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FEUILLE FEDERALE 115e année

Berne, le 10 janvier 1963

Volume I

Délai d'opposition: 10 avril 1963

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LOI FÉDÉRALE sur

les cartels et organisations analogues (Du 20 décembre 1962) L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 31 bis, 64 et 114bis de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 18 septembre 1961 (1), arrête: I. Champ d'application Article premier La loi est applicable aux cartels et aux organisations analogues.

Elle ne l'est pas aux conventions, décisions et mesures qui ne visent que les rapports de travail.

Art. 2 1 Sont réputés cartels au sens de la loi les conventions et les décisions ainsi que les accords sans force obligatoire qui influencent ou sont propres à influencer le marché de certains biens ou de certains services par une limitation collective de la concurrence, en réglant notamment la production, la vente ou l'acquisition de marchandises, ainsi que les prix et autres conditions.

2 Sont assimilés aux cartels les accords par lesquels des acheteurs s'engagent envers leurs fournisseurs à observer, en revendant des marchandises, des prix ou des conditions de vente déterminés (prix imposés), lorsque, c'est un cartel ou une organisation analogue qui impose ces accords ou en assure l'exécution.

(!) FF 1962, II, 549.

Feuille fédérale. 115e année. Vol. I.

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Principe

Cartels

Organisations analogues

Art. 3 Sont réputées organisations analogues au sens de la loi, lorsqu'elles dominent le marché de certains biens ou de certains services ou l'influencent d'une manière déterminante: a. L'entreprise isolée; b. Les entreprises qui accordent tacitement leur comportement; c. Les entreprises liées entre elles par des participations financières ou d'une autre manière.

II. Dispositions de droit civil et de procédure civile

Ulictìtó des entraves à la conouirence

Exceptions

1. Entraves à la concurrence de tiers Art. 4 1 Les mesures prises par un cartel, telles que l'interdiction d'acheter et de livrer des marchandises, la mise à l'index d'employeurs, les discriminations en matière de prix ou de conditions d'achat, ainsi que la sous-enchère dirigée contre un concurrent déterminé, sont illicites, sous réserve des exceptions prévues à l'article 5, lorsqu'elles visent à écarter des tiers de la concurrence ou à les entraver notablement dans l'exercice de celle-ci.

2 Les dispositions sur les entraves illicites à la concurrence sont applicables par analogie aux organisations visées par l'article 3.

Art. 5 Les entraves à la concurrence sont licites lorsqu'elles sont justifiées par des intérêts légitimes prépondérants et ne restreignent pas la libre concurrence de manière excessive par rapport au but visé ou du fait de leur nature et de la façon dont elles sont appliquées.

2 Peuvent notamment être justifiées par des intérêts légitimes prépondérants les mesures qui visent a, A sauvegarder une concurrence loyale et à empêcher d'en fausser le jeu; 6. A établir, pour une branche ou une profession, des exigences professionnelles ou techniques raisonnables; c. A promouvoir dans une branche ou une profession, une structure souhaitable dans l'intérêt général; d. A assurer l'application d'un cartel sur les marchés étrangers; e. A assurer l'application de prix imposés raisonnables, notamment lorsqu'ils sont nécessaires pour sauvegarder la qualité de la marchandise ou le service de la clientèle; est réservée l'application des lettres a à d CD matière de prix imposés.

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Ne sont pas justifiées par des intérêts légitimes les mesures qui visent uniquement à écarter de nouveaux concurrents; les 1er et 2e alinéas sont réservés.

Art. 6 1 Celui qui est atteint ou menacé dans ses intérêts par une entrave illicite à la concurrence peut demander la constatation du caractère illicite de la mesure, la cessation de cette mesure, la suppression de l'état de fait illicite, des dommages-intérêts en cas de faute et la réparation du tort moral aux conditions prévues par l'article 49 du code des obligations.

2 Pour assurer la cessation de la mesure ou la suppression de l'état de fait illicite, le juge peut, à la requête du demandeur, décider que des engagements à caractère de cartel seront sans effet à l'égard de ce dernier; au besoin, il peut aussi ordonner que le demandeur adhère au cartel, avec les droits et obligations qui en découlent, ou ordonner qu'il soit admis dans l'association.

s A la demande de la partie qui a eu gain de cause, le juge peut l'autoriser à faire publier le jugement aux frais de la partie adverse.

Il fixe le mode et l'étendue de la publication.

Art. 7 Les cantons désignent pour l'ensemble de leur territoire un tribunal chargé de connaître en instance cantonale unique des actions intentées pour entrave illicite à la concurrence. Ce tribunal est également compétent pour connaître d'autres actions civiles intentées en même temps que l'action pour entrave illicite à la concurrence.

2 L'action peut être intentée : a. Contre tous les responsables, dans le canton où le cartel ou l'organisation analogue a son siège ou, faute d'un tel siège, dans le canton où il a son administration; à ce défaut, dans le canton où la majorité des défendeurs ont leur domicile ou, au choix du demandeur, dans l'un des cantons où les défendeurs sont en nombre égal; b. En l'absence d'autre for en Suisse, au lieu où l'acte illicite a été commis.

Art. 8 Le recours au Tribunal fédéral est recevable sans égard à la valeur litigieuse.

Art. 9 Dans les contestations en matière d'entraves illicites à la concurrence, les secrets de fabrication ou d'affaires des parties seront sauvegardés. La partie adverse n'obtiendra connaissance des moyens de 1

ActîoLB

For

Recours

Sauvegarde des secrets d'affaires

preuve propres à révéler de tels secrets que dans la mesure compatible avec leur sauvegarde.

Art. 10 Mesures provisionnelles

En vue de garantir les droits découlant d'entraves illicites à la concurrence, le juge ordonne, à la requête de l'une des parties, des mesures provisionnelles, telles que l'administration de preuves à futur ou la cessation des mesures attaquées. Les articles 9 à 12 de la loi du 30 septembre 1943 sur la concurrence déloyale sont applicables par analogie.

2. Engagements internes des membres du cartel

Art. 11 Forme & caractère de cartel

1

Les conventions et décisions créant des engagements à caractère de cartel ne sont valables qu'en la forme écrite. Pour les décisions, un procès-verbal signé suffit.

2

Celui qui adhère à un cartel n'est Hé par les engagements à caractère de cartel que s'il les reconnaît par écrit.

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Les accords relatifs aux prix imposés assujettis à la loi ne nécessitent pas la forme écrite.

Art. 12 Libération dos engagements à caractère de cartel

1

Celui qui est lié par un engagement à caractère de cartel peut demander au juge d'en être totalement ou partiellement libéré lorsque sa position s'est notablement détériorée ou lorsqu'un autre juste motif rend son engagement incompatible avec les règles de la bonne foi. Le jugement rétroagit au jour de l'introduction de la demande, à moins qu'exceptionnellement le juge n'en décide autrement.

2 Le juge ne peut ordonner la libération partielle que s'il peut admettre que les parties se seraient liées même en l'absence des clauses attaquées.

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Si le membre d'une association entend se libérer de ses engagements à caractère de cartel sans cesser d'être membre, le juge n'en décidera ainsi que si l'on peut équitablement l'exiger de l'association.

4 Sont réservées toutes dispositions légales, statutaires ou conventionnelles qui régleraient la dénonciation ou la sortie dans un sens plus favorable au contractant ou au sociétaire.

Art. 13 1

Aucune indemnité ne peut être exigée de la personne dont les engagements à caractère de cartel prennent fin ou qui sort d'une association visant principalement des fins semblables à celles des cartels.

2 Le cartel ne doit pas rendre la cessation des engagements difficile à l'excès par la manière dont il règle les droits pécuniaires du membre sortant ainsi que les délais de dénonciation ou d'autres conditions de sortie.

Conditions inadmissibles

Art. 14 1

Les entraves à la concurrence définies à l'article 4= qui visent à faire observer des engagements à caractère de cartel ou des prix imposés raisonnables, assujettis à la loi, ne sont licites que si les mesures prises ne causent pas à celui qui en est l'objet un préjudice excessif par rapport au but visé ou du fait de leur nature ou de la façon dont elles sont appliquées.

2 Si les mesures sont illicites, le lésé peut intenter les actions prévues par l'article 6.

3 Les articles 4 et 5 sont applicables aux mesures auxquelles l'intéressé ne s'est pas soumis d'avance.

Sanctions

Art. 15 1

Les conventions et décisions attribuant à une juridiction arbitrale la connaissance de contestations futures relatives à la naissance, à la validité et à l'extinction d'engagements à caractère de cartel ou à des mesures prises à titre de sanction en vertu de l'article 14 sont nulles lorsqu'elles ne donnent pas à chaque partie le droit, dans chaque cas, d'intenter action auprès du juge ordinaire ou de demander dans les trente jours qui suivent la notification de la plainte que la contestation soit tranchée non par le tribunal arbitral mais par le juge ordinaire.

2 Lorsque, dans d'autres contestations, des droits visés au premier alinéa sont invoqués devant une juridiction arbitrale, celle-ci est compétente pour en connaître, à moins que la partie qui fait valoir ces droits ne saisisse le juge ordinaire dans les trente jours.

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Les dispositions des alinéas 1er et 2 ne sont pas applicables aux conventions et décisions auxquelles sont également parties des personnes domiciliées à l'étranger s'il est prévu que les contestations seront portées devant un tribunal arbitral international.

Juridiction arbitrale

Autres dispositions de procédure

Art. 16 Les articles 9 et 10 concernant la sauvegarde de secrets d'affaires et les mesures provisionnelles sont applicables aux contestations relatives à des engagements à caractère de cartel. En outre, dans les contestations relatives à des mesures prises à titre de sanction en vertu de l'article 14, le for se détermine d'après l'article 7.

IH. Dispositions de droit administratif 1. Organisation et tâches de la commission des cartels

Organisation

Enquêtes générales

Recommandations et avis

Art. 17 Le Conseil fédéral nomme une commission des cartels, de 11 à 15 membres, où sont représentés les sciences économique et juridique, les milieux économiques et les consommateurs. La commission dispose d'un secrétariat. Le Conseil fédéral arrête le règlement de la commission d'entente avec celle-ci.

2 La commission est indépendante des autorités administratives.

Elle remet chaque année au département fédéral de l'économie publique un rapport sur son activité; ce rapport est publié.

3 Les membres de la commission sont liés par le secret de fonction. Le rapport d'activité et les autres rapports de la commission qui sont publiés ne doivent révéler aucun secret d'affaires.

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Art. 18 La commission procède, de sa propre initiative ou à la demande du département fédéral de l'économie publique, à des enquêtes concernant la situation, l'évolution et les effets des cartels et des organisations analogues en Suisse. Elle publie ses rapports d'enquête, à moins que le département n'en décide autrement.

2 La commission réunit les jugements rend.us en vertu de la loi et les publie périodiquement sous une forme appropriée. Les tribunaux transmettent à la commission une expédition complète de leurs jugements.

Art. 19 1 La commission sera consultée lors de l'élaboration de lois et d'ordonnances fédérales qui restreignent la libre concurrence. Elle peut, de sa propre initiative, soumettre au Conseil fédéral des recommandations touchant la politique en matière de concurrence.

2 Sur demande, la commission donne aux tribunaux ainsi qu'aux personnes justifiant d'un intérêt légitime des avis sur des questions de principe relatives aux cartels.

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Art. 20 Le département fédéral de l'économie publique peut charger la commission d'enquêtes spéciales en vue d'établir si certains cartels ou certaines organisations analogues ont des effets nuisibles d'ordre économique ou social.

2 Avant de clore la procédure, la commission donnera aux intéressés l'occasion de s'exprimer sur le résultat de ses investigations.

Elle peut leur recommander de modifier ou d'annuler certaines clauses ou de renoncer à des mesures prises par des cartels ou des organisations analogues.

3 Une fois la procédure terminée, la commission remet au département fédéral de l'économie publique un rapport et des propositions. Si le département estime qu'une enquête complémentaire est nécessaire, la commission y procédera.

4 Le département décide de la publicité à donner aux résultats de l'enquête.

Art. 21 1 Lorsqu'elle procède à une enquête spéciale, la commission invite les personnes qui peuvent l'éclairer sur les faits à lui fournir les renseignements utiles et à produire les pièces nécessaires. Elle peut faire appel à des experts.

2 Si cette libre consultation ne permet pas d'élucider suffisamment les faits, la commission interrogera les parties, entendra les témoins et ordonnera la production des pièces. Les articles 36 à 65 de la loi de procédure civile fédérale du 4 décembre 1947 et les articles 22 à 26 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 sont applicables par analogie.

3 Les mesures et décisions de la commission peuvent être attaquées dans un délai de dix jours devant le président du Tribunal fédéral pour violation manifeste du droit.

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2, Action administrative

Art. 22 Pour sauvegarder l'intérêt public, le département fédéral de l'économie publique peut, en se fondant sur une enquête spéciale, dans le délai d'une année à compter de la remise du rapport d'enquête, intenter action devant le Tribunal fédéral, contre un cartel ou une organisation analogue qui empêche la concurrence ou l'entrave notablement dans une branche économique ou une profession, d'une manière incompatible avec l'intérêt général, notamment au détriment des consommateurs.

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Enquêtes spéciales

Procédure en matière d'enquête» spéciales

8 2

S'il admet l'action, le Tribunal fédéral ordonne les mesures nécessaires; en particulier, il peut annuler ou modifier certaines clauses ou interdire des mesures prises par des cartels ou des organisations analogues.

3 L'article 9 concernant la sauvegarde de secrets d'affaires est applicable par analogie.

IV. Dispositions finales

Art. 23 Sauf disposition contraire de la loi, les dispositions du code civil, notamment celles du code des obligations, sont applicables aux cartels et aux organisations analogues.

2 Sont réservées les dispositions fédérales sur la concurrence déloyale, la protection industrielle et le droit d'auteur, ainsi que les prescriptions de droit public qui dérogent à la loi.

3 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la loi.

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Ainsi arrêté par le Conseil des Etats.

Berne, le 20 décembre 1962.

Le président, F. Fauquex Le secrétaire, F. Weber Ainsi arrêté par le Conseil national.

Berne, le 20 décembre 1962.

Le président, André Gninand Le secrétaire, Ch. Oser Le Conseil fédéral arrête : La loi fédérale ci-dessus sera publiée en vertu de l'article 89, 2e alinéa, de la constitution fédérale et de l'article 3 de la loi du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux.

Berne, le 20 décembre 1962.

Par ordre du Conseil fédéral suisse : 13689

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser Date de la publication : 10 janvier 1963 Délai d'opposition: 10 avril 1963

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LOI FÉDÉRALE sur les cartels et organisations analogues (Du 20 décembre 1962)

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1963

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10.01.1963

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