# S T #

N° 6

LVIe année. Vol. I.

10 février 1904.

Abonnement par année (franco dans toute la Suisse) : 5 francs.

Prix d'insertion 15 centimes la ligne ou son espace. Les insertions doivent être transmises franco à l'expédition. -- Imprimerie et expédition de C.-J. Wyss, à Berne.

# S T #

Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le projet d'une loi fédérale concernant le contrat d'assurance.

(Du 2 février 1904.)

Monsieur le président et messieurs, Dans le domaine de l'assurance privée, la constitution fédérale accorde la souveraineté législative à la Confédération en ce qui concerne le droit administratif et en ce qui concerne le droit privé.

Suivant l'article 34, alinéa 2, de la constitution, « les opé« rations des entreprises d'assurance non instituées par l'Etat « sont soumises à la surveillance et à la législation fédérales ».

Sur la base de cette disposition a été édictée, le 25 juin 1885, la loi fédérale concernant la surveillance des entreprises privées en matière d'assurance (qui sera désignée dorénavant par « loi de surveillance »). Par cette loi, la Confédération institue un contrôle étendu de l'Etat sur les conditions techniques et sur la situation financière des établissements privés d'assurance qui opèrent dans notre pays. Mais la loi de surveillance ne touche en aucune façon aux rapports de droit privé entre les personnes qui sont parties au contrat d'assurance.

Elle règle exclusivement la surveillance de l'Etat, qui a pour tâche, suivant le but principal de la loi, de rendre certaine la Feuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

19

268

solvabilité des entreprises' privées d'assurance. Ainsi la loi de surveillance, réglant uniquement les rapports entre l'Etat et les entreprises privées d'assurance, ressort au droit public; c'est une loi de police limitée dans son objet.

La souveraineté législative de la Confédération, quant au droit privé en matière d'assurance, résulte de l'article 64 de la constitution fédérale. Ce droit privé comprend les prestations réciproques que fait, naître le contrat d'assurance, les droits et les obligations des parties contractantes, de l'assureur et du preneur d'assurance. Le droit privé relatif aux assurances forme ainsi une partie intégrante du droit fédéral des obligations ; c'est pour des motifs d'opportunité seulement que, lors de la codification du droit des obligations, on a renoncé à légiférer sur les assurances.

Ces motifs n'ayant plus de valeur, comme nous l'expliquerons plus loin, nous pensons qu'il faut maintenant s'efforcer de soumettre sans retard le droit des assurances à des règles légales, et de combler ainsi une lacune dans le droit des obligations.

Nous avons donc l'honneur de vous soumettre le projet d'une loi fédérale sur le contrat d'assurance, avec l'exposé des motifs qui suit.

A. Coup d'oeil sur l'état actuel de la législation sur le droit privé des assurances; nos travaux préparatoires.

Le droit privé des assurances a un caractère d'universalité très marqué. Dans ses traits principaux, il s'est développé de ·la même manière dans tous les Etats civilisés. Ce développement uniforme, qui s'explique par l'identité des facteurs constitutifs du droit, -- technique des assurances et besoins de sécurité économique, -- fournit une large source internationale de droit, au lieu d'une source nationale.

Le droit privé d'assurance, c'est le droit relatif à un genre spécial de contrat. Ce genre comprend des formes nombreuses. La terminologie actuelle distingue deux types principaux : le contrat d'assurance maritime et le contrat d'assurance terrestre (assurance sur la vie, assurance contre les accidents .et la maladie, assurance contre l'incendie, assurance contre la

269

responsabilité légale, assurance contre la grêle et contre la mortalité du bétail, assurance contre les risques de transports terrestres, etc.)

Le développement du droit d'assurance se rattache à l'assurance maritime. Le droit d'assurance maritime s'est, dans ses traits principaux, constitué librement d'après les besoins du commerce. Dans les Etats baignés par la mer, il s'est élaboré d'une manière complète au cours des siècles un droit d'assurance maritime, qui est aujourd'hui, presque partout, consacré par la toi.

Mais le droit relatif aux formes nouvelles, aux assurances terrestres, c'est-à-dire à la matière d'assurance qui, dans notre situation territoriale, est soumise à la codification, ne s'est pas développé en même temps que l'assurance elle-même. Le professeur Ehrenberg, dans son « Handbuch des Versicherungsrechts», publié en 1893, dit fort bien, page 41: «Sur un « grand nombre des principes les plus importants, malgré la « collaboration de toutes les nations civilisées, il n'a pas été « possible d'obtenir l'unité dans la doctrine ni dans la pra« tique ; on peut donc facilement comprendre que, dans la plupart « des Etats, la législation ait gardé beaucoup de réserve à « l'égard du droit d'assurance. Là où l'on a tenté une codi« fication générale, on a fréquemment formulé des règles géné« raies sans couleur, sans portée ou même complètement erro« nées ; même dans la doctrine, c'est à peine s'il a été tenté « de bien saisir dans leurs principes les conflits d'intérêts dont « il s'agit, de faire une distinction, qui s'impose, spécialement « ici, entre les règles imperatives et celles qui sont simplement x< dispositives ; et la jurisprudence, qui, dans nombre de ques« tions spéciales importantes, a de beaucoup devancé la doc-« trine, n'a eu naturellement que de rares occasions d'examiner « à fond les grandes questions de principe. Tandis que l'assu« rance a atteint une perfection technique, une efficacité prati-, « que sans pareilles, le droit, qui devait la consacrer et lui « garantir la sécurité, est resté dans un état déplorable d'ina« chèvement quant au fonds et quant à la forme. » Le législateur, il est vrai, n'est pas resté partout dans l'inaction. Quelques Etats soumettent le contrat d'assurance aux règles relatives aux assurances maritimes (Code civil français, art.

1964), ou
établissent des règles communes pour les assurances maritimes et pour les assurances terrestres (ainsi le Landrecht prussien, dont les règles sur ce point ont été au fonds abrogées depuis assez longtemps déjà, les unes par le Code de

270

commerce allemand, les autres par des lois prussiennes spéciales). Cette manière de régler les choses n'a pas pu être maintenue. La prépondérance du droit maritime, fixé depuis longtemps, ne permettait pas de tenir suffisamment compte des particularités inhérentes à l'assurance terrestre, comme l'exige la nature des choses. - Dans une série d'autres Etats,, le droit des assurances terrestres a été codifié sur une base indépendante. Ainsi en Portugal, Code de commerce de 1834 revisé en 1888 ; dans les Pays-Bas, Code de commerce 1838 ; en Belgique, loi de 1874 (Code de commerce, Livre I, Titres X et XI); en Hongrie, Code de commerce de 1875; en Italie, Code de commerce de 1882; en Espagne, Code de commerce de 1885; en Roumanie, Code de commerce de 1887. -- Au premier rang des codifications des Etats de l'Amérique, se place la partie du Code de commerce du Chili (1867) relative aux assurances terrestres. Le nouveau Code de commerce du Japonr de 1898, contient aussi, dans les articles 383--430, des règles relatives aux assurances terrestres. Les autres Etats de l'Europe, l'Angleterre, la France, l'Allemagne, l'Autriche, les pays du Nord et la Suisse n'ont encore aujourd'hui aucune codification du droit des assurances terrestres. L'Angleterre règle par des lois spéciales quelques questions essentielles de l'assurance sur la vie. Dans les Etats de l'Empire d'Allemagner surtout en Prusse, existent quelques lois spéciales sur diverses matières des assurances terrestres, en particulier sur l'assurance contre l'incendie. En Autriche, .on applique les régies du Code civil (§ 1267 à 1269; 1288 à 1292).

Un petit nombre seulement de législations cantonales, maintenues en vigueur par l'art. 896 C. Ó., règlent le contrat d'assurance. Il n'y a de prescriptions détaillées que dans les Codes civils de Zurich et de Schaffhouse. Les autres cantons se contentent de fixer quelques principes fondamentaux en matière d'assurance, ou ne s'occupent que de la place du contrat d'assurance dans la classification du droit (contrats aléatoires, inadmissibilité de l'exception du jeu).

Plusieurs Etats ont cherché à codifier le droit des assurances terrestres. Tel a été le cas en Autriche, sous la forme d'un Projet de loi autrichienne sur l'assurance, élaboré en 1870 .par le Ministère de la Justice, et sous la forme d'un remarquable
projet rédigé en 1889 par l'Association d'assureurs austro-hongroise (Fachverein österreichisch-ungarischer Assekurateure). Dans les Pays-Bas et en Scandinavi",, il y a aussi des projets de lois d'assurance, qui réaliseraient un progrès suides points importants.

271

En Allemagne et en Suisse, les essais de codification ont été plus persévérants. En Allemagne, ces tentatives ont été faites tantôt sur le terrain du droit des Etats (Projet d'un Code de commerce, en Wurtemberg, 1839 ; projet d'un Code civil bavarois 1861), tantôt sur le terrain du droit impérial (Conférence du Nuremberg, Commission fédérale de Dresde; Bahr, Projet d'une loi impériale sur le contrat d'assurance, 1892). Un projet complet de loi sur le contrat d'assurance terrestre pour l'Empire allemand a été publié récemment.

Nos essais de codification en Suisse remontent au Projet de Code de commerce suisse de Munzinger (1864). Le 111° Livre range le contrat d'assurance au nombre des actes de commerce les plus importants. A la base de son travail relativement aux assurances, Munzinger place deux grands principes, « le maintien de l'ordre public » et « la protection de l'assuré. » Aussi les dispositions du projet, qui ne visent qu'à fixer les principes généraux du droit des assurances terrestres, sont peu nombreuses, comme il convenait, et sont généralement imperatives. La critique objecta avant tout que la notion de « l'ordre public », vague, difficile à définir, ne peut servir de base à des règles de droit civil. De même le postulat « de la protection de l'assuré » pris en lui-même, abstraction faite de la nature spéciale de l'assurance, conduit à des règles inadmissibles. -- Le premier Projet d'un Code fédéral des obligations reproduisait au fond les prescriptions du projet du Code de commerce de 1864 concernant les assurances. Les projets suivants, par contre, modifièrent ces prescriptions sur des points essentiels. Mais ces propositions aussi soulevaient, à d'autres égards, une opposition non moins vive, que manifestèrent surtout les entreprises d'assurance suisses et la Société suisse des Juristes (1877, assemblée de Zurich). En présence de critiques qui sur beaucoup de points étaient bien fondées, on renonça à régler le droit privé d'assurance en même temps que le droit des obligations.

Mais la codification du droit des assurances ne devait pas être abandonnée ; elle était seulement ajournée. Lors de la discussion de la loi de surveillance déjà, la proposition fut faite au sein de la 'Commission du Conseil des Etats d'édicter un principe net de droit privé (F. féd. 1885, I, 511). Il ne
fut donné aucune suite à cette proposition, parce que, comme le Conseil fédéral l'expose en détail dans son Supplément au Message (F. féd. 1. c. 511), les rapports de droit privé que le contrat d'assurance crée entre les parties devaient être réglés

272

ultérieurement d'une manière complète par une loi spéciale. Le rapport de la Commission du Conseil des Etats rappelle « qu'il y a lieu d'ajourner l'élaboration de cette loi, afin d'être « à même de profiter des expériences que fournira l'exercice « de la surveillance fédérale et d'y puiser des directions dont « la codification civile pourra s'inspirer » (F. féd., 1885, I, 598).

Dans l'assemblée de la Société suisse des Juristes, en 1885, fut exprimée aussi la conviction que la codification du droit privé d'assurance était urgente. (Voir Zeitschrift für schweizerisches Recht, n. P. IV, 582).

L'impulsion directe en faveur de notre récent essai de codification a donc été donnée par la Société suisse des Juristes.

Dans sa 29e session (Genève 1891), la Société avait comme objet de discussion « les principes à édicter à la base d'une loi fédérale sur le contrat d'assurance sur la vie. » Le rapporteur, Dr Rehfous, préavisa en faveur d'une loi spéciale sur le contrat d'assurance sur la vie et formula des thèses précises.

Le corapporteur Lienhard, conseiller d'Etat, formula la thèse principale que «le contrat d'assurance sur la vie devait être réglé par la loi en même temps que le contrat d'assurance en général. » La Société décida d'inviter le Conseil fédéral à prendre en mains, sans retard, la codification du droit en matière d'assurance. Le Conseil fédéral fit bon accueil à cette requête et transmit la question au Département de Justice et Police, et à celui de l'Industrie et de l'Agriculture. En 1893, les deux Départements constituèrent une commission d'experts et y appelèrent MM. Cornaz, juge fédéral à Lausanne ; Grossmann, directeur de PHelvétia à St-Gall ; Dr Eugène Iluber, professeur à Berne ; Dr Kinkelin, professeur à Baie ; Dr Kummer, directeur du bureau fédéral des assurances, à Berne ; Lienhardt député au Conseil des Etats, à Berne ; Dr L. Eehfoiis', avocat à Genève ; Dr H. Roelli, chef de la subdivision juridique au Bureau fédéral des assurances ; Dr Léo Weber, secrétaire pour la législation et la justice, à Berne.

La Commission se réunit une première fois le l or juillet 1893. Elle discuta surtout la question de la nécessité de la loi.

Comme la .Société suisse des Juristes, elle se prononça catégoriquement dans ce sens qu'en légiférant sur la matière on satisferait à un besoin urgent
des cercles intéressés, et que l'on donnerait à la loi fédérale concernant la surveillance des entreprises privées d'assurance son complément nécessaire. La Commission n'aborda pas d'autres questions ; elle ne discuta ni les principes ni l'étendue du travail ; elle reconnut qu'il fallait

273

laisser le champ libre au rédacteur, pour qu'il pût, sous sa responsabilité, faire un travail formant un tout homogène. Sur la proposition de la Commission, le Conseil fédéral chargea M. Roelli, professeur à Zurich, précédemment fonctionnaire juridique du Bureau des assurances, de préparer un projet de loi avec exposé des motifs.

Le projet, qui a le caractère d'une oeuvre individuelle, fut transmis au Département de Justice et Police en janvier 1896, avec l'exposé des motifs des parties les plus importantes; et le reste des motifs suivit en août de la même année. Le Département de Justice et Police le communiqua immédiatement au Tribunal fédéral, aux gouvernements cantonaux et aux tribunaux supérieurs, aux facultés de droit suisses, aux journaux juridiques suisses, aux compagnies concessionnées, et aux journaux spéciaux étrangers les plus connus. Cette publicité donnée au projet provoqua un grand nombre de travaux critiques.

Le Département de Justice et Police renforça alors la Commission d'experts en y adjoignant MM. de Cérenville, directeur d'assurances à Lausanne; Favey, professeur à Lausanne; Dr Forrer, conseiller national, àWinterthour; Langsdorf, directeur à Winterthour (remplacé après son décès, comme représentant de la branche-accidents, par M. Mêler, directeur à Zurich); Stein, directeur à Baie; Hans Weber, juge fédéral, à Lausanne.

Il se fit représenter dans les délibérations de la Commission par le chef de la division de législation et de justice (d'abord M. le professeur de Salis, puis par M. le professeur Reichel).

La Commission se réunit en septembre 1896 pour la seconde fois. Elle décida d'entrer en matière sur le projet et de répartir le travail préparatoire entre trois sous-commissions (technique, économique et juridique). Les délibérations commencèrent en 1897 et se terminèrent en 1901. Chaque souscommission soumit le projet à une discussion approfondie.

Lorsque les sous-commissions eurent achevé leurs travaux, la Commission entière se réunit sous la présidence de M. Hans Weber, juge fédéral, pour la discussion finale. Des procès-verbaux détaillés des délibérations des commissions ont été rédigés par M. le Dr Ostertag, président du tribunal civil à Baie.

Dans sa 37e réunion à Fribourg (1899), la Société suisse des Juristes entendit un rapport de l'auteur du projet sur les

274

travaux préparatoires d'une loi fédérale sur le contrat d'assurance. La Société déclara par une résolution que le projet formait une base convenable pour la codification du droit privé en matière d'assurance (voir Zeitschrift für schweizerisches Recht; n. s. XVIII, 766).

Notre projet s'en tient, en principe, à la rédaction que la commission d'experts a donnée en définitive au projet de loi, et qu'elle a adoptée à l'unanimité dans sa séance du 1er octobre 1901.

B. Les points de vne généraux dans le travail de codification.

1. Nécessité de la codification.

Le droit privé en matière d'assurance forme une partie intégrante du droit des obligations. Les motifs généraux qui réclamaient autrefois des règles uniformes pour les opérations juridiques les plus importantes de la vie quotidienne, poussent aussi à la codification du droit relatif aux assurances. Depuis longtemps l'assurance est sortie du cadre des opérations auxiliaires du commerce ; elle est devenue aujourd'hui une opération indépendante, et elle a pris une place importante dans la vie économique actuelle. Ainsi, à la fin de 1900, le montant total des assurances des Compagnies d'assurances sur la vie soumises à la surveillance fédérale s'élève à 683,524,569 francs en capital, et à 2,480,581 francs en rentes annuelles. A la même date, les sociétés d'assurances contre l'incendie assurent net 7,847,276,173 francs. Les entreprises concessionnées en Suisse par la Confédération encaissent en 1900 en Suisse ensemble 50,732,886 francs, soit fr. 15. 26 par tête d'habitant.

L'art. 896 G. 0. renvoie au fond à une page blanche.

Dans la plupart des cantons, toute codification du droit d'assurance fait défaut. Les règles générales ou spéciales du droit d'assurance qui sont en vigueur ça et là dans les cantons, sont ou surannées ou insuffisantes, ou même erronées, si l'on se place au point de vue du droit actuel. En 1864 déjà, Munzinger relevait dans son Exposé des motifs, page 324, que bon nombre de dispositions du Code civil zuricois concernant les assurances étaient insignifiantes. La revision de ce code en 1887 n'a rien changé à cette situation. Dans son commentaire du P. G. B. revisé, Livre III, Titre VII, Du contrat d'assu-

275

rance, Schneider écrit : « Dans l'attente de la loi fédérale prévue à l'article 896 C. 0., les dispositions antérieures ont été maintenues sans modification. » Mais des législations cantonales meilleures seraient encore insuffisantes. Les opérations d'assurance, qui réclament l'exploitation rationnelle en grand (voir page 19), ont besoin, plus que toute autre, d'être soumises à des règles uniformes, surtout dans un petit Etat.

L'état actuel de la législation cantonale favorise la codification sur le terrain du droit fédéral, en ce sens que l'intervention de la Confédération ne peut pas se heurter à des difficultés extérieures ayant leur source dans un droit original bien déterminé.

Les cercles intéressés ont un besoin urgent que le droit d'assurance soit réglé par la loi. A cause de ses particularités, qui ont leur source dans une union spéciale d'éléments techniques et d'éléments économiques, il est nécessaire que l'opération d'assurance soit consolidée par la loi. Peu de gens comprennent l'essence de l'assurance et sa fonction. C'est à cela qu'il faut faire remonter une série de plaintes qu'on entend couramment et qui ne sont réellement pas fondées. C'est ainsi par exemple qu'une personne inexpérimentée est choquée de ce que, lorsqu'il y a sinistre total, l'assureur contre l'incendie ne paie pas sans discussion la somme assurée ; de ce que l'assureur sur la vie ne restitue pas la totalité des primes payées, lorsque le contrat est résilié unilatéralement. La loi seule, en réglant les droits et les obligations des parties contractantes, peut porter remède à cela. Elle augmente la confiance du public dans l'institution de l'assurance ; elle favorise ainsi le développement de l'assurance, et le particulier qui a besoin de sécurité, comme aussi les établissements d'assurance et la prospérité publique, sont donc intéressés à la codification. Elle procure à l'assuré la sécurité d'esprit et la sécurité matérielle ; elle fournit à l'assureur un puissant appui moral. -- La législation est appelée de plus à modifier la situation juridique qui existe actuellement entre l'assureur et l'assuré, en procurant à l'assuré les droits qui résultent pour lui de l'essence et du but de l'assurance, mais que sous le régime de la liberté illimitée des conventions le public doit souvent abandonner aujourd'hui. Dans les
affaires d'assurance, la « liberté des conventions » n'existe en réalité que pour l'assureur. En premier lieu, celui qui a besoin de s'assurer n'est généralement pas à même de pénétrer le contenu des Conditions générales, -- qui sont souvent très étendues, -- et d'en comprendre le sens et la portée, surtout si ces conditions doivent être recherchées dans des statuts ou des

276 * règlements alourdis d'une masse de prescriptions organiques.

Dans la pratique courante, celui qui désire contracter une assurance renonce d'emblée à étudier de près la proposition ; il se contente des indications et des renseignements d'un intermédiaire expert dans les affaires, de l'agent, pour les actes duquel l'assureur a coutume de décliner d'avance toute responsabilité. Mais celui-là même qui aurait la connaissance voulue doit accepter toutes les conditions, sans pouvoir les critiquer ; sinon, il devrait se passer de la garantie qui lui est nécessaire. En fait, les Compagnies d'assurances sont investies d'un monopole ; les individus isolés ne peuvent se soustraire à leur pression

A cet état de choses correspond en général la teneur des conditions d'assurance. -- On fait à l'assuré- le devoir le plus strict d'observer des prescriptions particulières, inusitées dans les affaires ordinaires, très détaillées, ayant, il est vrai, des motifs réels (comme, par exemple, l'appréciation du risque), mais qui permettent des conclusions différentes suivant la manière de voir individuelle et suivant le degré de culture de l'intéressé ; tout cela sans lui fournir une indication quelconque pour s'orienter ; et chaque inobservation de ces prescriptions, souvent . vagues, entraîne la déchéance immédiate de tout droit.

Au nombre de ces prescriptions, il faut placer, -- outre la procédure souvent fort compliquée qui est prévue pour constater le dommage et fixer l'indemnité, -- l'obligation de faire des déclarations nombreuses, dont le contenu reste souvent indéterminé, tandis que leur forme et l'époque où elles doivent être faites sont réglées minutieusement. Tel est notamment le cas des déclarations relatives à la modification du risque pendant la durée du contrat. Par exemple, que doit faire l'assuré en présence des conditions suivantes : Si le risque se trouve modifié d'une manière quelconque (Branche-accidents)...; si pendant le cours de l'assurance, le risque d'incendie est aggravé (Branche-incendie)...; tout changement qui survient pendant la durée de l'assurance dans la situation de l'assuré, notamment dans ses occupations on sa profession... (Branche-vie)? -- C'est aussi un fait que maintes conditions sont indûment préjudiciables à l'assuré. -- A tout cela s'ajoute que la pratique des assurances n'est souvent pas d'accord avec la conduite que le contrat prescrit aux parties. Tantôt, par exemple, la prime est déclarée portable ; il est interdit, à l'agent de l'aller encaisser -- et, en même temps, cela est toléré. Tantôt on ad-

277

met, et l'on recommande même, que l'agent fasse un examen des lieux et remplisse de déclarations le formulaire, mais en même temps on enlève à l'assuré le droit de se prévaloir des constatations faites par l'agent ou des instructions fournies par lui... La clause du contrat suivant laquelle la police n'est délivrée que contre paiement de la première prime est journellement violée, et on laisse l'assuré dans la conviction qu'il est assuré, puisqu'il a la police en mains. Peut-être l'assuré découvre-t-il trop tard que l'assurance entre en vigueur non pas dès la remise de la police, mais seulement après le paiement de la première prime. - Enfin, la confusion et l'insécurité juridique sont aggravées par le fait que souvent l'assureur déroge sans nécessité au droit commun en matière d'obligations, ou que l'assureur étranger se réfère à sa législation nationale au lieu de se préoccuper de quelques questions de notre droit.

La jurisprudence est parvenue, il est vrai, à des résultats importants. Mais le principe de la liberté des conventions constitue un obstacle ; il soustrait précisément à l'examen du juge les grandes questions générales et ne permet de lui soumettre que des questions spéciales. Personne ne pourra blâmer le juge, en présence de cet état défavorable du droit, d'avoir recouru à des règles d'interprétation exceptionnelles dans le domaine des obligations, et de s'être refusé à appliquer d'une manière rigoureuse certaines conditions d'assurance. Mais, à la longue, cela est incompatible avec la sécurité du droit.

Il faut enfin tendre à la codification pour assurer l'application de la loi de surveillance. Les articles 2 et 4 de cette loi prescrivent de soumettre à l'examen et à l'approbation du Conseil fédéral, entre autres, les conditions générales d'assurance. Les règles à édicter fourniraient la mesure pour apprécier les documents qui doivent être produits. A cette heure, l'autorité de surveillance se borne à examiner si les conditions d'assurance1 se heurtent à une règle imperative du droit fédéral. (Loi de surveillance, lois sur la responsabilité des industriels et Code fédéral des obligations.) Cette méthode de vérification ne peut naturellement sauvegarder les intérêts des assurés que d'une manière insuffisante.

La codification n'est pas rendue inutile par le fait que la .concurrence
intense entre les Compagnies d'assurances a amené avec le temps la disparition de mainte condition rigoureuse et arbitraire (surtout dans les assurances sur la vie). Ainsi que cela a été expliqué plus haut, il reste encore beaucoup à faire, et l'on ne peut s'en remettre à l'effet de la concurrence, qui

278 opère par occasion, mais au hasard et sans plan. Seule la loi peut remédier aux inconvénients qui résultent de ce que les rapports entre les parties ne sont pas réglés d'une manière claire et complète, même dans les contrats les mieux rédigés.

Il ne peut être que bon d'orienter en même temps le juge et l'avocat sur les points fondamentaux d'une institution dont le développement juridique n'a pas marché de pair avec le développement économique et technique.

Au sujet de la nécessité de la codification, notre Commission d'experts s'est exprimée comme suit : « A l'unanimité, il est exprimé aux autorités fédérales le « voeu pressant de pourvoir le plus promptement possible à « l'élaboration de la loi sur la base du projet, et de ne pas « attendre la revision du Code fédéral des obligations ou l'en« trée en vigueur de l'ensemble du droit civil. Une prompte co« dification est nécessaire soit dans l'intérêt du public, soit spécia« lement aussi en considération de la tâche du Bureau fédéral « des assurances et des besoins des Compagnies d'assurances. Il « faut au Bureau fédéral une base pour vérifier l'admissibilité « des conditions générales d'assurances. Les Compagnies d'as« surances cherchent à éviter le plus possible de fréquentes « modifications dans leurs conditions générales ; dans l'attente « de la revision que rendrait nécessaire l'introduction de la « loi, elles ont' ajourné jusqu'à cette revision générale les « changements qu'elles pouvaient adopter ; elles insistent, elles « aussi, pour que la situation actuelle prenne fin. » 2. Possibilité de la codification.

Il faut reconnaître franchement que la matière est ardue, qu'elle rend le travail difficile et réclame des dispositions soigneusement pesées et bien en harmonie avec les besoins économiques et les exigences techniques. Le législateur suisse est ' cependant à la hauteur de cette tâche. Si, en général, les codifications étrangères du droit d'assurance ne peuvent guère servir de modèle, elles présentent cependant, ça et là, des règles claires, bien appropriées à leur destination. Notre législateur a donc à sa disposition d'abord ces exemples, en bien comme en mal, puis les expériences de près de dix-huit années de surveillance de l'Etat. La surveillance de l'Etat procure aux fonctionnaires qui en sont les organes la possibilité de se familiariser avec tous les détails des opérations d'assurance.

Cela garantit au législateur des travaux préliminaires sérieux.

279

Le législateur a de plus à sa disposition la source abondante d'un droit coutumier international. Avant tout, la pratique des affaires et les décisions de tribunaux étrangers ont t'ait naître des convictions juridiques auxquelles le législateur national peut se joindre sans hésitation. D'autre part, les conditions générales élaborées pour les diverses branches d'assurance sont des matériaux précieux, qui doivent être soigneusement étudiés et pris en considération. Les « conditions générales » donnent la teneur typique du contrat ; elles sont le témoignage du droit coutumier qui existe ou qui est en voie de formation, particulièrement lorsque de nombreux assureurs en ont fixé le texte en commun. Cependant il ne faut pas exagérer la valeur des conditions générales pour le travail législatif. Fréquemment les conditions générales des assurances terrestres ne portent pas nettement l'empreinte des besoins économiques liés à l'assurance, et ne reflètent pas nettement les idées en cours dans les affaires d'assurance ; dans la règle, elles n'expriment que la conception de l'un des intéressés, de l'assureur. L'inégalité sociale des parties et l'ignorance complète de ceux qui ont besoin d'assurance expliquent que, dans les assurances terrestres, l'assuré ait coutume de se soumettre sans discussion à des conditions qu'il ne connaît pas, qu'il ne comprend pas, qu'il ne peut même pas lire, -- ce qui n'est pas le cas dans l'assurance maritime, où les parties en présence sont des commerçants également rompus aux affaires.

Le développement des opérations d'assurance n'est pas encore achevé ; il se peut surtout que la série des risques à assurer ne soit pas encore épuisée ; mais cela n'est pas un obstacle à la codification. En invoquant un pareil argument contre la codification, on enlève complètement toute base à l'activité législative en matière d'obligations. C'est affaire à la politique législative de tenir compte des changements que le temps apporte aux besoins et d'agir en temps utile, de telle sorte que les lois accompagnent la vie même, et ne la suivent pas en boitant.

L'objection que la législation nationale est une menace pour l'assureur étranger n'est pas fondée, si la loi est conforme à la nature des choses, si les droits et les obligations qu'elle établit sont en harmonie avec les bases fondamentales
des opérations d'assurance et peuvent être acceptés par tout assureur dans le trafic international. L'inanité de cette objection résulte d'ailleurs de ce que les assureurs internationaux ne font entendre aucune plainte au sujet du chaos qui existe aujourd'hui dans le droit continental, et exploitent avec empressement sans cesse de nouveaux territoires. Parmi

280

les Etats, les uns ont codifié le droit d'assurance plus ou moins complètement ; leurs lois présentent des divergences non seulement sur des points de détail, mais aussi sur des questions fondamentales. Ceux qui n'ont pas de codification soumettent le contrat d'assurance principalement au droit commun en matière d'obligations ; mais, là aussi, existe la possibilité qu'une seule et même question de droit soit résolue de manières différentes.

Ces explications ne combattent naturellement pas l'idée d'une entente internationale sur les questions de droit qui sont à la base de l'assurance privée. Au contraire, l'idée d'une entente de ce genre a notre sympathie ; nous sommes convaincus en effet que cette entente favoriserait puissamment, non seulement le développement du droit d'assurance, mais aussi et surtout celui de l'assurance même.

3. Etendue de la codification.

Les limites de la codification s'imposent d'elles-mêmes: a. La première limite résulte de notre situation territoriale.

La codification a pour objet les assurances terrestres. Nous n'avons aucun besoin de règles spéciales à l'assurance maritime.

Cependant, les dispositions de la loi sont applicables à l'assurance maritime en tant qu'elles peuvent la concerner.

è. La seconde limite tient au but de la loi à édicter et à sa nature de droit privé. L'objet de la codification est le contrat d'assurance, article 896 C. O. A ce titre, l'opération d'assurance est soumise aux règles du droit des obligations, dans la mesure où les particularités de ce genre de contrat n'imposent pas d'y déroger. Pour éviter des répétitions inutiles et faire ressortir que la loi a le caractère d'une loi spéciale, la codification doit se rattacher au Code fédéral des obligations (article 1er du projet).

Cela exclut du travail de codification: aa. Les règles relatives aux rapports de droit avec les établissements d'assurance d'Etat ou organisés par l'Etat, qui rentrent dans le domaine du droit public. (Etablissements cantonaux d'assurance immobilière et mobilière contre l'incendie.

Caisses de retraites, de veuves et d'orphelins, organisées par l'Etat, etc.).

281

Ces rapports sont soustraits aux règles du droit privé comme à la surveillance de la Confédération (articles 34 et 64 ,de la Constitution fédérale).

bb. Les rapports contractuels déjà réglés par la législation fédérale, dans la mesure où la nature spéciale de ce genre de contrat ne réclame pas des dispositions particulières. La loi en · effet se réfère au C. 0.

Plus difficile est la question de la corrélation entre la loi et les règles du C. 0. concernant les Sociétés. Deux types de . sociétés doivent être pris en considération : la société anonyme et l'association. En droit fédéral, les sociétés mutuelles d'assurance doivent se constituer comme associations. La loi fédérale de surveillance a déjà fait des brèches importantes au droit concernant les sociétés anonymes et les associations, surtout quant à la gestion financière. C'est ainsi que l'autorité de surveillance n'a pas admis l'amortissement fractionné des frais d'organisation prévu par l'article 656, 1, C. 0. ; qu'elle a interdit l'exploitation simultanée de branches d'assurance diverses (par exemple de l'assurance sur la vie et de l'assurance contre l'incendie); qu'elle a exigé, des entreprises constituées sur la base de la mutualité, qu'elles stipulent dans les statuts l'obligation à des contributions supplémentaires, etc. Est-ce à la loi sur le contrat d'assurance de résoudre ces questions ?

Doit-elle compléter notamment les règles relatives aux associations, qui, d'une manière générale, sont insuffisantes et qui souvent ne conviennent pas en matière d'assurance ? Nous ne le croyons pas. La gestion technique et financière des établissements d'assurance dans son ensemble touche à la prospérité publique et se trouve soumise à l'action du droit public ; le contrôle de cette gestion est la tâche principale de la surveillance de l'Etat. Dès que des réformes paraissent nécessaires pour des motifs de surveillance, il doit y être pourvu par la loi de surveillance, qui du reste a besoin d'être revisée. D'après ces considérations, et suivant l'exemple des législations étrangères, c'est au droit concernant la surveillance qu'il appartient notamment de régler comme telles les relations les plus importantes des institutions d'assurance mutuelle. Mais, en revanche, la situation de l'association, comme assureur, et du sociétaire, comme assuré, doit
être soumise à notre loi. Par ce moyen seront réglés entre l'association " et ses membres les rapports de droit privé en pratique les plus importants.

Les lacunes devraient être comblées à teneur de l'article 678 et suivants C. 0. Il pourra être fait davantage lors d'une revision complète du droit concernant les associations.

82

e. La troisième et dernière limite est formée par les domaines du droit privé qui ne sont pas encore réglés par la Confédération, mais qui sont encore régis par le droit cantonal.

Cette limite résulte de considérations d'opportunité. Il n'est pas recommandable d'incorporer dans une loi spéciale des règles de droit privé qui auraient une portée générale. Aussi avons-nous décliné de statuer dans le projet de loi sur les questions générales de droit civil qui se rattachent à l'assurance en faveur de tiers, prévue à l'article 67 du projet (nature de l'attribution, réserve successorale, donation dépassant la quotité disponible, sort de l'assurance en cas de communauté de biens).

Pour la même raison, nous n'avons pas réglé la question d'absence, c'est-à-dire la situation juridique de l'assureur à l'égard de l'assuré disparu, et, dans l'article 52 du projet, nous avons réservé le droit cantonal.

d. Il ne nous a pas paru nécessaire de fixer de limites déterminées aux effets de la loi. En particulier, nous n'avons voulu aborder en aucune façon la question de l'application territoriale de la loi. Il faut laisser à la doctrine et à la jurisprudence le soin de fixer les conditions dans lesquelles, en cas de doute, le contrat d'assurance tombe sous l'application de la loi. C'est ce même principe qui a été adopté lors de la codification du droit des obligations; il a fait ses preuves en pratique.

C. Le projet de loi.

1. Le système.

Le projet est divisé en quatre parties: Dispositions générales (articles 1er à 43); Dispositions spéciales à l'assurance des choses (articles 44--63) ; Dispositions spéciales à l'assurance des personnes (articles 64--78) ; et Dispositions finales (articles 79--83).

La division en « assurance de choses » et « assurance de personnes » est tout extérieure. Mais elle est justifiée par des considérations d'opportunité. Seule, elle permet de grouper les règles de droit communes aux divers genres d'assurances, de les placer en tête de la loi dans un titre spécial, et de donner ainsi à la loi de la clarté. Il n'y a rien à objecter contre cette manière de faire aussi longtemps que l'on n'a pas démontré qu'il est impossible d'édicter des règles communes à toutes les branches d'assurance, et, par cela même, que des règles pro-

283

posées sont fausses. C'est à dessein qu'ont été choisies les expressions « Assurances des choses » et « Assurances des personnes ». Ellles épargnent au législateur la peine de discuter cette question théorique : L'assurance sur la vie 'est-elle ou non une assurance-indemnité ?

Le projet prend en égale considération les diverses brandies d'assurance terrestre. Ses dispositions générales régissent tous les contrats d'assurance, s'il n'a pas été expressément apporté de limites à leur application ; de même les dispositions spéciales à l'assurance des choses régissent toutes les branches d'assurance de choses. Dans l'assurance des personnes, en raison de l'importance économique de l'assurance sur la vie et de l'assurance contre les accidents, ont été développés avant tout, à côté de quelques règles générales, les principes caractéristiques concernant ces branches.

2. La technique.

Sciemment, on s'est abstenu de définitions. Les lois en ·effet n'ont pas à définir, surtout lorsque, comme cela est le cas ici, il s'agit d'une matière de droit encore flottante. Des points essentiels dans les notions relatives à l'assurance ne sont pas encore fixés. Le projet définit lorsque des motifs spéciaux le réclament, et surtout lorsqu'il y a lieu de fixer les conditions ou les effets du droit. Comparez les articles 46, 55, alinéa 1er, art. 60, alinéa 2, art. 62, alinéa 1er, et art. 67.

Dans la partie générale comme dans les titres spéciaux, le projet a cherché d'abord à formuler les grands principes de droit. Il n'établit de règles de détail que sur les points où la nature propre d'un type de contrat, ou bien les particularités de diverses branches d'assurances, exigeaient des prescriptions spéciales, ou lorsqu'il fallait rompre avec une pratique inadmissible. Partout, il a cherché à concilier les intérêts en conflit. Il y a de puissants motifs pour cela. Et d'abord, le législateur doit garder une certaine réserve à l'égard des branches d'assurance qui ne sont pas encore développées ou qui n'ont point acquis leur développement complet. Puis il faut tenir compte des divergences fondamentales d'opinion sur le but de la codification. Il est extraordinairement difficile déjà d'arriver à l'unité sur les principes généraux, parce que beaucoup d'assureurs ont coutume de considérer comme une entrave gênante toute législation qui touche cette matière. Un projet plus détaillé rencontrerait encore des difficultés plus grandes. Comme Feuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

20

284

le montrent son contenu et son étendue, le projet cherche ;Y codifier l'ensemble du droit des assurances terrestres. Mais le projet n'est pour nous qu'une première étape ; il accorde à la population^ qui a besoin de l'assurance, les concessions que réclame actuellement l'équité.

3. Les points de vue dirigeants.

a. La loi doit être élaborée sur les bases mêmes de l'assurance. Il y a des bases techniques et des bases économiques: c'est le risque et la garantie de la -valeur de remplacement. Ce sont ces deux éléments qui, en s'unissant, donnent à l'assurance sa physionomie et lui font atteindre son but : répartir les dommages d'une manière rationnelle entre un grand nombre de personnes soumises à la même menace. L'élément économique consiste dans un groupement étendu des risques, qui permet de répartir les dommages entre un nombre de personnes également menacées, assez grand pour que le sacrifice demandé à chacune d'elles reste dans les limites de ses ressources. Mais .

l'assurance n'aurait pas donné de bien grands résultats si elle s'était bornée à créer une communauté de risques entre des personnes menacées par un même événement. L'idée de l'association lui est commune avec beaucoup d'autres institutions de la vie économique. Ce qui caractérise l'assurance comme institution originale de prévoyance et ce qui la distingue d'autres institutions analogues, c'est sa technique, sa façon de procéder à la répartition des dommages entre les intéressés, sa manière de fixer l'indemnité et la prime. La technique de l'assurance repose sur une organisation générale qui, grâce à la statistique et au calcul des probabilités, permet une répartition des dommages aussi sûre que rationnelle. Les bases techniques sont le produit de travaux scientifiques, le résultat arithmétique d'une masse d'observations statistiques sur la fréquence et les modalités de certains événements. C'est ainsi que la statistique de la mortalité fait connaître comment se sont suivis les décès parmi les personnes de même âge prises comme sujets d'observation ; c'est ainsi que la statistique des accidents indique combien des personnes observées sont victimes d'accidents et à quel degré (décès, invalidité permanente ou temporaire, totale ou partielle).

Des observations statistiques semblables sont à la base des autres assurances. Ces résultats
des observations statistiques sont donc des expériences. Ils procurent à l'assureur non pas la certitude que les événements se passeront à l'avenir de la même manière, mais seulement, suivant le plus on moin,«,

285

d'exactitude des méthodes d'observations, une probabilité plus ou moins grande. L'arrivée de l'événement, il est vrai, est toujours, pour la personne menacée envisagée seule, un hasard qui échappe au calcul. Mais l'expérience apprend que, sur un grand nombre de personnes soumises à la même menace (risque), la proportion entre celles qui sont atteintes et celles qui étaient menacées oscille habituellement entre d'étroites limites, et que la loi des grands nombres peut être appliquée aux'écarts possibles.- D'après cette loi, plus le nombre des risques assurés est considérable, plus faibles sont relativement les variations. Aussi, en pratique, il est indispensable que lex opérations d'assurance soient exploitées en grand. L'application de la loi des grands nombres a pour condition que chaque risque, envisagé isolément, soit indépendant des autres ainsi que de toute cause étrangère commune. C'est seulement grâce à des mesures particulières dans l'exploitation des affaires que ces conditions peuvent être réalisées' (précaution d'éviter les accumulations de risques qui entraîneraient des sinistres en masse). De là, la nécessité que les opérations d'assurance soient exploitées rationnellement. A cette condition seulement, l'assureur est à même de se faire une opinion juste sur la probabilité du sinistre, à l'aide de ses bases techniques, et de calculer avec une sûreté presque complète la prime nette, qui est l'équivalent mathématique du risque. Par là, la technique de l'assurance rend possible l'exploitation rationnelle des opérations en grand, l'appréciation correcte du risque et le calcul de la prime.

Ces explications démontrent que l'opération d'assurance ne peut pas être traitée d'une manière quelconque, comme c'est généralement le cas dans d'autres branches d'industrie de notre vie économique ; elle exige au contraire impérieusement certains arrangements indépendants des appréciations individuelles, et que l'on appelle les bases techniques. C'est sur ces bases indispensables, généralement exigées par la loi et soumises à un contrôle, que repose l'opération de l'assurance (voir loi de surveillance art. 2, 5 et 6). En raison de leurs fonctions, les bases techniques exercent une influence décisive sur la solution d'une série de questions importantes. Et d'abord, c'est sur elles que reposent les calculs
de l'assureur sur l'étendue du risque, ainsi que sur la contre-partie qui lui est nécessaire (prime mathématique). Ces calculs, établis techniquement et soustraits à l'appréciation individuelle, ne sont point des combinaisons unilatérales d'affaires ; ils sont la base stable et obligatoire, même pour l'assureur, d'une série de mesures d'affaires (déclarations imposées au preneur, modification du risque, calcul de la réserve,

286

rachat, réduction), qui ont une importance considérable pour les rapports contractuels.

Les bases techniques imposent l'exploitation rationnelle de l'assurance, ainsi que cela a été expliqué. La nécessité d'une exploitation rationnelle en grand oblige "l'assureur à déroger aux principes du droit commun en matière d'obligations, lorsque les besoins de l'exploitation en grand réclament des prescriptions particulières. 8i l'on- doit reconnaître que l'élément technique doit influer sur l'opération d'assurance, logiquement, il faut que le droit garantisse l'exécution des mesures qui dérivent des bases techniques.

C'est dans ce sens que le projet liquide d'abord les impor, tantes questions relatives à la prestation et à sa contre-partie.

Articles 18-22, 24, 25, 26, 35, 36, 40, 48, 60, 66 et 74-78. De là aussi les principes qui résultent de la manière de traiter et d'apprécier le risque au point de vue de la technique de l'assurance. Articles 5, 6, 8, 11, 28, 29 et 32. La question de \'étendue, du risque couvert par l'assurance a une importance fondamentale. Elle est réglée par l'article 32 du projet. Les motifs des principes juridiques seront indiqués plus loin.

b. Une série d'autres règles résultent du but propre de l'assurance en général (art. 15), et du but spécial de l'assurance des choses (art. 44, 46, 49, 50, 51, 53, 56 et 63) et de l'assurance des personnes (art. 64, 65, 71, 72, 73).

c. Le projet prend en considération les intérêts pultlics (prospérité générale ; bonne foi), dans la mesure où cela peut être l'affaire d'une loi civile. Articles 8, 11, 14, 44, alinéa 2, art, 47, 54, 55, 62, 64, alinéa 1er.

d. Le projet voue une attention particulière aux besoins de la vie économique, en tant qu'ils doivent trouver leur satisfaction dans l'assurance. Art, 2, 3, 4, 12, 13, 16, 17, 33, 34, 44, 62, 67-70.

e. L'art. 80 du projet a la plus grande importance. U groupe les dispositions imperatives; l'alinéa premier contient les règles qui s'imposent d'une manière absolue; l'alinéa second, celles qui ne peuvent pas être modifiées au, détriment du preneur d'assurance ou de l'ayant droit. Des explications précédemment données, il résulté qu'il est nécessaire de restreindre la liberté des conventions toutes les fois que les parties en présence n'ont pas, comme dans les assurances maritimes et les ré-

287

assurances, ou une égale puissance économique ou une égale expérience des affaires. Cette limitation est réclamée par tous les experts impartiaux. Elle doit surtout être édictée dans les cas où le législateur doit rompre avec la pratique dominante.

Autrement, la volonté du législateur reste lettre morte. Cette manière d'agir n'est point sans précédent.

« Des institutions économiques qui ont un caractère de « monopole bien marqué (comme les chemins de fer par exem« pie) ou qui se prêtent aux cartels, comme beaucoup d'indus« tries où la concurrence est restreinte et qui, en même « temps, ont une grande importance économique, de sorte que « le public ne peut éviter de recourir à elles, ont dû, autrefois « et de nos jours, se soumettre à ces restrictions. La liberté « illimitée des conventions peut, -- comme bien d'autres li« bertés, -- se transformer en son contraire, et conduire à « l'asservissement du faible au puissant ; elle produit cet effet « lorsque celui qui est socialement le plus faible doit nécessai« rement contracter avec celui qui est socialement le plus fort « et lorsque des cartels font disparaître le bienfait de la con« currence. Alors «la liberté» n'existe réellement que pour le « plus fort ; elle amène l'oppression de l'intéressé le plus faible, « auquel s'imposent les conditions du contrat. L'essence de « cette soi-disant liberté des conventions n'est plus « la libre « entente », comme le mot l'indiquerait, -- mais la règle im« posée et l'obligation de se soumettre. L'antinomie qui existe « entre la liberté apparente et la contrainte effective pénètre « la forme positive du droit des assurances terrestres presque « entier, suivant l'expression que lui donnent les conditions « générales d'assurance. Même la création de nombreuses so« ciétés mutuelles n'a pu le faire disparaître. Ce doit donc être « le devoir le plus important du législateur de protéger l'assuré, « en édictant un nombre suffisant de principes absolus, et de « rendre par là aux compagnies d'assurances le meilleur des « services » (Ehrenberg, Versicherungsrecht I. p. 82 et 83). -- « « Le législateur doit répartir à tous également le soleil et le « vent; lorsque cela est nécessaire il doit accorder protection « aux faibles par des règles imperatives ; mais il ne peut pas « s'en remettre au sentiment d'équité de l'une
des parties ou au « compte qu'elle devra tenir de la concurrence. » (Ministre Steinbach, dans le Ehrenzweigs Assekuranz-Jahrbuch, 1885, p. 258). -- Dans l'assemblée de la Société suisse des Juristes en 1885, M. le juge fédéral Hans Weber n'a pas demandé moins catégoriquement des prescriptions Imperatives. (Voir Zeitschrift für schweizerisches Recht, n. F. IV, 585).

288

La Commission d'experts et la critique scientifique ont reconnu que le projet avait conservé la juste mesure dans les prescriptions imperatives qu'il propose, et qu'il atteignait le but. « C'est surtout en posant un grand nombre de règles im« pératives que le projet montre la voie que devra suivre en « matière d'assurance toute législation qui voudra réellement « garantir à l'assuré une protection suffisante. » (Ehrenberg, Examen critique du projet, p. 7). Les raisons particulières qui ont fait accorder force obligatoire à des règles diverses, seront expliquées dans l'exposé des motifs du projet.

I). Motifs des dispositions du projet.

1. Dispositions générales. Art, 1« à 43 et 79-88.

1. Prescriptions diverses.

a. Caractère de la lui; ses rapports avec le Code fédéral des obligations.

Article 1er.

La loi est uno loi spéciale; mais elle n'épuise pas la matière. Les dispositions générales ou spéciales du C. 0. doivent régir le contrat d'assurance, si la loi spéciale n'en dispose pas autrement."Avant tout," par conséquent, il n'y a pas lieu de régler les questions généraleser qui sont du domaine du .droit des obligations. (C. 0. Art. 1 à 28, art. 77 à 198). En considération des règles contenues dans les art. 110 et suivants C. 0., la loi spéciale s'abstient de déterminer les conséquences de l'inexécution d'obligations imposées par la loi (voir notamment art. 47, alinéa 1er, art. 58, alinéa 1er, et art. 62, alinéa 3). -- L'étroite corrélation entre la loi et le C. 0. est marquée extérieurement en ce que la référence au C. 0. est placée en tête du projet. -- Le principe directeur que la loi spéciale doit être complétée par le C. 0. doit être énoncé. En présence d'une loi spéciale, l'application des principes généraux du droit dès obligations ne va pas immédiatement de soi; c'est ce qu'enseigne la jurisprudence dans le domaine de la responsabilité indus-

289

tiïelle. Mais le juge doit recourir au droit commun, dès que cela paraît compatible avec le droit d'assurance.

Le projet n'a pas admis l'idée de subordonner la validité du contrat d'assurance à l'observation de la forme lécrite. Le droit moderne est ennemi des formes. Elles gênent les parties, et font naître le danger qu'en raison d'un vice de forme toute valeur juridique soit refusée à une volonté régulièrement manifestée. De plus le caractère de contrat formel aurait pu avoir une influence défavorable sur l'interprétation du contrat. Le juge aurait dû s'en tenir principalement à la lettre même. -- 11 n'y a pas de motifs impérieux pour sanctionner par la loi la forme écrite. Au contraire, la sécurité du trafic d'assurance, qui doit tenir compte de nombreuses modifications du contrat, réclame précisément la liberté de la forme. C'est ce que démontrent les fictions contraires à la nature des choses que diverses lois ont dû adopter, par exemple : Code de commerce honyrois § 468 ; Code civil zuricois § 497. Il ne rentre pas non plus dans le cadre d'une loi spéciale de prescrire la forme écrite pour remédier à la diversité des lois cantonales en matière de preuve. - - Ce qui est décisif, c'est cette considération <|iie les parties sont libres de déroger aux règles du C. 0., soit que conformément à l'article 14 C. 0., elles fassent dépendre la validité du contrat de la rédaction par écrit, soit qu'elles stipulent que l'assiireur manifeste son acceptation définitive de la proposition par la remise de la police (C. 0. art. 14, alin. 2).

Voir en outre article 12 et les motifs.

.....~j /.:_^.Ii b. Rapport entre le nouveau droit et l'ancien. Art. 81.

Les conflits quant au temps doivent être liquidés en appliquant par analogie les règles du droit commun, art. 882 et 883 C. 0. L'art. 81, alin. 2, vise les contrats qui n'ont pas été conclus pour une durée déterminée, mais qui ne peuvent être résiliés que par une dénonciation faite conformément au contrat. C'est ce qui a Heu pour la plupart des contrats d'assurance, abstraction faite de l'assurance sur la vie. Suivant la règle formulée dans l'art. 882 C. 0., ces contrats doivent être jugés en principe, d'après l'ancien droit. Quant à la question de rétroactivité, elle doit être résolue, à notre avis, surtout par des considérations d'opportunité. La sécurité
des opérations d'assurance exige que les anciens contrats soient mis le plus tôt possible en harmonie avec le nouveau droit. Le projet atteint ce but, sans porter atteinte à des intérêts légitimes.

290

c. Inapplicabilité de la lui aux. petites mutualités. Art.

'/9.

Ainsi que cela a été dit déjà, ce sont les bases techniques qui impriment à l'assurance son caractère distinctif. En beaucoup de points importants, elles exercent une influence sur la teneur du droit d'assurance. Voir p. 20. Un grand nombre de petites réunions de personnes, (caisses de prévoyance, caisso.s de secours mutuels, etc.) ont un but économique semblable à celui de l'assurance : la garantie de notre existence économique.

Mais à ces soi-disant sociétés d'assurance, la technique et l'expérience font entièrement défaut ; elles se contentent de répartir les dommages entre les sociétaires sans plan rationnel.

Leur activité n'a rien de commun avec l'assurance. Les contrats qui émanent de ces sociétés ne peuvent pas tomber sous le coup de la loi d'assurance. Ce seraient précisément les dispositions les plus importantes, basées sur le technique de l'assurance, qui, en fait, seraient inapplicables. Pour dissiper toute incertitude, une disposition expresse a paru nécessaire. Cependant la loi sur le droit privé d'assurance n'a pas à décider si l'existence de ce genre de société se justifie au point de vue économique. C'est au contraire l'affaire de la loi de surveillance.

(Art. 1e1', alin. 2).

d. Communications îles parties ; lieu d'adresse. Art. 41.

L'assuré, ou tout autre ayant droit, par exemple un héritier, est tenu, le plus souvent sous peine des sanctions juridiques les plus graves (déchéance du droit à l'assurance), do faire certaines déclarations (modification du risque, sinistre) pramplement et au bon endroit. Souvent, les conditions générales des contrats prescrivent que tel ou tel avis doit être donné tantôt à l'agent, tantôt directement à la Direction, ou même, à la fois, à l'agent et à la Direction. Ces prescriptions déconcertent, surtout si l'avis doit être donné à une direction qui a son sièye à l'étranger. La situation de l'intéressé, qui n'a le plus souvent qu'un court, délai pour sauvegarder ses droits, est compromise. On peut donc, à bon droit, exiger -pour les communications au moins une place en Suisse connue de l'assuré.

Art. 41, alin. 2. Cette règle est imperative. Art. 80, alin. 2.

L'art. 41, alin. I er , fait disparaître les difficultés pratiques pour les communications à faire par l'assureur.

e. Inobservation des délais. Art. 42.

En pratique, l'inobservation des délais, souvent très courts,, entraîne; les conséquences les plus graves, sans qu'il y ait à

291

distinguer si elle était excusable ou non. La jurisprudence a battu cette pratique en brèche en repoussant la déchéance lorsque l'inobservation ne provient pas d'une faute. Le projet a adopté cette idée. L'art. 42, qui ne peut pas être modifié au détriment de l'assuré (art. 80, alin. 2), dispose que l'ayant droit peut accomplir l'acte retardé sans sa faute, aussitôt après que l'empêchement a cessé, c'est-à-dire sans bénéficier à nouveau du délai primitivement prévu.

f. Justification de la prétention ; échéance de l'indemnité.

Art. 38 et 39. · La justification de la prétention (art. 38) est une particularité de l'opération d'assurance. Dans la règle, l'assureur ne peut pas se contenter de la simple déclaration du dommage.

Il faut qu'il reçoive connaissance des faits qui, loyalement appréciés, doivent le convaincre que son obligation de réparer un dommage est échue. Ainsi, la justification de la prétention n'est pas l'administration d'une preuve, comme en procédure, c'est la condition de forme dont dépend l'obligation' de l'assureur. Ordinairement l'assureur précise flans la police en quoi doit consister la justification (enumeratici! des pièces et justifications à fournir). Le législateur ne peut que sanctionner le principe ; pour les détails, et dans les limites données par la nature des choses, il doit s'en rapporter aux stipulations du contrat. L'art. 8^, n° 1, part de cette considération qu'il est important pour l'assureur d'être mis le plus vite possible au courant des faits qui donnent naissance à la prétention, afin de prévenir les dissimulations possibles. L'art. 42 empêche des rigueurs contraires à l'équité. D'autre part, il faut avoir égard au preneur d'assurance et ne pas lui rendre trop difficile la justification de sa prétention. C'est le but dos dispositions de l'art. 38, n° 2 et alinéa 3. L'ayant droit ne peut être tenu que de produire les pièces qu'il, lui est possible de se procurer sans yrands frais, et que de fournir des renseignements sur des faits déterminés, connus de lui. -- L'art. 3^, alin. 4, accorde à l'assureur une protection efficace contre la mauvaise foi. -- En principe, l'assureur doit pouvoir s'en rapporter à la loyauté de l'ayant droit. Le projet ne vise que les procédés frauduleux dont l'ayant droit se rendrait coupable dans la justification de la prétention,
en mie de s'enrichir d'une manière illégitime. Le contrat ne perd son effet qu'à l'égard* de l'ayant droit qui est en faute. Cette formule a une importance pratique pour les contrats d'assurance collective de personnes,

:292

surtout pour l'assurance des ouvriers contre les accidents. Si l'assureur se départit du contrat, il a droit à la prime convenue, conformément à l'art. 26 du projet. L'assureur peut se réserver des droits plus étendus à teneur de l'art. 27.

L'assureur doit avoir un délai convenable pour examiner la justification de la prétention et prendre une décision. C'est seulement après l'expiration de ce délai que son obligation est échue. Art. 39, alin. 1er. Le délai court à partir 'du moment où la justification de la prétention a été fournie d'une manière rétjîilière. Si la justification n'est pas suffisante, la prétention n'est pas échue. Mais si l'assureur prétend à tort que la justification est insuffisante, il peut être mis en demeure. En droit commun, il n'est pas nécessaire que la créance soit liquide pour que le débiteur puisse être mis en demeure. C'est la loi qui fixe le jour de l'échéance. La demeure n'existe donc qu'après la sommation. Art. 117 C. (). Quant aux conséquences de la demeure, voir art. 119 C. 0. et suivants.

L'art. 39, alin. 2, est dirigé contre certaines clauses qui restreignent les droits de l'assuré d'une manièro évidemment contraire à l'équité.

g. La prescription. Art. 43.

L'art. 43, alinéa 1er, soumet tous les droits qui peuvent résulter du contrat d'assurance à une prescription de deux ans.

La brièveté de ce délai correspond avant tout à un besoin pressant de la pratique des affaires, généralement reconnu par la législation et la doctrine. 11 faut qu'après un laps de temps asse/ court l'assureur puisse être au clair sur sa situation pécuniaire. De plus il faut insistei' sur co point que c'est par un prompt règlement du risque que l'on peut combattre efficacement le danger d'une dissimulation de l'état de fait. La prescription court à partir de l'échéance de la prétention. Art. 149 C. 0. L'échéance n'est pas toujours fixée d'une manière absolue, puisque l'exigibilité du droit à la réparation du dommage dépender de conditions particulières, précisées dans l'art. 39, afin. 1 . L'assureur peut cependant exiger que la justification soit fournie dans un délai convenable et limiter ainsi la durée du droit de l'assuré. Art. 38, n° 1, et 43, alinéa 2.

Les règles proposées pour la prescription tenant suffisamment compte des besoins du trafic des assurances, on doit prohiber les clauses habituelles qui limitent 'encore davantage la durée du droit de l'assuré. Art. 43, alinéa 2. D'après la

293

doctrine et la jurisprudence la plus récente, ces clauses ne modifient pas les délais de prescriptions fixés par la loi (Art.

148 C. 0.), mais limitent le droit lui-même par rapport au temps. Dès lors, la disposition de l'art. 43, alin. 2, iv'est pas superflue.

2. Les propositions relatives aux assurances. Art. 2, 3 et 4.

a. La proposition d'assurance en général. Art. 2.

Ordinairement, le contrat d'assurance est conclu entre absents. D'après le droit des obligations, l'auteur d'une offre est lié par son offre jusqu'au moment où il peut s'attendre à l'arrivée de la réponse suivant la marche régulière des affaires.

Art. 5 C. 0. -- Ce principe ne peut pas être maintenu à l'égard de celui qui a besoin de sécurité, et qui, clans la règle, propose l'assurance. Il lui ôte la possibilité de calculer quand doit arriver la réponse de l'assureur, car il manque généralement de toute connaissance de la marche des affaires dans les opérations d'assurance. Il n'existe, du moins dans les opérations d'assurance, aucune mesure objective qui permette de résoudre cette question : quel est le délai exigé par la marche régulière des affaires V -- Suivant la nature de l'établissement d'assurance et l'organisation de ses affaires, la réponse d'un assureur paraîtra expédiée en temps utile, tandis qu'émanant d'un autre assureur, elle ne le serait pas. -- Le sinistre, pouvant survenir à chaque instant, l'auteur de la proposition doit être instruit le plus tôt possible du sort de sa proposition. -- C'est là le but qu'atteint la prescription imperative contenue dans l'art. 2.

Elle fait disparaître les inconvénients de la pratique actuelle, qui, par des clauses spéciales, lie souvent l'auteur de la proposition et lui impose l'attente pour un -temps extraordinairement long.

L'assureur doit toujours soumettre la proposition à un examen approfondi ; aussi n'y a-t-il pas lieu de distinguer entre les propositions faites entre présents et les propositions entre absents. -- Les délais prévus sont équitables. "Si la proposition a été faite sans réserve, ce sont les délais légaux d'acceptation. Dès qu'ils sont expirés, la proposition perd immédiatement toute force obligatoire. (Art. 2, alinéa 3).

b. Les propositions spéciales.

Art. 3.

Ordinairement, le contrat d'assurance est conclu pour une durée assez longue. Au cours de l'assurance surviennent fréquemment des circonstances qui sont contraires aux données

294:

d'après lesquelles le contrat a été conclu, par exemple un changement de profession) de conditions de vie, etc. L'assureur est suffisamment protégé par les clauses qui le libèrent de sa responsabilité, ou tout à fait, ou tant que subsistera l'état de choses contraire au contrat. Mais l'assuré est dans un état d'insécurité, qu'il a grand intérêt à voir cesser au plus tôt. Il s'adresse à l'assureur et compte qu'il reste assuré, même si aucune réponse ne lui parvient. -- Mais la jurisprudence actuelle montre que, précisément dans ces cas, l'assureur n'entend pas que son silence soit interprété comme un consentement.

L'art. 5, alin. 3, C. 0. ne vise pas les cas que traite l'art. A du projet. -- II s'impose donc de -faire la clarté, pour les cas les plus fréquents et les plus importants en pratique, à l'aide d'une règle spéciale.

L'art. 3, alin. l or , oblige l'assureur à répondre à toute proposition de prolonger ou de modifier, ou de remettre en viyueur le contrat. Les motifs exposés justifient que l'on exigo de la partie qui a l'expérience des affaires, de l'assureur, qu'elle traite ses clients avec la diligence qui doit être présumée che/, elle d'après sa pratique des affaires. -- Cela est particulièrement vrai quant aux modifications du contrat. La modification du contrat est le plus souvent nécessitée par des modifications du risque qui surviennent au cours de l'assurance. Même lorsque la modification du risque provient d'une résolution propre de l'assuré, elle apparaît dans la règle comme le résultat du changements dans les conditions et les besoins de l'existence économique. Aussi les demandes de modifications émanant des assurés doivent-elles se maintenir quant à leur nombre et à leur contenu, dans .les limites normales, dérivant des circonstances économiques. -- Si l'assureur ne veut pas être lié, il faut qu'il réponde à la proposition. Nous préférons cette expression à la formule « qu'il refuse », -- qui serait l'expression juridique juste, -- pour que l'assureur ne se trouve pas forcé, dans un cas particulier, de refuser d'emblée la proposition. La réponse doit être faite dans un délai convenable. Comp. art. 5 r alin. 3, C. 0. II serait impossible de fixer un délai précis. L'assureur est souvent appelé à prendre une décision après avoir examiné lui-même l'état des choses.

L'exception prévue
par l'art. 3, alin. 2, relativement aux propositions d'augmenter la somme assurée, est justifiée par cette considération que, pour tenir compte comme il convient des intérêts de l'assureur, il faut traiter cette modification du contrat comme un nouveau contrat.

2'J5

c. Le formulaire de proposition.

Art. 4.

La proposition d'assurance est faite sur la base des conditions générales d'assurance. 11 faut que l'auteur de la proposition ait eu la possibilité de se familiariser on temps utile avec ces conditions. Le but et la portée de la règle apparaissent clairement. Dans l'intérêt de l'assurance, il faut mettre un terme aux pratiques peu correctes qui se sont introduites dans la recherche des polices. Conformément à son but, la prescription de l'art. 4 ne vise que les formulaires fournis par l'assureur.

L'art. 4, alin. 2, assure l'observation pratique de la loi. 11 ne fait donc point obstacle à ce que le contrat ne se forme sur la base d'un formulaire qui ne serait pas conforme aux prescriptions de la loi (par exemple si l'auteur de la proposition accepte la police sans réserve).

3. Les déclarations obligatoires en général.

Art. 5--10, art. 28--31 et 37.

D'après la pratique, à laquelle la doctrine et la législation ont adhéré en principe, le preneur d'assurance a l'obligation do faire certaines communications à l'assureur, lors de la conclusion du contrat, au cours de l'assurance et après le sinistre.

Dans la terminologie usuelle, ces obligations sont comprises dans l'expression unique de « Anzeigepflicht ». Les informations à fournir dans les différentes périodes de l'opération diffèrent par leur but et leur contenu; elles doivent donc être traitées' séparément.

a. Déclarations à faire lors de la conclusion du contrat.

Art. 5--10.

L'obligation de déclarer a sa source dans les bases techniques de l'opération d'assurance.. -- Les bases techniques, c'està-dire les bases obtenues par l'investigation scientifique, sont le résultat de nombreuses observations statistiques sur la fréquence et les modalités de certains événements. L'expérience montre que, dans la règle, les risques de même nature ne sont pas identiques entre eux (par exemple le risque de décès pour un certain nombre de personnes de même âge); ils présentent entre eux des différences plus ou moins fortes, qui, au point de

296

vue de la probalité du sinistre, doivent faire attendre pourchaque risque une éventualité plus favorable ou plus défavorable pour l'assureur. Les observations statistiques, qui sont coordonnées dans les bases techniques, peuvent ou tenir compte de ces différences entre les risques ou en faire abstraction.

Elles tiennent compte de ces différences si elles soumettent à l'observation des matériaux choisis, des risques qui, d'après des constatations spéciales au sujet des éléments du danger^ peuvent être considérés équivalents, et si elles utilisent le résultat de cette observation pour en déduire des probabilités; elles font abstraction des différences, des éléments plus ou moins grands de dangers propres à chaque risque, lorsqu'elles déterminent d'emblée la probabilité générale du sinistre au moyen de matériaux qui n'ont pas été classés qualitativement.

La manière de procéder de l'assureur à l'égard des propositions d'assurance sera nécessairement déterminée par la construction de ses bases techniques. Tantôt l'assureur doit se former une opinion aussi certaine que possible sur ce point: le risque, envisagé isolément, peut-il être considéré comme équivalent quant à ses chances avec les risques choisis qui ont été observés ? Pour cela il a besoin, dans chaque cas particulier, de connaître les faits qui sont importants pour apprécier les éléments du danger et particulièrement la probabilité du sinistre. Tantôt l'assureur est soustrait évidemment à la nécessité d'examiner pour le risque proposé la particularité du danger. Les branches d'assurance qui, vu leurs bases techniques, ne tiennent pas compte des éléments de dangers spéciaux à chaque risque, et qui, par conséquent, ne connaissent pas de déclarations (l'assurance obligatoire instituée par l'Etat avec primes égales, assurance en cas de vie, assurance contre les risques de voyage) sont, par leur nombre et leur importance économique, bien au-dessous des branches pour lesquelles est nécessaire la sélection des risques. -- Celles-ci forment la règle,, celles-là l'exception.

D'après ce qui vient d'être exposé, la déclaration est exigée en vue d'une sélection des risques qu'imposé la technique.

Elle doit être exigée du preneur d'assurance, parce que lui seul connaît les faits qui sont importants pour apprécier le risque. On ne saurait admettre à la
charge de l'assureur une obligation de s'enquérir. Et d'abord, en diverses branches (surtout dans l'assurance des personnes) la recherche des éléments du risque par l'assureur paraît impossible et inconciliable avec l'exploitation en grand. Puis une investigation, même peu minutieuse, de l'assureur entraînerait- toujours de grands sacri-

297; fices de temps et d'argent. Cette aggravation des difficultés des affaires aurait des conséquences qui retomberaient sur le preneur d'assurance. Les déclarations du preneur d'assurance,, qui rendent possible la sélection des risques, sont donc la condition de l'emploi des bases techniques. De là résulte la manière de traiter juridiquement l'obligation de déclarer. 11 laut poser en principe que l'effet juridique du contrat est subordonné pour l'assureur à cette condition que le preneur ait déclaré les faits qui sont importants au point de vue technique.

1. L'obligation de déclarer incombe, en principe, à celui qui propose l'assurance, et qui, dans la régie, est aussi l'assuré.

Art. 5. Dans certains cas, il faut prendre en considération,, outre ce qui est à la connaissance de l'auteur de la proposition, ce qui est su d'autres personnes. Art. 6. Si le contratest conclu par un représentant, doivent être déclarés tous les faits qui étaient connus du représenté ainsi que ceux qui étaient connus du représentant. Cette règle incontestée pare au danger que, pour des motifs déloyaux, l'intéressé ne recoure aux services d'un intermédiaire, qui ignorerait la situation. -- En cas d'assurance pour compte d'autrm (Art. 16), la déclaration doit comprendre aussi les faits qui sont connus du tiers lui-même ou de son intermédiaire, à moins que le contrat ne soit conclu à l'insu de ces personnes ou qu'il ne soit pas possible d'aviser le preneur en temps utile. -- En cas d'assurance sur la vie d'une tierce personne (Art. 64), l'opinion la plus répandue, appuyée surtout sur la pratique, est que le preneur est responsable sans réserve des déclarations du tiers sur la tête duquel l'assurance repose. En faveur de cette opinion, parle le danger d'une collusion. Mais elle se heurte à cette considération plus décisive que l'assurance sur la tête d'autrui est le plus souvent sans valeur, si elle doit reposer aussi sur les faits connus de ce tiers. Le danger de collusion pouvant être combattu par l'assureur à l'aide de précautions appropriées, le droit, dans son nouveau'^développement, fait à juste titre abstraction des dires du tiers-déclarant. -- Au surplus, on ne peut pas admettre sans autre comme connus du preneur d'assurance des faits qui étaient à la connaissance de tierces personnes, particulièrement de celles
qui ont participé à la conclusion du contrat (agent, médecin). Comp. art. 25. C. O.

2. Le contenu et l'étendue des déclarations à faire doivent être en harmonie avec le but de l'assurance, -- garantie contre des dangers économiques incertains, -- et avec les exigences des bases techniques.

298

a. Le but de l'assurance exige que l'obligation de déclarer soit limitée aux faits connus de celui qui fait la proposition.

Art. 5, alin. 1er. -- La sécurité n'existe pas en réalité si l'assureur peut décliner son obligation contractuelle même dans les cas où n'ont pas été déclarées des circonstances qui aggravaient le risque et qui existaient déjà lors, de la conclusion du contrat, mais qui ne pouvaient pas être connues de l'autour de la proposition. La technique des assurances n'a pas non plus des exigences plus grandes. En effet, la statistique, coordonnée dans les bases techniques, tient parfaitement compte de ce fait d'expérience que, même si le déclarant agit avec la diligence la plus grande, des circonstances qui sont d'une importance décisive pour l'appréciation du risque peuvent rester ignorées ou n'être pas exactement connues. Ainsi, la possibilité que des circonstances importantes pour l'appréciation du risque ou leur portée réelle demeurent cachées à celui qui propose l'assurance, forme précisément partie intégrante du risque d'assurance. Aussi, c'est à bon droit que la législation, comme la doctrine et la pratique prédominantes, maintiennent que l'obligation de déclarer est limitée à ce qui est connu de celui qui a fait la' proposition. Par là se trouve complètement écartée la pratique qui transforme l'obligation de déclarer en obligation pour le preneur de s'enquérir. L'obligation de s'enquérir ne peut pas être déduite de l'essence de l'opération d'assurance, et, à cause de ces conséquences, elle est inconciliable avec les intérêts du preneur d'assurance. -- Aux faits qui sont connus de l'auteur de la proposition sont assimilés les faits qui doivent, être connus de lui. Ce qui signifie que seule l'ignorance provenant d'une faute grave a de l'importance.

b. Doivent être déclarés les faux importants qui sont counus de l'auteur de la proposition, c'est-à-dire les faits qui ont de l'importance pour l'appréciation technique du risque. Four la sélection du risque, sont seuls pris en considération les faits qui sont de nature à exercer une influence sur le jugement de l'assureur au sujet de l'étendue du risque (« de nature à influer sur l'opinion du risque »). Il faut donc considérer comme imjiortant tout fait qui est de nature à exercer une influence sur la détermination de l'assureur de
conclure le contrat ou de le conclure aux conditions convenues. (Art. 5, alin. 2). Dans la règle, il est impossible de contrôler si l'assureur, connaissant la situation réelle, n'aurait certainement pas contracté ou s'il n'aurait pas contracté comme il l'a fait; il doit donc suffire que le fait permette de conclure à la possibilité d'une volonté différente chez l'assureur. Ce qui est décisif pour déterminer

299

quels faits sont importants, c'est la conviction loyale du proposant. Ce principe s'impose parce qu'il faut avoir égard à la personne du proposant qui ne peut pas connaître ce qu'exigent les bases techniques, et qui, par conséquent, n'est souvent pas à même de discerner si, au yeux de l'assureur, un fait déterminé a de l'importance ou non. L'assureur qui aurait des exigences plus grandes peut recourir au questionnaire. Voir ci-dessous lettre e.

c. Tous les faits importants qui sont connus du proposant doivent être déclarés, à l'exception de ceux que l'assureur est appelé à connaître et à prendre en considération parce qu'ils vont de soi et résultent de la nature même du risque. En ce sens, vont de soi les circonstances qui sont inhérentes au risque et qui dérivent des conditions ordinaires de l'existence et des habitudes dominantes de la vie. L'idée qu'il y a lieu de déclarer seulement les exceptions à l'état normal, est inadmissible. Dans la technique de l'assurance, il n'y a, pour aucun risque, un état normal. Le risque n'est pas une marchandise ayant des qualités connues et sur lesquelles on compte ; son appréciation qualitative, qui s'impose en vue de la sélection, exige, dans chaque cas particulier, l'examen minutieux de toutes les circonstances importantes. L'assureur a donc toujours besoin de l'exposé net des faits importants qui ne vont pas de soi; il ne peut pas lui suffire de recevoir seulement communication des circonstances anormales, exceptionnelles.

d. Enfin, doivent être déclarés tous les faits importants qui viennent à la connaissance du preneur d'assurance jusqu'à la date de la conclusion du contrat. Cette règle est une conséquence du principe même de l'obligation de déclarer. L'obligation de déclarer a, pour but de manifester à l'assureur les circonstances qui sont de nature à exercer une influence sur sa volonté de conclure une affaire. Elle doit donc nécessairement subsister jusqu'au moment où disparaît la possibilité d'une détermination différente de l'assureur. Ce moment, c'est la conclusion du ,,con trat.

e. Le questionnaire. Art. 7. Le contrat d'assurance terrestre est généralement conclu sur la base des réponses que le proposant a faites aux questions de l'assureur contenues dans un formulaire de proposition et de déclaration. Le questionnaire a donc pour les deux
contractants une grande valeur pratique. Pour le proposant, c'est une direction éclairée pour déterminer les circonstances qui, dans l'opinion de l'assureur, sont essentielles pour apprécier le risque. Du fait que c'est Femlle'fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

21

300

« l'assureur qui est appelé en première ligne, par sa connaissance des choses et par la nécessité de sauvegarder ses intérêts, à décider quelles sont les circonstances qui doivent être considérées comme importantes, il faut conclure, d'accord avec la pratique, que l'étendue de l'obligation de déclarer est limitée en fait aux points qui sont indiqués dans le questionnaire. Le proposant satisfait donc à son obligation en répondant aux questions posées. Art. 7, alin. Ier. -- Le questionnaire n'est pas moins important pour l'assureur. D'abord, l'assureur a un intérêt très légitime à bien préciser lui-même les faits qui indubitablement sont importants quant au risque. Puis il doit avoir le droit de désigner comme essentiels des faits dont l'importance objective pour l'appréciation du risque peut paraître douteuse. On ne peut pas l'empêcher de mettre à profit, pour apprécier le risque, les expériences de la pratique qui viennent compléter les observations statistiques coordonnées dans les bases techniques, et perfectionnent ainsi la technique de l'assurance. Enfin, il est possible que l'assureur ait besoin de certaines informations non pas pour taxer le risque, mais pour des raisons de la technique de ses affaires (répartition des risques). Ces considérations exigent que l'assureur ait la faculté de décider définitivement quels faits il entend faire envisager comme importants pour l'appréciation du risque qui lui incombe.

Aussi faut-il déclarer importants tous les faits indiqués dans lo questionnaire. Art. 7, alin. 2. -- A cette règle, deux exceptions sont admises. Les questions que l'assureur a posées d'une manière imprécise et équivoque, ne sont pas considérées comme importantes. Les questions qui ne sont pas posées clairement cachent des dangers sérieux pour le proposant et ne peuvent par conséquent pas jouir de la protection légale. Outre la précision dans les questions, il faut attendre de l'assureur un examen convenable des réponses faites. En demandant une réponse à des questions déterminées, l'assureur déclare que le renseignement demandé déterminera sa décision de contracter.

Si l'assureur conclut le contrat lors même qu'il fia pas reçu de réponse à ses questions ou à quelques-unes d'entre elles (barres, etc.), il montre que les réponses n'avaient pas d'importance pour lui. Mais il ne convient
aucunement que l'assureur invoque ensuite contre les réclamations du preneur d'assurance l'absence de réponse aux questions posées. L'assureur a agi d'une manière négligente et a perdu par là ses exceptions. Cette règle ne s'applique plus lorsque, par suite de circonstances particulières, l'assureur devait attribuer un sens déterminé à l'absence de réponse à une question. Art. 10, chiffre 2, lettre b.

301

3. lléticetice; ses conséquences. En posant le principe contenu dans l'article 5, on exprime cette règle que celui qui doit faire la déclaration ne doit dissimuler ou déclarer inexactement aucun fait important qu'il connaissait ou devait connaître lors de la conclusion du contrat. S'il agit contrairement à ce devoir, s'il fait au sujet d'un fait important une déclaration qu'il sait ou doit savoir fausse, il y a réticence. Art. 8. -- D'accord avec la pratique récente et libérale, le projet repousse l'idée que, pour décider s'il y a réticence, il faille s'en tenir seulement à l'inexactitude de la déclaration, en fait.

Une telle règle serait aussi rigoureuse qu'injustifiée. En raison de la nature même du risque, il est très difficile, et même parfois impossible, de constater exactement les faits importants. Le preneur d'assurance n'est pas initié aux affaires ; ce n'est point un expert ; il traite une opération qui Ini est étrangère et qui le soumet à des exigences spéciales et inusitées dans les opérations ordinaires de la vie. Très souvent, le déclarant doit répondre à des questions techniques ou autres dont le sens et la portée sont difficiles à comprendre. Dans ces circonstances, des omissions, des appréciations erronées, des inexactitudes sont absolument inévitables, d'autant plus que, suivant la pratique prédominante, les directions et instructions de l'intermédiaire expérimenté, de l'agent, n'obligent point l'assureur, et que le preneur ne doit compter que sur lui-même pour la fixation des faits.

Dès lors, si l'on ne veut pas mettre en question le but de l'assurance, équitablement il ne faut pas faire grief au déclarant de ce que, ne connaissant pas exactement lui-même les faits, il a fait de bonne foi à l'assureur des déclarations qui ont induit celui-ci en erreur. Cette argumentation trouve sa base la plus solide dans la raison d'être même de l'obligation de déclarer. Ainsi que l'établit l'article 5, le preneur d'assurance n'est pas soumis .à une obligation absolue de déclarer ; il est tenu seulement de communiquer à l'assureur les faits importants de la manière et dans la mesure ou il les connaît.

La règle qu'il n'y a pas à tenir compte en principe de ce que ces communications sont contraires à l'état réel des choses, inconnu du déclarant, est une simple conséquence de ce principe.
La réticence entraîne pour le preneur d'assurance certaines conséquences préjudiciables. La plus importante est que le contrat ne lie pas l'assureur. Art. 8. La cause juridique de cette nullité est le fait, corroboré par les bases techniques,

302

que, si l'assureur avait été dûment renseigné, il n'aurait pas conclu le contrat ou n'aurait pas contracté aux conditions convenues. Les conséquences de la réticence se produisent donc aussi lorsqu'il n'existe pas de relation de cause à effet entre la déclaration fausse et le sinistre. L'assureur jouit d'une exception pour se défendre contre les prétentions qui seraient tirées du contrat ; s'il a déjà accompli son obligation, il a l'action en restitution. Art. 70. C. 0. Il va de soi que l'assureur a ces mêmes moyens contre un ayant cause du preneur d'assurance. Art. 189 C. 0.

Le sort des primes est réglé par l'article 26 (voir pages 319 et suivantes ci-dessous).

Dans certains cas, le droit de l'assureur de se départir du contrat pour cause de réticence tombe complètement, même si la réticence était intentionnelle. Il en est ainsi notamment lorsque l'assureur a connu ou provoqué la dissimulation ou la fausse déclaration ou lorsqu'il a renoncé expressément ou tacitement à s'en prévaloir. Le vice qui affecte le contrat peut en effet être couvert par la renonciation de l'assureur. Dans l'assurance sur la vie, la renonciation est souvent déclarée expressément d'avance (polices incontestables). La renonciation tacite résulte non seulement d'un acte positif (par exemple remise de la police, création d'avenants, acceptation de primes ultérieures, etc.), mais aussi de la conduite passive de l'assureur, lorsque, connaissant la fausse déclaration, il ne fait pas valoir, dans un délai convenable, son droit d'attaquer le contrat. Il est paré par là à un silence frauduleux. Art. 8 et 10.

L'indication inexacte de l'âge fait l'objet d'une règle spéciale. (Voir article 66 et pages 339 et suivantes.)

Lorsque le contrat est relatif à plusieurs choses ou à plusieurs personnes (assurance contre l'incendie, assurance collective des ouvriers contre les accidents, etc.) et que la réticence n'a trait qu'à quelques-unes de ces choses ou de ces personnes, il se pose la question de savoir si, quant aux conséquences de la réticence, le contrat est divisible ou non. La pratique de l'assurance terrestre, en opposition avec la pratique de l'assurance maritime, tient fermement pour l'indivisibilité. Mais la.

tendance actuelle du droit est de considérer, sous certaines conditions, le contrat d'assurance collective comme divisible.
Ainsi le contrat conserve son effet pour la partie qui n'est pas affectée par la réticence, à moins qu'il ne soit évident que l'assureur n'aurait pas assuré cette partie seule aux mêmes conditions. La première condition, -- qu'il y ait eu réticence seu-

303

lement quant à une partie des objets, -- n'est réalisée que si les faits dissimulés ou inexactement déclarés concernent exclusivement quelques-uns des objets, de sorte que ces faits soient sans importance pour apprécier le risque qui s'attache aux autres objets. Art. 9.

b. La modification du risque; obligation de déclarer au couru de l'assurance. Art. 28-31.

L'obligation de déclarer lors de la conclusion du contrat a pour but de permettre la sélection des risques exigée par la technique des assurances, l'appréciation par l'assureur du risque dont il se charge. Cette appréciation est faite au moment de la conclusion du contrat pour toute la durée de l'assurance. Elle est rendue assez difficile parce que souvent les faits ne sont pas fixés une fois pour toutes (comme l'âge, les maladies éprouvées, le genre de construction d'un édifice), mais sont variables en ce sens qu'ils sont susceptibles d'une modification ultérieure ou que leur effet réel dépend de l'avenir (profession et résidence de l'assuré, voisinage de l'édifice). Toutes les fois que les éléments du risque sont variables, l'assureur ne doit pas se borner à apprécier le risque d'après les faits tels qu'ils se présentent lors de la conclusion du contrat ; il doit prévoir que la situation pourra se modifier dans l'avenir à son détriment. Cette prévoyance peut se déployer de différentes manières dans l'appréciation technique du risque. Ou bien l'assureur fait entrer dans ses calculs la possibilité des modifications ultérieures ; ou bien il exclut d'avance certains faits (les voyages, le service militaire en temps de guerre) de l'ensemble des risques et se décharge ainsi de sa responsabilité ; ou bien enfin, quant à certains faits, il se base, pour toute la durée de l'assurance, sur un état exactement décrit lors de la conclusion du contrat.

C'est dans ce dernier cas seulement qu'il peut être question de modification du risque. Cela suppose en effet un changement dans le risque tel qu'il a été accepté par l'assureur. La question de l'étendue du risque à la charge de l'assureur doit être résolue en partant du principe qu'en cas de doute l'assurance est accordée contre le risque sans restriction. Art. 32.

L'obligation de déclarer lors de la conclusion du contrat a pour but de permettre à l'assureur la sélection des risques, l'appréciation du risque proposé. Cette appréciation est l'affaire de l'assureur exclusivement. C'est la tâche principale de

304

la technique de son industrie. Sa volonté de conclure le contrat est le résultat de cette appréciation ; l'assureur 'doit manifester à l'autre partie contractante de quelle manière le risque a été apprécié, si ce risque ne doit pas être considéré comme accepté sans aucune restriction. Il ne peut donc y avoir limitation du risque que par des réserves expresses (conditions du contrat) de la part de l'assureur. De cette conception découle la règle que seuls peuvent amener une modification du risque les faits qui ont servi de base à l'appréciation du risque et qui subissent un changement pendant la durée du contrat, contrairement aux conditions du contrat.

On obtient ainsi une base solide pour résoudre toutes les questions fondamentales. En premier lieu comment déterminer le cercle des modifications qui auront une influence? Il faut prendre en considération exclusivement les faits, variables par leur nature, qui étaient importants pour l'appréciation du risque, lors de la conclusion du contrat ; et même seulement ceux au sujet desquels le contrat présuppose un état déterminé pour toute la durée de l'assurance. Ainsi les clauses vagues concernant la modification des risques critiquées plus haut (page 2 76) sont dorénavant inadmissibles. Art. 28, al. 1er,.

phrase 2.

La nature de la modification est sans importance. Ce ne sont pas seulement les aggravations du risque, mais aussi les changements, au sens strict de ce terme, qui ont pour conséquence de modifier le risque d'une manière contraire au contrat. Cette conclusion ne peut pas être repoussée par des arguments tirés de la technique des assurances ; elle est fortifiée notamment par la considération suivante. Les dangers qui menacent nos personnes et nos biens dépendent souvent les uns des autres -ou d'une autre cause commune, à tel point que les calculs techniques de l'assureur, qui supposent les risques indépendants les uns des autres, ne peuvent être maintenus qu'à l'aide de mesures particulières dans l'exploitation des affaires.

Ces mesures supposent souvent, surtout dans l'assurance des choses, que l'on prenne en considération toute modification du risque. -- Pour des raisons pratiques impérieuses, la cause de la modification du risque ne doit pas être méconnue. Toutes les modifications du risque qui proviennent du fait du preneur font naître
immédiatement pour l'assureur le droit de décliner sa responsabilité. Art. 28. C'est à tort que l'on fait intervenir ici la notion de la faute. Dans la règle, même la modification du risque qui repose sur la libre détermination de l'assuré ne provient pas d'une volonté arbitraire, mais est le résultat d\m

3Q5

changement dans la situation et les besoins économiques. Cependant, des motifs techniques ne permettent pas au législateur d'aller à rencontre de l'assureur en cette matière. La pratique prédominante oblige l'assuré à aviser l'assureur de la modification projetée, avant qu'elle déploie ses effets. Cette obligation de déclarer admise par le projet (art. 28, al. 2) diffère par son but et sa nature de l'obligation de déclarer lors de la conclusion du contrat ; elle n'a qu'une valeur complémentaire. L'assureur veut connaître la modification du risque sans retard, ou bien pour constater que sa responsabilité a pris fin, ou bien pour modifier les conditions de cette responsabilité, ou bien pour prendre les mesures nécessaires en vue de prévenir un dommage possible, par exemple en concluant une réassurance.

Les modifications qui surviennent sans le fait de l'assuré doivent être soumises à une règle plus douce. L'assuré ne doit pas être privé de la sécurité dont il a besoin, simplement par suite d'un changement qu'il n'a nullement provoqué et que, souvent, il ne connaît pas. En harmonie avec la pratique récente, il faut concilier les besoins opposés des parties en décidant que l'assureur doit se contenter d'être informé des changements du risque qui sont parvenus à la connaissance de l'assuré, et de se réserver les déterminations prévues au contrat, sa responsabilité subsistant dans l'intervalle. Si l'assureur se départit du contrat, il doit demeurer engagé jusqu'à l'expiration d'un certain délai pendant lequel l'assuré pourra se pourvoir d'une autre assurance. Art. 29. -- Les considérations exposées à propos de l'article 9 justifient aussi à l'égard de la modification du risque, la divisibilité de l'assurance collective. Art. 30. -- L'article 31 règle d'une manière équitable les cas dans lesquels la modification du risque reste sans effet. La règle proposée sous le n° 2 est d'une application générale en matière d'assurance maritime ; mais elle a aussi une importance pratique en matière d'assurance terrestre. -- L'article 26 règle le sort des primes payées.

c. L'obligation de déclarer après le sinistre.

(Déclaration du dommage). Art. 37.

L'obligation de déclarer après le sinistre est reconnue d'une manière générale par la doctrine et la législation. -- La déclaration immédiate du dommage doit sauvegarder
les intérêts légitimes de l'assureur. L'assureur doit être mis à même de déterminer au plus tôt la nature et les conséquences du sinistre, et de prendre les mesures nécessaires pour res-

306

tremare le dommage. Telle est la seule raison d'être de l'obligation de déclarer. L'inexécution de cette obligation reste sans conséquence toutes les fois que l'assureur a eu connaissance de l'accident, en temps utile, par une autre voie. -- Cette obligation suppose d'abord que la personne à laquelle elle est imposée connaît le fait du sinistre, -- elle n'a pas d'obligation de s'enquérir, -- puis qu'elle connaît le droit qui résulte de l'assurance. Car on ne saurait raisonnablement astreindre à la déclaration du dommage que celui qui sait avoir un droit contre l'assureur.

Dans la pratique, le défaut de déclaration a cette conséquence que le contrat ne lie plus l'assureur. Mais cette conséquence rigoureuse ne peut pas être justifiée ; en tout cas, si la violation de l'obligation provient de la négligence, elle est en disproportion inadmissible avec le dommage que l'ayant droit peut causer à l'assureur par une omission contraire à son devoir. La tendance actuelle du droit est d'accorder à l'assureur seulement une action en dommages-intérêts, lorsque l'inexécution provient d'une faute. L'indemnité à la charge de l'ayant droit doit être restreinte au montant auquel se serait réduite la prestation de l'assureur, si la déclaration du dommage avait été faite en temps utile. Cette limitation résulte du but même de l'obligation de déclarer. L'assureur n'a donc aucune indemnité à réclamer lorsqu'il est évident que, même si l'avis du sinistre avait été donné en temps voulu, le dommage n'aurait pu être empêché ni totalement, ni partiellement.

Par contre, il faut accorder à l'assureur une protection efficace contre la mauvaise foi. L'assureur n'est pas lié par le contrat si l'ayant droit n'a pas donné l'avis immédiatement, dans l'intention d'empêcher l'assureur de déterminer en temps utile les circonstances dans lesquelles le sinistre s'est produit.

4. Caractères spéciaux du risque assuré ; étendue du risque.

a. Les caractères spéciaux du risque. Art. 11 et 15.

Le projet s'abstient volontairement de toute définition C'est à la doctrine de rechercher s'il y a vraiment une notion générale du risque d'assurance et comment il faut comprendre spécialement les divers risques d'assurance (décès, accidents, incendie, etc.). Mais lorsqu'il y a lieu de fixer certaines conditions auxquelles un droit est subordonné ou certains effets d'un droit, le projet doit définir les caractères spéciaux du risque.

307

aa. Par l'essence du risque, l'assurance se rapporte à un événement futur qui est ou absolument incertain (assurance contre les phénomènes naturels, assurance contre les accidents, etc.) ou incertain seulement quant à l'époque à laquelle il se réalisera (assurance en cas de décès). Si l'événement redouté n'était plus à craindre lors de la conclusion du contrat parce que le sinistre s'était déjà produit ou parce que le danger à disparu, il n'y a plus d'intérêt assurable ; le contrat est sans objet. Article 11, alinéa 1er. Tout bien considéré, cette règle rentre dans le droit commun. En harmonie avec l'article 17 C. 0., -- concernant la prestation qui est impossible déjà lors de la conclusion du contrat, -- elle déclare nul le contrat d'assurance: Cela n'exclut point que, suivant les circonstances d'un cas spécial, les parties ne puissent avoir une autre volonté juridique, par exemple la volonté de faire une libéralité. Malgré la référence contenue dans l'article 1er du projet, il n'est pas superflu de formuler expressément cette règle. Car la question tranchée dans l'article 11, alinéa 1er, est controversée encore aujourd'hui, parce que dans certaines branches d'assurance,.

pour des raisons pratiques, elle a reçu une autre solution; En effet, dans l'assurance maritime, c'est une règle incontestée que le contrat est valable même lorsque, lors de la conclusion du contrat, le sinistre était exclu ou le dommage déjà survenu, pourvu que les parties n'eussent aucune connaissance de l'état réel des choses. On admet fictivement un risque qui, en réalité, n'existe plus. Les motifs qui ont provoqué cette fiction se trouvent dans les circonstances particulières à l'assurance maritime.

Très souvent, le contrat ne peut être conclu qu'après que le transport a commencé, donc à un moment où, dans la règle, les parties ne sont pas à même d'acquérir une certitude sur le sort du bien menacé, ou, plus tard, après le sinistre, de déterminer si le sinistre est survenu avant la conclusion du contrat ou après. Ces circonstances particulières, qui parlent aussi en faveur -de la bonne foi des parties, doivent être prises en considération dans les assurances maritimes, ainsi que dans les autres branches qui ont à tenir compte des mêmes difficultés. Dans cette catégorie rentrent les assurances de transports terrestres,
la réassurance et, sous certaines conditions, l'assurance contre l'incendie. Article 11, alinéa 2. -- Mais cette règle du droit d'assurance maritime ne peut pas être acceptée dans le droit des assurances terrestres. Avec les moyens actuels de communications, il est tout à fait impossible que, dans une assurance terrestre, les parties ne connaissent pas l'état réel des choses au moment de la perfection du contrat. Du moins

308

est-il toujours possible d'acquérir la certitude sur ce point, sans peine. Ainsi les circonstances dans lesquelles l'assurance terrestre est conclue ordinairement ne laissent plus place à la bonne foi, qui sert à juste titre de point de départ à l'assurance maritime. Le législateur doit donc, pour des motifs de politique juridique, édicter des dispositions dans le sens du projet.

Les prescriptions de l'article 11, alinéas 3 et 4, sont conformes à la pratique actuelle. Aucune considération de droit privé ou de droit public n'empêche d'admettre la pratique qui se base sur la connaissance que le preneur avait lorsqu'il expédie la proposition d'assurance, alinéa 4. En sens inverse, comparez alinéa 3. -- Comme le preneur d'assurance contre lequel l'alinéa 4 sera invoqué aura ordinairement agi frauduleusement, les sévères sanctions civiles qui sont prévues doivent être approuvées. Voir aussi l'article 47, alinéa 2, du projet.

bb. L'article 15 régie la question de la faute, les conséquences de ce que le sinistre a été provoqué par une faute.

L'idée prédomine dans la législation et dans la doctrine que l'assurance ne peut et ne doit procurer de protection que contre les événements accidentels, indépendants de la volonté de la personne menacée ; mais cette idée est en contradiction avec le but de l'assurance, qui est de garantir l'existence économique. L'expérience de chaque jour l'apprend, l'existence de l'homme n'est pas menacée seulement par des événements de pur hasard, mais pour le moins tout autant par des actes irréfléchis de sa part et par des négligences. Personne n'est à l'abri d'oublis ou d'inattentions, qui peuvent entraîner des conséquences graves. Cette expérience a pu être faite de tout temps. Son importance s'est beaucoup accrue dans la vie moderne. Les multiples exigences que les conditions actuelles de la vie imposent à l'activité de l'homme lui rendent fréquemment impossible d'avoir pour sa personne et ses biens la prévoyance qui résulterait d'une réflexion calme. Il faut reconnaître aussi que les moyens actuels des communications et les installations industrielles qui sont en développement continu, ainsi que beaucoup de produits, ont augmenté les dangers pour les personnes et les biens, non seulement d'une manière directe, mais aussi indirectement, en ce sens que l'usage habituel qui
en est fait rend insensible aux dangers particuliers qu'ils présentent et détourne de l'attention qui serait nécessaire. Ces oublis, ces inattentions, qui, -- précisément parce qu'ils ne peuvent pas être évités sans une vigilance

SO«

spéciale continue, -- sont communément considérés ' dans l
L'objection que, d'après les règles ordinaires du droit, l'assuré doit répondre de toute négligence, est inadmissible.

Des questions sociales, dont une des plus importantes se trouve dans l'assurance, ne peuvent pas être résolues par des déductions logiques tirées des règles générales du droit, mais seulement d'après leur but. Puis, on ne comprend pas pour quel motif il serait contraire à la bonne foi et inadmissible, aux termes de l'article 17 C. 0., de garantir l'assuré contre sa faute légère. Ainsi, l'assurance générale contre la responsabilité, qui est en plein développement, s'est basée, conformément à son but et sans soulever d'opposition juridique, sur l'idée de garantir l'assuré contre les conséquences civiles de sa faute.

La plupart des lois et des projets de loi disposent, il est vrai, expressément que les contrats d'assurance, qui doivent protéger le preneur contre les conséquences dommageables den actes illicites (interdits) qu'il commet, sont nuls. Mais cette règle est fausse au point de vue pratique, et insoutenable sous cette forme au point de vue juridique. Toute prestation licite peut faire l'objet d'un contrat. La prestation promise par l'assureur porte-t-elle le caractère d'une prestation licite ou non? C'est une question qui doit être résolue d'après les règles de droit privé ou, à défaut de règle de ce genre, d'après les idées juridiques prédominantes. Les règles du droit public ont leur raison d'être spéciale dans la protection des intérêts publics ; leur but fixe la limite juridique de leur champ d'application. Les
prescriptions du droit public et les règles du droit privé ne reposent point au fond sur les mêmes considérations. Il est donc inadmissible d'attribuer sans autre aux règles de l'un de ces domaines juridiques force obligatoire dans l'autre domaine. Il est possible, mais nullement nécessaire,

310

qu'un acte illicite, -- et par conséquent punissable, -- touche par ses conséquences au domaine du droit privé. C'est l'affaire «lu juge civil de déterminer l'importance de ces conséquences en droit privé; dans son jugement, il n'est pas lié en principe par l'appréciation pénale de l'acte contraire au droit.

Par ces considérations, le projet comprend d'une manière générale la faute légère dans l'assurance. Article 15, alinéa 1er.

Ce principe est le résultat juridique de situations et de besoins économiques. Il a un caractère dispositif, car on ne peut pas interdire à l'assureur de fixer les conditions de sa responsabilité par des clauses spéciales, plutôt que d'après une mesure abstraite des fautes.

L'article 15, alinéa 2, fait une application logique de l'idée qui est à la base de l'alinéa 1er, et règle la responsabilité du preneur d'assurance pour les actes de certaines tierces personnes, à savoir des personnes qui font ménage commun avec lui ou pour les actes desquels il est civilement responsable. Dans les limites fixées par la nature des choses, cette règle protège le preneur d'assurance notamment contre le risque d'avoir à répondre, à teneur de l'art. 115 C. 0., du dommage causé par la faute de tierces personnes et d'être ainsi privé, indirectement, de la protection de l'assurance. L'art. 63, alin. 3, «lu projet accorde aux tierces personnes mentionnées clans l'art. 15, alin. 2, une protection propre.

b. L'étendue du risque. Art. 32.

Le principe ici posé est d'une importance fondamentale dans le droit des assurances. Dans chaque contrat pour ainsi dire, l'assureur décline sa responsabilité pour tel ou tel événement. De plus, la pratique des assurances, et la doctrine à sa suite, excluent régulièrement de l'assurance les événements qui sont extraordinaires ou qui sont de nature à atteindre en même temps un grand nombre de personnes ou de biens (guerre, émeute, tremblements de terre, ouragans, etc.). Enfin d'après la pratique actuelle, l'assureur ne répond pas des événements qui peuvent être attribuées à des modifications dans l'objet assuré (vice propre de la chose, inflammation spontanée, etc.).

Dans ces circonstances, une règle légale qui fixe quelle est, en cas de doute, l'étendue du risque à la charge de l'assu-

311

reur, est indispensable dans l'intérêt de la sécurité des relations d'affaires et dans celui de la jurisprudence.

Le législateur a le choix entre deux solutions. Il peut, en s'appuyant sur une règle ordinaire d'interprétation, décider que la responsabilité de l'assureur devra être déterminée d'après les faits établis par le contrat et que, s'il y a doute sur son, étendue, il faudra prononcer contre l'assuré. Mais il peut aussi disposer qu'en cas de doute l'assureur doit répondre de tous les risques du genre dont il s'agit. La première solution n'élimine pas la difficulté ; en particulier, elle n'empêche pas une référence à la jurisprudence et à la pratique, dont, précisément en matière d'assurance, on ne peut garantir ni la consistance ni la raison d'être. .

Aussi le projet a-t-il, en principe, adopté la seconde solution ; il dispose que la question de l'étendue de la responsabilitédoit en cas de doute être tranchée contre l'assureur, dans ce sens que l'assureur a charge de tous les événements qui présentent le caractère du risque. Ainsi se trouvent fixés d'une manière claire et précise les plus importants rapports de droit entre les parties, en évitant des prescriptions de détail gênantes.

" -- Le projet laisse à l'assureur toute liberté pour fixer l'étendue et les conditions de sa responsabilité. L'assureur seul est à même d'apprécier si et dans quelles conditions les risques dont la probabilité ne peut être calculée peuvent être compris dans, l'assurance. Mais l'assureur doit indiquer d'une manière claire et non équivoque les risques dont il n'entend pas être chargé.

Les clauses générales, très communes en pratique, telle que « tout acte illicite », « toute contravention aux lois et règlements », etc., sont interdites.

5. La police. Articles 12, 13, 14 et 65.

Conformément à la législation et à la pratique, l'article 12, alinéa 1er, impose à l'assureur l'obligation de remettre au preneur un document constatant les droits et les obligations des parties ; c'est ce qu'on appelle la police. Cette règle garantit le résultat pratique que visent les partisans de la forme écrite du contrat. Il est hors de doute que l'assuré a intérêt à être instruit par un document authentique, d'une manière complète, des droits et des obligations des parties. Du moment que la loi impose à l'assureur l'obligation de dresser un acte écrit constatant le contrat, elle doit lui accorder expressément le droit au remboursement de ses débours et aux frais de la

312

police. Le Conseil fédéral pourra, par ordonnança, empêcher les taxes exagérées. -- L'article 12, alinéa 2, oblige de plus l'assureur à remettre à l'assuré, sur sa demande, certaines copies. Les documents de proposition contiennent des énonciations et des déclarations de volonté du proposant qui, au fond, constituent une partie intégrante du contrat. L'assuré ne peut examiner les rapports de droit créés par le contrat que s'il connaît le contenu des déclarations qu'il a faites dans la proposition. Vu le nombre et la nature des questions, on ne peut admettre que l'assuré ait cette connaissance par sa propre déclaration. De plus, il faut rappeler que souvent dans la pratique c'est l'agent d'assurance ou un tiers (le médecin) qui remplit le formulaire de déclaration. On ne peut admettre l'objection que l'assuré peut prendre lui-même des copies. La rapidité avec laquelle on recueille aujourd'hui les propositions ne lui en laisse pas le temps.

L'article 13 remédie à un état de choses dont les inconvénients sont vivement ressentis dans les opérations d'assurance. L'assuré n'a souvent la police à sa disposition qu'après avoir payé la première prime. C'est seulement alors qu'il est à même d'en examiner de près le contenu, bien souvent com- " pliquâ. La pratique n'admet aucune réclamation ultérieure de l'assuré à raison de ce que le contenu de la police ne serait pas d'accord avec ce qui avait été convenu. Au contraire, au moyen d'une clause particulière, elle attribue à l'acceptation de la police cet effet juridique qu'elle « constate » ou « mani. feste » que l'assuré est d'accord avec le contenu du contrat dans son ensemble. Mais, en fait, si l'on tient compte de toutes les circonstances, cette déclaration est une fiction; elle ne peut pas être approuvée par le législateur. Mais, inversement, la bonne foi exige que l'assuré vérifie le contenu de la police dans un bref délai et en réclame la rectification, s'il y a lieu. 11 ne s'agit point pour l'assuré d'attaquer le contrat pour cause d'erreur, mais d'obtenir la constatation exacte d'une opération tout à fait valable. Il ne peut pas résulter de là pour l'assureur une situation incertaine.

Par la fonction juridique qui lui est attribuée, la police est un simple instrument de preuve. Elle constate la teneur de l'opération juridique qui a été conclue. L'assureur
qui effectue un paiement est en droit, d'après les dispositions générales du C. O. (article 102), d'exiger une quittance, et, si l'assurance est éteinte, la restitution ou l'annulation de la police, conformément à l'article 105 C. 0.

813

La pratique des assurances admet des polices à ordire et des polices au porteur, mais elle ne les envisage pas comme de véritables titres à ordre ou au porteur. La police au porteur a pour but d'affranchir l'assureur des difficultés que présente la vérification du droit des intéressés, et de toute responsabilité en cas d'erreurs et de-fraudes. En vertu de la clause au porteur, l'assureur de bonne foi peut considérer la présentation de la police comme une légitimation suffisante pour le paiement. Cette fonction juridique de la clause au porteur fait de la police un titre de légitimation.

L'assureur a le droit de payer à celui qui présente la police; il n'est pas tenu de le faire. La clause à ordre a, de même, principalement pour but, dans son application pratique, de faciliter la vérification de la qualité des intéressés.

Il n'existe aucun motif d'interdire les polices au porteur ou les polices à ordre. L'assurance des choses, surtout l'assurance de transport, a besoin de formes de transmission qui facilitent la cession des droits. Par contre, il s'impose de préciser les effets juridiques de la police à ordre et de la police au porteur dans les assurances de personnes. -- Tant que la police d'assurance sur la vie au porteur ne doit être qu'un titre de légitimation, on ne peut refuser de la reconnaître juridiquement, par considération pour l'étendue du cercle des affaires de l'assureur. Art. 65, alin. 2. Ainsi est établie une règle spéciale, qui est étrangère au C. 0. pour les reconnaissances ordinaires de dettes, et qui fixe, non pas l'exercice du droit contre l'assureur, mais la condition de la validité du paiement par l'assureur. -- La clause au porteur, dans la rédaction usitée dans la pratique (« la somme assurée est payable au porteur de la police »), ne laisse cependant pas voir clairement si la police au porteur n'a pas des effets plus étendus. Des clauses de ce genre induisent le public à croire que la police est un véritable titre au porteur dont la simple tradition, sans autre formalité, opère valablement une cession de créance en toute propriété ou en nantissement. De là des procès fréquents. Pour cette raison déjà, il faut une indication · fournie par la loi. -- Mais il faut aussi résister à la tendance de faciliter la circulation des polices d'assurance sur la vie au moyen de la clause
au porteur. Les polices manquent complètement des éléments économiques et juridiques d'une reconnaissance de dette négociable. Le but de l'assurance sur la vie notamment, -- qui est un acte de prévoyance pour la famille, -- répugne aux formes simplifiées de transmission des droits.

Pour ces considérations, l'art. 65, alin. 1er, déclare que le droit

314

qui résulte du contrat d'assurance ne peut pas être cédé patla simple tradition de la police.

Pour les mêmes motifs, la police à ordre ne peut servir que de titre de légitimation. Il faut écarter la facilité plus grande de transmission du droit qui résulte de la clause à ordre ; -- l'endossement rend inutile la preuve de la cession du droit et la notification à l'assureur. -- L'art. 65, alin. 1er, exclut la transmission par endossement du droit qui résulte d'un contrat d'assurance de personne.

L'art. 14 règle l'annulation des polices perdues. Il faut tenir compte de l'objection que la nature juridique de la police, -- telle que la fixe le projet, -- exclut l'annulation, puisque le titre n'est qu'un instrument de preuve et n'a aucune fonction de droit civil. Mais, à l'encontre de cette objection juste, des considérations de nature pratique exigent l'annulation. La possession de l'acte même répond à un besoin urgent de l'assuré, qui doit être constamment au clair au sujet de ses rapports de droit avec l'assureur. En fait, la police est indispensable dans nombre de transactions (nantissement, cession, etc.). La faculté de l'annulation prévue par l'art. 105 C. 0. est insuffisante, cela se conçoit. La règle proposée par le projet dissipe l'insécurité du droit, qui devient toujours plus intolérable, au sujet surtout de la question de savoir si les polices au porteur peuvent être , annulées et de quelle manière. -- L'art. 14 établit le droit de requérir l'annulation, conformément à la nature des choses. La compétence quant au lieu est réglée conformément aux prescriptions imperatives de la loi de surveillance (art. 2, chiffre 4, alin. 3). La compétence quant à la matière reste réglée par le droit cantonal. Par raison d'opportunité, les règles relatives à l'annulation des lettres de change (art. 793 et suivants, C. 0.) sont déclarées applicables. L'interdiction de payer prévue art. 791 C. 0. est inutile ici. Le but est atteint par une simple notification à l'assureur. Par contre, l'art. 798 C. 0. n'atteint pas le but (remplacement du titre); aussi l'art.

14, alin. 3, accorde-t-il au requérant le droit d'exiger la délivrance à ses frais d'une nouvelle police. Comp. art. 856 C. 0.

L'art. 14 n'empêche naturellement pas que l'assureur ne doive se contenter, lors du paiement, de l'annulation simple d'après
l'art. 105 C. 0.

6. L'assurance pour compte d'autrui. Art. 16 et 17.

L'assurance pour compte d'autrui répond à des besoins particuliers de la vie économique, surtout en matière d'assu-

»

315

rancc contre les risques de transport et contre l'incendie. Le commissionnaire de transport, l'entrepositaire, etc., sont fréquemment dans la nécessité de contracter une assurance pour un intéressé connu ou inconnu. Depuis peu, l'assurance pour compte d'autrui joue un rôle aussi dans l'assurance contre les accidents. Le patron qui conclut une assurance dite collective combinée, et qui se fait rembourser par les ouvriers une partie de la prime fixée, fait en ce sens une assurance pour compte d'autrui. Il se justifie donc de traiter de cette forme d'assurance dans la partie générale de la loi, en raison de ses caractères particuliers.

L'art. 16 établit les points de vue fondamentaux. Pour ne pas entraver inutilement une forme d'assurance susceptible de développement économique, le projet admet l'assurance pour compte d'autrui même sans mandat. L'art. 16, alin. 2, pare aux inconvénients possibles; d'après cet article, le preneur qui n'a pas contracté pour compte d'autrui d'une manière incontestable, est considéré comme étant lui-même l'assuré. La prescription de l'art. 17, alin. 2, est encore plus efficace.

L'art. 17, alin. 1er, écarte les doutes qui ont fait naître parfois des variations dans la jurisprudence. L'assurance a pour but la compensation d'un dommage qui provient du sinistre.

Les avantages de l'assurance ne doivent donc pas profiter à un tiers quelconque, niais seulement à celui auquel le sinistre a causé un dommage. Il est de l'intérêt bien entendu de l'assureur et de l'intérêt public que ce principe soit rigoureusement maintenu et que les assurances-pari soient combattues comme dangereuses. Aussi, contrairement à ce qui se passe pour les commissionnaires, en général, le preneur d'une assurance pour compte d'autrui ne peut pas invoquer les droits résultant du contrat toutes les fois qu'il y a lieu de craindre un abus de l'assurance.

Cela est évidemment le cas lorsque l'obligation de l'assureur est échue et que son exécution est exigée. Aussi le droit de réclamer l'indemnité appartient-il exclusivement à l'intéressé, à l'assuré. Comparez la prescription imperative de l'art. 44-, alin. 2, et l'art. 17, alin. 2, du projet. On peut admettre sans hésitation les deux exceptions à ce principe prévues dans l'art. 17, alin. 2. Dans ces deux cas, la possibilité d'une spéculation condamnable du
preneur d'assurance est exclue, puisque l'assuré sait que son intérêt est garanti. -- L'art. 17, alin. 3, tire la conséquence de la position juridique que le yrenem Veuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

22

316

d'assurance prend dans le contrat. -- Le projet n'a pas à régler les rapports de droit entre le preneur d'assurance et l'assuré: 1. La prime. .Art. 18 à 27.

a. La charge de l'obligation incombe en principe au preneur, qui, dans la règle, est aussi l'assuré. Art. 18, alin. 1er. -- L'alin. 2 consacre une particularité de l'assurance pour compte d'autrui généralement admise. -- L'alin. 3 accorde à l'assureur un droit de compensation vis-à-vis du bénéficiaire. Cette règle déroge à l'art. 185 C. 0. en ce sens quelle établit le droit de compensation en faveur de l'assureur, non pas pour toutes les réclamations susceptibles de compensation, mais seulement ·pour les primes. Cette règle est imposée par la technique de l'assurance. La prestation qui résulte du contrat suppose nécessairement le paiement préalable de la contre-partie, la prime.

Dans l'assurance collective, la, compensation ne s'applique.qu'à la partie de la prime qui est due pour la prestation que le contrat stipule en faveur du bénéficiaire.

b. Paiement de la prime [)ar le cré<(ìtcier-
projet, c'est l'art. 83 C. O. qui fixe le taux de l'intérêt dû. -- Des motifs d'équité parlent en faveur du droit de gage que la loi accorde au créancier-gagiste. Cette garantie accordée au créancier est de nature à prévenir autant que possible la liquidation anormale des contrats d'assurance sui 1 la vie surtout.

c. Echéance. L'art. 20 règle l'exigibilité de la prime. Le projet ordonne le paiement préalable des primes. Ce mode de paiement correspond à un principe du droit d'assurance. -- L'alin. 2 écarte la clause des polices que l'assurance entre en vigueur seulement après le paiement de la première prime et non pas déjà dès la délivrance de la police. L'assuré ne doit pas être laissé plus longtemps dans l'idée qu'il est assuré parce que la police lui a été délivrée sans réserve, lors même que la prime n'a pas été payée.

317

}

d. Sommation obligatoire. Conséquence de lu demeure.

Art. 21 et 22. L'assureur doit pouvoir compter sur le paiement ponctuel des primes pour que l'exploitation normale de son entreprise ne soit pas compromise. Les conséquences ordinaires de la demeure (art. 119 et 121 C. 0.) ne le protègent pas suffisamment. Le recouvrement juridique de la prime n'est pas compatible avec les exigences de l'exploitation en grand. Le projet règle les conséquences de la démeure conformément à la pratique actuelle (art. 21, alin. 3). Mais il s'en écarte quant aux conditions auxquelles le débiteur se trouve mis en demeure. Le paiement des primes est toujours stipulé pour une échéance fixe. Suivant le principe «dies interpellât pro homine » le débiteur est ainsi en demeure par la seule échéance du terme (art. 117, alin. 2, C. 0.). Si la demeure ne devait produire que des effets ordinaires, les conditions de la demeure d'après le droit des obligations ne soulèveraient aucune objection. Mais l'assureur stipule des conséquences exceptionnelles, justifiées en fait ; à raison des conséquences économiques rigoureuses que la demeure entraîne pour le débiteur, le législateur doit sauvegarder d'une manière convenable les intérêts du débiteur. Ce résultat ne peut être atteint qu'en rompant, en matière d'assurance, avec le principe de la mise en demeure suivant le droit commun, et en instituant à sa place l'obligation légale pour l'assureur d'adresser une sommation. Art. 21, alin. 1er. Les conséquences de la demeure ne se produisent pas, si le retard n'est pas dû à une faute, art. 42. En sens contraire art. 119, 122 et 123 C. 0. ; par contre, art. 118, alin. 2, C. 0. -- Si, à teneur de la convention ou de l'usage, la prime est quérable, l'assureur peut remplacer la sommation écrite par une sommation verbale. Art. 21, alin. 2. -- Lorsque le débiteur est en demeure, l'assureur peut, à son choix, ou se départir du contrat, ou poursuivre le paiement de la prime.

Mais, à teneur de l'art. 22, alin. 1er, l'assureur perd le droit d'exiger l'exécution du contrat, s'il n'a pas poursuivi dans un court délai le paiement de la prime en souffrance. On réagit par là d'une manière efficace contre la pratique de l'assureur qui garde le silence et ne réclame qu'après des années la prime en souffrance et les primes venues depuis à échéance,
naturellement sans avoir à supporter les sinistres qui ont pu se produire dans l'intervalle. Il n'est pas admissible que, par son inaction, l'assureur laisse penser a l'assuré que le contrat ne continue pas.

e. Lieu du paiement. Art. 23. La règle du droit commun que la dette d'une somme d'argent doit être payée au domicile

318

du créancier (art. 84, n° 1, C. ().)' est maintenue. Art. 28, alin. 1e1'. Une indication légale s'impose, vu le nombre des agences.

-- A ce principe que la prime doit être payée chez l'assureur, qu'elle est portable, l'art. 23 apporte deux exceptions. Une première concerne les sociétés étrangères. La loi de surveillance exige, il est vrai, qu'elles indiquent un domicile principal en Suisse. Mais ce domicile n'est pas, dans la règle, un dominile commercial, une succursale. D'autre part, l'équité ne permet pas d'obliger l'assuré à porter la prime au domicile de l'assureur à l'étranger. L'art. 23, alin. 2, assure un lieu d'exécution en Suisse. -- L'alin. 3 pare à ce danger que l'assureur n'indique point de domicile principal en Suisse ou révoque ce domicile. Le débiteur peut aussi, sans autre recherche, recourir à la procédure prévue, art. 107 G. 0. -- La loi de surveillance (art. 2, n° 4, alin. 2) fixe le lieu d'exécution, en Suisse, des prestations qui incombent à l'assureur.

L'art. 23, alin. 4, règle le cas, fréquent en pratique, où l'assureur fait encaisser habituellement la prime chez 1«; débiteur, sans y être obligé, c'est-à-dire sans que cela ait été expressément convenu. Cette pratique très répandue n'implique aux yeux des assureurs aucune modification des conventions ; elle n'annule point "ia clause que la prime est portable. I/iissureur peut révoquer cette pratique de .sa seule volonté. L'assuré de même peut, à son gré, se conformer à cet usîï»'c «HI n'en pas tenir compte. Par contre, il est de droit que tuiit que l'assureur n'a pas révoqué cet usage ou que l'assuré ne l'a pas repoussé, la prime stipulée portable devient quérable quant à l'époque et au lieu de paiement. Suivant le projet, la clause usuelle que le débiteur ne peut pas se prévaloir de l'encaissement à domicile est sans effet. Art. 80, alin. 2. L'acte même, l'encaissement de la prime, est inconciliable avec cette réserve.

/'. Réduction dsx primes. Art. 24. Cette disposition, qui se comprend d'elle-mfime, doit remédier à certains inconvénients de la pratique des assurances, qui ont fréquemment donné lieu à des plaintes fondées de la part du public^ L'art. 24 suppose que des faits déterminés, qui augmentaient le risque et qui.

lors de la conclusion du contrat, ont servi de base à son appréciation et à la fixation de la prime,
ont disparu au cours de l'assurance.

y. Indivisibilité de la prime. Art. 25. Ce principe résulte des considérations techniques. Les bases statistiques de la technique des assurances sont des observations nombreuses faites

319

pendant un temps déterminé. Aussi l'on ne prend pas en considération les variations que peut présenter chaque risque individuellement pendant la période d'observation, quant à la probabilité du dommage. Si la période d'observation a été mesurée d'une manière convenable, ces variations peuvent être considérées comme se compensant. L'assureur doit donc mesurer le temps d'après lequel est calculée l'unité de prime, de manière qu'il puisse compter sur la compensation des écarts. Gomme l'appréciation technique du risque repose sur la méthode d'observation exposée ci-dessus, il est impossible de déterminer quelle fraction de la prime revient à l'assureur, si sa responsabilité cesse avant la fin de la période d'assurance. Aussi est-il admis d'une manière générale dans le droit des assurances que la prime de la période d'assurance en cours est indivisible.

A.. Sort de la prime en eus de résiliation 'unilatérale du contrat. Art. 26 et 27. Le projet doit renoncer à faire l'énumération complète de tous les cas possibles de résiliation unilatérale. L'alin. 1er fait ressortir à titre d'exemple les cas qui ont une actualité particulière. Le juge aura à en faire l'application par analogie. La question de savoir quelle prestation est due à l'assureur, lorsque le risque disparaît au cours de l'assurance, ne concerne pas la résiliation unilatérale du contrat.

Cependant, vu le principe posé dans l'art. 145 C. 0. et l'indication contenue dans l'art. 26 du projet, il n'y a pas lieu de la résoudre d'une manière spéciale. -- En cas de résiliation unilatérale du contrat, l'assureur conservera le droit à la totalité de la prime qui avait été stipulée pour la période d'assurance en cours à l'époque de la dissolution. Art. 26, alin. 1er.

Cette règle reçoit application dans tous les cas qui ne rentrent pas dans les conditions prévues aux alin. 2, 3 et 4 et par conséquent, en principe, toutes les fois que la prime représente, d'après les bases techniques de l'opération, r équivalent du risque couru. D'impérieuses raisons de calcul et d'exploitation empêchent absolument l'assureur de restituer la prime totalement ou môme partiellement. Ou bien il a dépensé ce qu'il a reçu, jusqu'au dernier centime, conformément à sa destination, en partie dès le début de l'assurance (pour payer les commissions de conclusion et d'encaissement,
les primes de réassurances), en partie au cours du contrat ou après la clôture de l'exercice ' (pour couvrir les frais généraux et les sinistres, pour répartition des bénéfices) ; ou bien il en détient encore une partie sous forme de réserve de primes. Mais même cette partie est

320

encore une prestation due, d'après le principe de l'indivisibilité de la prime, -- art. 25, -- (ainsi les reports ou réserves de primes périodiquement encaissées dans toutes les assurances de choses et dans l'assurance contre les accidents et la maladie). Les sommes mises en réserve ne peuvent pas être restituées sans ruiner les bases du calcul. Ainsi est justifiée tech- ' niquement la règle de l'art. 26, alin. 1er. .Au point de vue du projet, on ne peut contester que le législateur n'ait à fixer · l'étendue de la prestation légitimement due à l'assureur par application du principe technique de l'assurance. -- La prescription de l'art. 26, alin. 1er, qui accorde à l'assureur les primes payées comme équivalent du risque couru s'applique aussi aux assurances sur la vie qui ne sont pas susceptibles de rachat, c'est-à-dire à ceux de ces contrats qui ne font pas naître une obligation certaine contre l'assureur (assurance en cas de vie, assurance temporaire en cas de décès, assurance de survie).

Dans les assurances sur la vie dans lesquelles il est incertain si l'assureur aura une prestation à exécuter, il est tenu compte pour le calcul de la prime de ce que les versements du preneur demeurent acquis à l'assureur si le sinistre ne se produit pas. Aussi, en cas de dissolution du contrat, l'assureur ne peui~il pas, sans ruiner les calculs techniques, renoncer au bénéfice éventuel subordonné à la non-arrivée du sinistre.

L'art. 26, alin. 2, règle par analogie avec le droit maritime, qui sert de modèle, ce qu'on appelle le droit de ristourne. Kn équité, l'assureur ne peut pas prétendre ici à la totalité de la prime. L'assureur peut, le cas échéant, réclamer suivant le droit commun une indemnité, outre le remboursement de ses frais. Art, 26, alin. 5.

Les alinéas 3 et 4 de l'art. 26 traitent des cas dans lesquels les primes payées dépassent l'équivalent dû à l'assureur.

Cette condition est évidemment réalisée pour l'alin. 3, mais aussi, tout bien examiné, pour l'alin. 4. Dans les assurances sur la vie qui font naître une obligation certaine de l'assureur (assurance-vie entière en cas de décès, assurance mixte, y compris l'assurance dite à terme fixe), il est payé pendant toute îa durée du contrat une prime constante. Comme le risque augmente avec l'âge, le preneur paie, au commencement trop en correspectif
de la prestation qui lui est sûrement garantie, mais plus tard, trop peu. Ce sont les réserves faites sur les primes qui rétablissent l'équilibre. (Réserve). Les primes payées sont donc l'équivalent du risque couru, dans la mesure où elles devaient servir à couvrir les sinistres survenus dans chaque période d'assurance ; mais, pour partie elles sont la contre-partie d'un

321

risque à courir ultérieurement par l'assureur, dans la mesure où elles servent à constituer la réserve destinée à garantir le paiement de la somme assurée en s'ajoutant aux primes qui sont dues par l'assuré pour l'avenir. Suivant le système du projet, l'assureur a droit à l'équivalent stipulé dans la mesure où il a couru le risque -ou bien dans la mesure oi( des raisons techniques ·rendent cette contre-partie nécessaire pour lui. La conséquence de ce système, c'est que dans les cas prévus alin. 3 ot 4, c'està-dire toutes les fois que l'assureur a reçu plus que la contrepartie réellement due, il y a lieu, en principe, à restitution de l'excédent, qui doit être considéré techniquement comme la contrepartie d'une prestation future qui est devenue caduque. Si l'alin. 3 ne prévoit pas la restitution de la totalité des primes payées d'avance, cela tient avant tout à cette considération que l'assureur a besoin d'une contre-partie supplémentaire lorsque .'.es frais d'assurance n'ont pu être amortis qu'en partie sur les primes acquises. -- L''alin. 3 demande de plus un exposé de motifs spécial, en ce sens qu'il prend pour base non pas la réserve des primes, mais le montant des primes payées pour une période ultérieure d'assurance. Dans les branches dans lesquelles il est d'usage de faire payer les primes d'avance pour plusieurs périodes (ainsi dans Fassuiance contre l'incendie ou contre les accidents), la réserve des primes n'est pas calculée d'après un système scientifique, techniquement établi, -- comme dans l'assurance sur la vie. -- La réserve est tout à fait empirique ; assez souvent, elle est calculée d'une manière arbitraire. Aussi les réserves sont-elles très différentes, les circonstances étant les mêmes. Dans ces circonstances, le législateur doit veiller à fixer une base qui garantisse aux assurés l'égalité de traitement.

L'art. 26 règle exclusivement le sort des primes d'après les considérations techniques. La prestation garantie par l'assureur ne peut pas être rendue restituable, que la dissolution du contrat repose sur des motifs de' droit commun ou du droit d'assurance. Il y a en question des circonstances de fait que la nature des choses ne permet pas de considérer comme n'étant pas intervenues. En échange de la prestation stipulée de l'assuré, l'assureur garantit une contre-prestation,
dont la révocation ultérieure est impossible. -- La responsabilité de la partie dont la faute aurait amené la résiliation du contrat est réglée par le droit commun. Art. 26, alin. 5.

Dans certains cas, la pratique actuelle refuse tout règle· ment en · cas de résiliation unilatérale. C'est ainsi que la tota-

322

lite des primes payées seront acquises à l'assureur, notamment si l'assureur se départit du contrat pour cause de fraude de la part du preneur. Cette pratique ne peut pas être approuvée en principe. Même la mauvaise foi ne justifie pas que le preneur doive plus qu'une pleine indemnité. Il faut cependant reconnaître que la nature spéciale de l'opération d'assurance ne permet pas à l'assureur d'établir nettement l'étendue du dommage. Comme on ne peut pas refuser à. l'assureur une juste indemnité et que d'autre part le preneur de mauvaise foi ne mérite pas d'égard particulier, l'art. 27 permet aux parties de stipuler que la prestation due à teneur de l'article 26 peut être réduite de moitié au plus si la rfticence u été commise de mauvaise foi. Il va de soi que, dans ce cas, l'assureur n'a pas droit à une plus ample indemnité. S'il n'y a pas de convention spéciale ou si la réticence n'a pas été commise de mauvaise foi, c'est la disposition de l'art. 2o qui demeure la règle. Pour des motifs d'intérêt public, l'art. 2(5, alinéa final, réprime d'une manière particulièrement sévère, dans des cas déterminés, la fraude du preneur d'assurance ou de l'ayant droit.

8. La responsabilité de l'assureur pour ses agents.

Art. 33.

Les agents ont des fonctions si importantes dans les affaires d'assurance que le législateur doit se préoccuper des rapports de droit que l'activité de l'agent fait naître entre les parties. Il y a controverse sur la situation juridique do l'agent, et dans les cercles intéressés et dans la doctrine et la jurisprudence. Le terme « agent » n'est pas une notion précise. Les uns s'en tiennent aux idées courantes et considèrent l'agent comme un mandataire commercial. (Art. 426 C. ().)

Les autres, notamment les assureurs, donnent à l'agent la position juridique d'un courtier. Suivant le système juridique adopté, dans le premier cas l'assureur est responsable des actes de l'agent dans les relations d'affaires, dans le second, il est déchargé de toute responsabilité.

D'après le contrat qui l'investit de ses fonctions, l'agent d'assurance est mandataire de l'assureur. Il n'a à travailler dans une même branche que pour un seul assureur, qui est son mandant. Il a de plus, après la conclusion du contrat, à servir "en général d'intermédiaire à l'assureur vis-à-vis de l'assuré dans les relations d'affaires (remise des polices, encaissement des primes, réception de communications diverses, etc.).

328

Toutes les fois que l'assureur adresse ses clients à l'agent, expressément ou tacitement, l'agent n'est certainement plus un tiers impartial ; il agit au contraire dans l'intérêt de l'une des parties, de l'assureur. C'est donc à bon droit que l'agent est considéré généralement comme l'homme de confiance et le représentant de l'assureur.

Aussi l'article 33, alinéa 1er, établit-il la présomption que l'agent a un pouvoir de représentation. De même que l'article 426 C. 0., cette prescription est basée sur l'ensemble dos actes que comporte habituellement, c'est-à-dire suivant l'opinion ayant, cours dans les affaires, l'exécution des opérations confiées à un agent »semblable. On trouve ainsi une mesure objective pour fixer l'étendue des pouvoirs de l'agent. Dans l'intérêt de la sécurité des transactions, le pouvoir accordé par le contrat qui institue l'agent ne peut pas être seul déterminant. Il est aussi parfaitement juste que l'assureur soit lié par les actes que l'agent fait en dehors du cerdo des fonctions qui lui ont été confiées, mais qu'il a coutume de faire avec l'autorisation tacite de l'assureur. -- Comme l'assureur a coutume de se décharger de toute responsabililé pour les actes de l'agent, au moyen de clauses spéciales, l'article ·):!, alinéa 1er, est une disposition imperative. Article 80, alinéa 2.

L'article 33, alinéa 2, repose sur cette considération, bien fondée en technique, que l'industrie de l'assurance doit être exploitée suivant un plan fixe, sur la base de conditions gé-, nérales d'assurance identiques. Cette prescription évite en même temps au public d'accorder, sans autre, confiance à l'agent qui prétend avoir un pouvoir spécial de représentation.

9. La revision des conditions générales d'assurance.

Art, 34.

La revision des conditions générales d'assurance prend une importance pratique immédiate lorsque le contrat a été conclu pour une assez longue durée ou même pour la vie entière. La technique et le droit d'assurance sont dans un état continuel de développement. A des idées ou des besoins nouveaux correspondent d'autres conditions d'assurance. (Vite question doit donc attirer l'attention spéciale du législateur.

L'article 34 a sa source dans la base économique do l'assurance. L'égalité de traitement pour les assurés est imposée par la justice, même lorsque les intéressés n'ont pas entre

·324 eux de lien social (sociétés mutuelles), mais forment ime communauté de risques seulement au point de vue économique (société anonyme). Les exigences de la vie doivent faire enlever à l'assureur la faculté de décider librement s'il laissera les anciens assurés profiter aussi des conditions nouvelles. Mais ses intérêts légitimes doivent être sauvegardés. Ce résultat est obtenu par l'article 34. Le preneur d'assurance peut exiger que le contrat soit continué aux conditions nouvelles. Il n'a pas le droit d'invoquer l'une ou l'autre de ces conditions ; il doit en admettre l'application on bloc. Mais les anciens assurés doivent être soumis aux mêmes conditions que les nouveaux en ce qui concerne les contre-prestations, comme en ce qui concerne les conditions générales, si les conditions revisées ·exigent une contre-partie plus élevée.

10. Le retrait do la concession ; ses conséquences civiles.

Art. 35.

D'après l'article 13 de la loi de surveillance, les tribunaux ordinaires prononcent, entre autres, sur les conséquences civiles du retrait de la concession. L'article 35 fournit au juge les règles fondamentales d'après lesquelles il s'acquittera de sa tâche difficile. La disposition du projet se réfère à la règle fondamentale de l'article 9, alinéa 2, de la loi de surveillance.

La condition première à laquelle le contrat est conclu chex nous, c'est que la situation de l'assureur soit régulière, conforme aux exigences de la loi de surveillance. L'assuré doit pouvoir compter que seuls des établissements solides obtiennent la concession, et que les injonctions de l'autorité de surveillance, destinées à maintenir une situation saine, seront respectées. Autrement, les intérêts principaux des assurés sont mis en danger. -- On objecte que le projet attache des conséquences civiles trop étendues à la concession ; mais on perd de vue l'importance extraordinaire que présente pour l'assurance, envisagée comme une institution de sécurité, une exploitation qui mérite la confiance. Les conséquences civiles du retrait de la concession sont réglées comme il convient. L'assureur en déconfiture ne doit naturellement pas faire appel aux connaissances techniques du législateur en matière d'a'ssurance. D'après ses effets, la prescription de l'article 35 s'applique, comme cause d'extinction, même aux contrats conclus avant l'entrée en vigueur de la loi. -- L'article 35 règle d'une manière complète les droits de l'assuré. L'assuré n'a pas droit

325

à une indemnité pour l'inexécution du contrat. (Art. 110 et suiv. C. 0.)

11. La faillite de l'assureur.

Art. 36.

Le projet règle la situation du preneur en cas de faillite de l'assureur. -- Mais la liquidation ne fait pas l'objet de règles spéciales. Cela signifie que. conformément à l'opinion qui prévaut actuellement, le fait que l'assureur entre en liquidation ne fait pas naître pour l'assuré le droit de se départir du contrat. Si, en se mettant en liquidation, l'assureur viole le contrat, il est passible de dommages-intérêts. Art. 110 et 11G, C. 0. -- En présence des dispositions des articles 657, alinéa 2, et 704, alin. 1er, C. ()., et des pouvoirs que possède l'autorité de surveillance, il n'est pas besoin de dispositions particulières pour décider quand l'assureur doit être considéré comme insolvable. D'après ces dispositions, la faillite survient en principe non pas seulement lors de la cessation des paiements, mais dès que les ressources nécessaires pour couvrir les engagements sont insuffisantes. -- L'art. 36, alin. 5, règle les rapports concernant la réassurance Par la réassurance, le preneur ne couvre pas le risque de l'assuré, il ne couvre lui-même de son propre risque. Les prestations du réassureur n'appartiennent donc pas à l'assuré ; elles tombent dans la masse de la faillite.

Le projet a renoncé à établir au profit du preneur d'assurance un primli'ge pour ta réserve afférente à son assurance (réserve des primes, réserve pour sinistres en cours). D'après les conceptions juridiques actuelles, les privilèges ne peuvent être admis en matière de faillite qu;'exceptionnellement et seulement si des motifs économiques impérieux l'exigent. Ici, cette condition fait complètement défaut. Dans la règle, l'assureur n'a pas d'autres créanciers que les assurés. 11 n'existe aucuiv motif de les traiter d'une manière différente. De plus, la loi de surveillance ne prévoit aucune réserve individuelle. L'application des privilèges dans la faillite soulèverait de graves difficultés.

12. Le dommage partiel.

Art. 40.

La pratique du contrat dès choquant de ces des réclamations

accorde à l'assureur le droit de se départir qu'un dommage s'est produit. Le caractère clauses saute aux yeux. Elles donnent lieu à quotidiennes, d'autant plus que la résiliation

326 du contrat entraîne toujours pour l'assuré des dommages économiques. Aussi le législateur doit-il s'occuper de cette question. -- L'alin. I er prévoit que le sinistre a causé un dommage partiel et non pas un dommage total. Comme il est possible que les accidents se succèdent à bref délai, le projet règle d'abord l'étendue de la responsabilité de l'assureur pour l'avenir. La règle que l'assureur ne répond, en cas de doute, que pour le reste de la somme assurée, est la règle de droit actuelle dans les assurances maritimes et les assurances contre la grêle. Elle se recommande aussi pour les autres branches d'assurance.

S'il y a dommage partiel, l'assureur a le droit, ainsi que le preneur d'assurance, de se départir du contrat. Alin-. 2. Kn généra], le contrat n'accorde le droit de résiliation qu'à l'assureur. Suivant l'exemple d'une pratique récente, le projet accorde ce droit à l'assuré aussi. "Dans les affaires d'assurance, ce n'est pas seulement l'assureur qui fait des expériences fâcheuses, c'est aussi l'assuré. On ne voit pas pourquoi celui-ci aurait des droits moindres. Puis, souvent, d'autres causes peuvent imposer la résiliation à l'une ou à l'autre des parties. Le projet garantit suffisamment, par les dispositions de l'art. 40, aiin. 4 et 5, les intérêts de l'assureur pour le cas où l'assuré se départit du contrat.

Si c'est l'assureur qui se départit du contrat, il faut procurer à l'assuré la possibilité de s'assurer ailleurs en temps utile. Tel est le but de Yalin. 3, première phrase. Le fait que l'assureur se départit du contrat avant son terme naturel, justifie quant au sort des primes une règle spéciale qui déroge à l'art. 25 du projet. L'assureur qui décline sa responsabilité pour le reste de la somme assurée no peut pas, en bonne justice, s'enrichir de la fraction de la prime qui correspond à cette partie de la somme assurée. Alin. 3, seconde, phrase.

II. Dispositions spéciales à l'assurance des choses.

Art. 44-63.

1. Objet de l'assurance des choses.

Art. 44.

L'objet de l'assurance, ce n'est pas la chose que l'événement dommageable peut atteindre, mais bien l'intérêt queer l'assuré a à ce que le sinistre ne se produise pas. Alin.'1 . Ce principe est basé non pas sur des considérations secondaires de terminologie, mais sur une notion importante en théorie et

327

en pratique. En insistant sur l'intérêt, on met une digue efficace aux assurances-pari ; de plus, dans l'intérêt de la vie économique, on déclare assurables les rapports divers que des personnes différentes peuvent avoir à l'égard d'un même objet.

L'intérêt assurable n'exprime qu'un rapport économique.

Il ne faut pas l'envisager comme une notion juridique. L'intérêt économique peut exister indépendamment de tout rapport juridique entre une personne et un objet, et manquer au contraire lors même que ce rapport existe. Est assurable tout intérêt économique licite, et par conséquent l'intérêt qui consiste dans un bénéfice industriel espéré. Dans cette catégorie rentre notamment l'assurance dite assurance contre le chômage, conclue conformément aux prescriptions imperatives des articles 55, alinéa 1er, et 59, alinéa 3.

Ainsi que cela a été exposé plus haut (page 315), le droit de réclamer une indemnité ne peut pas exister au profit d'un tiers quelconque, mais seulement au profit de celui qui a éprouvé un dommage. Alinéa 2. Ce principe, qui découle de l'essence même de l'assurance, est indispensable pour sauvegarder la prospérité publique et l'intérêt de l'assureur.

2. La valeur d'assurance. Articles 45 et 59, alinéa 2.

Dans l'assurance des choses, il faut distinguer nettement l'une de l'autre deux valeurs : la râleur d'assurance et la valeur de remplacement. La valeur d'assurance est la valeur que représente l'intérêt assurable lors de la conclusion du contrat.

Article 45, alinéa 1er. La valeur de remplacement, par contre, est celle que représente l'intérêt lors du sinistre. Article 55.

-- La valeur d'assurance sert à décider s'il y a surassurance ou double-assurance. Elle ne sert pas de base pour l'évaluation du dommage, elle n'est pas en même temps valeur de l'emplacement; en principe donc, aucun intérêt public n'est engagé dans la fixation de la valeur d'assurance. Aussi le projet n'exclut-il pas les conventions spéciales entre les parties au sujet du montant de la valeur d'assurance. Des clauses de ce genre n'interviennent pas, ordinairement, dans les assurances terrestres. Mais, dans les assurances maritimes, apparaît ce qu'on appelle la taxe. La fixation de la somme assurée ne constitue pas, comme on le croit souvent, un accord sur l'évaluation de l'intérêt assuré. Voir les motifs de l'article 46 (cidessous chiffre 3, lettre a). Pour donner satisfaction à tous les besoins, la prescription de l'article 59, alinéa 2, attribue

328

l'importance juridique qu'elle mérite à la clause qui fixe éventuellement la valeur d'assurance. Par contre, des raisons d'intérêt public rendent cet arrangement, inadmissible lorsque, comme dans l'assurance contre le chômage, un profit futur doit être assuré contre l'incendie.

L'article 45, alinéa 2, repose sur cette considération que, le plus souvent, ce n'est pas l'intérêt qui est désigné d'une manière précise, mais seulement l'objet auquel l'intérêt s'attache. Cette disposition écarte tout doute quant à la nature de l'intérêt assuré. Aussi 1' « intérêt d'un propriétaire » n'est-il pas ici une notion juridique, mais seulement une notion économique. L'acheteur d'un bien meuble, par exemple, ne devient juridiquement propriétaire de la chose qu'après qu'il en a pris possession (article 199 C. O.); mais il a l'intérêt économique d'un propriétaire dès la conclusion du contrat, puisqu'il supporte les risques de la chose. (Article 204 C. 0.).

La prescription de l'article 45, alinéa 3, concorde avec la pratique actuelle. Pour celui qui s'assure d'une manière suffisante, elle constitue un progrès.

3. La somme assurée; surassurance et double-assurance.

Articles 46, 47, 59, alinéa l«1', üü, öl et 62.

a. Dans le droit relatif à l'assurance des choses, la somme assurée a deux fonctions essentielles. En premier lieu,, elle indique le montant maximum de l'indemnité que l'assureur peut avoir à fournir en cas de dommage. Si le sinistre survient, ce n'est pas la somme assurée qui doit être payée, mais seulement, dans la limite fixée par elle, le dommage éprouvé.

(Article 60, alinéa 1er, et article 55, alinéa 1er). A ce principe que la somme assurée fqrme la limite extrême do l'obligation de l'assureur, le projet fait une exception quant aux frais de sauvetage (article 61). -- En second lieu, c'est la comparaison entre la somme assurée et la valeur d'assurance qui détermine s'il y a surassurance ou double-assurance. Article 46. -- Mais, conformément à l'opinion courante, consacrée par le projet, la somme assurée ne fournit, aucunement la preuve que les objets assurés existent, ou qu'ils ont la valeur indiquée. Il serait évidemment incompatible avec l'intérêt public de régler les choses de cette manière. L'article 59, alinéa 1er, est rédigé conformément à ces considérations. Il exprime de la manière la plus intelligible que l'assuré doit, en cas de sinistre, faire la.

preuve de son intérêt et de la valeur de cet intérêt.

329-.

è. Les ternies « surassurance » et « double-assurance ·» expriment le rapport entre la somme assurée et la valeur d'assurance. Aussi ces notions et les conséquences qui en dérivent exigent-elles que la valeur d'assurance puisse être déterminée.

Cela n'est pas possible dans quelques branches de l'assurance des choses, notamment dans l'assurance générale contre la responsabilité et dans l'assurance du profit espéré. 11 ne peut pas alors être question de surassurance ni de double-assurance.

aa. Il y a surassurance lorsque la somme assurée dépasse la valeur d'assurance. Article 46, alinéa 1er. Le projet s'est abstenu de prohiber absolument la surassurance. Et cela pour les considérations suivantes. D'abord la prohibition est impraticable lorsqu'il s'agit d'assurance d'objets variables (marchandises en magasin, approvisionnements, etc.). La crainte que l'assuré ne recoure à la surassurance dans une intention frauduleuse ne justifie pas d'exclure la surassurance qui se produit le plus souvent en toute bonne foi, et particulièrement pas lorsqu'elle apparaît précisément comme une mesure de prévoyance économique, pour tenir compte d'une augmentation de valeur probable dans l'avenir (acquisitions nouvelles, etc.).

-- Aucun intérêt public n'impose d'interdire la surassurance.

En effet, la détermination du dommage ne repose ni sur la valeur d'assurance, ni sur la somme assurée, mais exclusivement sur la valeur de remplacement. L'article 47, alinéa 2, et le droit pénal établissent la protection contre la surassurance faite de mauvaise foi. -- La solution proposée écarte l'opinion inadmissible, quoique ce soit l'opinion courante, que l'assuré doit être indemnisé en proportion de la somme assurée; elle rend superflu le contrôle cantonal qui a pour but de prévenir la surassurance, et qui est aussi inutile que désagréable.

bb. Double-assurance. Article 46, alinéa 2. De la teneur du projet, il résulte clairement qu'il ne faut- pas qualifier juridiquement de double-assurance toute assurance multiple. Il n'y a pas double-assurance si les sommes assurées cumulées ne dépassent pas la valeur d'assurance, ou si plusieurs assureurs doivent répondre d'une seule et même somme assurée, ou solidairement, ou subsidiairement, ou au prorata. Les assurances multiples ne deviennent double-assurance que lorsque l'ensemble des
sommes assurées dépasse le montant de la valeur d'assurance. La double-assurance répond à de véritables besoins des affaires, comme l'exposent les « Bemerkungen der schweizerischen Versicherungsanstalten zum Entwurfe eines Bundesgesetzes über das O. R. » (1877), p. 18. Elle ne peut le plus .

330

souvent pas être évitée dans les assurances de valeurs considérables et variables. Aussi le projet admet-il, avec les mesures de précautions suffisantes (articles 47 et 62), la doubleassurance contractée de bonne foi.

Il va 'de soi que l'assuré ne doit obtenir qu'une fols la réparation du dommage. Le législateur doit assurer ce résultat par une disposition imperative. 11 y a deux solutions possibles.

Chaque assureur répond, ou bien prò rata d'une partie du dommage, ou bien solidairement de toute l'indemnité, dans les limites de la somme assurée par lui, avec recours contre les autres assureurs (droit anglo-américain). Le projet a adopté la première solution parce qu'elle permettait d'atteindre plus exactement le but. Article 62, alinéa l1'1'. En conséquence, chaque assureur, tenu sans réserve à indemnité, répond du dommage suivant la proportion qui existe entre la somme assurée par lui et le montant total des sommes assurées. L'assureur qui se verrait réclamer la totalité de l'indemnité a l'exception de division. L'article 47, alinéa 1er, pare aux abus possibles. Sous peine de sanctions civiles, l'assuré doit donner avis de l'assurance multiple à chaque assureur.

L'article 62, alinéa 2, tire la conséquence juridique de rotte considération pratique que l'assuré ne recourt souvent à la double-assurance que pat-ce qu'il a des doutes sur la solvabilité de l'assureur primitif. L'assureur recevant la prime pour le montant total de la somme assurée souscrite par lui, on peut sans hésitation lui imposer cette responsabilité subsidiaire.

L'article 62. alinéa 3, sauvegarde les intérêts de l'ensemble des assureur.*, et prévient les collusions qui pourraient être tentées entre l'assuré et l'un des assureurs.

L'étendue de l'indemnité que devrait l'assuré qui contreviendrait à ces règles, se détermine d'elle-même.

4. Séduction ultérieure de la valeur d'assurance.

Article 48.

L'assurance des choses est conclue dans la régie pour une durée asse/, longue (10 ans). Dans ce laps de temps, la valeur d'assurance peut subir des variations considérables. Le projet ne tient compte que des diminutions de valeur qui se produisent au cours de l'assurance et qui sont importantes. Cette proscription concerne surtout les assurances conclues par los simples particuliers. Sa raison d'être pratique apparaît nettement.

331

5. Changements dans la personne de l'assuré.

Articles 49 et 50.

Le projet a en vue tous les cas de transmission et non pas seulement les transmissions qui résulteraient d'opérations entre vifs. Il prend en considération le changement dans la personne de l'assuré, c'est-à-dire la substitution d'un assuré nouveau à l'assuré antérieur ; il ne s'occupe pas du changement qui peut se produire dans la personne de l'ayant droit à l'indemnité. La question que règle l'article 49 est controversée.

Suivant les uns, le contrat s'éteint en cas de transmission de propriété ; suivant d'autres, le nouveau propriétaire est substitué de plein droit à l'assuré antérieur. Suivant une opinion intermédiaire, le nouveau propriétaire ne succède au contrat d'assurance que si l'assuré lui a fait cession de ses droits. Cette dernière opinion ne s'explique pas. Si, au point de vue du droit d'assurance, il n'y a pas d'objection contre la substitution du nouveau propriétaire, -- et c'est ce que suppose évidemment l'opinion attaquée, -- on ne voit pas pourquoi le contrat d'assurance ne lui serait pas transmis de plein droit. Cette solution est contraire aux besoins des affaires et à une saine politique juridique. Les besoins des affaires exigent impérieusement que l'assurance profite au nouveau propriétaire. Le résultat économique de la sécurité ne doit pas disparaître parce que, à cause d'une inattention excusable, le droit à l'assurance n'a pas été cédé. -- Suivant la conception la plus récente, est considéré comme assuré l'intérêt objectif qu'aurait, à ce que le sinistre ne se produise pas, toute personne quelconque intéressée en la même qualité à la conservation d'un bien. De ce principe, qui donne toute satisfaction aux besoins économiques, il faut conclure que l'assurance est attachée à l'objet assuré et qu'elle se perd et s'acquiert par la transmission de l'intérêt.

Aussi la règle posée dans l'article 49 paraît-elle fondée.

En vertu de considérations économiques particulières, elle rompt avec le principe général que le créancier n'est pas tenu d'accepter un autre débiteur en lieu et place du débiteur originaire. -- On ne peut faire d'objections pratiques contre les propositions du projet. La transmission de l'intérêt est une nécessité économique ; elle n'est pas opérée en vue de faire passer à un débiteur insolvable
les obligations envers l'assureur. Comp. article 49, alinéa 2. -- Le transfert de l'assurance s'opère en vertu de la loi au moment même de la transmission de l'intérêt. Le nouveau propriétaire est substitué aux droits Feuille fédérale suisse. Année LVL Vol. I.

23

332

et aux obligations qui résultent du contrat d'assurance. Par conséquent, toutes les exceptions qui résultent des rapports d'assurance lui sont opposables. La situation juridique de l'assureur est suffisamment sauvegardée par l'article 49, alinéa 1er, au moyen de la référence à l'article 28.

L'article 50, alinéa 1er, repose sur la considération que la masse de la faillite n'a pas moins besoin de sécurité qu'un nouveau propriétaire. L'article 50, alinéa 2, tient compte de circonstances spéciales. Comme la saisie pratiquée en exécution de poursuites et le séquestre ne font pas naître un droit de gage, cette prescription n'est point rendue inutile par l'article 51.

6. Droit de gage sur la chose assurée. Articles 51 et 52.

Le projet résout ici une question controversée du droit commun. La disposition repose au fond sur les considérations économiques exposées ci-dessus, chiffre 5. La question doit être résolue en partant de la fonction économique de l'assurance et d'après des considérations d'opportunité. Toute assurance de l'intérêt d'un propriétaire comprend aussi, sans autre, l'intérêt qui le diminue, de celui qui possède un droit réel sur la chose.

-- En faveur de la solution proposée dans le projet parlent aussi des considérations d'opportunité. Ce n'est plus seulement le créancier hypothécaire, mais aujourd'hui d'une manière générale tout créancier-gagiste, qui suppose l'assurance comme allant de soi. Cette idée favorise le crédit et l'augmente. En cas d'insolvabilité du débiteur qui a constitué le gage, -- c'est dans ce cas que la question acquiert une importance pratique, -- il serait évidemment contraire à l'équité d'enlever au créancier-gagiste le bénéfice de l'assurance pour l'attribuer aux créanciers chirographaires. L'objet constitué en gage échappe aux poursuites des créanciers. Pourquoi n'en serait-il pas de môme de la valeur de remplacement, qui, au point de vue économique, représente l'objet? Les créanciers chirographaires doivent-ils tirer un profit du sinistre ? Des dispositions législatives récentes sont conçues dans le même sens que le projet. Ainsi, la loi française du 19 février 1889, relative à l'attribution d'indemnités dues par suite d'assurances, dispose, article 2 : « Les indemnités dues par suite d'assurances contre l'incendie, contre la grêle, contre la mortalité des
bestiaux ou les autres risques, sont attribuées, sans qu'il y ait besoin de délégation expresse, aux créanciers privilégiés ou hypothécaires suivant leur rang. » L'article 52 maintient les dispositions spéciales du droit cantonal. Cette réserve s'impose parce que, suivant les circons-

333

tances, le droit cantonal doit entamer le droit fédéral des assurances.

7. Assurance contre la responsabilité ; gage légal du tiers lésé.

Article 53.

L'assurance contre les conséquences de la responsabilité légale est maintenant en pleine voie de développement. Elle a franchi depuis longtemps les limites de la responsabilité industrielle, créée par des lois spéciales, et s'est emparée du domaine du droit commun. Aujourd'hui l'assurance contre la responsabilité n'a plus seulement une importance individuelle. Ce n'est plus la personne responsable seule qui y est intéressée, mais toute la société humaine. Il est contraire aux idées modernes et au eut de l'assurance que, lorsque la personne responsable est insolvable, l'indemnité soit enlevée à celui qui éprouve un dommage et attribuée aux créanciers. Les créanciers de la personne responsable ne doivent retirer aucun avantage d'un acte illicite de leur débiteur. Comp. aussi la loi française du 19 février 1889, citée plus haut, article 3: «En cas d'assurance du risque locatif ou du recours du voisin (voir code civil, articles 1733 et 1382), l'assuré ou ses ayants droit ne peuvent toucher tout ou partie de l'indemnité sans que le propriétaire de l'objet loué, le voisin ou le tiers subrogé à leurs droits aient été désintéressés des conséquences du sinistre.» -- L'article 53 n'accorde pas au tiers un droit propre et direct, mais seulement un droit de gage sur les droits qui résultent de l'assurance. -- Le projet facilite la réalisation de ce droit en permettant à l'assureur de verser l'indemnité directement aux tiers. Article 53, alinéa 1er, deuxième phrase. La réalisation du gage par voie de poursuite a lieu suivant les prescriptions de la loi sur la poursuite pour dettes.

8. Obligation de sauvetage et frais de sauvetage.

Articles 54 et 61.

L'obligation de sauvetage est basée sur la bonne foi due par l'assuré et sur l'intérêt public. Le projet n'établit l'obligation de sauvetage que pour l'assurance des choses.

Dans le domaine de l'assurance des personnes, l'obligation de sauvetage est remplacée par l'instinct de la conservation

384

qui est inné dans l'homme. -- L'obligation de sauvetage ne fonde aucune gestion d'affaires sans mandat (Art. 469 et suivants C. 0.) ; c'est la condition dont dépend l'obligation de l'assureur. La diminution du dommage ne comprend pas seulement les mesures contre l'extension du dommage, mais aussi des actes de sauvetage. Art. 54.

A l'obligation de sauvetage chez l'assuré correspond, chez l'assureur, l'obligation de rembourser les frais de sauvetage.

Art. 6l. Naturellement, ces frais ne sont pris en considération que s'ils ont été faits en vue de restreindre un dommage couvert par l'assurance. Etant donnée l'organisation actuelle de la police du feu, il n'y a pas à redouter des mesures de sauvetage excessives ou inutiles. Mais il est indispensable de prescrire que, s'il n'y a pas péril en la demeure, l'assuré doit requérir les instructions de l'assureur sur les mesures à prendre et s'y conformer, puisque les frais de sauvetage sont, en principe, à la-charge de l'assureur. -- L'obligation de sauvetage ne doit pas imposer à l'assuré une charge excessive. L'expérience montre qu'en cas de danger beaucoup de gens ne savent plus que faire; des exigences rigoureuses sont impossibles.

Art. 54, alin. 2. Si l'assuré est son propre assureur, parce qu'il y a sous-assurance, il doit supporter une part proportionnelle des frais de sauvetage. Art. 61, alin. 2. Comp. les motifs de l'art. 60, alin. 2 (ci-dessous, chiffre 10).

9. La valeur de remplacement. Art. 55 et 56.

L'assurance des choses ne doit pas être une source de bénéfice ; elle doit seulement couvrir un dommage. De puissantes considérations d'intérêt public imposent ce principe, qui découle de l'essence même de l'assurance. Aussi les prescriptions, d'après lesquelles le dommage doit être évalué, doiventelles être rendues imperatives. Art. 80, alin. 1er. -- Ainsi que cela a été expliqué plus haut, le dommage ne peut être évalué ni d'après la valeur d'assurance, ni d'après la somme assurée.

C'est exclusivement la valeur de l'objet de l'assurance à l'époque du sinistre qui doit faire règle. Art. f>5, alin. 1er. -- Les autres règles de l'art. 55, qui sont simplement dispositives, tiennent compte des besoins spéciaux des diverses branches d'assurance, surtout de l'assurance contre les risques de transport et de l'assurance contre la grêle. Elles n'excluent
pas des clauses par lesquelles les parties dérogeraient à la loi, mais dans les limites fixées à l'alinéa lclf. L'art. 55, alin. 4, résulte de la nature réparatrice même de l'assurance.

335

II faut des prescriptions spéciales quant à la fixation du dommage pour l'assurance contre l'incendie, non seulement à cause de la grande importance économique de cette branche d'assurance, mais aussi à cause de ses particularités.

L'art. 56 détermine la valeur de remplacement des divers genres de biens. La prescription du n° 1 concorde avec la pratique actuelle. Par contre, celles des nos 2 et 3 y dérogent. Dans la règle, même pour les biens qui sont sujets à l'usure et par conséquent à une diminution naturelle de valeur, on prend pour base la valeur commune. Mais ce mode de faire ne peut pas être approuvé. Pour les choses dénommées au n° 3 surtout, la valeur commune ne peut pas servir de mesure correcte d'appréciation. La valeur commune de choses usagées est faible ; l'expérience le montre ; elle n'est aucunement en rapport avec la valeur que ces choses représentent pour leur possesseur. C'est un fait que chacun, par exemple, évalue les meubles dont il fait usage à un prix beaucoup plus élevé que celui qui est demandé sur le marché pour des objets de même qualité. La valeur commune de machines usagées ou d'autres ustensiles atteint souvent à peine la valeur de la matière première. Les dispositions proposées tiennent compte des besoins de la vie économique, sans méconnaître les particularités de l'assurance contre l'incendie. -- D'accord avec la pratique, l'art. 56, alinéa final, assimile au dommage résultant de l'incendie le dommage qui provient des mesures prises pour éteindre l'incendie ou d'un déménagement nécessaire et.

qui consiste dans la destruction, la détérioration ou la disparition de la chose. Cette règle incontestée est une conséquence du principe de l'obligation de sauvetage (art. 54) et des prescriptions concernant la police du feu.

IO. Responsabilité de l'assureur en cas de sous-assurance.

Art. 60, alin. ï.

Suivant l'opinion qui prédomine dans la doctrine et la jurisprudence, il y a sous-assurance lorsque la somme assurée n'atteint pas la 'valeur d'assurance. (Art. 45, alin. 1er). Mais, sur le continent, la pratique repose sur le rapport entre laer somme assurée et la valeur de remplacement. (Art. 55, alin. 1 ). Cette pratique ne soulevant aucune objection, ni au point de vue de l'assuré prévoyant, ni au point de vue de l'intérêt public, le projet s'y rallie. -- La sous-assurance a de l'importance lorsqu'il s'agit de fixer le montant de l'indemnité à la charge de

336

l'assureur. L'assuré est son propre assureur pour la partie de la valeur de remplacement non couverte par l'assurance. Art.

60, alin. 2. Comp. Art. 61, alin. 2, et art. 63, alin. 1er.

11. Evaluation du dommage ; interdiction de changements.

Art. 57 et 58.

Souvent, la pratique des assurances impose à l'assuré de prendre des mesures déterminées qui doivent garantir la prompte fixation des causes et de l'étendue du dommage. Le projet remet aussi aux parties le soin de discerner quelles sont les mesures à prendre dans chaque cas particulier. L'art.

57 a pour but de faciliter aux intéressés la détermination immédiate et correcte du dommage. Dans l'intention du projet, l'évaluation du dommage doit se faire avec le concours des deux parties. La discussion contradictoire doit écarter mainte difficulté. -- L'alin. 2 assure l'évaluation du dommage en cas de résistance de l'une des parties ou de différences d'opinion entre les intéressés au sujet de l'étendue du dommage éprouvé.

Ce n'est pas une disposition de procédure, c'est une règle du fond même du droit. Quant à la valeur du préavis des experts dans une instance en justice, elle doit être fixée par la procédure cantonale. Les clauses d'arbitrage, très usitées dans la pratique, ne tombent pas sous l'application de l'art. 57, alinéa 2. -- La prescription de l'alin. 3 garantit l'assureur contre le risque que, en participant à l'évaluation du dommage, il puisse être considéré comme ayant renoncé aux exceptions qu'il pouvait avoir. -- D'accord avec la pratique prédominante, l'alin. 4 met les.frais de l'évaluation du dommage à lacharge des parties par parts égales.

C'est à bon droit que les conditions générales d'assurance interdisent à l'assuré d'apporter aucun changement aux objets endommagés, avant que le dommage ait été constaté. On peut seulement faire cette critique que la clause concernant ce point est conçue dans des termes trop généraux et qu'elle est préjudiciable à l'assuré. L'assureur a seulement intérêt à ce qu'il ne devienne pas impossible de constater la cause du dommage et le dommage lui-même. Mais cet intérêt même doit céder devant l'intérêt public et devant l'intérêt plus intense de l'assureur lui-même à la diminution du dommage. Art. 58, alin. 1er.

387

12. Recours de l'assureur. Art. 63.

C'est en connaissance de cause que la question du recours de l'assureur n'est réglée que relativement à l'assurance des choses. On exprime par là que, dans l'assurance de personnes, l'assureur n'a aucun droit de recours. La question de savoir si l'assureur peut exercer une action propre et indépendante en dommages-intérêts contre l'auteur du dommage, est du domaine du droit commun. (Art. 50 et suivants C. 0.) La jurisprudence suisse la plus récente résout cette question négativement. Comp. Revue de la jurisprudence, Vol. XVI, n° 44.

Pour les assurances de personnes, la pratique prédominante a abandonné le recours de l'assureur, avec raison. La subrogation, en effet, ne peut être basée que sur des motifs d'équité et des considérations d'opportunité. Ces motifs et ces considérations ne peuvent pas être invoqués dans l'assurance des personnes, qui doit faire abstraction de toute évaluation de la vie humaine et qui ne connaît aucune limite pour la liquidation du dommage. Il en est tout, autrement dans l'assurance des choses. Dans la mesure ou il a été indemnisé par l'assureur, l'assuré ne peut plus réclamer d'indemnité à l'auteur du dommage. Or, il ne paraît pas équitable que l'assurance profite à l'auteur du dommage, qui a commis un acte illicite. En accordant le droit de recours à l'assureur de choses, on écarte ce dilemme. Sans doute, l'assureur a reçu un plein équivalent dans la prime et cette circonstance empêche d'admettre l'idée que l'assureur ait éprouvé un dommage. Mais, en ce qui concerne l'assurance des choses, cet argument doit céder devant la considération qu'en excluant le droit de recours on compromettrait l'opération d'assurance sous le rapport du droit privé et du droit public.

Les droits qu'un acte illicite fait naître au profit de l'assuré passent à l'assureur de plein droit. Par conséquent, l'assuré n'est garant ni de l'existence du 'droit, ni de la solvabilité du débiteur. Art. 195 C. 0. La subrogation a lieu au profit de l'assureur au moment du paiement de l'indemnité et jusqu'à concurrence de cette indemnité. Au surplus, la disposition de l'art. 185 C. 0. est applicable. -- Pour les motifs exposés au sujet de l'art. 15, l'art. 63, alin. 3, accorde protection aux tierces personnes (serviteurs, etc.) qui font ménage commun avec l'assuré ou pour les actes desquels l'assuré est responsable.

338

111. Dispositions spéciales à l'assurance des personnes.

Art. 64-78.

1. Assurance sur la tête d'un tiers, et cession des droits résultant du contrat. Art.. 64.

L'assurance de la vie d'autrui joue un rôle notamment dans la branche d'assurance-yie. En opposition avec l'assurance au profit d'autrui (art. 67), elle a pour but d'attribuer au preneur d'assurance les avantages de l'assurance qui repose sur la tête d'un tiers. Cela peut donner lieu à des spéculations fâcheuses. Aussi le législateur ne doit-il admettre l'assurance sur la tête d'un tiers que moyennent des précautions.

La législation et la doctrine exigent généralement que le preneur d'assurance ait un intérêt à l'existence du tiers-assuré.

On ne dit pas ce que doit être cet intérêt (intérêt économique ou intérêt moral). L'idée que l'intérêt à l'existence d'autrui suffit à lui seul pour rendre l'assurance légitime, n'est pas conciliable avec nos idées actuelles. Il est contraire à la dignité humaine que la vie d'une personne fasse l'objet de calculs d'affaires sans le consentement de cette personne. On ne peut pas s'en tirer simplement avec la notion très vague d'un « intérêt ». L'intérêt ne doit-il exister qu'au moment de la conclusion du contrat ? doit-il subsister pendant la durée du contrat et surtout exister au moment où la prestation deviendra exigible V La somme assurée est-elle due en totalité ou seulement jusqu'à concurrence de la valeur de l'intérêt qu'a le preneur d'assurance ? Comment l'intérêt moral peut-il être évalué et contrôlé ?

Le projet ne réclame pas le consentement du tiers pour tous les contrats sur la tête d'autrui, mais seulement lorsqu'il s'agit d'assurance en cas de décès. Art. 8l, alin. 1er. En faveur de cette restriction parle la considération pratique que seule l'assurance en cas de décès laisse concevoir des spéculations immorales, ce qui ne peut être le cas avec les assurances en cas de vie.

L'art. 64, alin. 2 et 3, écarte un doute qui, dans la pratique, a souvent fait naître des difficultés. Il n'y a pas lieu d'apporter d'autres restrictions au droit de céder les prétentions qui résultent du contrat d'assurance ; autrement on risquerait de nuire au crédit que procure le droit qui résulte du contrat d'assurance des personnes. L'art. 183 C. 0. permet de tenir compte de circonstances particulières.

339

2. Indications inexactes quant à l'âge. Art. 66.

D'accord avec une pratique récente, le projet n'attache pas en principe les effets de la réticence (art. 8) à l'indication inexacte de l'âge. Sans doute, dans la plupart des branches de l'assurance des personnes, l'âge est un élément important du risque, parce qu'il détermine seul la classification du risque ou contribue du moins à cette classification. Mais d'importantes considérations pratiques exigent que l'indication inexacte de l'âge ne soit pas considérée absolument comme une réticence. L'indication inexacte de l'âge provient le plus souvent d'un oubli, d'une erreur. Mais ce qui est décisif, c'est que l'âge peut toujours être fixé avec certitude. L'assureur ne paie qu'après la production d'un acte de naissance officiel.

Evidemment, les conséquences rigoureuses de la réticence ne seraient pas justifiées.

L'art. 66 place en tête la règle que l'assureur ne peut se départir du contrat que si l'âge vrai ne rentre pas dans les limites d'admission adoptées par lui. On ne peut pas imposer à l'assureur l'assurance de personnes dont il a d'avance décliné l'acceptation à cause de leur jeune âge, ou de leur âge trop avancé. Dans la règle, la base technique nécessaire manquerait pour l'évaluation de tels risques. « L'âge d'entrée » et « l'âge vrai » ne sont point nécessairement des termes synonymes. -- L'assureur traite l'année d'âge commencée tantôt comme n'ayant pas commencé, tantôt comme accomplie entièrement ou partiellement. Dans l'assurance sur la vie surtout, il faut bien distinguer les deux âges ; car souvent, en raison de circonstances qui augmentent le risque, il est dû une prime plus élevée que celle qui correspondrait à l'âge vrai ; on admet fictivement un âge d'entrée plus élevé. Aussi le droit pour l'assureur de se départir du contrat doit-il logiquement dépendre de cette seule condition que l'âge vrai d'entrée ne rentre pas dans les limites d'admission adoptées. L'intention du déclarant reste sans influence.

Mais si l'âge vrai d'entrée rentre dans les limites d'admission, le contrat a force obligatoire malgré l'indication inexacte de l'âge. Si, sur la base de la déclaration inexacte de l'âge, le preneur d'assurance a payé une prime trop faible, la prestation de l'assureur doit être réduite selon le rapport qui existe entre la prime convenue et la prime du tarif pour l'âge orai d'entrée. Art. 66, n° 1. Cette règle juridique est correcte au point de vue technique. Par contre, le procédé qui

340

déduit de la somme assurée la différence des primes avec les intérêts composés, est grossier et non technique. Il fait naître des scrupules en droit, parce que cette méthode de calcul impose au preneur une prestation plus forte que celle dont il entendait se charger par le contrat. L'art. 66, n° 1, alin. 2, prévoit que, sur la base de l'indication incorrecte de l'âge, l'assureur a déjà trop payé. Le remède consiste dans la restitution de ce qui a été payé de trop. Pour des motifs tirés de la technique de l'assurance, l'application des règles du droit commun au sujet de l'enrichissement illégitime a. été exclue.

En raison des exigences techniques, il faut à l'assureur un plein dédommagement.

L'art. 66, n° 2, règle les cas dans lesquels, par suite de la déclaration incorrecte de l'âge, le preneur a payé une prime trop élevée. D'après les principes du droit commun, qui sont applicables ici, l'assureur n'est obligé à rembourser que ce dont il se trouve enrichi au moment où le remboursement est réclamé. Art. 73 C. 0. L'assureur est enrichi non pas de l'excédent de la prime brute dont il a fait emploi, année par année, suivant sa destination, mais seulement de la somme qui a été réservée comme différence entre la réserve existante et la réserve plus faible qui était nécessaire d'après l'âge vrai d'entrée. C'est à cela que doit être limitée l'obligation de remboursement.

3. Assurance au profit d'autrui. Art. 67-69 et art. 71.

L'art. 67, a,lin. 1er, fixe les caractères distinctifs de l'assurance au profit d'autrui, sur la base de l'art. 128 C. 0. La promesse de payer à une tierce personne ne doit pas nécessairement être incorporée dans la police ; elle peut être déduite de la déclaration de volonté de l'auteur de l'offre (stipulant), et d'actes concluants de l'assureur (promettant).

Les alinéas 2 et 3 de l'art. 67 fixent des règles d'interprétation des clauses au moyen desquelles le bénéficiaire est le plus fréquemment désigné en pratique. La crainte que ces règles d'interprétation puissent aller à l'encontre de la volonté des parties doit céder devant la nécessité d'éclairer le public en cette matière. Les dispositions proposées concordent avec le but normal de l'assurance (prévoyance pour la famille) et, dans leur essence, avec la jurisprudence.

L'art. 68 détermine la nature du droit du bénéficiaire. Ce droit est soumis à une condition de Fait et à une condition de

341

temps. Le preneur d'assurance a la faculté de disposer librement des droits qui résultent du contrat. Art. 68, alin". 1er. Le droit du bénéficiaire ne devient irrévocable qu'au décès du preneur, si, dans l'intervalle, ce dernier n'a pas fait d'autres dispositions. Le bénéficiaire doit donc avoir survécu au preneur.

Art. 68, alin. :',.

Le preneur peut renoncer au droit de révoquer la désignation. Par l'effet de cette renonciation, le droit du bénéficiaire devient irrévocable. Mais, comme ce droit est subordonné à la survie du bénéficiaire, il est soumis encore à une condition de temps. Dans l'intérêt de la sécurité des affaires, la loi doit régler les conditions requises pour qu'il y ait renonciation à la révocation. De lege ferenda, la remise de la police au bénéficiaire ne peut pas suffire. La police n'est pas une valeur.

La solution que présente l'art. 68, alin. 2, prévient des doute» souvent justifiés.

L'art. 69 indique comme cause d'extinction du droit du bénéficiaire, tant qu'il est révocable, la saisie de l'assurance et la faillite du preneur. L'art. 69, alin. 2, et l'art. 70, alin. 3, empêchent des rigueurs contraires à l'équité.

L'art. 71 règle, conformément au but de l'assurance, la question, très souvent discutée, de savoir si et dans quelle mesure celui au profit duquel une assurance collective contre les accidents a été conclue (la victime et ses héritiers) a un droit direct cantre l'assureur. La solution proposée écarte le danger que le patron ne s'enrichisse par le fait d'accidents qui atteignent ses ouvriers. Souvent, une assurance contre la responsabilité est liée à l'assurance collective contre les accidents. Dans ce cas, celui au profit duquel existe la responsabilité peut aussi invoquer l'art. 53.

4. Réalisation de l'assurance après saisie ou faillite. Art. 70.

Cette prescription s'applique seulement à l'assurance contractée par le débiteur sur sa propre tête. L'assurance conclue sur la tête d'autrui est soumise sans autre à l'exécution forcée.

Cela est conforme en principe à la manière de voir adoptée par le projet quant à l'assurance de la vie d'autrui (Art.

64).

Le consentement du preneur exigé par l'art. 70, alin. 1er, peut être donné d'avance, par exemple au moment même de la saisie de l'assurance. -- L'art. 70, alin. 2, empêche qu^ les créanciers soient lésés. Les assurances sur la vie non susceptibles de rachat sont bien inférieures en nombre et

342

en importance économique aux assurances susceptibles de rachat. Elles ne représentent, dans la règle, aucune valeur réalisable. Voir ci-dessus les motifs de l'art. 26 (page 32"). A des conditions déterminées, l'art. 70, alin. 3, accorde un droit de rachat au conjoint et aux enfants dui preneur. Cette règle tient compte du but économique de l'assurance. Il ne faut pas sans nécessité enlever à la famille sa dernière ressource. Les intérêts des tiers ne sont pas lésés. La valeur que représente .('assurance reste acquise aux créanciers du preneur.

5. Assurance contre les accidents; indemnité en cas d'invalidité. Art. 72.

L'art. 72 a pour but de mettre fin aux inconvénients qui se sont fait gravement sentir dans la pratique en raison du mode de règlement, -- rente ou capital, -- au choix de l'assuceur. Les polices d'assurance contre les accidents portent en tête, de la manière la plus visible, l'indication d'une somme déterminée comme indemnité maximum en cas d'invalidité. Elles évoquent donc la conviction que l'indemnité sera fournie sous la forme d'un capital. Dans la règle, on ne prend pas garde que, dans la police, l'assureur s'est réservé le droit de s'acquitter de son obligation au moyen d'une rente. L'assuré préfère toujours le règlement en capital au service d'uni? rente ; la très faible proportion des rentes indiquées par les compagnies le prouve.

L'assuré doit acheter ce mode de règlement, -- si d'ailleurs l'assureur l'accorde, -- par un grand sacrifice pécuniaire. Abstraction faite même des inconvénients de la pratique, le règlement en rente est défectueux en lui-même. Souvent, en raison des conséquences de l'accident, l'assuré doit changer de profession. Il a besoin pour cela d'un capital d'exploitation. Puis la rente ne se transmet pas par succession, comme cela est le cas dans la plupart des lois d'assurance des ouvriers contre les accidents. Elle s'éteint à la mort de l'invalide. Le règlement en rente paraît tout à fait conti-aire à l'équité dans tous les cas où la victime doit probablement succomber à bref délai aux suites de l'accident et où elle touche peut-être seulement quelques annuités, au lieu du capital pour lequel elle croyait être assurée. A cela s'ajoute que l'assureur calcule la rente d'invalidité d'après les bases techniques des rentes viagères. Mais il est évident que la mortalité des personnes frappées d'invalidité dépasse la mortalité des individus sains, du rentier qui achète

sa une rente parce qu'il espère une longue vie. L'invalide est ainsi toujours lésé.

Le projet établit une situation claire. Toutes les fois que le preneur n'a pas expressément demandé dans sa proposition l'indemnité en rente, l'indemnité doit être acquittée sous la forme d'un capital. A l'avenir, l'assureur ne pourra plus prétendre s'acquitter au moyen d'une rente en alléguant que le preneur a conclu le contrat aux conditions générales d'assurance, et que ces conditions prévoient le règlement en rente.

La situation de l'assureur est sauvegardée pour le cas où les conséquences de l'accident ne pourraient pas être déterminées immédiatement.

En présence de la solution proposée, nous considérons comme superflue une disposition spéciale qui prescrirait le règlement en rente des indemnités d'invalidité dans l'assurance des ouvriers contre les accidents. Et d'abord, c'est l'affaire des parties de stipuler le mode de règlement qui convient le mieux. Si elles ne le font pas, le règlement en capital est prescrit.

6. Droit du preneur de se départir du contrat. Art. 73.

L'art. 73 consacre cette particulurité de l'assurance sur la vie, admise d'une manière générale dans la pratique, que le maintien du contrat ne peut être imposé. (Voir ci-dessous, chiffre 7.) La deuxième phrase empêche que l'assureur n'ait à supporter le risque, gratuitement, pendant un délai peut-être assez long. Le délai de grâce a pour but d'assurer le maintien du contrat ; il n'a pas de raison d'être ici.

7. Réduction et rachat de l'assurance sur la vie.

Art. 74--79.

Une grande partie des contrats d'assurance sur la vie n'arrivent pas à leur fin normale, mais sont résiliés prématurément pour les motifs les plus divers.

Ce phénomène provient d'une particularité de l'assurance sur la vie qui doit être prise en considération d'après son importance économique. C'est ce qu'exprimé la règle incontestée dans la pratique que le preneur d'assurance peut, à toute époque, se départir librement du contrat. Cette règle sauvegarde les intérêts des deux parties. L'assurance sur la vie n'aurait pas

344

pu se développer si le preneur d'assurance avait été lié par le contrat malgré les changements qui surviennent fréquemment dans les conditions de la vie. Le bienfait de l'assurance aurait même manqué à la classe moyenne, qui fournit le meilleur aliment pour l'assurance sur la vie. Aussi le projet accorde-t-il à juste titre au preneur le droit de se départir du contrat.

Art. 73.

De l'essence du contrat d'assurance sur la vie découle donc pour l'assuré le droit de se départir librement du contrat. Par conséquent, il incombe au législateur la tâche aussi importante que difficile de fixer les principes juridiques qui doivent être à la base du règlement de compte entre les parties. Ce règlement apparaît comme s'imposant en principe en ce qui concerne toutes les branches d'assurance sur la vie qui ont une réserve des primes. La réserve comprend les primes payées par anticipation, c'est-à-dire les parties des primes qui n'étaient pas le correspectif du risque couru, mais le correspectif partiel d'un risque à venir, augmentées des intérêts composés. -- Les sommes réservées, qui perdent leur destination en cas de dissolution anticipée du contrat, ne doivent pas simplement être de bonne prise pour l'assureur. Cette idée avait déjà été catégoriquement exprimée, lors des débats sur la loi de surveillance, par la Commission du Conseil des Etats. F. féd. 1885, vol. 1er, p. 511. Les assurances sur la vie ont le caractère très-net de mesures de prévoyance. Ce qui a été épargné ne doit pas, sans motifs impérieux, être détourné de sa destination. Il n'y a pour cela ni motifs juridiques, ni motifs techniques. La réserve ne peut pas être attribuée à l'assureur à titre d'indemnité, puisque la dissolution anticipée du contrat est de l'essence de l'assurance sur la vie et que cette éventualité doit par conséquent être prise en considération lors de la conclusion de l'affaire. Même la technique de l'assurance n'exige pas que la réserve, devenue sans objet, demeure à la libre disposition de l'assureur.

Telle est aussi l'opinion en cours dans la pratique. Les concessions que la pratique accorde, pendant la durée de l'assurance sous forme de prêt, et, en cas de dissolution anticipée, sous forme d'indemnité, tendent, par leur nature juridique, à constituer un droit de l'assuré à sa réserve des primes. Ce que l'assureur
loyal, animé de l'esprit de progrès, peut accorder, sans compromettre ses calculs techniques naturellement, peut en toute équité être exigé des assureurs qui opèrent correctement.

Actuellement, le règlement entre les parties dépend sans restriction de l'arbitraire de l'assureur. Entre le règlement

345

admis en principe et dont la mesure est nettement fixée par le contrat, et le règlement qui dépend de la seule appréciation de l'assureur, tous les degrés, pour ainsi dire, sont représentés. En présence de la grande importance économique de la question, le législateur a toutes raisons de fixer les droits de l'assuré à la réserve. Par contre, vu la surveillance de l'Etat, le projet s'abstient d'accorder à l'assuré des droits quant à la création et à l'administration de la réserve des primes.

Le projet s'appuie en principe sur la pratique actuelle. Il y a deux modes usuels de règlement : la réduction et le rachat. La réduction ne met pas fin au contrat ; elle le modifie.

La somme assurée est réduite en proportion du montant de la réserve, et l'assuré est libéré du payement ultérieur des primes. Le rachat, au contraire, met fin au contrat ; l'assuré reçoit une somme calculée généralement d'après la réserve.

a. Conditions et contenu de la réduction et du rachat. La réduction et le rachat ne peuvent pas être accordés purement et simplement, mais seulement dans la mesure où la sécurité de l'exploitation le permet. La conclusion du contrat impose à l'assureur des frais (provisions, etc.), qui doivent être amortis aussitôt ou dans un court délai. La contre-partie de ces dépenses se trouve dans le chargement des primes. En cas de modification anticipée du contrat, ces recettes prévues font défaut.

Aussi longtemps que la réserve ne dépasse pas le montant de la bonification due à l'assureur, l'assuré ne peut rien réclamer. En général, c'est seulement lorsque trois primes annuelles ont été payées que la réserve atteint un chiffre qui permet de faire une prestation à l'assuré. Le droit à la, réduction et au rachat doit donc être subordonné à cette condition que trois primes annuelles au moins aient été payées (art. 74, alin. 1er et 2).

L'art. 74, alin. 1er, déclare susceptible de réduction toute assurance sur la vie. En cas de réduction, l'assureur conserve la réserve ; il perd seulement le droit aux primes ultérieures.

Le rachat, au contraire, enlève à l'assureur à la fois la réserve et les primes futures. Pour des raisons techniques, le rachat ne peut être admis que pour les formes d'assurance dann lesquelles la prestation de l'assureur arrivera certainement, c'està-dire pour les assurances qui basent
les calculs techniques sur la certitude de l'exécution de la prestation de l'assureur. C'est seulement si cette condition se réalise, si par conséquent disparaît un risque qui aurait certainement entraîné dans l'avenir une

346

dépense pour l'assureur, que le rachat est admissible. Lorsqu'il est incertain que l'assureur ait une prestation à faire, aucun règlement en argent ne peut être accordé, parce que les calculs techniques sont basés sur le fait que l'assureur conservera éventuellement les primes payées, c'est-à-dire si l'événement redouté ne se produit pas. Des considérations importantes exigent que le législateur accorde à l'assuré, outre le droit à la réduction, le droit au rachat. La réduction ne sauvegarde pas l'intérêt de l'assuré à se défaire d'une assurance qui est devenue pour lui économiquement sans valeur. Le législateur ne peut absolument pas accorder moins qu'une pratique générale qui correspond à des besoins économiques pressants. Le législateur n'a pas non plus à contraindre à l'épargne en prescrivant que tout assuré doit laisser la réserve en mains de l'assureur.

Dans la règle, ce n'est pas sans raisons sérieuses que l'assuré renonce à continuer l'assurance. La craiiate que le droit légal au rachat ne favorise les extinctions anormales, des contrats méconnaît l'esprit d'épargne de l'assuré. Même le rachat implique pour l'assuré une perte pécuniaire. La règle légale est au contraire de nature à diminuer le nombre considérable des renonciations pures et simples, et à accroître la considération pour l'assurance sur la vie et pour son importance économique.

Aussi le projet établit-il le droit de rachat de l'assuré dans les branches d'assurance sur la vie où il est certain que la prestation de l'assureur arrivera à échéance. Art. 74, alin. 2.

La réduction et le rachat ne peuvent être exigés que pour la fin d'une période d'assurance. Art. 74, alin. 3. En ce qui concerne le rachat, l'assureur, qui est dans la nécessité d'immobiliser ses capitaux, doit être protégé contre une paniqué en cas de c.rise. Comp. l'art. 76, alin. 3.

b. Nature juridique de la réduction et du rachat. Les expressions « réduction » et « rachat » se sont tellement implantées dans la langue usuelle des affaires d'assurance, qu'elles doivent être maintenues dans la loi. Sans doute, la nature juridique de l'acte qui est basé sur la réduction et le rachat n'y apparaît clairement ni dans ses conditions, ni dans ses effets. L'expression « rachat », surtout, induit en erreur.

Elle n'a en vue que le résultat économique de l'opération mais
elle fait penser que cette opération est bilatérale. Ce serait une idée fausse. La réduction et le rachat sont des actes unilatéraux, par lesquels se réalise le droit garanti par la loi de modifier le contrat (réduction) ou de le rompre (rachat). Comp. art. 80, alin. 2.

347

c. Interdiction de la déchéance du contrat d'assurance sur la vie. Art. 77. En raison des explications qui précèdent, le projet doit interdire qu'une assurance susceptible de rachat ou de réduction ne devienne, à l'occasion, de bonne prise pour l'assureur. L'assurance est transformée de plein droit en une assurance libérée. Aux conditions posées art. 77, alin. 2, l'assuré a le droit d'exiger le rachat de l'assurance primitive. Il va de soi qu'après l'expiration du délai accordé dans Falin. 2, il peut aussi demander le rachat de l'assurance réduite, si elle est susceptible de rachat.

d. Réduction et rachat des parts de bénéfices. Art. 78 Quelques systèmes de participation aux bénéfices réalisent les participations échues aux assurés sous la forme d'une assurance sur la vie accessoire. Tel est le cas dans ce qu'on appelle le « Bonussystem ». On ne peut pas approuver la pratique qui ne prend pas en considération, dans le calcul de l'indemnité, les bénéfices ainsi employés. -- Du reste, le projet s'abstient d'édicter des prescriptions de droit privé sur la participation des assurés aux bénéfices. Il ne serait possible d'imposer la participation des assurés aux bénéfices qu'à l'égard des sociétés mutuelles. Mais ici le droit aux bénéfices dérive des rapports de société et ne doit pas être réglé dans une loi d'assurance.

C'est à la loi de surveillance d'édicter les dispositions de droit public qui seraient nécessaires pour garantir la participation aux bénéfices dérivant d'un contrat.

e. La valeur de règlement. Art. 75. Le premier projet avait fixé les éléments à l'aide desquels devaient être calculés la valeur de réduction et le prix du rachat. La commission d'experts avait adhéré en principe aux dispositions proposées.

La valeur de réduction aurait été obtenue, en considérant la réserve entière comme la prime unique d'une assurance conclue à l'âge de l'assuré à l'époque de la réduction. Comme prix de rachat, l'assureur aurait dû accorder la réserve, sous déduction de trois pour cent au plus de la somme assurée.

Une compagnie suisse d'assurances sur la vie a fait opposition à ce projet dans un mémoire détaillé. Le Département de Justice et Police fit alors examiner par des experts encore une fois, d'une manière approfondie, la question de savoir s'il convenait de fixer par la loi la valeur de
règlement. Le préavis technique fut tout à fait négatif. Il fut relevé que, d'après les expériences les plus récentes de la technique des assurances sur la vie, la valeur de règlement ne peut pas être calculée correctement à l'aide d'une formule générale.

Feuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

24

348

Four des considérations pratiques déjà, il n'est pas recommandable de définir dans la loi la valeur de règlement, de manière que les bsises techniques de calcul seules soient fixées pour les diverses formes d'assurance. Ces prescriptions d'un caractère purement technique n'ont aucune utilité pour le public. D'autre part, l'assurance sur la vie n'a point achevé son développement ; plus que toute autre branche d'assurance, elle crée des combinaisons nouvelles, dont on ne peut prévoir la construction. Dès lors, la loi, bien que chargée d'une masse de dispositions techniques, aurait toujours paru incomplète.

Considérant d'une part que, dans l'état actuel de la technique de l'assurance sur la vie, il est impossible de fixer à cet égard une régie qui soit correcte au point de vue technique, applicable à tous les cas et non équivoque ; et d'autre part, qu'il ne convient pas de recourir à de multiples dispositions spéciales, nous avons supprimé dans le projet arrêté par la commission d'experts les dispositions qui concernaient la détermination et la quotité de la valeur de règlement. Le législateur, en effet, ne doit pas s'exposer au danger de consacrer une solution qui serait contraire à la science ou insuffisante. En présence de questions techniques difficiles, il convient d'attendre d'abord le développement pratique et scientifique des choses.

Mais il ne faut pas perdre de vue que la valeur de règlement ne peut cependant plus être calculée par l'assureur suivant sa libre appréciation. Car l'arbitraire avec lequel les assureurs ont continué de procéder à cet égard, -- les circonstances étant les mêmes, -- est incompatible avec une institution de prévoyance sociale. La nouvelle prescription formulée dans l'art. 75 atteint le but visé. Ainsi, l'assureur est tenu de fixer, dans les conditions générales de l'assurance, les bases de la détermination de la valeur de réduction et du prix du rachat. Maintenant déjà, d'après la loi de surveillance, ces conditions doivent être soumises à l'examen et à l'approbation du Conseil fédéral. L'art. 75 vient de plus donner au Conseil fédéral, en sa qualité d'autorité de surveillance sur les entreprises privées d'assurance, la mission de décider, après examen des conditions générales d'assurance, c'est-à-dire après examen particulier de chaque cas, si les valeurs de
règlement prévues par l'assurance sont convenables. Ce mode de faire, qui ne se heurte à aucune difficulté administrative, offre une double garantie. En premier lieu, la décision de l'autorité, imposée par la loi et prise en connaissance de cause, remplace

349 la libre appréciation de l'assureur. En second lieu, l'autorité de surveillance, n'étant liée ' par aucun texte de loi, est à même, en tout temps, de baser son jugement technique sur les expériences les plus récentes et d'amener ainsi entre les parties un règlement rationnel, et tenant un juste compte de leur situation économique.

f. Obligations de l'assureur; revision par le Bureau fédéral des assurances; échéance de la créance résultant du rachat. -- L'art. 76, alinéas 1er et 2, assure l'exécution pratique des prescriptions qui règlent la réduction et le rachat. -- L'art. 76, alinéa 3, fixe d'une manière équitable l'échéance de la créance qui appartient à celui qui bénéficie du rachat. -- Comp. art. 74, alin. 3. -- Comme l'assurance à prime unique ne présente, techniquement, qu'une période d'assurance unique et indivisible (coiup. art. 20, alin. 1er, 2e phrase, du projet), l'échéance de la créance qui résulte du rachat doit être réglée d'une manière spéciale pour les assurances de ce genre. -- Article 76, alinéa 3, 2e phrase.

Veuillez agréer, monsieur le président et messieurs, l'assurance de notre parfaite considération.

Berne, le 2 février 1904.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le vice-président, RUCHET.

Le chancelier de la Confédération, RINGIER.

350

Projet.

Loi fédérales sur le

contrat d'assurance^

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

C O N F É D É R A T I O N SUISSE,.

En exécration de l'article 64 de la .constitution fédédérale ; Vu le message du Conseil fédéral du 2 février 1904rf décrète : I. Dispositions générales.

Art. 1er.

Rapport Le contrat d'assurance est soumis aux dispositions spéciale et le du Code fédéral des Obligations, sauf prescriptions contraires de la présente loi.

Art. 2.

Pruposition Celui qui adresse à l'assureur une proposition de o.d Präposition contra* est lié pendant dix jours à dater de l'arrivée générale.
351

II est lié pendant quatre semaines si l'assurance
Il est dégagé si l'acceptation de l'assureur ne lui ·est pas parvenue avant l'expiration du délai.

Art. 3.

Est considérée comme acceptée la proposition de &. Propositions spéciales.

prolonger ou de modifier un contrat ou de remettre en vigueur un contrat suspendu, si l'assureur n'a pas répondu à cette proposition dans un délai convenable.

Cette règle ne s'applique pas à la proposition d'augmenter la somme assurée.

Art. 4.

Les conditions générales de l'assurance doivent ou c. Formulaire.

bien être contenues dans le formulaire même de proposition fourni par l'assureur ou bien 'avoir été remises au proposant avant qu'il ait transmis le formulaire contenant sa proposition de contrat.

Si cette prescription n'a pas été observée, l'auteur de l'offre n'est pas lié par sa proposition.

Art. 5.

Le proposant doit communiquer à l'assureur tous Déclarations a faire lors de les faits qui sont importants pour Pappréeiation du laduconclusion contrat.

.risque, dans la mesure et la manière où ils sont connus a. Règio K n ou doivent être connus de lui lors de la conclusion du contrat.

Sont importants tous les faits qui, selon la conviction loyale du proposant, sont de nature à exercer une ·influence sur la détermination de l'assureur de conclure .le contrat ou de le conclure aux conditions convenues.

352

Art. 6.

i>. Contrat par

Doivent être déclarés, si le contrat est conclu par ' un représentant, tous les faits importants qui étaient ou (levaient être connus du représenté, ainsi que ceux qui étaient ou devaient être connus du représentant.

c. Assurance En cas d'assurance pour compte d'autrui v(art. 16), pour compte " d'fiiitrni. la déclaration doit comprendre aussi les faits qui sont ou doivent être connus du tiers lui-même ou de son intermédiaire, à moins que le contrat ne soit conclu à leur insu ou qu'il ne soit pas possible d'aviser le proposant en temps utile.

représentant.

Art. 7.

d. Questionnftirf

Si le proposant doit faire sa déclaration d'après un questionnaire émanant de l'assureur, il satisfait à son obligation en répondant aux questions posées.

Sont considérés comme importants les faits au sujet desquels l'assureur a posé des questions précises et non équivoques.

Art. 8.

Réticences.

Si celui qui devait faire la déclaration a,' lors de la * ([nonces. conclusion du contrat, inexactement déclaré ou omis de déclarer un fait important qu'il connaissait ou devait connaître, l'assureur n'est pas lié par le contrat, à condition qu'il s'en soit départi dans le délai de quatre semaines à «sater du moment où il a eu connaissance de l'omission ou de la fausseté de la déclaration (réticence).

Leurs couse-

Art. 9.

Assurance coiSi le contrat est relatif à plusieurs choses ou à lective ; divisibilité', plusieurs personnes et que la réticence n'ait trait qu'à quelques-unes de ces choses ou de cos personnes, l'assu-

353

rance reste en vigueur pour les autres, s'il est évident que l'assureur les auraient assurées seules aux mêmes conditions.

Art. 10.

Malgré la réticence (art. 8), l'assureur ne pourra eontrit'maid"é ltt pas se départir du contrat : .

i-«'inenee.

1. Si ce qui n'a pas été déclaré ou qui a été inexactement déclaré a disparu avant le sinistre; 2. si l'assureur a provoqué la réticence ou s'il a renoncé à se départir du contrat.

Il y a renonciation en particulier : a. Si l'assureur connaissait ou devait connaître le fait qui n'a pas été déclaré ou qui a été inexactement déclaré; l). si le déclarant n'a pas répondu à l'une des questions posées et que l'assureur ait cependant conclu le contrat, lorsque, du moins, il ne résulte pas des autres déclarations que la question devait être considérée comme ayant reçu une réponse dans un sens déterminé.

Art. 11.

Le contrat d'assurance est nul si, au moment où il a été conclu, le risque avait déjà disparu ou si le sinistre était déjà survenu.

Cette règle ne s'applique ni aux assurances-incendie relatives à des objets situés à l'étranger, ni aux assurances-transports, ni à la réassurance.

Cependant, si, lors de la conclusion du contrat, l'assureur savait que le risque avait déjà disparu, le preneur d'assurance n'est pas lié par le contrat. L'assureur n'a droit ni à la prime ni au paiement de ses frîiis.

Suinté du contrat.

354 Si, d'autre part, lorsqu'il expédie la proposition d'assurance, le preneur savait que le sinistre était déjà survenu, l'assureur n'est pas lié par le contrat; il a droit à toute la prestation convenue.

Art.

La Police.

12.

L'assureur est tenu de remettre au preneur un , ,,, .

, ,. .

, , , , document revêtu de sa signature (police) constatant les droits et les obligations des parties. Il a le droit de percevoir, outre le timbre et les frais de port, une taxe soit pour la rédaction de la police, soit pour les modifications ultérieures. Le maximum de cette taxe pourra être fixé par ordonnance du Conseil fédéral.

L'assureur doit de plus remettre au preneur, sur sa demande, contre remboursement des débours, une copie des déclarations contenues dans la proposition d'assurance ou dans tout autre document, et qui ont servi de base à la conclusion du contrat.

a. Son contenu. ,

Art. 13.

u

snnt?é'erVê "

a

^' ^ teneur de la police ou des avenants ne concorde pas avec les conventions intervenues, le preneur doit en demander la rectification dans les quatre semaines dès la réception de l'acte ; faute de quoi, la teneur en est considérée comme acceptée.

Cette règle doit être insérée textuellement dans chaque police.

Art. 14.

Annulation.

En cas de perte de la police, l'ayant droit peut requérir du juge du lieu de l'exécution du contrat l'annulation du titre.

A l'annulation des polices s'appliquent par analogie les règles relatives à l'annulation des lettres de change (793 C. 0.).

355

Après que l'annulation a été prononcée, le requérant peut exiger la délivrance à ses frais d'une nouvelle police.

Art. 15.

L'assureur ne doit pas d'indemnité si le sinistre a sinistre causé par tante.

été causé intentionnellement ou par négligence grave par le preneur ou l'ayant droit.

Si le sinistre est dû à la négligence grave de personnes qui font ménage commun avec le preneur d'assurance ou l'ayant droit, ou bien à la négligence grave de personnes dont le preneur ou l'ayant droit est responsable, l'assureur ne doit pas d'indemnité lorsque le preneur ou l'ayant droit a commis une faute grave ou dans la surveillance de ces personnes, ou en engageant leurs services ou en les admettant chez lui.

Art. 16.

Le preneur peut contracter l'assurance ou pour son pour Assurance compte propre compte ou pour compte d'autrui, avec ou sans d'autrui.

désignation de la personne du tiers assuré.

En cas de doute, le preneur est censé avoir contracté l'assurance pour son propre compte.

Art. 17.

L'assurance pour compte d'autrui lie l'assureur, de Particularités l'assurance lors même que le tiers assuré ne ratifie le contrat pour compte d'autrui.

qu après le sinistre.

Avec l'autorisation de l'assuré, le preneur a qualité pour réclamer l'indemnité à l'assureur. Cette autorisation n'est pas nécessaire si l'assuré avait donné au preneur mandat sans réserve de conclure l'assurance, ou si le preneur avait l'obligation légale de pourvoir à l'assurance.

356

L'assureur n'a pas le droit da compenser les créances qu'il peut avoir contre le preneur avec l'indemnité qu'il doit à l'assuré. Reste réservée la disposition de l'article 18, alinéa 2, de la présente loi.

Art. 18.

La l'rime.

il. Qui est obligé.

Le preneur d'assurance est obligé au paiement de la prime.

Dans l'assurance pour compte d'autrui, l'assureur a le droit de réclamer le paiement de la prime à l'assuré aussi, lorsque le preneur est devenu insolvable et qu'il n'avait pas déjà reçu la prime de l'assuré.

En cas d'assurance au profit d'autrui, l'assureur a le droit de compenser sa créance do prime avec la prestation due au bénéficiaire.

Art. 19.

b. Paiement de la prime pas un créancier gagiste.

Le créancier qui a un droit de gage sur l'assurance n'est pas obligé au paiement de la prime.

S'il en effectue le paiement, il acquiert, contre celui qui a constitué le gage, une créance pour la somme déboursée et tes intérêts, et il jouit pour cette créance d'un privilège sur la prestation due par l'assureur, sons réserve des droits de gage antérieurement acquis.

Art. 20.

<;. Echéance.

Sauf stipulation contraire, la prime est duo pour la première période d'assurance dès la conclusion du contrat. Par « période d'assurance » il faut entendre le laps de temps d'après lequel est calculée l'unité de prime.

L'assureur qui délivre la police avant le paiement de la première prime ne peut pas se prévaloir de la clause de la police portant que l'assurance n'entre en vigueur qu'après le paiement de cette prime.

357

En cas de doute, les primes ultérieures sont échues au commencement d'une nouvelle période d'assurance.

Art. 21.

Sommation Si la prime n'a pas été payée à l'échéance ou dans (?.obligatoire.

le délai de grâce accordé par le contrat, l'assuré doit de.Conséquence Ja demeure.

être sommé par écrit, à ses frais, d'en effectuer le paiement dans les dix jours dès l'envoi de la sommation.

La sommation doit rappeler les conséquences du retard.

Si la prime doit être encaissée chez le débiteur, l'assureur peut remplacer la sommation écrite par une sommation verbale.

Si la sommation reste sans effet, l'obligation de l'assureur est suspendue à partir de l'expiration du délai légal.

L'article 77 de la présente loi reste réservé.

Art. 22.

Rapports de Si l'assureur n'a pas poursuivi le paiement de la edroit «près lu prime en souffrance dans les deux mois après l'expira- demeure.

tion du délai de dix jours fixé par l'article 21, il est censé s'être départi du contrat et avoir renoncé au paiement des primes arriérées.

Si l'assureur a poursuivi le paiement de la prime ou l'a accepté ultérieurement, son obligation reprend effet à partir du moment où la prime arriérée a été acquittée avec les intérêts et les frais.

Art. 23.

La prime est payable au lieu où l'assureur a son /. Lion de paiement.

siège.

Prime portaprime quéSi l'assureur n'a pas de siège en Suisse et n'a pas blé; rable.

indiqué au preneur un lieu spécial de paiement en Suisse, la prime est payable à son domicile principal en

358

Suisse (article 2, n° 3, lettre 6, de la loi fédérale du 25 juin 1885 sur la surveillance des entreprises privées d'assurances).

Si l'assureur a négligé d'élire son domicile principal en Suisse, le lieu d'exécution du contrat est au domicile du preneur.

Si l'assureur a fait régulièrement encaisser la prime chez le preneur, il doit réclamer la prime chez le débiteur, tant qu'il n'a pas expressément déclaré qu'il renonçait à cette pratique.

Art. 24.

«. Réduction

de la prime.

s.indivisibilité de In prime.

Si la *prime a été fixée en considération de faits déterminés qui augmentaient le risque, et que ces faits, au cours de l'assurance, disparaissent ou perdent leur importance, le preneur est en droit d'exiger que, pour les périodes ultérieures d'assurance, la prime convenue soit réduite à la prime du tarif.

Art. 25.

Sauf disposition contraire du contrat ou de la pròf sente loi, la prime convenue pour la période d'assurance courante est due en entier lors même que l'assureur n'a supporté le risque que pendant une partie de ce temps.

Art. 26.

i. Sort de la En cas de résiliation unilaterale du contrat, notammen résiliation t pour l'une des causes prévues aux articles 8, 15, unilatérale 28, 29, 40, alinéa 4, 58, alinéa 2, et 66, alinéa 1er, générale, l'assureur conserve son droit à la prime pour la période d'assurance en cours au moment de la résiliation.

Cependant, si la résiliation a lieu avant que le risque ait commencé à courir pour l'assureur, celui-ci a droit seulement au remboursement de ses frais.

359

Si la prime avait été payée d'avance pour plusieurs périodes d'assurance, l'assureur doit, sous réserve des dispositions de l'alinéa suivant, restituer au moins les trois quarts des primes afférentes aux périodes futures d'assurance.

En cas de résiliation d'un contrat d'assurance sur la vie légalement susceptible de rachat (art. 74, alinéa 2) l'assureur doit la prestation minimum prescrite pour le rachat. La somme à rembourser doit être calculée d'après la réserve à la date de la résiliation du contrat.

Ces prescriptions ne changent rien à la responsabilité de la partie dont la faute aurait amené la résiliation unilatérale du contrat.

Demeurent réservées les dispositions des articles 11, alinéa 3, 35, 36 et 47, alinéa 2, de la présente loi.

Art. 27.

Le contrat peut accorder à l'assureur le droit de ^,,^^f réduire de moitié au plus les prestations qui lui incom- mauvaise foi.

bent aux termes de l'article 26, alinéas 3 et 4, si l'assuré contrevient frauduleusement à ses obligations quant aux déclarations qui lui sont imposées (art. 8, 28, alinéa 2, 37, alinéa 3, et 38, alinéa 4).

Art. 28.

Si le preneur provoque une modification essentielle Modification .

i i« risque.

du risque, au cours de 1 assurance, i«1 assureur cesse pour ,,duPar ^ fait a l'avenir d'être lié. par le contrat. Il y a modification es- " PreneuTsentielle du risque, si un fait qui importait pour l'appréciation du risque (article 5) et dont les parties

360

avaient déterminé l'étendue lors de la conclusion du contrat vient à être modifié, contrairement aux stipulations du contrat.

Le contrat peut déterminer si le preneur doit donner avis de ces modifications à l'assureur, dans quelle mesure et dans quels délais.

Art. 29.

Sans le fait

Si la modification essentielle du risque intervient sans le fait du preneur, elle n'entraîne la conséquence fixée par l'article 28 de cette loi que si le preneur n'a pas déclaré cette modification à l'assureur, par écrit et sans retard, après qu'il en a ou connaissance.

Déclaration à Si le preneur n'a pas contrevenu à cette obligation preneur et Que l'assureur se soit réservé- le droit de résilier le rée du contrat. contrat, la responsabilité de l'assureur prend fin quatorze jours après qu'il a notifié au preneur la résiliation du contrat.

Art. 30.

Divisibilité de Lorsque Je contrat comprend plusieurs choses ou collective, plusieurs personnes et que le risque n'est modifié que pour une partie de ces choses ou do ces personnes, l'assurance demeure en vigueur pour les autres, à la condition que le preneur paye pour elles, à première réquisition, la prime plus élevée qui pourrait être due à l'assureur.

Art. 31.

Maintien du

contrat maigre la modification

La, modification du risque reste sans effet: ^ 1- Si elle était de nature passagère et que l'état primitif ait été rétabli avant le sinistre; 2. si elle a été apportée dans l'intérêt de l'assureur ou si elle était imposée par un devoir d'humanité;

361

3. si l'assureur a renoncé expressément ou tacitement à se départir du contrat, notamment si, après avoir reçu du preneur l'avis écrit de la modification, il ne lui a pas notifié, dans un délai de dix jours, la résiliation du contrat.

Art. 32.

Sauf disposition contraire de la présente loi, l'as- Kt|:}lSq"Vlu sureur répond de tous les événements qui présentent le caractère du risque contre les conséquences duquel l'assurance a été conclue, à moins que le contrat n'exclue certains événements d'une manière précise et non équivoque.

Art. 33.

A l'égard du preneur, l'agent est réputé avoir le Responsabilité r ° · ' île l'assureur pouvoir de faire pour l'assureur les actes que comporte sos p»»r agents.

habituellement l'exécution des opérations confiées à un agent semblable, ou les actes que l'agent a coutume de faire avec l'autorisation tacite de l'assureur.

L'agent n'a le pouvoir de modifier les conditions générales de l'assurance ni au profit ni au préjudice du preneur.

Art. 34.

Si,1 1pendant le cours du contrat,' les conditions &gé- conditions Kimsiou des générales d assurance des contrats de même genre sont mo- »éraies.

difiées, le preneur peut exiger que le contrat soit continué aux conditions nouvelles. Mais, si les nouvelles conditions exigent une contre-prestation plus élevée, il doit fournir à l'assureur le juste équivalent.

Art. 35.

Le preneur est en droit de se départir du contrat : »«trait de la r concession.

1. Si la concession fédérale est retirée à l'assureur, Effets.

par application de l'article 9, alinéa 2, de la loi fédérale du 25 juin 1885 concernant la surveillance des entreprises privées d'assurance ;

362

2. si l'assureur, après avoir renoncé à la concession fédérale, n'apporte pas à son organisation ou à sa gestion les modifications exigées par le Conseil fédéral à teneur de l'article 9, alinéa 2, de la loi précitée.

Si le preneur se départit du contrat, il peut, sous réserve des prescriptions de l'alinéa suivant, réclamer le remboursement de la prime payée pour le temps où l'assurance ne court plus.

Si le preneur se départit d'un contrat d'assurance sur la vie, il a droit à la totalité de la réserve.

Les contrats qui ont été conclus sous l'empire d'une loi cantonale de surveillance (article 14, alinéas 2 et 3, de la loi précitée) restent soumis à la législation cantonale.

Art. 36.

Faillite de l'as

En cas de faillite de l'assureur, le preneur peut se départir du contrat.

S'il s'en départit, il a les droits spécifiés à l'article 35, alinéas 2 et 3, de la présente loi.

Si, pour la période d'assurance en cours, il a une indemnité à réclamer à l'assureur, il peut faire valoir, à son choix, ou son droit à l'indemnité ou les droits cidessus.

Demeurent réservés les droits à d'autres dommages-intérêts.

Les paiements à la charge du réassureur rentrent dans la masse de la faillite.

Art. 37.

n cas de sinistre,

Déclarations E l'ayant droit doit, aussitôt qu'il cas de sinistre. a eu connaissance du sinistre et du droit qui résulterait de l'assurance, en donner avis par écrit et sans retard à l'assureur.

363

Si, par faute, l'ayant droit contrevient à cette obligation, l'assureur a le droit de réduire l'indemnité à la somme à laquelle elle se serait réduite si la déclaration avait été faite à temps.

L'assureur n'est pas lié par le contrat, si l'ayant droit n'a pas fait immédiatement sa déclaration dans l'intention d'empêcher l'assureur de déterminer en temps utile les circonstances du sinistre.

Art, 88.

L'ayant droit doit fournir, par écrit, la justification Justification flfîS de sa prétention, de manière que l'assureur puisse se i>rétTMttoiw.

convaincre de la légitimité de cette prétention.

Il peut être convenu : 1. que la justification doit être faite dans un juste délai déterminé ; 2. que l'ayant droit devra produire des pièces déterminées, à condition qu'il lui soit possible de se les procurer sans grands frais.

S'il en est requis, l'ayant droit doit fournir, au sujet des faits qui lui sont connus, tous autres renseignements qui serviraient à déterminer dans quelles circonstances le sinistre s'est produit et quelles en ont été les conséquences.

Si, frauduleusement, l'ayant droit ou son représentant dissimule ou déclare inexactement des faits qui auraient exclu ou restreint l'obligation de l'assureur, ou si, frauduleusement, il ne fournit pas la justification de sa prétention ou la fournit tardivement, l'assureur n'est pas lié par le contrat envers l'ayant droit.

Art. 39.

La créance qui résulte du contrat est échue à l'ex- Exigibilité piration d'un délai de quatre semaines à partir du prétention.

Feuille fédérale suisse. Année LV1. Vol. I.

25

364

moment où la justification de la prétention a été fournie.

Est nulle la clause que la prétention n'est échue qu'après qu'elle a été reconnue par l'assureur ou consacrée par un jugement passé eu force de chose jugée.

' B

e

parüeT

.

Art. 40.

S'il n'y a eu qu'un dommage partiel, l'assureur,, en cas de doute, n'est plus tenu à l'avenir que pour le reste de la somme assurée.

L'assureur a le droit, ainsi que le preneur d'assurance, de se départir du contrat au plus tard lors du paiement de l'indemnité.

Si l'assureur résilie le contrat, sa responsabilité cesse après un délai de quatorze jours depuis qu'il a notifié au preneur la résiliation du contrat. Il doit rembourser la prime qui correspond à la partie non écoulée de la période d'assurance en cours et au reste de la somme assurée.

Si le preneur se départit du contrat, l'assureur conserve son droit à la prime pour la période d'assurance en cours.

Si la prime avait été payée d'avance pour plusieurs périodes d'assurance, l'article 26, alinéa 3, est applicable.

Art. 41.

Communica-

Les communications (tue l'assureur doit faire,

à

1 lions a faire ' par l'assureur teneur de la présente loi, au l preneur d'assurance ou à r on le preneur.

'

l'ayant droit, peuvent être faites valablement à la dernière adresse connue de l'assureur.

Les communications que le preneur ou l'ayant droit doit faire à l'assureur, à teneur de la loi ou du contrat, peuvent être faites valablement à tout agent de l'assureur, s'il n'a pas été désigné de place en Suisse pour ces communications.

365

Art. 42.

Lorsque le contrat ou la loi fait dépendre de l'ob- a*unbdfirTMsànS servation d'un délai un droit qui résulterait de l'assu- fa«terance, l'ayant droit peut accomplir l'acte retardé sans sa faute aussitôt après que l'empêchement a cessé.

Art. 43.

Les créances qui dérivent du contrat d'assurance se Prescription, prescrivent par deux ans.

Sauf -disposition contraire de la présente loi, et sous réserve de l'article 38, n° 1, les créances contre l'assureur ne peuvent pas être soumises à une limite de temps plus courte.

II. Dispositions spéciales à l'assurance des choses.

Art. 44.

Tout intérêt économique qu'une personne peut avoir à ce qu un sinistre n'arrive pas, peut être l'objet d'une assurance de choses.

Sous réserve de la disposition de l'article 17, alinéa 2, le droit à l'indemnité appartient exclusivement à la personne dont l'intérêt est assuré, même si le contrat a été conclu par un intermédiaire.

Cette personne est l'assuré.

Objet de

l'assurance-

Art. 45.

La valeur d'assurance est la valeur que représente l'objet de l'assurance lors de la conclusion du contrat.

En cas de doute, l'intérêt assuré est présumé être l'intérêt qu'aurait le propriétaire à la conservation de la chose.

v »leur

d'assurance.

366

Sont compris dans l'assurance, si l'objet de l'assurance est désigné par son genre, tous les objets appartenant à ce genre à l'époque du sinistre.

Art. 46.

Surassurance.

Si la somme assurée dépasse la valeur d'assuDouble assurance, rance, il y a surassurance.

a . Définition.

111 * . , , * .

11 y a double assurance, lorsque le même intérêt est assuré contre le même risque et pour le même temps auprès de plusieurs assureurs, de telle sorte que l'ensemble des sommes assurées dépasse la valeur d'assurance.

Art, 47.

*. Conséquences.

Celui qui conclut une double assurance doit en informer chacun des assureurs, par écrit, et sans retard.

S'il omet intentionnellement de donner cet avis, ou s'il conclut frauduleusement une double assurance ou une surassurance, l'assureur n'est pas lié par le contrat.

Chaque assureur a droit à toute la prestation convenue.

Art. 48.

Diminution de Si (a valeur d'assurance subit une diminution d'assurance, essentielle pendant le cours de l'assurance, chacune des parties peut exiger la réduction proportionnelle de la somme assurée.

La prime doit être réduite proportionnellement pour les périodes ultérieures d'assurance.

Art. 49.

Changement personnede

Si l'objet de l'assurance change de propriétaire, les droits et les obligations qui résultent du contrat d'assurance sont transmis à l'acquéreur, pourvu que cette substitution n'entraîne pas une modification essentielle du risque (art. 28.)

367

Pour la prime échue à l'époque du transfert, le précédent propriétaire est tenu envers l'assureur aussi bien que l'acquéreur.

Art. 50.

Si l'assuré tombe en faillite,7 la masse succède au l'assuré, fatuitésaisie».

de

contrat.

séquestre.

Si la chose assurée est saisie par la voie de la poursuite pour dettes ou mise sous séquestre, l'assureur qui a été informé en temps utile ne peut plus s'acquitter valablement qu'entre les mains de l'office des poursuites.

Art. 51.

Si une chose assurée est donnée en gage, le privi- ^/,,r^oiïoge8 lege du créancier s'applique à la fois aux droits que le assurée.

contrat d'assurance confère au débiteur, à la prestation due par l'assureur, et à la chose acquise au moyen de l'indemnité.

Si le créancier a notifié son droit de gage à l'assureur, celui-ci ne peut payer l'indemnité qu'avec l'assentiment du créancier, sous peine de dommagesintérêts.

Art. 52.

Demeurent en vigueur les prescriptions des lois Maintien du droit cantonales qui étendent à la somme assurée et à l'in- cantonal.

demnité d'assurance le droit réel qui existe sur la chose assurée d'après la législation cantonale, ainsi que les règles qui garantissent la prétention de l'ayant droit.

Art. 53.

En vertu de la 1présente loi. le tiers qui éprouve Assurance-a r responsabilité.

un dommage a, jusqu à concurrence de 1 indemnité qui Gage légal lui est due, un droit de gage sur la prétention que l'as- tiers lésé.

368

sure peut avoir à raison d'une assurance contre les conséquences de la responsabilité légale. L'assureur peut s'acquitter directement entre les mains du lésé.

L'assureur est responsable de tout acte qui porterait atteinte à ce droit du tiers.

Art. 54.

°bauvetagedc

Lors du smistl e

' > l'assuré est obligé de faire tout ce qui est possible pour restreindre le dommage. S'il n'y a pas péril en la demeure, il doit requérir les instructions de l'assureur sur les mesures à prendre et s'y conformer.

Si l'assuré contrevient à cette obligation d'une manière inexcusable, l'assureur a le droit de réduire l'indemnité au montant auquel elle se serait réduite si cette obligation avait été accomplie.

Art. 55.

valeur de Le dommage doit être calculé d'après la valeur .

.

, ,.

, a. En général, qu avait 1 objet de 1 assurance immédiatement avant le sinistre. (Valeur de remplacement.)

Dans l'assurance des marchandises contre les risques de transport, c'est la valeur de la chose au lieu de destination qui fait règle.

S'il y a eu assurance d'un profit à venir, le dommage se calcule d'après le prix qu'aurait eu la chose si l'entreprise avait réussi.

Les frais évités par le sinistre doivent être déduits de la valeur fixée conformément aux alinéas 2 et 3.

remplacement.

li. Dans l'assurance contre l'incendie.

Art. 56.

Dans l'assurance contre l'incendie, la valeur de remplacement est:

369

1. Pour les marchandises et les produits naturels, la valeur courante; 2. pour les édifices, la valeur locale de construction, sous déduction de la moins-value résultant de l'usure, mais, au maximum, la valeur vénale ; 3. .pour les meubles meublants, les outils et les machines, le prix que nécessiterait une acquisition à nouveau, sous déduction de la moins-value causée par l'usage.

Doit être considéré comme résultant de l'incendie, le dommage qui provient des mesures prises pour éteindre l'incendie ou d'un déménagement nécessaire; et qui consiste dans la destruction, la détérioration ou la disparition de la chose.

Art. 57.

L'assureur, de même que l'assuré, a le droit d'exi- Evaluation d« dommage.

ger que le dommage soit évalué sans retard d'un commun accord. En cas de destruction partielle de produits agricoles par la grêle, l'évaluation du dommage doit être ajournée jusqu'à la récolte, si l'assureur le demande.

Si l'une des parties'refuse de participer à l'évaluation du dommage, ou si les parties ne peuvent pas s'entendre sur son importance, l'évaluation doit, sauf convention contraire, en être faite par des experts désignés .par le tribunal.

Le fait que l'assureur participe à l'évaluation du dommage ne lui enlève pas les exceptions qu'il peut opposer à l'assuré.

Les frais de l'évaluation du dommage incombent aux parties, par parts égales.

Art. 58.

Tant que le dommage n'a pas été évalué, l'assuré interdiction ne doit, sans le consentement de l'assureur, apporter aux changements, choses endommagées aucun changement qui pourrait

370

rendre plus difficile ou impossible la détermination des causes du sinistre ou celle du dommage, à moins que ce changement ne paraisse s'imposer dans l'intérêt public, ou pour limiter le dommage.

Si, dans une intention frauduleuse, l'assuré contrevient à cette obligation, l'assureur n'est plus lié par le contrat.

Art, 59.

valeur ae L'assuré doit établir la valeur de remplacement remplacement.

A qui incombe (art.

55 et

56).

Cependant, si la valeur d'assurance a été arrêtée par les parties, la valeur convenue est considérée comme valeur de remplacement, à moins que l'assureur ne prouve que la valeur de remplacement, calculée suivant les prescriptions des articles 55 et 56 de la présente loi, est inférieure à la valeur d'assurance.

Dans l'assurance d'un profit futur contre l'incendie, une telle convention est nulle.

Art. 60.

Somme A moins que le contrat ou la présente loi (art. 61) dtion de l casn'en dispose autrement, l'assureur ne répond du domassurance. mage que jusqu'à concurrence de la somme assurée.

Si la somme assurée n'atteint pas la valeur de remplacement (sous-assurance), le dommage doit être réparé, sauf convention contraire, suivant la proportion qui existe entre la somme assurée et la valeur de remplacement.

Art. 61.

de Frais sauvetage Si l'assuré a fait des frais pour limiter le dommage (art. 54) sans que cela fût évidemment inutile, l'assureur est tenu de les lui rembourser, même si les mesures prises sont restées sans résultat, ou si ces frais, ajoutés à l'indemnité, dépassent le montant de la somme assurée.

371

Si la somme assurée n'atteint pas la valeur de remplacement, l'assureur supporte les frais suivant la proportion qui existe entre la somme assurée et la valeur de remplacement.

Art. 62.

S'il y a double assurance (article 46), chaque assu- J^lce.

reur répond du dommage suivant la proportion qui ßcspousubUit« existe entre la somme assurée par lui et le montant assllrTMrstotal des sommes assurées.

Si l'un des assureurs est devenu insolvable, chacun des autres assureurs est tenu, sous réserve des prescriptions de l'article 61, alinéa 2, de la présente loi, de la part qui incombe à l'assureur insolvable, suivant la proportion qui existe entre les sommes assurées et jusqu'à concurrence de la somme assurée par lui. L'assureur qui acquitte l'indemnité est subrogé aux droits de l'assuré contre l'assureur insolvable.

En cas de sinistre, l'assuré ne doit pas renoncer à l'une quelconque des assurances au préjudice des autres assureurs, ou y apporter des modifications.

Art. 63.

Dansv la mesure où il a fourni une indemnité,' l'assureur est subrogé aux droits que l'assuré peut avoir contre des tiers à raison d'actes illicites.

L'assuré est responsable de tout acte qui compromettrait ce droit de l'assureur.

La disposition de l'alinéa 1er ne s'applique pas au cas où l'auteur du dommage est l'une des personnes mentionnées à l'article 15, alinéa 2, de cette loi, à moins qu'il n'ait causé le dommage intentionnellement ou par négligence grave.

Recours

de l'assureur-

372

III. Dispositions spéciales à l'assurance des personnes.

Art. 64.

Assurance sur L'assurance sur la vie d'autrui est nulle,' si celui la tête d nu tiers.

décès du(iuel l'assurance est conclue n'a pas consenti Cessibilitc desau, , , . , droits a la conclusion du contrat.

contrat.

Mais le droit résultant du contrat peut être cédé sans le consentement de ce tiers.

Le consentement de celui qui a assuré sa propre vie et qui a cédé le droit qui résulte du contrat, n'est pas nécessaire pour une cession ultérieure de ce droit.

Art. 65.

Nature juridiLe droit qui résulte d'un contrat d'assurance de que de la police.

personnes ne peut être cede m par endossement m par la simple tradition de la police.

Si la police est au porteur, l'assureur de bonne foi peut considérer le porteur comme l'ayant droit.

Art. 66.

indication J'àge.

anexacte Se

En cas d'indication inexacte de l'âge, l'assureur ne 6 ' peut se départir du contrat que si l'âge réel d'entrée ne rentre pas dans les limites d'admission fixées par lui.

Si, par contre, l'âge d'entrée est compris dans ces limites, il y a lieu d'appliquer leis règles suivantes : 1. Si, par suite de l'indication inexacte de l'âge, il a été payé une prime moindre que celle qui aurait dû être payée d'après l'âge réel d'entrée, l'obligation de l'assureur doit être réduite suivant la proportion qui existe entre la prime stipulée et la prime du tarif pour l'âge réel.

Si l'assureur s'était déjà acquitté, il a le droit de répéter, avec les intérêts, ce qu'il a payé de trop d'après ce calcul;

373

2. si, par suite de l'indication inexacte de l'âge, il a été payé une prime plus élevée que celle qui aurait dû être payée d'après l'âge réel d'entrée, l'assureur est tenu de rembourser la différence entre la réserve existante et celle qui était nécessaire pour l'âge réel d'entrée. Les primes ultérieures doivent être réduites d'après l'âge réel d'entrée; 3. pour les calculs prévus aux nos 1 et 2 du présent article, il faut faire emploi des tarifs qui étaient en vigueur lors de la conclusion du contrat.

Art. 67.

Il y a assurance au profit d'un tiers lorsqu'il est Assurance convenu que l'assureur fera la prestation que lui impose f rutit ll'!lutrulo. Définition.

le contrat à un tiers désigné nominativement ou de toute autre manière süffisante.

Il faut considérer comme bénéficiaires, sous l'expression « les enfants du preneur », les enfants appelés à la succession lors du décès du preneur ; sous l'expression « le conjoint », le conjoint qui existe lors du décès du preneur,, et sous l'expression « héritiers ou ayants cause » les personnes qui ont droit à la succession, lors même qu'elles n'accepteraient pas la succession.

Si plusieurs personnes ont été désignées comme bénéficiaires sans indication précise de la part qui leur revient, les bénéficiaires qui existent lors du décès ont des droits égaux à la somme assurée.

Art. 68.

Lors même que le contrat a été conclu au profit d'un aispo*uum
374

II perd ce droit s'il remet la police au bénéficiaire après y avoir inscrit la mention qu'il renonçait à la faculté de révocation.

Le droit à l'assurance n'appartient au bénéficiaire qu'au décès du preneur.

Art. 69.

c

. Extinction

Si le P reneur n'a Pas renoncé à la faculté de révoquer la désignation du bénéficiaire, cette désignation s'éteint en cas de saisie de l'assurance ou de faillite du preneur.

Si la saisie tombe ou si la faillite est révoquée, la désignation reprend son effet.

Art. 70.

ne

Réalisation de l'assurance U assurance qu'un débiteur a contractée sur sa après saisie propre vie ne Peut être maintenue, en cas de réalisation de l'assurance après saisie ou faillite, qu'avec le consentement du débiteur.

créanciers Si le débiteur ne consent pasî à la continuation du droit de rachat contrat, les créanciers ou l'acquéreur de la créance ont et «es enfants, droit au prix de rachat de l'assurance.

Le conjoint et les enfants du débiteur peuvent, avec le consentement de celui-ci, exiger que l'assurance leur soit cédée contre remboursement du prix de rachat. Cette demande doit être adressée à l'office des poursuites ou à l'administration de la faillite avant la réalisation de la créance.

Art. 7l.

e

collective conD l'assurance collective contre les accidents naît, dents. Droits pour celui au profit duquel l'assurance a été conclue, un bénéficiaire, droit irrévocable et direct contre l'assureur dès qu'un accident est survenu.

375

Art.

72.

Lorsque l'accident a causé une diminution de capa- Assurance contri- les neCité de travail probablement permanente. 1 indemnité ciiu>uth.

Règlement eu doit être fourme, sous la forme d un capital calcule d après capital, la somme assurée pour invalidité, aussitôt qu'il est constaté quelles sont les conséquences probablement durables de l'accident. Il peut être convenu que les rentes qui auraient été payées dans l'intervalle seront déduites de l'indemnité.

La disposition de cet article n'est pas applicable lorsque le preneur d'assurance a expressément stipulé l'indemnité sous forme d'une rente.

Art. 73.

Le preneur d'assurance qui a payé une prime Droit du preneur de se annuelle a le droit de se départir du contrat d assurance départir du contrat.

sur la vie et de refuser le paiement des primes ultérieures.

Le contrat doit être dénoncé à l'assureur, par écrit, au plus tard la veille du jour où commence une nouvelle période d'assurance.

Art. 74.

A la demande de l'ayant droit, l'assureur doit trans- Uëductum et former totalement ou partiellement, en une assurance a. Condition.

libérée, toute assurance sur la vie pour laquelle trois primes annuelles au moins ont été payées.

L'assureur doit de plus, sur la demande de l'ayant droit, racheter, totalement ou partiellement, toute assurance sur la vie pour laquelle il est certain que son obligation arrivera à échéance, et lorsque trois primes annuelles au moins ont été payées.

La réduction et le rachat ne peuvent avoir lieu que pour la fin d'une période d'assurance.

376

S'il a été versé une prime unique, le rachat peut être exigé à toute époque.

Art. 75.

l

a valeur de L'assureur doit fixer les bases de la détermination règlement. de ja valeur (je réduction et du prix du rachat.

Les règles concernant la réduction et le rachat doivent faire partie des condition générales d'assurance.

Le Conseil fédéral, en qualité d'autorité de surveillance dans le domaine de l'assurance privée, décide si les valeurs de règlement prévues sont convenables.

Art. 76.

c. obligation L'assureur est tenu de fixer la valeur de réduction vérification ou de rachat de lassurance et de la taire connaître à par le Bureau fédéral dos l'ayant droit dans les six semaines après qu'il a reçu la assurances: échéance de la demande. Il doit de plus, s'il en est requis, lui fournir créance résultant du les données qui sont nécessaires à des experts pour calrachat.

* culer la valeur de réduction ou de rachat.

A la demande de l'ayant droit, le Bureau fédéral des assurances revise gratuitement ces calculs.

En cas de rachat, la créance de l'ayant droit n'est échue qu'après l'expiration d'un délai de six semaines, et jamais avant la fin de la période de l'assurance pendant laquelle la demande de rachat a été formée. Dans les assurances pour lesquelles une prime unique a été payée, la créance est échue après l'expiration du délai de six semaines.

«le l'assureur;

Art. 77.

û. interdiction Si le paiement des primes cesse après que déchéance, l'assurance a été en vigueur depuis trois ans au moins, la réduction de l'assurance est due. L'assureur doit fixer.,

377

suivant les prescriptions de la présente loi, la valeur de réduction, et, pour les assurances susceptibles de rachat, la valeur de rachat. Il la communique à l'ayant droit sur sa demande.

Si l'assurance est susceptible de rachat, l'ayant droit peut, dans les six semaines après qu'il a reçu cette communication, demander le rachat au lieu de la réduction.

Art. 78. .

Les prescriptions de la présente loi concernant la et Reduction réduction ou le rachat des assurances sur la vie, sont participation aussi applicables aux prestations que l'assureur accorde à l'ayant droit, comme participation aux bénéfices échus, sous forme d'une assurance sur la vie.

IV. Dispositions finales et transitoires.

Art. 79.

La présente loi n'est pas applicable aux contrats Ass ociations conclus par des associations non soumises à la surveil- a l'application lance de l'Etat. (Art. 1er de la loi du 25 juin 1885, concernant les entreprises privées d'assurance.)

Art. 80.

Sont nulles les conventions qui seraient contraires Règles aux prescriptions des articles 11, 14, 39, alinéa 2, 43, 44, alinéa 2, 47, 55, alinéa 1er, 56, 59, alinéa 8, 62, alinéa 1er, 64, alinéa 1er, et 65 de la présente loi.

Les prescriptions des articles 2, 3, 8, 13, 20, alinéa 2, 21, 22, alinéa 1er, 23, alinéas 2, 3 et 4, 26, 28, 29,

378

33, 40, alinéas 2 et 3, 41, alinéa 2, 42, 71, 72, alinéa ler 74, 75, 76, 77 et 78 de la présente loi ne peuvent pas être modifiées par convention au détriment du preneur d'assurance ou de l'ayant droit.

Cette règle n'est pas applicable à l'assurance maritime ni à la réassurance.

Art, 81.

Rapport entre Les dispositions transitoires des articles 882 et 883 le nouveau droit du Code fédéral des obligations sont applicables rpar & et l'ancien.

analogie.

Les prescriptions mentionnées à l'article 80 de la présente loi sont applicables aussi aux contrats conclus avant l'entrée en vigueur de cette loi, à partir du moment où, depuis l'entrée en vigueur de la loi, ils auraient pu être dénoncés à teneur des conventions.

Art. 82.

Clause

Seront abrogés, dès l'entrée en vigueur de la présente loi, l'article 896 du Code fédéral des obligations, ainsi que toutes les prescriptions contraires des lois et ordonnances cantonales.

Art. 83.

Mise de la loi.

en vigueur

Le Conseil fédéral est chargé, conformément à la loi du 17 juin 1874 sur la votation des lois fédérales et des arrêtés fédéraux, de publier la présente loi et de fixer la date de son entrée en vigueur.

379

# S T #

Rapport du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur

la demande d'indemnité formulée par M. Barbezat-Frey, domicilié à Brougg.

(Du 9 février 1904.)

Monsieur le président et messieurs, M. Barbezat-Frey, domicilié à Brougg, recourt à l'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, par office du 18 décembre 1903, contre une décision du Conseil fédéral, du 28 novembre 1903, qui lui allouait une indemnité de 170 francs pour les soins donnés à son fils, décédé le 8 juin 1903. 11 réclame dans son recours une indemnité pour la mort de ce dernier, bien que, dans sa demande d'indemnité adressée au Conseil fédéral, le 8 novembre 1903, il ait déclaré ne prétendre qu'au remboursement des frais de maladie, sans vouloir faire une question d'argent de la mort de son fils.

Voici les faits. Le fils du recourant, Barbezat Henri, né en 1882, a été déclaré apte au service par la commission de visite sanitaire, en automne 1901. Peu après, on remarquait chez lui les signes d'une affection pulmonaire, qui rendit nécessaire son transfert au sanatorium d'Heiligenschwendi. Barbezat resta à Heiligenschwendi du 23 octobre 1901 au 21 janvier 1902 ; le médecin de l'établissement avait constaté chez lui une tuberculose pulmonaire du deuxième degré et, quand Feuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. I.

26

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le projet d'une loi fédérale concernant le contrat d'assurance. (Du 2 février 1904.)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1904

Année Anno Band

1

Volume Volume Heft

06

Cahier Numero Geschäftsnummer

---

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

10.02.1904

Date Data Seite

267-379

Page Pagina Ref. No

10 075 744

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.