00.461 Initiative parlementaire Révision de la législation régissant les fondations Rapport de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats du 23 octobre 2003

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 21quater, al. 3, de la loi sur les rapports entre les conseils (LREC), la commission vous soumet le présent rapport qu'elle transmet simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet de loi ci-joint.

23 octobre 2003

Pour la commission: Le président, Fritz Schiesser

2003-2502

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Condensé Le présent projet de loi a pour but de libéraliser le droit suisse des fondations afin d'encourager la constitution de fondations. En effet, celles-ci peuvent compléter et soutenir l'action de l'Etat. La culture, la formation, la recherche et les sciences ainsi que l'aide sociale pourraient également bénéficier de l'aide supplémentaire apportée par un plus grand nombre de fondations. Il est incontestable que la Suisse compte déjà de nombreuses fondations. Cela étant, en permettant de mieux tenir compte des intérêts des fondateurs, les mesures proposées par le projet de loi vise à inciter un plus grand nombre de personnes à renoncer à une partie de leur fortune.

La révision de la législation sur les fondations touche trois domaines: ­

la possibilité de modifier le but de la fondation,

­

l'introduction de l'obligation pour les fondations de désigner un organe de révision,

­

l'élévation du plafond des déductions fiscales.

L'introduction d'une possibilité pour le fondateur de se réserver le droit de modifier le but de sa fondation dans l'acte de fondation permet d'assouplir les conditions de modification du but. Les intérêts d'un fondateur peuvent évoluer ou de nouveaux besoins plus importants peuvent apparaître au cours des années. Cette réserve permet au fondateur de tenir compte de ces changements. Les délais à respecter entre chaque modification (10 ans) permettent malgré tout de protéger les intérêts des destinataires.

Le contrôle des fondations et la transparence qui en découle peuvent être améliorés en introduisant une obligation pour les fondations de désigner un organe de révision. Ce gain de transparence est propre à générer un climat de confiance, à même d'encourager les dons de tiers.

La possibilité de déduire, dans le cadre de l'impôt fédéral direct, jusqu'à 40 % du revenu net (respectivement du bénéfice net), au lieu de 10 % actuellement, les versements faits en faveur de fondations (ou d'autres personnes morales) poursuivant des buts de service public ou d'utilité publique est certainement la mesure la plus susceptible d'encourager la constitution de fondations. Cette augmentation est justifiée dans la mesure où les montants déduits serviront à soutenir les activités d'utilité publique ou seront directement versés à une collectivité publique (Confédération, canton ou commune) ou à l'un de ses établissements. Si certaines conditions restrictives sont remplies, la déduction pourra même aller jusqu'à 100 % du revenu net/bénéfice net. Pour des raisons d'autonomie en matière de barèmes, les abattements fiscaux admis par les cantons et les communes continueront à relever de leur seule compétence.

Les diminutions de recettes fiscales induites par la révision ne peuvent pas être chiffrées, mais, si l'on se réfère aux versements faisant l'objet de déductions aujourd'hui, elles peuvent être évaluées à un montant assez peu élevé.

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Rapport 1

Genèse du projet

Le 14 décembre 2000, le conseiller aux Etats Schiesser déposait une initiative parlementaire sous forme d'un projet rédigé de toutes pièces demandant la révision de la législation régissant les fondations, en particulier la modification des art. 80 et suivants du Code civil (CC) ainsi que celle des dispositions pertinentes du droit fiscal. L'amélioration des modalités de la loi a pour but d'encourager, dans l'intérêt de la collectivité, la création de fondations.

Suivant la proposition de la Commission de l'économie et des redevances (CER-E), le Conseil des Etats a à l'unanimité décidé, le 8 juin 2001, de donner suite à l'initiative1. Saisie du mandat d'élaborer un projet de loi, la CER-E a institué une souscommission composée des conseillers aux Etats Wicki (président), David, Hofmann Hans, Plattner et Schiesser. Cette sous-commission a élaboré un avant-projet de révision des dispositions légales concernées en collaboration avec l'Administration fédérale des contributions, l'Office fédéral de la justice et la Division Droit et surveillance des fondations du Secrétariat général du Département fédéral de l'intérieur.

La sous-commission s'est informée en détail au sujet des propositions contenues dans le texte de l'initiative du conseiller aux Etats Schiesser à l'occasion de diverses auditions (directeurs de fondations, association faîtière des fondations suisses, Conférence des directeurs cantonaux des finances). Les avis des participants à ces auditions ont attiré l'attention de la sous-commission sur certains points critiques des propositions en discussion.

Le 15 mai 2003, la commission a pris connaissance de l'avant-projet de sa souscommission et a décidé de mener une succincte procédure de consultation auprès des cantons. Celle-ci a duré du 4 juin au 31 juillet 2003.

Après avoir pris connaissance des résultats de la consultation, la commission a procédé, lors de sa séance du 23 octobre 2003, à quelques modifications de l'avantprojet et a, par 9 voix contre 1, approuvé le présent le projet de loi.

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Grandes lignes du projet

2.1

Nécessité de procéder à une révision législative

La Suisse possède un grand potentiel en ce qui concerne la constitution de fondations d'utilité publique. À ce jour, ce potentiel est encore largement inexploité.

L'essor économique d'après-guerre a permis la constitution d'importantes fortunes privées. Les valeurs patrimoniales détenues par des privés ont très fortement augmenté au cours de ces dernières années. Les propriétaires de telles fortunes sont souvent disposés à rétrocéder une partie de leur fortune au profit de l'intérêt général.

Il s'agit par conséquent d'améliorer les conditions de la constitution de fondations de manière à rendre l'utilisation de moyens privés dans ce domaine plus attractive pour les fondateurs. Un droit des fondations libéral et ressenti comme tel, transpa1

BO 2001 p. 261

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rent et assorti d'incitations fiscales a le pouvoir d'encourager la constitution de fondations. Personne ne conteste que, aujourd'hui déjà, la Suisse compte de nombreuses fondations et que de nouvelles sont constituées chaque année2. Toutefois, les comparaisons avec des pays comme les Etats-Unis, l'Autriche ou la France démontrent que la flexibilité ­ ou, dans le cas de la France, l'absence de flexibilité ­ avec laquelle le droit des fondations a été conçu influe fortement sur le nombre de fondations.

Bien qu'il ne soit pas question que des fondations se substituent à l'action de l'Etat, celles-ci peuvent tout de même apporter une contribution importante dans de nombreux domaines. Il n'y a rien à objecter au fait que le soutien qu'un fondateur privé apporte aux collectivités publiques puisse lui valoir certains avantages. La révision du droit des fondations et des dispositions concernées de la législation fiscale doit permettre de rendre la constitution de fondations plus attractive, afin d'inciter plus de personnes à soutenir l'Etat dans l'accomplissement de tâches de service public ou d'utilité publique. L'attractivité du transfert de patrimoine à des fondations peut être améliorée en modifiant les dispositions pertinentes du droit civil et fiscal.

Dans le droit des fondations actuellement en vigueur, le créateur d'une fondation détermine une fois pour toutes qui ou quoi il veut soutenir au moyen du capital qui fait l'objet de la fondation. Si ses intérêts évoluent au cours du temps, il peut se voir «aliéner sa fondation». Il ne dispose alors plus de la possibilité d'apporter son soutien à de nouveaux besoins sociaux dont la nécessité pourraient pourtant être plus grande.

Une lacune existe aussi au niveau de la transparence et du contrôle des fondations.

Celui qui fait don d'une partie de son patrimoine aimerait savoir comment la fondation utilise cet argent. Or, l'existence d'un organe de révision obligatoire, à même de garantir cette transparence, n'est pas prévue dans le droit en vigueur. Cette proposition avait pourtant déjà été unanimement saluée dans l'avant-projet soumis à consultation en 1993 par le Département fédéral de justice et police3.

En ce qui concerne le droit fiscal, le droit en vigueur n'est pas non plus optimal dans la mesure où la loi sur l'impôt fédéral direct prévoit
la possibilité de déduire les versements en faveur de personnes morales poursuivant des buts de service public ou d'utilité publique jusqu'à un plafond de 10 % seulement du revenu net respectivement du bénéfice net (les cantons ayant repris ce plafond dans leur propre législation). Or ce plafond est loin de constituer une incitation suffisante à se séparer de parts importantes de sa fortune.

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3

En Suisse, il y a un peu plus de 8000 fondations d'intérêt général classiques. Depuis plusieurs décennies, la Surveillance fédérale des fondations tient un Répertoire fédéral des fondations. L'inscription dans ce répertoire est cependant facultative. Le répertoire reflète la diversité des initiatives personnelles et des contributions financières dans les domaines culturel, social et scientifique. Plusieurs milliers de fondations placées sous la surveillance des cantons ou des communes, ainsi que les fondations de prévoyance en faveur du personnel, ne figurent toutefois pas dans le répertoire.

En 1993, en se basant sur une motion Iten, le DFJP a démarré un projet de révision du droit des fondations. L'avant-projet élaboré par un groupe de travail placé sous la conduite du professeur Riemer a été suspendu à l'issue de la procédure de consultation.

Les propositions du groupe de travail avaient fait l'objet de controverses importantes.

Certains points non contestés, tels que celui relatif à l'obligation de désigner un organe de révision, ont été cependant repris dans le présent projet de loi.

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2.2

Régime actuel

La législation fédérale ne donne pas de définition des fondations; elle se borne à indiquer à l'art. 80 CC que pour constituer une fondation, il faut affecter des biens à un but spécial. Pour qu'une fondation voie le jour, trois expressions indispensables de la volonté de son fondateur (essentialia negotii) sont nécessaires: ­

l'expression de la volonté de constituer une fondation autonome;

­

la désignation du patrimoine (initial) à affecter à la fondation;

­

la description du but de la fondation (Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération, JAC 27 n° 42).

Le fondateur doit formuler lui-même ces trois points. Il est donc illégal qu'une tierce personne exprime ultérieurement la volonté du fondateur sur l'un des trois points mentionnés, notamment en ce qui concerne le but. Cela correspond aux principes en matière d'héritage en vertu desquels le contenu essentiel d'un legs doit avoir été défini par le défunt lui-même (ATF 81 II 22 ss; JAC 10 no 64). Ces essentialia negotii doivent être exposés dans l'acte de fondation. Aux termes de l'art. 80 CC, il faut, pour créer une fondation, affecter des biens à un but spécial. Au sens de la loi, l'acte de fondation sert simplement à esquisser, succinctement et précisément, le but de la fondation et les grands traits de l'organisation. Cet acte est donc comparable à une constitution qui retient quelques traits essentiels et laisse aux règlements d'exécution et à la pratique le soin de régler le reste. L'autorité de surveillance doit pourvoir à ce que les biens de la fondation soient employés conformément à la destination prévue par l'acte de fondation (art. 80 ss CC).

Les art. 80 à 89bis du CC ont introduit pour les fondations classiques et leur constitution un régime très libéral qui ne demande à l'Etat ni concession, ni approbation, ni reconnaissance. C'est pourquoi notre pays a déjà été qualifié de paradis des fondations4. Les raisons pour lesquelles la forme légale de fondation est si appréciée sont les suivantes: ­

le besoin du fondateur de passer à la postérité;

­

le principe de la liberté des fondations, qui garantit largement la sphère privée et l'autonomie de la fondation;

­

la règle de l'exemption fiscale;

­

le droit libéral des fondations du CC, qui est axé sur le respect et la conservation de la volonté du fondateur.

Les deux principes qui caractérisent cette réglementation sont la liberté de créer des fondations et celle d'en déterminer le but et l'organisation. La surveillance est nécessaire car la fondation n'est pas organisée comme une corporation, c'est-à-dire que ce ne sont pas les membres affiliés, comme dans une association, les actionnaires ou les coopérateurs qui font office d'organe de contrôle suprême. Cela sert principalement à garantir que la volonté du fondateur sera respectée après sa mort. Selon le domaine d'activité de la fondation, c'est la commune, le canton ou la Confédération qui est compétent. Pour créer une fondation, il faut s'inscrire au registre du commerce

4

Bernhard Hahnloser, «Die Stiftungsaufsicht», Heft 1, 1989, Arbeitsgemeinschaft für gemeinnützige Stiftungen, AGES-Verlag, c/o Scobag AG, 4010 Bâle, accompagné de données statistiques.

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(principe de l'inscription, exception faite pour les fondations à but religieux ou les fondations de famille).

2.3

Propositions de la commission

Avec la révision du droit des fondations, la commission veut libéraliser ce domaine dans la mesure du possible et créer un environnement qui encourage la constitution de fondations. Les fondations ne doivent pas être entravées par des réglementations trop rigides. Au contraire, il faut favoriser leur développement au moyen de conditions attractives. En même temps, il faut aussi que les dispositions révisées permettent de prévenir les abus. La commission est d'avis que les réglementations ci-après permettraient de rendre les fondations plus attractives.

Le projet de la commission comprend trois grands volets, à savoir l'introduction du droit pour le fondateur d'exiger la modification du but, l'obligation de désigner un organe de révision et l'amélioration des conditions-cadre fiscales.

Le projet comprend par ailleurs d'autres propositions (notamment mesures en cas de surendettement ou de manque de liquidités, constitution d'une fondation par pacte successoral, modifications accessoires du but et de l'organisation de la fondation) reprises pour certaines de l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993 (pour le détail de ces autres propositions, voir infra ch. 3).

2.3.1

Modification du but de la fondation

Selon le droit en vigueur, la modification du but d'une fondation n'est possible qu'à des conditions très restrictives. Le but d'une fondation peut être adapté lorsqu'il est devenu désuet et inadapté et, partant, qu'il ne correspond plus à la volonté du fondateur. Dans la pratique, divers instruments ont été développés pour assouplir ce principe perçu comme trop strict, notamment en décrivant le but des fondations de manière très large ou en procédant à des modifications accessoires de l'acte de fondation qui permettent de restreindre ou d'élargir le but de la fondation.

Il n'en demeure pas moins souhaitable de flexibiliser les dispositions relatives au but des fondations. La révision permettra au fondateur de se réserver la possibilité de modifier le but de sa fondation au moyen d'une requête correspondante ou d'une disposition pour cause de mort. Ainsi, le fondateur garde un lien étroit avec sa fondation et peut tenir compte de ses nouveaux intérêts ou de nouveaux besoins de la société. Afin que la pérennité et la transparence des fondations demeurent tout de même garanties et que les destinataires puissent compter sur une certaine continuité, une modification du but ne doit pas être possible avant un délai de dix ans à compter de la constitution de la fondation ou d'une précédente modification de son but. Pour les fondations poursuivant des buts de service public ou d'utilité publique, le nouveau but devra en outre demeurer un but de service public ou d'utilité publique, ce eu égard aux avantages accordés en matière fiscale pour ce genre de fondations.

Enfin, le droit de modifier le but d'une fondation est un droit strictement personnel réservé au fondateur, il est incessible et ne passe pas aux héritiers.

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2.3.2

Organe de révision

Afin d'améliorer la crédibilité de la surveillance, la commission propose d'introduire une obligation pour les fondations de désigner un organe de révision. En pratique, les fondations sont nombreuses à avoir déjà désigné un organe de révision sur une base volontaire. Les fondations ont en effet besoin de transparence et d'un climat de confiance, notamment celles dont les activités d'intérêt public sont soutenues par des dons de tiers.

L'introduction de l'obligation de désigner un organe de révision crée cette confiance. Pour pouvoir remplir sa mission correctement, l'organe de révision doit bien évidemment s'adapter aux conditions de la fondation concernée. Etant donné que le montant du capital de dotation d'une fondation ne saurait refléter sa complexité, il n'est pas possible de limiter l'obligation de désigner un organe de révision aux fondations disposant d'un capital de dotation important. La révision des comptes est vue comme un instrument adéquat pour toutes les fondations et utile pour le contrôle interne. Les qualifications professionnelles des réviseurs ne sont en revanche pas fixées. Il s'agit uniquement de garantir que les réviseurs sont capables d'accomplir leurs tâches correctement. Les petites fondations et les fondations dont les structures sont simples doivent encore avoir la possibilité de nommer également des personnes physiques disposant des connaissances comptables adéquates en qualité d'organe de révision. La révision à titre bénévole n'est pas non plus exclue.

2.3.3

Amélioration des conditions-cadre fiscales

Impôts directs La commission est de l'avis qu'il est possible d'encourager efficacement les fondations poursuivant des buts de service public ou d'utilité publique grâce à une pratique plus généreuse en matière de déduction des versements bénévoles. Dans ce domaine, la commission propose les innovations suivantes: ­

possibilité de déduire, dans le cadre de l'impôt fédéral direct, jusqu'40 % du revenu net (respectivement du bénéfice net), les versements faits en faveur de personnes morales poursuivant des buts de service public ou d'utilité publique;

­

augmentation de ce plafond à 100 % du revenu/bénéfice nets si certaines conditions sont remplies;

­

prise en compte des versements non seulement en espèces, mais également sous la forme de prestations en nature;

­

prise en compte des versements en faveur de la Confédération, des cantons, des communes et de leurs établissements.

En ce qui concerne les montants des abattements fiscaux pour l'impôt fédéral direct, les déductions pourront aller jusqu'à 40 % du revenu net ou du bénéfice net. Actuellement, ce plafond est de 10 %. Si certaines conditions sont remplies (intérêt public particulièrement important, financement durable, participation au moins équivalente du canton et de la commune), la déduction fiscale admise par l'impôt fédéral direct doit même pouvoir atteindre 100 %.

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A ce jour, seuls les versements en espèces peuvent faire l'objet de déductions fiscales. Il s'agit désormais d'autoriser la déduction d'«autres valeurs patrimoniales» et, en particulier, d'admettre la déductibilité fiscale de valeurs matérielles telles que les immeubles afin d'en favoriser le don à des fondations.

Enfin, il faut également autoriser la déductibilité des versements bénévoles en faveur de la Confédération, des cantons, des communes et de leurs établissements. Ce complément a été apporté notamment afin que les universités puissent aussi bénéficier de libéralités. Les dons en faveur de la recherche et de la formation sont très intéressants pour l'Etat et peuvent contribuer à le décharger considérablement dans ce domaine.

En raison de l'autonomie des cantons inscrite dans la Constitution (art. 129) en matière de barèmes, les abattements fiscaux admis par les cantons et les communes continueront à relever de leur seule compétence. Le projet se contente de prévoir l'élargissement de la possibilité de déduire les dons également en nature faits aux fondations ainsi que la prise en compte des collectivités publiques.

Taxe sur la valeur ajoutée Le projet de la commission prévoit en outre une modification de la loi sur la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA). La modification vise avant tout à exonérer de l'impôt la prestation qui est fournie par une organisation d'utilité publique lorsqu'elle fait savoir publiquement qu'elle a reçu une contribution d'un donateur.

2.3.4

Abandon de l'idée d'instaurer un droit de rétrocession

Dans le cadre des travaux relatifs au présent projet de loi, la CER-E ainsi que sa sous-commission ont examiné l'idée visant à instaurer une possibilité pour le fondateur de procéder à la rétrocession du capital engagé. Cette dernière aurait permis au fondateur de récupérer, à l'issue d'un certain délai, tout ou partie de la somme initialement engagée, pour peu qu'il ait souscrit une clause correspondante lors de la création de la fondation. Cette disposition aurait eu l'effet de donner au fondateur une sorte de garantie assimilable à un «filet de sécurité» devant lui permettre de faire face, dans le pire des cas, à une dégradation de sa situation financière.

Mais l'instauration d'une possibilité de rétrocession aurait impliqué des efforts importants à tous les niveaux (contribuables, administrations fiscales, fondations, surveillance des fondations), dans la mesure où elle aurait supposé la mise en place préalable de réglementations complexes en matière de droit civil et de droit fiscal destinées à prévenir les abus (fraude fiscale, blanchiment d'argent). Cela aurait également rendu la loi moins lisible. De plus, la réputation dont jouissent les fondations suisses aurait pu être entamée. C'est la raison pour laquelle l'idée d'instaurer un droit de rétrocession a finalement été abandonnée.

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2.3.5

Proposition de la minorité

Une minorité (Leuenberger et Béguelin) propose de s'en tenir au droit en vigueur et de ne pas modifier le plafond de 10 % du revenu ou du bénéfice nets s'appliquant à la déduction des versements faits en faveur de fondations. Seul l'élargissement de la possibilité de déduire les versements faits aux collectivités publiques et à leurs établissements est reprise par la minorité. Selon la minorité, l'augmentation prévue du plafond portant sur les contributions déductibles doit être rejetée pour plusieurs raisons.

Le principe de l'imposition selon la capacité contributive concrétise le principe constitutionnel de l'égalité de traitement. Or l'augmentation des déductions fiscales prévues par le projet est contraire au principe de l'imposition selon la capacité contributive: un contribuable aisé procédant à des dons en faveur d'une fondation peut en effet baisser sa charge fiscale au niveau d'un contribuable à la situation financière beaucoup plus modeste. A quoi s'ajoute que de telles déductions seraient de nature à favoriser les contribuables soumis à des taux marginaux élevés au détriment de ceux disposant de plus faibles revenus.

La minorité relève par ailleurs que le projet de la commission signifie que le contribuable peut décider seul à quelles tâches d'utilité publique doivent être affectées les ressources dont il fait don. En lieu et place d'une prise de décision par l'Assemblée fédérale, le projet prévoit un processus non démocratique.

Enfin, dans le contexte actuel de dégradation brutale des finances publiques, les déductions proposées et les pertes fiscales qu'elles impliquent sont pour la minorité inopportunes.

2.3.6

Résultats de la procédure de consultation

L'avant-projet de la CER-E a été envoyé en procédure de consultation auprès des cantons, laquelle a duré du 4 juin au 31 juillet 2003. 25 cantons ont donné leur avis.

En raison de la brièveté du délai imparti, le canton de Zoug a renoncé à présenter ses observations. La Conférence des directeurs cantonaux des finances (CDF) s'est également prononcée sur le projet, toutefois uniquement sur la réglementation fiscale.

2.3.6.1

Avis des cantons relatifs aux modifications proposées du code civil

Opportunité de réviser le droit des fondations A une exception près (GL, qui a toutefois salué la majorité des révisions proposées), tous les cantons ont donné une réponse affirmative à la question de savoir si une révision du droit des fondations est opportune. Le but principal du projet, à savoir la création d'un cadre légal à même d'encourager la constitution de fondations, a été expressément approuvé.

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Introduction du droit du fondateur d'exiger la modification du but S'agissant de la question de savoir s'il faut prévoir pour le fondateur le droit d'exiger la modification du but (réserve quant à l'affectation), les avis des cantons ont divergé.

Six cantons (AI, BE, GR, LU, NW, OW) se sont prononcés expressément en faveur de la réglementation proposée: selon ces cantons, cette dernière augmente l'attractivité des fondations et encourage la création de fondations; elle permet de résoudre une partie des problèmes actuels sans pour autant affaiblir la protection des intérêts des destinataires.

Treize cantons (AG, BS, FR, GE, JU, NE, SH, SO, TG, TI, VD, VS, ZH) ont rejeté la proposition. Ils font valoir que les dispositions actuelles, de par leur souplesse, sont suffisantes et que la pratique a développé diverses solutions pour assouplir la rigueur du droit en vigueur. La modification proposée constituerait par ailleurs une grave entorse au principe de la pérennité de la fondation, ce qui pourrait tant constituer un frein à la générosité du public qu'être néfaste pour les bénéficiaires de la fondation. Le danger que l'on abuse de la réserve quant à l'affectation pour rétrocéder le patrimoine au fondateur a été considéré comme trop grand. Enfin, d'autres cantons ont exprimé leur scepticisme envers la proposition, se demandant si la nouvelle réglementation était à même d'atteindre son but dans la mesure où elle contenait plus de limitations que d'avantages pour le fondateur.

Obligation de désigner un organe de révision Tous les cantons ont répondu par l'affirmative à la question de savoir si la réglementation relative à l'obligation de désigner un organe de révision est adéquate. Par la suppression de cette importante lacune, la transparence, et, par là-même, la crédibilité des fondations ainsi que la confiance des donateurs et des destinataires seront accrues. Les conditions pour une professionnalisation accrue sont également ainsi créées. La nouvelle réglementation permet en outre une surveillance efficace et en même temps économique. Enfin, la réglementation proposée est conçue de façon assez souple et peut ainsi être adaptée à la complexité variable des structures des fondations.

2.3.6.2

Avis des cantons relatifs aux modifications proposées du droit fiscal

Augmentation du plafond relatif à la déduction des versements La plupart des cantons estiment disproportionné le quadruplement du plafond de la déduction et, par conséquent, ils le rejettent. Seuls BL, SZ et TI ainsi que la CDF approuvent cette augmentation, cette dernière donnant sa préférence toutefois à une déduction limitée à 20 %. Si une hausse devait cependant être décidée, une majorité des cantons (AG, AR, FR, GE, GL, NE, NW, OW, SG, SH, SO, TG UR, VS, ZH ainsi que la CDF) considèrent qu'une hausse de la déduction à 20 % serait convenable, limite correspondant à ce que certains cantons connaissent déjà.

Les cantons justifient leur rejet d'une hausse à 40 % en affirmant notamment qu'elle lèserait, en partie du moins, les principes de l'universalité de l'impôt (art. 127, al. 2, Cst.) et de l'imposition selon la capacité contributive. En outre, plusieurs cantons 7434

craignent une baisse excessive du produit de l'impôt et une augmentation des possibilités d'abus qui se traduirait par une augmentation de la charge des contrôles.

Enfin, certains cantons craignent un renforcement des pressions sur le législateur cantonal pour qu'il introduise des hausses identiques; la compétition fiscale entre les cantons en serait aggravée.

Augmentation du plafond à 100 % sous certaines conditions Pour les mêmes raisons qui poussent à rejeter la hausse à 40 %, pratiquement tous les cantons (sauf BL, BS et SZ) ainsi que la CDF rejettent la hausse du plafond jusqu'à 100 %. Certains cantons (LU, NW) seraient toutefois d'accord avec une augmentation du plafond jusqu'à 30 %, voire 50 %.

Elargissement à la déduction des prestations en nature Le nombre des cantons favorables et défavorables à cette mesure est pratiquement égal. AG, AI, AR, BE, GR, JU, LU, NE, NW, SZ, TG et VS sont plutôt défavorables. En revanche, BL, BS, FR, GE, GL, OW, SG, SH, SO, TI, UR, VD, ZH et la CDF l'approuvent en principe. En général, ces cantons font dépendre leur approbation de l'adoption de limites et de principes d'évaluation clairs.

Elargissement du cercle des bénéficiaires Tous les cantons (sauf NE et TI) ainsi que la CDF approuvent en principe cet élargissement du cercle des bénéficiaires. AG, AR, TG, UR et VS approuvent sous réserve que le plafond de la déduction reste fixé à 20 % du revenu net ou du bénéfice net.

Modification de la LTVA A une exception près (NE), tous les cantons qui ont donné leur avis sur le nouvel art. 33a de la loi régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA) approuvent ce complément à la loi qu'ils jugent bienvenu.

3

Commentaire des dispositions

3.1

Commentaire des dispositions du droit civil

Art. 57, al. 3, CC L'art. 57, al. 3, CC est adapté afin de tenir compte de la nouvelle réglementation de l'art. 88 CC relative à la dissolution de la fondation. En effet, selon le projet, il appartient à l'autorité fédérale ou cantonale compétente de dissoudre, sur requête ou d'office, les fondations dont le but a cessé d'être réalisable, est devenu illicite ou contraire aux moeurs (art. 88, al. 1, CC).

La compétence de prononcer la dissolution ne revenant plus systématiquement à une autorité judiciaire, l'adverbe «judiciairement», contenu à l'art. 57, al. 3, CC, doit être supprimé.

La dissolution de fondations de famille ou ecclésiastiques demeure de la compétence du tribunal (art. 88, al. 2, CC).

7435

Art. 81, al. 1 et 3 (nouveau), CC Conformément à l'art. 81, al. 1, CC, la fondation peut être constituée par acte authentique ou par testament. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral5, il n'est en revanche pas admissible de constituer une fondation par une clause conventionnelle contenue dans un pacte successoral.

Dans le cadre de l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993, l'ensemble des participants à la procédure de consultation a salué la proposition visant à permettre la constitution de fondations également par un pacte successoral.

En remplaçant la notion de «testament» par celle de «disposition pour cause de mort», l'art. 81, al. 1, CC prévoit d'autoriser la constitution d'une fondation par un pacte successoral.

Lorsqu'une fondation est constituée par disposition pour cause de mort, on ne peut pas exclure que les héritiers ne respectent pas la volonté du défunt et «oublient» la fondation. Pour éviter cette éventualité, l'art. 81, al. 3, CC prévoit que l'autorité qui ouvre la disposition pour cause de mort doit aviser le préposé au registre du commerce compétent de la constitution de la fondation. Celui-ci doit, selon l'art. 103, al. 1, de l'ordonnance sur le registre du commerce, annoncer à l'autorité de surveillance l'inscription de la fondation et se faire confirmer par elle qu'elle en assume la surveillance.

Art. 83, al. 2 à 4 (nouveau), CC Le message du Conseil fédéral concernant la révision du code des obligations du 19 décembre 20016 (droit de la société à responsabilité limitée) propose une nouvelle réglementation en cas de carences dans l'organisation d'une personne morale, qui doit s'appliquer à l'ensemble des formes de sociétés régies par le code des obligations. Des dispositions particulières sont prévues pour les associations et les fondations, afin de tenir compte des spécificités de ces formes de droit.

Etant donné que la révision de l'art. 83 CC présente des liens étroits avec la présente initiative parlementaire, il est proposé de reprendre la proposition du Conseil fédéral.

Il s'agira ultérieurement d'adapter en conséquence le projet de révision du droit de la société à responsabilité limitée.

Pour l'essentiel, l'art. 83 CC contient les innovations suivantes:

5 6

­

L'autorité de surveillance peut prendre les mesures nécessaires non seulement au moment de la constitution de la fondation, mais également lorsque les carences dans l'organisation sont constatées ultérieurement.

­

L'art. 83 CC doit permettre de remédier à toutes les formes de carences dans l'organisation qui peuvent se présenter: il peut s'agir d'un organe qui fait défaut ou d'un organe qui n'est pas composé conformément aux prescriptions (de la loi, de l'acte de fondation et du règlement); en particulier, lorsqu'un organe de révision ne remplit pas les exigences d'indépendance statuées à l'art. 83a, al. 2, CC, l'intervention de l'autorité de surveillance est justifiée.

ATF 96 II 273, cons. 4 à 8.

FF 2002 2949

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­

L'autorité de surveillance agit d'office. Conformément à l'art. 941a (nouveau) CO, les autorités du registre du commerce doivent, lorsqu'elles constatent une carence dans l'organisation d'une fondation, en informer l'autorité de surveillance compétente.

­

L'autorité de surveillance peut prononcer toutes les mesures nécessaires afin de remédier à la carence dans l'organisation de la fondation. L'art. 83, al. 2, CC mentionne, à titre exemplatif, la fixation d'un délai à la fondation afin qu'elle rétablisse une situation conforme au droit et la nomination de l'organe qui fait défaut ou d'un commissaire. D'autres mesures appropriées sont également envisageables, comme la modification de l'acte de fondation ou du règlement. Conformément à l'art. 83, al. 4, CC, la fondation supporte les frais de ces mesures.

­

Selon le droit actuel, les biens d'une fondation ne peuvent pas être remis à une autre fondation ayant un but semblable si le fondateur ou une clause expresse de l'acte de fondation s'y oppose. Suivant une suggestion émise lors de la procédure de consultation, l'art. 83, al. 3, CC du projet renonce à cette limitation. Il importe de remarquer que la modification du but de la fondation au sens de l'art. 86 CC peut également avoir lieu même si le fondateur s'y oppose ou si l'acte de fondation l'exclut. Ainsi, la même réglementation s'appliquera aux deux cas.

Art. 83a (nouveau) CC Cette disposition prévoit l'obligation pour les fondations de désigner un organe de révision et fixe les conditions d'indépendance que celui-ci doit remplir. L'obligation de désigner un organe de révision a déjà été proposée par l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993 ainsi que par l'avant-projet de loi fédérale sur l'établissement et le contrôle des comptes annuels (LECCA) du 29 juin 1998. Dans les deux cas, les résultats de la procédure de consultation ont été favorables. En pratique, les autorités de surveillance, du moins au niveau fédéral, requièrent d'ailleurs déjà la désignation d'un organe de révision.

Seules les fondations dites classiques sont assujetties à l'obligation de désigner un organe de révision. Selon l'art. 87, al. 1bis, CC les fondations de famille et les fondations ecclésiastiques en sont dispensées. Elles peuvent néanmoins désigner un organe de révision sur une base volontaire.

Al. 1 Conformément à l'art. 83a, al. 1, CC, il incombe à l'organe suprême de la fondation de nommer l'organe de révision. L'organe suprême de la fondation peut également révoquer l'organe de révision en tout temps avec effet immédiat (pour le droit de la société anonyme, voir art. 727e, al. 3, CO). L'organe de révision est inscrit au registre du commerce (comme tous les autres organes de la fondation).

Al. 2 L'organe de révision peut être une personne physique ou morale. L'art. 83a, al. 2, CC parle de «personnes mandatées pour la révision» et indique ainsi clairement que les rapports juridiques entre la fondation et l'organe de révision reposent sur un contrat de mandat qui, en tant que tel, peut être révoqué en tout temps conformément

7437

à l'art. 404, al. 1, CO. Les réviseurs bénévoles et non professionnels sont aussi admis selon la nouvelle réglementation.

Les personnes mandatées pour la révision doivent, selon l'art. 83a, al. 2, CC, être indépendantes de la fondation (pour le droit de la société anonyme, voir art. 727c CO). Le projet présume (de manière irréfragable) que l'indépendance n'est pas garantie dans certaines situations et, en particulier, lorsque les personnes mandatées pour la révision: ­

font partie d'un autre organe de la fondation;

­

sont liées à la fondation par des rapports de travail (p. ex. elles tiennent la comptabilité de la fondation);

­

présentent des liens de parenté étroits avec des membres d'autres organes de la fondation;

­

sont elles-mêmes destinataires de la fondation.

L'autorité de surveillance vérifie le respect des exigences d'indépendance et peut, le cas échéant, intervenir sur la base de l'art. 83, al. 2, CC. Les autorités du registre du commerce doivent également examiner si les dispositions légales sont respectées au moment de la réquisition d'inscription.

Al. 3 Les personnes mandatées pour la révision doivent disposer des qualifications nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches, c'est-à-dire la vérification de la comptabilité et de la situation patrimoniale de la fondation (voir art. 727a CO pour le droit de la société anonyme). Conformément à l'art. 83a, al. 3, CC, le Conseil fédéral peut fixer les critères en fonction desquels les fondations sont exceptionnellement tenues de faire appel à un réviseur particulièrement qualifié. Cette dernière notion est tirée du droit de la société anonyme7. Toutefois, les critères de taille prévus par le code des obligations ne sauraient s'appliquer aux fondations. Il s'agira de tenir compte des particularités des fondations et de s'appuyer sur des critères tels que le montant capital de dotation, la somme des dons reçus annuellement ou encore l'exploitation d'une entreprise en la forme commerciale par la fondation.

Al. 4 Conformément à l'art. 83a, al. 4, CC, l'autorité de surveillance peut dispenser la fondation de l'obligation de désigner un organe de révision lorsque des conditions, à définir par le Conseil fédéral par voie d'ordonnance, sont remplies. Cette disposition permet de tenir compte des besoins de la pratique tout en garantissant la sécurité du droit et une application uniforme indépendamment de l'autorité de surveillance compétente. L'exemption devrait cependant demeurer l'exception et concerner en particulier les fondations qui ont une fortune très peu élevée ou dont les activités sont très restreintes. Le Conseil fédéral devra également fixer les modalités de l'exemption et, en particulier, sa durée.

7

Art. 727b CO; ordonnance sur les qualifications professionnelles des réviseurs particulièrement qualifiés du 15.6.1992 (RS 221.302).

7438

La possibilité a été examinée de fixer dans la loi un capital de dotation maximal, audessous duquel la fondation serait automatiquement libérée de l'obligation de désigner un organe de révision. Cette solution n'a cependant pas été retenue car elle n'est pas suffisamment nuancée.

Art. 83b (nouveau) CC L'art. 83b CC définit les attributions de l'organe de révision. Ce dernier vérifie la comptabilité et la situation patrimoniale de la fondation (voir art. 728 CO pour le droit de la société anonyme). Les personnes mandatées pour la révision doivent en particulier rechercher si les comptes annuels (voir à ce sujet l'art. 84b CC) ont été établis conformément à la loi et aux dispositions de l'acte de fondation.

Le résultat de la vérification est consigné dans un rapport qui mentionne également les noms des personnes qui ont procédé à la révision et qui confirme que celles-ci remplissent les exigences de qualifications et d'indépendance. Le rapport de révision est remis à l'organe suprême de la fondation.

Outre son activité de révision au sens strict, l'organe de révision assume également certains devoirs en cas de surendettement et de manque de liquidités (à ce sujet, voir art. 84a CC).

Art. 84, al. 1bis (nouveau), CC L'art. 84, al. 1bis, CC autorise expressément les cantons à centraliser la surveillance des fondations et, ainsi, à renoncer à la surveillance exercée par les communes. Une proposition identique n'a soulevé presque aucune opposition lors de la procédure de consultation relative à l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993.

Art. 84a (nouveau) CC L'art. 84a CC concorde avec l'art. 84b de l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993.

La disposition reprend, pour l'essentiel, les principes de la réglementation du droit de la société anonyme en matière de perte de capital et de surendettement (art. 725 s.

CO). Lorsqu'il y a des raisons sérieuses d'admettre que la fondation est surendettée ou qu'elle souffre d'un manque chronique de liquidités, l'organe suprême de la fondation dresse immédiatement un bilan intermédiaire qu'il soumet à l'organe de révision. Si la fondation est effectivement surendettée ou qu'elle souffre d'un manque chronique de liquidités, le bilan intermédiaire est remis à l'autorité de surveillance.

Il appartient alors à celle-ci de prononcer
les mesures qui s'imposent (p. ex. restreindre le but de la fondation, dissoudre la fondation ou décider des mesures d'assainissement).

Si la fondation ne peut être assainie par des mesures de surveillance, l'autorité de surveillance peut requérir les mesures d'exécution forcée prévues par la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP)8. Par ailleurs, l'art. 725a CO s'applique par analogie. Selon cette disposition, le juge peut ajourner la faillite, à la requête de l'autorité de surveillance ou d'un créancier, si l'assainissement de la fondation paraît possible.

8

RS 281.1. Voir l'art. 39, al. 1, ch. 12, LP.

7439

Art. 84b (nouveau) CC Al. 1 L'art. 84b, al. 1, CC prévoit expressément que les fondations sont assujetties à l'obligation de tenir une comptabilité. Celle-ci est en effet le préalable indispensable à la révision des comptes statuée à l'art. 83a CC. Il est d'autant plus nécessaire de fixer cette obligation au niveau de la loi que, selon la jurisprudence actuelle du Tribunal fédéral9, les fondations sont soumises à l'obligation d'établir des comptes annuels uniquement lorsqu'elles font le commerce, exploitent une fabrique ou exercent en la forme commerciale quelque autre industrie conformément à l'art. 934, al. 1, CO.

Al. 2 L'établissement des comptes annuels est régi par les art. 957 ss CO, qui s'appliquent par analogie. Toutefois, lorsque la fondation exploite une entreprise en la forme commerciale, les règles du droit de la société anonyme (art. 662 ss CO) doivent s'appliquer par analogie.

Art. 85 CC Selon le droit actuel, lorsque la surveillance de la fondation relève de la Confédération, il appartient au Conseil fédéral d'en modifier l'organisation, sur requête de l'autorité de surveillance et après avoir entendu l'organe suprême de la fondation. Le Conseil fédéral a délégué cette compétence au Département fédéral de l'intérieur10.

La nouvelle formulation de l'art. 85 CC tient compte de cette répartition des compétences.

Art. 86, al. 1, CC L'art. 86, al. 1, CC est modifié sur deux points:

9 10

11

­

Comme pour l'art. 85 CC, la compétence de décider la modification du but de la fondation est désormais attribuée à l'autorité fédérale compétente et non plus au Conseil fédéral.

­

Le droit actuel prévoit que seule l'autorité de surveillance peut proposer la modification du but de la fondation à l'autorité compétente. Le projet étend cette attribution à l'organe suprême de la fondation11. Dans un cas comme dans l'autre, l'autorité fédérale ou cantonale compétente entendra l'organe suprême respectivement l'autorité de surveillance avant de se prononcer.

ATF 110 Ib 17 Voir l'art. 3, al. 2, let. a, de l'ordonnance sur l'organisation du Département fédéral de l'intérieur (RS 172.212.1) en relation avec les art. 43, al. 2, et 47, al. 2, de la loi fédérale sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (RS 172.010).

De nombreuses organisations consultées dans le cadre du projet de révision du droit des fondations de 1993 ont fait une proposition identique.

7440

Art. 86a (nouveau) CC L'art. 86a CC permet au fondateur de requérir la modification du but de la fondation auprès de l'autorité compétente. Le fondateur peut ainsi se réserver la possibilité de donner une nouvelle orientation à la fondation.

Al. 1 et 2 L'art. 86a CC fixe les conditions auxquelles est soumise la modification du but de la fondation.

Les conditions prévues à l'al. 1 doivent être remplies par toutes les fondations dites classiques. Il s'agit des conditions suivantes: ­

L'acte de fondation réserve la possibilité de modifier le but de la fondation.

La clause réservant la modification du but doit ainsi avoir été prévue lors de la constitution de la fondation.

­

Le fondateur doit déposer une requête en modification du but de la fondation auprès de l'autorité fédérale ou cantonale compétente. La requête précise le nouveau but que doit poursuivre la fondation; il est également concevable que le nouveau but soit déjà fixé dans l'acte de fondation. La requête peut également résulter d'une disposition pour cause de mort du fondateur; conformément à l'art. 86a, al. 4, CC, l'autorité qui procède à l'ouverture de la disposition pour cause de mort doit alors aviser l'autorité de surveillance compétente de la disposition visant la modification du but de la fondation.

­

Dix ans au moins se sont écoulés à compter de la constitution de la fondation ou de la dernière modification prononcée sur requête du fondateur. Le fondateur peut ainsi provoquer à plusieurs reprises la modification du but de la fondation, en respectant un délai de 10 ans entre chaque modification. Ce délai de 10 ans doit garantir une certaine pérennité de la fondation et éviter que les activités de la fondation ne soient bloquées en raison de changements fréquents de but.

­

Lorsque la requête en modification du but intervient avant l'écoulement du délai de 10 ans, l'autorité compétente doit attendre avant de rendre sa décision, sans que ce soit un motif de refus de la requête.

S'agissant des fondations ayant un but de service public ou d'utilité publique au sens de l'art. 56 let. g de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct, l'al. 2 fixe une condition supplémentaire: le nouveau but doit demeurer un but de service public ou d'utilité publique. Cette limitation supplémentaire du droit du fondateur de modifier le but de la fondation veut d'une part éliminer la crainte, souvent exprimée lors de la procédure de consultation, que le fondateur ne puisse, pour des raisons fiscales, abuser de son droit de modifier le but de la fondation et que ce droit ne se transforme finalement en un droit de rétrocession du fondateur. La limitation veut d'autre part garantir aux personnes qui ont fait des dons à une fondation en vertu de son but que leur argent sera utilisé dans un but de service public ou d'utilité publique, même s'il ne devait plus s'agir du but primitif.

L'autorité compétente doit examiner si les conditions requises sont remplies. Le cas échéant, elle doit prononcer la modification du but de la fondation et requérir l'inscription du nouveau but auprès de l'office du registre du commerce compétent.

Le nouveau but de la fondation n'est opposable aux tiers qu'une fois inscrit au registre du commerce et publié dans la Feuille officielle suisse du commerce 7441

(art. 932, al. 2, CO). L'autorité compétente ne doit, en revanche, pas examiner si la requête s'appuie sur des motifs particuliers; elle n'a donc pas de pouvoir d'appréciation pour juger de l'opportunité de la modification du but (comme c'est le cas en matière de modification du but fondée sur l'art. 86, al. 1, CC); elle doit la prononcer lorsque les conditions sont remplies. Demeurent réservées les situations dans lesquelles le nouveau but est illicite ou contraire aux moeurs, ou encore ne peut être poursuivi par une fondation.

Al. 3 Conformément à l'art. 86a, al. 3, CC, le droit du fondateur de requérir la modification du but a un caractère strictement personnel; il s'éteint par la mort du fondateur et ne peut être transféré à un tiers, pas même aux héritiers. Lorsque le fondateur est une personne morale, le droit de requérir la modification du but s'éteint au plus tard 20 ans après la constitution de la fondation. Cette réglementation vise à empêcher que l'on recourt à une personne morale dans le but de perpétuer la possibilité de modifier le but de la fondation.

Al. 4 L'art. 86a, al. 4, CC règle l'exercice du droit de requérir la modification du but en cas de pluralité de fondateurs (personnes physiques ou morales). Afin de coordonner l'exercice du droit, cette disposition prévoit que la requête doit impérativement être déposée conjointement par l'ensemble des fondateurs.

L'art. 86a CC ne se prononce pas sur la modification du but (sur requête du fondateur) des fondations de famille et des fondations ecclésiastiques, qui ne sont pas soumises au contrôle de l'Etat (art. 87, al. 1, CC). Il s'agit d'un silence qualifié du législateur. En effet, un des principaux buts poursuivis par la présente révision du droit des fondations est d'améliorer les conditions-cadre régissant les fondations poursuivant des buts d'utilité publique. La nouvelle réglementation s'adresse ainsi essentiellement aux fondations dites classiques. L'introduction d'un droit pour le fondateur de requérir la modification du but d'une fondation de famille ou d'une fondation ecclésiastique appellerait des dispositions particulières qui sortiraient du cadre de la présente révision.

Art. 86b (nouveau) CC L'art. 86b CC s'inspire d'une proposition de l'avant-projet de révision du droit des fondations de 1993 qui a recueilli une
large acceptation à l'occasion de la procédure de consultation.

Le droit actuel ne règle pas les modifications accessoires de l'organisation et du but de la fondation. L'art. 86b CC codifie les principes développés par la jurisprudence du Tribunal fédéral12 prévoyant une procédure simplifiée pour les modifications de peu d'importance de l'acte de fondation. Les modifications accessoires de l'acte de fondation peuvent être prononcées par l'autorité de surveillance lorsqu'elles sont commandées par des motifs objectivement justifiés et qu'elles ne lèsent pas les droits de tiers.

12

ATF 103 Ib 161, cons. 2.

7442

Art. 87, al. 1bis (nouveau), CC Conformément à l'art. 83a CC, les fondations doivent désigner un organe de révision. Les fondations de famille et les fondations ecclésiastiques sont toutefois dispensées de cette obligation selon l'art. 87, al. 1bis, CC. Cette disposition a été intégrée à l'art. 87 CC pour des raisons de technique législative.

Art. 88 CC L'art. 88 CC ne modifie pas fondamentalement le droit actuel; il en supprime certaines lacunes et introduit une réglementation plus uniforme.

Al. 1 L'al. 1 s'adresse aux fondations qui font l'objet d'une surveillance de l'Etat. Selon la réglementation actuelle, la fondation est dissoute de par la loi lorsque son but a cessé d'être réalisable. Selon la doctrine13, l'autorité compétente doit néanmoins constater la dissolution dans une décision qui a uniquement un effet déclaratoire, ce qui ne va pas sans poser certains problèmes. En effet, la fondation étant dissoute de par la loi, le moment précis de la dissolution ne peut généralement pas être déterminé avec exactitude. L'art. 88, al. 1, CC propose dès lors les innovations suivantes: ­

La dissolution de la fondation n'intervient plus de par la loi. Il appartient à l'autorité fédérale ou cantonale compétente de la prononcer, d'office ou sur requête. La décision de l'autorité compétente revêt un caractère constitutif14.

­

Lorsque le but de la fondation a cessé d'être réalisable, l'autorité compétente doit, avant de décider la dissolution, examiner si la fondation peut être maintenue par une modification de l'acte de fondation (et, en particulier, du but de la fondation).

­

La compétence de décider la dissolution revient à l'autorité fédérale ou cantonale compétente, et non pas au tribunal, lorsque le but est devenu illicite ou contraire aux moeurs (art. 88, al. 2, CC).

Al. 2 L'art. 88, al. 2, CC règle la dissolution des fondations de famille et des fondations ecclésiastiques. Ces dernières n'étant pas soumises à la surveillance de l'Etat, il appartient au tribunal de prononcer leur dissolution.

La nouvelle réglementation de l'art. 88 CC implique également des adaptations mineures des art. 57, al. 3, et 89 CC.

Art. 89 CC L'art. 89 CC subit uniquement quelques modifications, de nature avant tout rédactionnelle, résultant de la réglementation proposée par l'art. 88 CC.

13

14

Voir notamment: Harold Grüninger, Kommentar zum schweizerischen Privatrecht, Schweizerisches Zivilgesetzbuch I, Art. 1­359 ZGB, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1996, Art. 88/89 N 6.

L'autorité compétente doit également requérir l'inscription au registre du commerce de la dissolution et de la radiation de la fondation, conformément à l'art. 89, al. 2, CC.

7443

3.2

Commentaire des dispositions du droit des obligations

Art. 941a (nouveau) CO Cette disposition est proposée en relation avec la nouvelle réglementation concernant les carences dans l'organisation de la fondation prévue à l'art. 83, al. 2, CC.

Lorsqu'il constate une carence dans l'organisation impérativement prescrite par la loi d'une fondation, le préposé au registre du commerce doit en informer l'autorité de surveillance compétente. Le devoir du préposé se limite aux violations de règles impératives qui ressortent de l'inscription au registre du commerce ou des pièces justificatives, comme l'absence d'organe de révision ou son indépendance (art. 83a CC). Les autorités du registre du commerce ne sont par contre pas tenues d'assurer la mise en oeuvre de prescriptions contenues dans l'acte de fondation; cette obligation incombe à l'autorité de surveillance.

3.3

Commentaire des dispositions fiscales

3.3.1

Loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD)

Art. 33a (nouveau) LIFD Généralités Cette disposition règle la possibilité de déduire fiscalement les prestations bénévoles que les personnes physiques destinent à des buts d'utilité publique.

D'après l'art. 33, al. 1, let. i, LIFD actuel, la déduction est limitée à 10 %. En outre, la réglementation en vigueur est ainsi faite que la déduction est calculée sur le revenu net après déduction de la prestation bénévole. Cette réglementation est difficile à comprendre pour le praticien «moyen». Elle correspond à une déduction de 10 % du revenu net. En fait, il s'agit cependant de 9,1 % du revenu net avant déduction de la prestation bénévole (10 en pour-cent de 110).

D'une part, le maximum de la déduction admise serait porté désormais à 40 %. De plus, la réglementation du nouvel art. 33a, al. 1, LIFD concernant la déduction précise que le revenu diminué des charges prévues aux art. 26 à 33 LIFD constitue la base du calcul de la déduction. Cette nouvelle réglementation qui conduit à une déduction allant jusqu'à 40 % du revenu net avant déduction de la prestation bénévole a l'avantage d'être simple à comprendre pour le contribuable. Avec la réglementation actuelle, une déduction de 40 % correspondrait en revanche à une déduction effective de 28,6 % (40 en pour cent de 140) du revenu net avant déduction de la prestation bénévole.

D'autre part, il faut relever également d'autres modifications importantes qui se trouvent dans cette même disposition: ­

Elargissement des prestations bénévoles limitées jusqu'ici aux versements en espèces aux autres valeurs patrimoniales (al. 1);

­

Elargissement de la déduction aux prestations bénévoles à la Confédération, aux cantons, aux communes et à leurs établissements (al. 1);

7444

­

Possibilité de porter la déduction à la totalité (100 %) du revenu imposable dans certains cas (al. 2).

Al. 1 En soi, il suffirait de parler uniquement de prestations bénévoles de valeurs patrimoniales à la place de versements bénévoles en espèces et de prestations bénévoles d'autres valeurs patrimoniales. Le maintien de la notion de «versement en espèces» se justifie, d'une part, par le fait que les versements en espèces sont toujours les plus fréquents et, d'autre part, par le fait que la pratique connaît bien cette notion. En citant en outre les «prestations bénévoles d'autres valeurs patrimoniales», on élargit nettement l'objet de l'affectation. Cette notion comprend en effet les biens mobiliers et immobiliers ainsi que les capitaux (y compris les créances) et les droits de propriété intellectuelle. En revanche, le travail n'est pas considéré comme une valeur patrimoniale.

Cet alinéa prévoit en outre que les prestations bénévoles en faveur de la Confédération, des cantons, des communes et de leurs établissements seront également déductibles du revenu. Par exemple, il serait possible de verser des prestations bénévoles aux EPF et de bénéficier de la déduction fiscale.

L'art. 56, let. g, LIFD permet l'exonération fiscale partielle d'une fondation étant donné que l'exonération n'est accordée que pour la partie du bénéfice qui est exclusivement et irrévocablement affectée à des buts de pure utilité publique.

Par contre, l'art. 33, al. 1, let. i, LIFD ne permet la déduction que si la fondation est entièrement exonérée de l'impôt, ce qui ressort du texte d'après lequel l'institution qui reçoit le versement bénévole doit poursuivre «des buts de pure utilité publique».

Pour établir le «parallèle» entre les deux dispositions, il faut renoncer à l'adjectif «pure» dans le futur art. 33a, al. 1, LIFD (qui doit remplacer l'art. 33, al. 1, let. i, LIFD). Il en va de même pour l'art. 9, al. 2, let. i, LHID.

La nouvelle réglementation permet également l'abattement fiscal de versements faits à des institutions au bénéfice d'une exonération uniquement partielle, ce qui signifie plus de flexibilité. L'exonération fiscale partielle ne peut cependant être accordée qu'à la condition que l'institution concernée tienne des comptabilités séparées, l'une pour le domaine au bénéfice de l'exonération et l'autre pour celui qui ne l'est pas.

Al. 2 Une déduction pouvant atteindre le montant total du revenu imposable pourra être accordée, pour l'impôt fédéral direct, aux conditions suivantes: ­

un intérêt public particulièrement important,

­

un financement durable,

­

une participation au moins égale du canton et de la commune.

Intérêt public particulièrement important Le but que poursuit le bénéficiaire du versement bénévole doit présenter un intérêt public particulièrement important. Etant donné que l'impôt fédéral direct est concerné, un intérêt purement régional ne saurait suffire en principe. Il devra s'agir d'un intérêt régional fort et prouvé. En revanche, ce critère sera toujours considéré comme rempli pour les versements bénévoles à la Confédération, aux cantons, aux 7445

communes ainsi qu'à leurs établissements. Dans tous les autres cas, il faudra contrôler si le but poursuivi par la personne morale concernée présente véritablement un intérêt public particulièrement important.

Financement durable En ce qui concerne ce critère également, on admettra qu'il est toujours rempli pour les versements bénévoles à la Confédération, aux cantons et aux communes ainsi qu'à leurs établissements. Il n'en va pas de même pour les personnes morales: en l'occurrence, le critère du financement durable signifie que l'existence de la personne morale qui reçoit le versement bénévole est assurée financièrement par ce versement ou par d'autres attributions. Cette condition doit être remplie notamment lorsque la personne morale doit ériger ou reprendre des bâtiments. L'admission d'une déduction fiscale élevée ne doit en effet pas entraîner par la suite des frais pour les pouvoirs publics. L'exigence d'après laquelle le financement de la personne morale doit être assuré à long terme a pour but d'éviter que son exploitation ne cause ensuite des coûts importants aux collectivités publiques. En d'autres termes, la condition du financement durable est importante surtout pour les activités que les pouvoirs publics ne déploieraient pas sans l'initiative privée. L'initiative privée ne doit pas conduire à une extension des tâches publiques.

Participation au moins égale du canton et de la commune («symétrie des sacrifices») La «symétrie des sacrifices» entre la Confédération, le canton et la commune constitue le troisième critère: toute déduction excédant les 40 % «ordinaires» pour l'impôt fédéral direct devra donc s'accompagner d'une déduction au moins égale en pourcentage sur les impôts directs du canton et de la commune.

Il y a lieu de relever ce qui suit: ­

7446

Déduction: La déduction en matière d'impôt fédéral direct dépend de celle pour les impôts directs du canton et de la commune. Mais il faut être conscient qu'on ne pourra pas exiger une déduction de même montant en chiffres absolus. Cela supposerait en effet que l'assiette de l'impôt soit la même pour l'impôt fédéral direct et pour les impôts directs du canton et de la commune, ce qui n'est pas le cas. Par exemple, les déductions sont différentes ou il se peut que le contribuable possède un commerce en dehors de son canton de domicile. Cela entraîne une assiette d' impôt différente pour la Confédération, le canton et la commune. On ne peut donc tenir compte de cette situation qu'en prenant en compte, comme proposé, une équivalence en pour cent. D'autre part, la déduction au moins égale en pourcentage doit garantir la «symétrie des sacrifices» de sorte que l'abandon de substance fiscale dans un but d'utilité publique ne concerne pas uniquement l'impôt fédéral direct, mais aussi (et dans la même mesure au moins) l'impôt cantonal et communal. En matière d'impôt fédéral direct, une déduction de, par exemple, 80 % du revenu déterminant, c'est-à-dire du revenu diminué des déductions prévues aux art. 26 à 33, dépendrait du fait qu'une déduction au moins égale en pourcentage soit acceptée en matière d'impôts directs du canton et de la commune. A l'inverse, il serait cependant possible, dans l'exemple cidessus, que la déduction accordée pour l'impôt fédéral direct soit inférieure à 80 %. On tiendrait ainsi compte, le cas échéant, du fait que l'importance du

but d'utilité publique n'est pas la même pour la Confédération, le canton et la commune.

­

Instance compétente: La taxation et la perception de l'impôt fédéral direct sont déléguées aux cantons; la Confédération ne garde que la compétence d'exercer la surveillance (art. 103 LIFD). L'administration cantonale de l'impôt fédéral direct, qui fait partie de l'administration fiscale cantonale, est chargée de diriger et de surveiller l'application de l'impôt fédéral direct (art. 104 LIFD). Elle doit donc aussi accorder la déduction en question, c'est-à-dire effectuer la taxation concernée par celle-ci. En raison du principe de la «symétrie des sacrifices», cette instance ne pourra cependant pas autoriser un «cas particulier» contre la volonté de l'instance compétente pour l'impôt cantonal et communal (en général le gouvernement cantonal).

C'est pourquoion utilise le terme neutre «le canton» pour parler de l'instance compétente pour accorder cette déduction.

­

Par ailleurs, l'Administration fédérale des contributions peut faire usage des compétences suivantes dans le cadre de sa surveillance: elle peut se faire représenter dans les négociations des autorités de taxation et leur faire des propositions (art. 134 LIFD); elle peut interjeter recours contre les décisions de taxation et les décisions sur réclamation de l'autorité de taxation (art. 141 et 145 LIFD); enfin, elle peut élever un recours de droit administratif contre les décisions des instances cantonales de recours devant le Tribunal fédéral (art. 146 LIFD). Ces compétences permettent de garantir une pratique juridique uniforme.

Al. 3 D'après l'al. 3, l'annonce publique des prestations bénévoles ne doit pas empêcher le fondateur de les déduire. A vrai dire, cela va de soi dans la législation régissant les impôts directs. En effet, la déduction de la prestation bénévole dépend exclusivement du fait que le bénéficiaire poursuit des buts de service public ou d'utilité publique au sens de l'art. 56, let. g, LIFD ou fait partie des pouvoirs publics ou de leurs établissements. Faire savoir publiquement qu'on a versé des prestations bénévoles ne change rien à cette condition fondamentale.

Art. 59, al. 1, let. c, LIFD A part le fait qu'il s'agit ici de déductions sur le bénéfice net, on peut faire en principe les mêmes remarques qu'à l'art. 33a, al. 1 à 3, LIFD. Ces remarques concernent les nouveautés suivantes: ­

Elargissement des prestations bénévoles limitées jusqu'ici aux versements en espèces aux autres valeurs patrimoniales (voir commentaires de l'art. 33a, al. 1);

­

Elargissement de la déduction aux prestations bénévoles versées à la Confédération, aux cantons, aux communes et à leurs établissements (cf. commentaire de l'art. 33a, al. 1);

­

Possibilité de porter la déduction à la totalité (100 %) du bénéfice imposable dans certains cas (voir commentaire de l'art. 33a, al. 2);

7447

­

Le fait de porter le versement des prestations bénévoles à la connaissance du public n'a pas d'effet sur leur déduction (cf. commentaire de l'art. 33a, al. 3).

3.3.2

Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)

Les mêmes prescriptions sont en principe valables pour la LIFD et la LHID. C'est pourquoi les commentaires des dispositions de la LHID sont pour l'essentiel les mêmes que pour les dispositions de la LIFD. La table de concordance suivante montre les relations entre la LHID et la LIFD: Art. LHID

Art. LIFD

art. 9, al. 2, let. i et ibis art. 25, al. 1, let. c

art. 33a art. 59, al. 1, let. c, cbis et cter

Particularités de la LHID: Art. 9, al. 2, let. i, LHID Etant donné que l'art. 129 de la Constitution fédérale exclut expressément les montants exonérés de l'impôt (déductions) de l'harmonisation, la LHID ne mentionne ni le taux de 40 % ni la possibilité de porter la déduction à 100 %. Cette compétence relève en effet de l'autonomie du législateur cantonal.

Art. 25, al. 1, let. c, LHID Les commentaires de l'art. 9, al. 2, let. i, LHID sont valables par analogie.

3.3.3

Loi fédérale sur l'impôt anticipé (LIA)

Art. 5, al. 1, let. f (nouvelle), LIA La modification proposée n'est qu'une harmonisation avec la terminologie de la LIFD.

3.3.4

Loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA)

La disposition (art. 33a) qui devrait compléter la LTVA institue des règles particulières sur l'imposition fiscale des versements bénévoles à des organisations d'utilité publique portés à la connaissance du public. En l'occurrence, on distingue entre le cas où une telle organisation reçoit des versements bénévoles et celui où elle effectue de tels versements.

7448

Al. 1 L'al. 1 règle le cas où l'organisation d'utilité publique reçoit des versements bénévoles. Du point de vue de la TVA, le problème est de savoir si cette organisation fournit une prestation imposable (à savoir une prestation publicitaire ou une prestation visant à promouvoir l'image de l'auteur du versement) lorsqu'elle fait connaître publiquement l'auteur du versement, et en particulier lorsqu'elle le remercie publiquement. Selon la pratique en vigueur, il n'y a pas de prestation imposable; c'est pourquoi on parle également de don, lorsque l'auteur du versement est cité une ou plusieurs fois ­

avec ou sans mention de sa profession ou de son activité commerciale dans un rapport annuel ou dans un compte rendu scientifique;

­

sans mention de sa profession ou de son activité commerciale dans d'autres publications.

Par rapport à la pratique en vigueur, l'al. 1 étend le caractère de don aux versements bénévoles lorsque l'auteur d'un tel versement est cité avec sa profession ou son activité commerciale dans une publication autre qu'un rapport annuel ou un compte rendu scientifique (par ex. un programme, un tiré à part, une revue ou une affiche).

Dans ce cas, il ne s'agit plus en principe d'un simple don, mais d'un parrainage avec contre-prestation: en d'autres termes, le bénéficiaire du versement bénévole cite en contrepartie le nom ou la raison de commerce du sponsor en tant qu'entreprise dans une publication et fournit ainsi une prestation publicitaire ou visant à promouvoir l'image du sponsor. Le versement bénévole constitue alors la contre-prestation d'une prestation de services imposable.

Le nouvel al. 1 exclut l'imposition à titre de parrainage lorsqu'une organisation d'utilité publique cite publiquement l'auteur du versement bénévole à condition qu'elle le cite sous une forme neutre, c'est-à-dire sans tout complément qui pourrait avoir un effet publicitaire ou viser à promouvoir son image, par exemple en faisant allusion aux produits qu'il fabrique ou diffuse. Si l'organisation d'utilité publique ajoute uniquement le logo ou la raison sociale de l'auteur du versement bénévole, il n'y a pas non plus de contre-prestation: le versement bénévole garde son caractère de don.

Al. 2 L'al. 2 règle le cas où l'organisation d'utilité publique est l'auteur des versements bénévoles. Dans ce cas, le problème est de savoir si le bénéficiaire du versement fournit une contre-prestation imposable (en l'occurrence une prestation publicitaire) lorsqu'il cite cette organisation. Selon la pratique actuelle, il n'y a jamais de parrainage imposable dans ces cas, que l'organisation d'utilité publique soit citée dans un rapport annuel, un compte rendu, un rapport scientifique ou dans une autre publication.

Il y a cependant une exception lorsque l'organisation d'utilité publique porte le nom de l'entreprise qui l'a fondée et qui distribue des versements bénévoles par le biais de cette organisation d'utilité publique. Lorsque le nom de l'organisation d'utilité publique est cité dans une publication, l'entreprise fondatrice obtient un effet publicitaire ou une promotion de son image; dans ce cas, le bénéficiaire des versements
bénévoles fournit donc une prestation imposable en citant le nom de l'organisation d'utilité publique, ce que le Tribunal fédéral vient de confirmer dans un arrêt récent du 13 février 2002. Dans son considérant 6c, le Tribunal fédéral constate qu'il faut 7449

admettre un parrainage («sponsoring») lorsqu'une entreprise commerciale se sert d'une fondation pour vulgariser ses parrainages. Comme l'al. 1, l'al. 2 a pour but d'exclure l'imposition dans ce cas, à la condition que le nom de l'organisation d'utilité publique soit cité sous une forme neutre, donc sans aucun complément qui pourrait avoir un effet publicitaire ou viser à promouvoir l'image de l'entreprise fondatrice. Il n'y a pas non plus de contre-prestation imposable si le bénéficiaire du versement bénévole ajoute uniquement le logo ou la raison sociale de l'entreprise dont le nom est contenu dans celui de l'organisation d'utilité publique.

Al. 3 L'al. 3 précise que le versement bénévole peut se faire soit en espèces, soit sous forme de prestations appréciables en argent (prestations en nature, mise à disposition de personnel ou d'infrastructures).

Al. 4 Dans le cadre de la taxe sur la valeur ajoutée, une organisation est considérée comme poursuivant un but d'utilité publique en matière de sponsoring lorsque les quatre conditions mentionnées à l'al. 4 sont remplies. Les critères fixés s'appuient sur la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de définition de la notion d'«utilité publique» appliquée dans le cadre de l'impôt fédéral direct.

a.

L'organisation doit être gérée sous la forme juridique d'une personne morale, notamment sous celle d'une fondation ou d'une association. En outre, l'organisation doit renoncer à la distribution du bénéfice net en faveur de ses membres, de ses sociétaires ou des organes qui la composent; si cette personne morale est une société à but lucratif (notamment une société anonyme ou une société coopérative), ce renoncement doit figurer expressément dans ses statuts.

b.

Les moyens de l'organisation doivent être affectés irrévocablement au but de l'organisation, ce qui signifie qu'ils doivent être consacrés définitivement aux activités exercées par l'organisation. La distribution de ces moyens aux fondateurs, actionnaires et sociétaires doit être définitivement exclue. En cas de liquidation de la personne morale, l'ensemble de la fortune sera donc obligatoirement versé à une organisation poursuivant des buts semblables.

La gestion d'un café dans le cadre d'un musée appartenant à l'organisation, par exemple, n'enfreint pas les conditions posées tant que cette activité ne constitue pas le but principal de cette organisation ni sa seule assise économique, mais tout au plus un moyen de poursuivre le but défini (récolte de fonds).

c.

L'activité de l'organisation ne peut être d'intérêt général que si le cercle des destinataires, donc des personnes qui bénéficient de la promotion et du soutien de l'organisation, est ouvert. Restreindre le cercle des destinataires aux membres d'une association ou d'une société coopérative, ou aux personnes exerçant une profession déterminée exclut toute possibilité d'exonération d'impôt pour cause d'utilité publique.

d.

Outre l'élément objectif de l'intérêt général, la notion d'utilité publique comprend un élément subjectif, le désintéressement, c'est-à-dire l'altruisme.

Le caractère d'utilité publique d'une activité suppose donc non seulement qu'elle est exercée dans l'intérêt général, mais aussi qu'elle est désintéres-

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sée, c'est-à-dire qu'elle exige de la part des membres de la corporation ou de tiers des sacrifices en faveur de l'intérêt général primant leurs propres intérêts (cf. arrêts du Tribunal fédéral du 19 octobre 1950, in: ASA, vol. 19, p. 328 ss; arrêt du 10 avril 1987, in: ASA, vol. 57, p. 506 ss et arrêt du 28 octobre 1988, in: ASA, vol. 59, p. 464 ss). L'exonération est en principe accordée uniquement si l'activité n'est pas déployée dans le propre intérêt.

Cette libéralité désintéressée et altruiste fait défaut aux institutions d'assistance mutuelle. En outre, l'exonération n'est pas accordée si, sur la base des structures salariales, on peut supposer qu'il existe une répartition cachée des bénéfices.

La disposition du ch. 2 est mentionnée par souci d'exactitude. Elle permet d'établir un lien avec les conditions posées pour une exonération d'impôt dans le cadre de l'impôt fédéral direct à l'art. 56, let. g, LIFD.

4

Conséquences financières

Pour ce qui est des conséquences financières du projet de loi, la proposition de la commission de porter le plafond de la déduction pour les versements bénévoles aux personnes morales exonérées de l'impôt en raison de leurs buts de service public ou d'utilité publique de 10 à 40 % (et même à 100 % sous certaines conditions) du revenu net (personnes physiques) ou du bénéfice net (personnes morales) constitue la principale nouveauté pour l'impôt fédéral direct. Concernant les diminutions des recettes fiscales qui en découleraient, on peut se livrer aux réflexions suivantes: Personnes physiques Le dépouillement par l'Administration fédérale des contributions des déclarations d'impôt de la période fiscale 1995/96 (il n'existe pas de données plus récentes) a démontré que, parmi les contribuables qui font valoir des libéralités, seuls deux à trois pour cent font valoir une déduction avoisinant la limite actuelle de 10 % du revenu net. On peut en déduire que seuls 1 à 2 % des contribuables feraient valoir des déductions plus élevées si la limite de la déductibilité était relevée. Les conséquences exactes de l'élévation envisagée du plafond de la déduction sur le produit de l'impôt (resp. la diminution des recettes de l'impôt fédéral direct) ne peuvent pas être chiffrées, mais elles ne devraient pas être considérables.

On ne peut pas non plus estimer la diminution du produit des impôts cantonaux car, pour des raisons de droit constitutionnel, le projet de loi laisse (comme jusqu'à présent) au législateur cantonal le soin de déterminer le plafond de la déduction autorisée pour les versements bénévoles.

Personnes morales L'Administration fédérale des contributions ne dispose pas de relevés statistiques permettant d'évaluer l'utilisation que les personnes morales font des possibilités de déduction des versements bénévoles. Il n'est donc pas possible non plus d'indiquer la diminution du produit de l'impôt qu'entraînerait une hausse de la limite de la déduction pour l'impôt fédéral direct.

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Il en va de même pour le produit des impôts cantonaux car, comme pour les personnes physiques, il appartient au législateur cantonal de fixer le plafond de la déduction.

5

Relation avec le droit européen

Le droit européen ne connaît pas de règles de droit civil régissant les fondations.

6

Constitutionnalité

La modification des dispositions du code civil régissant les fondations (art. 80 et suivants) se fonde sur l'art. 122, al. 1, de la Constitution15 qui habilite la Confédération à légiférer en matière de droit civil.

La révision des dispositions de droit fiscal se fait dans le cadre des lois concernées, à savoir: la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (RS 642.11), la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (RS 642.14), la loi sur l'impôt anticipé (RS 642.21) et la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (RS 941.20). Les bases constitutionnelles de ces quatre lois se trouvent aux art. 128, 129, 130 et 132 Cst.

15

RS 101

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