01.061 Rapport concernant la convention révisée sur la protection de la maternité et sur le retrait de cinq conventions (88e session de la Conférence internationale du Travail 2000) du 15 juin 2001

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, En vertu de l'art. 19 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail (OIT), nous vous soumettons un rapport sur la convention révisée sur la protection de la maternité (no 183), adoptée par la Conférence internationale du Travail lors de sa 88e session. Nous vous informons par ailleurs du retrait de cinq conventions et vous proposons d'en prendre acte.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 juin 2001

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2001-1073

5601

Condensé Le présent texte examine, d'une part, si la convention révisée sur la protection de la maternité (no 183) concorde avec notre droit national et, d'autre part, rend compte du retrait de cinq conventions par la Conférence internationale du Travail (CIT).

Concernant la nouvelle convention no 183 sur la protection de la maternité, la révision de l'ancienne convention no 103 augmente le niveau de protection et introduit aussi une certaine souplesse. La protection est étendue à toutes les femmes, y compris celles qui se trouvent dans des situations de travail atypiques. Par ailleurs, le congé de maternité passe de 12 à 14 semaines. Certaines dispositions peuvent néanmoins être modérées par des lois nationales et après consultation des partenaires sociaux. Ainsi, l'employeur pourrait être directement sollicité, au lieu des assurances, durant le congé de maternité. Par ailleurs, certaines catégories de femmes pourraient être expressément exclues de la convention.

Selon une pratique bien établie, la Suisse ne ratifie que les conventions de l'OIT dont les dispositions concordent avec le droit et les pratiques nationales. Seules les conventions fondamentales de l'OIT, que la Suisse a aujourd'hui toutes ratifiées, ont donné lieu à des exceptions. Suite à la votation du 13 juin 1999, il n'existe toujours ni assurance maternité, ni congé de maternité en Suisse, raison pour laquelle il ne sera pas possible de ratifier la convention.

Le présent rapport a été soumis à la Commission fédérale pour les affaires de l'OIT.

Cette commission extra-parlementaire, composée de membres de l'administration et de partenaires sociaux, a été mise en place l'année dernière, lors de la ratification de la convention no 144 de l'OIT. La commission approuve le présent rapport.

5602

Rapport 1

Introduction

Conformément à l'art. 19, al. 5 et 6, de la constitution de l'OIT, les Etats membres ont l'obligation de soumettre à leur parlement les conventions et les recommandations internationales du travail adoptées lors de chaque session de la CIT. Cette soumission doit avoir lieu dans un délai d'un an après la clôture de chaque session de la CIT. Ce délai peut être prolongé de six mois au maximum.

Dans le présent rapport, nous analysons la convention no 183 concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952, adopté le 15 juin 2000, complétée par la recommandation no 191, ainsi que le retrait de conventions obsolètes, à savoir: la convention (no 31) sur la durée du travail (mines de charbon), 1931; la convention (no 46) (révisée) sur la durée du travail (mines de charbon), 1935; la convention (no 51) de réduction de la durée du travail (travaux publics), 1936; la convention (no 61) de réduction de la durée du travail (textile), 1937; et la convention (no 66) sur les travailleurs migrants, 1939.

2

Convention (no 183) concernant la révision de la convention (no 103) (révisée) sur la protection de la maternité, 1952

2.1

Partie générale

A l'occasion de sa 268e session (mars 1997), le Conseil d'administration du Bureau international du Travail (BIT) a décidé de porter la question de la révision de la convention (no 103) (révisée), et de la recommandation (no 95) sur la protection de la maternité, 1952, à l'ordre du jour de la 87e session de la CIT.

En se fondant sur les conclusions adoptées lors de la première discussion, en juin 1999, le BIT, conformément à l'art. 39 du Règlement de la Conférence, a préparé les projets d'une convention et d'une recommandation qui ont servi de base à la deuxième discussion lors de la 88e session de la CIT. Le 15 juin 2000, la CIT a adopté la convention (no 183) concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952, et la recommandation (no 191) l'accompagnant. Cette convention remplace la convention (no 103) sur la protection de la maternité (révisée) de 1952 (cf. art. 13 de la convention (no 183) ), qui n'avait suscité que peu de ratifications.

L'adoption d'une nouvelle convention sur la protection de la maternité est le résultat des importants efforts déployés par le BIT depuis le milieu des années quatre-vingtdix pour évaluer la pertinence et l'efficacité des normes internationales du travail afin de veiller à ce qu'elles soient en phase avec le monde d'aujourd'hui. En effet, depuis l'adoption de la convention (no 103) en 1952, le rôle des femmes dans la société a changé, la structure de l'emploi a considérablement évolué et le taux d'activité des femmes a beaucoup progressé, d'où l'importance accrue de protéger la maternité des travailleuses.

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La nouvelle convention présente des avancées importantes en étendant la protection accordée aux femmes pendant la grossesse et l'allaitement, même si, dans certains domaines, elle introduit, par un renvoi à la législation et à la pratique nationales, une souplesse accrue dans le but d'obtenir un plus grand nombre de ratifications. A cet égard, la Suisse peut se rallier aux objectifs poursuivis par ce nouvel instrument.

2.2

Partie spéciale

2.2.1

Explication des dispositions et position de la Suisse à l'égard de la convention

La convention (no 183) comporte 21 articles, dont seuls les onze premiers sont des dispositions de fond. Pour savoir si la Suisse remplit les exigences de la convention, il convient de comparer les dispositions de la convention avec la législation et la pratique suisses, c'est-à-dire avec les dispositions du Code des obligations (CO; RS 220), de la loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail (LTr; RS 822.11) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance 1 (OLT1; RS 822.111), de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (LEg; RS 151) et de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10).

Selon l'art. 1 de la convention, le terme «femme» désigne toute personne du sexe féminin, sans discrimination aucune. Il s'agit d'une définition très large. Le terme «discrimination» doit être entendu dans le sens que lui donne la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958. De plus, ces définitions se retrouvent dans la convention pour l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes (RS 0.108), et dans la convention du 21 décembre 1965 pour l'élimination de la discrimination raciale (RS 0.104), également ratifiées par la Suisse.

Par ailleurs, la convention no 183 exclut toute discrimination fondée sur la situation matrimoniale, reprenant en cela la portée de l'art. 2 de la convention (no 103). La définition du mot «enfant» est calquée sur la précédente. En particulier, elle vise également l'enfant adoptif. Toutefois, les dispositions de la convention ne confèrent pas à ce dernier une protection spécifique. De manière générale, l'art. 8 de la Constitution fédérale garantit l'égalité de traitement et la non-discrimination; de plus, la Suisse a ratifié la convention no 111 (voir message FF 1960 I 29) de l'OIT, la convention européenne des droits de l'homme (art. 14; RS 0.101) et le pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 26; RS 0.103.2). De la sorte, cette disposition de la convention no 183 ne pose aucun problème pour le droit suisse.

L'art. 2 de la convention détermine le champ d'application personnel de la convention.

En vertu du par. 1 de l'art. 2, la convention s'applique à toutes les femmes employées, y compris les femmes qui le sont dans le cadre de formes
atypiques de travail dépendant. L'expression «femmes employées» comprend toutes les femmes engagées dans une relation d'emploi, sans considération de la forme du contrat de travail (oral ou écrit, formel ou tacite) ou du type de rémunération. Est déterminante la relation d'emploi indépendamment du type de travail ou de son lieu. La LTr s'applique en principe à toutes les entreprises publiques ou privées qui emploient un ou plusieurs travailleurs de façon durable ou temporaire (art. 1, al. 1 et 2, LTr).

Selon le CO, par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage pour une durée déterminée ou indéterminée à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire; entre également dans la notion de contrat de travail le travail à 5604

temps partiel (art. 319 CO). Le champ d'application de la convention recouvre donc celui de la LTr et du CO et ce premier paragraphe peut donc être accepté.

Le par. 2 de l'art. 2 autorise l'exclusion partielle ou totale du champ d'application de la convention de catégories limitées de travailleurs si l'application de la convention à ces catégories soulève des problèmes spéciaux d'une importance particulière.

Le par. 3 de l'art. 2 prévoit les modalités d'application du précédent paragraphe.

La LTr exclut de son champ d'application non seulement certaines catégories de personnes (en particulier les travailleurs à domicile, voir art. 3 LTr), mais également certains types d'entreprises (notamment les entreprises agricoles, les transports publics et les administrations publiques, voir art. 2 LTr). Pour les administrations publiques, il convient de préciser qu'en vertu de l'art. 3a LTr, l'art. 35 LTr sur la protection de la santé de la travailleuse durant la grossesse est applicable à l'administration fédérale ainsi qu'aux administrations cantonales et communales. La clause de souplesse prévue par le par. 2 est-elle suffisante pour envisager une acceptation de ce paragraphe? Cette question peut souffrir de rester ouverte, attendu que d'autres dispositions de cet instrument ne sont pas compatibles avec le droit suisse (cf. infra).

L'art. 3 de la convention est une disposition générale concernant la protection de la santé de la mère et de l'enfant. Il exige que des mesures soient prises par les Etats membres, après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives, afin que les femmes enceintes ou qui allaitent ne soient pas contraintes d'accomplir un travail préjudiciable à leur santé ou à celle de leur enfant ou comportant un risque significatif pour la santé de la mère ou celle de l'enfant. Sur la base de la compétence donnée au Conseil fédéral par l'art. 35, al. 2, LTr, l'art. 62 OLT 1 réglemente l'exercice des activités dangereuses ou pénibles en cas de grossesse et de maternité, activités qui ne sont permises que lorsque l'inexistence de toute menace pour la santé de la mère ou celle de l'enfant est établie sur la base d'une analyse de risque ou que la prise de mesures de protection adéquates permet d'y parer. L'art. 3 peut être accepté.

L'art. 4 de la
convention traite du congé de maternité proprement dit. Toute femme à laquelle la convention s'applique a droit à un congé de maternité d'une durée de quatorze semaines au moins (par. 1). Le congé de maternité doit comprendre une période de congé obligatoire de six semaines après l'accouchement, à moins qu'à l'échelon national il n'en soit convenu autrement par le gouvernement et les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs (par. 4). La LTr ne prévoit pas de congé de maternité en tant que tel (sous-entendant l'idée de rémunération); elle interdit l'emploi des femmes durant les huit semaines suivant l'accouchement; ensuite et jusqu'à la seizième semaine, elles ne peuvent être occupées que si elles y consentent (art. 35a, al. 3, LTr). L'art. 4 n'est donc pas acceptable.

L'art. 5 de la convention vise l'éventualité d'une maladie, de complications ou d'un risque de complications résultant de la grossesse ou de l'accouchement. Dans ce cas, un congé supplémentaire doit être accordé. Ce congé ne fait pas partie du congé de maternité susmentionné, mais il doit être octroyé dans les circonstances précises indiquées, avant ou après la période du congé de maternité. La nature et la durée maximale de ce congé peuvent être précisées conformément à la législation et à la pratique nationales. Au plan suisse, ce congé sera un congé de maladie. Le fait qu'à l'issue du congé de maternité, une femme s'absente de son poste de travail en raison d'une maladie ne soulève pas de problème. Toutefois, la question de la rémunération 5605

accordée durant ce «congé supplémentaire» se pose dans les mêmes termes qu'à l'art. 4 (cf. infra ad art. 6).

L'art. 6 de la convention règle la question de l'octroi de prestations en espèces et en nature pendant le congé visé aux art. 4 et 5.

Alors que le par. 1 de l'art. 6 pose le principe, les par. 2 à 4 fixent les critères relatifs au niveau des prestations en espèces à assurer. Ce niveau doit être tel que la femme peut subvenir à son entretien et à celui de son enfant dans de bonnes conditions de santé et selon un niveau de vie convenable (par. 2). Lorsque les prestations versées au titre du congé de maternité visé à l'art. 4 sont déterminées sur la base du gain antérieur, le montant de ces prestations ne doit pas être inférieur aux deux tiers du gain antérieur de la femme ou du gain tel que pris en compte pour le calcul des prestations (par. 3). Lorsque les prestations sont déterminées par d'autres méthodes, leur montant doit être du même ordre de grandeur que celui qui résulte en moyenne de l'application du par. 3 (par. 4). Tout Etat partie doit garantir que les conditions requises pour bénéficier des prestations en espèces puissent être réunies par la grande majorité des femmes auxquelles la convention s'applique (par. 5).

L'art. 324a, al. 3, CO prévoit qu'en cas de grossesse et d'accouchement de la travailleuse, l'employeur a les mêmes obligations de verser le salaire durant un temps limité que si la travailleuse était malade ou accidentée (art. 324a, al. 1 et 2). Toutefois, l'obligation de l'employeur de verser le salaire est limitée dans le temps: à 3 semaines pendant la première année de service et, ensuite, à une période plus longue, fixée équitablement, compte tenu de la durée des rapports de travail et des circonstances particulières. Pour des raisons de simplification, certains tribunaux (bernois, zurichois et bâlois) ont élaboré des échelles qui indiquent le nombre de semaines de salaire auquel ont droit les travailleurs en fonction des années de service, échelles qui servent maintenant de référence. Ainsi, les prestations en espèces prévues par le CO ne permettent pas toujours à la femme de subvenir à son entretien et à celui de son enfant. En effet, il arrive que même les huit semaines d'interdiction de travailler, prévues par la LTr, ne soient pas totalement payées. Par exemple,
selon l'«échelle bernoise», il faut être dans la 3e année des relations de travail pour que l'employeur soit obligé de verser le salaire durant les huit semaines d'interdiction de travailler prévue par la LTr (dans la 10e année de service pour avoir 16 semaines payées). De plus, si, durant l'année de service, la travailleuse est tombée malade ­ que ce soit ou non en relation avec la maternité ­ son droit au paiement du salaire sera réduit du nombre de jours de maladie.

Des prestations en espèces peuvent également être octroyées en cas de maternité dans le cadre de la LAMal. Cependant, l'assurance des indemnités journalières est facultative. Dans l'hypothèse où une femme a conclu une telle assurance, elle a droit à des prestations de maternité si, lors de l'accouchement, elle était au bénéfice d'une assurance depuis au moins 270 jours sans interruption de plus de trois mois.

L'assureur doit verser les prestations durant seize semaines, dont au moins huit après l'accouchement. Ces prestations ne peuvent être imputées sur la durée de versement des indemnités journalières en cas de maladie et doivent être allouées même si cette durée est expirée (art. 74 LAMal). Toutefois, si la femme est malade à l'issue du congé de maternité et qu'elle a épuisé son droit à des indemnités journalières en cas de maladie (art. 72, al. 3, LAMal), elle ne bénéficie plus de prestations en espèces de l'assurance-maladie durant le congé supplémentaire prévu à l'art. 5 de la convention.

Concernant le niveau des prestations, l'assureur convient avec le preneur d'assurance du montant des indemnités journalières assurées (art. 72, al. 1, LAMal). Les 5606

assureurs ne sont pas tenus de proposer un montant minimal d'indemnité. Les caisses limitent souvent l'assurance individuelle d'indemnités journalières au sens de la LAMal à 6, 10 ou 30 francs par jour.

Nos prescriptions nationales ne remplissant pas les exigences de la convention, les par. 2, 3, 4 et 5 ne peuvent pas être acceptés.

Le par. 6 de l'art. 6 énonce le principe selon lequel une assistance sociale doit être garantie aux femmes qui ne satisfont pas aux conditions prévues pour bénéficier des prestations en espèces. Le droit d'obtenir de l'aide dans des situations de détresse figure à l'art. 12 de la Constitution fédérale. En Suisse, l'assistance sociale relève de la compétence des cantons; elle intervient de manière complémentaire et subsidiaire et ne prend en charge que les personnes qui ne sont pas couvertes par les assurances sociales, qui ne le sont plus ou dont le revenu est insuffisant. Le droit suisse en matière d'assistance sociale étant compatible avec ce qu'exige la convention, le par.

6 peut être accepté.

Selon le par. 7 de l'art. 6, des prestations médicales doivent être assurées à la mère et à son enfant, conformément à la législation nationale ou de toute autre manière conforme à la pratique nationale. Ces prestations doivent comprendre les soins prénatals, les soins liés à l'accouchement, les soins postnatals et l'hospitalisation lorsqu'elle est nécessaire. En cas de maternité, la LAMal prévoit des prestations en nature octroyées dans le cadre de l'assurance des soins (assurance obligatoire pour toute la population).

Cette assurance prend en charge les examens de contrôle effectués par un médecin ou une sage-femme ou prescrits par un médecin, pendant et après la grossesse; l'accouchement à domicile, dans un hôpital ou dans une institution de soins semi-hospitaliers, ainsi que l'assistance d'un médecin ou d'une sage-femme; une contribution de 100 francs pour un cours collectif de préparation à l'accouchement dispensé par une sagefemme; les conseils en cas d'allaitement s'ils sont prodigués par une sage-femme ou par une infirmière ayant suivi une formation spéciale dans ce domaine (art. 29 LAMal). Si la femme est malade durant la grossesse ou après l'accouchement, elle aura droit aux prestations générales en cas de maladie. La durée de prise en charge des soins médicaux
et pharmaceutiques est illimitée. La législation suisse concernant l'assurance obligatoire des soins (LAMal, titre 2) est compatible avec ce paragraphe.

Le par. 8 de l'art. 6 prévoit, d'une part, que les prestations afférentes au congé doivent être assurées par une assurance sociale obligatoire. par prélèvement sur des fonds publics ou d'une manière déterminée par la législation et la pratique nationales. D'autre part, cette disposition prescrit que l'employeur ne doit pas être tenu personnellement responsable du coût direct de toute prestation financière de ce genre due à une femme qu'il emploie sans y avoir expressément consenti. Deux exceptions à la non-responsabilité de l'employeur du coût des prestations financières dues à une salariée sont prévues: premièrement, un Etat membre qui aurait été doté d'un tel système avant le 15 juin 2000 (date d'adoption de la convention) peut le conserver et ratifier la convention sans avoir à amender sa législation; deuxièmement, un Etat membre ayant ratifié la convention peut, ultérieurement, adopter un tel système, sous réserve que le gouvernement ait l'accord des organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs. La convention comporte une grande souplesse sur ce point, permettant de tenir compte de différents systèmes.

En résumé, le droit suisse ne connaissant toujours pas de congé de maternité payé, l'art. 6 ne peut pas être accepté.

5607

L'art. 7 de la convention introduit une clause de souplesse destinée à préserver la situation des pays dont l'économie et le système de sécurité sociale sont insuffisamment développés. Cet article ne saurait être invoqué par la Suisse.

L'art. 8 de la convention vise à garantir une protection suffisante de l'emploi.

En vertu du par. 1 de l'art. 8, il est interdit à l'employeur de licencier une femme pendant la grossesse, le congé de maternité ou le congé en cas de maladie ou de complications, pendant une période suivant son retour de congé à déterminer par la législation nationale, sauf pour des motifs sans lien avec la grossesse, la naissance de l'enfant et ses suites ou l'allaitement. Conformément à l'art. 336c, al. 1, let. C, CO, l'employeur ne peut pas résilier un contrat de travail pendant la grossesse et au cours des seize semaines qui suivent l'accouchement. Seule la résiliation pour justes motifs au sens de l'art. 337 CO est possible. Les justes motifs sont notamment toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné son congé la continuation des rapports de travail (art. 337, al. 2, CO). Un licenciement durant cette période de protection, sans être basé sur un juste motif, est nul (art. 337c, al. 2, CO). Dès lors, à moins d'avoir un juste motif, un employeur soumis au droit suisse ne peut pas résilier le contrat de travail pendant la durée de la protection, même si son motif n'a pas de lien avec la grossesse, la naissance de l'enfant et ses suites ou l'allaitement. Par exemple, un licenciement pour des motifs économiques serait nul en Suisse, alors qu'il serait admissible au regard de la convention (no 183).

Attendu que notre législation est plus protectrice envers les travailleuses que ce que prévoit la convention, ce paragraphe peut donc être accepté.

Le par. 2 de l'art. 8 prescrit qu'à l'issue du congé de maternité, la femme doit être assurée de retrouver le même poste ou un poste équivalent rémunéré au même taux.

Le fait de ne pas retrouver sa place de travail ou un poste équivalent serait considéré comme une modification du contrat de travail; en droit suisse, il ressort de la notion même de contrat que toutes modifications intervenant après la conclusion du contrat de travail doivent résulter de la manifestation
concordante de volonté des cocontractants. Si les parties sont en désaccord sur la modification du contrat ­ donc ici sur le fait que la femme ne retrouve pas sa place ou un poste équivalent ­, l'employeur qui a proposé la modification du contrat doit le résilier et, s'il ne le fait pas, les anciennes conditions, sur lesquelles les parties étaient d'accord, restent en vigueur (art. 320 CO; ATF 109 II 327). Par ailleurs, l'art. 3 LEg interdit tout licenciement qui, même après la période de protection de l'art. 336c, al. 1, let. c, CO, serait fondé sur une discrimination à raison du sexe, notamment sur la situation familiale ou la grossesse (art. 3, al. 1 et 2, LEg). Il suffirait alors à la travailleuse concernée de rendre vraisemblable l'existence d'une discrimination pour que celle-ci soit présumée (art. 6 LEg). La violation de l'interdiction de discriminer peut entraîner dans ce cas une indemnité pouvant aller jusqu'à six mois de salaire (art. 5, al. 2 et 4, LEg). Par conséquent, il est possible de considérer que la protection offerte par le CO correspond sur ce point aux exigences du par. 2.

L'art. 8 de la convention peut être accepté intégralement.

L'art. 9 de la convention impose aux Etats membres de prendre des mesures propres à garantir que la maternité ne constitue pas une source de discrimination en matière d'emploi (par. 1). Le principe de non-discrimination prévu par l'art. 8 de la Constitution fédérale est notamment mis en oeuvre par la LEg dont l'art. 3 interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, en particulier, s'agissant des femmes, en se fondant sur leur grossesse. A cet égard, nous renvoyons également aux art. 4, 5 et 6 LEg.

5608

L'interdiction des tests de grossesse est l'une des mesures énoncées au par. 2 de l'art. 9 comme donnant effet au principe consacré par le par. 1. Toutefois, cette disposition autorise que des tests de grossesse soient exceptionnellement pratiqués pour des raisons de sécurité et de santé. Selon la législation suisse, l'interdiction d'un test de grossesse découle implicitement des dispositions sur la protection de la personnalité (notamment de l'art. 328 CO). De plus, l'art. 3, al. 1 et 2, LEg interdit toute discrimination à raison du sexe lors de l'embauche ou de l'attribution des tâches, et en particulier toute discrimination fondée sur l'état civil, la situation familiale ou la grossesse. Des tests de grossesse pourraient toutefois être considérés comme mesure objectivement justifiée, et par conséquent admissible, pour des travaux qui ne peuvent être exercés en étant enceinte (mannequins, danseuses, activités nocives pour le déroulement de la grossesse, etc.). L'art. 9 peut donc être accepté dans son intégralité.

L'art. 10 de la convention garantit à la femme le droit à une ou plusieurs pauses quotidiennes ou à une réduction journalière de la durée du travail pour allaiter son enfant (par. 1) qui doivent être comptées comme temps de travail et rémunérées en conséquence (par. 2). La LTr prévoit que l'employeur doit donner aux mères le temps nécessaire pour l'allaitement (art. 35a, al. 2). L'art. 60, al. 2, OLT 1 prescrit qu'au cours de la première année de vie de l'enfant, l'intégralité du temps consacré à l'allaitement est réputé temps de travail lorsque la travailleuse allaite son enfant dans l'entreprise; lorsqu'elle quitte son lieu de travail pour allaiter, la travailleuse peut compter comme temps de travail la moitié du temps consacré à l'allaitement. Le problème de la rémunération de ces pauses n'est pas réglé par la loi, mais tant que les parties ne sont pas convenues du contraire, ce temps, réputé temps de travail, est en principe rémunéré. Savoir si le fait que ce temps n'est pas systématiquement rémunéré constitue ou non un obstacle à une ratification, est une question qui peut rester ouverte vu les autres obstacles existants.

Aux termes de l'art. 11 de la convention, tout Etat partie doit examiner périodiquement, en consultation avec les organisations représentatives des employeurs
et des travailleurs, l'opportunité d'étendre la durée du congé de maternité et d'augmenter le montant ou le taux des prestations en espèces.

Les art. 12 à 21 de la convention comportent les dispositions finales habituelles, qui n'appellent pas de commentaire particulier. Seul l'art. 13 de la convention mérite d'être relevé, dans la mesure où il prévoit que la convention no 183 remplace la convention no 103, et ceci dès son entrée en vigueur. Deux Etats membres de l'OIT ayant ratifié la nouvelle convention no 183 à ce jour (Italie et Slovaquie), celle-ci entrera en vigueur le 7 février 2002 et, à partir de cette date, la ratification de la convention no 103 n'est plus possible.

2.2.2

Position au regard de la recommandation

La recommandation (no 191) n'a aucun caractère contraignant. La question de la ratification ne se pose donc pas, raison pour laquelle nous nous limitons à résumer le contenu de cette recommandation sans chercher à établir si elle est ou non compatible avec la législation suisse en vigueur.

5609

Ce texte recommande notamment aux Etats membres de porter la durée du congé de maternité à 18 semaines au moins et le niveau des prestations en espèces à un montant égal à la totalité du gain antérieur. En outre, elle invite les Etats membres à adopter des mesures en vue d'assurer l'évaluation de tout risque que peut comporter le lieu de travail pour la sécurité et la santé de la femme enceinte ou qui allaite et de son enfant. Enfin, la recommandation demande d'étendre la protection à d'autres types de congés apparentés (congé parental, congé en cas d'adoption).

2.2.3

Conclusion

Ce nouvel instrument introduit des améliorations par rapport à la convention no 103, par exemple en étendant le champ d'application personnel et en augmentant la durée du congé de maternité. Mais parallèlement, il prévoit des assouplissements (en particulier l'art. 6, par. 8) afin de susciter un plus grand nombre de ratifications. Cela étant, le droit suisse n'est pas compatible actuellement avec les dispositions de la convention. Nous renonçons donc à vous proposer de ratifier la convention (no 183) concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952. Nous vous suggérons toutefois que ce nouvel instrument international et la présente analyse constituent un élément important du débat sur une future législation en matière de congé de maternité. Une fois cette législation adoptée, nous proposons que la Commission tripartite sur les questions de l'OIT soit à nouveau saisie de ce dossier afin d'examiner la question de la ratification de cette convention.

La Commission fédérale tripartite pour les affaires de l'OIT qui, conformément à la convention no 144, émet des recommandations au Conseil fédéral en matière d'affaires ayant trait à l'OIT, adhère à cette conclusion. Alors que les représentants des travailleurs demandaient au Conseil fédéral de marquer sa volonté de ratifier la convention à une date ultérieure, les représentants des employeurs rappelaient la votation populaire du 13 juin 1999 et les travaux de réforme en cours. Après l'entrée en vigueur d'une assurance maternité, le Conseil fédéral examinera à nouveau la convention sous l'angle de sa compatibilité avec la pratique et le droit suisse.

3

Retrait de la convention (no 31) sur la durée du travail (mines de charbon), 1931; de la convention (n° 46) (révisée) sur la durée du travail (mines de charbon), 1935; de la convention (no 51) de réduction de la durée du travail (travaux publics), 1936; de la convention (no 61) de réduction de la durée du travail (textile), 1937; et de la convention (no 66) sur les travailleurs migrants, 1939

Les conventions de l'OIT sont aujourd'hui au nombre de 183. Au cours des 80 ans d'existence de l'organisation, nombre de ces conventions ont été révisées et nouvellement numérotées. Lors de sa 85e session, en juin 1997, la CIT a complété l'art. 19 de sa constitution par le par. 9, qui permet d'abolir et de retirer les conventions obsolètes, voire jamais entrées en vigueur.

5610

Selon cet art. 19, par. 9, de la Constitution de l'OIT, une convention est jugée obsolète si elle a perdu son objet ou n'apporte plus de contribution utile à l'accomplissement des objectifs de l'organisation. Les cinq conventions concernées n'avaient en outre été ratifiées que par un maximum de 10 Etats; la Suisse n'en avait ratifié aucune. Le retrait des conventions a été approuvé à la fois par le groupe de travail sur la révision des normes internationales de travail du conseil d'administration de l'OIT et par 68 des 69 Etats ayant participé en 1999 à une procédure de consultation de l'OIT. Seule l'Indonésie a émis des réserves. L'OIT a approuvé le retrait définitif des cinq conventions en juin 2000, engageant ce faisant la première étape de la rationalisation de l'appareil normatif et contribuant ainsi à renforcer l'organisation.

5611