05.429, 05.430, 05.431, 05.432, 05.440 Initiatives parlementaires Structures d'accueil pour enfants Rapport de la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national du 21 août 2008

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, La Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national (CSEC-N) vous soumet son rapport concernant les initiatives parlementaires 05.429 à 05.432 et 05.440, qu'elle propose de classer.

21 août 2008

Pour la commission: La présidente, Josiane Aubert

2008-2261

7807

Résumé Les cinq initiatives parlementaires concernées ont suscité au sein de la commission une réflexion de fond sur plusieurs points relatifs aux structures d'accueil extrascolaire et extrafamilial pour enfants. Entre le dépôt de ces initiatives et la décision de la commission de proposer leur classement, la situation a notablement évolué au niveau des cantons. Ainsi, l'accord intercantonal sur l'harmonisation de la scolarité obligatoire (concordat HarmoS) prévoit une offre de base dès l'âge de 4 ans. La sous-commission de la CSEC qui était chargée d'élaborer un projet de mise en oeuvre des initiatives a commencé par procéder à de nombreuses auditions. Celles-ci lui ont permis de recueillir différentes opinions et informations. Elle a alors constaté qu'il existait dans ce domaine autant de systèmes que de cantons. Il lui a ainsi été impossible d'obtenir des données comparables entre les cantons et, par conséquent, d'établir les besoins réels et les offres effectivement disponibles. Durant cette même période, le concordat HarmoS a été présenté aux cantons. Or, le système qu'il prône dans le domaine des structures d'accueil pour enfants répond en grande partie aux objectifs des auteurs des cinq initiatives. C'est pourquoi la commission renonce à poursuivre dans la voie préconisée par les initiatives, à savoir celle d'une modification de la Constitution fédérale. Toutefois, en ce qui concerne les enfants en âge préscolaire, le dialogue doit être engagé avec la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) afin de chercher une solution analogue, sous la forme d'un concordat. Par ailleurs, dans le dessein de soutenir la création, à moyen terme, de places d'accueil supplémentaires, la commission dépose une motion qui charge le Conseil fédéral à soumettre au Parlement un message sur la prorogation de la loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants, en vigueur jusqu'à la fin janvier 2011, ainsi que les projets d'arrêtés financiers pour les quatre années suivantes. La commission estime que ces deux mesures soutiennent le principal objectif visé par les cinq initiatives, tout en évitant une votation populaire qui risquerait de faire obstacle aux travaux en cours.

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Liste des abréviations CDAS

Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales

CDIP

Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique

HarmoS

Accord intercantonal sur l'harmonisation de la scolarité obligatoire

OFAS

Office fédéral des assurances sociales

PISA

Programme for International Student Assessment

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Rapport 1

Le contexte

Le 21 mai 2006, le peuple suisse a accepté les nouveaux articles constitutionnels sur la formation avec une majorité très nette de 86 %. Si ces dispositions confirment la répartition des compétences en matière d'éducation, les autorités publiques (soit, selon le degré d'enseignement, la Confédération, les cantons, ou les deux) sont désormais tenues par la Constitution fédérale (Cst.) de faire en sorte que le système éducatif s'insère dans un cadre harmonisé à l'échelle nationale.

Le concordat HarmoS permet aux cantons d'appliquer les prescriptions fixées à l'art. 62, al. 4, Cst. pour la scolarité obligatoire. Il harmonise ainsi pour la première fois au niveau national la durée des différents degrés d'enseignement, leurs objectifs de formation et les conditions de passage de l'un à l'autre. Quant à l'introduction d'horaires blocs et de structures de jour, elle fait partie d'un processus en cours dans les cantons; elle ne dépend donc pas directement d'HarmoS. Toutefois, les cantons ayant adhéré au concordat s'engagent à privilégier, au degré primaire, la formule des horaires blocs dans l'organisation de l'enseignement et à proposer une offre appropriée de prise en charge des élèves en dehors du temps d'enseignement (structures de jour).

Afin de favoriser l'impulsion donnée par la loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants1 et d'accroître les possibilités pour la Confédération d'intervenir dans ce domaine, cinq conseillères nationales, membres de cinq groupes parlementaires différents, ont déposé chacune, à l'automne 2005, une initiative parlementaire visant à insérer un nouvel al. 3 à l'art. 62 Cst. En substance, elles demandent que les cantons veillent à ce que les communes proposent, en collaboration avec le secteur privé, un accueil extrafamilial et extrascolaire adéquat pour les enfants jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire, la Confédération pouvant les soutenir dans cette tâche. Quatre de ces initiatives présentent un texte de même teneur, alors que la cinquième s'en écarte sur un point déterminant (cf. ch. 2.1).

2

Les cinq initiatives parlementaires

2.1

Les objectifs

Les cinq initiatives parlementaires ont été déposées à la session d'automne 2005, le 21 septembre pour les quatre premières et le 7 octobre pour la dernière. Il s'agit précisément des objets suivants: 05.429 Iv. pa. Egerszegi-Obrist. Structures d'accueil extrascolaire et extrafamilial; 05.430 Iv. pa. Genner. Améliorer les chances des enfants et des familles; 05.431 Iv. pa. Fehr Jacqueline. Améliorer les chances de formation des enfants et des jeunes;

1

RS 861

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05.432 Iv. pa. Riklin Kathy. Introduction d'écoles à horaire continu; 05.440 Iv. pa. Haller. Familles et accueil extrascolaires.

Les initiatives précitées visent donc à améliorer l'offre existant dans le domaine des structures de jour. A cette fin, elles proposent d'ajouter à l'art. 62 Cst. une disposition octroyant à la Confédération la compétence d'intervenir en matière d'accueil extrafamilial et extrascolaire des enfants. Actuellement, cette compétence est du ressort des cantons. L'objectif des cinq initiatives n'y changerait rien, sauf que la Confédération disposerait désormais d'une compétence subsidiaire lui permettant de soutenir les cantons et les communes dans la création de structures de jour. Cette nouvelle donne contribuerait à combler le manque actuel d'encadrement et à mieux concilier famille et vie professionnelle, notamment chez les femmes exerçant une activité lucrative, qui n'y parviennent que difficilement. Un autre élément fondamental des initiatives réside dans l'égalité des chances, l'importance de l'encadrement extrascolaire (par exemple l'aide de devoirs scolaires à domicile) et de certaines activités d'aide à la prime enfance prenant toujours plus d'ampleur sur le plan de la politique sociale et éducative.

En ce qui concerne l'âge des enfants à prendre en considération dans le cadre de cette amélioration, à mettre en oeuvre d'urgence selon les auteurs des initiatives, les textes présentent une différence essentielle. Tandis que les objets 05.429, 05.430, 05.431 et 05.440 proposent d'englober la prime enfance et la période de scolarité obligatoire, l'intervention 05.432 se cantonne au domaine des écoles à horaire continu, excluant donc la période préscolaire et la prime enfance. Voici les teneurs respectives des cinq initiatives en question: 05.429, 05.430, 05.431, 05.440: «La Constitution est modifiée comme suit: Art. 62, al. 3 ­ Les cantons veillent à ce que les communes proposent, en collaboration avec le secteur privé, un accueil extrafamilial et extrascolaire adéquat pour les enfants jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire. La Confédération peut les soutenir dans cette tâche.» 05.432: «La Constitution est modifiée comme suit: Art. 62, al. 3 ­ Les cantons veillent à ce qu'il existe une école de jour adéquate pour les enfants jusqu'à la fin de la scolarité
obligatoire. L'école de jour comprend l'enseignement obligatoire, l'encadrement des enfants en dehors des heures de cours et la tenue d'une cantine.

L'encadrement en dehors des cours et le repas à la cantine sont facultatifs pour les élèves. Les parents peuvent être appelés à participer aux coûts.» Toutes ces initiatives ont en commun de vouloir une offre adaptée aux besoins, en ce sens que les différences entre zones urbaines et zones rurales doivent pouvoir être prises en considération de manière explicite, aussi bien par rapport à la demande effective en termes de places d'accueil que par rapport à la nature des attentes.

2.2

L'examen préalable

Les cinq initiatives ont été attribuées aux Commissions de la science, de l'éducation et de la culture pour examen préalable, conformément à l'art. 109 de la loi sur le Parlement (LParl), car la priorité a été donnée à l'objectif des auteurs d'insérer les dispositions concernées dans les articles constitutionnels sur la formation ­ et non dans ceux touchant la politique sociale, par exemple.

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La CSEC-N a procédé à l'examen préalable des initiatives le 24 février 2006, décidant par 20 voix contre 5 d'y donner suite. Le 26 juin 2006, la commission homologue du Conseil des Etats a elle aussi donné suite aux initiatives, par 10 voix contre 0, chargeant ainsi la CSEC-N d'élaborer un projet à l'intention du Conseil national.

Les commissions estiment toutes deux majoritairement qu'il est absolument nécessaire d'agir dans le domaine des structures de jour extrascolaires. Comme les auteurs des initiatives, les tenants de cette opinion estiment qu'une compétence subsidiaire de la Confédération pourrait donner l'élan qu'il faut à l'objectif visé. A l'appui de leur point de vue, ils citent aussi bien l'aspect social que l'aspect économique: il y a, d'une part, le besoin d'assurer un encadrement satisfaisant pour les enfants et les jeunes et, d'autre part, l'avantage économique (dicté par la situation démographique) de voir augmenter la proportion des femmes exerçant une activité lucrative. Pour les deux commissions, le développement des structures de jour se justifie tout à fait sur le plan économique, chaque franc investi retournant à la communauté à raison d'une fois et demie sous forme de revenu fiscal. Par ailleurs, l'existence de places d'accueil en nombre suffisant et de structures de jour à un endroit accroît sa puissance d'attraction sur les entreprises nationales et internationales. Sans compter que de telles structures contribuent à améliorer l'intégration des migrants, et plus spécialement de leurs enfants. Certains membres des deux commissions ont défendu encore un autre objectif des auteurs des initiatives: mettre sur pied davantage de possibilités d'enseignement dès la prime enfance, à l'instar de ce que font la plupart des pays qui obtiennent de meilleurs résultats que la Suisse dans les études PISA.

Quant aux minorités des deux commissions, elles sont d'avis qu'il n'incombe pas à la Confédération d'agir dans ce domaine ­ si tant est que la nécessité de le faire fût réelle ­, mais aux cantons, vu la structure fédéraliste de notre système scolaire. Elles estiment en outre que la création d'offres supplémentaires dans ce domaine provoquerait un surcoût pour l'Etat. A leur avis, il est de toute façon préférable que les enfants soient encadrés par leurs proches car elles craignent
l'émergence d'une inégalité de traitement entre les familles qui s'organisent de façon autonome et celles qui s'en remettent à un accueil extrafamilial, soutenu par l'Etat. Enfin, ces minorités mettent en doute l'effet de l'accueil extrafamilial des enfants sur l'éducation et l'apprentissage des compétences sociales, considérant le modèle scolaire traditionnel, associé à un renforcement du rôle de la famille, comme la meilleure solution aux problèmes rencontrés actuellement dans le domaine de l'accueil des enfants et des adolescents.

2.3

Le mandat et la composition de la sous-commission

Le 15 septembre 2006, la CSEC-N a décidé d'instituer une sous-commission, composée de 11 membres, et de lui confier le mandat suivant: a)

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Définir les possibilités offertes dans le domaine en question par la législation en vigueur au niveau fédéral, soit: ­ étudier et apprécier les bases constitutionnelles existantes (art. 41, 62, 63 et 167 Cst.); ­ proposer une réglementation fédérale.

b)

Dresser un tableau exact de la situation actuelle et définir les moyens de garantir la qualité de l'accueil des enfants en ayant pour objectifs: ­ l'amélioration de l'égalité des chances dans le domaine de l'éducation; ­ l'intégration sociale; ­ l'amélioration de la conciliation entre famille et vie professionnelle.

Définir les groupes d'âges concernés (enfants en âge de scolarité seulement ou prime enfance également).

Définir la manière dont les différents intéressés (prestataires privés, communes, cantons et Confédération) pourraient mettre sur pied les offres d'accueil.

Définir comment ces offres pourraient être financées.

Aux termes de son mandat, la sous-commission devait travailler en étroite coopération avec les cantons, notamment avec la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (DCAS) et la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP).

Jusqu'à la fin 2007, la sous-commission a été composée des députés suivants: Galladé, Bruderer, Brunschwig Graf, Freysinger, Füglistaller, Genner, Häberli-Koller, Noser, Pfister Theophil, Riklin Kathy, Savary. Dès le début de la 48e législature, en janvier 2008, sa composition a été la suivante: Galladé, Bruderer, Füglistaller, Genner, Häberli-Koller, Mörgeli, Müri, Noser, Perrinjaquet, Pfister Theophil, Riklin Kathy. La conseillère nationale Chantal Galladé en était la présidente, et la conseillère nationale Pascale Bruderer, la vice-présidente.

2.4

Les travaux de la sous-commission

La sous-commission a siégé six fois au total, entre le printemps 2007 et le printemps 2008. Conformément à son mandat, elle a dressé un tableau de la situation et élaboré un projet de disposition constitutionnelle, tout en se demandant s'il y avait lieu de fixer une compétence de la Confédération dans la Constitution et, dans l'affirmative, où il conviendrait de l'insérer.

2.4.1

Les auditions

Dans une première phase, qui s'est étendue sur trois séances, la sous-commission a procédé à des auditions très détaillées, censées lui permettre d'atteindre trois objectifs: premièrement, se faire une idée de la situation dans les cantons en matière de structures de jour et des travaux que nécessiterait le développement des offres à ce niveau; deuxièmement, réunir des expériences faites avec différentes formes de structures de jour, prendre contact avec des prestataires offrant de telles possibilités d'accueil et avec des représentants des partenaires sociaux favorables au développement des structures de jour, en tenant compte des dernières connaissances scientifiques acquises par la recherche en matière d'éducation; troisièmement, se mettre en relation avec des spécialistes du droit constitutionnel. En conséquence, les personnes suivantes ont été entendues:

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Kathrin Hilber, conseillère d'Etat, Saint-Gall, présidente de la CDAS; Isabelle Chassot, conseillère d'Etat, Fribourg, présidente de la CDIP; Hans Ambühl, secrétaire général de la CDIP; Margrith Hanselmann, secrétaire générale de la CDAS; Olivier Maradan, secrétaire général suppléant de la CDIP; Maria Luisa Delcò, ancienne directrice du département Scuole dell'infanzia, Divisione della scuola, DECS, Tessin; Philippe Lavanchy, Service de la protection de la jeunesse, Vaud; Martin Wendelspiess, chef de l'Office de l'école obligatoire, canton de Zurich; Felix Bamert, Association suisse des écoles de musique (ASEM); Ernst Buschor, professeur, fondation Bertelsmann; Uschi Furter, directrice de la structure d'accueil pour enfants Zwärglihuus, Hôpital cantonal d'Aarau; Ulla Grob, Association suisse des structures d'accueil pour enfants; Thomas Jaun, président de Netzwerk Kinderbetreuung; Markus Mauchle, chef de service spécialisé, Association suisse des écoles à horaire continu; Urs Moser, directeur de projet pour les études PISA, Institut pour l'évaluation de la formation, Université de Zurich; Franziska Peterhans, secrétaire centrale de l'Association faîtière des enseignantes et des enseignants suisses (ECH); Hans Rudolf Schuppisser, vice-directeur de l'Union patronale suisse; Peter Sigerist, secrétaire central, responsable de la division Formation, Union syndicale suisse; Bernhard Ehrenzeller, professeur à l'Université de Saint-Gall, Institut de droit et de pratique juridique.

La sous-commission a pu découvrir ainsi les différents systèmes en vigueur dans les cantons qui proposent aujourd'hui déjà des structures de jour étendues. Le Tessin, par exemple, offre de vastes possibilités jusqu'à l'âge de 3 ans («asilo nido»), puis de 3 à 6 ans (école enfantine). Il est à noter que 95 à 98 % des petits Tessinois fréquentent les structures au stade de l'école enfantine. Le canton de Vaud est lui aussi doté d'une base constitutionnelle et de dispositions légales visant à offrir des structures de jour adéquates aux enfants jusqu'à l'âge de 12 ans. Une attention particulière y est accordée à la rentabilité, autrement dit à l'utilisation optimale de chacune des institutions. C'est pourquoi celles-ci se sont constituées en réseaux, au sein desquels les enfants peuvent être répartis avec la plus grande souplesse
possible.

Par ailleurs, les cantons ont souligné que, à leur avis, le sujet était déjà réglé à satisfaction dans le concordat HarmoS pour ce qui regarde le domaine de l'école obligatoire. Ce concordat se trouvait encore en consultation pendant les travaux de la souscommission, mais il a été adopté entre-temps par les directeurs cantonaux de l'instruction publique (cf. ch. 1 et ch. 2.4.2). Les cantons se référaient à l'art. 11, al. 2, du concordat: «Une offre appropriée de prise en charge des élèves est proposée 7814

en dehors du temps d'enseignement (structures de jour). L'usage de cette offre est facultatif et implique en principe une participation financière de la part des titulaires de l'autorité parentale.» Selon les explications des cantons, la situation est toutefois différente pour les enfants en âge préscolaire et pour la prime enfance, domaines où des démarches très dissemblables suivant les régions sont en cours et où il n'existe encore aucune coordination à l'échelle nationale (cf. les résultats de l'enquête qui sont exposés au ch. 2.4.3). Ainsi, les cantons sont unanimes à penser qu'il y a un réel besoin de places d'accueil à ce stade et qu'il est nécessaire de coordonner étroitement les offres relatives à la prime enfance et à l'école obligatoire.

Les syndicats comme les patrons ont insisté devant la sous-commission sur l'importance du développement des structures de jour. Les représentants des partenaires sociaux ont rappelé, d'une part, que de telles structures pouvaient être décisives pour une entreprise ou un salarié dans le choix d'un site ou d'un emploi et, d'autre part, que les offres de ce type contribuaient à améliorer l'intégration des femmes dans la vie professionnelle, ce qui répondrait en outre à un souhait des milieux économiques. Les syndicats ont relevé par ailleurs les aspects de l'intégration et de l'égalité des chances. Alors que la demande d'extension des offres ­ telle qu'elle a été présentée à la sous-commission par les représentants des institutions compétentes ainsi que par les associations actives dans ce domaine ­ a également été défendue par les représentants des partenaires sociaux, la question de l'influence de la Confédération et celle de l'éventuelle mise à contribution des milieux économiques pour développer lesdites offres sont demeurées controversées.

Enfin, du point de vue des sciences de l'éducation et de la pédagogie, la souscommission s'est penchée sur les comparaisons disponibles avec les pays qui ont obtenu de meilleurs résultats que la Suisse ces dernières années dans les études PISA. A cet égard, l'importance d'un encadrement scolaire assuré toute la journée durant a été mise en évidence. Il a aussi été fait mention des lacunes constatées en Suisse en matière éducative sur la période préscolaire et pendant la prime enfance.

Selon un représentant éminent
des experts auditionnés, dans les autres pays, ces deux étapes expliquent en partie le succès de la politique éducative, même s'il convient de préciser que les systèmes appliqués par ces pays ne pourraient que partiellement être mis en oeuvre chez nous compte tenu du contexte local spécifique.

2.4.2

La concertation avec les cantons

Ainsi qu'il l'a été dit plus haut, la sous-commission a travaillé en étroite concertation avec les cantons, et principalement avec la CDAS et la CDIP, qui étaient parfois représentées à ses séances.

A cet égard, la concomitance entre les travaux de la sous-commission et la dernière phase de l'élaboration du concordat HarmoS a joué un rôle déterminant. En effet, le projet de concordat se trouvant encore en consultation au début des travaux de la commission, l'obligation pour les signataires dudit concordat de créer une offre appropriée de structures de jour (cf. ch. 2.4.1) n'était que provisoire à ce moment-là.

Selon la commission, les choses ont changé après l'adoption du concordat par la

7815

CDIP et sa ratification par les cantons2. Ainsi, une majorité de la commission estime que l'objectif commun des cinq initiatives est atteint (cf. ch. 3.1) si les cantons créent une offre appropriée de structures de jour pour la période de scolarité obligatoire.

En revanche, il a fallu examiner plus avant le domaine des structures de jour existant pour la prime enfance et la période préscolaire. La terminologie et les définitions utilisées lors des entretiens ont également dû être clarifiées. La CDAS et la CDIP, qui se sont penchées sur ces questions durant les travaux de la sous-commission, ont préparé une déclaration commune visant à harmoniser les définitions et à déterminer les principes de la future coopération intercantonale et nationale dans le domaine des structures de jour. Les résultats intermédiaires de ces travaux ont été mis à la disposition de la sous-commission ­ au moment de la rédaction du présent rapport, la publication de ces résultats était toutefois encore attendue.

2.4.3

La détermination de l'offre et du besoin

En raison du manque d'informations fiables dont disposait la sous-commission sur l'offre actuelle et sur le besoin en structures de jour dans les cantons, la commission a chargé l'OFAS de procéder à une enquête parmi ces derniers. Il s'agissait en l'occurrence de: 1.

recenser l'offre actuelle;

2.

recueillir des renseignements sur l'offre future;

3.

prendre connaissance de la situation actuelle concernant les procédures d'autorisation applicables aux institutions concernées (s'informer notamment sur l'existence d'une autorisation obligatoire et sur d'autres obligations);

4.

déterminer si, et sur quelle base ou de quelle manière, les prestataires sont encouragés par les pouvoirs publics.

L'enquête, réalisée et analysée par l'OFAS, a révélé ­ avec un taux de réponse de 84 % (22 cantons ont répondu aux questions posées) ­ des différences considérables dans la pratique des cantons. Ces différences ont été constatées dans presque tous les paramètres de l'enquête: il existe plusieurs modèles de financement (notamment en ce qui concerne la participation des parents); l'offre et les infrastructures varient fortement d'une commune à l'autre; là où il y en a (ailleurs, ils sont en cours d'élaboration), les systèmes les plus disparates coexistent en matière de détermination du besoin; enfin, les dispositions relatives aux autorisations varient également d'une collectivité à l'autre.

Ces résultats ont conforté la commission dans son souhait d'assister à un renforcement de la coordination intercantonale et à l'élaboration de directives communes aux cantons. Les partisans des objectifs visés par les cinq initiatives parlementaires y ont vu également une confirmation de leur volonté de voir la Confédération s'engager davantage sur ce dossier (d'autant que cela ne manquera pas d'impulser un mouvement plus large).

2

Dans plusieurs cantons, l'adhésion au concordat a été combattue par un référendum, dont l'issue n'était pas encore connue au moment de la rédaction du présent rapport.

7816

2.4.4

Les experts consultés

Sur la nécessité de modifier la Constitution en y insérant une disposition spécifique et sur la question de savoir où la placer exactement, la sous-commission a consulté l'Office fédéral de la justice ainsi qu'un expert externe, le professeur Bernhard Ehrenzeller (Université de Saint-Gall, Institut de droit et de pratique juridique). Dans son rapport adressé à la sous-commission, l'Office fédéral de la justice est arrivé à la conclusion suivante: «Il est nécessaire de modifier la Constitution pour obliger les cantons à agir dans le sens voulu par les cinq initiatives parlementaires considérées.» L'office estime toutefois que l'art. 116, al. 1, 2e phrase, Cst., éventuellement en relation avec l'art. 110, al. 1, let. a, Cst., forme une base juridique suffisante pour la compétence de soutien de la Confédération prévue par les initiatives.

Quant au professeur Ehrenzeller, son mandat consistait à examiner les possibilités de mise en oeuvre des initiatives et à faire des propositions concernant la réglementation dans la Constitution de l'accueil de jour extrafamilial des enfants. Il a lui aussi indiqué à la sous-commission que l'art. 116 Cst. se prêtait à une telle réglementation, tout en proposant d'y insérer deux nouveaux alinéas (qui deviendraient les al. 3 et 4). La principale raison de cette proposition, qui s'écarte passablement du contenu des initiatives, tient au fait qu'il ne serait pas pertinent de préciser qu'une offre est facultative et que les parents peuvent être appelés à participer aux coûts dans le cadre des dispositions relatives à la formation. En effet, les articles concernés ­ dont fait partie l'art. 62, al. 3, visé par les auteurs des initiatives ­ posent au contraire les principes de la gratuité de l'offre et de l'école obligatoire, ce qui serait en contradiction avec le dispositif proposé pour les structures de jour (cf. la formulation de la proposition Ehrenzeller au ch. 2.5).

2.5

Les propositions de la sous-commission

Au vu de ce qui précède, la sous-commission a finalement étudié trois options: 1.

modifier l'art. 62, al. 3, Cst. conformément à la proposition des cinq initiatives parlementaires;

2.

modifier l'art. 116 Cst. en y insérant deux nouveaux al. 3 et 4, conformément à la proposition du professeur Ehrenzeller.

Texte proposé pour l'al. 3: «Elle [la Confédération] encourage (ou peut encourager) les cantons à offrir un accueil extrafamilial et extrascolaire de jour adéquat pour les enfants en âge de scolarité obligatoire (ou jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire).»3 Texte proposé pour l'al. 4 (variante 1): «Si les efforts d'harmonisation de l'offre des cantons en matière d'accueil extrascolaire et extrafamilial n'aboutissent pas, la loi fixera les objectifs et les principes de cette offre.» Texte proposé pour l'al. 4 (variante 2): «La législation fédérale fixe les objectifs et les principes de l'offre en matière d'accueil extrascolaire et extrafamilial.»

3

Entre parenthèses, les sous-variantes proposées par le professeur Ehrenzeller.

7817

3.

se borner à l'harmonisation cantonale visée à l'art. 11 du concordat HarmoS et mettre fin aux travaux de mise en oeuvre des initiatives.

Le 24 avril 2008, par 5 voix contre 3, et 3 abstentions, la sous-commission a décidé de proposer à la CSEC-N de choisir la troisième option et de classer les cinq initiatives parlementaires concernées. Une minorité était favorable à la poursuite des travaux de la sous-commission en vue de l'élaboration d'un projet à l'intention de la commission.

3

Les raisons de renoncer au projet

Réunie le 22 août 2008, la CSEC-N a suivi la proposition de la sous-commission par 14 voix contre 5, et 1 abstention. Elle propose donc à son conseil de classer les cinq initiatives parlementaires. Les arguments invoqués en commission pour ou contre cette décision sont exposés ci-après.

3.1

L'avis de la majorité de la commission

En ce qui concerne la création d'offres supplémentaires de structures de jour, la majorité de la commission estime que la situation actuelle est fondamentalement différente de celle qui prévalait lorsque les initiatives ont été déposées et lorsque les deux CSEC y ont donné suite. Certes, les partisans de la position de la majorité constatent une généralisation de l'opinion selon laquelle les acteurs publics et privés doivent accroître leur implication dans ce domaine. Toutefois, ils soulignent le progrès que représente l'adoption du concordat HarmoS: contrairement à la situation qui prévalait encore au début des travaux de mise en oeuvre des interventions, les cantons se sont engagés à améliorer l'offre en structures de jour dans le domaine de l'école obligatoire tout en assurant que cette offre continuera d'être axée sur les besoins. Aux yeux de la majorité de la commission, il vaut mieux se concentrer sur la mise en oeuvre du concordat HarmoS, car l'idée d'inscrire l'objectif visé par les initiatives à l'art. 62 Cst. se révèle incohérente. Quant à savoir si, et dans quelle mesure, le traitement des cinq initiatives parlementaires a incité les cantons à considérer l'objectif qu'elles visent, la majorité préfère ne pas se prononcer; toutefois, elle estime qu'il n'est pas exclu que ces interventions, ainsi que les travaux de la sous-commission, aient eu un effet décisif.

De l'avis de la majorité, les travaux de la sous-commission ont par ailleurs révélé les points de vue les plus divergents sur la question de savoir s'il était urgent d'élaborer une disposition constitutionnelle attribuant une compétence de soutien à la Confédération. De même, la majorité estime que les opinions étaient trop partagées quant à l'emplacement d'une telle norme dans la Constitution. Pour expliquer l'impossibilité de parvenir à un consensus sur ce point, la majorité invoque la désunion qui régnait aussi bien au sein de la commission qu'entre les auteurs des initiatives concernant leurs objectifs fondamentaux. Dans ces conditions, la majorité estime qu'un projet de modification constitutionnelle soumis au Parlement et au peuple serait voué à l'échec et contre-productif: les cantons se sont déjà mis d'accord sur une marche à suivre commune, et il semble que ceux qui souhaitaient se limiter aux écoles à horaire continu aient été entendus.

7818

Pour les raisons exposées ci-dessus, la majorité de la commission estime qu'il est préférable de renoncer à poursuivre le traitement des initiatives parlementaires (qui visent toutes à modifier ou à compléter la Constitution), de proposer de les classer et de suivre la voie tracée par les cantons. Elle souligne toutefois que les travaux de mise en oeuvre des initiatives ont été utiles et considère que la sous-commission, pour l'essentiel, a rempli le mandat qui lui avait été confié (cf. ch. 2.3). La procédure a surtout permis de fournir au Parlement une documentation détaillée sur le sujet; elle a également répondu à plusieurs questions essentielles concernant les offres actuelles, ou a du moins contribué à les remettre à l'ordre du jour, notamment pour ce qui est de l'interface entre la Confédération et les cantons. Enfin, toujours selon la majorité, elle a permis de mettre le doigt sur certains problèmes vitaux, encore en suspens, et d'identifier des lacunes dans la documentation.

3.2

L'avis de la minorité de la commission

La minorité de la commission estime que l'extension des compétences de la Confédération dans le domaine des structures de jour extrascolaires et extrafamiliales reste un objectif essentiel. En effet, l'implication de la Confédération peut fournir une impulsion en faveur des structures de jour, comme cela a été le cas lorsque la Confédération a accordé des aides financières à la création de places supplémentaires dans les garderies d'enfants. Aux yeux de la minorité, s'arrêter ainsi à mi-chemin, alors que les travaux sont déjà bien avancés, laisserait aux cantons le soin de prendre le relais sur un dossier d'une importance politique majeure, au risque de voir celui-ci évoluer de manière inconstante par la suite. La minorité souligne surtout que renoncer à poursuivre la mise en oeuvre des interventions exclurait une fois de plus la prime enfance et l'âge préscolaire de tout cadre juridique; d'après elle, c'est une situation qu'il faut éviter pour des raisons de politique aussi bien éducative que sociale. Contrairement à la majorité, les partisans de la position de la minorité estiment que la discussion au sein de la sous-commission a démontré que l'art. 62 Cst. était la base de travail idéale, notamment parce que l'encouragement des structures de jour pour la prime enfance et l'âge préscolaire doit être considéré comme une tâche relevant de la politique éducative.

La minorité de la commission renonce toutefois à proposer que la sous-commission poursuive ses travaux. Elle est bien consciente que le soutien dont elle bénéficierait serait en fin de compte trop faible et qu'un échec en votation populaire ne ferait que freiner l'élan donné par le concordat HarmoS.

3.3

La motion de commission et l'invitation faite à la CDAS

Une large majorité de la commission s'accorde à penser qu'il existe un réel besoin d'élargir l'offre en structures de jour pour la prime enfance et l'âge préscolaire.

La CSEC-N a ainsi approuvé, par 14 voix contre 5, et 1 abstention, une motion4 de commission invitant le Conseil fédéral à soumettre au Parlement une prorogation et

4

Cf. annexe

7819

une révision de la loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants.

Jusqu'à la promulgation de cette base légale, la loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants reste en vigueur. D'ici la fin 2009 au plus tard, le Conseil fédéral soumettra au Parlement un message sur la prorogation de la loi fédérale ainsi que les projets d'arrêtés financiers pour les quatre années suivantes.

La commission estime qu'il incombe en premier lieu à la CDAS d'agir en la matière.

C'est pourquoi elle a adopté, par 14 voix contre 7, une proposition invitant la CDAS à élaborer un concordat concernant les structures de jour pour l'âge préscolaire ainsi qu'à examiner les modalités de mise en oeuvre d'un tel accord.

La commission estime que ces deux mesures soutiennent le principal objectif visé par les cinq initiatives, tout en évitant une votation populaire qui risquerait de faire obstacle aux travaux en cours.

7820

Annexe

Motion de commission du 21 août 2008

Incitation financière 1.

Le Conseil fédéral est appelé à soumettre au Parlement une révision de la loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants.

2.

La loi fédérale sur les aides financières à l'accueil extra-familial pour enfants reste en vigueur jusqu'à la promulgation de cette nouvelle base légale. D'ici la fin 2009 au plus tard, le Conseil fédéral soumet au Parlement un message sur la prorogation de la loi fédérale ainsi que les projets d'arrêtés fédéraux idoines relatifs au cadre financier pour les quatre années suivantes.

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