10.073 Message concernant l'approbation d'un protocole modifiant la Convention contre les doubles impositions entre la Suisse et la Pologne du 25 août 2010

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral portant approbation du protocole du 20 avril 2010 modifiant la Convention conclue le 2 septembre 1991 entre la Confédération suisse et la République de Pologne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

25 août 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-1919

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Condensé Le présent protocole d'amendement à la Convention de double imposition entre la Suisse et la Pologne prévoit l'adoption d'une clause d'échange de renseignements conforme à la norme de l'OCDE. D'autres points de ce protocole concernent l'introduction de l'exonération (taux zéro) des dividendes provenant de participations déterminantes, des dividendes versés à des institutions de prévoyance et des intérêts versés entre entreprises associées. De plus, le présent protocole introduit dans la Convention une clause d'arbitrage et une disposition sur la prise en compte fiscale des contributions à la prévoyance.

Les cantons et les milieux économiques intéressés approuvent la conclusion du présent protocole.

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Message 1

Considérations générales sur l'évolution de la politique conventionnelle contre les doubles impositions

Les conventions de double imposition constituent un élément essentiel de la politique fiscale. De bons accords dans ce domaine facilitent l'activité de notre économie d'exportation, favorisent l'investissement étranger en Suisse et contribuent par làmême à la prospérité de la Suisse et de ses pays partenaires.

La politique conventionnelle de la Suisse est guidée depuis toujours par la norme de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la mieux à même de nous permettre d'atteindre à la prospérité. Elle vise principalement à une répartition claire des compétences en matière d'imposition des personnes physiques et morales, à un impôt résiduel aussi bas que possible sur les intérêts, les dividendes et les redevances et, d'une manière générale, à prévenir tout conflit fiscal qui serait préjudiciable aux contribuables exerçant une activité internationale. De tout temps, la Suisse a dû manier le compromis pour pouvoir à la fois maintenir chez elle des conditions fiscales avantageuses et faire accepter son système fiscal par ses partenaires internationaux. En effet, en l'absence d'une légitimité internationale, la meilleure des fiscalités perdrait tout intérêt.

Le 13 mars 2009, le Conseil fédéral a décidé d'adapter l'assistance administrative en matière fiscale aux données nouvelles de la politique internationale.

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Contexte, déroulement et résultats des négociations

La Convention entre la Suisse et la Pologne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (RS 0.672.964.91, ci-après «CDIPL») est datée du 2 septembre 1991. Elle n'a jamais été révisée depuis lors.

La CDI-PL ne contient pas de dispositions particulières sur l'échange de renseignements. Conformément à la longue pratique de la Suisse, l'assistance administrative est par conséquent limitée aux renseignements nécessaires à sa bonne application.

Vu la pratique conventionnelle suivie par la Suisse jusqu'en mars 2009 en matière d'assistance administrative avec les Etats membres de l'Union européenne (UE), la Suisse et la Pologne avaient décidé, début 2009, d'ouvrir des négociations pour compléter leur convention contre les doubles impositions par une disposition sur l'échange de renseignements dans les cas de fraude fiscale ainsi que pour les sociétés holding, et fixé une première rencontre au début du mois d'avril 2009.

Suite à la décision du Conseil fédéral du 13 mars 2009 de retirer la réserve de la Suisse à l'échange de renseignements selon le Modèle de convention de l'OCDE, la Pologne a été le premier pays avec lequel la Suisse a entamé des négociations pour intégrer à la CDI-PL une disposition sur l'échange de renseignements conforme à la norme de l'OCDE. La Suisse a également saisi cette occasion pour adapter certains points de la CDI-PL aux circonstances actuelles et pour obtenir certaines améliorations. Après trois cycles de négociations, ces dernières se sont achevées le 1er juillet 2009 et ont abouti au paraphe d'un protocole d'amendement à la CDI-PL (ci-après 5103

«protocole d'amendement»). Ce protocole d'amendement a été signé à Varsovie le 20 avril 2010.

Les cantons et milieux économiques intéressés ont approuvé la révision de la CDI-PL.

3

Appréciation

Pour les dividendes provenant de participations déterminantes, l'exonération (taux zéro) et la réduction du taux de participation suppriment la charge fiscale résiduelle dans l'état de la source dans les rapports de la société mère suisse avec ses filiales.

En outre, l'exonération des dividendes versés à des institutions de prévoyance facilite les placements internationaux de ces investisseurs institutionnels. Par ailleurs, dans le domaine des intérêts et des redevances, le résultat obtenu est équilibré et, en raison du délai prévu pour l'application, donne aux acteurs concernés suffisamment de temps pour s'adapter aux nouvelles conditions. Il a ainsi été possible d'inscrire dans les relations bilatérales le contenu de l'art. 15 de l'Accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts (ci-après «accord sur la fiscalité de l'épargne», RS 0.641.926.81). Pour ce qui est de la nouvelle disposition sur l'échange de renseignements, elle correspond à la norme de l'OCDE et n'autorise l'échange de renseignements que sur demande et au cas par cas. Enfin, l'adoption d'une clause relative à un tribunal arbitral et d'une disposition sur la prise en considération fiscale des cotisations versées au régime de sécurité sociale de l'autre Etat contractant a permis d'atteindre deux objectifs visés par la Suisse dans le cadre de sa nouvelle politique conventionnelle. Le présent protocole présente un résultat équilibré et contribuera au bon développement des relations économiques bilatérales.

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Commentaire des dispositions du protocole d'amendement

Le protocole d'amendement modifie et complète certaines dispositions de la CDIPL. Les principales modifications sont commentées ci-dessous.

Art. I du protocole d'amendement relatif à l'art. 2 de la CDI-PL (Impôts visés) Le système fiscal polonais a été modifié ces dernières années. L'impôt de compensation et l'impôt sur les salaires, notamment, ont été supprimés. En outre, l'impôt agricole est devenu de fait un impôt immobilier, ce qui explique qu'il ne fasse plus partie des impôts visés par la CDI-PL. Le catalogue des impôts polonais a ainsi été adapté à la situation actuelle.

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Art. II du protocole d'amendement relatif à l'art. 4 de la CDI-PL (Résident) La révision a été l'occasion d'adapter la disposition sur la résidence au texte le plus récent du Modèle de convention de l'OCDE. Il est expressément précisé désormais que la notion de résidence s'applique non seulement aux Etats contractants, mais aussi à leurs subdivisions politiques et à leurs collectivités locales.

Art. III du protocole d'amendement relatif à l'art. 10 de la CDI-PL (Dividendes) Le paragraphe 2 de la disposition actuelle prévoit un droit d'imposition de 15 % des dividendes en faveur de l'Etat de la source, droit qui est réduit à 5 % pour les participations de 25 %. Le nouveau par. 2 ne change pas l'impôt résiduel général sur les dividendes, qui reste fixé à 15 %. Toutefois, à la demande de la Suisse, les dividendes provenant de participations déterminantes et les dividendes versés à des institutions de prévoyance seront exonérés (al. 2a). Sont considérées comme participations déterminantes les participations d'au moins 10 % au capital de la société qui verse les dividendes, à condition que la participation ait été détenue pendant deux ans au moins. Cette durée de détention minimale a été introduite à la demande de la Pologne pour empêcher des abus. Si la condition des deux ans de détention n'est pas encore remplie au moment du versement des dividendes, l'exonération pourra tout de même être demandée si la durée de détention est remplie ultérieurement. La pratique élaborée en relation avec l'art. 15 de l'accord sur la fiscalité de l'épargne est applicable par analogie.

Art. IV du protocole d'amendement relatif à l'art. 11 de la CDI-PL (Intérêts) L'impôt résiduel sur les intérêts se monte actuellement à 10 % au maximum. La Pologne a refusé l'exonération générale des intérêts en raison notamment de ses conséquences financières. Dans le cadre d'une solution globale, il a cependant été possible de convenir une réduction à 5 % de l'impôt résiduel avec exonération des intérêts versés entre entreprises associées. La notion «d'entreprises associées» est définie au ch. 3 du protocole à la CDI-PL (voir art. XI du protocole d'amendement).

Ainsi, les entreprises associées sont des entreprises entre lesquelles il existe une participation directe d'au moins 25 % ou des entreprises dans lesquelles une société
domiciliée dans un Etat de l'UE ou de l'Espace économique européen (EEE) détient une participation directe d'au moins 25 %.

Les règles régissant les entreprises associées sont conformes à la directive 2003/49/CE concernant les intérêts et les redevances1 et à l'accord sur la fiscalité de l'épargne. Etant donné que la Pologne a jusqu'au 30 juin 2013 pour introduire l'exonération des intérêts selon cette directive et en application de cet accord, il a été convenu que les modifications concernées seraient applicables seulement à partir de cette date. Jusqu'à cette date, la disposition actuelle restera en vigueur en l'état.

1

Directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d'États membres différents (JO L 157 du 26.6.2003).

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Art. V du protocole d'amendement relatif à l'art. 12 de la CDI-PL (Redevances) L'art. 12 actuel prévoit un impôt à la source résiduel de 10 % sur les redevances. En dérogation à l'art. 12, le ch. 3 du protocole à la CDI-PL dispose que le droit d'imposer les redevances appartient uniquement à l'Etat de résidence, aussi longtemps que la Suisse ne perçoit pas un impôt à la source sur les redevances. La Suisse n'a pas accepté d'abroger purement et simplement ce chiffre, comme le souhaitait la Pologne. Comme la Pologne accordait une importance capitale à un droit d'imposition limité de l'Etat de la source sur les redevances, les délégations ont toutefois convenu, dans le cadre d'une solution globale, d'abroger le ch. 3 dudit protocole, mais de ramener simultanément le taux de l'impôt résiduel sur les redevances de 10 à 5 % et d'introduire l'exonération (taux zéro) pour les entreprises associées. La définition que le protocole d'amendement donne à la notion «d'entreprise associée» présentée ci-dessus est également valable pour les redevances.

Pour garantir à la Suisse qu'elle ne sera pas désavantagée en matière de redevances par rapport aux Etats membres de l'UE ou de l'EEE, la Pologne s'est montrée disposée à accorder à la Suisse une clause de la nation la plus favorisée sur ce point (ch. 4 du protocole à la CDI-PL). Ainsi, si la Pologne devait accorder ultérieurement un taux d'impôt résiduel inférieur à 5 % dans une convention contre les doubles impositions ou un autre accord conclu avec un Etat membre de l'UE ou de l'EEE, ce taux serait applicable immédiatement dans les relations avec la Suisse.

Cette nouvelle disposition s'appliquera, comme pour les intérêts, seulement à partir du 1er juillet 2013. L'exonération générale actuelle des redevances reste donc applicable jusqu'au 30 juin 2013.

Art. VI du protocole d'amendement relatif à l'art. 13 de la CDI-PL (Gains en capital) A l'art. 13, dans un nouveau par. 4, le droit d'imposer les bénéfices sur l'aliénation de parts à des sociétés immobilières est attribué à l'Etat du lieu de situation conformément au Modèle de convention de l'OCDE. Du côté suisse, l'art. 23 relatif à la méthode utilisée pour éviter les doubles impositions précise que la Suisse n'exonère ces gains que s'il est prouvé qu'ils ont été imposés en Pologne.

Art. VII du protocole
d'amendement relatif à l'art. 15 de la CDI-PL (Professions dépendantes) A la demande de la Pologne et dans le cadre d`une solution globale, le calcul des 183 jours ne se base plus sur l'année civile, mais sur toute période de 12 mois.

Art. IX du protocole d'amendement relatif à l'art. 25 de la CDI-PL (Procédure amiable) Cet article prévoit l'introduction dans la CDI-PL d'une clause d'arbitrage inspirée du Modèle de convention de l'OCDE. Cette disposition est conforme à la pratique conventionnelle de la Suisse. Pour plus de précisions concernant la procédure d'arbitrage, on se référera au message sur une nouvelle Convention de double imposition avec l'Afrique du Sud (FF 2007 6225).

Une procédure d'arbitrage est ouverte à la demande du contribuable concerné si les autorités compétentes des deux Etats contractants n'ont pas réussi à s'entendre après 5106

trois ans de procédure amiable, et à condition qu'aucun tribunal des Etats contractants n'ait tranché le cas. La sentence du Tribunal arbitral est contraignante pour les Etats contractants dans la mesure où aucun des contribuables directement concernés ne s'oppose à la sentence. Les autorités compétentes doivent encore régler les questions de procédure.

Art. X du protocole d'amendement relatif à l'art. 25a de la CDI-PL (Echange de renseignements) Dans un contexte de globalisation des marchés financiers et surtout de crise financière, la coopération internationale en matière fiscale revêt une importance accrue.

La Suisse soutient les efforts déployés dans ce domaine. En retirant sa réserve à l'art. 26 du Modèle de convention de l'OCDE, la Suisse s'est engagée politiquement à reprendre la norme concernée telle qu'elle est précisée et dans ledit article et dans son commentaire. La Pologne a affirmé qu'elle ne donnerait son accord à la révision que si la disposition concernant l'échange de renseignements était la plus proche possible de la norme de l'OCDE. La conclusion de la révision dépendait donc de la manière dont serait aménagé le champ d'application matériel de l'échange de renseignements.

La disposition paraphée reprend, pour l'essentiel, le texte de l'art. 26 du Modèle de convention de l'OCDE. Certaines modifications lui ont été apportées pour permettre l'utilisation des renseignements à d'autres fins, sous réserve de l'accord des deux Etats, et pour donner expressément aux Etats contractants le droit d'appliquer les mesures de contrainte nécessaires à l'exécution des demandes de renseignements envers une banque, un autre établissement financier, un mandataire ou une personne agissant en tant qu'agent fiduciaire, ainsi qu'à la détermination des rapports de participation. Ces modifications sont compatibles avec la norme de l'OCDE.

Le premier paragraphe pose le principe de l'échange de renseignements. Il prévoit l'échange des renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la CDI-PL ou pour l'administration ou l'application de la législation interne relative à tous les impôts. La limitation aux renseignements qui sont vraisemblablement pertinents exclut la pêche aux renseignements («fishing expeditions»). En outre, l'Etat requérant est tenu de recourir à tous
ses moyens d'enquête avant de présenter une demande de renseignements à l'autre Etat. Pour l'échange de renseignements, il n'est pas nécessaire que le contribuable concerné soit un résident de Suisse ou de Pologne: il suffit qu'il y ait un rattachement économique avec l'un des Etats contractants.

Bien que la Suisse cherche à limiter l'échange de renseignements aux impôts visés par la CDI-PL, notamment pour éviter des doublons avec d'autres accords internationaux (par ex. avec l'accord de coopération du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, pour lutter contre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte à leurs intérêts financiers; RS 0.351.926.81), elle a dû déroger à ce principe à la demande expresse de la Pologne car celle-ci subordonnait la conclusion des négociations à la reprise du libellé de l'al. 1 de l'art. 26 du Modèle de convention de l'OCDE. En tout état de cause, chaque accord qui pourrait être parallèlement applicable devra avant tout être examiné dans chaque cas selon son caractère spécifique et selon le principe de la lex specialis.

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Le deuxième paragraphe pose le principe du maintien du secret et prévoit que les renseignements obtenus ne peuvent être communiqués qu'aux personnes ou autorités concernées par l'établissement et le recouvrement des impôts au sens du paragraphe précédent, par les procédures et poursuites concernant ces impôts, ou par les décisions sur les recours relatifs à ces impôts. Il s'ensuit que ces renseignements peuvent aussi être communiqués au contribuable ou à son représentant.

Pour limiter le cercle des personnes pouvant consulter les renseignements transmis et ainsi réduire le risque d'abus, la Suisse s'efforce d'exclure la transmission des renseignements aux autorités de surveillance. Le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE prévoit expressément cette possibilité. Néanmoins, comme, en l'occurrence, la Pologne tenant beaucoup à la teneur du texte du Modèle de convention de l'OCDE, les parties ont convenu de reprendre celui-ci dans le cadre d`une solution globale. Les autorités de surveillance peuvent donc consulter les renseignements transmis, mais elles restent elles aussi soumises aux prescriptions sur le maintien du secret.

Ce paragraphe prévoit en outre que les renseignements reçus peuvent être utilisés à d'autres fins que des fins fiscales si cette possibilité est prévue par les lois des deux Etats contractants et si l'Etat appelé à fournir les renseignements donne son consentement à cette utilisation. Cette disposition permet par exemple d'utiliser les renseignements obtenus dans le cadre d'une autre procédure pénale, sans retirer à la personne concernée ses droits de procédure distincts en Suisse. Cette disposition permet d'éviter d'avoir à rechercher et à transmettre plusieurs fois les mêmes informations à des fins différentes. Dans tous les cas, le consentement de l'Etat requis est obligatoire.

Le troisième paragraphe contient certaines limitations à l'échange de renseignements en faveur de l'Etat requis. Il est prévu que l'Etat requis n'est tenu, ni de prendre des mesures administratives allant au-delà des limites prescrites par sa propre législation ou par sa pratique administrative, ni de prendre des mesures administratives qui ne seraient pas autorisées par la législation ou par la pratique administrative de l'Etat requérant. Dans le cas de la Suisse, cela implique que le droit
d'être entendu ainsi que les droits de recours sont protégés. En outre, l'Etat requis n'est pas obligé de fournir des renseignements qui ne peuvent être obtenus selon sa propre législation ou sa propre pratique administrative ou qui ne peuvent être obtenus selon la législation ou la pratique administrative de l'Etat requérant. Enfin, l'Etat requis peut refuser de communiquer des renseignements qui seraient contraires à l'ordre public ou qui révéleraient un secret commercial, ce qui pourrait être le cas si l'Etat requérant ne prend pas les dispositions propres à garantir que les renseignements demandés seront effectivement tenus secrets.

Le par. 4 prévoit que l'Etat requis a l'obligation de rechercher et de communiquer les renseignements demandés même lorsqu'il n'en a pas besoin à ses propres fins fiscales. L'échange de renseignements n'est donc pas limité aux seuls renseignements qui présentent aussi un intérêt pour les autorités fiscales de l'Etat requis.

Le par. 5 contient des dispositions particulières concernant les renseignements qui sont détenus par les banques ou d'autres intermédiaires ou qui concernent les droits de propriété dans une personne. De tels renseignements doivent être échangés nonobstant les limitations prévues au par. 3. L'Etat requis doit également rechercher et transmettre les renseignements demandés même lorsque ces renseignements ne seraient pas disponibles en vertu de sa propre législation ou de sa pratique adminis5108

trative. Par conséquent, la Suisse ne peut refuser de communiquer des renseignements en invoquant uniquement le secret bancaire suisse. Toutefois, cette disposition suppose que les renseignements demandés existent effectivement.

Dans les cas de fraude fiscale, la Suisse dispose, avec la procédure pénale prévue par son droit interne, des moyens nécessaires pour se faire remettre les renseignements visés au par. 5. Toutefois, la nouvelle disposition prévoit que l'échange de renseignements ne dépendra plus de l'existence d'une fraude fiscale. La deuxième phrase constitue la base légale nécessaire aux Etats contractants pour qu'ils puissent garantir la bonne exécution de leurs obligations en vertu de la CDI-PL, et elle leur confère les pouvoirs de procédure dont ils ont besoin pour obtenir les renseignements demandés. Dans un premier temps, la procédure applicable sera réglée dans une ordonnance du Conseil fédéral qui devrait entrer en vigueur le 1er octobre 2010, puis dans une loi dont les travaux d'élaboration ont d'ailleurs déjà débuté. Cette procédure a été avalisée dans les arrêtés fédéraux du 18 juin 2010 approuvant dix conventions nouvelles ou révisées contre les doubles impositions et elle ne nécessite pas d'être réitérée, sauf cas spécifique.

Toutefois, la Suisse n'accordera pas l'entraide administrative en matière fiscale à la Pologne lorsque la demande d'entraide se fonde sur des données obtenues illégalement. Le Conseil fédéral fera une déclaration au Gouvernement de la Pologne et s'efforcera d'obtenir une déclaration correspondante de la part du Gouvernement de Pologne. Le Conseil fédéral a été chargé de mettre en oeuvre cette démarche dans le cadre de la motion 10.3013 «Futures conventions de double imposition. Ne pas accorder l'entraide administrative lorsque les données ont été obtenues illégalement».

Les dispositions de l'art. 25a sont précisées plus avant dans le protocole à la CDIPL.

Le protocole rappelle ainsi les principes de la subsidiarité et de l'interdiction de la pêche aux renseignements (ch. 7, let. a et b).

De plus, il détaille les conditions auxquelles une demande de renseignements doit répondre (ch. 7, let. c). L'identification claire du contribuable concerné ainsi que de la personne (par exemple une banque) présumée être en possession des renseignements demandés est
notamment nécessaire. A la demande de la Pologne, cette disposition a été complétée par une déclaration commune d'après laquelle ces demandes doivent être traitées selon le principe de la bonne foi. Du point de vue suisse, ce complément n'a qu'un caractère déclaratoire, car l'obligation des Etats contractants d'agir selon le principe de la bonne foi découle déjà des règles générales d'interprétation des traités de droit public (art. 31 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, RS 0.111). De plus, le principe de la bonne foi est de toute façon un principe général du droit international.

Vu les exigences concernant la demande de renseignement, l'échange de renseignements est limité aux demandes concrètes dans un cas précis. De plus, l'obligation d'un Etat contractant d'échanger des renseignements spontanément ou automatiquement est expressément exclue; néanmoins, la possibilité pour ces Etats de procéder à un échange spontané ou automatique de renseignements en matière d'assistance administrative internationale demeure si leur droit national le prévoit (ch. 7, let. d). La Pologne, craignant que le texte proposé par la Suisse permette aux contribuables polonais de remettre en cause l'échange automatique de renseigne-

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ments, les délégations se sont entendues sur le texte retenu, qui tient compte des intérêts des deux Etats contractants.

Enfin, les droits de procédure des contribuables sont garantis (ch. 7, let. e). Au début, la Pologne demandait la possibilité de restreindre les droits de procédure lorsque les demandes portent sur des procédures fiscales pénales. La Suisse a refusé de souscrire à cette exigence. Sur ce point important pour la Suisse, les parties ont convenu de reprendre la proposition suisse dans le cadre d'une solution globale. En contrepartie, la Suisse a concédé à la Pologne la possibilité de transmettre les renseignements communiqués aux autorités de surveillance, conformément au texte du Modèle de convention de l'OCDE (al. 2).

La disposition révisée sur l'échange de renseignements s'appliquera aux années fiscales commençant le 1er janvier de l'année suivant l'année de l'entrée en vigueur ou après cette date. Pour la période précédant cette date, l'échange de renseignements est limité aux renseignements nécessaires à l'application régulière de la CDI-PL.

Art. XI du protocole d'amendement relatif au protocole à la CDI-PL L'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ci-après «accord sur la libre circulation», RS 0.142.112.681) coordonne les régimes d'assurance sociale des pays parties. Il est applicable à toutes les branches de la sécurité sociale (vieillesse, invalidité, décès, maladie, maternité, accident, chômage et allocations familiales) et s'applique aux ressortissants de la Suisse et des Etats membres de l'UE qui travaillent en Suisse ou dans un Etat membre ou qui y ont travaillé et s'établissent ensuite dans un autre pays. Il prévoit en principe la soumission au régime de prévoyance d'un Etat.

Etant donné que les règles de l'accord sur la libre circulation concernant la sécurité sociale et professionnelle ne coïncident pas avec celles des conventions contre les doubles impositions relatives à l'imposition du revenu de l'activité lucrative, il arrive régulièrement qu'une personne habite dans un Etat et doive y acquitter les cotisations à la sécurité sociale et professionnelle, alors qu'elle travaille dans l'autre Etat, où elle doit payer l'impôt sur son
revenu. Dans le cadre des négociations, les parties se sont entendues sur le fait que ce genre de cotisations doit être pris en compte dans l'Etat de travail aux mêmes conditions fiscales, comme les cotisations au régime de prévoyance de l'Etat du lieu de travail. Cet arrangement est inscrit au chiffre 6 du protocole à la CDI-PL.

En Suisse, la déduction des cotisations aux assurances sociales et à la prévoyance professionnelle est prise en compte forfaitairement dans le cadre des barèmes d'imposition à la source. En règle générale, la pratique suisse actuelle est donc déjà conforme à cette disposition.

Les autres dispositions du protocole à la CDI-PL ont été présentées plus haut dans le cadre du commentaire des articles concernés de la CDI-PL.

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Art. XII du protocole d'amendement (Entrée en vigueur et application) Les dispositions du protocole s'appliquent à partir du 1er janvier de l'année suivant l'année de son entrée en vigueur. Pour ce qui est des intérêts et des redevances, comme il a été indiqué plus haut, les nouvelles dispositions ne s'appliquent qu'à partir du 1er juillet 2013.

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Conséquences financières

L'introduction du taux zéro et la réduction du taux de la participation pour les dividendes provenant de participations déterminantes entraînent une diminution des recettes fiscales. Celle-ci devrait cependant être modérée étant donné que les dividendes provenant de participations d'au moins 25 % sont déjà exonérées en vertu de l'Accord sur la fiscalité de l'épargne. De même, la réduction de 10 à 5 % de l'impôt résiduel sur les intérêts à partir du 1er juillet 2013 entraînera elle aussi une certaine baisse des recettes fiscales. D'un autre côté, la réduction du taux des impôts résiduels devrait constituer un avantage concurrentiel et produire des recettes fiscales supplémentaires.

L'introduction d'une clause d'arbitrage n'a pas d'effet immédiat sur les ressources fiscales suisses. La possibilité de faire une demande de procédure d'arbitrage devrait toutefois inciter les Etats contractants à limiter autant que possible leurs différends, ce qui contribuera à protéger les ressources fiscales suisses.

Le protocole d'amendement instituant, d'une part, une assistance administrative pour appliquer le droit national de l'Etat requérant et, d'autre part, un accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales, l'une et l'autre sur demande, pourrait certes être considéré d'une certaine manière comme préjudiciable pour la place économique suisse et, indirectement, pour les recettes fiscales du pays. Cependant, au vu des efforts internationaux pour uniformiser les conditions de l'assistance administrative dans l'ensemble des Etats («global level playing field») et pour assurer l'efficacité de l'échange de renseignements au moyen d'un mécanisme de contrôle adéquat, la nouvelle situation ne devrait pas avoir d'incidences particulières pour la Suisse.

Les cantons et les milieux économiques intéressés ont approuvé le protocole d'amendement. Globalement, il contribuera positivement au maintien et au développement des relations économiques bilatérales et, par là même, à permettre à la Suisse d'atteindre ses principaux objectifs en matière de commerce extérieur.

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Constitutionnalité

Le protocole d'amendement se fonde sur l'art. 54 de la Constitution (Cst., RS 101), qui attribue à la Confédération la compétence en matière d'affaires étrangères. C'est l'Assemblée fédérale qui est compétente pour l'approuver, en vertu de l'art. 166, al. 2, Cst. Une fois approuvé, il fera partie intégrante de la CDI-PL de 1991. Celle-ci a été conclue pour une durée indéterminée, mais elle peut être dénoncée à tout moment pour la fin d'une année civile moyennant un préavis de six mois. Le protocole n'implique pas d'adhésion à une organisation internationale. Cependant, depuis le 1er août 2003, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst., les traités inter5111

nationaux qui contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales sont sujets au référendum facultatif en matière de traités internationaux. Conformément à l'art. 22, al. 4 de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (RS 171.10), sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. D'autre part, afin de garantir une application cohérente de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst., et pour éviter que ne soient soumis au référendum plusieurs accords similaires, le Conseil fédéral a précisé, dans son message du 19 septembre 2003 relatif à la Convention contre les doubles impositions avec Israël, qu'il accompagnerait dorénavant les accords qu'il présenterait au Parlement de la proposition de ne pas les soumettre au référendum facultatif en matière de traités internationaux lorsqu'ils n'entraînent pas d'obligations supplémentaires importantes pour la Suisse par rapport aux conventions antérieures.

La nouvelle disposition sur l'échange de renseignements conforme au Modèle de convention de l'OCDE, qui prévoit une assistance administrative élargie, constitue une nouveauté dans la pratique conventionnelle de la Suisse. La CDI-PL modifiée contiendra donc des dispositions importantes au sens de l'art. 141, al. 1, let. d. ch. 3, Cst. En conséquence, l'arrêté fédéral portant approbation d'un protocole modifiant la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et la Pologne devra être soumis au référendum facultatif.

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