03.025 Message relatif au Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 26 mars 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'approuver, un projet d'arrêté fédéral relatif au Deuxième Protocole additionnel du 8 novembre 2001 à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 mars 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2002­1579

2873

Condensé La Convention d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 du Conseil de l'Europe est entrée en vigueur le 12 juin 1962 (le 20 mars 1967 pour la Suisse).

En 1978, cette Convention a été complétée par un premier Protocole additionnel, qui autorise l'entraide judiciaire pour les infractions fiscales. La Suisse, le Liechtenstein et six autres Etats n'ont pas ratifié ce Protocole additionnel.

La Convention de 1959 ne satisfait plus entièrement aux exigences qu'imposent les formes modernes de la criminalité. La globalisation des marchés et l'évolution des technologies exerçant également leurs effets sur la criminalité internationale, il s'agit d'adapter les instruments de l'entraide judiciaire à des circonstances nouvelles. Pour que les Etats puissent agir efficacement contre la criminalité internationale, ils doivent pouvoir s'appuyer sur des dispositions d'entraide judiciaire simples à appliquer et correspondant aux nouvelles exigences de la pratique.

Telles sont les raisons qui ont amené le Conseil de l'Europe à élaborer un Deuxième Protocole additionnel, tenant compte, dans une large mesure, des normes d'entraide judiciaire adoptées entre-temps au niveau de l'Union européenne. Ces normes se trouvent dans la Convention d'entraide judiciaire de l'UE, du 29 mai 2000, et dans la Convention d'application du 19 juin 1990 de l'Accord de Schengen. Un grand nombre des dispositions du Deuxième Protocole additionnel qui constituent des innovations par rapport à la Convention de 1959 s'inspirent ainsi des normes de ces deux conventions (par exemple l'audition par vidéoconférence ou par conférence téléphonique, la transmission spontanée d'informations, la restitution des produits de l'infraction, l'observation transfrontalière, la livraison surveillée, les enquêtes discrètes, les équipes communes d'enquête ou la responsabilité pénale et civile des fonctionnaires).

D'un point de vue formel, le Deuxième Protocole se compose de trois chapitres. Le premier contient les dispositions qui remplacent ou complètent différents articles de la Convention de 1959 (art. 1 à 6). Le deuxième chapitre regroupe les dispositions qui sont nouvelles (art. 7 à 29). Le troisième, enfin, réunit les dispositions finales (art. 30 à 35). D'un point de vue matériel, le Deuxième Protocole ne modifie en rien la
substance de la Convention de 1959. Les déclarations et les réserves conservent leur validité, à moins qu'elles ne soient retirées. Grâce à cette clause, la Suisse pourra continuer à lier l'octroi de l'entraide judiciaire aux principes de la double punissabilité et de la spécialité.

La Suisse a signé ce Deuxième Protocole additionnel, à l'élaboration duquel elle a activement participé, le 15 février 2002. A ce jour, en comptant la Suisse, 21 Etats ont signé ce Protocole, qui pourra entrer en vigueur aussi tôt que trois pays l'auront ratifié. L'adhésion à ce nouvel instrument ne constitue pas une véritable innovation pour la Suisse, car la plupart des dispositions qu'il contient se trouvent déjà dans des accords bilatéraux passés avec les Etats voisins, ou dans la loi du 20 mars 1981 sur l'entraide pénale internationale (EIMP; RS 351.1).

2874

La Convention de l'UE et le Deuxième Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l'Europe forment une base moderne pour l'entraide judiciaire en matière pénale en Europe.

2875

Message 1

Partie générale

1.1

Situation initiale

1.1.1

Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale

La Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 19591 (STE No 030, ci-après «la Convention») est le premier instrument international codifiant les règles d'entraide judiciaire qui s'étaient développées au fil du temps sur la base de la pratique internationale. Avant cette Convention, seules des normes isolées étaient consignées dans des traités bilatéraux d'extradition. La Suisse a adhéré à la Convention le 20 décembre 1966. Aujourd'hui, la Convention réunit tous les Etats membres du Conseil de l'Europe (à l'exception d'Andorre, d'Azerbaïdjan, de la Bosnie-Herzégovine et de Saint Marin), ainsi qu'Israël2.

En 1978, la Convention a été complétée par un premier Protocole additionnel (STE No 099), qui introduisait en particulier une obligation d'entraide judiciaire pour les infractions fiscales. La Suisse a signé ce premier Protocole, mais ne l'a pas ratifié3.

En 1985, la Parlement avait approuvé le Protocole additionnel avec une réserve selon laquelle le Titre relatif à l'entraide judiciaire en matière fiscale n'est pas accepté (CN 4.6.1984; CE 4.10.1985). Par la suite, le Conseil fédéral avait renoncé à la ratification4 de ce Protocole additionnel, parce que dans les faits, cette réserve l'aurait vidé de sa substance et aurait entraîné des difficultés d'application5.

1.1.2

Nécessité d'un Deuxième Protocole additionnel

La Convention de 1959 ne satisfait plus entièrement aux exigences qu'imposent les formes modernes de la criminalité. La globalisation des marchés et l'évolution des technologies exerçant également leurs effets sur la criminalité internationale, il s'agit d'adapter les instruments de l'entraide judiciaire aux nouvelles conditions qui régissent la politique, les rapports sociaux et le crime. Pour que les Etats puissent agir efficacement contre la criminalité internationale, ils doivent pouvoir s'appuyer sur des dispositions d'entraide judiciaire simples à appliquer et correspondant aux nouvelles exigences de la pratique.

1 2 3

4 5

RS 0.351.1 La convention est aussi ouverte à l'adhésion des Etats non membres du Conseil de l'Europe (art. 28).

Outre la Suisse, neuf Etats n'ont pas ratifié le Protocole additionnel de 1978: Andorre, l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie, le Liechtenstein, Malte, Saint Marin et Serbie-Monténégro.

Voir à ce propos le message du Conseil fédéral relatif au premier Protocole additionnel (FF 1983 IV 129).

La Suisse aurait été contrainte de rejeter toute demande d'entraide judiciaire en matière fiscale (soustraction d'impôts et escroquerie en matière fiscale), bien que dans la pratique, en vertu de l'art. 3, al. 3, EIMP, elle accorde l'entraide judiciaire en cas d'escroquerie en matière fiscale.

2876

En 1995, le Comité d'experts du Conseil de l'Europe chargé d'examiner régulièrement le fonctionnement et l'application des instruments pénaux européens (Comité d'experts sur le fonctionnement des Conventions européennes dans le domaine pénal) est arrivé à la conclusion que, pour résoudre les problèmes existants en matière d'entraide judiciaire, un Deuxième Protocole additionnel à la Convention était nécessaire.

Lors de l'élaboration du nouvel instrument, le Comité d'experts a tenu compte des développements au sein de l'Union européenne, qui préparait, en parallèle du Conseil de l'Europe, une Convention d'entraide judiciaire destinées aux Etats membres de l'UE. Au printemps 2001, un projet de texte était prêt, à l'élaboration duquel la Suisse a participé activement. Le Comité Directeur pour les Problèmes Criminels a approuvé ce projet en juin 2001, moyennant deux modifications: une nouvelle disposition sur la protection des témoins y a été introduite, tandis que la réglementation relative à la protection des données a été assortie de la possibilité d'une réserve.

Le 19 septembre 2001, le Comité des ministres a adopté le Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (STE No 182, ci-après «le Deuxième Protocole») et l'a ouvert à la signature.

Sur de nombreux points, le Deuxième Protocole suit de près les règles contenues dans la Convention d'entraide judiciaire de l'UE, du 29 mai 20006 (ci-après «la Convention de l'UE») ainsi que dans la Convention d'application du 19 juin 1990 de l'Accord de Schengen7. Certaines de ces réglementations se trouvent également dans des accords bilatéraux que la Suisse a conclus avec des Etats voisins dans les domaines de l'entraide judiciaire en matière pénale et de la coopération policière et judiciaire8.

1.2

Etat des signatures et des ratifications

Le Deuxième Protocole additionnel a été ouvert à la signature le 8 novembre 2001 pour les Etats ayant adhéré à la Convention ou l'ayant signée. A ce jour, 21 Etats ont signé ce nouvel instrument9; deux Etats (l'Albanie et le Danemark) l'ont ratifié.

Le Deuxième Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois suivant l'expiration d'une période de trois mois après le dépôt du troisième instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation (art. 30, par. 2).

6

7

8 9

Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne (Journal officiel des Communautés européennes C 197/1 du 12.7.2000).

Convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 (Journal officiel des Communautés européennes No L 239 du 22.9.2000, p. 19).

Cf. ch. 2.2 Albanie, Allemagne, Belgique, Bulgarie, Chypre, Danemark, France, Grande-Bretagne, Grèce, Irlande, Islande, Macédoine, Malte, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Suède, Ukraine et Suisse (état mars 2003)

2877

2

Partie spéciale

2.1

Commentaire général sur le Deuxième Protocole

Le Deuxième Protocole a pour objectif d'améliorer la coopération entre les Etats parties dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale. A cet effet, il contient des dispositions qui complètent la réglementation actuelle de la Convention. D'autres dispositions visent à faciliter et à simplifier la procédure d'entraide judiciaire. Le Deuxième Protocole ne modifie en rien le contenu central de la Convention. Il complète la Convention (et le premier Protocole additionnel de 1978) dans le but de faciliter l'application de ces deux instruments. Le Deuxième Protocole ne crée notamment pas d'obligation d'accorder l'entraide judiciaire pour des infractions fiscales.

Le Deuxième Protocole se compose de trois chapitres. Le chap. I contient les dispositions qui remplacent ou complètent différents articles de la Convention (art. 1 à 6).

Le chap. II regroupe les dispositions qui sont nouvelles par rapport à la Convention (art. 7 à 29). Le chap. III, enfin, réunit les dispositions finales (art. 30 à 35).

Dans le chap. I, l'art. 1, par. 3, constitue une innovation essentielle, puisqu'il prévoit que l'entraide judiciaire pourra aussi être accordée dans des cas d'infractions aux règlements poursuivies par des autorités administratives. De nombreuses dispositions du chap. II, adoptées en partie à l'initiative de la Suisse, ont été calquées sur celles de la Convention du 29 mai 2000 de l'UE et de la Convention d'application de l'Accord de Schengen, du 19 juin 1990. Quelques dispositions ont été reprises mot pour mot. C'est le cas en particulier pour l'audition par vidéoconférence ou par conférence téléphonique, la transmission spontanée d'informations, la restitution des produits de l'infraction, le transfèrement temporaire de personnes détenues sur le territoire de la Partie requise, (art. 9 à 13) ainsi que pour l'observation transfrontalière, la livraison surveillée, les enquêtes discrètes (on parle en Suisse d'investigations secrètes), les équipes communes d'enquête et la responsabilité pénale et civile des fonctionnaires (art. 17 à 22). Ces dispositions ne constituent cependant pas une nouveauté pour la Suisse, car elles existent déjà dans des traités bilatéraux conclus avec les pays voisins dans les domaines de l'entraide judiciaire en matière pénale et de la coopération judiciaire et policière10,
ou reprennent des réglementations prévues par la loi sur l'entraide pénale internationale (EIMP)11 et que la Suisse applique déjà12.

Des réserves sont possibles pour cinq articles (art. 33, par. 2), soit ceux qui concernent la remise par voie postale des actes de procédure (art. 16), l'observation transfrontalière (art. 17), la livraison surveillée (art. 18), les enquêtes discrètes (art. 19) et les équipes communes d'enquête (art. 20)13.

Il est important de relever que les réserves et déclarations relatives à la Convention conservent leur validité, à moins qu'un Etat n'y renonce expressément (art. 33, par. 1). Cette clause permet à la Suisse de maintenir sa politique en matière 10 11 12

13

Voir à ce propos le ch. 2.2 RS 351.1 Font partie de cette catégorie les articles sur la transmission spontanée d'informations (art. 11), la restitution des produits de l'infraction (art. 12), la remise par voie postale des actes de procédure (art. 16) et les mesures provisoires (art. 24).

Voir à ce propos le ch. 2.3.2

2878

d'entraide judiciaire. Elle peut donc continuer de lier l'octroi de l'entraide judiciaire au principe de la double punissabilité et au principe de la spécialité.

2.2

Commentaires des différentes dispositions du Deuxième Protocole

Seules les dispositions les plus importantes sont commentées ci-dessous.

2.2.1 Art. 1

Chapitre I Champ d'application

Cet article modifie l'art. 1er de la Convention de trois façons.

Le par. 1 est complété par les mots «... et dans les meilleurs délais ...». Cet ajout souligne l'importance et le caractère urgent de l'entraide judiciaire internationale. A l'instar de l'art. 17a EIMP, il oblige l'Etat requis à traiter les demandes d'entraide judiciaire avec célérité. L'on ne peut toutefois pas en déduire que l'Etat requis soit tenu de respecter les délais qui lui auraient été fixés par l'Etat requérant.

Le par. 3 élargit le champ d'application ­ actuellement limité aux procédures pénales pendantes devant une autorité judiciaire ­ aux infractions poursuivies par une autorité administrative. Cette disposition vise à couvrir toutes les procédures liées à des infractions, qu'il s'agisse de délits ou de contraventions. La formulation, qui reprend celle de l'art. 49, let. a, de la Convention d'application de l'Accord de Schengen, tient compte du fait que la même infraction est poursuivie dans certains Etats par une autorité pénale, dans d'autres, par une autorité administrative (c'est le cas notamment des contraventions en matière de circulation routière). La réglementation actuelle s'est révélée insatisfaisante dans la pratique, parce que certains Etats, en vertu des dispositions de la Convention, accordent l'entraide judiciaire, par exemple, pour des infractions à la loi sur la circulation routière, alors que d'autres la refusent au motif qu'il ne s'agit pas d'une procédure pénale devant une autorité judiciaire.

L'expérience a, par ailleurs, montré que pour les infractions économiques, l'enquête préliminaire est souvent menée par des autorités administratives spécialisées en lieu et place des autorités normalement chargées de l'investigation.

Le nouveau par. 3, qui se présente sous une forme potestative, donnera aux autorités administratives chargées de poursuivre une infraction la possibilité d'adresser une demande d'entraide judiciaire à un Etat étranger. La question de savoir si, dans un premier temps, la procédure relève de la compétence d'une autorité pénale ou d'une autorité administrative ne joue aucun rôle, dès l'instant qu'à un stade ultérieur, un recours est possible devant un tribunal pénal, étant entendu, par ailleurs, que la compétence de ce tribunal peut s'étendre à d'autres matières que le droit
pénal. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les conditions nécessaires à la coopération avec une autorité administrative sont remplies lorsque cette dernière peut

2879

enquêter sur une infraction et demander, une fois que l'enquête est close, l'ouverture d'une procédure judiciaire susceptible de déboucher sur une condamnation pénale14.

L'extension de l'entraide judiciaire aux autorités administratives ne fonde cependant pas une obligation générale de coopération avec des autorités fiscales, par exemple pour une procédure visant un cas de soustraction d'impôt. Les motifs permettant de refuser l'entraide judiciaire prévus à l'art. 2 de la Convention restent valables. Ainsi, l'adhésion au Deuxième Protocole additionnel permettra toujours de refuser d'accorder l'entraide judiciaire pour une infraction fiscale (art. 2, let. a, de la Convention). La Suisse pourra donc continuer de refuser l'octroi de l'entraide judiciaire lorsque la demande concerne des faits relevant uniquement de la soustraction d'impôt. L'entraide judiciaire est toutefois possible lorsque la procédure vise une escroquerie en matière fiscale, en vertu de l'art. 3, al. 3, EIMP.

La réserve de spécialité formulée par la Suisse est un autre argument contre l'obligation de la Suisse d'accorder l'entraide judiciaire à une autorité fiscale étrangère: les informations et les moyens de preuve obtenus par la voie de l'entraide judiciaire ne peuvent être utilisés par l'Etat requérant sans l'accord préalable de la Suisse que pour poursuivre une infraction pour laquelle l'entraide judiciaire serait accordée15. Cette réserve exclut une utilisation à des fins fiscales des actes transmis par la Suisse.

Par ailleurs, cette disposition n'a aucune influence sur le principe de la double punissabilité. En particulier, elle ne permet pas de déduire que l'entraide judiciaire doit être accordée à une autorité administrative si cette entraide nécessite des mesures procédurales de contrainte (par ex. levée du secret bancaire). C'est l'art. 5 de la Convention qui détermine s'il est possible, dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire, de fournir à une autorité administrative entrant dans le champ d'application du Deuxième Protocole des information juridiquement protégées. La Suisse n'ordonne de mesures coercitives que si les faits motivant la commission rogatoire sont punissables dans les deux Etats ou, en d'autres termes, s'ils violent une norme pénale de droit commun. Si tel n'est pas le cas, des mesures coercitives
sont exclues, même avec le Deuxième Protocole16.

Pour la Suisse, la réglementation du par. 3 n'est pas nouvelle. Elle se trouve également dans les accords complémentaires à la Convention passés avec les Etats voisins17 et correspond, dans sa philosophie, à l'art. 1, al. 3, EIMP.

Le par. 4 élargit le champ d'application de la Convention aux procédures pénales visant des personnes morales. Une demande d'entraide judiciaire ne peut plus être rejetée au seul motif que le droit de l'Etat requis ne prévoit pas une responsabilité pénale des personnes morales dans le cadre d'une procédure administrative ou pénale.

14

15 16 17

ATF du 28 avril 1997 1A.361/1996 (entraide judiciaire accordée à aux autorités italiennes de surveillances des opérations boursières); ATF 121 II 153 et ATF 118 Ib 457 (entraide judiciaire accordée à la Commission française des opérations de bourse).

Déclaration de la Suisse relative à l'art. 2, let. b et c, de la convention (RS 0.351.1).

Déclaration de la Suisse relative à l'art. 5, par. 1 de la convention (RS 0.351.1).

Cf. art. I, let. a, de l'Accord complémentaire du 13 novembre 1969 avec l'Allemagne (RS 0.351.913.61), art. I de l'Accord complémentaire du 13 juin 1972 avec l'Autriche (RS 0.351.916.32), art. I, par. 1, de l'Accord complémentaire du 28 octobre 1996 avec la France (RS 0.351.934.92), art. II, par. 1, de l'Accord complémentaire du 10 septembre 1998 avec l'Italie (FF 1999 1409).

2880

Pour la Suisse, cette disposition ne présentera pas de difficultés particulières car le Conseil fédéral, dans le cadre de la révision de la partie générale du Code pénal, a soumis au Parlement une nouvelle norme pénale concernant la responsabilité des entreprises (art. 102 projet CP). Selon le projet du Conseil fédéral, une entreprise est punissable si une infraction est commise par son exploitation et que cet acte ne peut être imputé à aucune personne déterminée en raison d'un manque d'organisation de l'entreprise18. Le Parlement a modifié le projet du Conseil fédéral en ce sens qu'une entreprise pourra, dans certains cas, être punissable même si l'acte en question a pu être imputé à une personne déterminée19. Au reste, la Suisse peut aujourd'hui déjà accorder l'entraide judiciaire dans de tels cas en s'appuyant sur la responsabilité pénale des organes de l'entreprise.

Pour que l'art. 1 soit applicable dans la pratique, les Etats parties sont invités à établir une liste des autorités judiciaires et administratives qui satisfont aux critères du Deuxième Protocole décrits ci-dessus. Nous renvoyons à ce propos aux art. 6 et 27.

Art. 2

Présence d'autorités de la Partie requérante

L'art. 2 prévoit que les personnes qui participent à une procédure à l'étranger puissent assister à l'exécution de la commission rogatoire, lorsque l'Etat requérant exige la présence de ces personnes dans l'intérêt de la procédure. Cet ajout, qui complète l'art. 4 de la Convention, a pour but de faciliter l'exécution des commissions rogatoires et, de ce fait, d'éviter autant que faire se peut des demandes complémentaires.

L'art. 65a EIMP contient une disposition analogue.

Il va de soi que la présence de personnes participant à une procédure à l'étranger ne doit pas avoir pour conséquence que ces personnes aient accès de manière prématurée à des informations concernant le domaine secret pendant l'exécution de la commission rogatoire. L'autorité suisse compétente pour répondre à la demande d'entraide judiciaire devra prendre les dispositions nécessaires pour que, durant cette phase de la procédure, aucune information concernant le domaine secret ne soit transmise20. La décision concernant la présence d'autorités étrangères doit être prise sous forme d'une décision incidente pouvant faire l'objet d'un recours21.

Art. 3

Transfèrement temporaire de personnes détenues, sur le territoire de la Partie requérante

Cette disposition remplace l'art. 11 de la Convention, dont l'application, dans la pratique posait certains problèmes. Selon le libellé actuel de l'art. 11 (de la Convention), les personnes détenues dans l'Etat requis ne peuvent être transférées dans l'Etat requérant que dans deux cas de figure, à savoir lorsque cet Etat demande leur 18

19

20

21

Message du Conseil fédéral du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse (dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal) et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, ch. 217 (FF 1999 1943 ss).

Le 19 septembre 2001, le Conseil des Etats a éliminé les dernières divergences subsistant à l'art. 102 du projet de CP (BO 2001 E 514 ss). Le Parlement a approuvé la nouvelle disposition pénale lors du vote final du 13.12.2002 (FF 2002 7697).

Art. 65a, par. 3 EIMP; Message du Conseil fédéral du 29 mars 1995 concernant la révision de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, ch. 241 (FF 1995 III 23).

ATF du 23 juin 2000 1A.157/2000.

2881

comparution en qualité de témoin ou aux fins de confrontation, dans le cadre d'une procédure pénale. Or il est apparu que ce champ d'application est trop restreint. La réglementation actuelle ne couvre en particulier pas le cas où la personne détenue doit comparaître dans l'Etat requérant pour y répondre de faits pour lesquels elle est poursuivie pénalement. Si l'on ne donne pas à cette personne la possibilité d'être présente dans l'Etat requérant, la procédure pénale pourrait être ralentie ou bloquée, puisqu'il serait alors impossible d'entendre la personne concernée sur les différents chefs d'accusation. C'est la raison pour laquelle une disposition plus largement applicable que celle du texte actuel a été retenue.

La formule «aux fins d'instruction», que l'on trouve au par. 1, tient compte de cette exigence de la pratique. Pour éviter toute confusion avec l'extradition, la comparution aux fins de jugement est expressément exclue. L'extradition, qui consiste à transférer une personne en vue d'un jugement pénal ou de l'exécution d'une peine, n'est donc pas couverte par la disposition. La remise d'une personne détenue en vertu de l'art. 3 n'est possible que durant la phase de l'instruction précédant le jugement22.

La disposition peut s'appliquer aussi bien à des citoyens des Etats parties qu'à des ressortissants d'autres pays. L'Etat requérant qui s'est vu remettre temporairement un de ses ressortissants ne peut dès lors pas invoquer la nationalité de la personne détenue pour refuser de la renvoyer dans l'Etat requis. Parallèlement, lorsqu'une personne détenue consent à être transférée dans l'Etat requérant, ce consentement vaut également pour son renvoi dans l'Etat requis.

Art. 4

Voies de communication

Par rapport à la réglementation actuelle, la nouvelle formulation des dispositions relatives aux voies de communication contient deux compléments, qui portent sur les voies de transmission et sur la forme de la communication.

En vertu du par. 1, les demandes d'entraide judiciaire peuvent être adressées directement à l'autorité judiciaire de la Partie requise, et renvoyées par la même voie. Les demandes ne doivent ainsi plus obligatoirement transiter par les ministères de la justice concernés, même si cette voie de transmission reste possible. Le par. 3 prévoit également la possibilité d'échanges directs pour les demandes d'entraide judiciaire concernant des autorités administratives, selon l'art. 1, par. 3. La voie directe est aussi ouverte pour les demandes de livraison surveillée et d'enquête discrète, ainsi que pour les demandes d'extraits du casier judiciaire (par. 4 à 6). La transmission directe reste en revanche exclue pour les demandes de transfèrement temporaire d'une personne détenue, selon l'art. 11 de la Convention et l'art. 13 du Deuxième Protocole (par. 2). Dans les cas d'urgence, la transmission peut se faire par l'intermédiaire de l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol) (par. 7).

Pour renforcer encore l'efficacité de cette réglementation dans la pratique, les dispositions de l'article peuvent faire l'objet de déclarations de la part des Etats (par. 8).

22

Le mandat d'arrêt décerné à l'étranger contre une personne détenue remise temporairement aux autorités suisses en vertu de l'art. 3 produit aussi ses effets pendant le séjour de la personne en Suisse (art. 72 EIMP).

2882

Pour la Suisse, la transmission directe n'est pas une nouveauté, puisqu'elle est déjà prévue dans des accords complémentaires à la Convention passés avec les Etats voisins23.

Selon le par. 9, il est possible, à certaines conditions, d'avoir recours aux moyens modernes de télécommunication pour la transmission des demandes d'entraide judiciaire et des autres communications. Cette forme de communication (par ex. fax, courrier électronique) présuppose cependant que l'autorité requérante soit en mesure de produire à tout moment, sur demande, l'original de la demande ou du document transmis, ainsi qu'une trace écrite de l'expédition. Le texte prévoit un autre gardefou, puisqu'il donne à chaque Etat la possibilité de déclarer à quelles conditions il admet les demandes et les communications transmises par voie électronique ou par d'autres moyens de télécommunication. Une telle déclaration peut être faite en tout temps.

Pour la Suisse, il ne paraît pas nécessaire à ce stade de faire une telle déclaration. En effet, la réglementation n'impose pas de contrainte et elle est formulée de telle manière que la Suisse puisse, dans un cas concret, demander que l'original de la demande lui parvienne par la voie habituelle. Dans ce contexte, il est par ailleurs judicieux d'attendre que le projet de loi sur la signature électronique, en préparation, trouve sa forme définitive24.

Art. 5

Frais

Les dispositions relatives aux frais, figurant à l'art. 20 de la Convention, sont remplacées par une nouvelle réglementation plus complète.

L'art. 5 maintient le principe de la gratuité de l'entraide judiciaire. Le par. 1 déroge à ce principe pour les frais occasionnés par l'intervention d'experts (let. a) ou le transfèrement de personnes détenues (let. b) ou encore pour les frais importants ou extraordinaires, c'est-à-dire qui découlent d'une demande sortant du cadre habituel (let. c). Cela peut être le cas lorsqu'une commission rogatoire doit être exécutée selon les règles de procédure de l'Etat requérant, règles qui n'existent pas dans la procédure de l'Etat requis (par ex. audition croisée dite cross-examination). L'on peut aussi penser à des frais liés à l'entreposage d'un objet d'art saisi ou à une surveillance téléphonique d'une grande ampleur. Dans tous ces cas, l'Etat requis peut demander à l'Etat requérant le remboursement des frais occasionnés.

Selon le par. 2, l'Etat requérant doit aussi prendre en charge tous les coûts liés aux vidéoconférences, à moins que les Parties n'en conviennent autrement.

Le par. 3 invite les Parties à convenir à l'avance des conditions de paiement des frais importants ou extraordinaires visés au par. 1.

23

24

Cf. art. VIII de l'Accord complémentaire du 13 novembre 1969 avec l'Allemagne (RS 0.351.913.61), art. IX de l'Accord complémentaire du 13 juin 1972 avec l'Autriche (RS 0.351.916.32), art. XIV de l'Accord complémentaire du 28 octobre 1996 avec la France (RS 0.351.934.92), art. XVII, par. 1 de l'Accord complémentaire du 10 septembre 1998 avec l'Italie (FF 1999 1415).

Le 3 juillet 2001, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la loi fédérale sur les services de certification dans le domaine de la signature électronique (FF 2001 5423).

En proposant l'équivalence entre la signature électronique et la signature manuscrite, le Conseil fédéral entend promouvoir le commerce électronique.

2883

2.2.2 Art. 7

Chapitre II Exécution différée des demandes

Cet article complète l'art. 19 de la Convention en permettant désormais non seulement de refuser l'entraide judiciaire, mais aussi de différer l'exécution de la demande, ou encore de ne l'exécuter que partiellement ou d'en assortir l'exécution au respect de certaines conditions.

Le par. 1 donne aux Etats la possibilité de surseoir à la satisfaction d'une demande si le fait de donner suite à cette demande risque d'avoir une incidence négative sur une procédure pénale interne en cours.

Les par. 2 et 3 expliquent la manière de procéder en cas de rejet de la demande ou d'exécution différée: l'Etat requis doit fournir les motifs du refus ou du report de l'entraide et examiner, avec l'Etat requérant, si l'entraide peut tout de même être accordée et, dans l'affirmative, à quelles conditions.

C'est l'art. 27 de la Convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité25 (STE No 185) qui a servi de modèle pour cette disposition.

Art. 8

Procédure

L'art. 3 de la Convention prévoit que les actes d'entraide judiciaire sont accomplis selon la procédure en vigueur dans l'Etat requis. L'art. 8 du Deuxième Protocole assouplit quelque peu ce principe. Il prévoit en effet que, dans certains cas, l'Etat requis devra respecter les modalités de la procédure étrangère pour l'exécution d'une demande d'entraide judiciaire. L'objectif de cette disposition est de faciliter l'utilisation des résultats obtenus dans le cadre de l'entraide judiciaire comme moyens de preuve dans l'Etat requérant. Les notions de «formalité» et de «procédure» doivent être comprises au sens large.

Des limites sont fixées à l'application du droit de procédure étranger: la formalité exigée par l'Etat requérant doit s'appuyer sur une disposition juridique interne et ne doit pas être contraire aux principes fondamentaux du droit de l'Etat requis. De plus, cette disposition ne peut être invoquée que lorsque le Deuxième Protocole ne prévoit pas expressément qu'une requête doit être exécutée selon le droit de l'Etat requis. C'est notamment le cas pour la livraison surveillée (art. 18, par. 3).

L'application de la procédure étrangère est déjà prévue à l'art. 65 EIMP.

Art. 9

Audition par vidéoconférence

Cet article reprend dans une large mesure l'art. 10 de la Convention de l'UE26.

Grâce à l'évolution des nouvelles technologies, il est aujourd'hui possible, pour une personne se trouvant dans un pays donné, de communiquer avec une personne ou une autorité se trouvant dans un autre pays, au moyen d'une liaison vidéo directe.

L'art. 9 vise à servir de base à cette procédure, afin de surmonter les difficultés qui 25 26

La Suisse a signé cette convention le 23 novembre 2001.

Art. 10 de la convention: Journal officiel des Communautés européennes C 197/8 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 10: Journal officiel des Communautés européennes C 379/15 du 29.12.2000.

2884

peuvent surgir dans des procédures pénales, lorsqu'une personne se trouve dans un Etat et que sa comparution à une audition dans un second Etat est inopportune ou impossible. Il fixe, en particulier, les règles relatives aux demandes d'audition par vidéoconférence et au déroulement de ces auditions. L'article s'applique généralement aux auditions d'experts et de témoins, mais il peut aussi, dans des conditions particulières énoncées au par. 8, s'appliquer aux auditions de personnes poursuivies pénalement ou de suspects.

L'une des principales règles de la procédure est que l'audition par vidéoconférence ne doit pas être contraire aux principes fondamentaux du droit de l'Etat requis (par. 2) et que les droits de procédure élémentaires soient respectés (par. 5). Ces garde-fous, ainsi que le rappel, dans le préambule du Deuxième Protocole, de la Convention du 4 novembre 195027 de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (CEDH), doivent garantir que la procédure d'audition par vidéoconférence respecte les droits de l'homme.

Le par. 1 énonce le principe selon lequel un Etat peut présenter dans le cadre d'une procédure pénale une demande d'audition par vidéoconférence concernant une personne qui se trouve dans un autre Etat partie. Une demande en ce sens peut être formulée dans les cas où les autorités judiciaires de l'Etat requérant ont besoin que la personne en question soit entendue comme témoin ou expert et où il est inopportun ou impossible pour cette personne de se rendre dans cet Etat pour une audition.

Le terme «inopportun» pourrait, par exemple, s'appliquer dans les cas où le témoin est particulièrement jeune ou âgé, ou encore en mauvaise santé; «impossible» pourrait, par exemple, couvrir les cas où le témoin serait exposé à un danger grave s'il comparaissait dans l'Etat requérant.

Le par. 2 oblige l'Etat requis à faire droit à une demande d'audition par vidéoconférence pour autant que l'audition ne soit pas, dans les circonstances de l'espèce, contraire aux principes fondamentaux de son droit et qu'il dispose des moyens techniques permettant d'effectuer l'audition. Dans ce contexte, la référence aux «principes fondamentaux de son droit» implique qu'une demande ne peut pas être rejetée au seul motif que l'audition de témoins et d'experts par vidéoconférence n'est pas
prévue par le droit de l'Etat requis, ou qu'une ou plusieurs conditions précises d'une audition par vidéoconférence ne seraient pas réunies en vertu du droit national.

Lorsque les moyens techniques nécessaires font défaut, l'Etat requérant peut, avec l'accord de l'Etat requis, fournir un équipement approprié pour permettre que l'audition ait lieu.

Le par. 3 concerne les informations qui doivent accompagner les demandes présentées en vertu de l'art. 9 et il exige, entre autres, que la demande expose la raison pour laquelle il n'est pas souhaitable ou pas possible que la personne qui fait l'objet de la demande soit présente à une audition dans l'Etat requérant. Si l'appréciation des circonstances appartient à l'Etat requérant, il n'en doit pas moins expliquer les raisons de sa demande. Une telle demande pourrait être présentée, par exemple, lorsque la personne concernée s'est réfugiée à l'étranger parce qu'elle risquait des poursuites pénales dans l'Etat requérant.

27

RS 0.101

2885

Le par. 4 prévoit que la citation à comparaître est délivrée à la personne concernée par l'autorité judiciaire de l'Etat requis. Cette disposition vise à garantir que des mesures appropriées pourront être prises pour assurer sa comparution à l'audition.

Contrairement à ce que prévoit le par. 8 dans le cas des personnes poursuivies pénalement et des suspects, il n'est pas nécessaire que le témoin ou l'expert donne son consentement à une audition par vidéoconférence.

Le par. 5 expose les règles à observer pour une audition par vidéoconférence. La let. a prévoit ainsi la présence, et au besoin l'intervention, d'une autorité judiciaire de l'Etat requis, afin de veiller à ce que les principes fondamentaux du droit de cet Etat soient respectés pendant l'audition. L'Etat requis doit prendre toutes les mesures nécessaires pour que sa législation soit respectée pendant l'audition et intervenir immédiatement si les principes de son ordre juridique sont violés.

En vertu de la let. b, les autorités compétentes doivent convenir, le cas échéant, de mesures destinées à assurer la protection de la personne à entendre. Ces mesures peuvent comprendre l'application de toute législation qui pourrait être en vigueur dans l'Etat requérant concernant la protection des personnes à entendre.

La let. c dispose que les auditions sont effectuées directement par les autorités judiciaires de l'Etat requérant ou sous leur direction, conformément à son droit interne.

Sans préjudice de la lettre e, la personne à entendre par vidéoconférence ne doit pas disposer de moins de droits que si elle participait à une audience se tenant dans l'Etat requérant.

En outre, la let. d oblige l'Etat requis à mettre un interprète à la disposition de la personne à entendre si cela est nécessaire et si l'Etat requérant ou la personne concernée le demande.

La let. e prévoit une clause de sauvegarde pour la personne à entendre: elle peut faire valoir tout droit de ne pas témoigner dont elle jouirait en vertu de la loi de l'Etat requis ou de l'Etat requérant. Lorsqu'un tel droit est invoqué, la décision devra être prise par l'autorité judiciaire qui procède à l'audition. L'autorité judiciaire de l'Etat requis doit, dans tous les cas, prendre les mesures nécessaires pour mener l'audition conformément aux principes fondamentaux de son droit. Il
est recommandé que les autorités judiciaires des deux Etats se consultent lorsqu'une personne à entendre invoque le droit de refuser de témoigner.

Le par. 6 prévoit que l'autorité judiciaire de l'Etat requis doit établir un procèsverbal de l'audition par vidéoconférence et le transmettre à l'Etat requérant. Le paragraphe indique les données qui doivent figurer dans le procès-verbal. Celles-ci ne concernent toutefois pas la teneur de l'audition. Les Etats parties peuvent, dans le respect de leur droit national, convenir d'arrangements particuliers concernant le procès-verbal pour assurer la protection des personnes qui ont participé à l'audition.

Les Etats concernés peuvent par exemple s'entendre pour que les noms de certaines personnes qui étaient présentes à l'audition dans l'Etat requis ne soient pas consignés dans le procès-verbal. Dans ce cas, les fonctions de ces personnes devraient néanmoins être indiquées.

Le par. 7 prévoit que si, pendant une audition par vidéoconférence, une personne refuse de témoigner ou fait un faux témoignage, l'Etat où se trouve cette personne doit être en mesure de la traiter de la même manière que si elle comparaissait à une audition organisée dans le cadre de la procédure nationale. S'il en est ainsi, c'est parce que l'obligation de témoigner à une audition par vidéoconférence relève du 2886

droit de l'Etat requis. Ce paragraphe vise notamment à garantir que, en cas de nonrespect d'une obligation de témoigner, le témoin s'expose, du fait de sa conduite, à des conséquences analogues à celles qui seraient applicables dans le cadre d'une procédure nationale sans recours à la vidéoconférence. En cas de refus de témoigner ou de faux témoignage, l'Etat requis et l'Etat requérant devront, en règle générale, se consulter et produire sans délai les informations dont l'Etat requis a besoin pour prendre les mesures appropriées à l'encontre du témoin ou de l'expert.

Le par. 8 permet aux Etats parties d'avoir recours à la vidéoconférence également pour l'audition de personnes poursuivies pénalement ou de suspects. Chaque Etat peut décider en toute liberté s'il accepte ou non d'exécuter les demandes relatives à de telles auditions. L'audition d'une personne poursuivie pénalement ou d'un suspect présuppose le respect de trois conditions: premièrement, les autorités judiciaires de la Partie requérante et de la Partie requise sont d'accord de recourir à cette méthode d'audition et se sont entendues sur les modalités; deuxièmement, l'arrangement auquel elles sont parvenues est conforme au droit national des deux Etats concernés ainsi qu'aux traités internationaux qui s'appliquent (par ex. la CEDH); troisièmement, la personne poursuivie pénalement ou le suspect doit avoir donné son consentement. L'audition par vidéoconférence d'une personne poursuivie pénalement ou suspecte n'est possible que lorsque ces trois conditions sont respectées.

En vertu du par. 9, tout Etat partie peut, par une déclaration adressée au Secrétaire général du Conseil de l'Europe, faire savoir qu'il n'admet pas l'audition par vidéoconférence d'une personne poursuivie pénalement ou suspecte. Pour la Suisse, une telle déclaration ne s'impose toutefois pas. De plus, compte tenu de l'augmentation de la criminalité internationale, elle ne serait pas non plus indiquée d'un point de vue politique et juridique, car l'audition par vidéoconférence est appelée à prendre toujours plus d'importance, notamment pour les affaires complexes. La Suisse a d'ailleurs déjà conclu une disposition analogue avec l'Italie28.

L'audition par vidéoconférence n'est, sous cette forme, pas explicitement prévue en droit de procédure suisse. La loi sur l'entraide
pénale internationale permet certes déjà actuellement de recourir à des formes que le droit suisse ne connaît pas pour l'obtention de moyens de preuve, dans la mesure où elles sont compatibles avec le droit suisse et ne causent pas de graves préjudices aux personnes qui participent à la procédure (art. 65 EIMP). En outre, l'audition d'un témoin peut avoir lieu en présence de personnes qui participent à la procédure étrangère (art. 65a EIMP). La réglementation sur la vidéoconférence complète le droit actuel en ce sens que le témoin ou l'expert sera tenu de se présenter pour la vidéoconférence si son audition s'avère inopportune ou impossible dans l'Etat requérant et qu'en utilisant cette méthode d'audition, c'est l'autorité requérante qui aura la maîtrise du dossier. Dans ce domaine, l'art. 9 contient du droit uniforme qui peut être directement appliqué par les autorités des Etats. Nous renvoyons à ce titre au ch. 6.1.1.

Art. 10

Audition par conférence téléphonique

Cet article tient compte du fait que les auditions par conférence téléphonique constituent un autre domaine dans lequel les nouveaux moyens de télécommunication peuvent être utilisés dans le cadre de l'entraide judiciaire. De telles auditions peu28

A ce propos, voir l'art. VI de l'Accord complémentaire du 10 septembre 1998 avec l'Italie (FF 1999 1411).

2887

vent être particulièrement utiles dans les cas où, par exemple, un témoin doit faire une déposition sur une question de routine. Par ailleurs, elles peuvent être convenues et effectuées assez facilement et à peu de frais. L'art. 11 de la Convention de l'UE a servi de modèle à la réglementation29.

L'art. 10 établit un cadre général pour les demandes d'audition par conférence téléphonique. Il se distingue de l'art. 9 en ce que ses dispositions, contrairement à celles régissant l'audition par vidéoconférence, ne s'appliquent qu'à l'audition de témoins et d'experts. Par ailleurs, l'audition par conférence téléphonique n'est possible que si le témoin ou l'expert concerné y consent (par. 2). De plus, ce type d'audition doit être prévu dans le droit national de l'Etat requérant (par. 1) et ne doit pas être contraire aux principes fondamentaux du droit de l'Etat requis (par. 3). C'est la raison pour laquelle il n'était ici pas nécessaire de prévoir, comme cela a été fait dans l'art. 9, que l'audition par conférence téléphonique est utilisée lorsqu'il est inopportun ou impossible pour la personne de comparaître en personne à l'audition.

L'art. 10 n'est en rien contraire à la pratique suivie dans certains Etats parties consistant à entendre par téléphone depuis l'étranger une personne en qualité de témoin, éventuellement dans les locaux d'un consulat, sans l'assistance de l'Etat dans lequel elle se trouve.

Le par. 1 permet que des demandes d'entraide en vue de la tenue d'une audition par conférence téléphonique soient présentées lorsqu'une personne qui doit être entendue comme témoin ou expert dans un Etat partie se trouve dans un autre Etat partie.

Le dépôt d'une telle demande présuppose que l'audition sera menée par les autorités judiciaires de l'Etat requérant et que le droit de cet Etat prévoit l'audition par conférence téléphonique.

Selon le par. 2, l'audition par conférence téléphonique ne peut avoir lieu que si la personne concernée consent à ce que l'audition se fasse par ce moyen.

Le par. 3 oblige l'Etat requis à faire droit à la demande, pour autant qu'elle ne soit pas contraire aux principes fondamentaux de son droit.

Le par. 5 prévoit que l'Etat requérant et l'Etat requis s'entendent sur les modalités pratique de l'audition, mais quels que soient les arrangements convenus, l'Etat requis
peut exiger, en se fondant sur le par. 6, que les règles prévues à l'art. 9, par. 5 et 7, s'appliquent à l'audition, dans la mesure où elles sont applicables.

Le droit de la procédure suisse ne prévoit pas l'audition par conférence téléphonique. Ne satisfaisant pas une condition essentielle, la Suisse ne pourra donc pas faire une demande à un pays étranger pour une audition de ce type. Si la Suisse est l'Etat requis, il appartiendra à l'autorité d'entraide judiciaire compétente de décider, en s'appuyant sur l'art. 65 EIMP, quelle suite il y a lieu de donner à la demande.

Art. 11

Transmission spontanée d'informations

Les expériences faites dans l'application de la Convention du 8 novembre 1990 du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime30 (STE No 141) ont montré que, dans la lutte contre la 29

30

Art. 11 de la convention: Journal officiel des Communautés européennes C 197/9 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 11: Journal officiel des Communautés européennes C 379/16 du 29.12.2000.

RS 0.311.53; art. 10

2888

criminalité internationale, l'échange rapide des informations sur les infractions et les lieux où elles ont été commises est indispensable. En effet, dans de tels cas, l'action pénale doit intervenir aussi rapidement que possible. Il peut donc être utile qu'un Etat fasse part à un autre Etat d'informations qu'il a obtenues dans le cadre de ses investigations.

L'art. 11 fait de l'échange d'informations prévu en cas de blanchiment d'argent une règle générale, qui s'applique à tous les types d'infraction. Il donne aux autorités de poursuite pénale la possibilité, à certaines conditions, de transmettre, sans qu'une demande d'entraide judiciaire leur ait été faite, des informations qu'elles ont récoltées au cours d'une de leurs propres enquêtes et qui pourraient intéresser une autorité de poursuite pénale étrangère. L'art. 67a EIMP va dans la même direction.

Le par. 1 décrit les conditions dans lesquelles la transmission spontanée d'informations en dehors d'une procédure d'entraide judiciaire est admissible. Il s'agit d'une disposition potestative. L'échange d'informations se fait selon les règles du droit national des Etats concernés.

Selon le par. 2, l'utilisation des informations fournies peut être soumise à des conditions prévues dans le droit national de la Partie qui les transmet31; si tel est le cas, le par. 3 prévoit que l'autorité destinataire est tenue de respecter ces conditions.

Le par. 4 donne, toutefois, à chaque Etat partie la possibilité de déclarer qu'il se réserve le droit de ne pas se soumettre aux conditions imposées en vertu des dispositions du par. 2 par l'Etat qui fournit l'information, à moins qu'il ne soit avisé au préalable de la nature de l'information et qu'il accepte que cette dernière lui soit transmise. Cette possibilité de réserve tient compte du fait que le droit de procédure de certains Etats ne leur permet pas de respecter des conditions qui seraient liées à la transmission de l'information (par ex. utilisation limitée des informations par la Partie destinataire).

Art. 12

Restitution

La Convention (art. 3) n'autorise la remise d'objets que comme moyen de preuve.

L'art. 12 étend cette possibilité aux objets obtenus par des moyens illicites. Désormais, des objets saisis dans l'Etat requis et provenant d'activités délictueuses pourront être mis à disposition de l'Etat requérant en vue de leur restitution à leur propriétaire légitime. La remise de ces objets présuppose qu'il ait été dûment tenu compte des revendications des personnes ayant acquis de bonne foi des droits de propriété sur les objets saisis. Le terme d'«objet» doit être compris au sens large. Il englobe également les valeurs, par exemple, comme le prévoit l'art. 74a EIMP.

Le par. 1 autorise, mais n'oblige pas, l'Etat requis à donner suite à une demande de restitution. L'Etat requis pourrait, par exemple, refuser de donner suite à une telle demande lorsqu'il a lui-même besoin des objets réclamés comme moyen de preuve dans une procédure interne. Cet article ne vise pas à modifier les dispositions de droit national relatives à la confiscation. Il ne devrait d'ailleurs s'appliquer que dans les cas où il n'y a aucun doute quant à l'identité du propriétaire légitime du bien.

31

Une autorité de poursuite pénale suisse peut, par exemple, exiger que l'autorité étrangère à laquelle elle fournit des informations bancaires ne les utilise que pour présenter une demande d'entraide judiciaire à la Suisse (art. 67a, al. 5 EIMP).

2889

En vertu de l'art. 6, par. 2, de la Convention, l'Etat requis peut renoncer au renvoi des objets qu'il transmet à l'Etat requérant comme moyen de preuve. Cette renonciation peut intervenir avant ou après la remise des objets. Le par. 2 précise la disposition de la Convention en indiquant que l'Etat requis peut faire usage de cette possibilité de renonciation aux fins de la restitution du bien à son propriétaire légitime. Comme dans le cas du par. 1, cela suppose que l'identité du propriétaire légitime du bien ait été clairement établie et que la disposition s'applique sans préjudice des droits des tiers de bonne foi.

Le par. 3 précise que lorsqu'il a renoncé au renvoi des objets avant leur remise à l'Etat requérant, l'Etat requis ne peut faire valoir aucun droit de gage ni aucun autre droit de recours découlant de la législation fiscale ou douanière sur ces objets.

Le par. 4 prévoit, cependant, que l'exercice de la possibilité de renonciation conformément au par. 2 n'empêche pas l'Etat requis de percevoir les taxes ou les droits de douanes qui pourraient lui être dus par le propriétaire légitime.

Les accords bilatéraux conclus avec la France et avec l'Italie contiennent une norme analogue32, qui s'appuie sur une disposition de la Convention de l'UE (art. 8).

Art. 13

Transfèrement temporaire de personnes détenues, sur le territoire de la Partie requise

L'art. 11 de la Convention et l'art. 3 du Deuxième Protocole règlent le cas classique du transfèrement temporaire de détenus: une personne est détenue dans l'Etat requis et doit être temporairement remise à l'Etat requérant pour participer aux actes d'instruction. L'art. 13 traite du cas inverse, où une personne est détenue dans l'Etat requérant et doit être temporairement remise à l'Etat requis. Dans la pratique, ce cas peut se présenter lorsque l'Etat requérant présente une demande d'entraide judiciaire dont l'exécution, pour des raisons tenant au droit de la procédure, nécessite la présence, sur le territoire de l'Etat requis, d'une personne détenue sur le territoire de l'Etat requérant. Lorsque, par exemple, une demande d'entraide judiciaire vise une reconstitution des faits, l'exécution de la demande dans l'Etat requis ne pourra souvent se faire qu'avec le concours d'une personne détenue sur le territoire de l'Etat requérant.

Le par. 1 prévoit que le transfèrement de la personne détenue nécessite un accord entre les autorités compétentes de l'Etat requérant et de l'Etat requis.

Le par. 2 dispose que les autorités concernées doivent se mettre d'accord sur les modalités du transfèrement et sur le moment où la personne sera renvoyée sur le territoire de l'Etat requérant.

Le par. 3 tient compte du fait qu'un Etat peut exiger le consentement de la personne à transférer. Si le droit interne de l'Etat requérant impose que la personne concernée doive donner son consentement, l'original ou la copie de la déclaration de consentement doit être fourni sans tarder à l'Etat requis.

Les par. 4 et 5 contiennent les bases légales nécessaires pour que la personne transférée puisse être maintenue en détention dans l'Etat requis et pour que la période 32

Cf. art. VI de l'Accord complémentaire du 28 octobre 1996 avec la France (RS 0.351.934.92), et art. VIII de l'Accord complémentaire du 10 septembre 1998 avec l'Italie (FF 1999 1412).

2890

passée en détention dans l'Etat requis soit déduite de la période de détention que la personne doit subir dans l'Etat requérant. Cette disposition correspond à la réglementation de l'art. 11, par. 3 de la Convention.

Le par. 7 donne aux Etats la possibilité d'indiquer, par le biais d'une déclaration, dans quelles circonstances ils exigeront le consentement de la personne à transférer.

Pour la Suisse, une déclaration sur ce point n'est pas nécessaire. En effet, en vertu de l'art. 70 EIMP, la Suisse peut en principe transférer à une autorité étrangère des personnes détenues en Suisse, contre leur volonté. Une exception est faite pour les personnes qui ne sont pas inculpées à l'étranger et pour les citoyens suisses. Il est toutefois également possible de renoncer au consentement pour ces deux catégories lorsque la remise est exigée pour l'exécution d'une demande suisse d'entraide judiciaire. Compte tenu de cette situation juridique, il n'est pas nécessaire que la Suisse fasse une déclaration relative à l'art. 13, qui vise précisément à couvrir ce cas.

Cette disposition se retrouve également dans les accords bilatéraux conclus avec la France et l'Italie33. Elle s'inspire des dispositions de la Convention de l'UE (art. 9).

Art. 14

Comparution personnelle de personnes condamnées et transférées

En appliquant la Convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées34 (STE No 112), l'on a constaté qu'aucune de ses dispositions ne couvrait le cas de la personne condamnée purgeant dans son pays d'origine une peine prononcée à l'étranger lorsque s'ouvre dans le pays qui a prononcé la condamnation un procès en révision nécessitant la présence de la personne concernée.

L'art. 14 vise à combler cette lacune. Il prévoit que les dispositions des art. 11 et 12 de la Convention relatives au transfèrement temporaire et à l'immunité s'appliquent par analogie à la comparution personnelle, dans l'Etat ayant prononcé la condamnation, des personnes condamnées et transférées, à des fins de révision du jugement. Il va de soi que dans l'Etat ayant prononcé la condamnation, la personne transférée ne jouit pas de l'immunité pour les faits sur lesquels porte le procès en révision.

L'art. 14 repose sur l'idée que la procédure de révision est avant tout dans l'intérêt de la personne transférée. Il ne devrait donc pas s'appliquer lorsque la personne transférée s'oppose à sa remise à l'Etat ayant prononcé sa condamnation.

Art. 15

Langue des actes de procédure et des décisions judiciaires à remettre

L'art. 15 traite des demandes de notification selon les art. 7 et suivants de la Convention et l'art. 3 du premier Protocole additionnel (non ratifié par la Suisse). Il doit être considéré en relation avec l'art. 16 de la Convention, qui permet à toute Partie d'exiger une traduction des demandes et des pièces annexes. En vertu de la déclaration faite par la Suisse, les demandes d'entraide judiciaire qui lui sont adressées, ainsi que leurs annexes, doivent être traduites dans l'une des trois langues officielles. N'ont en revanche pas besoin d'être traduites les demandes visant la remise de

33

34

Cf. art. XII de l'Accord complémentaire du 28 octobre 1996 avec la France (RS 0.351.934.92) et art. XIV de l'Accord complémentaire du 10 septembre 1998 avec l'Italie (FF 1999 1414).

RS 0.343

2891

citations à comparaître35. D'autres Etats n'ont pas fait de déclaration sur ce point.

L'art. 15 vise à statuer une réglementation uniforme pour des motifs de sécurité du droit. La réglementation proposée tient compte du fait qu'un Etat de droit doit garantir les droits de procédure élémentaires. En fait partie le droit, pour l'accusé, d'être informé dans une langue qu'il comprend de la nature et de la cause des chefs d'inculpation qui pèsent contre lui36.

La réglementation prévue à l'art. 15 vaut pour toutes les demandes de notification et pour toutes les formes de remise (par. 1). Elle doit aussi être considérée en liaison avec la remise postale (art. 16). Le principe est que les documents à remettre (actes de procédure, décisions judiciaires, etc.) le sont toujours dans la langue originale (par. 2). Il est dérogé à ce principe dans les deux cas suivants: ­

L'autorité qui a rédigé le document à remettre doit le traduire, ou du moins en traduire les passages les plus importants, dans une langue que le destinataire comprend, si l'autorité a des raisons de penser que ce destinataire ne connaît que cette autre langue (par. 3).

­

Si la remise se fait par l'intermédiaire des autorités de l'Etat requis, l'autorité qui a établit le document l'accompagnera d'une brève information sur le contenu du document à remettre dans la langue, ou dans l'une des langues, de l'Etat requis (par. 4).

Cette réglementation ne vaut que pour les pièces annexes de la demande (documents à remettre). Pour les demandes de notification proprement dites, l'art. 16 de la Convention, et les déclarations des différents Etats sur cet article, continueront de s'appliquer.

Art. 16

Remise par voie postale

L'objectif de cet article est de simplifier la remise des actes de procédure et des décisions judiciaires à des destinataires qui se trouvent dans un autre pays. En effet, les demandes de notification peuvent être la source d'une forte charge de travail pour les autorités d'entraide judiciaire, d'autant que le temps et le travail nécessaires pour traiter les demandes de notification entrantes et sortantes est souvent hors de proportion avec la gravité des infractions concernées. La réglementation vise donc à éviter aux autorités d'entraide judiciaire de devoir s'occuper d'affaires mineures (par ex. notification d'amendes pour stationnement illégal ou de décisions pour excès de vitesse).

Le par. 1 donne aux autorités de poursuite pénale des Parties la possibilité d'envoyer les actes de procédure et les décisions judiciaires liées à une infraction par voie postale directement à leur destinataire.

Les par. 2 à 4 servent à la protection juridique du destinataire. Ils imposent à l'autorité ayant établi le document les obligations suivantes: ­

35 36

L'autorité qui établit le document à remettre l'accompagne d'une note indiquant où et comment le destinataire peut s'informer de ses droits et de ses devoirs (par. 2).

Déclaration de la Suisse relative à l'art. 16, par. 2, de la convention (RS 0.351.1).

Art. 6, par. 3, let. a, CEDH (RS 0.101).

2892

­

Le destinataire doit en particulier être informé des conséquences que pourrait avoir le non respect du document qui lui est notifié. S'il s'agit d'une convocation en qualité de témoin ou d'expert, la note d'information devrait indiquer si la personne convoquée a droit à une avance pour couvrir ses frais de déplacement et de séjour. Si le destinataire est convoqué en tant qu'accusé, il devrait être informé des conditions dans lesquelles il peut demander l'assistance d'un avocat (par. 3).

­

Si l'autorité émettrice a des raisons de penser que le destinataire, en raison de connaissances linguistique insuffisantes, ne comprendra pas le contenu du document à remettre ni des informations annexes, elle doit faire traduire le contenu essentiel des documents dans la langue que comprend le destinataire (par. 4).

Cette réglementation s'inspire de la Convention de l'UE (art. 5). Pour la Suisse, l'envoi direct de documents par voie postale n'est pas nouveau. Cette possibilité est explicitement prévue par l'EIMP et a été intégrée dans divers accords conclus avec des Etats voisins (cf. ch. 2.3.2 concernant l'art. 16).

Art. 17

Observation transfrontalière

Cet article reprend presque entièrement l'art. 40 de la Convention d'application de l'Accord de Schengen37, en étendant toutefois le champ d'application aux personnes à l'égard desquelles il y a de sérieuses raisons de penser qu'elles peuvent conduire à l'identification ou à la localisation d'une personne recherchée (par. 1). Par ailleurs, le trafic d'étrangers et l'abus sexuel d'enfant ont été rajoutés à la liste des infractions (par. 6).

Par «observation», il faut entendre l'observation secrète d'une personne par des autorités de police pendant une période prolongée, sans qu'un contact ne soit voulu entre la personne observée et les agents observateurs.

Selon le par. 1, les agents d'une des Parties qui, dans le cadre d'une enquête judiciaire, observent dans leur pays une personne présumée avoir participé à un fait punissable pouvant donner lieu à extradition, ou une personne à l'égard de laquelle il y a de sérieuses raisons de penser qu'elle peut conduire à l'identification ou à la localisation de la personne recherchée sont autorisés à continuer cette observation sur le territoire d'une autre Partie, lorsque celle-ci a autorisé l'observation transfrontalière sur la base d'une demande d'entraide judiciaire présentée au préalable.

L'autorisation, qui vaut pour l'ensemble du territoire, peut toutefois être assortie de conditions. Sur demande, l'observation sera confiée aux agents de la Partie sur le territoire de laquelle elle est effectuée.

Lorsqu'en raison de circonstances particulièrement urgentes, l'autorisation de l'autre Partie n'a pas pu être obtenue préalablement, l'observation peut, selon le par. 2, se poursuivre au delà de la frontière, dans certaines conditions: le franchissement de la frontière doit être communiqué immédiatement, pendant l'observation, aux autorités compétentes de l'Etat partie sur le territoire duquel l'observation continue. Une demande motivée doit suivre sans délai. L'observation doit être arrêtée si 37

Convention d'application du 19 juin 1990 de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes: Journal officiel des Communautés européennes No L 239 du 22.9.2000, p. 19.

2893

l'Etat requis rejette la demande ou si l'autorisation n'est pas obtenue cinq heures après le franchissement de la frontière.

L'observation telle que visée au par. 2 n'est toutefois admissible que pour les faits punissables suivants: assassinat, meurtre, viol, incendie volontaire, fausse monnaie, vol et recel aggravés, extorsion, enlèvement et prise d'otage, trafic d'êtres humains, trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, infractions aux dispositions légales en matière d'armes et d'explosifs, destruction par explosifs, transports illicites de déchets toxiques et nuisibles, trafic d'étrangers et abus sexuel d'enfant (par. 6).

Le par. 3 fixe les conditions générales à remplir pour qu'une observation transfrontalière soit admissible. Les agents observateurs doivent se conformer aux dispositions de l'art. 17 et au droit de la Partie sur le territoire de laquelle ils opèrent; ils doivent obtempérer aux injonctions des autorités localement compétentes. Dans les cas non urgents, ils se munissent d'un document attestant que l'Etat requis a donné son accord à l'opération. Ils doivent également être en mesure de justifier de leur qualité officielle. Les agents observateurs peuvent emporter leur arme de service pendant l'observation, sauf décision contraire expresse de l'Etat requis. L'utilisation de l'arme est cependant interdite, sauf en cas de légitime défense. Selon la let. e, les agents observateurs ne peuvent pas entrer dans les domiciles ou les lieux non accessibles au public. Ils ne peuvent ni interpeller, ni arrêter la personne observée. Toute opération doit faire l'objet d'un rapport aux autorités de la Partie sur le territoire de laquelle elle est intervenue; la comparution personnelle des agents observateurs peut être requise. Selon la let. h, les autorités de la Partie dont viennent les agents observateurs apportent, lorsqu'il est demandé par les autorités de la Partie sur le territoire de laquelle l'observation a eu lieu, leur concours à l'enquête consécutive à l'opération à laquelle ils ont participé, y compris aux procédures judiciaires.

La Suisse fera une déclaration relative aux autorités à désigner, comme le prévoit le par. 438.

L'instrument de l'observation transfrontalière ne constitue pas une nouveauté pour la Suisse, puisque des réglementations similaires, allant
même parfois plus loin, sont prévues dans les accords bilatéraux passés avec la France39, l'Autriche et la principauté du Liechtenstein40, ainsi qu'avec l'Allemagne41.

38 39

40

41

Cf. ch. 2.3.1 Art. 7 de l'Accord du 11 mai 1998 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1).

Art. 10 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse, la République d'Autriche et la Principauté du Liechtenstein concernant la coopération transfrontalière des autorités compétentes en matière de sécurité et de douane (RS 0.360.163.1).

Art. 14 et 15 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et judiciaire (Accord entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police; FF 2000 872 ss).

En vigueur depuis le 1.3.2002.

2894

Art. 18

Livraison surveillée

Cet article s'inspire très fortement de l'art. 12 de la Convention de l'UE42. La réglementation prévue reprend celle de la Convention des Nations Unies, du 20 décembre 1988, contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes43 (que la Suisse n'a pas encore ratifiée), qui limite la livraison surveillée aux infractions liées au trafic de stupéfiants. L'art. 18 du Deuxième Protocole va un peu plus loin, puisqu'il autorise la livraison surveillée pour toutes les infractions graves, passibles d'une peine privative de liberté d'un an au moins. La livraison contrôlée présuppose qu'une demande d'entraide judiciaire ait été présentée. Elle ne peut se faire qu'avec l'accord de l'Etat requis, et elle est soumise à la législation de cet Etat.

Pour la Suisse, c'est le droit de procédure cantonal et fédéral qui est déterminant.

Cet article a pour objet de fournir un cadre pour la coopération entre les Parties en ce qui concerne les livraisons surveillées. Il s'agit là d'une technique d'enquête qui s'est révélée très efficace dans la lutte contre le trafic de drogue et d'autres formes graves de criminalité44.

L'expression «livraison surveillée» n'a pas été définie et il convient de l'interpréter conformément à la loi45 et aux pratiques nationales. La disposition s'applique, par exemple, si l'envoi illicite, avec le consentement des Etats parties concernés, a été intercepté et autorisé à poursuivre son acheminement vers un autre Etat, soit avec son contenu initial intact, soit après soustraction ou remplacement de tout ou partie de celui-ci. Cette méthode aide les autorités concernées à découvrir plus rapidement les auteurs d'une infraction.

En vertu du par. 1, chaque Partie est tenue d'adopter les moyens nécessaires pour garantir que, lorsqu'une autre Partie le lui demande, elle puisse permettre qu'une livraison surveillée ait lieu sur son territoire dans le cadre d'une enquête pénale relative à une infraction susceptible de donner lieu à une extradition. Cette disposition n'oblige cependant pas un Etat à approuver une telle livraison surveillée. La décision d'accepter ou de rejeter la demande est laissée à l'appréciation de la Partie requise.

Le par. 2 dispose que c'est la Partie requise qui décide si une livraison surveillée doit ou non avoir lieu sur son territoire. Ces décisions
doivent être prises cas par cas et elles doivent l'être dans les limites des règles pertinentes de l'Etat partie requis.

Les modalités pratiques à suivre pour les livraisons surveillées exigent une consultation et une coopération étroites entre les services et les autorités compétents des Etats parties concernés. Le par. 3 précise que ces livraisons se déroulent conformément aux procédures prévues par l'Etat requis. Il appartient aux autorités compétentes de cet Etat, le cas échéant, d'agir, de prendre les mesures nécessaires et de surveiller leur application.

42

43 44 45

Art. 12 de la convention: Journal des Communautés européennes C 197/9 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 12: Journal des Communautés européennes C 379/17 du 29.12.2000.

FF 1996 I 586 Europol a élaboré un «Manuel de l'Union européenne sur les livraisons surveillées», qui contient des informations quant au déroulement de ces opérations.

Dans le cas d'une livraison surveillée, il s'agit en règle générale de mesures urgentes destinées à récolter ou à préserver des moyens de preuve au sens de l'art. 18 EIMP.

2895

La Suisse fera une déclaration relative aux autorités à désigner, comme le prévoit le par. 446.

Pour la Suisse, la méthode d'investigation dite des livraisons surveillées ne constitue pas une nouveauté, puisque des réglementations analogues se trouvent dans les accords bilatéraux conclus avec l'Allemagne47, ainsi qu'avec l'Autriche et la Principauté du Liechtenstein48.

Art. 19

Enquêtes discrètes

Cet article reprend presque entièrement la réglementation de l'art. 14 de la Convention de l'UE49. Comme il s'agit d'un domaine extrêmement sensible, la disposition a été formulée de manière potestative. L'Etat requis a ainsi la possibilité de rejeter une demande. C'est le droit de l'Etat requis qui est déterminant pour l'autorisation et la conduite de l'enquête discrète. Cet article ne concerne que les enquêtes pénales effectuées par des agents intervenant en secret ou sous une identité fictive. Ces agents sont généralement désignés par le terme d'agents infiltrés. Ils doivent bénéficier d'une formation spéciale et peuvent notamment être infiltrés dans un réseau criminel pour récolter des informations ou pour aider à l'identification et à l'arrestation des membres de ce réseau. Les autres formes d'enquêtes discrètes liées à une infraction ne sont pas visées ici. Une demande d'assistance peut être déposée soit pour permettre à un agent infiltré d'agir sur le territoire de l'Etat requis, soit pour pouvoir faire appel à un agent infiltré de l'Etat requis dans une enquête effectuée sur le territoire de l'Etat requérant. Par ailleurs, il pourrait être demandé à l'Etat requis de mettre à disposition un agent infiltré pour une enquête menée sur son propre territoire.

Formulé de manière souple, le par. 1 précise que les Etats parties requérant et requis doivent se mettre d'accord pour qu'un agent infiltré intervienne dans un cas particulier. Comme cette disposition laisse une grande marge d'appréciation aux Etats concernés, il n'a pas été jugé nécessaire, à la différence de ce qui vaut pour les livraisons surveillées selon l'art. 18, de limiter les enquêtes pour lesquelles l'entraide peut être demandée à celle qui sont liées à des infractions pouvant donner lieu à une extradition.

Conformément au par. 2, c'est aux autorités compétentes de l'Etat requis qu'il appartient de décider de la réponse à donner à une demande relative à une enquête discrète. S'il est fait droit à la demande, le paragraphe exige aussi que les Etats concernés conviennent d'un certain nombre de points, notamment de la durée de l'enquête et de ses modalités précises, dans le respect de leur législation et de leurs procédures nationales.

46 47 48

49

A ce propos, cf. ch. 2.3.1 Art. 19 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 878).

Art. 12 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse, la République d'Autriche et la Principauté du Liechtenstein concernant la coopération transfrontalière des autorités compétentes en matière de sécurité et de douane (RS 0.360.163.1).

Art. 14 de la convention: Journal officiel des communautés européennes C 197/11 du 12.7.2000; rapport explicatif sur l'art. 14: Journal officiel des communautés européennes C 379/19 du 29.12.2000.

2896

Le par. 3 a été libellé en termes généraux pour donner aux Etats parties la souplesse dont il ont besoin en matière d'enquêtes discrètes. Il prévoit que les enquêtes discrètes doivent être menées conformément à la loi et aux procédures de l'Etat sur le territoire duquel l'enquête se déroule. La préparation et la direction de l'enquête ­ y compris les dispositions à prendre pour assurer la sécurité des agents concernés ­ sur lesquelles porte la coopération, doivent être décidées d'un commun accord par les Parties. En Suisse, le droit de procédure de certains cantons fournit une base légale pour des enquêtes discrètes. Une réglementation à l'échelle de la Suisse est prévue dans le projet de loi fédérale sur l'investigation secrète50, dont le Parlement est actuellement saisi.

La Suisse fera une déclaration relative aux autorités à désigner, comme le prévoit le par. 451.

La question des enquêtes discrètes a déjà été réglée dans un accord bilatéral avec l'Allemagne52.

Art. 20

Equipes communes d'enquête

Cet article s'inspire fortement de l'art. 13 de la Convention de l'UE53, le champ d'application étant cependant élargi aux membres détachés de l'équipe (par. 3).

Cette réglementation a été élaborée parce que l'expérience a montré que lorsqu'un Etat enquête sur des infractions qui ont une dimension transfrontalière, la participation d'autorités de poursuite pénale ou d'autres services compétents provenant d'un Etat dans lequel existent des liens avec les infractions en question peut être utile à l'enquête. C'est en particulier le cas pour les enquêtes pénales dans le domaine de la criminalité organisée. L'un des problèmes qui se posaient jusqu'ici concernant les équipes communes était l'absence de bases légales spécifiques permettant à de tels équipe d'être créées et d'agir. Pour combler cette lacune, l'art. 20 fixe les conditions dans lesquelles les équipes communes doivent être créées et la manière dont elles s'acquitteront de leur tâche.

Le par. 1 contient les règles de base relatives à la création d'une équipe commune d'enquête. La création d'une équipe commune doit ainsi toujours reposer sur une demande d'entraide judiciaire, qui peut être présentée par toute Partie. Suite à cette demande, les autorités compétentes des Etats concernés devront se mettre d'accord sur l'objectif et la durée de la mission, ainsi que sur la composition de l'équipe. Aucune limite n'a été fixée quant au nombre d'Etats qui peuvent y participer.

L'intervention de l'équipe commune se limite à un objectif précis, qui consistera à effectuer des enquêtes pénales dans l'un ou plusieurs des Etats parties concernés. En outre, l'accord sur la création de l'équipe commune précise la durée de l'intervention, qui pourra toutefois être prolongée par consentement mutuel. Les noms des personnes qui composeront l'équipe doivent également figurer dans l'accord. Si la 50

51 52 53

Message du Conseil fédéral du 1er juillet 1998 concernant les lois fédérales sur la surveillance de la correspondance postale et des télécommunications et sur l'investigation secrète (FF 1998 3689).

Cf. ch. 2.3.1 Art. 17 et 18 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 877 ss).

Art. 13 de la convention: Journal des Communautés européennes C 197/9 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 13: Journal des Communautés européennes C 379/17 du 29.12.2000.

2897

plupart de ces personnes seront vraisemblablement des agents des services de police, les équipes pourront aussi, dans certains cas, comprendre des procureurs, des juges, ou d'autres personnes. Lorsqu'un accord relatif à la mise en place d'une équipe a été réalisé, l'équipe en question sera créée dans l'Etat où la majeure partie de l'enquête devrait être menée. Les Parties devront aussi tenir compte de la question des frais, y compris des indemnités journalières à verser aux membres de l'équipe.

Le par. 3 dispose que l'équipe d'enquête et ses membres détachés interviendront sous la responsabilité d'un représentant de l'autorité compétente ­ participant aux enquêtes pénales ­ de l'Etat partie sur le territoire duquel l'équipe intervient. Cela signifie, en particulier, que la responsabilité de l'équipe peut changer, selon l'objectif spécifique, si l'équipe effectue des enquêtes dans plusieurs pays. Le responsable de l'équipe agit dans les limites que lui fixe le droit national (let. a). En outre, l'équipe est tenue de respecter pleinement le droit de la Partie dans laquelle elle intervient. Le responsable donnera des instructions aux autres membres de l'équipe, qui les exécuteront en tenant compte des conditions dans lesquelles l'équipe a été créée (let. b).

Le par. 4 donne une définition de l'équipe commune et des membres détachés. Selon le par. 5, les membres d'une équipe commune qui n'interviennent pas dans leur propre Etat (membres détachés) sont autorisés à être présents lorsque des mesures d'enquête sont prises dans l'Etat d'intervention. Toutefois, le responsable de l'équipe peut, pour des raisons particulières, en décider autrement, dans le respect du droit de l'Etat sur le territoire duquel l'équipe intervient. Dans ce contexte, l'expression «raisons particulières» n'a pas été définie, mais elle peut être interprétée comme incluant, par exemple, des cas où il s'agit de recueillir des témoignages dans des affaires concernant des crimes sexuels, en particulier lorsque les victimes sont des enfants. Une décision visant à exclure la présence d'un membre détaché ne peut en aucun cas être fondée sur le seul fait qu'il est étranger. Dans certains cas, des raisons d'ordre opérationnel peuvent fonder de telles décisions.

Le par. 6 permet aux membres détachés d'exécuter des mesures d'enquête dans
l'Etat d'intervention, conformément au droit national de ce dernier, sur instruction du responsable de l'équipe et avec le consentement des autorités compétentes de l'Etat d'intervention et de l'Etat qui a procédé au détachement. Ce consentement peut figurer dans l'accord portant création de l'équipe ou être donné ultérieurement.

Il peut aussi s'appliquer d'une manière générale ou être limité à des cas ou des circonstances particuliers.

Le par. 7 introduit une innovation importante. Cette disposition a pour effet de permettre à un membre détaché de demander aux autorités compétentes de son pays de prendre des mesures que l'équipe commune juge nécessaires. En pareil cas, il ne sera pas nécessaire que l'Etat d'intervention présente une demande formelle d'entraide. Les mesures exigées seront considérées par l'Etat concerné comme si la demande en avait été faite conformément aux conditions qui prévalent pour une enquête nationale.

Le par. 8 couvre le cas où l'enquête requiert l'aide d'un Etat partie n'ayant pas participé à la création de l'équipe ou d'un Etat tiers. Dans de telles circonstances, l'Etat d'intervention présentera une demande d'entraide selon les procédures habituelles.

2898

Le par. 9 facilite le travail des équipes communes d'enquête en offrant à un membre détaché la possibilité de mettre à la disposition de l'équipe commune des informations qui sont disponibles dans son pays et qui sont utiles pour les enquêtes menées par l'équipe. Un tel échange d'information ne sera toutefois possible que si le droit national du membre détaché le permet et dans les limites des compétences de ce membre.

Le par. 10 définit les conditions applicables à l'utilisation des informations obtenues de manière régulière par un membre ou un membre détaché d'une équipe commune d'enquête, lorsque ces informations ne pourraient pas être obtenues d'une autre manière par les autorités compétentes des Etats parties concernés. Les possibilités sont toutefois limitées. Ces informations ne peuvent être utilisées qu'aux fins pour lesquelles l'équipe a été créée (let. a), ou pour détecter, enquêter sur et poursuivre d'autres infractions pénales, sous réserve du consentement de la Partie où l'information a été obtenue. Ce consentement ne peut être refusé que dans les cas où une telle utilisation représenterait un danger pour les enquêtes pénales menées dans la Partie concernée, ou pour lesquels cette Partie pourrait refuser l'entraide (let. b). Les informations peuvent également être utilisées pour prévenir un danger immédiat et sérieux pour la sécurité publique et sans préjudice des dispositions de la let. b si, par la suite, une enquête pénale est ouverte (let. c). L'utilisation à d'autres fins est possible, pour autant que les Parties qui ont créé l'équipe commune d'enquête en ait convenu ainsi (let. d).

Le par. 12 donne aux Etats parties qui ont créé une équipe commune d'enquête la possibilité de convenir que des personnes qui ne sont pas des représentants de leurs autorités compétentes peuvent prendre part aux activités de l'équipe. Il est, par exemple, envisageable que des personnes issues d'autres Etats ou d'organisations internationales (Interpol, Europol) puissent venir fournir à une équipe commune une aide et des connaissances supplémentaires. Les personnes autorisées à participer à une équipe d'enquête au titre du par. 12 auront essentiellement un rôle d'appui ou un rôle consultatif et elle ne sont pas autorisées à exercer les fonctions auxquelles sont habilités les membres ou les membres détachés de l'équipe, ni à utiliser les informations visées au par. 10, sauf si l'accord conclu entre les Etats concernés le permet.

Art. 21

Responsabilité pénale en ce qui concerne les fonctionnaires

Cet article s'inspire fortement de l'art. 15 de la Convention de l'UE54. Il prévoit que les fonctionnaires d'un Etat autre que l'Etat d'intervention sont assujettis aux dispositions pénales de ce dernier en ce qui concerne les infractions dont ils seraient victimes ou qu'ils commettraient, à moins qu'il n'en soit convenu autrement entre les Etats concernés. La réglementation vaut pour les observations transfrontalières, les livraisons surveillées, les enquêtes discrètes et les équipes communes d'enquête.

54

Art. 15 de la convention: Journal des Communautés européennes C 197/11 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 15: Journal des Communautés européennes C 379/19 du 29.12.2000.

2899

Art. 22

Responsabilité civile en ce qui concerne les fonctionnaires

Cet article est calqué sur l'art. 16 de la Convention de l'UE55. Son objectif est une réglementation couvrant les prétentions de droit civil auxquelles pourraient donner lieu les missions effectuées par des fonctionnaires d'un Etat partie sur le territoire d'un autre Etat partie, dans le cadre des dispositions sur l'observation transfrontalière, la livraison surveillée, les enquêtes discrètes ou les équipes communes d'enquête. Selon la règle de base applicable, et à moins que les Parties n'en conviennent autrement, un Etat partie est responsable de tout dommage causé par ses fonctionnaires lors des missions en question. Toutefois, l'Etat partie sur le territoire duquel le dommage a été causé est tenu, en premier lieu, de réparer ce dommage de la même manière que s'il avait été causé par ses propres fonctionnaires. En pareil cas, l'autre Etat doit rembourser intégralement toute indemnisation versée aux victimes du dommage ou à leurs ayants droits. Sous réserve de ce remboursement et de tout droit qu'il pourrait faire valoir à l'égard de tiers, l'Etat partie sur le territoire duquel le dommage a été causé ne peut réclamer aucun autre remboursement.

Art. 23

Protection des témoins

Cette disposition permet à un Etat d'exiger des mesures de protection particulières pour une personne exposée à des actes d'intimidation ­ ou risquant de l'être ­ dans le cadre d'une procédure pénale. Selon la volonté des rédacteurs du Deuxième Protocole, cet article n'oblige pas l'Etat requis à prendre des mesures concrètes ou à légiférer. Il incite plutôt les Etats concernés à convenir de mesures propres à assurer la sécurité de la personne menacée. Le terme de «témoin» doit être compris au sens large, conformément à la recommandation du Conseil de l'Europe sur l'intimidation des témoins et les droits de la défense56, et peut ainsi englober les experts et les interprètes. La disposition s'applique donc à toute personne qui dispose d'informations en rapport avec une affaires pénale.

Selon cette disposition, lorsqu'une demande d'entraide judiciaire est présentée, sur la base de la Convention ou de l'un de ses Protocoles additionnels, concernant un témoin, un expert ou un interprète, les autorités compétentes de l'Etat requérant et de l'Etat requis doivent convenir de mesures visant à protéger la personne concernée, lorsque cette personne risque d'être exposée à des menaces ou nécessite une protection. Les menaces doivent être de nature à diminuer la capacité de la personne concernée à transmettre sans influence extérieure les informations dont elle dispose.

Les mesures à adopter doivent être conformes au droit national des deux Etats parties concernés.

L'application de cette disposition présuppose qu'une demande soit présentée et que les deux Etats concernés s'entendent sur les mesures de protection nécessaires.

55

56

Art. 16 de la convention: Journal des Communautés européennes C 197/11 du 12.7.2000; Rapport explicatif sur l'art. 16: Journal des Communautés européennes C 379/19 du 29.12.2000.

Recommandation R (97) 13 sur l'intimidation des témoins et les droits de la défense.

2900

Art. 24

Mesures provisoires

En vertu de cet article, l'Etat requis peut, en conformité avec sa loi nationale et sur demande de l'Etat requérant, ordonner des mesures provisoires en vue de préserver des moyens de preuve, de maintenir une situation existante ou de protéger des intérêts juridiques menacés (par ex. blocage d'un compte bancaire). La Partie requise peut faire droit à la demande partiellement ou assortir son accord de conditions (par ex. limitation dans le temps des mesures prises). Pour la Suisse, la base légale interne permettant de prendre de telles mesures se trouve à l'art. 18 EIMP.

Selon le par. 1, les mesures provisoires qui sont ordonnées doivent être conformes au droit national de l'Etat requis. Si la Suisse est l'Etat requis, les mesures provisoires exigées dans le cadre d'une procédure pénale étrangère peuvent être ordonnées si aucun motif essentiel (par ex. absence de double incrimination) ne s'oppose à une telle coopération.

Le par. 2 règle les modalités. L'Etat requis peut n'ordonner les mesures provisoires que partiellement, ou les assortir de conditions.

Art. 26

Protection des données

Comme le Deuxième Protocole additionnel prévoit toute une série de mesures de police, une attention particulière se devait d'être accordée à la réglementation des questions de protection des données qui y sont liées.

L'art. 26 s'applique aux données à caractère personnel transmises sur la base de la Convention ou de l'un de ses Protocoles. L'expression «données à caractère personnel» est à prendre au sens qui lui est donné dans la Convention du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel57. Selon l'art. 2, let. a, de cette Convention, l'expression en question signifie toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable («personne concernée»). Cette définition vaut quelle que soit la manière dont les données à caractère personnel sont conservées ou traitées. Il s'ensuit que l'art. 26 s'applique à toutes ces données, qu'elle fassent ou non l'objet d'un traitement automatisé. On entend par «personne identifiable» une personne pouvant être identifiée, directement ou indirectement, notamment au moyen d'un numéro d'identification ou d'un ou de plusieurs éléments spécifiques qui sont l'expression de l'identité physique, mentale, économique, culturelle ou sociale de cette personne.

Dans le même temps, l'art. 26 n'affecte en aucune manière les obligations des Etats membres au titre de la Convention de 1981. Ainsi, selon l'art. 5 de cette Convention, les Parties doivent prendre, dans leur droit interne, les mesures nécessaires pour que les données à caractère personnel faisant l'objet d'un traitement automatisé soient obtenues et traitées loyalement et licitement, soient enregistrées pour des finalités déterminées et légitimes et ne soient pas utilisées de manière incompatible avec ces finalités. De plus, les données doivent être exactes et si nécessaire mises à jour, et doivent être conservées sous une forme permettant l'identification des personnes concernées pendant une durée n'excédant pas celle nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont enregistrées.

57

RS 0.235.1

2901

Le par. 1, let. a à c, précise dans quelles conditions des données à caractère personnel en rapport avec l'exécution d'une demande d'entraide judiciaire peuvent être utilisées par l'Etat partie auquel elles ont été transmises sans l'accord préalable de l'Etat partie qui les a transmises: La let. a vise l'utilisation aux fins des procédures auxquelles s'appliquent la Convention ou l'un de ses Protocoles.

La let. b autorise une utilisation aux fins d'autres procédures judiciaires ou administratives directement liées aux procédures visées à la let. a. Les termes «directement liées» peuvent recouvrir notamment le cas d'une procédure de retrait de l'autorité parentale liée à une procédure pénale pour de mauvais traitements à un enfant, ou encore une procédure d'indemnisation pour la victime d'une infraction qui fait valoir ses prétentions financières par la voie civile. Pour s'assurer que les données transmises par la Suisse ne puissent pas être utilisées dans des procédures visant des affaires de soustraction fiscale, le Conseil fédéral entend faire usage de la possibilité donnée au par. 5 de faire une déclaration58.

La let. c vise la prévention d'un danger immédiat et sérieux pour la sécurité publique.

Pour tout autre usage des données à caractère personnel, le par. 2 exige le consentement préalable soit de l'Etat qui les a transmises, soit de la personne concernée.

Le par. 3 donne à chaque Etat partie la possibilité, à certaines conditions, de refuser de transmettre des données obtenues en conséquence de l'exécution d'une demande faite au titre de la Convention ou de l'un de ses Protocoles. Un tel refus est possible lorsque les données sont protégées au titre de la loi nationale et que la Partie à laquelle elle devraient être transmises n'est pas liée par la Convention du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, sauf si cette dernière Partie s'engage à accorder aux données la même protection que celle qui leur est accordée par l'Etat qui doit les transmettre.

Selon le par. 4, enfin, toute Partie qui transmet des données obtenues en exécution d'une demande faite au titre de la Convention ou de l'un de ses Protocoles peut exiger de la Partie à laquelle les données sont transmises d'être informé de l'utilisation qui en
a été faite.

Concernant le par. 5, la Suisse fera une déclaration qui précise le champ d'application de cette disposition. Cette déclaration vise à empêcher que des données à caractère personnel provenant de Suisse puissent être utilisées dans le cadre d'une procédure ouverte à l'étranger pour soustraction fiscale.

Art. 28

Rapports avec d'autres traités

Cette disposition a pour objectif d'harmoniser les différents accords existant dans le domaine de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale. Elle indique ainsi que les dispositions du Deuxième Protocole ne font pas obstacle aux règles plus détaillées contenues dans les accords bilatéraux ou multilatéraux conclus entre des Parties, pour autant que ces accords visent à compléter les dispositions de la Convention ou du Deuxième Protocole, ou à faciliter l'application des principes qu'ils 58

Cf. ch. 2.3.1

2902

contiennent. Les accords bilatéraux que la Suisse a conclus avec les Etats voisins (France, Allemagne, Autriche et Principauté du Liechtenstein, Italie) dans les domaines de l'entraide judiciaire en matière pénale et de la coopération en matière policière et judiciaire visent exactement ce but. Leur maintien en vigueur n'est donc pas remis en question.

L'art. 30 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités59, qui règle l'application de traités successifs portant sur la même matière, va dans la même direction. Le par. 3 de cet article prévoit que lorsque toutes les Parties à un traité antérieur sont également Parties au traité postérieur, sans que le traité antérieur ait pris fin ou que son application ait été suspendue, le traité antérieur (en l'espèce: les accords bilatéraux conclus avec les Etats voisins) ne s'applique que dans la mesure où ses dispositions sont compatibles avec celles du traité postérieur (en l'espèce le Deuxième Protocole). Toute norme conventionnelle doit être appliquée dans le cas d'espèce selon le principe de la bonne foi. C'est là le corollaire du principe «pacta sunt servanda» (art. 26)60. Cette disposition est importante pour les accords bilatéraux et le Deuxième Protocole additionnel dans la mesure où ces textes couvrent parfois les mêmes thèmes. Du point de vue de la Suisse, l'entrée en vigueur du Deuxième Protocole additionnel ne devrait aucunement limiter l'application des traités bilatéraux conclus avec les Etats voisins, traités qui garderont toute leur validité. On peut même supposer que la marge de manoeuvre que ménage le Deuxième Protocole permettra de tirer parti de l'ensemble des possibilités de coopération policière et judiciaire qu'offrent ces traités.

2.2.3 Art. 30 à 35

Chapitre III Clauses finales

Les art. 30 à 35 se basent à la fois sur les «Clauses finales types pour les conventions et accords conclus au sein du Conseil de l'Europe»61 et sur les clauses finales de la Convention de 1959.

Tout comme la Convention elle même, le Deuxième Protocole est ouvert à la signature pour les Etats non membres du Conseil de l'Europe. Un Etat ne peut toutefois adhérer au Deuxième Protocole que s'il est Partie à la Convention (art. 31, par. 1).

L'art. 33 a trait aux réserves en vigueur ou nouvelles. Les réserves et les déclarations portant sur des dispositions de la Convention ou du premier Protocole additionnel restent valables, à moins qu'elles ne soient retirées (Abs. 1). Pour le Deuxième Protocole, les réserves ne peuvent porter que sur les art. 16, 17, 18, 19, et 20 (par. 2).

59 60 61

RS 0.111 Robert Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, Berne 1999, p. 58 s.

Cf. «Rapport explicatif relatif au Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale», ch. 203: http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Cadreprincipal.htm.

2903

Tout Etat partie peut, en tout temps, dénoncer le Deuxième Protocole par notification adressée au Secrétaire général du Conseil de l'Europe (art. 34, par. 1). La dénonciation de la Convention entraîne automatiquement la dénonciation du Deuxième Protocole (art. 34, par. 3).

2.3

Arrêté fédéral relatif au Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale

Le Deuxième Protocole prévoit qu'un Etat partie peut formuler différentes déclarations et réserves au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion.

2.3.1

Déclarations relatives au Deuxième Protocole

Le Conseil fédéral compte, au moment du dépôt de l'instrument de ratification, faire sept déclarations relatives au Deuxième Protocole. Ces déclarations visent à faciliter l'application des dispositions sur l'entraide judiciaire et à déterminer le cadre de la coopération.

I. Art. 4, par. 8 (Voies de communication) Conformément à la déclaration relative à la Convention62, l'Office fédéral de la justice est l'autorité centrale compétente pour recevoir les demandes d'entraide judiciaire émanant de l'étranger et pour transmettre celles de la Suisse, selon l'art. 4, par. 1 et 4, pour recevoir et transmettre les demandes de transfèrement temporaire de personnes détenues selon l'art. 4, par. 2, ainsi que pour présenter et recevoir les demandes d'extraits du casier judiciaire, selon l'art. 4, par. 5. Lorsqu'en cas d'urgence, une demande prévue à l'art. 4 est présentée directement à l'autorité compétente de l'Etat requis, une copie de la demande et de la réponse doit être adressée à l'Office fédéral de la justice.

II. Art. 6 (Autorités judiciaires) Conformément à la déclaration relative à la Convention63, sont considérées comme autorités judiciaires suisses aux fins de la Convention les tribunaux, leurs cours, chambres ou sections, le Ministère public de la Confédération, l'Office fédéral de la justice, ainsi que les autorités habilitées par le droit cantonal ou fédéral à instruire des affaires pénales, à décerner des mandats de répression et à prendre des décisions dans une procédure liée à une cause pénale.

III. Art. 17, par. 4 (Observation transfrontalière) Sont déclarés compétents pour exécuter les demandes au titre de l'art. 17 l'Office fédéral de la police et les commandements de la police des cantons.

62 63

Déclaration de la Suisse concernant l'art. 11, par. 3, 13, par. 1 et l'art. 15, par. 1 et 3 de la convention (RS 0.351.1).

Déclaration de la Suisse concernant l'art. 1 de la convention (RS 0.351.1).

2904

Les demandes présentées à la Suisse au titre de l'art. 17, par. 1 et 2, doivent être adressées aux autorités de poursuite pénale de la Confédération ou aux autorités de poursuite pénale du canton sur le territoire duquel interviendra probablement le franchissement de la frontière.

En cas de doute, les demandes faites au titre de l'art. 17, par 1, doivent être adressées à l'Office fédéral de la justice et les demandes faites au titre de l'art. 17, par. 2, à l'Office fédéral de la police.

IV. Art. 18, par. 4 (Livraison surveillée) Les demandes faites au titre de l'art. 18 doivent être adressées aux autorités de poursuite pénale de la Confédération ou aux autorités de poursuite pénale du canton sur le territoire duquel le transport commence.

En cas de doute, ces demandes peuvent être adressées à l'Office fédéral de la justice.

V. Art. 19, par. 4 (Enquêtes discrètes) Sont déclarés compétents pour exécuter les demandes au titre de l'art. 19 le Ministère public de la Confédération et le juge d'instruction fédéral64 ainsi que les autorités de poursuite pénale du canton sur le territoire duquel l'enquête transfrontalière commence.

VI. Art. 26, par. 5 (Protection des données) La Suisse exige que les données à caractère personnel qu'elle a transmises à une autre Partie aux fins citées au par. 1, let. a et b, ne puissent être utilisées sans le consentement de la personne concernée qu'avec l'accord de l'Office fédéral de la justice aux fins d'une procédure pour laquelle la Suisse aurait pu, selon les termes de la Convention, refuser de communiquer ces données ou restreindre leur utilisation65.

VII. Art. 27 (Autorités administratives) Sont désignés comme autorités administratives suisses au sens de l'art. 1, par. 3, de la Convention, les services administratifs de la Confédération et des cantons qui, en vertu du droit fédéral ou cantonal, peuvent poursuivre des infractions et qui sont habilités, lorsque l'enquête est terminée, à demander l'ouverture d'une procédure judiciaire pouvant déboucher sur une condamnation pénale.

64 65

Cf. art. 10 du projet de loi fédérale sur l'investigation secrète (FF 1998 3767).

Cf. art. 12, par. 3, let. b, de la Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (RS 0.235.1).

2905

2.3.2

Réserves relatives au Deuxième Protocole additionnel

Le Conseil fédéral n'entend faire de réserves pour aucun article où une réserve est possible (art. 16 à 20).

I. Art. 16 (Remise par voie postale) Des réglementations de ce type existent déjà dans les accords bilatéraux conclus avec la France66, l'Italie67 et l'Allemagne68. L'art. 68 EIMP, en relation avec l'art. 30 de l'ordonnance d'application69 (OEIMP) vont dans la même direction. Ces dispositions prévoient expressément la notification par voie postale.

II. Art. 17 (Observation transfrontalière) La réglementation de l'observation transfrontalière est conçue de manière à laisser une grande marge de manoeuvre aux Parties. L'application de cette mesure doit se faire dans le respect exclusif du droit de l'Etat requis. Ce renvoi au droit interne permet de garantir que le législateur ne soit pas lié dans ce domaine.

L'art. 17 du Deuxième Protocole prévoit que pour l'observation transfrontalière, une demande d'entraide judiciaire doit être présentée. Cette disposition doit garantir que des agents étrangers n'exécutent pas, sur le territoire suisse et sans le consentement des autorités conduisant la procédure, des actes officiels relevant de la compétence exclusive des autorités de poursuite pénale suisses. Dans des cas d'urgence, l'observation peut être poursuivie sur le territoire d'un autre Etat sans qu'une demande d'entraide judiciaire ait été présentée au préalable; mais une telle demande devra être transmise, après coup, sans délai. L'autorisation accordée par les autorités fédérales ou par une autorité cantonale peut être assortie de conditions. Cette disposition permet à la Suisse de limiter, par exemple, l'observation dans le temps et de ne permettre sa poursuite, passé ce délai, que si l'instance judiciaire cantonale ou fédérale compétente l'autorise. Ainsi, la réglementation prévue à l'art. 17 laisse à la Suisse une marge de manoeuvre suffisante et ne va pas à l'encontre de l'avant-projet de code de procédure pénale suisse.

66 67

68

69

Art. X de l'Accord du 28 octobre 1996 entre la Suisse et la France en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (RS 0.351.934.92).

Art. XII de l'Accord du 10 septembre 1998 entre la Suisse et l'Italie en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et d'en faciliter l'application (FF 1999 1414).

Art. 1 de l'Accord du 8 juillet 1999 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne relatif à la modification de l'Accord conclu le 13 novembre 1969 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne en vue de compléter la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et de faciliter son application (FF 2000 893).

RS 351.11

2906

De plus, les accords bilatéraux conclus avec l'Allemagne70 ainsi qu'avec l'Autriche et la Principauté du Liechtenstein71 contiennent des réglementations sur l'observation transfrontalière qui vont parfois plus loin. Une disposition relative à l'observation transfrontalière a également été intégrée dans l'accord de coopération policière et judiciaire passé avec la France72.

III. Art. 18 (Livraison surveillée) La décision de recourir à des livraisons surveillées est prise dans chaque cas d'espèce par la Partie requise, dans le respect du droit national. C'est également le droit de la Partie requise qui détermine les procédures. L'application de cette mesure doit se faire dans le respect exclusif du droit de l'Etat requis. Ce garde-fou laisse à la Suisse une marge de manoeuvre suffisante pour exécuter de telles demandes. De plus, des réglementations correspondantes existent déjà dans les accords bilatéraux conclus avec l'Allemagne73, ainsi qu'avec l'Autriche et la Principauté du Liechtenstein74.

IV. Art. 19 (Enquêtes discrètes) La réglementation sur les enquêtes discrète est formulée de manière potestative, et l'application d'une telle mesure nécessite un accord entre les Parties concernées. Par ailleurs, pour l'application, seul le droit de la Partie requise est déterminant. En réservant l'application du droit national, le Deuxième Protocole laisse toute latitude au Parlement pour la mise au point de la loi sur l'investigation secrète. De plus, une réglementation correspondante existe déjà dans le traité bilatéral conclu avec l'Allemagne75.

V. Art. 20 (Equipes communes d'enquête) La réglementation sur les équipes communes d'enquête est, elle aussi, formulée de manière potestative. Une équipe d'enquête commune ne peut être constituée et agir que si les Parties concernées sont parvenues à un accord. De plus, les enquêtes sont menées conformément au droit national de l'Etat sur le territoire duquel elles se déroulent. Ces conditions très strictes offrent une garantie suffisante que, le cas échéant, les dispositions juridiques suisses s'appliqueront. Il n'est donc pas nécessaire pour la Suisse de formuler une réserve à cet égard. De plus, des réglementa-

70 71

72

73 74

75

Art. 14 et 15 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 872 ss). En vigueur depuis le 1.3.2002.

Art. 10 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse, la République d'Autriche et la Principauté du Liechtenstein concernant la coopération transfrontalière des autorités compétentes en matière de sécurité et de douane (RS 0.360.163.1).

Art. 7 de l'Accord du 11 mai 1998 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1).

Art. 19 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 878).

Art. 12 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse, la République d'Autriche et la Principauté du Liechtenstein concernant la coopération transfrontalière des autorités compétentes en matière de sécurité et de douane (RS 0.360.163.1).

Art. 17 et 18 de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 877 ss).

2907

tions correspondantes existent déjà dans des accords bilatéraux conclus avec l'Allemagne76, ainsi qu'avec l'Autriche et la Principauté du Liechtenstein77.

3

Conséquences

3.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel pour la Confédération et les cantons

Le Deuxième Protocole additionnel n'induit pour la Suisse aucune obligation en matière d'entraide judiciaire, qui aille au-delà de ce qu'impose la loi sur l'entraide judiciaire en matière pénale et les conventions bilatérales conclues avec les Etats voisins. Quantitativement parlant, le nouvel instrument ne devrait donc pas entraîner un accroissement du volume de travail. D'un point de vue qualitatif, en revanche, on ne saurait exclure que les mesures prévues au titre de l'entraide judiciaire (audition par vidéoconférence et par conférence téléphonique, observation transfrontalière, livraison surveillée, enquêtes discrètes, équipes communes d'enquête, etc.) se traduisent par une charge de travail supplémentaire. La mise en oeuvre de ces mesures, pourrait, dans certains cas, prendre passablement de temps et se révéler onéreuse.

Cette remarque vaut tout particulièrement pour les cas d'entraide judiciaire qui relèvent de la compétence de la Confédération. Dans l'état actuel des choses, il est encore impossible d'évaluer quelles incidences l'exécution des demandes d'entraide au titre du Deuxième Protocole additionnel aura sur les finances de la Confédération et des cantons. Ces incidences dépendront dans une large mesure du nombre et de l'ampleur desdites demandes ainsi que du genre et de la durée des mesures d'entraide requises.

3.2

Incidences en matière d'informatique

L'adhésion de la Suisse au Deuxième Protocole additionnel n'aura, vraisemblablement, aucune incidence en matière d'informatique.

3.3

Conséquences pour l'économie

L'adhésion de la Suisse au Deuxième Protocole additionnel ne devrait avoir aucune conséquence pour l'économie.

76 77

Art. 20 ss de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Suisse et l'Allemagne en matière de police (FF 2000 879 ss).

Art. 13 ss de l'Accord du 27 avril 1999 entre la Confédération suisse, la République d'Autriche et la Principauté du Liechtenstein concernant la coopération transfrontalière des autorités compétentes en matière de sécurité et de douane (RS 0.360.163.1).

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4

Programme de la législature

Le Deuxième Protocole additionnel est mentionné dans le rapport du 1er mars 2000 sur le programme de la législature 1999­200378 au titre de l'objectif 4: mise en oeuvre de la nouvelle politique de sécurité dite «de la sécurité par la coopération» (R 9 Intensification de la coopération avec la justice et la police des autres pays: condition de la sûreté intérieure) comme nouvel instrument d'entraide judiciaire.

5

Relation avec le droit européen

Le Deuxième Protocole additionnel s'inscrit dans la lignée des nouveaux instruments normatifs qui ont été adoptés en Europe. Il s'inspire nettement de la Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne. Il reprend également, en partie, des dispositions de la Convention d'application de l'Accord de Schengen, du 19 juin 1990.

Le Deuxième Protocole additionnel vise à améliorer la coopération entre les Etats parties en complétant et en actualisant les dispositions existant en matière d'entraide judiciaire. Ce nouveau Protocole est également censé permettre d'intensifier, au plan international, la lutte contre la criminalité. Instrument important du Conseil de l'Europe, il constitue ­ conjointement avec la nouvelle Convention conclue dans le cadre de l'UE ­ une base juridique moderne pour la coopération internationale en matière pénale.

6

Constitutionnalité

En vertu de l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.), les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération, le corollaire de cette compétence étant que le Conseil fédéral signe les traités internationaux et les soumet à l'approbation de l'Assemblée fédérale (art. 184, al. 2, Cst.). La compétence qu'a l'Assemblée fédérale d'approuver les traités internationaux est fondée sur l'art. 166, al. 2, Cst.

En vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum facultatif lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et qu'ils ne peuvent pas être dénoncés, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou entraînent une unification multilatérale du droit. Le Deuxième Protocole additionnel peut être dénoncé (art. 34) et n'implique pas l'adhésion à une organisation internationale.

Il reste donc simplement à déterminer si la ratification du Deuxième Protocole entraîne une unification multilatérale du droit. Selon la pratique constante du Conseil fédéral, seuls sont impérativement soumis au référendum facultatif les traités qui contiennent du droit uniforme directement applicable (self-executing) pour l'essentiel, réglant en détail un domaine juridique bien défini, autrement dit suffisamment important pour justifier, sur le plan national, la rédaction d'une loi distincte79. Le Parlement a précisé la pratique du Conseil fédéral et décidé que dans certains cas ­ 78 79

FF 2000 2179 s FF 1988 II 894, 1990 III 904, 1992 III 319

2909

en raison de l'importance ou de la nature des dispositions ou parce qu'il est prévu de créer des organes de contrôle internationaux ­ il peut y avoir unification multilatérale du droit même lorsque les normes internationales correspondantes sont peu nombreuses80. La notion d'unification du droit ne peut s'appliquer à des dispositions isolées que lorsque celles-ci présentent une importance fondamentale81.

Le Deuxième Protocole additionnel contient principalement des normes de nature formelle ou procédurale qui complètent la Convention de base de 1959 et ne représentent pas une nouveauté pour la Suisse. Ces dispositions n'entraînent pas une unification multilatérale du droit et ne sont pas directement applicables. L'art. 9, en revanche, contient du droit uniforme concernant l'audition par vidéoconférence qui sera directement applicable dans les Etats parties. Cette disposition oblige l'Etat requis à auditionner des témoins ou des experts dans le cadre d'une vidéoconférence selon le droit et sous la direction de l'Etat requérant. Le droit national permet déjà actuellement par la voie de l'entraide judiciaire, d'auditionner des témoins ou des experts selon le droit étranger et en présence de personnes qui participent à la procédure étrangère (art. 65, al. 1 et 2; art. 65a, al. 1 et 2, EIMP). La réglementation dans le Deuxième Protocole additionnel aura cependant pour conséquence qu'en utilisant cette nouvelle méthode d'audition, c'est l'Etat requérant qui sera maître du dossier. De plus, le témoin ou l'expert sera obligé de se présenter à la vidéoconférence, au cas où son audition est inopportune ou impossible dans l'Etat requérant.

Selon le droit actuel, une personne est libre de se présenter devant l'autorité requérante pour être auditionnée (art. 69, al. 1, EIMP). Etant donné que la disposition du Deuxième Protocole additionnel complète le droit national sur un point fondamental et peut être qualifiée de «self-executing», on peut admettre que le Deuxième Protocole additionnel entraîne dans ce domaine une unification multilatérale du droit au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

Pour ces raisons, l'arrêté fédéral portant approbation du Deuxième Protocole additionnel est sujet au référendum facultatif en matière de traités internationaux.

80 81

FF 1990 III 904 (avec références) FF 2001 6005

2910