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FEUILLE FÉDÉRALE 96e année

Berne, le 17 août 1944

Volume I

Paraît, en règle générale, une semaine sur deux.

Prix:, 20 francs par an; 10 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnements ou de remboursement.

Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des hoirs K.-J.Wyss, société anonyme, à Berne.

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'allocation de subventions à une association suisse des coopératives de cau-tionnements hypothécaires.

(Du 9 août 1944.)

Monsieur le Président et Messieurs, Le 18 décembre 1942, M. Seiler a déposé au Conseil national une motion nous invitant à étudier les moyens d'assurer sur une base collective les hypothèques en dernier rang et en particulier de consolider le développement des coopératives de cautionnement, en raison des effets défavorables que le nouveau droit en matière de cautionnement exerce sur l'octroi des crédits bancaires. Cette motion a été adoptée le 10 juin 1943 par le Conseil national, le 23 septembre 1943 par le Conseil des Etats et acceptée, sous réserve, par le Conseil fédéral.

Les questions soulevées par la motion ont été soumises à un examen approfondi. Nous vous ferons part, tout d'abord, de quelques considérations sur le problème des hypothèques de rang postérieur et la manière dont on s'est efforcé de le résoudre; après quoi nous examinerons, en détail, la question des coopératives de cautionnements hypothécaires. Nous nous exprimerons ensuite sur les autres solutions proposées, ainsi que sur la façon dont on pourrait grouper les coopératives avec l'appui de la Confédération. En dernier lieu, nous nous occuperons de la question de leur imposition et tirerons les conclusions nécessaires.

I. LES HYPOTHÈQUES DE RANG POSTÉRIEUR Les placements immobiliers ont toujours exercé un attrait particulier en raison de leur sûreté. Il faut distinguer entre les placements directs que l'acheteur opère sous forme de paiement et les placements indirects que Feuille jédérale. 96« année. Vol. I.

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les banques hypothécaires, les sociétés d'assurances et les particuliers constituent en prêtant des fonds sur les immeubles dont le prix n'est pas entièrement payé par le propriétaire. Grâce à la liquidité constante du marché des capitaux, ces deux sortes de placements n'ont, d'une façon générale, guère donné lieu à des difficultés; cela est particulièrement vrai depuis l'introduction de la lettre de gage en 1931. Aujourd'hui, des hypothèques de premier rang peuvent être constituées, jusqu'aux deux tiers de la valeur d'estimation, plus facilement et plus avantageusement que ce ne fut jamais le cas précédemment. Il n'est pas rare actuellement que les acquéreurs d'immeubles, cherchant avant tout à opérer un placement, s'engagent à verser des montants tels que des hypothèques de rang postérieur au premier n'entrent pas en considération.

Lorsqu'il reste un écart entre le paiement opéré par l'acheteur au moyen de ses fonds propres et le montant de la première hypothèque, cet écart n'est cependant pas toujours facile à combler, bien que des prêts à concurrence de 66 à 80 pour cent d'une valeur d'estimation prudemment calculée puissent encore être considérés en général comme de bons placements. On a déclaré, de différents côtés, que des sûretés complémentaires ne devraient pas être réclamées pour ces prêts garantis dans les limites de 66 à 80 pour cent par une hypothèque de la valeur d'estimation. La pratique a cependant montré que la valeur des immeubles, même s'il s'agit de maisons d'habitation ordinaires, peut subir à la longue des fluctuations de nature à diminuer la sûreté des placements garantis par des hypothèques jusqu'à 80 pour cent de la valeur d'estimation. C'est pour cette raison que différentes banques hypothécaires n'accordent aucun crédit de ce genre et que les autres exigent en tout cas un intérêt plus élevé et, le plus souvent, des sûretés supplémentaires. Si des sûretés réelles ne peuvent alors être fournies, le cautionnement entre généralement en considération. Ainsi l'hypothèque de rang postérieur touche à la fois au domaine de la garantie réelle et à celui de la garantie personnelle. Ce caractère mixte revêt de l'importance, en Suisse comme ailleurs, dès que les circonstances économiques commandent, ainsi qu'il arrive de temps à autre, de ne prêter des capitaux qu'avec la plus grande
prudence.

Si cette question agite souvent l'opinion et si l'on a l'impression qu'il y aura toujours du mécontentement, il faut l'attribuer à plusieurs circonstances.

Relevons tout d'abord que la limite des prêts peut varier suivant les circonstances. En temps de chômage et de pénurie de logements, lorsqu'il s'agit d'encourager la construction, on considère comme raisonnables des prêts dépassant 80 pour cent de la valeur du gage. Mais si une crise immobilière vient à se produire, on est enclin à dire que les créanciers au bénéfice d'hypothèques de rang postérieur doivent supporter eux-mêmes les conséquences de leurs placements imprudents.

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Notons, en second lieu, que nombre de prêts dépassent malheureusement la limite de 80 pour cent. Le désir de posséder sa propre maison n'est pas répandu dans les seuls milieux disposant de capitaux suffisants.

Avec le fallacieux espoir d'assister bientôt à une hausse des valeurs immobilières, on achète souvent des immeubles à un prix trop élevé pour les ressources dont on dispose. Il arrive aussi que des « petites gens » cherchent à augmenter le rendement de leurs économies en achetant un immeuble.

D'autres personnes encore désirent simplement s'assurer un logement ou des locaux pour l'exercice d'une activité. Grande est leur déception lorsque l'insuffisance de leurs ressources font d'elles les premières victimes de conditions nouvelles. Dans tous ces cas, on ne parle, bien à tort, que des difficultés que présente la constitution d'hypothèques de rang postérieur. Les coopératives de cautionnements hypothécaires ne peuvent être d'aucune utilité en l'occurrence. Si l'on ne veut pas laisser les choses suivre leur cours, il convient de recourir à des mesures de désendettement, comme cela a déjà été fait dans quelques cantons, II y a bien des années déjà que l'on se plaint chez nous, comme en Allemagne, des difficultés que rencontre la constitution d'hypothèques de rang postérieur. Ces difficultés ont notamment été signalées au Conseil national par M. Seiler, auteur de postulats déposés les 10 juin 1921, 22 décembre 1927 et 10 juin 1937.

Le premier de ces postulats fut à l'origine d'une grande conférence qui se tint à Olten le 19 août 1922 et où il fut .surtout question de la protection -- dans les formes de l'assurance -- des créanciers garantis par une hypothèque de rang postérieur. Une commission d'étude, instituée pour examiner cette question, arriva à des conclusions négatives. Sur ces entrefaites, la première coopérative de cautionnements hypothécaires fut fondée à Baie, en 1925. Le mouvement coopératif, qui avait déjà produit de nombreux effets favorables au profit des paysans, des consommateurs et des artisans, commença aussi à se développer dans la classe des propriétaires fonciers moyens.

Le deuxième postulat Seiler préconisait l'institution d'une assurance des crédits garantis par des hypothèques de rang postérieur. On proposait, notamment, d'émettre des obligations à primes pour alimenter
un fonds de réassurance, de faire subventionner par la Confédération les coopératives de cautionnements et d'exonérer leurs parts sociales du droit de timbre fédéral. Au cours des pourparlers avec les autorités fédérales, il fut question de l'octroi d'un prêt de 2 millions de francs au taux de 2 pour cent. Vers le milieu de la dernière décennie, la situation étant devenue critique sur le marché hypothécaire, il se forma à Zurich une association pour la protection des intérêts hypothécaires suisses (Schutzverband schweizerischer Hypothekeninteressen). Dans plusieurs autres localités se constituèrent des associations de débiteurs et cautions, qui réclamaient l'assurance des

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dettes hypothécaires et le désendettement partiel. Le 1er juin 1936 entra en vigueur, grâce à l'entremise de la Confédération, un « gentlemen's agreement » prévoyant que les hypothèques constituées entre 66 et 100 pour cent de la valeur d'estimation des immeubles ne pouvaient être dénoncées au remboursement si les sûretés étaient suffisantes, si les intérêts et les amortissements étaient payés régulièrement et si l'objet du gage était entretenu convenablement. Les amortissements annuels, déterminés par la diminution de la valeur du gage et l'existence de garanties complémentaires, ne devaient, en règle générale, pas être supérieurs à 5 pour cent. Au mois de septembre de la même année, le gonvernement soleurois proposa aux chambres fédérales de reviser la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite en faveur des débiteurs hypothécaires et des cautions. Pour le cas où sa proposition n'aurait pas de suite, il demandait que la compétence nécessaire fût accordée aux cantons. Il proposait en outre d'introduire dans la loi sur le désendettement de domaines agricoles une disposition autorisant les cantons à prendre des mesures analogues en faveur d'autres groupements économiques.

Dans notre rapport du mois de janvier 1937, nous exprimâmes la crainte que des mesures de ce genre ne diminuent encore plus la valeur des immeubles. La commission instituée par les chambres en vue d'examiner cette initiative cantonale se rangea à nos vues tout en recommandant de prolonger le « gentlemen's agreement ». A cette occasion, M. Seiler présenta, le 10 juin 1937, un nouveau postulat soulevant la question de la réassurance en faveur des coopératives de cautionnements hypothécaires.

Le 22 janvier 1939, les associations de débiteurs et cautions se groupèrent en une association suisse. Les efforts déployés par cette association en vue d'obtenir l'institution d'une assurance cantonale obligatoire pour les hypothèques n'ont cependant pas encore abouti. Sur ces entrefaites, l'association soleuroise des débiteurs et cautions fonda, en 1943, une caisse d'assurances hypothécaires à caractère coopératif.

Mentionnons enfin que la loi fédérale revisant le titre vingtième du code des obligations, entrée en vigueur le 1er juillet 1942, cherche à mettre fin aux abus se manifestant toujours plus dans le domaine du cautionnement. Comme
les milieux intéressés l'affirment, les nouvelles dispositions entravent toutefois inévitablement les opérations de cautionnement destinées à garantir des hypothèques de rang postérieur, pouvant être tenues pour « saines ». Si le cautionnement de personnes physiques dépasse 2000 francs, il doit revêtir dorénavant la forme authentique; lorsqu'il s'agit de personnes mariées, l'assentiment du conjoint est maintenant nécessaire. Tout cautionnement de personnes physiques s'éteint dans le délai de vingt ans dès sa constitution. Ces dispositions ne sont pas en vigueur depuis un temps suffisant pour qu'on puisse se rendre définitivement compte de leurs répercussions. Il semble cependant, comine la motion

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le relève, que la constitution de cautionnements simples soit devenue plus difficile, de sorte que les cautionnements collectifs acquerront plus d'importance. Ils ont un caractère moins dépendant et doivent dès lors être préférés du point de vue social. Différentes coopératives de cautionnements hypothécaires relèvent, dans leur rapport sur la gestion en 1943, que les prescriptions qui rendent plus difficile le cautionnement individuel n'exercent encore aucune influence sur la marche de leurs affaires. Cela est dû au fait que la construction due à l'initiative privée subit un fort ralentissement; d'autre part, les particuliers accordent des hypothèques de rang postérieur, à défaut d'autres possibilités de placements favorables sans cautionnement.

Dans cet exposé, nous n'avons pas fait mention de toute une série de requêtes présentées verbalement et par écrit aux autorités fédérales par les intéressés. Elles sont encore plus nombreuses que les interventions parlementaires et n'ont jamais fait l'objet d'une décision négative sur le fond. Si elles n'ont pas encore été traitées, c'est parce qu'il importait avant tout de s'occuper de tâches plus urgentes et de se rendre compte du développement que prendraient les coopératives de cautionnements hypothécaires et de déterminer préalablement la forme à donner à une aide de la Confédération. Il s'agit cependant d'un problème qui attend sa solution depuis des dizaines d'années et qui mérite de retenir l'attention des autorités fédérales.

II. LES COOPÉRATIVES DE CAUTIONNEMENTS HYPOTHÉCAIRES Une association d'assurances hypothécaires semble avoir été fondée en Allemagne déjà vers 1870. Chez nous, l'application des principes coopératifs au domaine du cautionnement est de date plus récente. Les plus anciennes institutions sont les coopératives de cautionnements pour fonctionnaires. Une coopérative de cautionnements pour ouvriers agricoles et petits paysans se constitua à Brougg en 1921. A partir de 1923, on voit se fonder des coopératives pour l'artisanat. Parmi les coopératives hypothécaires (que nous appellerons dans la suite simplement « coopératives »), celle de Baie est la plus ancienne. Vient ensuite celle de Soleure, fondée en 1927. D'autres coopératives sont créées à Berne, St-Gall et Zurich en 1928 et à Bienne, Winterthour et Baie-Campagne en 1929. Il
s'agissait de coopératives fondées uniquement par des sociétés locales ou cantonales de propriétaires d'immeubles. Plus tard, des banques et des associations artisanales fondèrent, à leur tour, en collaboration avec des sociétés de propriétaires des coopératives (Schafihouse, 1935; Thurgovie, 1938).

Ces dix coopératives se constituèrent, en 1938, en une union suisse. Depuis lors, il se fonda quelques nouvelles coopératives qui diffèrent un peu des précédentes, n'étant ouvertes, selon les cas, qu'à des agriculteurs ou aux personnes exerçant n'importe quelle profession. Quelques établissements

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hypothécaires ont en outre fondé des organisations de cautionnement pour leurs débiteurs. Ces organisations ne sont qu'en apparence indépendantes.

Vu leur caractère particulier, nous ne nous en occuperons pas.

Les coopératives de cautionnement -- qui font en général payer un modeste droit d'entrée -- facilitent à leurs membres la constitution d'hypothèques de rang postérieur en se portant caution dans les limites de leurs statuts. Les membres souscrivent généralement des parts sociales et versent des primes annuelles. En règle générale, le montant de la souscription s'élève à 5 pour cent et la prime à 5 pour mille de la somme garantie. Depuis le 1er janvier 1944, la coopérative de Baie-Ville n'exige plus qu'une prime de x/3 pour cent, mais elle ne verse, à partir de cette date, plus d'intérêts sur les parts souscrites par les membres qu'elle cautionne. Depuis récemment quelques coopératives ont tendance à cautionner des personnes sans exiger qu'elles acquièrent la qualité de membre. Il suffit que ces personnes fassent des versements dans un fonds de couverture. Le capital social ne peut alors être entamé avant que ce fonds ait été mis à contribution. Comme les prestations des personnes cautionnées ne suffisent jamais à assurer la marche de la caisse les coopératives acceptent des membres libres, qui souscrivent des parts mais ne se font pas cautionner. Ces derniers se composent non seulement d'anciennes personnes cautionnées et d'associations mais surtout de banques hypothécaires cantonales et privées établies sur le territoire où s'exerce l'activité des coopératives. Depuis peu de temps, la coopérative de cautionnements de Soleure bénéficie également de contributions des créanciers, et le canton lui verse des subsides à titre unique et périodique.

Le tableau suivant renseigne sur le financement et l'importance des affaires, à fin 1943, de toutes les coopératives affiliées à l'union suisse.

Coopératives

cautionnées Nombre

Capital social

Membres libres Nombre

819 288 39 787 5 58 127 668 113 291

Total

3195

914800 214668 36300 292400 5600 35700 70300 128181 45000 114700

925 101 120 454 381 135 351 290 108 136

1 857 649 3001

Réserves

Capital social fr.

fr.

Baie-Ville . . .

Soleure . . . .

Berne St-Gall . . . .

Zurich . . . .

Bienne . . . .

Winterthour . .

Baie-Campagne Schaffhouse . .

Thurgovie . . .

Capital total

910500 147500 108700 277 400 145000 67700 188700 154620 84200 125700

Prêts hypothécaires garantis par cautionnements Nombre

fr.

fr.

1825300 214430 362168 117 349 145 000 16241 569800 233 193 150600 -- 103400 32500 259000 26840 154620 52500 129200 23 382 240 400 14000

2210020 3939488 730 435

Montant

fr.

926 10 703 675 226 2 070 492 42 553 900 866 3 624 950 50492 5 57 570 189 670472 127 672 3422 144 118 598 833 302 1 909 955

3341

24 175 102

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Ces dix coopératives se sont portées caution pour 3341 hypothèques, d'une valeur de 24 175 102 francs, avec un capital de 3 939 488 francs et des réserves atteignant 730 444 francs. Le capital a été constitué, à concurrence de 1 857 649 francs, par 3195 personnes cautionnées et, à concurrence de 2 210 020 francs, par 3001 membres libres. Les parts souscrites par les personnes cautionnées représentent 40 pour cent du capital social et des réserves.

Les primes encaissées se sont élevées en moyenne à 142 000 francs, de 1935 à 1941. Les pertes subies par suite de cautionnements ont été de 45 000 francs, ce qui représente un résultat très satisfaisant. Notons cependant que, pendant les années de crise, beaucoup de coopératives ont cherché à éliminer les risques de pertes en acquérant les immeubles que leurs membres ne pouvaient plus garder. C'est ainsi que les huit plus anciennes coopératives possédaient un assez grand nombre d'immeubles de valeur douteuse. Il y a quelques années, les immeubles représentaient plus de la moitié de l'actif de cinq de ces coopératives: les amortissements se sont élevés, en moyenne pendant les années 1935 à 1941, à 29000 francs. L'évolution favorable du marché immobilier a permis, depuis 1940, de réduire ces placements d'environ 2 millions de francs, de sorte qu'il n'y avait en 1943 plus que six coopératives possédant des immeubles acquis dans les conditions susmentionnées. Ces immeubles représentaient, il est vrai, une valeur comptable de 1,8 million. En 1937, la coopérative de Soleure a dû réduire son capital social de 16 pour cent; en 1943, celle de Baie-Campagne a dû réduire de 40 pour cent les parts non dénoncées et de 61,4 pour cent les parts dénoncées. Les banques intéressées ont été obligées d'engager des sommes importantes pour couvrir les pertes probables. Actuellement, la plupart des coopératives sont assainies; toutefois, un petit nombre d'entre elles devront encore enregistrer des pertes dans des limites qu'on peut estimer supportables.

L'aggravation passagère de la situation financière des coopératives a produit, ces dernières années, une diminution de leurs affaires. Cette diminution est également imputable au recul constaté dans la construction et au fait que les prêts garantis par les coopératives sont presque toujours soumis à des amortissements
obligatoires. Une autre conséquence réside dans le fait qu'on s'est montré plus prudent non seulement pour la reprise d'immeubles, mais aussi pour la constitution de cautionnements en général.

Alors que certains statuts autorisent des cautionnements jusqu'à 85 pour cent de la valeur d'estimation des immeubles, les charges moyennes garanties par la plupart des coopératives sont inférieures à 80 pour cent. Quelques coopératives ont dû exiger des garanties supplémentaires dans des cas douteux. Mentionnons que les deux coopératives les plus jeunes n'ont subi, jusqu'à maintenant, aucune perte d'exploitation. Elles le doivent non seulement au fait qu'elles ont pu travailler pendant des années favorables, mais encore à leur prudence. Elles ont ainsi apporté la preuve éclatante

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que le cautionnement collectif en matière hypothécaire est une institution viable. Nous nous félicitons de ce que les plans établis en vue d'un groupement des coopératives avec allocation de subsides fédéraux soient l'oeuvre d'une de ces deux coopératives.

La plupart des coopératives sont autorisées, par leurs statuts, à se porter caution à concurrence d'un montant dix fois supérieur à leurs fonds propres. La régression du nombre des affaires enregistrée par plusieurs coopératives a contribué en pratique à réduire cette proportion de moitié.

La coopérative de Zurich dispose de fonds propres qui atteignent trois fois le montant de ses cautionnements.

Abstraction faite des frais de gérance d'immeubles, les frais généraux proprement dits sont minimes. Eu égard aux membres libres, les coopératives s'efforcent, en général, de verser un modeste intérêt sur le capital social. Sept coopératives ont pu le faire en 1943. L'intérêt a varié entre 1,35 et 3 pour cent.

En résumé, nous constatons qu'au cours des vingt dernières années, les coopératives se sont développées dans une certaine mesure en Suisse allemande et ont fait d'utiles expériences dans les bonnes et les mauvaises années. Toutes sont fermement résolues à tenir compte de ces expériences et à continuer l'oeuvre entreprise. Les créanciers reconnaissent et apprécient les sûretés qu'offrent les coopératives de cautionnements hypothécaires.

Cela est si vrai que quelques banques cantonales exigent, pour les prêts garantis par des coopératives, le même intérêt que pour ceux qui sont garantis par une hypothèque de premier rang et que d'autres banques appliquent des taux légèrement supérieurs, mais inférieurs tout de même à ceux qui sont en usage pour les hypothèques de rang postérieur. Il est intéressant de constater qu'une banque, qui n'avait accordé jusqu'à maintenant que des prêts en premier rang, a prévu récemment l'octroi de prêts de rang postérieur à condition qu'ils soient garantis par une coopérative.

III. AUTRES PROJETS DE RÉFORME On estime que le montant des prêts hypothécaires dépassant la limite des deux tiers de la valeur du gage s'élève en Suisse à 2 ou 3 milliards de francs. Un peu moins de la moitié de cette somme représenterait des prêts bancaires. Les opérations de ce genre ne présentent heureusement pas de difficultés pour un bon nombre de débiteurs. Il n'est en effet pas rare que les hypothèques de rang postérieur soient en mains du débiteur lui-même ou traitées comme des hypothèques de premier rang. Les hypothèques de rang postérieur sont souvent entre les mains de parents ou de fournisseurs, c'est-à-dire de créanciers plus accommodants que d'autres. Dans nombre de cas, elles sont aussi constituées pour le solde d'une créance provenant de la vente d'un immeuble ou de la reprise d'une exploitation artisanale.

Fréquemment les débiteurs sont à même d'engager comme sûretés

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complémentaires des obligations, des livrets d'épargne ou des polices d'assurance, ce qui évite des cautionnements. Il arrive enfin que des particuliers n'ayant aucun lien de parenté ni aucune relation d'affaires avec le débiteur acceptent de se porter caution et garantissent ainsi, pendant de longues années et d'une manière pleinement satisfaisante, des prêts qui sont l'objet d'une hypothèque de rang postérieur.

Nul ne sait à combien s'élèvent les prêts garantis sous ces formes particulières et qui ne donnent en général pas lieu à des difficultés, étant données les circonstances. Il est cependant certain que ces prêts constituent une notable partie des 2 à 3 milliards. Si l'on fait abstraction, en outre, du montant malheureusement considérable, représenté par des hypothèques de tout dernier rang, avec couverture tout à fait insuffisante, on constate que le nombre des prêts constitués dans les limites de 80 pour cent et dont la couverture offre quelques difficultés est relativement minime. Il est toutefois certain que cette somme représente un multiple des prêts garantis par les coopératives. Nous devons par conséquent nous demander pourquoi le cautionnement collectif n'est pas plus répandu et quelles perspectives ouvrent d'autres moyens.

Les coopératives de cautionnements hypothécaires sont des organismes d'entr'aide, obligés de demander à des personnes étrangères une partie des fonds dont ils ont besoin. Si le capital recueilli de cette manière court certains risques ou reste entièrement improductif pendant de longues années, les personnes qui ont qualité de membres libres seront mises à rude épreuve. Les coopératives exercent leur activité exclusivement dans le domaine hypothécaire; elles ne s'occupent que de prêts garantis par des hypothèques de rang postérieur. La conséquence en est que les crises économiques les mettent rapidement en péril. Un ralentissement des affaires dans certaines industries, telles que celles de l'horlogerie, de la soie, des machines, de la broderie, etc., peut, par suite du caractère régional de ces coopératives, exercer des effets fâcheux sur leur situation. Ces institutions exigent en outre des prestations importantes des personnes auxquelles elles viennent en aide. La prime annuelle de % pour cent équivaut pour le débiteur du prêt à une augmentation du taux de
l'intérêt, et la somme qu'il doit affecter à l'achat d'une part sociale réduit d'autant les amortissements qu'il serait en mesure de verser. Il est donc compréhensible qu'on ait souvent cherché une autre solution.

L'idée de l'assurance exerce toujours beaucoup d'attrait. Lors de la conférence d'Olten, on reconnut qu'une assurance contre la perte de loyers serait insuffisante, car elle ne faciliterait pas le financement de nouvelles constructions. L'idée d'une assurance hypothécaire proprement dite a fait en revanche du chemin. Dans un rapport, M. P. Béguin se prononce pour la création d'une association suisse de réassurance. Il estime que les risques hypothécaires sont en principe assurables si l'on envisage de longues

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périodes. A son avis, il est cependant nécessaire de limiter l'assurance à la garantie contre la perte que peut subir le créancier et de prévoir une prorogation des prestations d'assurance en cas de crise. Dans un contrerapport M. Zollinger considère une telle assurance comme insuffisante. Il conteste, en outre, que les risques hypothécaires soient assurables, les risques variant considérablement de cinq ans à cinq ans. Le calcul des primes présenterait surtout des difficultés extraordinaires. Selon les informations recueillies par le département des finances et des douanes, les banques ont pu s'en prendre le plus souvent aux cautions. Elles ont subi ainsi des pertes si minimes qu'elles n'ont montré aucun intérêt pour une assurance dont la création sur une base privée est très discutée.

L'essai d'instituer, sur la base du droit public, une assurance obligatoire aurait-il quelque chance d'aboutir ? La réponse est donnée par ce qui s'est passé dans le canton de Soleure au cours des années 1934 à 1941. L'association soleuroise des débiteurs et cautions avait déposé, le 24 décembre 1934, une initiative sous forme de loi rédigée de toutes pièces, initiative à laquelle le gouvernement cantonal opposa un contre-projet. Les promoteurs de l'initiative présentèrent alors, le 24 juillet 1936, un nouveau projet qui ne fut pas soumis à la votation populaire. Un recours fut rejeté par le Tribunal fédéral le 28 mai 1937. Le Conseil d'Etat présenta, le 11 juillet 1941, un nouveau projet, que le peuple rejeta. Les meilleurs spécialistes ayant donné leur avis, du point de vue juridique et économique, sur tous ces projets, nous croyons utile de reproduire ici quelques-unes de leurs constatations.

Selon le projet de l'association des débiteurs et cautions, les cautions de dettes immobilières auraient eu, après l'entrée en vigueur de l'assurance, qualité de certificateurs de caution. De nouvelles sûretés n'auraient été constituées au début que sous cette forme; par la suite, elles seraient devenues superflues. De l'avis du Tribunal fédéral, ces dispositions, ou d'autres semblables, auraient été contraires au droit fédéral ou auraient dépassé la compétence du canton en matière législative. S'exprimant sur les dispositions selon lesquelles des contributions seraient prélevées par la caisse d'assurance également sur
les propriétés non grevées, le Tribunal fédéral déclara qu'il y aurait là une entorse au principe de l'égalité devant la loi. Un rapport d'expert exposa qu'à l'étranger les garanties assumées pour pertes hypothécaires par les sociétés d'assurances privées ont été entièrement supprimées en raison des risques inhérents à ce genre d'opérations. D'après le projet du Conseil d'Etat, l'assurance aurait été financée par des impôts immobiliers complémentaires, des contributions uniques des créanciers hypothécaires et des subventions de l'établissement cantonal d'assurance en cas d'incendie. Des hypothèques auraient pu être assurées à concurrence de 95 pour cent de la valeur d'estimation cadastrale, et la prime pour une charge de 80 pour cent ne se serait élevée qu'à 1,1 pour mille. Le projet a été rejeté parce qu'il ne présentait un intérêt que pour

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un nombre restreint de débiteurs hypothécaires et que la majorité du peuple estimait que des impôts immobiliers complémentaires seraient injustes.

Si l'assurance hypothécaire proprement dite n'a jamais été réalisée, diverses combinaisons de l'assurance sur la vie et des hypothèques de rangs postérieurs ont abouti à des résultats pratiques. Dès qu'une police a acquis une certaine valeur de rachat, elle est facilement acceptée par le créancier hypothécaire en lieu ou en plus du cautionnement. Il existe aussi des sociétés d'assurances qui s'engagent en cas de décès de l'assuré à amortir les dettes contractées sur des immeubles. Cette forme de garantie n'a pris, cependant, que peu d'importance, car elle exige de trop grands sacrifices pour beaucoup de débiteurs. Si elle épargne bien des ennuis en cas de décès, les survivants ont, en revanche, avantage à encaisser une somme déterminée, lorsque leur revenu est insuffisant pour conserver l'immeuble, ce qui arrive souvent.

Les mêmes objections s'appliquent à un système d'assurance analogue, introduit récemment par les caisses de crédit à terme différé. Il consiste dans le fait que l'assurance sur la vie ne doit être conclue que pour le temps durant lequel le débiteur doit opérer des amortissements. Dans ce cas, les primes sont naturellement très élevées.

On a également recommandé l'émission de lettres de gage en deuxième rang pour financer les hypothèques de rangs postérieurs. Le projet n'a pas été réalisé, car ces hypothèques ne se prêtent guère à la couverture de papiers-valeurs.

Les milieux intéressés ont demandé plus d'une fois que l'on introduise en premier lieu une limite de charge légale et un amortissement obligatoire des prêts hypothécaires. S'il est possible que ces deux mesures soient de nature à exercer un effet favorable sur les hypothèques de rang postérieur, il est en revanche douteux qu'elles satisfassent le besoin de sécurité manifesté par les créanciers. De fait, les coopératives se portent en général caution pour des hypothèques qui ne dépassent pas les limites qui pourraient être prévues par des prescriptions légales et qui sont soumises à un amortissement dont le taux ne pourrait être encore augmenté.

Nous constatons donc qu'on a cherché de différentes manières déjà à mieux garantir les prêts couverts par des hypothèques de rang
postérieur.

Les coopératives de cautionnements hypothécaires ne sont pas le seul moyen d'atteindre ce but et n'échappent pas non plus à toute critique.

Elles constituent toutefois une base de départ pour les mesures à prendre par la Confédération, puisqu'il s'agit d'instituts qui ont acquis une certaine importance et sont de nature à rendre des services toujours plus nombreux dès que leurs assises financières seront plus solides.

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IV. LA RÉUNION DES COOPÉRATIVES DE CAUTIONNEMENTS ' HYPOTHÉCAIRES EN UNE ASSOCIATION Comme nous l'avons dit, quelques coopératives doivent encore liquider les immeubles qu'elles ont acquis. Il est clair que la Confédération ne saurait verser des subventions pour couvrir les pertes qui pourraient résulter de ces opérations. Mentionnons que les coopératives qui ont préféré restreindre leur activité plutôt que de tomber en difficultés devraient recruter un plus grand nombre de membres libres afin de pouvoir conclure de nouveau des opérations saines et répondre à leur destination. Il importe naturellement que l'on tire partout les leçons des expériences et s'y conforme strictement.

Si ces conditions sont remplies, la Confédération ne peut écarter entièrement l'idée de soutenir ces institutions.

La clientèle principale des coopératives n'est en général pas composée de gens qui cherchent à acquérir un immeuble par pur caprice, sans égard à leurs ressources. Les coopératives de Winterthour et de Thurgovie publient une statistique des débiteurs cautionnés. A fin 1943, la proportion entre chaque catégorie de débiteurs était la suivante: Winterthour

Thurgovie

Artisans 50 177 Fonctionnaires, employés et ouvriers . . .

60 90 Particuliers 15 35 Agriculteurs 2 -- En ce qui concerne la nature des immeubles grevés d'hypothèques complétées par des cautionnements, la statistique de St-Gall nous fournit les renseignements suivants: Maisons à une ou deux familles 131 Maisons locatives 350 Immeubles servant en partie à l'exploitation artisanale 356 Propriétés agricoles 35 Dans les autres coopératives la proportion varie tout au plus du fait que l'agriculture y joue un rôle encore moins important.

Il ressort de ces chiffres que les coopératives servent dans une forte mesure à l'artisanat, qui jouit déjà, largement, de l'aide de la Confédération pour ses besoins en capitaux d'exploitation.

Les coopératives de cautionnements artisanales ont suivi une évolution à peu près parallèle à celle des coopératives hypothécaires. Elles ont cependant réussi à prendre pied en Suisse romande et se sont constituées déjà en 1935 en une union suisse, a laquelle la Confédération a prêté son appui.

Pour créer des possibilités de travail et tenir compte des pertes que les artisans ont subies lors de l'assainissement de l'hôtellerie et de l'agriculture, nous nous sommes fait autoriser par les chambres (arrêté du 21 décembre 1934) à subventionner les coopératives de cautionnements artisanales.

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Grâce à d'autres arrêtés fédéraux, pris les 23 décembre 1936, 28 octobre 1937 et 6 avril 1939 pour combattre la crise, créer des possibilités de travail, renforcer la défense nationale et lutter contre le chômage, il a été possible, jusqu'à aujourd'hui, de venir constamment en aide à l'artisanat. Par nos arrêtés des 12 avril 1940 et 13 septembre 1941, l'union suisse des coopératives de cautionnements des arts et métiers fut chargée d'organiser une aide générale et une aide spéciale en faveur de l'artisanat.

La première aide concerne les entreprises qui, par suite du service actif de l'exploitant ou indirectement du fait de la mobilisation de guerre, se trouvent dans des embarras financiers; la seconde est instituée pour les entreprises en difficultés des localités frontières, des stations de villégiature et de l'industrie automobile. La Confédération a mis à disposition, jusqu'en 1943, 3,7 millions de francs, montant sur lequel il restait encore à la fin de l'année 1 740 986 francs, servant de réserve pour le fonds de secours des institutions de secours à l'artisanat.

La Confédération rembourse à ces coopératives, par l'intermédiaire de leur union, 75 pour cent des pertes subies sur les cautionnements ordinaires ' et 90 pour cent des pertes provenant de cautionnements effectués d'entente avec l'union. D'après les dispositions sur l'aide générale à l'artisanat, la Confédération supporte en principe 80 pour cent des pertes subies sur les cautionnements. En ce qui concerne l'aide spéciale aux artisans et détaillants, elle ne prend à sa charge que les deux tiers des pertes, l'autre tiers devant être supporté par les cantons. La Confédération participe en outre à la moitié des frais d'administration en tant qu'ils ne sont pas couverts par les recettes ordinaires. A fin 1943, les coopératives affiliées à l'union suisse étaient cautions de 1715 prêts. Ces cautionnements représentaient une valeur de 5 millions de francs environ. Les artisans cautionnés paient une commission annuelle de % pour cent, sauf lorsqu'il s'agit de l'aide à l'artisanat. Ils doivent en outre verser chaque année un amortissement s'élevant au moins à 1/10 du cautionnement ordinaire et à 1/15 du cautionnement garanti par des sûretés. S'il s'agit de l'aide à l'artisanat, l'amortissement est fixé à 1/20 du cautionnement. Les artisans
qui bénéficient de cautionnements ne sont toutefois pas obligés d'acquérir des parts sociales, de sorte que 30 pour cent seulement du capital global est recueilli auprès de particuliers. Le solde a été versé par des associations, des cantons, et notamment des banques. Les coopératives doivent être gérées conformément aux prescriptions de l'union. Elles ont l'obligation d'accepter des requérants qui n'ont pas la qualité de membre et qui habitent des cantons où il n'existe pas d'institutions analogues. Elles doivent en outre entretenir des offices de comptabilité et ne peuvent se constituer caution -- sauf en cas de secours à l'artisanat -- qu'à concurrence de 10 000 francs pour des prêts non garantis et de 15 000 francs pour des prêts garantis par des sûretés complémentaires. C'est donc l'association qui répartit les subventions fédérales nécessaires à l'artisanat dans sa lutte pour l'existence ;

66(5 elle lui assure ainsi les capitaux d'exploitation nécessaires et encourage les artisans à tenir une comptabilité.

En soutenant les coopératives de cautionnements hypothécaires, la Confédération faciliterait à l'artisanat le cautionnement non seulement pour les crédits d'exploitation mais aussi pour les crédits hypothécaires; de la couverture de ces derniers pourrait dépendre aussi le maintien de l'entreprise, notamment en temps de chômage ou lorsque les crédits sont difficiles à obtenir en raison de la rareté des capitaux. En outre, l'aide de la Confédération faciliterait à la classe moyenne le financement de la construction de maisons d'habitation. Le rapport de la banque cantonale de Thurgovie sur la gestion en 1943 déclare ce qui suit au sujet de la coopérative de cautionnements hypothécaires qui exerce son activité dans le canton: « Elle lutte déjà à sa manière contre la pénurie de logements. Elle pourrait peut-être aussi être appelée, dans la période transitoire qui précédera le retour de l'économie de paix, à financer des possibilités de travail dans l'une de leurs formes les plus naturelles et les plus productives, notamment en prenant une part active à la construction de maisons dans les endroits où il y a pénurie de logements. » Les projets qui ont été soumis dans cette intention aux autorités fédérales sont bien différents, du point de vue technique, des dispositions adoptées pour les coopératives de cautionnements des arts et métiers. Aussi l'aide a-t-elle moins d'ampleur. Il s'agirait de constituer une association suisse des coopératives de cautionnements hypothécaires. Les coopératives qui y adhéreront devront lui soumettre tous les cautionnements existants et les nouveaux qu'elles se proposent de constituer. Dans chaque cas, l'association décidera librement si et dans quelle mesure elle reprendra les cautionnements. Les constructions ayant un caractère de spéculation ou de fantaisie, les fabriques, les hôtels, ainsi que les immeubles difficilement réalisables, ne pourront en principe entrer en considération. On n'acceptera, d'autre part, que des hypothèques ne dépassant pas 80 pour cent de la valeur d'estimation des immeubles non agricoles et 100 pour cent de la valeur de rendement des immeubles affectés à l'agriculture. Lorsque des amortissements n'auront pas été prévus,
l'association réduira ses engagements de son propre chef si elle accepte de reprendre l'affaire. Le débiteur devra en outre être reconnu digne d'intérêt du point de vue moral et professionnel. Ces conditions étant remplies, l'association pourra s'engager à supporter les pertes dans une mesure qu'elle déterminera dans chaque cas. En règle générale, la mesure ne dépassera pas 40 pour cent. Les différentes coopératives seront donc entièrement libres d'exercer leur activité comme elles l'entendent; elles pourront se développer selon les conditions régionales, mais ne pourront faire couvrir leurs pertes par l'association que dans la limite des dispositions susmentionnées.

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L'influence qu'exercera l'association sur les coopératives ne pourra être que favorable. Les coopératives ressentiront les effets des crises régionales dans une mesure moindre que précédemment. Si l'association repose sur des bases solides, elle fournira l'appui recherché depuis longtemps lorsque des difficultés d'ordre plus ou moins général surgiront sur le marché immobilier. Tout le mouvement corporatif en faveur du cautionnement hypothécaire prendra un nouvel essor. Cette nouvelle institution contribuera ainsi à la fondation de nouvelles coopératives et développera celles qui existent déjà.

Pour atteindre son but, l'association devra être plus forte aussitôt que possible. Les différentes coopératives et leurs membres ne seront cependant en mesure d'y contribuer que faiblement. Comme nous l'avons vu, le cautionnement collectif en matière hypothécaire est relativement cher.

Diverses coopératives ont dû s'imposer des sacrifices considérables pour être assainies; d'autres doivent encore effectuer des amortissements sur les immeubles qu'elles ont acquis. Celles qui sont en bonne posture ne devront toutefois pas être contraintes de supporter des charges trop lourdes, car elles ne seraient alors plus disposées à participer à la constitution d'une association destinée avant tout à renforcer la situation des sociétés peu ' prospères.

De bonnes perspectives s'offrent pour l'association à la condition qu'elle soit libre de refuser des cautionnements présentant un risque évident ou de ne s'engager que dans une faible mesure. Elle aura en outre cet avantage de traiter des affaires préparées par ses membres et à leurs frais, ce qui lui permettra de travailler avec moins de frais généraux.

Pour empêcher que les ressources des différentes coopératives ne doivent être mises à contribution dans une trop large mesure et pour réduire autant que possible les charges fiscales de l'association, on a prévu que chaque coopérative ne devra souscrire qu'une part sociale de 1000 francs. Comme cette souscription est insuffisante pour constituer une base financière, chaque coopérative aura l'obligation de faire un versement complémentaire s'élevant au maximum à 2 pour cent. Les risques seront couverts en premier lieu par un capital spécial alimenté par les excédents d'exploitation et des versements. Des réserves devront
en outre être constituées.

Si, à un moment donné, le capital spécial et les réserves sont insuffisants pour couvrir les risques, on aura recours aux engagements complémentaires dans la mesure des garanties fournies par l'association aux diverses coopératives et d'une manière proportionnelle pour celles-ci. En vue de couvrir les dépenses courantes, les coopératives devront verser une prime annuelle s'élevant, en règle générale, à 1 pour mille, mais à 1 % pour mille au maximum. L'engagement complémentaire de 2 pour cent et la prime de 1 à 1 % pour mille seront calculés sur le montant pour lequel la coopérative s'est portée caution et non sur celui que garantit l'association. Pour un cautionnement de 1000 francs, couvert par l'association à concurrence

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de 40 pour cent, l'engagement complémentaire s'élèvera donc à 20 francs et la prime à 1 franc ou 1 fr. 50. Au vu de ce projet, nous constatons ce qui suit: La prime fixée en règle générale à 1 pour mille représente 2l/2 pour mille du risque assumé par l'association à concurrence de 400 francs sur un montant de 1000 francs, alors que les personnes cautionnées paient 5 pour mille à la coopérative. L'engagement complémentaire de 2 pour cent représente 5 pour cent des risques assumés par l'association à concurrence de 40 francs sur un montant de 100 francs, ce qui fait un taux égal à celui que les coopératives exigent des personnes qu'elles cautionnent. En revanche, les coopératives gardent à leur entière disposition le capital libre et les réserves. On estime que sur la valeur actuelle, d'environ 25 mulions, des hypothèques garanties par cautionnements, quelque 20 millions pourront entrer en ligne de compte pour être couverts partiellement par l'association.

Dans l'état actuel, l'association serait mise à contribution à concurrence d'un montant de 8 millions de francs, alors que les engagements de toutes les coopératives se réduiraient à 17 millions. Les coopératives pourraient, par conséquent, céder à l'association 32 pour cent du montant pour lequel elles se sont portées caution. Des calculs démontrent qu'elles devraient abandonner pour cela 16 pour cent seulement de toutes les primes qu'elles encaissent et à peine 8% pour cent de l'ensemble de leurs fonds propres (parts sociales souscrites par les membres libres et les membres cautionnés et réserves), qui serviraient au versement de leurs parts sociales et à la garantie de leurs engagements complémentaires.

Un autre avantage pour les coopératives consiste dans le fait qu'elles pourront encore se porter caution sans augmenter leur capital lorsque leurs engagements auront été couverts par l'association. Ainsi que nous l'avons dit, il est généralement prescrit que les coopératives ne peuvent se porter caution que pour un montant dix fois supérieur à leurs fonds propres. Supposé qu'une coopérative disposant de fonds propres pour un montant de 100 000 francs se soit portée caution pour un million, elle s'adressera à l'association pour qu'elle se porte garante d'un montant de 400 000 francs, et en contre-partie la coopérative contractera des engagements
supplémentaires pour 20 000 francs. Ainsi, elle disposera encore de 80 000 francs de fonds propres et assumera effectivement des risques pour un montant de 600 000 francs, de sorte qu'elle pourra encore contracter des cautionnements pour 200 000 francs.

On doit reconnaître qu'il y a de bonnes raisons de placer l'association dans une situation moins favorable que les coopératives, puisqu'elle ne reprend que les bons risques et qu'elle a moins de frais généraux. L'expérience montrera cependant si l'on aura su trouver, ce faisant, la juste mesure. Nous sommes d'avis qu'il faut s'en tenir à la proportion de 40 pour cent, afin que l'association ne dispose pas d'une base financière trop faible.

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Sinon les subventions fédérales serviront indirectement à l'assainissement des coopératives.

Aussi longtemps qu'aucun capital de couverture n'aura été mis à disposition par des tiers, la situation, considérée dans son ensemble, ne s'améliorera pas, mais les coopératives bénéficieront pour leur part d'une sécurité accrue. Cela ne sera cependant vrai que dans la mesure où les fonds seront suffisants pour couvrir les opérations de l'association et des coopératives.

L'association devra donc examiner sérieusement les risques et chercher à accroître son capital. Pour cette raison et parce que les coopératives sont considérablement avantagées par ce procédé, nous estimons que le versement complémentaire maximum, proposé par les promoteurs des projets, soit 2 pour cent, devrait être la'règle. Comme il s'agit non pas de céder un capital, mais uniquement de garantir les engagements complémentaires, les intérêts du capital restent acquis.

Il ressort de ce qui précède que l'association est à même d'apporter aux coopératives une certaine amélioration technique, bien qu'en définitive la somme du capital et les recettes provenant des primes restent les mêmes. Pour que l'association, en sa qualité de réassureur, se distingue des coopératives agissant comme première caution, il est nécessaire de la doter le plus tôt possible d'un capital spécial et de réserves.

Il paraît donc indiqué que l'association recoure aux mêmes mesures que les coopératives, c'est-à-dire qu'elle doive s'assurer la participation de tiers. Elle n'a en effet pas d'autre ressource. Il y a cependant une difficulté. Elle réside dans le fait que les banques, les associations, ainsi que les particuliers soutiennent déjà les diverses coopératives en engageant librement des capitaux, qui ne rapportent qu'un modeste intérêt ou même aucun, et en prêtant leur collaboration dans les organes des coopératives.

Ils devront intervenir davantage par la suite, mais il n'est guère probable qu'ils verseront des contributions à l'association intercantonale. Si le cautionnement collectif pour des hypothèques de rang postérieur, bien que financé par des tiers pour plus de la moitié, s'est souvent révélé peu viable, il est certain que le cautionnement avec réassurance ne peut guère se développer sans appuis extérieurs.

Comme nous l'avons dit, les coopératives
de cautionnements artisanales bénéficient, dans une mesure relativement large, de versements de la Confédération pour couvrir leurs frais d'exploitation et leurs pertes sur les cautionnements. La coopérative de cautionnements pour ouvriers agricoles et petits paysans à Brougg put commencer son activité en 1921, avec un capital social de 1,2 million de francs, versé par l'agriculture comme part aux excédents de la société suisse de surveillance. La coopérative de cautionnements SAFFA disposait, lors de sa fondation en 1930, du bénéfice net de l'exposition dont elle porte le nom et qui s'élevait à 300 000 francs.

En sa qualité de coopérative-artisanale, elle a encore touché des subventions Feuille fédérale. 96« année. Vol. I.

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fédérales. La coopérative de cautionnements créée en 1942 dans le canton d'Appenzell E.h.-Ext. fut dotée, par le canton et la banque cantonale, d'un capital social notable. Afin que l'association des coopératives de cautionnements hypothécaires ne débute pas dans de moins bonnes conditions, les promoteurs des projets demandent que la Confédération lui verse des subventions s'élevant à 100 000 francs pendant les cinq premières années et à 50 000 francs les cinq années suivantes. La dépense de la Confédération serait ainsi de 750 000 francs en dix ans. Si l'on ajoute à cette somme le produit des intérêts composés pendant la durée susmentionnée et si aucun prélèvement ne doit être opéré pour couvrir les risques, l'association disposera d'environ 900 000 francs. Aucune intention n'a été manifestée quant à l'emploi des subventions.

Il n'est pas question que la Confédération souscrive au capital social, les projets élaborés ne donnant à ce capital qu'une importance secondaire.

Les autorités fédérales n'ont d'ailleurs pas l'intention de faire participer constamment la Confédération à la gestion financière de cette association et d'ériger celle-ci en office fédéral. Quant aux frais d'administration proprement dits, ils ne pourront pas donner lieu à des subventions (sauf peut-être pendant la première année), car l'association des coopératives de cautionnements hypothécaires aura, du point de vue économique, une importance moindre que celle des coopératives artisanales. Force est donc d'affecter les versements de la Confédération au capital spécial ou aux réserves. Celles-ci ne pourront compenser les pertes avant que le capital de couverture ait été employé. Elles seront alimentées au moyen des excédents d'exploitation. Il serait par conséquent indiqué que les subventions fédérales soient versées au capital spécial. Les primes qu'encaissera l'association pendant les dix premières années seront bien inférieures au total des subventions ; aussi ne peut-il être question de prévoir un remboursement des subventions si l'on ne veut pas mettre toute l'oeuvre en danger.

Les subventions fédérales doivent donc être versées à fonds perdu.

Le montant que nous proposons nous semble adapté aux circonstances, quoiqu'il soit bien inférieur à celui qui avait été demandé en 1927. Etant donné que l'association n'est pas
encore fondée (les préparatifs sont, il est vrai, très avancés et on ne sait pas encore d'une façon certaine dans quelle mesure les coopératives y adhéreront), il est permis de considérer que la Confédération ne peut d'ores et déjà s'engager à verser des subventions pendant dix ans. C'est pourquoi nous pensons que la Confédération ne devrait être engagée qu'au moment où sept coopératives au moins seraient devenues membres de l'association. Si une ou plusieurs coopératives devaient sortir de l'association, les subventions fédérales seraient réduites en conséquence.

Nous tenons pour probable que ce nombre de sept sera atteint par les adhésions des coopératives qui se sont déjà groupées et que d'autres demanderont leur adhésion. Cette possibilité d'adhésion doit être offerte aux associations de cautionnements qui exercent en majeure partie leur

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activité dans le domaine hypothécaire et qui ne se constituent pas seulement caution en faveur de débiteurs d'un seul créancier. Lorsqu'un certain nombre d'expériences auront été faites, les coopératives de cautionnements agricoles, qui ont exprimé le désir de rester provisoirement indépendantes, pourront aussi devenir membres de l'association. Les autorités fédérales auront suffisamment l'occasion de se renseigner sur la marche de l'association puisque les statuts prévoient qu'elles auront un siège au conseil d'administration (qui se composera de 5 à 7 membres) et le droit de contrôler entièrement la gestion pendant tout le temps qu'elles alloueront des subventions.

Les droits de la Confédération seront suffisants pour que son représentant puisse se rendre compte de la marche de l'association, mais ils ne sont pas assez étendus pour empêcher l'exécution d'une décision du conseil d'administration à laquelle il s'est opposé. Si l'on peut admettre que cela n'est pas nécessaire, il faut cependant aussi tenir compte du fait que le conseil d'administration n'est pas encore composé et que la Confédération devra verser des subventions pendant un temps assez long, de sorte qu'un droit d'opposition, avec effet suspensif, devrait quand même être réservé.

La solution la plus simple consiste à subordonner le versement des subventions à l'approbation des comptes annuels par le Conseil fédéral. Le projet d'arrêté fédéral ci-joint contient une disposition dans ce sens.

Si l'association des coopératives de cautionnements hypothécaires est soutenue financièrement par la Confédération, il faudrait qu'elle collaborât avec l'union suisse des coopératives de cautionnements des arts et métiers.

Supposons le cas d'un artisan qui, désirant obtenir un crédit d'exploitation, se voit refuser un cautionnement par une coopérative artisanale parce qu'il ne remplit pas les conditions exigées pour qu'une exploitation puisse être considérée comme saine. Cet artisan pourra peut-être obtenir le crédit désiré en fournissant des garanties hypothécaires. Si la banque exige encore un cautionnement, il sera amené à recourir aux services d'une coopérative de cautionnements hypothécaires. Dans ce cas, il ne faut cependant pas que l'association des coopératives de cautionnements hypothécaires assure la couverture complémentaire, sinon
les deux associations, qui sont soutenues financièrement par la Confédération, travailleraient l'une contre l'autre. Les deux mouvements (cautionnement des arts et métiers et cautionnements hypothécaires) ne se sont encore jamais heur tés. Il est probable que les deux activités pourront se poursuivre sans se porter préjudice.

Lorsque la Confédération sera intervenue financièrement en faveur de l'une et de l'autre, leur collaboration devra cependant être exigée.

V. LES ALLÉGEMENTS FISCAUX Les coopératives de cautionnements hypothécaires ont demandé plus d'une fois à être exemptées des impôts. Il ressort de leurs comptes qu'elles

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ont dû verser ces dernières années au fisc plus de 30 pour cent des primes encaissées. Ces versements réduisent d'autant leurs possibilités de constituer des réserves. En se défaisant de leurs immeubles les coopératives réduiraient leurs charges fiscales, à la condition toutefois que le fisc ne devienne pas plus exigeant ces prochaines années. Cet état de choses a évidemment des .effets défavorables sur des organisations d'entr'aide ne disposant que de ressources limitées. On comprend donc .ce désir d'une exonération fiscale. Si les coopératives de cautionnements hypothécaires reviennent constamment à la charge, c'est, disent-elles, parce que la Confédération accorde déjà ce privilège aux coopératives d'immeubles locatifs, de cautionnements pour ouvriers agricoles et petits paysans et, depuis peu de temps, à toutes les coopératives affiliées à l'union des coopératives de cautionnements des arts et métiers.

Actuellement, la question de l'aide à fournir par la Confédération à l'association qui sera fondée semble revêtir plus d'importance pour les intéressés que celle de l'exemption d'impôts. Si nous soulevons quand même la question fiscale, c'est parce que les impôts grèvent fortement les finances de ces coopératives et que, lors de la discussion de la motion Seiler au Conseil des Etats, il a été relevé que l'exemption d'impôts est une des formes sous laquelle la Confédération pourrait, le cas échéant, soutenir ces institutions.

Notons tout d'abord que la mesure envisagée ne laisserait pas aux coopératives la jouissance entière du 30 pour cent des primes absorbé par les impôts, car l'exemption n'aurait pas d'effet sur les droits fiscaux des cantons et des communes. Il est vrai que certaines coopératives ont obtenu satisfaction en s'adressant aux autorités cantonales et communales, et les exemples où les cantons ont renoncé à leurs droits ne font pas défaut.

L'administration fédérale des contributions a cependant déjà accordé des allégements. Les autorités cantonales chargées de la taxation en matière d'impôts fédéraux ont été invitées, pour le calcul de la fortune imposable, à considérer les risques provenant de cautionnements comme des dettes; elles doivent donc considérer comme dettes les réserves constituées pour la couverture de ces risques et déduire comme passif les risques qui ne sont pas
couverts par les réserves. Dans le calcul du produit net imposable, les versements aux réserves pour risques de pertes doivent, d'autre part, être déduits du produit brut en tant qu'ils ont dû être opérés pour couvrir de nouveaux risques ou des risques plus élevés qui se sont produits au cours de l'exercice fiscal. Ces dispositions s'inspirent des délibérations qui ont été engagées au Conseil national, au cours de la session d'automne de 1933, au sujet de la contribution de crise et de l'assujettissement des coopératives de cautionnements hypothécaires. Au nom de la commission unanime, le rapporteur rejeta catégoriquement l'idée d'exempter les coopératives

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de l'impôt, ajoutant que des atténuations pourraient être apportées aux dispositions qui se révéleraient trop rigoureuses.

Les dispositions en vigueur ne permettent pas de décréter l'exemption générale d'impôts. Pour le droit de timbre -- qui entre peu en ligne de compte, il est vrai -- constatons, en ce qui concerne le droit sur les coupons, que des exceptions ne se conçoivent ni du point de vue objectif, ni du point de vue subjectif. Quant à une exemption du droit d'émission, elle n'entrerait en considération que si les coopératives pouvaient prouver, dans des cas d'espèce, qu'elles remplissent les conditions requises à l'article 17, 2e et 3e alinéas, de la loi sur les droits de timbre. Ces dispositions sont plus ou moins semblables à celles de l'article 16, chiffre 3, de l'arrêté instituant un impôt pour la défense nationale, ce qui nous amène à parler d'un impôt plus lourd. Cette dernière disposition exige, pour l'essentiel, que le requérant exerce une activité d'utilité publique. Or, les organismes d'entr'aide ne remplissent généralement pas cette condition.

Une pratique constante veut en effet non seulement que l'organisme à mettre au bénéfice de l'exemption fiscale ait pour but de venir en aide à des personnes disposant de peu de ressources, mais encore que l'activité déployée par cet organisme dépende des prestations absolument désintéressées de coopératives ou de particuliers. La plupart des coopératives de cautionnements hypothécaires ne remplissent pas ces conditions, puisque les membres qu'elles cautionnent doivent leur être affiliés. Les prestations des membres libres ne peuvent pas non plus être considérées comme pleinement désintéressées. Elles sont surtout fournies par des banques, des asso.ciations et des particuliers pour lesquels la situation des débiteurs cautionnés joue un rôle, à un titre ou à un autre. Ces banques, associations et particuliers ne versent en général pas de contributions à fonds perdu ; ils souscrivent des parts sociales, sur lesquelles est versé de temps à autre un intérêt qui n'est guère inférieur à la moyenne des intérêts ordinaires.

D'ailleurs, les personnes cautionnées, étant propriétaires d'immeuble, ne peuvent être en général considérées comme disposant de peu de ressources.

Ces dispositions particulièrement sévères s'imposent en raison du nombre
des coopératives ayant un caractère' d'entr'aide et du fait qu'une exemption d'impôt aurait une trop grande portée financière. Le Tribunal fédéral a jugé (coopérative de cautionnements des caisses suisses de prêts contre administration fédérale des contributions, ATF XXXII, p. 293) qu'il n'y a pas contradiction lorsque la Confédération ne prévoit pas d'exemption d'impôts pour les coopératives de cautionnements tout en soutenant de ses deniers l'activité de certaines d'entre elles.

D'après la législation et la pratique, la Confédération n'accorde l'exonération d'impôts que dans une mesure très restreinte.

Comme quelques coopératives ont réussi, en tirant les conséquences de cette manière de voir, à se faire exonérer d'impôts, il n'y a aucune raison

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pour que la Confédération institue un régime différent. Elle a d'autant moins de raisons d'agir que les adaptations nécessaires, si elles sont difficiles, sont cependant de nature à avantager en fin de compte toute l'oeuvre du cautionnement coopératif.

VI. CONCLUSIONS ET PROPOSITIONS Les hypothèques de rang postérieur sont partout une source de difficultés dans le domaine du crédit. L'histoire de plusieurs dizaines d'années en fait foi. Ces difficultés sont dues souvent à un mauvais emploi des fonds.

Aussi les critiques ne doivent-elles pas être acceptées telles quelles. La situation de mainte personne de la classe moyenne est en jeu, même lorsque ces hypothèques de rang postérieur peuvent être qualifiées de « saines ».

On a adopté divers moyens pour remédier à ces difficultés. Comme dans d'autres domaines, l'entr'aide fondée sur le principe coopératif a donné les meilleurs résultats. La réunion de ces coopératives en une association subventionnée par la Confédération donnera une impulsion nouvelle à leur bienfaisante activité. Précisons cependant que ce procédé pourra aider à surmonter bien des difficultés, mais il ne résoudra jamais le problème même des hypothèques de rang postérieur. Les plans qui nous ont été soumis donnent l'impression d'avoir été soigneusement établis et montrent que l'appui de la Confédération est non seulement justifié mais encore nécessaire.

L'appui sollicité par les coopératives en faveur de leur association ne constitue, certes, pas une des principales tâches de la Confédération, ïl s'agit tout d'abord d'étendre l'aide apportée à l'artisanat pour le cautionnement et ensuite de prendre les mesures qui se justifient du point de vue économique en faveur des petits propriétaires d'immeubles qui sont à la recherche d'une caution. L'importance sociale de ces mesures est incontestable. Relevons en outre ce qui suit.

Il est à craindre qu'on ne pourra pas toujours se procurer aussi facilement qu'aujourd'hui les fonds nécessaires à la construction et que dans un avenir plus ou moins rapproché il faudra absolument encourager la construction pour créer des possibilités de travail. Dans ces conditions, on fait bien d'encourager, dans la construction, non seulement l'initiative des pouvoirs publics et des coopératives de construction mais aussi celle des particuliers. Lorsqu'il
s'agit de petits épargnants -- l'expérience nous l'apprend -- le financement se heurte souvent à des difficultés. Si les coopératives de cautionnements hypothécaires bénéficient de l'appui d'une association suffisamment développée grâce à des subventions fédérales payées en temps opportun, on aura bien fait de verser dès maintenant les premières annuités, somme toute modeste, d'une subvention à allouer pendant dix ans.

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Considérant que les ressources de la Confédération sont mises à contribution dans une mesure extraordinairement forte par des tâches urgentes, on pourrait soutenir qu'une subvention fédérale, quoique justifiée en principe, ne devrait pas être allouée pour l'instant. C'est pourquoi nous n'avons pas jugé indiqué d'accorder nous-mêmes l'aide attendue de la Confédération, en nous fondant sur nos pouvoirs extraordinaires. Le projet d'arrêté, n'étant pas de portée générale, n'est par conséquent pas soumis au referendum. Nous avons préféré suivre la voie de la législation ordinaire.

Nous vous prions donc de bien vouloir délibérer dès maintenant sur notre projet d'arrêté allouant des subventions à une association des coopératives de cautionnements hypothécaires et d'adopter cet arrêté.

Le projet d'arrêté prévoit l'allocation de subventions du montant sollicité par les promoteurs du projet dans leur lettre du 26 juillet 1943.

Elles ne seront versées qu'après que le Conseil fédéral aura approuvé les comptes annuels de l'association. Elles doivent être employées conformément à ce qui est dit dans notre message, et le représentant de la Confédération qui siégera au conseil d'administration veillera à ce qu'il en soit ainsi.

Nous résumons comme suit les conditions que nous avons envisagées en rédigeant notre message: 1° L'association sera fondée selon le projet de statuts d'avril 1943 et notamment les dispositions dont il a été question dans ce message.

2° En règle générale, les engagements complémentaires des coopératives envers l'association seront fixés au taux maximum de 2 pour cent.

3° Les subventions fédérales ne commenceront à être versées que dès le jour où l'association comprendra au moins sept coopératives se portant caution à l'égard de différents créanciers et exerçant principalement leur activité dans le domaine hypothécaire. Si, dans la suite, le nombre des coopératives tombe au-dessous de sept, les subventions seront réduites dans une mesure correspondante.

4° Les coopératives de cautionnements à caractère essentiellement agricole ne pourront être admises dans l'association qu'à une époque postérieure, qui sera déterminée par le Conseil fédéral d'entente avec l'association.

5° L'association des coopératives de cautionnements hypothécaires devra collaborer d'une manière appropriée avec
l'union suisse des coopératives de cautionnements des arts et métiers.

6° Les subventions fédérales doivent être versées dans le capital spécial.

Les dépenses courantes d'administration seront supportées par l'association elle-même. Au cours du premier exercice, elles pourront cependant être couvertes partiellement par la subvention fédérale.

676

Une disposition du projet d'arrêté charge le Conseil fédéral de l'exécution et lui confère le droit de fixer les conditions mises au versement des subventions fédérales. Elle signifie que l'approbation des comptes annuels et par conséquent le versement des subventions ne dépendront pas seulement des conditions énoncées plus haut. Le Conseil fédéral devra pouvoir, au contraire, faire servir à d'autres fins encore les coopératives de cautionnements hypothécaires.

Nous vous recommandons d'adopter ce projet et saisissons cette occasion pour vous présenter, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 9 août 1944.

* Au nom du Conseil fédéral suisse: Le vice-président, PILET-GOLAZ.

46i6

Le chancelier de la Confédération, LEIMGRUBEE.

677

(Projet.)

Arrêté fédéral allouant

des subventions à une association suisse des coopératives de cautionnements hypothécaires.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 9 août 1944, arnie, : Article premier.

1

Le Conseil fédéral est autorisé à allouer pendant dix ans au plus des subventions à une association à fonder sous le nom d'« association suisse des coopératives de cautionnements hypothécaires ».

2 Les subventions s'élèveront à 100 000 francs pendant les cinq premières années, et à 50 000 francs les cinq années suivantes.

3 Le paiement est subordonné à l'approbation des comptes de l'association par le Conseil fédéral.

Art. 2.

Les subventions doivent être employées de la manière indiquée dans le message du Conseil fédéral du 9 août 1944. Un représentant de la Confédération, siégeant dans le conseil d'administration, veillera à ce qu'il en soit ainsi.

Art. 3.

1 Le présent arrêté, qui n'est pas de portée générale, entre immédiatement en vigueur.

2 Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution et peut fixer les conditions dans lesquelles les subventions prévues à l'article premier pourront être versées.

4616

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'allocation de subventions à une association suisse des coopératives de cautionnements hypothécaires. (Du 9 août 1944.)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

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Foglio federale

Jahr

1944

Année Anno Band

1

Volume Volume Heft

17

Cahier Numero Geschäftsnummer

4582

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

17.08.1944

Date Data Seite

653-677

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