03.015 Message concernant une convention de double imposition avec la République islamique d'Iran du 19 février 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral approuvant une convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 27 octobre 2002 avec la République islamique d'Iran, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 février 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2002-2552

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Condensé Une convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune a été signée le 27 octobre 2002 avec la République islamique d'Iran.

Outre l'élimination des doubles impositions, cette convention offre également une certaine protection institutionnelle aux personnes qui ont des relations fiscales avec les deux Etats et plus particulièrement aux entreprises qui procèdent à des investissements. Elle favorise les nouveaux investissements et garantit en outre que des mesures fiscales ne limiteront pas la compétitivité des entreprises suisses par rapport à leurs concurrentes d'autres Etats industrialisés.

La convention suit en grande partie le Modèle de convention de l'OCDE ainsi que la pratique conventionnelle suisse. Les solutions préconisées par la Suisse en ce qui concerne l'imposition des dividendes, des intérêts et des redevances ont pu être, en grande partie, introduites dans la convention. Les cantons et les milieux économiques intéressés ont approuvé la conclusion de cette convention au cours de la procédure de consultation.

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Message 1

Historique

Après la victoire de Sayed Mohammad Khatami aux élections présidentielles du 23 mai 1997, la République islamique d'Iran a engagé des relations commerciales avec les Etats du Golfe persique ainsi qu'avec des Etats européens. L'économie iranienne est fondée sur un mélange d'économie planifiée, d'économie d'Etat, d'économie privée (notamment dans le domaine de l'agriculture) et de commerce.

En 1990, l'Iran s'est engagé sur la voie de la privatisation. Suivant les lois les plus récentes concernant le budget, le gouvernement iranien doit présenter un programme de privatisation de toutes les entreprises publiques n'ayant pas un intérêt stratégique.

Bien que les réformes structurelles nécessaires aient du mal à être mises en place rapidement et que ce retard repousse encore l'ouverture du pays au marché mondial, la République islamique d'Iran représente un marché au potentiel important. L'Iran est membre, entre autres, de l'ONU, de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Il participe également à l'OPEP et à l'OCI.

Les relations économiques entre la Suisse et la République islamique d'Iran se concentrent sur le commerce et se développent de façon positive tant du point de vue des importations que des exportations. La République islamique d'Iran, qui est le quatrième plus gros producteur de pétrole dans le monde, est aussi le troisième marché le plus important pour la Suisse au Moyen-Orient. La balance commerciale affiche d'ailleurs un excédent conséquent en faveur de la Suisse. Depuis le 1er novembre 2001, l'accord de protection des investissements signé le 8 mars 1998 est en vigueur. Un accord de commerce et de coopération économique est en cours de négociation; les relations commerciales entre les deux pays devraient s'intensifier dès l'entrée en vigueur de cet accord.

Après seulement deux rondes de négociations en août 2001 et en mai 2002, un projet de convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune a pu être paraphé le 30 mai 2002.

Après que les cantons et les milieux économiques intéressés ont déclaré approuver la convention, cette dernière ainsi que le protocole qui l'accompagne ont été signés le 27 octobre 2002 à Téhéran par le conseiller fédéral Joseph Deiss.

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Commentaire des dispositions de la convention

La convention suit en grande partie, tant sur le plan formel que matériel, le Modèle de convention de l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) ainsi que la pratique conventionnelle suisse. C'est pourquoi nous nous contenterons de commenter les principales différences par rapport à ce modèle et à cette pratique et de signaler les particularités de la convention.

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Art. 2

Impôts visés

La convention s'applique aux impôts sur le revenu et sur la fortune.

Art. 3

Définitions générales

Le droit iranien ne connaissant pas les sociétés de personnes, ces dernières ne sont pas expressément mentionnées dans la définition du terme «national». Il est toutefois entendu que les sujets de droit constitués selon le droit de l'un des deux Etats contractants sont considérés à la fois comme des «personnes» et comme des «nationaux».

Art. 4

Résident

Le droit iranien ne permet pas de posséder la double nationalité; c'est pourquoi la disposition de la let. d) du par. 2 a dû être adaptée.

Le par. 3 précise qu'en cas de double résidence d'une personne morale, le lieu où se trouve son siège de direction effective est déterminant.

Art. 5

Etablissement stable

L'exploitation des ressources naturelles étant extrêmement importante en Iran, le par. 2 mentionne également les travaux de prospection dans la liste des activités fondant un établissement stable. Toutefois, étant donné que ces travaux ne sont imposés que si un bénéfice est effectivement réalisé, cet écart par rapport au Modèle de convention de l'OCDE ne doit pas être considéré comme une extension de la notion d'établissement stable. Lorsque les travaux de prospection sont réalisés par la société qui poursuit l'exploitation des ressources, la société peut reporter proportionnellement les pertes.

Le par. 3 prévoit qu'un chantier de construction ou de montage, y compris les activités de surveillance liées à ces travaux, constituent un établissement stable si leur durée dépasse douze mois.

Le terme «livraison» ne pouvant être repris, selon le point de vue iranien, dans la liste des exceptions du par. 4, le ch. 1 du protocole indique que les entrepôts de stockage ne constituent pas un établissement stable dans la mesure où les marchandises entreposées sont vendues exclusivement en vertu de contrats conclus par l'entreprise de l'autre Etat contractant.

Le par. 6 précise, dans sa deuxième phrase, qu'un représentant n'est plus indépendant à partir du moment où il n'exerce plus son activité dans le respect du principe du prix de pleine concurrence («Arm's Length Principle») comme entre tiers indépendants.

Art. 7

Bénéfices des entreprises

La convention suit le principe fixé dans le Modèle de convention de l'OCDE d'après lequel un établissement stable ne peut être imposé que sur des bénéfices qui lui sont imputables.

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Le ch. 2 du protocole précise, en ce qui concerne la répartition des revenus, qu'on ne peut attribuer à l'établissement stable que la part de la rémunération correspondant à sa contribution effective et à ses fonctions.

Art. 8

Transport international

Cet article prévoit que les bénéfices réalisés en trafic international sont imposables dans l'Etat de résidence de l'entreprise.

Les entreprises communes («Joint Ventures») n'étant pas autorisées par la Constitution iranienne, la disposition correspondante n'est pas reprise.

Art. 9

Entreprises associées

Etant donné que le droit fiscal iranien prévoit que la créance fiscale est prescrite après trois ans déjà, il n'est pas utile de reprendre la disposition du par. 3 formulée dans plusieurs autres conventions conclues par la Suisse.

Art. 10

Dividendes

Pour les participations (à l'exclusion des sociétés de personnes), le taux de l'impôt en faveur de l'Etat de la source est limité à 5 % lorsque la participation est égale au moins à 15 % du capital de la société qui verse les dividendes. Dans tous les autres cas, l'impôt résiduel à la source ne peut dépasser 15 %.

Art. 11

Intérêts

La République islamique d'Iran interdit le prélèvement d'intérêts: c'est pourquoi sa législation fiscale ne prévoit pas d'imposition à la source sur les versements correspondants. Dans la pratique, les intérêts versés sont désignés comme des frais administratifs.

Le par. 2 limite à 10 % l'impôt résiduel à la source sur les intérêts.

Sont exonérés de l'impôt à la source d'après le par. 3, les intérêts qui sont versés aux pouvoirs publics de l'autre Etat contractant, y compris à la Banque nationale de cet Etat, les intérêts en liaison avec des ventes à crédit de marchandises commerciales et d'équipements industriels, commerciaux et scientifiques ainsi que les intérêts versés au titre d'un emprunt bancaire. Le ch. 3 du protocole précise également que la disposition s'applique, que la banque soit propriété des pouvoirs publics ou propriété d'une personne privée.

Art. 12

Redevances

Le par. 2 limite à 5 % le taux de l'impôt résiduel à la source sur les redevances.

La notion de «redevances» définie au par. 3 comprend également les redevances provenant du leasing.

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Art. 13

Gains en capital

Le par. 4 prévoit que, en cas d'aliénation de participations à des sociétés immobilières, le droit d'imposer revient à l'État dans lequel se trouvent les biens immobiliers.

Art. 15

Professions dépendantes

Des incertitudes pouvant naître du fait que l'année fiscale iranienne (qui commence en général le 21 mars et se termine le 20 mars de l'année suivante) ne suit pas le calendrier civil grégorien, il est convenu que la let. a) du par. 2 porte sur une période de douze mois.

Art. 17

Artistes et sportifs

Pour éviter les abus, le par. 2 prévoit que l'État où un artiste ou un sportif de l'autre État contractant s'est produit peut également imposer les revenus versés à d'autres personnes, pour autant que ces revenus soient versés en contrepartie de la prestation de l'artiste ou du sportif.

Le par. 3 exclut le droit d'imposition de l'Etat où l'artiste ou le sportif s'est produit lorsque les revenus proviennent dans une mesure substantielle de fonds publics de l'autre Etat contractant.

Art. 18 et 19

Pensions et fonctions publiques

Conformément à la pratique conventionnelle suisse, le ch. 4 du protocole indique expressément que les art. 18 et 19 de la convention s'appliquent également aux prestations en capital.

Art. 21

Autres revenus

Pour les autres revenus, cet article institue une règle d'attribution en faveur de l'Etat de résidence.

Art. 22

Fortune

Etant donné que les deux Etats contractants imposent la fortune, la convention comporte un article correspondant au Modèle de convention de l'OCDE et qui tient compte des bases fixes des personnes exerçant une activité lucrative indépendante.

Art. 23

Elimination des doubles impositions

La République islamique d'Iran applique la méthode de l'imputation pour éviter la double imposition.

La Suisse applique comme d'habitude la méthode de l'exemption avec réserve de la progressivité et accorde l'imputation forfaitaire d'impôt pour les dividendes, les intérêts et les redevances. Enfin, les dispositions de la convention prévoient que les entreprises suisses bénéficient du même dégrèvement pour les dividendes de source iranienne que pour les dividendes de source suisse.

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Art. 24

Non-discrimination

La clause de non-discrimination s'étend à tous les impôts des Etats contractants, sans égard au champ d'application matériel de la convention.

Art. 26

Echange de renseignements

La clause qui figure dans la convention correspond à celle qui a été convenue avec plusieurs Etats non membres de l'OCDE. L'échange de renseignements est limité aux renseignements nécessaires à la bonne application de la convention. Les renseignements échangés ne doivent servir qu'à la fixation et à la perception des impôts visés par la convention. L'échange de renseignements visant les secrets commerciaux, d'affaires, bancaires, industriels ou professionnels est exclu.

Art. 28

Entrée en vigueur

La convention entre en vigueur dès l'échange des instruments de ratification. En Suisse, les dispositions de la convention sont applicables aux années fiscales commençant à partir du 1er janvier de l'année suivant l'entrée en vigueur. Pour la République islamique d'Iran, les dispositions de la convention s'appliquent aux années fiscales commençant à partir du 1er Farvardin (soit le 21 mars) suivant l'entrée en vigueur.

Le par. 3 abroge les dispositions de l'échange de notes entre la Suisse et l'Iran concernant l'imposition d'entreprises aériennes dès que la convention sera applicable.

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Conséquences financières

Dans toute convention de double imposition, les deux Etats contractants renoncent à certaines recettes fiscales. Pour la Suisse, les pertes qui en découlent résultent du remboursement partiel de l'impôt anticipé et de l'imputation de l'impôt à la source perçu par la République islamique d'Iran sur les dividendes, les intérêts et les redevances conformément aux art. 10, 11 et 12. Les investissements iraniens en Suisse étant peu importants, les remboursements ne devraient pas se traduire par un important manque à gagner. L'imputation forfaitaire d'impôt introduite par l'arrêté du Conseil fédéral du 22 août 1967 entraînera une certaine diminution des recettes des fiscs suisses. Cette baisse des recettes fiscales dont l'ampleur ne peut pas être estimée faute de statistiques appropriées sera compensée en partie: en effet, alors qu'il fallait autoriser jusqu'ici la déduction des impôts iraniens de la base de calcul, le montant brut des revenus provenant de la République islamique d'Iran sera désormais imposable en Suisse. Il s'ensuivra une augmentation générale du revenu imposable.

La présente convention contient des règles qui garantissent à la Suisse et à l'économie suisse une solide protection contre la double imposition dans les relations bilatérales avec la République islamique d'Iran et permettent d'éliminer, sur le plan fiscal, les éventuels désavantages concurrentiels par rapport aux autres Etats ayant conclu une convention de double imposition avec l'Iran. Dans l'ensemble, la convention contient des avantages importants en faveur du développement des 2317

relations économiques bilatérales; elle contribuera à promouvoir les investissements directs suisses en Iran. Les cantons et les milieux économiques intéressés ont approuvé la conclusion de cette convention au cours de la procédure de consultation.

Par ailleurs, on rappellera que les conventions de double imposition sont conclues avant tout dans l'intérêt des contribuables et qu'elles favorisent la coopération économique qui constitue l'un des buts principaux de la politique suisse en matière de commerce extérieur.

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Constitutionnalité

La présente convention se fonde sur l'art. 54 de la Constitution fédérale, qui attribue à la Confédération la compétence en matière d'affaires étrangères. L'Assemblée fédérale est compétente pour approuver la convention en vertu de l'art. 166, al. 2, de la Constitution. La convention est conclue pour une durée indéterminée, mais elle peut être dénoncée en tout temps pour la fin d'une année civile moyennant un préavis de six mois. Elle ne prévoit ni l'adhésion à une organisation internationale ni n'entraîne une unification multilatérale du droit. L'arrêté fédéral n'est donc pas sujet au référendum facultatif en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, de la Constitution.

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Conclusions

La présente convention suit dans une large mesure le Modèle de convention de l'OCDE et correspond aux principes de la pratique conventionnelle suisse. Elle institue la sécurité du droit et garantit aux investisseurs suisses d'importants dégrèvements des impôts iraniens. De façon plus générale, elle devrait favoriser le développement ultérieur des relations économiques bilatérales entre la Suisse et la République islamique d'Iran.

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