation de la sécurité au Kosovo peut avoir des conséquences pour la Suisse; la stabilité du Kosovo est donc toujours d'une importance majeure pour notre pays.

1.2

Développements politiques au Kosovo

Au terme des négociations menées en 2007, qui s'étaient achevées sur le constat qu'il était impossible d'aboutir à une solution négociée sur la question du statut du Kosovo, ce dernier a déclaré son indépendance le 17 février 2008 en étroite coordination avec l'Union Européenne (UE) et les Etats-Unis. A cette occasion, le Kosovo a réaffirmé son acceptation des obligations découlant du plan établi par l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations-Unies, M. Martti Ahtisaari. Il s'agit notamment de la protection et de la promotion des communautés non-albanaises. Le Kosovo a en outre invité l'UE à déployer sa mission destinée à l'établissement de la justice et de la police EULEX, et l'OTAN à poursuivre son engagement au Kosovo avec le maintien de la KFOR. Toujours présente sur la base de la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations Unies (CS/ONU), la MINUK a, quant à elle, été fortement redimensionnée et n'exerce presque plus aucune fonction opérationnelle, excepté dans le nord du pays.

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Il n'est pas encore possible, jusqu'à plus ample information, de chiffrer exactement la diaspora albano-kosovare en Suisse puisque les Kosovars d'origine albanaise, considérés en principe comme des immigrants serbes jusqu'à la déclaration d'indépendance du Kosovo, n'ont eu la possibilité d'échanger leur passeport serbe contre un passeport kosovar qu'à partir du début de l'année 2009. Jusqu'à la rédaction du présent message, près de 42 000 personnes ont fait usage de cette possibilité.

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La nouvelle Constitution de la République du Kosovo est entrée en vigueur le 15 juin 2008. Conforme aux normes internationales, elle accorde notamment une attention tout particulière aux droits des minorités, à leur représentation institutionnelle et à la décentralisation. De nombreuses lois ont également été adoptées conformément aux prescriptions du «Plan Ahtisaari» précité. Dans l'ensemble, le cadre juridique et institutionnel nécessaire au pays pour mener à bien son développement politique et socio-économique semble désormais installé. Le Kosovo devrait dès lors être en mesure de se rapprocher de l'UE. Le gouvernement de Pristina a clairement fixé cet objectif comme une priorité. Il doit dorénavant faire preuve d'une volonté politique suffisante pour mener à bien les nombreuses et difficiles réformes encore nécessaires.

Jusqu'à présent, l'indépendance du Kosovo a été reconnue par 70 Etats, dont la Suisse et la majorité des Etats membres de l'UE (22 sur 27), de l'OSCE (32 sur 56), de l'OTAN (22 sur 26) et du Conseil de l'Europe (32 sur 47).

La Serbie s'est en revanche fermement opposée à la déclaration d'indépendance du Kosovo en se livrant à une campagne diplomatique très active. L'un des résultats les plus notables de cette position a été la saisine de la Cour internationale de justice (CIJ) par l'Assemblée générale de l'ONU, le 8 octobre 2008, sur la question de la légalité de la déclaration d'indépendance du Kosovo. Le 22 juillet 2010, la CIJ a rendu son avis, en indiquant que la déclaration d'indépendance ne contrevenait pas au droit international. Elle contredit ainsi l'avis de la Serbie, décevant grandement les attentes de Belgrade. La Serbie a alors décidé de soumettre une nouvelle résolution à l'Assemblée générale des Nations Unies en cherchant, de cette façon, à rouvrir les négociations sur le statut du Kosovo. Au terme de pourparlers serrés notamment avec l'UE et avec la Serbie, une résolution a été adoptée par consensus. Cette résolution enjoint de favoriser un processus de dialogue entre la Serbie et le Kosovo, avec l'appui de l'UE. Cet avis et cette résolution laissent à penser que bon nombre d'Etats pourraient aussi franchir le pas de la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo.

Après d'intenses négociations, la mission EULEX a pu être lancée le 9 décembre 2008, devenant la
plus grande mission civile de l'UE jamais déployée. Elle a pour mandat de renforcer l'Etat de droit dans trois secteurs clés (justice, police et douanes), ainsi que de lutter contre la corruption et la criminalité organisée, ce qui représente un défi de taille particulièrement difficile à relever.

Parallèlement, la constitution de l'International Civilian Office (ICO) a permis la création d'un bureau international qui travaille en étroite collaboration avec le gouvernement et est très engagé dans la mise en oeuvre des prescriptions du jeune Etat, en particulier dans le domaine des communautés minoritaires, de la décentralisation ainsi que de la protection du patrimoine religieux et culturel.

Un enjeu fondamental pour la stabilité et l'avenir du Kosovo est celui de la décentralisation, qui doit permettre une intégration et une participation adéquates de toutes les communautés ­ de la communauté serbe en particulier ­ au Kosovo. La décentralisation doit par ailleurs faciliter l'accès des différentes couches de la population albanaise aux institutions étatiques (comme la formation ou la santé). Dans ce contexte, il s'agit de distinguer le nord du sud du pays. Dans le nord, des tensions subsistent et la volonté d'intégration des Serbes reste faible. Dans les municipalités à majorité serbe nouvellement créées au sud de la rivière Ibar (en soi un succès notable), au contraire, la participation des Serbes à la vie politique du Kosovo s'accroît, tout comme leur volonté de coopérer avec Pristina.

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Les élections municipales de novembre et décembre 2009 ont, à cet égard, constitué un tournant politique important: les taux de participation de la population serbe vivant dans le sud du Kosovo se situaient entre 15 et 25 % au premier tour et ont, par endroits, atteint 60% au deuxième tour ­ alors même que Belgrade avait préconisé le boycott. Même si rien n'est encore définitivement gagné, loin s'en faut, ces développements positifs permettent de nourrir un optimisme prudent quant à ce processus de décentralisation.

La Suisse contribue au processus de paix au Kosovo en soutenant des projets et des acteurs locaux et en mettant du personnel qualifié à la disposition des organisations internationales. Rétablir la confiance, faire face au passé récent, améliorer le fonctionnement des institutions et protéger les minorités sont autant d'objectifs importants pour assurer la stabilité au Kosovo. En apportant une contribution de 7 millions de francs environ, la Suisse facilite le dialogue politique intercommunautaire, soutient le processus de traitement juridique et non-juridique des séquelles du passé et s'engage pour les droits et la participation des minorités dans le cadre de la décentralisation. Quinze experts dans les domaines de la police, de la justice, des minorités et du travail de maîtrise des séquelles du passé sont actuellement mis à la disposition de la mission EULEX et du Bureau civil international (ICO).

Sur le plan politique, les élections législatives du 17 novembre 2007 ont amené au pouvoir une coalition dirigée par le Parti démocratique du Kosovo (PDK), de Hashim Thaci, et comprenant la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), du président Sejdju qui s'est retiré le 27 septembre 2010 (et de feu le président Rugova), ainsi que le parti serbe SLS et le parti turc KDTP. Fragile ­ les relations entre le PDK et le LDK sont tendues ­, confronté à de réelles difficultés objectives (sur le plan économique notamment) et régulièrement décontenancé face aux manoeuvres de déstabilisation de la Serbie, le gouvernement reste sous la pression d'une opinion publique qui attendait une plus grande indépendance et un processus plus rapide en ce sens.

Même si la perspective d'une adhésion à l'UE reste éloignée, le Kosovo est déjà engagé sur la voie de l'intégration européenne. Un «dialogue» sur le processus
de stabilisation et d'association a ainsi été lancé, y compris en matière de libéralisation du régime des visas.

En matière de politique extérieure et de politique de sécurité, la Suisse adopte une approche globale en ce qui concerne le Kosovo. Les principaux acteurs ­ la défense, la diplomatie (par ex. dans la promotion civile de la paix ou dans la politique de migration) et la coopération en matière de développement ­ fournissent une contribution importante. Les organismes concernés ont créé des synergies profitables et mènent à bien leur engagement en coordonnant étroitement leurs activités, tant à Berne que dans la région concernée. Il est important de souligner que, par le passé, la contribution des organismes civils dépendait de l'engagement militaire et que la présence de la KFOR reste un élément décisif de la stabilisation de la région et de la garantie de l'engagement civil. Il est, dès lors, également réjouissant que la Suisse maintienne pour l'instant sa participation à la KFOR à son niveau actuel, car le maintien de la stabilité ­ notamment dans le nord du Kosovo ­ revêt une importance décisive, tout spécialement durant cette phase délicate où des négociations pourraient s'ouvrir entre Belgrade et Pristina, comme le proposait la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU adoptée au début de septembre 2010. Autrement, cela pourrait avoir des effets négatifs sur le dialogue à venir.

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Depuis longtemps, la Suisse s'engage, tant sur le plan politique que sur le plan opérationnel, pour qu'un dialogue s'instaure entre les groupes ethniques qui composent le Kosovo et pour la protection de la participation et des droits des diverses communautés. Cet engagement se traduit par des projets concrets et par l'envoi de policiers ou d'autres experts. Dans ce sens, la participation à la KFOR est un complément et une concrétisation efficace et profitable des priorités de la Suisse dans le domaine de l'établissement d'un Etat de droit et dans la mise sur pied d'une architecture de sécurité démocratique.

1.3

Situation en matière de sécurité

En matière de sécurité, la situation qui règne au Kosovo peut être qualifiée de calme et de stable. Une exception toutefois: le nord du pays, majoritairement peuplé de Serbo-Kosovars, où la situation, bien que calme, reste néanmoins très instable.

Depuis la déclaration d'indépendance du Kosovo, survenue en février 2008, la situation s'est améliorée en général. Ainsi, le nombre des incidents interethniques entre Albanais et Serbes du Kosovo a, généralement, fortement diminué. C'est dû, pour une part, à l'amélioration du travail de la police kosovare et à la mission de l'UE de promotion de l'Etat de droit au Kosovo (EULEX) active depuis la fin 2008, et, d'autre part, à l'émigration durable de la population serbo-kosovare. Force est également de constater que les groupements extrémistes albano-kosovars sont restés discrets depuis la déclaration d'indépendance. Une grande partie de ces groupements ont dû subir de fortes restrictions financières en raison d'une baisse considérable de l'intérêt de la population kosovare, ainsi que de la diaspora, pour les thèmes qu'ils abordaient. Les groupements comme le mouvement Autodétermination, les organisations de vétérans ou l'Armée nationale albanaise, se sont fortement concentrés, par le passé, sur les droits de la population albanaise et l'indépendance du Kosovo, et n'ont pas pu ou voulu s'adapter à la nouvelle situation.

Au nord du pays, un potentiel persistant de violence motivée par des tensions interethniques subsiste toutefois; il s'exprime régulièrement dans les zones tampons qui séparent les quartiers serbo-kosovars des quartiers albano-kosovars, nécessitant généralement l'intervention des acteurs internationaux. Plusieurs incidents violents enregistrés ces dernières années, notamment les plus récents accrochages du 11 septembre 2010 à Mitrovica, qui ont fait des blessés par balle également parmi le personnel de la KFOR, ont montré que la ville multiethnique de Mitrovica pouvait toujours être le point de départ de tensions interethniques. La majorité des incidents touchant la sécurité constatés au nord du pays ont toutefois des origines criminelles ou relèvent de différends immobiliers.

1.4

Situation économique

De nombreux facteurs empêchent la reconstruction et la stabilité du Kosovo. Ce sont surtout les tensions interethniques persistantes, la présence de groupements politiques radicaux et la criminalité organisée très répandue qui menacent la sécurité du pays. Le taux de chômage avoisinant les 50 %, plus de la moitié de la population (citadine et campagnarde) vit dans la pauvreté, voire dans l'extrême pauvreté.

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La criminalité organisée issue de la guerre, combinée à la tradition albanaise des bandes familiales fortement soudées, a donné naissance à un réseau opaque de liaisons au Kosovo et qui marque de son empreinte toute la société. Les normes législatives de l'UE ont certes largement été adoptées, mais leur application reste encore très lacunaire. Le peu de perspectives économiques constitue un terreau idéal pour les activités criminelles.

Dans le contexte des structures clandestines, des luttes de répartition et de l'affairisme, qui ont été l'apanage des toutes les sociétés balkaniques touchées par la guerre, la criminalité organisée a trouvé des conditions idéales d'existence et de croissance. Les principales menaces pour la sécurité sont actuellement la traite des êtres humains et le trafic de drogue, la prostitution, les constructions illégales et la contrebande, le chantage et le trafic d'armes. Les autorités kosovares, toujours en voie de constitution, ne peuvent faire face efficacement à ces menaces qu'avec le concours de la communauté internationale. La criminalité organisée ne constitue pas un phénomène spécifique au Kosovo; elle peut aussi tirer profit d'une marge de manoeuvre parfois considérable dans les pays voisins.

2

Le rôle de la KFOR

La mission première de la KFOR est définie par la résolution 1244 de l'ONU du 10 juin 1999. Elle consiste principalement à: ­

créer et maintenir un environnement sûr et stable;

­

mettre en oeuvre et surveiller l'application du Military Technical Agreement, qui prévoit le retrait des forces serbes du Kosovo et le désarmement de l'Armée de libération du Kosovo (UCK);

­

soutenir la mission civile de l'ONU MINUK et les autres partenaires civils internationaux.

La KFOR doit veiller avant tout à garantir un environnement sûr et stable, condition sine qua non de la reconstruction sociale, politique et économique du Kosovo.

2.1

Tâches de la KFOR

Des flambées de violence et des troubles susceptibles de s'étendre à l'ensemble du Kosovo restent possibles. Il n'y a donc pour le moment pas d'alternative réaliste à la présence de troupes de promotion de la paix pour garantir un environnement sûr et stable.

2.2

Développements au sein de la KFOR

La KFOR multinationale se concentre prioritairement sur l'accomplissement de sa mission en fonction de la situation et optimisée selon les moyens dont elle dispose.

Elle a pu, à plusieurs reprises, réduire l'effectif de ses troupes et adapter son éventail d'activités, ce qui a permis à plusieurs Etats engagés dans la KFOR de libérer leurs troupes au profit d'autres engagements internationaux.

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Le concept de réduction de l'effectif de la KFOR, développé par l'OTAN en collaboration avec les Etats mettant des troupes à disposition mais ne faisant pas partie de l'Alliance, comporte trois étapes, appelées Gates. Dans le cadre de Gate 1, un processus de réduction progressive s'est déroulé, faisant diminuer l'effectif de la KFOR de 14 000 à quelque 10 000 personnes actuellement. Le passage au dispositif de est lié à une diminution à environ 5700 militaires de la KFOR. Avec Gate 3, enfin, la KFOR verra encore son effectif diminuer à 2300 militaires environ.

Le 29 octobre 2010, l'OTAN a décidé de lancer le passage de Gate 1 à Gate 2. Cette décision a été prise en raison du développement positif de la situation en matière de sécurité dans la région. Grâce à ce processus, on a évité les anciens automatismes de la réduction qui avaient pu donner l'impression négative que les Etats de la KFOR avaient adapté leur dispositif sans tenir compte de la situation en matière de sécurité sur place. De cette façon, les fauteurs potentiels de troubles sont moins incités à passer à l'acte en attendant simplement la liquidation apparemment automatique de la présence militaire internationale. L'installation définitive dans le dispositif de Gate 2 prenda quelque 3 à 4 mois et sera donc achevée au printemps 2011.

L'application du dispositif de Gate 1 n'a pas donné lieu à des modifications substantielles dans la structure de la KFOR. Elle s'est surtout traduite par une réduction des troupes.

Le passage à Gate 2 entraîne des adaptations structurelles. Concrètement, sur le plan opérationnel, l'effort principal des troupes stationnées au Kosovo sera déplacé: les tâches de protection qui incombent à l'infanterie vont être substantiellement réduites, au contraire des activités liées au renseignement (acquisition et analyse de renseignements et d'informations) qui seront développées. La capacité d'intervention directe de la KFOR doit être maintenue en concentrant la mission sur les points sensibles connus et en accroissant sa mobilité. Les tâches de protection statiques qu'elle a assumées jusqu'à présent sont désormais dévolues aux forces de sécurité kosovares, lesquelles seront soumises à sa surveillance.

Cela signifie que dans Gate 2, la KFOR doit augmenter considérablement ses capacités en matière d'exploration,
de surveillance et de renseignement (acquisition et analyse des renseignements/informations). Etant donné qu'un nombre inférieur de troupes sera disponible en même temps en un lieu déterminé, les exigences en matière de mobilité de la KFOR seront plus élevées: outre la capacité de transporter des unités par la voie aérienne, il s'agira aussi de garantir la mobilité au sol, même dans des conditions difficiles. Dans ce contexte, les moyens du génie et les éléments chargés de l'élimination des munitions non explosées ont leur importance.

Le concept de la KFOR prévoit aussi qu'en cas d'escalade au niveau de la sécurité ou en cas de danger correspondant, des formations de réserve désignées à l'avance seront acheminées au Kosovo. Dans divers Etats, principalement les Etats les plus puissants de l'OTAN, ces formations font déjà l'objet d'un traitement particulier et peuvent être transportées rapidement sur un lieu d'intervention. La Suisse ne prend pas part à ce système de réserve.

La réduction prévue des troupes entraînera aussi une diminution du nombre des sites de la KFOR au Kosovo et provoquera, dès lors, des regroupements. La planification prévoit de fermer à moyen terme jusqu'à 16 sites sur les 21 que compte actuellement la KFOR. De plus, des changements sont prévus dans le domaine de la logistique.

Ainsi, les capacités de transport devront être réorganisées de telle sorte que les

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tâches correspondantes puissent être effectuées efficacement avec le moins de troupes possible.

On peut en déduire que la restructuration et la réduction de la KFOR prendra encore plusieurs années. Actuellement, les conceptions sur l'avenir de la KFOR prévoient qu'après être entrée dans la phase Gate 3, la force multinationale passera à la prochaine phase d'opération (Minimal Presence) et, parallèlement, se restructurera pour devenir une mission de conseil et d'instruction servant au développement de forces de sécurité contrôlées démocratiquement et respectueuses des principes de l'Etat de droit. Il est pensable qu'en raison du manque d'annonce concernant l'envoi des troupes, l'OTAN saute l'étape de réduction Gate 3 et s'installe directement dans le dispositif de Minimal Presence.

3

Adaptation de la SWISSCOY

3.1

Mission de la SWISSCOY

Le contingent suisse de la KFOR (SWISSCOY) compte actuellement 220 militaires.

Le gros de la SWISSCOY opère à partir du camp CASABLANCA, à Suva Reka. Ce camp est exploité en commun avec le contingent autrichien de la KFOR.

Les différentes modifications apportées au niveau opérationnel et aux effectifs de la KFOR ont eu, depuis le printemps 2010, des conséquences sur la structure de la SWISSCOY. Ces adaptations ont été faites en tenant compte des nouveaux besoins de la KFOR et des possibilités de l'armée suisse de mettre en évidence ses points forts dans le cadre des dispositions de l'arrêté fédéral en vigueur.

Pour les phases Gate 2 et Gate 3 de la KFOR, les points forts de l'armée suisse se situent essentiellement dans les domaines de la logistique et des transports, du génie et de l'élimination des munitions non explosées, ainsi que dans la recherche de renseignements et d'informations. Par ailleurs, l'appui accordé par la Suisse en matière de transport aérien est indispensable à la KFOR. Pour l'OTAN, l'engagement d'un hélicoptère de transport équivaut à celui d'une formation forte de 70 fantassins. Grâce au détachement du transport aérien, la Suisse fait partie des quatre Etats qui fournissent des prestations correspondantes au profit de la KFOR. Les hélicoptères suisses constituent actuellement les appareils de la KFOR offrant la capacité de transport la plus élevée; ce facteur peut s'avérer essentiel en cas de besoin de déplacement rapide de troupes.

En outre, la SWISSCOY fournit des prestations au contingent allemand et autrichien de la KFOR. La plupart de ces prestations sont liées au site (c'est-à-dire qu'elles doivent être fournies aussi longtemps que les installations et infrastructures concernées sont utilisées). Le gros de ces prestations concernant le camp CASABLANCA, les militaires de la SWISSCOY en tirent indirectement profit.

L'éventail futur des prestations de la SWISSCOY se concentre sur les prestations à fournir à la KFOR indépendamment de la taille de cette dernière. L'effectif total de la SWISSCOY ne sera donc que légèrement réduit par rapport à sa taille actuelle. La réduction des troupes d'autres Etats entraîne une augmentation de l'importance relative de la contribution de la Suisse à la KFOR à chacune des étapes de sa réduction. Pour toutes ces raisons, l'effectif de la SWISSCOY devrait à l'avenir aussi rester au niveau de 220 militaires.

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En ce qui concerne les missions accomplies dans le passé, il convient de relever que les partenaires de la SWISSCOY apprécient sa fiabilité et son professionnalisme.

Sur place, la SWISSCOY s'est forgée une excellente réputation. Les connaissances linguistiques et le savoir-faire dans des domaines civils qu'apportent nos militaires en service volontaire, sont des facteurs particulièrement appréciés.

3.2

Domaines d'activité de la SWISSCOY dans le Gate 1

Suite à l'adaptation de l'éventail des prestations, la SWISSCOY a mis à la disposition de la KFOR deux éléments LMT (Liaison and Monitoring Teams) et un élément EOD (Explosive Ordnance Disposal) chargé de l'élimination des munitions non explosées. Simultanément, les prestations d'infanterie, dont la KFOR n'avait plus besoin dans les mêmes proportions que jusque-là, ont été réduites.

Les LMT sont un élément du système de préalerte que la KFOR met sur pied dans le domaine du renseignement et de l'information. Le but recherché consiste à obtenir une image complète de la situation grâce à une présence visible et à des contacts directs avec les autorités locales, avec la population locale ainsi qu'avec les représentants sur place de l'ONU, de l'UE et d'organisations non gouvernementales. En outre, il est ainsi possible de déceler en temps utile les éventuelles tendances négatives et d'en suivre l'évolution. Le réseau particulièrement étendu des LMT permet également d'assurer une présence durable de la KFOR dans l'ensemble du Kosovo, même avec des effectifs réduits.

Le concept des LMT s'appuie étroitement sur celui des Liaison and Observation teams (LOT), qui fonctionne avec succès en Bosnie-Herzégovine depuis 2004 et avec lequel l'armée suisse a déjà pu faire des expériences. Les militaires suisses se sont révélés particulièrement appropriés pour ce genre de tâches; dans le cadre de cette activité, ils peuvent en effet tirer profit de leur formation et des expériences acquises tant dans le domaine civil qu'à l'armée.

Au Kosovo également, la population fait confiance aux LMT. Elle est également prête à se servir de cet instrument, c'est-à-dire à partager ses appréciations et ses soucis avec les LMT. Les premières expériences réalisées montrent en outre que le recours à des militaires pour cette tâche constitue aussi un avantage appréciable.

D'une part, le port de l'uniforme permet de marquer sa présence sur le terrain, et d'autre part, les LMT peuvent encore agir même si la situation en matière de sécurité venait à se détériorer.

L'équipe chargée de l'élimination des munitions non explosées, instruite pour accomplir des tâches dans le cadre de missions internationales pour la paix et envoyée au Kosovo dans le cadre du passage à Gate 1, se compose de spécialistes rattachés au Centre de compétences
de déminage et d'élimination des munitions non explosées en tant que personnel professionnel militaire. Cette équipe peut être engagée pour toutes les tâches liées à l'évaluation et à l'évacuation de munitions non explosées. Comme elle est motorisée et bénéficie d'une protection, elle peut intervenir dans l'ensemble du Kosovo.

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3.3

Domaines d'activité de la SWISSCOY dans les Gates 2 et 3

Comme cela a déjà été mentionné, les phases Gate 2 et Gate 3 requièrent pour l'essentiel des prestations dans les domaines de la logistique et des transports, du génie et de l'élimination des munitions non explosées, ainsi que dans la recherche de renseignements et d'informations. Il est donc essentiel, pour la KFOR, de continuer à disposer d'un détachement de transport aérien (hélicoptères). La Suisse prévoit également de maintenir à disposition la cellule de renseignements (Swiss Intelligence Cell, SWIC), la composante «police militaire», le personnel sanitaire et les officiers supérieurs. L'engagement des LMT, qui a commencé en 2010, doit être étendu de sorte que la SWISSCOY puisse, pendant ces phases, disposer d'au moins quatre LMT.

La Suisse accroîtra également sa contribution à la capacité de transport de la KFOR au Kosovo et sur les axes logistiques menant au Kosovo. Les automobilistes suisses sont particulièrement qualifiés pour cela, étant donné que leur formation civile leur permet de conduire différents types de véhicules.

Pour répondre aux besoins de la KFOR, la Suisse maintiendra sur place ses équipes chargées de l'élimination des munitions non explosées et mettra sur pied simultanément un élément du génie, qui doit être composé essentiellement de volontaires issus de la milice.

La composante «infanterie» de la SWISSCOY peut être réduite de manière significative. Seuls seront encore recrutés les éléments d'infanterie nécessaires pour la protection de l'infrastructure du camp CASABLANCA, aussi longtemps que celuici conservera sa place dans le concept d'opération de la KFOR.

3.4

Autres possibilités de développement

Dans la planification actuelle, on part du principe que l'essentiel des activités de la SWISSCOY se concentrera sur la mobilité ainsi que sur l'acquisition de renseignements et d'informations au plus tard avec la réalisation de la troisième étape de réduction (Gate 3). Dans cette perspective, le DDPS étudie la possibilité de fournir des prestations dans le domaine de l'exploration électronique sur la base du système intégré d'exploration et d'émission radio (IFASS).

La KFOR ne peut pas se passer du détachement de transport aérien si elle entend conserver un minimum de mobilité tactique. Il en va de même pour les capacités de transport au sol, qui seront toujours nécessaires même après la réalisation de l'étape Gate 3. Il n'est cependant pas encore possible d'en déterminer l'ampleur.

La Suisse prévoit de maintenir la SWISSCOY à Suva Reka aussi longtemps que cela reste judicieux pour des raisons opérationnelles et économiques. Comme le camp CASABLANCA n'est pas exploité par la KFOR, mais conjointement par l'Autriche et la Suisse, il n'est pas soumis au pouvoir décisionnel de la KFOR. Ainsi, les décisions concernant l'exploitation ou la fermeture du camp CASABLANCA doivent être prises conjointement par la Suisse et par l'Autriche. Au cas où il serait décidé de fermer le site de Suva Reka, d'autres solutions devraient être cherchées en coopération avec la KFOR et d'autres partenaires.

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3.5

Possibilité d'augmenter temporairement le contingent

Par l'arrêté fédéral du 11 juin 2008, le Conseil fédéral a été autorisé à augmenter, si nécessaire et pour deux mois au maximum, l'effectif du contingent au-delà de la limite de 220 militaires. Il peut engager 50 personnes supplémentaires au maximum pour des tâches de maintenance ou pour renforcer la sûreté en cas de menace accrue.

Compte tenu des modifications déjà apportées à la structure de la KFOR et de celles qui doivent encore l'être, il faut pouvoir disposer d'une plus grande flexibilité et augmenter, si nécessaire, l'effectif du contingent pour un laps de temps limité. En effet, l'effectif normal du contingent est calculé en fonction des prestations à fournir convenues avec la KFOR. Des événements extraordinaires tels qu'un changement de site ou le démantèlement de l'actuel camp CASABLANCA ne peuvent pas être gérés parallèlement aux tâches ordinaires avec l'effectif maximum officiel du contingent. Il faut partir du principe que la fermeture de ce site est inéluctable et que les prestations de la SWISSCOY devront à l'avenir être fournies de manière décentralisée à partir d'un petit nombre de camps occupés par des militaires de plusieurs nations. La KFOR tente par ce biais de réduire les besoins en forces chargées de garder ses propres installations.

En outre, comme jusqu'à présent, on ne saurait exclure l'hypothèse de voir la situation au Kosovo se déteriorer temporairement, entraînant par là des besoins en sécurité accrus.

L'éventualité d'une augmentation temporaire de l'effectif du contingent pour une période plus longue que les deux mois autorisés jusqu'à présent offrirait à la Suisse pour la première fois la possibilité d'obtenir un poste de général au sein de la KFOR pour une durée de six à douze mois. Une telle possibilité dépend en principe de la disponibilité du pays concerné de renforcer le quartier général avec du personnel d'état-major supplémentaire pour la durée du commandement prévu. Assumer un tel commandement aurait pour avantage d'améliorer notablement le profil de la Suisse au sein de la KFOR. Pour l'armée, ce serait également une précieuse occasion de démontrer la compétence de son personnel.

Il est possible que ces différentes tâches supplémentaires doivent être accomplies simultanément.

Pour toutes ces raisons, la possibilité d'augmenter temporairement le contingent
de 50 personnes pendant deux mois au plus, devrait désormais passer à 80 personnes au maximum pour une période limitée, à chaque fois, à douze mois au plus. Le personnel supplémentaire, qui serait recruté en principe parmi les professionnels civils et militaires, serait réuni au sein de détachements ad hoc et engagé en fonction des besoins et des tâches spécifiques. Théoriquement, le contingent de la SWISSCOY pourrait ainsi compter jusqu'à 300 personnes pour une période de douze mois au maximum.

Une augmentation temporaire du contingent dans le cadre des paramètres décrits ci-dessus doit être décrétée par décision du Conseil fédéral.

7693

3.6

Une poursuite de l'engagement est conforme à l'intérêt national

La SWISSCOY est l'engagement le plus important que la Suisse ait effectué à ce jour dans le domaine de la promotion militaire de la paix. Les facteurs suivants parlent en faveur de la poursuite d'un engagement substantiel de l'armée suisse au sein de la force multinationale de maintien de la paix KFOR: ­

Sur le plan de la politique extérieure et de sécurité, les Balkans occidentaux présentent une grande importance pour la Suisse. Ces dernières années, aucune autre région n'a reçu, par tête d'habitant, une aide suisse aussi importante que le Kosovo. Notre engagement politique et économique dans cette région ne peut se poursuivre avec succès qu'à la condition qu'aucun vide sécuritaire ne s'y développe.

­

La Suisse ne peut pas attendre que d'autres Etats s'engagent pour assurer militairement la sécurité au Kosovo si, bien que directement concernée par ce qui se passe dans la région, elle devait à l'avenir refuser sa contribution.

Compte tenu de son passé, de sa tradition de neutralité et de ses structures politiques, la Suisse peut compter sur une certaine compréhension si elle refusait de s'associer à des engagements internationaux de stabilisation dont les caractéristiques sont proches d'une véritable guerre, comme c'est le cas par exemple en Afghanistan. Par contre, un retrait de sa zone d'intérêts immédiats, à savoir les Balkans occidentaux, serait difficile à admettre dans la mesure où l'on y a encore besoin de ses services.

­

Ni la Suisse ni ses voisins européens n'ont d'intérêt à voir se développer un vide sécuritaire au Kosovo. Un tel vide priverait en effet le jeune Etat kosovar, encore relativement faible, d'un pilier essentiel dans ses efforts pour endiguer progressivement la criminalité organisée avec l'aide de la mission EULEX de l'UE, ce qui aurait des conséquences sur la stabilité dans l'ensemble de cette région des Balkans.

­

La Suisse est un partenaire fiable et fort apprécié de la KFOR; les prestations de la SWISSCOY sont reconnues par tous les partenaires importants de la Suisse. Jusqu'à présent, l'engagement au Kosovo a fortement contribué à donner une image positive des capacités de l'armée suisse et a permis de tirer des enseignements intéressants pour de futurs engagements.

3.7

Compatibilité avec le rapport sur la politique de sécurité 2010

La poursuite de l'engagement militaire au Kosovo s'inscrit dans les thèmes centraux abordés dans le rapport sur la politique de sécurité 2010 à propos de la promotion militaire de la paix. Le Conseil fédéral a par conséquent l'intention de renforcer cet engagement sur le plan tant quantitatif que qualitatif. L'engagement de la SWISSCOY s'inscrit en outre dans le cadre d'un engagement global de la Suisse dans les Balkans occidentaux, qui ne concerne pas seulement le DDPS. Sa participation à la KFOR permet aussi à la Suisse de fournir des prestations de haut niveau et d'autres qui font appel à ses points forts traditionnels. Grâce à la durée de son engagement, la Suisse renforce sa réputation de partenaire fiable. Avec la redéfinition de l'éventail de ses prestations, la Suisse fait preuve de flexibilité et s'adapte à l'évolution des 7694

besoins de la communauté internationale; elle devrait encore davantage s'engager dans des domaines dans lesquels elle présente des avantages comparatifs. La poursuite de l'engagement de la SWISSCOY est donc parfaitement justifiée.

3.8

Avantages retirés par l'armée

L'armée tire de l'engagement de la SWISSCOY des enseignements importants dont elle peut faire usage aussi bien pour d'autres missions que pour l'instruction. Les expériences faites notamment par les cadres bénéficient ensuite à l'instruction donnée en Suisse. Diverses procédures et l'équipement de nos militaires peuvent être testés, voire adaptés et améliorés. La durée de l'engagement de la SWISSCOY a également permis d'introduire des améliorations en matière d'entretien et de maintenance. L'utilisation de véhicules et d'appareils pendant une longue période a ainsi mis à jour des points faibles jusque-là ignorés et auxquels il a été possible de remédier par la suite. Sur les chars de grenadiers à roues par exemple, les jambes de force à gaz comprimé des suspensions à roues indépendantes ont été renforcées, car le modèle original n'était pas assez robuste pour une utilisation prolongée. D'autres améliorations concernent certains effets d'équipement (par exemple l'introduction du gilet de combat combiné à une veste à protection pare-balles).

Les expériences tirées de la conduite et de l'organisation des états-majors pendant un engagement ont trouvé leur place dans les règlements correspondants. Les expériences les plus précieuses sont toutefois celles faites en matière de conduite pendant une mission de longue durée. La gestion de la disponibilité, qu'il faut garantir 24 heures sur 24, ainsi que le maintien de la discipline dans un environnement où les possibilités de trouver des compensations à la vie militaire font défaut et où certains éléments du contingent connaissent périodiquement des phases de désoeuvrement, constituent pour le commandement des défis qui ne peuvent faire l'objet d'un entraînement ni être simulés dans un autre contexte.

3.9

Durée de l'engagement

Lors de l'envoi du premier contingent en 1999, le Conseil fédéral avait fixé à une année la durée de l'engagement de la SWISSCOY. Ensuite, l'Assemblée fédérale (compétente pour autoriser un engagement armé de plus de 100 militaires) a porté ce délai à deux ans. Depuis 2005, il est fixé à trois ans. Dans la résolution 1244 de l'ONU, la présence internationale de sécurité au Kosovo a été établie pour une période de douze mois. Cette présence «sera prolongée tant que le Conseil de sécurité n'en aura pas décidé autrement».

Les constatations actuelles se fondent sur le fait que la KFOR doit encore conserver sa capacité d'intervention pendant quelques années, même avec un effectif réduit.

La durée de l'engagement de la SWISSCOY doit par conséquent être prolongée pour une période de trois ans, à savoir jusqu'au 31 décembre 2014. La décision d'y mettre fin plus tôt peut faire l'objet d'une décision du Conseil fédéral. Le Conseil fédéral informera les Commissions de politique extérieure et les Commissions de sécurité des deux Chambres conformément à l'art. 152, al. 2, de la loi sur le Parlement (LParl).

7695

4

Conséquences pour les finances et le personnel

La planification financière actuelle pour les années 2012 à 2014 prévoit des coûts annuels admis de 37,5 millions de francs pour l'engagement d'un contingent militaire de taille comparable à la SWISSCOY.3 Les coûts supplémentaires doivent être intégralement absorbés dans le cadre du plafond des dépenses de l'armée.

Le calcul des conséquences d'ordre financier prend en compte tout d'abord les coûts du contingent de la SWISSCOY, engagé durablement au Kosovo avec un effectif réglementaire de 220 personnes. Les tableaux ci-après tiennent compte d'une part des coûts actuels, d'autre part des dépenses prévues en cas de maintien de la SWISSCOY au camp CASABLANCA ainsi qu'en cas de changement de site, c'està-dire en cas de cantonnement sur un site exploité par un partenaire (KFOR ou Etat partenaire). Alors que l'évaluation des coûts, dans la variante CASABLANCA, peut se faire en fonction de valeurs empiriques claires, il n'en va pas de même dans l'optique d'un nouveau site, où il faut se baser sur des estimations. Ces dernières se fondent sur des données actuellement disponibles. Les détails devront toutefois être négociés en cas de changement effectif de l'emplacement.

4.1

Conséquences pour les finances

Les conséquences sur le plan financier se présentent comme suit pour le contingent de la SWISSCOY durablement présent au Kosovo: Rubrique

Budget actuel

Budget prévu pour le cantonnement au camp CASABLANCA de 2012 à 2014

Dépenses de base, matériel, ravitaillement et reddition, maintenance, recrutement Frais d'exploitation, subsistance, carburants, communication Location de services aériens5 Dépenses de personnel Collaborateurs de la centrale liés au projet

1 362 000

2 000 000

800 000

6 098 000

5 500 000

9 400 000

3 900 000 23 340 000 2 800 000

4 000 000 24 900 000 3 500 000

4 000 000 24 900 000 3 500 000

37 500 000

39 900 000

42 600 000

Coût total annuel

Budget prévu pour le cantonnement sur un nouveau site4 de 2012 à 2014

En ce qui concerne les dépenses de base, il faut tenir compte du fait que de grandes parties de l'infrastructure ainsi que certains appareils et matériels sont utilisés en 3 4 5

Il s'agit ici de coûts effectivement engendrés, non de coûts totaux réels.

Sans les frais de déménagement. Voir ch. 4.2 Les frais de personnel pour les membres des Forces aériennes, indemnités de vol comprises, seront débités à l'engagement de la SWISSCOY par le biais d'imputations ultérieures. Ils ne sont pas compris dans les montants indiqués. Il en est de même pour les infrastructures requises par les Forces aériennes dans la zone d'engagement. Le carburant et les pièces détachées ne sont pas débités, parce que ces frais figurent dans le budget ordinaire des Forces aériennes et qu'il importe peu qu'ils soient encourus en Suisse ou au Kosovo.

7696

permanence depuis 1999. Par voie de conséquence, les besoins en maintenance et en renouvellement, avec un maintien de la SWISSCOY à CASABLANCA, sont en augmentation. Parmi les dépenses de base, on trouve aussi les coûts occasionnés par le recrutement et l'instruction des militaires de la SWISSCOY, mais pas les salaires des collaborateurs de la centrale qui participent au projet. En cas de changement de site, les coûts liés à l'infrastructure seraient certes supprimés, mais pas les frais de maintenance et de renouvellement des appareils et des matériels utilisés.

Sur un nouveau site, des coûts supplémentaires s'ajouteraient aux dépenses d'exploitation, car la Suisse devrait payer les frais d'hébergement et de subsistance avec incidence financière. De même, la nouvelle priorité accordée aux LMT engendre une augmentation des coûts avec incidence financière pour la location et la subsistance, étant donné que les équipes LMT sont stationnées de façon décentralisée.

En cas de changement de site, la question de savoir ce qu'il adviendra de l'actuelle infrastructure du camp CASABLANCA n'a pas encore été résolue. A part le démontage du camp et son rapatriement en Suisse, d'autres options peuvent être imaginées, comme sa remise à l'ONU ou à l'UE par exemple. De toute manière, les installations sensibles ou réutilisables comme les appareils radio et les moyens de communication, ou encore l'installation de traitement de l'eau, seront démontées et réexpédiées en Suisse ou transportées sur le nouveau site. Ces travaux de démontage, voire de remise, devront être confiés à un détachement spécial. Les frais de ces opérations sont mentionnés au ch. 4.2, dans la rubrique des dépenses de base.

En ce qui concerne les frais de personnel, il faut relever que le recours aux LMT et à des spécialistes en lieu et place de l'infanterie entraîne une hausse du profil des exigences, ce qui a aussi des répercussions au niveau des salaires.

Dans l'ensemble, les dépenses totales consacrées au contingent de la SWISSCOY stationné en permanence au Kosovo se monteront à 39,9 millions de francs à partir de 2012 ou à 42,6 millions de francs au maximum en cas de changement de site. Ce dernier chiffre constitue une estimation. Ne sont pas mentionnés dans les chiffres cités plus haut les éventuels frais d'infrastructure et autres coûts, impossibles à estimer à l'heure actuelle, que pourraient exiger des modifications fondamentales de l'organisation de la KFOR ou l'abandon du site actuel.

7697

4.2

Conséquences financières du recours à d'éventuels éléments flexibles

L'envoi éventuel d'éléments spécialisés supplémentaires, tels qu'ils sont décrits au ch. 3.5, entraînerait les conséquences financières suivantes: Rubrique

Durée supposée de l'engagement au Kosovo Effectif supposé du détachement Dépenses de base, matériel, ravitaillement et reddition, maintenance, remise Frais d'exploitation, subsistance, carburants, communication Frais de personnel

Changement de site, Augmentation du démontage du camp degré de protection CASABLANCA sur place

Occupation de fonctions EM plus élevées

Occupation de fonctions de cdmt plus élevées

2 à 4 mois

2 à 4 mois

6 mois

12 mois

60 personnes au maximum

env.

20 personnes

env.

env.

20 personnes 25 personnes

5 270 000

­

­

­

300 000

150 000

275 000

550 000

930 000

500 000

1 500 000

3 600 000

650 000

1 775 000

4 150 000

Frais supplémentaires pour détachement spécialisé, par 6 500 000 engagement

Contrairement aux chiffres mentionnés au ch. 4.1, les coûts indiqués ci-dessus prennent effet uniquement si le Conseil fédéral accepte l'envoi d'un détachement correspondant.

4.3

Conséquences pour le personnel

Depuis le début de l'engagement de la SWISSCOY en 1999, le nombre approuvé de collaborateurs affectés au projet est resté stable avec un effectif maximum de 25 postes. Etant donné que la taille de la SWISSCOY reste la même, ce nombre ne changera pas. Au vu de la réduction du personnel effectuée parmi les cadres contractuels dans les formations d'application et compte tenu de la plus grande complexité de l'instruction axée sur l'engagement, due en partie aux nouvelles tâches assumées par la SWISSCOY, le centre d'instruction sera renforcé par neuf cadres contractuels.

Ces mesures permettront d'assurer l'instruction axée sur l'engagement et l'aptitude opérationnelle, de même que la sécurité des militaires.

4.4

Conséquences pour l'économie et les cantons

La poursuite de l'engagement de la SWISSCOY n'a pas de conséquences pour l'économie et les cantons, à l'exception du canton de Nidwald, site du centre de compétences SWISSINT.

7698

5

Lien avec le programme de la législature

Le présent projet n'est concrètement annoncé ni dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20116 ni dans l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20117. Cela étant, il correspond à l'objectif 7 du programme de la législature 2007-2011 («Mettre en oeuvre la politique de sécurité»), à propos duquel le message du Conseil fédéral dit: «La sécurité de la Suisse et de ses habitants ne saurait cependant être assurée sans un engagement de sa part au-delà de ses frontières. Même s'ils se développent à des milliers de kilomètres de chez elle, l'instabilité et les conflits armés peuvent avoir des répercussions directes et immédiates sur sa sécurité. La promotion de la paix par des actions civiles et militaires est susceptible d'apporter une contribution essentielle à cet égard». Le présent arrêté fédéral doit permettre de prolonger jusqu'au 31 décembre 2014 l'engagement de la SWISSCOY au sein de la Kosovo Force multinationale (KFOR), en laissant à la Suisse la possibilité d'y mettre fin à tout moment.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité

L'art. 58, al. 2, de la Constitution (Cst.) définit ainsi la mission de l'armée: «L'armée contribue à prévenir la guerre et à maintenir la paix; elle assure la défense du pays et de sa population. Elle apporte son soutien aux autorités civiles lorsque ces dernières doivent faire face à une grave menace pesant sur la sécurité intérieure ou qu'elles sont confrontées à d'autres situations extraordinaires. La loi peut prévoir d'autres tâches». L'art. 1, al. 4, de la LAAM précise également qu'elle contribue à la promotion de la paix sur le plan international.

La constitutionnalité du service de promotion de la paix a déjà été examinée et confirmée à plusieurs reprises, pour autant que les engagements reposent sur une base volontaire (cf. notamment le message du 8 septembre 1993 relatif à la loi sur l'armée et l'administration militaire et à l'arrêté fédéral sur l'organisation de l'armée, FF 1993 IV 1, ch. 61; en allemand: H. Meyer, St. Galler Kommentar zu Art. 58 BV, Rz 12). La question des mesures prises pour la protection des personnes, des troupes et de l'exécution de la mission, notamment la question de l'armement, n'est pas pertinente à cet égard. Le Conseil fédéral est toutefois tenu d'examiner dans chaque cas la compatibilité de l'engagement avec les principes de la politique extérieure et de la politique de sécurité, avec le droit de la neutralité ainsi qu'avec la politique de neutralité de notre pays.

6.2

Compétences

Le Conseil fédéral, qui est responsable de la conduite de la politique extérieure et de la politique de sécurité peut, en temps utile, ordonner des engagements de promotion de la paix et définir l'équipement et l'armement nécessaires ainsi que d'autres mesu6 7

FF 2008 639 FF 2008 7745

7699

res. Les compétences du Parlement sont toutefois garanties pour ce qui est des questions essentielles. Lorsque l'effectif d'un engagement armé dépasse 100 militaires ou que celui-ci dure plus de trois semaines, l'engagement doit être approuvé par l'Assemblée fédérale (art. 66b, al. 4, LAAM). L'engagement de la SWISSCOY, tel qu'il est proposé par le présent message, répond à ces conditions.

Selon l'art. 66b, al. 3, de la LAAM, le Conseil fédéral est en outre tenu, en cas d'engagement armé, de consulter les Commissions de politique extérieure et les Commissions de la politique de sécurité des deux Chambres.

6.3

Forme juridique

L'arrêté fédéral ci-joint représente un acte particulier de l'Assemblée fédérale qui est expressément prévu dans une loi fédérale (art. 173, al. 1, let. h, Cst.). Comme il ne fixe pas de règles de droit et qu'il n'est pas sujet au référendum, il est qualifié d'arrêté fédéral simple (art. 163, al. 2, Cst.).

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