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FEUILLE FEDERALE 111e année

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Berne, le 11 juin 1959

Volume I

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la garantie de la constitution mise à jour du canton de Genève (Du 1er juin 1959) Monsieur le Président et Messieurs, Lors de la votation populaire des 6 et 7 décembre 1958, les électeurs du canton de Genève ont approuvé par 13 226 voix contre 649 l'arrêté législatif du Grand Conseil du 17 octobre 1958 concernant la mise à jour au 7 novembre 1958 de la constitution cantonale du 24 mai 1847. Aucun recours n'a été formé contre le résultat de ce scrutin.

Par lettre du 16 décembre 1958, le Conseil d'Etat de la république et canton de Genève a sollicité la garantie fédérale en faveur de la constitution cantonale mise à jour.

I

Par une loi du 18 juin 1949, le Grand conseil du canton de Genève avait chargé le Conseil d'Etat de publier le recueil systématique officiel de la législation en vigueur, ce recueil devant être soumis à sa ratification avant d'être promulgué. Aussi le Conseil d'Etat a-t-il présenté au Grand conseil, en février 1957, un projet d'arrêté législatif concernant la mise à jour de la législation genevoise. En ce qui concerne spécialement le nouveau texte de la constitution cantonale, il a été approuvé, selon l'arrêté législatif susdit du 17 octobre 1958, dans la nouvelle teneur adoptée par la commission chargée de la mise à jour de la législation genevoise. Ce texte mis à jour a été soumis au peuple conformément à l'article 152 de la constitution cantonale du 24 mai 1847, alors même qu'il n'entend, quant au fond, modifier aucune des dispositions constitutionnelles cantonales. La mise à jour au 7 novembre 1958 a eu essentiellement pour effet d'éliminer de la constitution cantonale les dispositions désuètes ou sans objet, de lui incorporer les lois constitutionnelles, d'améliorer la systématique en introFeuille fédérale. 111e année. Vol. I.

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1434 duisant des notes marginales, en numérotant les alinéas des articles, en intervertissant certains chapitres et en apportant au texte des corrections d'ordre-rédactionnel. Si la date du 7 novembre 1958 a été choisie pour la mise en vigueur de la constitution épurée, c'est parce qu'elle correspond au lendemain du jour où le Conseil d'Etat a entériné le résultat de la votation populaire des 25 et 26 octobre 1958 sur la loi constitutionnelle concernant le mode d'élection et le nombre des membres du conseil municipal de la ville de Genève (cf. FF 1958, II, 1513 et 1571). Cette loi constitutionnelle a ainsi été incorporée elle aussi dans la constitution mise à jour.

La constitution cantonale du 24 mai 1847, mise à jour au 7 novembre 1958, comprend désormais 181 articles répartis selon les titres suivants: I. Etat politique; II. Déclaration des droits individuels; III. Liberté individuelle et inviolabilité du domicile; IV. Qualité de citoyen; V. Conseil général; VI. Referendum et initiative; VII. Grand conseil; VIII. Conseil d'Etat; IX. Pouvoir judiciaire; X. Organisation des communes; XI. Instruction publique; XII. Cultes; XIII. Assistance publique; XIV. Dispositions diverses; XV. Mode de revision; XVI. Dispositions finales.

II On doit d'emblée se demander si la validité de la constitution genevoise ainsi mise à jour est subordonnée à la garantie fédérale. C'est la première fois que cette garantie est requise en faveur de la revision totale purement formelle et rédactionnelle d'une constitution cantonale. Les cantons du Tessin et de Genève ont bien procédé en 1930 et 1937 à une épuration de leur constitution, mais cette épuration n'avait pas été soumise à la votation du peuple et elle ne constituait d'ailleurs par une refonte complète, comparable à la présente mise à jour de la constitution genevoise.

Certes la constitution primitive du canton de Genève, du 24 mai 1847, était antérieure à la première constitution fédérale du 12 septembre 1848 et ne put ainsi pas obtenir la garantie fédérale. Mais les dispositions transitoires de la constitution fédérale de 1848 posaient à l'article 4 le principe de la force dérogatoire du droit fédéral (comme l'article 2 des dispositions transitoires de la constitution fédérale du 29 mai 1874) ; on doit admettre par conséquent que les dispositions de la constitution
genevoise de 1847 qui étaient contraires à la constitution fédérale de 1848 ont automatiquement cessé d'être en vigueur du fait de l'adoption de cette dernière ou de la promulgation des lois qu'elle prévoyait (cf. Burckhardt, Kommentar, 3« édit., p. 63). La même remarque vaut pour la loi constitutionnelle genevoise du 21 mars 1849 sur la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile qui, par inadvertance sans doute, n'a pas été soumise à l'époque à la garantie fédérale. En revanche toutes les lois constitutionnelles subséquentes ont obtenu cette garantie, conformément à l'article 6 de la constitution fédérale de 1874. Dans la mesure où elles ont été incorporées dans la constitu-

1435 tion cantonale mise à jour au 7 novembre 1958, ces lois constitutionnelles ont ainsi déjà été garanties et cela représente quelque 80 articles sur les 181 que compte la constitution mise à jour. Malgré cela, nous estimons que cette constitution doit être soumise à la garantie fédérale, d'une part parce qu'elle n'a jamais été, comme telle, garantie et d'autre part pour établir que l'abrogation de toute une série de dispositions est conciliable avec les conditions posées par l'article 6 de la constitution fédérale. Rappelons que l'aborgation en 1909 de l'article 49 de la constitution du canton de Soleure sur le traitement des instituteurs primaires a été l'objet de la garantie fédérale (FF 1909, IV, 28; BO 35, 591).

Il convient par conséquent d'examiner si la constitution genevoise mise à jour au 7 novembre 1958 est conforme au droit fédéral, si elle assure l'exercice des droits politiques d'après des formes républicaines et si elle peut être revisée lorsque la majorité absolue des citoyens le demandent.

III 1, Nous indiquons d'abord ci-après les articles de la constitution de 1847 qui ont été supprimés, en mentionnant entre parenthèses l'objet de chaque article et le motif de la suppression : (interrogatoire de toute personne arrêtée; faisait Article 3, 3e alinéa double emploi avec l'art. 7, 1er alinéa, de la loi constitutionnelle du 21 mars 1849, actuellement article 19 de la constitution mise à jour), Article 17 (droit de battre monnaie et de fixer le système des poids et mesures; sans objet du fait des articles 38 et 40 est.).

Article 61, 2e alinéa (octrois municipaux; abolis par le droit fédéral, soit la loi du 23 décembre 1886 et l'arrêté du Conseil fédéral du 15 juillet 1887).

(députés à la Diète fédérale; sans objet du fait de la Article 63 loi constitutionnelle du 9 mai 1931).

Article 87 (surveillance et pouce de l'instruction publique par le Conseil d'Etat; disposition superflue), Article 91 (interdiction pour les conseillers d'Etat membres du Grand conseil de participer à certaines votations; sans objet du fait de la loi constitutionnelle du 13 mars 1926).

(institution des justices de paix; disposition superArticle 97 flue).

Articles 112 et 113 (réunion à la ville de Genève des communes des Eaux-Vives, de Plainpalais et du Petit-Saconnex; dispositions transitoires n'ayant plus de raison d'être).

1436 Article 119, 3e alinéa (compétences attribuées au Conseil d'Etat au sujet de la rille de Genève; disposition n'ayant plus de raison d'être).

Article 140 (obligation pour les fondations de soumettre dans le délai d'un an les conditions de leur institution au Conseil d'Etat; disposition transitoire n'ayant plus de raison d'être).

Article 141 (autorisation des sociétés anonymes; sans objet du fait de droit fédéral [art. 620 et s. CO]).

Article 142 (concerne les fondations d'utilité publique et les sociétés anonymes; rendu caduc par l'abrogation de l'article 141 et la modification de l'article 139 conformément à l'article 175 de la constitution mise à jour).

Articles 143 et 144 (société économique et de l'hôpital; dispositions n'ayant plus de raison d'être).

Article 149 (bibliothèque publique ; disposition n'ayant plus de raison d'être).

Articles 154 à 157 (dispositions additionnelles n'ayant plus de portée pratique).

Le Grand conseil de Genève avait adopté le 28 avril 1847 des «dispositions transitoires pour la mise en activité de la nouvelle constitution» du 24 mai 1847 (art. 1er & 47). Ces dispositions n'ayant plus d'objet, elles n'ont pas été reprises dans la constitution mise à jour, à l'exception des articles 21 (proclamation du Conseil d'Etat entrant en charge) et 22 (prestation de serment des conseillers d'Etat) qui sont maintenant les articles 112 et 110 de la constitution mise à jour.

2. Les lois constitutionnelles postérieures à la constitution du 24 mai 1847 disparaissent dans la mesure où elles n'ont pas été incorporées dans la constitution mise à jour. Comme on l'a déjà relevé, elles ont obtenu la garantie fédérale, à l'exception de celle du 21 mars 1849 sur la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile.

Les dispositions non incorporées des lois constitutionnelles sont les suivantes : De la loi du 26 août 1868 (création d'un hospice général), l'article 1er, 2e alinéa (disposition abrogatoire), l'article 4, alinéas 1 à 4 et 6 (dispositions actuellement sans objet), les dispositions transitoires et l'article final sur l'entrée en vigueur.

De la loi du 26 avril 1879 (referendum facultatif cantonal), l'article 5 prévoyant une loi d'exécution.

De la loi du 4 octobre 1882 (conseils de prud'hommes), la clause abrogatoire et la disposition transitoire.

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De la loi du 12 janvier 1895 (referendum facultatif municipal), l'article 6 prévoyant une loi d'exécution.

De la loi du 29 octobre 1898 (organisation de l'assistance publique)5 la disposition abrogatoire de l'article 9.

De la loi du 17 juin 1905 (droit d'initiative), la disposition abrogatoire de l'article 8.

De la loi du 15 juin 1907 (suppression du budget des cultes), les dispositions transitoire (art, 5), additionnelle (art. 6 et 7) et abrogatoire (art. 8).

De la loi du 21 février 1931 (referendum obligatoire en matière financière), l'article 3 chargeant le Conseil d'Etat de son exécution.

Des lois du 31 mars 1901 et 13 mars 1906 (incompatibilités), et de toutes les lois susmentionnées, le préambule et les formules finales.

La suppression de toutes ces dispositions dans la constitution cantonale mise à jour ne porte nullement atteinte au droit fédéral.

3. Toute une série d'articles (29, 38, 40, 52, 65, 96, 99, 110, 111, 116, 124, 126, 128, 152, 161, 169, 175 et 185) ont subi des modifications de pure forme, seule la numérotation ayant changé dans la plupart des cas.

4. On a déjà signalé que la constitution primitive du 24 mai 1847 et la loi constitutionnelle du 21 mars 1849 sur la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile n'ont pas été formellement garanties. Aussi convientil d'examiner encore spécialement celles de leurs dispositions, incorporées dans la constitution mise à jour, dont la conformité avec le droit fédéral pourrait paraître discutable.

L'article 10 garantit la liberté d'enseignement à tous les Genevois (1er al,), les étrangers ne pouvant enseigner qu'après avoir obtenu une autorisation du Conseil d'Etat. Le constituant de 1847 avait réservé la liberté d'enseigner aux seuls Genevois, mais en vertu de la loi genevoise sur l'instruction publique de 1913, puis de 1940 (art. 14), les confédérés établis dans le canton sont assimilés aux Genevois. L'article 10 de la constitution genevoise doit naturellement être appliqué dans les limites du droit fédéral, notamment des articles 51 et 60 de la constitution fédérale, (cf. Burckhardt: Kommentar, 3e édit., p. 200, 482).

L'article 21 prévoit en particulier que les personnes étrangères, arrêtées pour mendicité, vagabondage ou contravention aux lois sur la police des étrangers, peuvent être, dans les vingt-quatre heures de
leur arrestation, conduites, hors du canton. Cette disposition doit être comprise et appliquée en fonction de l'article 69ter de la constitution fédérale et de la loi fédérale du 26 mars 1931/8 octobre 1948 sur le séjour et rétablissement des étrangers (spéc. art. 10), L'article 43, lettre c, prive de l'exercice des droits politiques «ceux qu sont au service d'une puissance étrangère». Cette disposition qui date de

1438 l'époque des capitulations militaires, est tombée en désuétude (cf. art. 11 et 43 est.).

L'article 107 interdit aux conseillers d'Etat de porter ou de recevoir des décorations et pensions étrangères. A propos de cette disposition, qui ne prévoit pas de sanction, il faut réserver l'article 12 de la constitution fédérale qui leur interdit en outre d'accepter des titres et présents de gouvernements étrangers, la contravention à cette interdiction entraînant la perte du mandat.

L'article 127, relatif au service actif extraordinaire, n'a plus guère de portée pratique. Il ne paraît d'ailleurs pas en contradiction avec les articles 13, 2e alinéa, et 19, 4e alinéa, de la constitution fédérale.

Selon l'article 176, aucune congrégation ne peut s'établir dans le canton de Genève sans l'autorisation du Grand conseil, qui statue après avoir entendu le préavis du Conseil d'Etat. Cette disposition doit être comprise sous réserve de l'article 52 de la constitution fédérale qui prohibe la fondation de nouveaux couvents ou ordres religieux.

Quant à l'article 178, il interdit aux membres du Grand conseil, ainsi qu'aux fonctionnaires et employés de l'Etat d'accepter, sans autorisation soit du Grand conseil soit du Conseil d'Etat, titres, décorations, émoluments ou pensions d'un gouvernement étranger. Ici aussi il faut réserver la prohibition et la sanction de l'article 12 de la constitution fédérale en ce qui concerne les membres du Grand conseil et rappeler qu'en vertu du droit fédéral l'interdiction des décorations et des titres étrangers s'applique en outre à tous les militaires.

IV

Des considérations ci-dessus il ressort que la constitution genevoise mise à jour au 7 novembre 1958 réunit les conditions prévues à l'article 6 de la constitution fédérale. Elle assure l'exercice des droits politiques d'après des formes républicaines. En effet, la souveraineté réside dans le peuple, qui se compose de l'ensemble des citoyens, et la forme du gouvernement est démocratique. Les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire sont séparés, leurs représentants étant élus par le peuple. Les libertés individuelles sont garanties. Les citoyens ont l'exercice des droits politiques dès l'âge de vingt ans révolus. Le droit de referendum, obligatoire en matière constitutionnelle, et facultatif en matière législative cantonale et communale, ainsi que le droit d'initiative législative et constitutionnelle cantonale sont garantis. Enfin, la constitution cantonale mise à jour a été acceptée par le peuple et elle peut être revisée lorsque la majorité absolue des citoyens le demandent, la question de la revision totale devant même être posée au peuple tous les quinze ans (art. 180).

1439 La constitution mise à jour ne renferme, abstraction faite des réserves mentionnées, rien de contraire au droit fédéral. Nous vous proposons de lui accorder la garantie fédérale, en adoptant le projet d'arrêté ci-annexé.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

Berne, le 1« juin 1959.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, P. Chaudet iï»i5

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL accordant

la garantie fédérale à la constitution mise à jour du canton de Genève

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 6 de la constitution fédérale; vu le message du Conseil fédéral du 1er juin 1959; considérant que les articles 10, 21, 43, 107, 127, 176 et 178 doivent être appliqués en conformité avec le droit fédéral notamment avec les articles 12, 19, 43, 51, 52, 60 et 69ter de la constitution fédérale; considérant que la constitution mise à jour du canton de Genève ne renferme par ailleurs rien de contraire à la constitution fédérale, arrête:

Article premier La garantie fédérale est accordée à la constitution du Canton de Genève du 24 mai 1847, mise à jour au 7 novembre 1958 et acceptée en votation populaire des 6 et 7 décembre 1958.

Art. 2

Le Conseil fédéral est chargé d'exécuter le présent arrêté.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la garantie de la constitution mise à jour du canton de Genève (Du 1er juin 1959)

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