ad 05.415 Initiative parlementaire Loi sur les maisons de jeu. Conditions-cadres Rapport du 13 novembre 2006 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats Avis du Conseil fédéral du 8 décembre 2006

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous exprimons ci-après notre avis, conformément à l'art. 112, al. 3, de la loi sur le Parlement (LParl), au sujet du rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats du 13 novembre 2006.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

8 décembre 2006

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2006-2926

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Avis 1

Le point de la situation

Le 17 juin 2005, le député aux Conseil des Etats Christoffel Brändli et le conseiller national Duri Bezzola ont tous deux déposé une initiative parlementaire visant à réviser l'art. 41, al. 4, de la loi sur les maisons de jeu (LMJ). Pour autant que les circonstances le justifient, le Conseil fédéral devrait pouvoir accorder une réduction fiscale qui, selon la proposition de M. Bezzola, s'étendrait aux huit premières années d'exploitation (soit à quatre années supplémentaires) et qui, selon la proposition de M. Brändli, porterait sur une période illimitée. La modification législative proposée vise principalement à soutenir les petits casinos de montagne de St-Moritz et de Davos, qui après quatre années d'exploitation se trouvent toujours dans une situation financière délicate.

Le 16 octobre 2006, la commission des affaires juridiques du Conseil des Etats s'est ralliée par 8 voix contre 3 à la proposition Bezzola. La commission a par ailleurs accepté par 6 voix contre 5 une proposition visant à étendre la possibilité de réduction aux sept premières années d'exploitation, plutôt qu'aux huit premières, tel que proposé initalement par le conseiller national Bezzola.

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Avis du Conseil fédéral

La Constitution prévoit la perception auprès des maisons de jeu d'un impôt spécial qui ne remplace pas les impôts ordinaires sur les entreprises. Cette taxe devrait correspondre à 80% au plus des recettes brutes provenant de l'exploitation des jeux.

La possibilité pour le Conseil fédéral d'abaisser le taux de l'impôt pendant les quatre premières années d'exploitation, ainsi que le prévoit l'art. 41, al. 4, LMJ, vise à permettre à des entreprises nouvellement créées de se constituer une clientèle. Elle n'a pas pour objectif de pallier des problèmes structurels, en l'occurrence un intérêt restreint de la clientèle touristique. C'est pourtant la raison pour laquelle les maisons de jeu ne sont plus en mesure de générer un volume de recettes suffisant pour couvrir leurs frais fixes élevés. Les casinos de St-Moritz et de Davos réalisent chacun un produit brut des jeux près de 3 fois inférieur à celui du casino qui les précède en termes de chiffre d'affaires.

Le Conseil fédéral a fait usage des possibilités maximales de réduction pour ces deux établissements, à savoir un abaissement (aide au démarrage) du taux de base de l'impôt à 20 % (art. 41, al. 4, LMJ) et une réduction touristique d'un tiers du taux de base (art. 42, al. 2, LMJ), soit un taux d'imposition effectif de 13,33 %.

Le Conseil fédéral ne trouve pas opportun de prorogation la réduction fiscale dans le but de soulager deux entreprises (sociétés anonymes) dont les investisseurs ont surestimé le volume d'activité et par conséquent la rentabilité. Pour le Conseil fédéral, la capacité économique des casinos a toujours revêtu une grande importance. Le message relatif à la loi sur les maisons de jeu (FF 1997 III 175) stipule notamment que: «une concession d'exploitation ne sera octroyée que si la capacité de la maison de jeu à être rentable est plausible. Une maison de jeu improductive ne sera d'une grande utilité ni pour l'économie nationale, ni pour le fisc.» 218

Le Conseil fédéral estime que les réductions actuelles prévues dans la loi constituent des mesures suffisantes et adéquates.

2.1

Inégalités de traitement entre les exploitants

Le Conseil fédéral estime qu'une modification des règles, à ce stade, conduirait immanquablement à une inégalité de traitement vis-à-vis des régions touristiques qui, sur la base des règles établies, ont renoncé à déposer leur candidature, tout comme vis-à-vis de maisons de jeu telles que Zermatt ou Arosa, qui ont dû fermer leurs portes en 2003 en raison de difficultés financières.

Au moment du dépôt des candidatures pour l'obtention d'une concession, les requérants étaient informés des règles applicables, à savoir qu'après quatre années d'exploitation ceux qui n'atteindraient pas un seuil de rentabilité suffisant devraient cesser leur activité. La volonté du législateur n'était pas de protéger les casinos de la concurrence, mais de laisser jouer la concurrence dans le cadre d'un marché réglementé. En opposition à cela, la révision proposée par CAJ-CE favoriserait deux sociétés anonymes qui bénéficient déjà d'une rente de situation (oligopole) sur un marché relativement lucratif.

2.2

Promotion du tourisme

Sous l'angle de la promotion touristique, il convient de rappeler que les maisons de jeu de Davos et de St-Moritz, dans leur situation particulière d'établissement implanté dans une région dépendant d'une activité touristique saisonnière, bénéficient d'ores et déjà sur la base de l'art. 42, al. 2, LMJ, d'une réduction d'un tiers du taux de l'impôt durant toute la durée de la concession.

De plus, force est de constater que l'effet d'encouragement sur le tourisme des casinos de montagne, tel que visé par le législateur, s'est révélé un échec. Il s'avère au contraire que l'essentiel des revenus des ces casinos provient de la clientèle locale.

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Conclusions

Eu égard aux arguments évoqués ci-dessus, notamment aux inégalités de traitement qu'engendrerait une telle proposition, le Conseil fédéral rejette la proposition et la proposition de minorité de la CAJ-CE du 13 novembre 2006 concernant le projet de loi sur les maisons de jeu, conditions-cadres.

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