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Alimentation de l'armée et de la protection civile Partie 1: analyse et mesures à court et à moyen terme Rapport du Conseil fédéral du 30 juin 2021

2021-2281

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Condensé Contexte Le 28 juin 2017, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS), en collaboration avec le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR), d'analyser d'ici à fin 2020 l'alimentation en effectifs de l'armée et de la protection civile. Un rapport devait établir dans quelle mesure les personnes astreintes et volontaires dont le nombre et les compétences répondent aux besoins de l'armée et de la protection civile peuvent être recrutées à moyen et à long terme. Le rapport devait également montrer comment garantir que les militaires obtiennent des avantages de leur obligation de servir pour la vie civile et professionnelle.

Depuis, le Parlement a adopté plusieurs interventions en lien avec l'alimentation de la protection civile, l'augmentation du nombre de femmes au sein de l'armée et l'examen d'une obligation d'un service citoyen. En considération de ces interventions, le présent document est la première partie d'un rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale.

Le rapport présente des mesures possibles visant à améliorer l'alimentation des effectifs de la protection civile et traite une partie des interventions parlementaires. Les éventuelles mesures à plus long terme qui exigeraient une adaptation du système de l'obligation de servir et, ainsi, également de la Constitution feront l'objet d'une deuxième partie du rapport, qui sera débattue par le Conseil fédéral à la fin de l'année 2021.

L'armée a un effectif réglementaire de 100 000 militaires et un effectif réel de 140 000 militaires. L'effectif réel est supérieur à l'effectif réglementaire, parce que tous les militaires requis ne peuvent pas toujours entrer en service. Les effectifs de la protection civile ont été adaptés à la stratégie de la protection de la population et de la protection civile 2015+, aux dangers et risques actuels et futurs et calculés en fonction des besoins des communes, régions et cantons. Les conditions spécifiques aux cantons, telles que le nombre d'habitants, la topographie, la situation politique et financière, ont également été prises en compte. Le Conseil fédéral, se fondant sur les besoins des cantons, a établi une valeur cible nationale de 72 000 membres de la protection civile.

Contenu du
rapport Le Conseil fédéral conclut que l'effectif réel visé de l'armée peut être atteint encore quelques années. Toutefois, la situation va changer à la fin de cette décennie, car en 2028 et 2029, deux classes d'âge seront licenciées par année. Ensuite, en raison de la réduction de la durée d'incorporation (durée des obligations militaires par groupe d'âge) de 12 à 10 ans, deux classes d'âge arriveront au terme de leur obligation de service. Il faut néanmoins tenir compte du fait que l'assouplissement introduit avec le développement de l'armée (DEVA) ne permet pas de faire de prévisions fiables quant aux effectifs du recrutement au début du service militaire. La situation à ce sujet sera plus claire à partir de 2023, au terme de la phase de mise en oeuvre du DEVA.

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Au contraire de l'armée, la protection civile n'est déjà plus suffisamment alimentée en raison des faibles chiffres de recrutement. L'une des raisons de cette situation est l'introduction de l'affectation différenciée (aptitude) pour l'armée. Une partie des conscrits qui, auparavant, étaient affectés à la protection civile parce qu'ils étaient inaptes au service militaire peuvent désormais effectuer le service militaire. Ils ne sont ainsi plus disponibles pour la protection civile. En outre, avec la révision de 2019 de la loi fédérale sur la protection de la population et sur la protection civile, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, la durée d'incorporation a été réduite de 20 à 14 ans.

Le présent rapport présente un aperçu des mesures prises jusqu'à ce jour. Toutefois, des mesures supplémentaires concernant les effectifs de l'armée devront être proposées lorsque la mise en oeuvre de la réforme de l'armée sera terminée et qu'une base d'évaluation fiable de ses effets sur les effectifs sera disponible. En été 2023, le Conseil fédéral soumettra le rapport final de la mise en oeuvre du développement de l'armée aux Chambres fédérales. Il y évaluera également les mesures nécessaires pour l'alimentation de l'armée.

Pour la protection civile, les données sont plus claires et le besoin d'agir plus urgent, car les effectifs sont en forte réduction depuis le début 2021. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose dès aujourd'hui d'autres mesures pour la protection civile. L'alimentation de la protection civile doit, entre autres, être assurée par un rapprochement entre le service civil et la protection civile. Concrètement, les personnes astreintes au service civil doivent effectuer une partie de leur service au sein de la protection civile, dans les cantons où la protection civile est sous-alimentée en permanence. Afin de mettre en oeuvre le plus rapidement possible les mesures visant à améliorer les effectifs de la protection civile, le 30 juin 2021, le Conseil fédéral a chargé le DDPS, en collaboration avec le DEFR, d'élaborer, d'ici l'été 2022, un avant-projet des bases légales à adapter à mettre en consultation.

Comme le Conseil fédéral part du principe que les effectifs de l'armée et de la protection civile ainsi que le recrutement de conscrits satisfaisant aux compétences requises ne pourront pas
être garantis durablement avec le système actuel de l'obligation de servir, il faut également réfléchir au développement de ce système sur le long terme. Le 30 juin 2021, le Conseil fédéral a chargé le DDPS, en collaboration avec le DEFR, de soumettre une deuxième partie du rapport d'ici fin 2021, avec des options pour l'adaptation à long terme du système de l'obligation de servir. Ce rapport sera transmis jusqu'à début 2022 aux Chambres fédérales.

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Table des matières Condensé

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Contexte 1.1 Effectifs de l'armée, de la protection civile et du service civil 1.2 Rapport du groupe de travail consacré au système de l'obligation de servir et mandat du Conseil fédéral du 28 juin 2017 1.3 Interventions parlementaires et proposition de la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers pour l'intégration dans la protection civile, de personnes accomplissant un service civil 1.4 Les femmes dans l'armée et la protection civile

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8 9

2

Méthodologie 2.1 Organes participants et structure 2.2 Définitions 2.3 Bases

9 9 10 12

3

Les effectifs de l'armée 3.1 Chiffres-clés de l'armée 3.2 Développement des effectifs 3.2.1 Conscrits et aptitude 3.2.2 Effectifs réglementaires et réels 3.2.3 Effectifs des cours de répétition 3.2.4 Effectifs spécifiques 3.2.4.1 Effectifs des formations à disponibilité élevée 3.2.4.2 Effectifs des cadres militaires 3.3 Développement des effectifs féminins dans l'armée 3.4 Impacts du développement des effectifs 3.4.1 Impacts sur l'instruction et la disponibilité de base 3.4.2 Impacts sur les engagements 3.5 Possibilités de pilotage 3.6 Mise en oeuvre des mesures de l'armée 3.6.1 Affectation différenciée 3.6.2 Réduction du nombre de départs de l'école de recrues pour raisons médicales 3.6.3 Amélioration de la compatibilité de l'instruction de base et du perfectionnement avec la vie privée 3.6.4 Amélioration de la coordination du service avec la formation civile 3.6.5 Renforcement de la collaboration en matière d'instruction et certificat de formation pour les cadres de milice 3.6.6 Indemnité de formation 3.6.7 Communication et information

15 15 16 16 17 18 19 19 20 20 21 21 21 22 22 22

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3.6.8 3.7 3.8

Meilleure utilisation du potentiel des femmes dans l'armée Évaluation des effets des mesures Bilan

26 29 30

4

Les effectifs de la protection civile 4.1 Effectifs et chiffres de recrutement 4.2 Écart entre les effectifs cantonaux réglementaires et réels 4.3 Causes 4.4 Effets 4.5 Adaptations liées à la révision de la LPPCi 4.6 Bilan

31 32 34 35 35 36 37

5

Mesures visant à améliorer les effectifs de la protection civile 5.1 Mesures à court terme 5.2 Mesures à moyen terme

37 38 38

6

Suite des démarches 6.1 Mesures à court terme 6.2 Mesures à moyen terme 6.3 Prochaines étapes

42 42 42 43

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Enseignements tirés de l'engagement de lutte contre le COVID-19 pour l'alimentation de l'armée et de la protection civile

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Rapport 1

Contexte

1.1

Effectifs de l'armée, de la protection civile et du service civil

Le système de l'obligation de servir détermine quelles personnes sont affectées, à quel moment et pour quelle durée, à l'armée, au service civil ou à la protection civile, et quelles prestations elles doivent fournir. L'allocation pour perte de gain et la taxe d'exemption de l'obligation de servir sont ajoutées comme conditions financières. Le système de l'obligation de servir sert à alimenter l'armée et la protection civile en personnel de manière à ce qu'elles puissent accomplir leurs missions. Pour ce faire, un nombre suffisant de personnes astreintes et aptes au service doivent être recrutées et, si possible, conservées pour toute la durée de service légalement déterminée. L'armée et la protection civile se voient attribuer leur personnel lors des journées de recrutement: les conscrits déclarés aptes au service militaire sont affectés à l'armée et ceux déclarés inaptes au service militaire, mais aptes au service de protection civile sont affectés à la protection civile. Quiconque est apte au service militaire, mais ne peut pas le concilier avec sa conscience peut effectuer un service civil de remplacement.

La mission de l'armée est fixée à l'art. 58 de la Constitution1 et dans la loi du 3 février 1995 sur l'armée (LAAM)2. L'armée contribue à prévenir la guerre et à maintenir la paix, assure la défense du pays et de sa population et sauvegarde la souveraineté de l'espace aérien suisse. En outre, elle apporte son appui subsidiaire aux autorités civiles principalement en Suisse lors d'événements prévisibles ou imprévisibles, mais également à l'étranger en fournissant des prestations d'aide et de protection, et contribue à la promotion de la paix. Le profil de performance de l'armée découle de sa mission. Afin d'être en mesure de remplir sa mission, l'armée doit disposer de suffisamment d'effectifs.

Le mandat de la protection civile est déterminé dans la loi fédérale du 20 décembre 2019 sur la protection de la population et sur la protection civile (LPPCi)3. La protection civile est responsable de la protection de la population, de l'assistance des personnes en quête de protection, de la protection des biens culturels, du soutien des organes civils de conduite et des autres organisations partenaires, ainsi que des travaux de remise en état et des engagements en faveur de la collectivité. Pour ce
faire, elle a besoin d'un certain nombre de personnes.

Le service civil est également un instrument de la politique de sécurité, car il apporte des contributions au Réseau national de sécurité et au maintien des conditions existentielles de base. Le mandat du service civil est fixé dans la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le service civil (LSC)4: les personnes astreintes au service civil peuvent 1 2 3 4

RS 101 RS 510.1 RS 520.1 RS 824.0

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être engagées au profit de la population civile pour prévenir et maîtriser les catastrophes et les situations d'urgence et pour aider au rétablissement après de tels événements. Contrairement à l'armée et à la protection civile, le service civil ne dépend pas d'un effectif déterminé de personnes incorporées pour remplir sa mission.

Actuellement, l'armée dispose des effectifs nécessaires pour remplir sa mission, contrairement à la protection civile, qui est déjà sous-dotée (à l'échelle nationale). Pendant une phase transitoire, les militaires soumis à l'obligation de servir avant le début de la mise en oeuvre du développement de l'armée (DEVA) restent incorporés 12 ans.

Pour les militaires déclarés aptes au service après le 1er janvier 2018, la période de service obligatoire est de 10 ans (art. 19, al. 1, de l'ordonnance du 22 novembre 2017 sur les obligations militaires [OMi]5). Lorsque cette réglementation transitoire arrivera à échéance, en 2028 et 2029, deux classes d'âges seront licenciées par année. Si l'on ajoute à cela la forte augmentation des départs pour le service civil et les nombreux licenciements pour raisons médicales, l'effectif réel tombera à 120 000 militaires d'ici à la fin de la présente décennie, soit beaucoup moins que prévu. Pour réduire les départs dus à des raisons médicales, l'armée a, entre autres, adapté les critères d'aptitude et introduit une amélioration progressive des performances. En outre, en raison de «l'affectation différenciée», elle recrute actuellement aussi des conscrits qui étaient autrefois inaptes au service militaire. C'est l'une des causes de la baisse des effectifs de la protection civile. Les effectifs de la protection civile menacent de diminuer encore plus rapidement et plus fortement que ceux de l'armée.

1.2

Rapport du groupe de travail consacré au système de l'obligation de servir et mandat du Conseil fédéral du 28 juin 2017

Le 9 avril 2014, le Conseil fédéral a institué un groupe de travail pour l'évaluation du système de l'obligation de servir. Ce groupe a examiné comment les personnes astreintes au service sont affectées à l'armée, au service civil et à la protection civile, et quelles prestations elles doivent fournir. Il a étudié différentes possibilités afin de développer le système actuel, en a déduit des propositions d'amélioration concrètes ainsi que des modèles, et il a formulé une série de recommandations visant à améliorer le système actuel de l'obligation de servir. Il a présenté trois alternatives au système existant. Le «modèle norvégien» prévoit que les hommes et les femmes soient astreints au service, mais que soient incorporés seuls ceux et celles dont l'armée et la protection civile ont réellement besoin. Tous les autres sont astreints à une taxe d'exemption. Le modèle «Obligation de servir dans la sécurité» prévoit une obligation de servir pour les hommes suisses, lesquels serviraient soit dans l'armée, soit dans la protection contre les catastrophes, qui comprendrait la protection civile et une partie du service civil. Dans le modèle «Obligation générale de servir», les femmes et les hommes suisses, ainsi que, en option, les ressortissantes et ressortissants étrangers, seraient astreints au service. Dans la mesure où les besoins de l'armée seraient couverts, ils pourraient choisir où ils accompliraient leur service en fonction de leurs aptitudes. Les trois modèles (alternatifs) exigeraient une révision de la Constitution. Le 5

RS 512.21

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groupe de travail est arrivé à la conclusion qu'il n'y avait pas de raison urgente de changer radicalement le système actuel dans le sens de ces trois modèles. Cependant, au cas où un développement du système de l'obligation de servir s'avérerait nécessaire, le groupe de travail recommande le modèle «norvégien» au Conseil fédéral.

Le 28 juin 2017, le Conseil fédéral a pris acte du rapport et a chargé le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) d'analyser d'ici à fin 2020 l'alimentation en effectifs de l'armée et de la protection civile, en collaboration avec le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR). Un rapport doit établir dans quelle mesure les personnes astreintes et volontaires dont le nombre et les aptitudes répondent aux besoins de l'armée et de la protection civile peuvent être recrutées à moyen et à long terme. Le rapport doit également montrer comment garantir que les militaires tirent avantage de leur obligation de servir dans leurs vies civile et professionnelle. Afin de tenir compte de la recommandation du groupe de travail sur le développement du système de l'obligation de servir, le Conseil fédéral a chargé le DDPS de procéder à son analyse également sur la base du modèle «norvégien». Le rapport doit également expliquer quels impacts le développement de l'armée a eu sur le système de l'obligation de servir jusqu'à ce jour, et quelles sont les conséquences des mesures prises par l'armée et la protection civile pour améliorer le système actuel.

1.3

Interventions parlementaires et proposition de la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers pour l'intégration dans la protection civile, de personnes accomplissant un service civil

Depuis le mandat du Conseil fédéral, différentes interventions parlementaires en lien avec l'alimentation de l'armée et de la protection civile ont été déposées: ­

l'interpellation 19.3626 Eichenberger-Walther «Augmenter la part des femmes dans l'armée en général et aux postes de cadre en particulier!» (liquidée):

­

le postulat 19.3789 Seiler Graf «Des droits et des opportunités renforcés pour les femmes dans l'armée. L'expérience d'États choisis» (adopté au Conseil national);

­

le postulat 19.3735 Vonlanthen «Mise en place d'un service citoyen. Un moyen de revitaliser le système de milice et de relever de nouveaux défis sociétaux?» (adopté au Conseil des États).

La Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers a chargé les Commissions de la politique de sécurité des deux conseils, d'une part d'examiner la fusion entre le service civil et la protection civile, concrètement l'intégration dans la protection civile de personnes astreintes, mais n'effectuant pas le service militaire pour des motifs de conscience, et d'autre part d'examiner l'élargissement du canal de recrutement aux femmes et aux ressortissants étrangers.

Le Conseil fédéral ne s'est pas exprimé sur le contenu de ces interventions parlementaires, mais a proposé de les adopter et a précisé, dans sa réponse, que les exigences 8 / 48

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de ces interventions seraient examinées et traitées dans le cadre du rapport sur l'alimentation de l'armée et de la protection civile. Il en va de même de la proposition de la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers.

Le lien thématique avec l'alimentation des effectifs de l'armée et de la protection civile sur la base du système actuel de l'obligation de servir est donné dans toutes les interventions. Le postulat 19.3735 Vonlanthen propose toutefois des modifications fondamentales du système de l'obligation de servir qui nécessiteraient une révision de la Constitution. C'est pourquoi sa demande sera traitée dans la deuxième partie du rapport sur l'alimentation de l'armée et de la protection civile, qui contiendra des options sur un possible développement à long terme du système de l'obligation de servir.

Cette deuxième partie sera transmise aux Chambres fédérales d'ici au début 2022.

1.4

Les femmes dans l'armée et la protection civile

Comme l'accomplissement d'une obligation de servir peut jouer un rôle important dans la discussion sur l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes, l'armée et la protection civile vont tout mettre en oeuvre pour encourager le plus grand nombre possible de femmes à accomplir volontairement un service militaire ou de protection civile. Un nombre plus élevé de femmes au sein de l'armée, même sans qu'elle soit en sous-effectifs, serait le bienvenu, car elles apportent des compétences supplémentaires. Dans la perspective où l'armée doit tenir compte des sous-effectifs à plus long terme, l'argument quantitatif entre en jeu. C'est la raison pour laquelle le service volontaire des femmes a été pris en compte dans l'élaboration de mesures pour garantir l'alimentation de l'armée et de la protection civile.

2

Méthodologie

2.1

Organes participants et structure

Le présent rapport est le fruit d'une collaboration entre la Confédération et les cantons.

Du côté de la Confédération, le DDPS (Secrétariat général, Groupement Défense, Office fédéral de la protection de la population) a collaboré avec le DEFR (Office fédéral du service civil). Les cantons ont travaillé avec des représentants de la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers et de la Conférence des responsables cantonaux des affaires militaires, de la protection de la population et de la protection civile.

Après les propos introductifs et méthodologiques (ch. 1 et 2) et sur la base d'un certain nombre d'hypothèses (ch. 2), les effectifs de l'armée et de la protection civile, ainsi que les causes et les effets des problèmes d'effectifs sont présentés (ch. 3 et 4). Ces chapitres exposent les mesures qui ont déjà été prises par l'armée et la protection civile, ainsi que les conséquences attendues. Le ch. 5 présente les mesures supplémentaires possibles pour atténuer ou résoudre les problèmes d'effectifs de la protection civile. Le ch. 6 expose les intentions du Conseil fédéral concernant la mise en oeuvre de ces mesures. Le ch. 7 énonce les enseignements pertinents pour l'alimentation 9 / 48

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des effectifs, tirés de l'engagement dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19, depuis le printemps 2020.

2.2

Définitions

Effectifs de l'armée6

6

­

Chaque formation de l'armée dispose d'un effectif réglementaire, c'est-à-dire de l'effectif qui est nécessaire pour que les performances requises lors d'un engagement puissent être fournies conformément aux principes et aux procédures d'engagement. L'effectif réglementaire de l'armée correspond à la somme des effectifs réglementaires de toutes les formations et compte 100 000 militaires. Lorsqu'il est atteint, toutes les positions de toutes les unités sont occupées et l'armée est totalement fonctionnelle sur le plan du personnel. Lors que l'alimentation de l'armée fonctionne de manière idéale, au moins un militaire ayant accompli la formation nécessaire à la fonction et possédant le grade correspondant est incorporé à chaque poste de l'effectif réglementaire.

­

Que ce soit pour des raisons de santé, professionnelles ou autres, il n'est pas possible que toutes les personnes incorporées puissent se présenter à chaque convocation. Chaque formation doit donc être dotée en personnel de telle sorte que l'effectif réglementaire puisse être atteint malgré un quota moyen d'absences. C'est l'effectif réel. Compte tenu des expériences passées, il doit être d'environ 40 % supérieur à l'effectif réglementaire, c'est-à-dire 140 000 militaires pour toute l'armée. Il comprend tous les militaires qui ont accompli une formation de base et qui sont incorporés au sein des états-majors et des formations de l'armée. La différence entre l'effectif réglementaire et l'effectif réel varie entre les différentes formations. Les unités qui sont le plus susceptibles d'être engagées sont soumises à des directives relatives à la disponibilité plus strictes et sont donc plus alimentées.

­

L'effectif des personnes astreintes aux services d'instruction correspond au nombre de personnes incorporées à une formation, mais n'ayant pas encore accompli leurs services d'instruction obligatoire, c'est-à-dire qui doivent encore accomplir des cours de répétition et peuvent également être convoquées pour des services d'appui et de services actifs.

­

L'effectif des personnes non astreintes aux services d'instruction correspond au nombre de personnes incorporées à une formation et qui ont accompli leurs services d'instruction obligatoire, c'est-à-dire qui ne doivent plus suivre de cours de répétition, mais qui sont toujours astreintes au service militaire. Ces dernières restent incorporées, mais sont convoquées uniquement pour des services d'appui et des services actifs.

­

Par effectif de mise sur pied, on entend le nombre de militaires mis sur pied pour un service d'instruction ou un engagement.

Les termes sont tirés du recensement annuel des effectifs de l'armée «ARMA» 2020.

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­

Par effectif d'entrée au service, on entend le nombre de personnes entrant au service.

­

Les recrues ne sont pas comptabilisées dans l'effectif, car elles ne peuvent pas être utilisées pour des engagements de l'armée (notamment les engagements de sûreté) tant qu'elles n'ont pas achevé leur école de recrues. Les militaires incorporés aux unités organisationnelles mentionnées ci-dessous ne sont pas non plus comptabilisés dans l'effectif: l'Office de l'auditeur en chef, les détachements d'exploitation des cantons, le Centre de compétences du sport de l'armée, les états-majors du Conseil fédéral, les membres du personnel militaire du service de la Croix-Rouge, les membres du personnel militaire selon l'art. 6 de l'ordonnance du 29 mars 2017 sur les structures de l'armée (OStrA)7 et selon l'art. 18 LAAM, ainsi que les militaires en service long qui ont effectué le nombre maximal de jours de services d'instruction.

­

Par départs anticipés, on entend les militaires qui quittent le service militaire avant d'avoir totalement rempli leurs obligations militaires. Les raisons principales des départs anticipés sont notamment le passage au service civil et l'inaptitude pour des raisons médicales.

Effectifs de la protection civile

7

­

L'effectif réglementaire de la protection civile au plan cantonal se fonde sur les besoins du canton. Plusieurs facteurs sont décisifs: une analyse des dangers et des risques, une palette et un profil de prestations ainsi que d'autres conditions spécifiques à chaque canton, comme le nombre d'habitants, la topographie et les conditions financières. Dans le cadre de la stratégie de la protection de la population et de la protection civile 2015+ ainsi que de la révision de la LPPCi au 1er janvier 2021, le Conseil fédéral est parti d'un objectif national de 72 000 membres de la protection civile, en se fondant sur les données cantonales de l'époque; les cantons, quant à eux, peuvent finalement décider euxmêmes de leurs effectifs.

­

L'effectif réel comprend les personnes astreintes au service réellement incorporées dans une formation de la protection civile et disponibles en cas d'événement. Il faut s'attendre à ce qu'en cas d'événement certains membres de la protection civile ne soient pas en mesure de répondre à une convocation parce qu'ils sont malades ou pour d'autres raisons.

­

Avec la révision de la LPPCi, la réserve de personnel, dans laquelle était incorporé auparavant le personnel excédentaire, a été supprimée dans la protection civile. Elle a été remplacée par un pool de personnel intercantonal qui doit faciliter la répartition intercantonale des personnes astreintes et l'équilibrage des sureffectifs et des sous-effectifs entre les cantons. Les personnes astreintes qui ne sont pas incorporées ou sont excédentaires sont comptabilisées dans le pool de personnel intercantonal. La répartition se fait d'un commun accord entre les cantons concernés par les sureffectifs ou les souseffectifs.

RS 513.11

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2.3

Bases

Situation des données Le présent rapport a été élaboré à un moment où les prévisions sur l'évolution des effectifs de l'armée sont particulièrement difficiles, car la mise en oeuvre du développement de l'armée a modifié le modèle de recrutement et d'instruction. L'âge du recrutement a été assoupli: les personnes astreintes au service militaire peuvent désormais reporter le recrutement jusqu'à leurs 24 ans révolus. Elles disposent ainsi de cinq ans pour choisir quand elles souhaitent se présenter au recrutement. Par conséquent, le nombre de recrues pour l'armée et la protection civile peut varier fortement d'une année à l'autre. Les chiffres devraient se stabiliser d'ici 2023, lorsque ceux qui ont fait un usage maximal de la flexibilité introduite en 2018 devront se présenter au recrutement. En 2018 et 2019, environ 5000 à 6000 conscrits par année ont demandé à reporter leur recrutement. Le nombre de ceux qui effectueront finalement un service militaire, un service de protection civile ou un service civil est incertain, dès lors que l'aptitude au service militaire diminue avec l'âge8. En outre, les adaptations du modèle d'instruction, comme le passage de trois à deux écoles de recrues par année ou la modification des exigences pour les cadres militaires, ont une influence sur le recrutement de personnes astreintes au service militaire.

En raison de ce changement de système, les chiffres à partir de 2018 ne sont que partiellement comparables avec ceux des années précédentes9. Ces incertitudes devraient faire place à une image plus précise au cours des années prochaines.

Hypothèses compte tenu de la situation en termes de menace et de danger Compte tenu de la situation sécuritaire actuelle, le Conseil fédéral ne voit aucune raison de remettre en question l'orientation fondamentale de l'armée. Des ajustements mineurs sont effectués en permanence dans le cadre du développement des forces armées axées sur les capacités. Les rapports de l'armée sur le développement des forces aériennes10 et des forces terrestres11 en constituent la base. Il en va de même pour l'orientation de la protection civile.

La situation en termes de menace et de danger décrite dans les rapports sur la politique de sécurité 201012, 201613 et 2021 n'a pas fondamentalement changé, même si elle s'est accentuée dans certains domaines. Les rivalités entre les grandes puissances et les puissances régionales émergentes se sont encore intensifiées, et la poursuite et la

8

9 10 11

12 13

Voir à cet effet: Dr. med. Frank Rühli (et al): Analyse möglicher Ursachen für die kantonalen Unterschiede in den Militärtauglichkeitsraten. Rapport à l'attention du médecin en chef de l'armée, Zurich, 24 octobre 2016.

Nombre de recrues: moyenne 2010 ­ 2017: 25 254, moyenne 2018 ­ 2019: 21 558.

Avenir de la défense aérienne. Sécurité de l'espace aérien pour la protection de la Suisse et de sa population, DDPS, 2017; www.vbs.admin.ch > Défense > Air2030 > Documents.

Avenir des forces terrestres. Rapport sur les perspectives de développement des capacités des forces terrestres, DDPS, 2019; www.vabs.admin.ch > Défense > Modernisation des forces terrestres > Documents.

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mise en oeuvre des intérêts politiques de puissance sont encore plus marquées. L'utilisation concertée de moyens civils et militaires dans la gestion des conflits hybrides a également augmenté. La numérisation croissante et fulgurante a encore renforcé les menaces dans le cyberespace et, ainsi, augmenté les vulnérabilités connexes de l'État, de l'économie et de la société. La désinformation représente désormais une menace importante en matière de politique de sécurité. De même, le changement climatique multiplie les épisodes météorologiques extrêmes et les dangers aux conséquences planétaires dus aux pandémies se sont radicalement confirmés avec la pandémie de COVID-19. Ces menaces, qui sont particulièrement d'actualité, n'ont pas remplacé ni supprimé les autres menaces, par exemple celles des attaques armées, mais elles s'y sont ajoutées. Bien que la probabilité que la Suisse soit directement visée par une attaque armée reste faible, le risque touchant indirectement la Suisse a en fait augmenté ces dernières années.

Du point de vue de la protection de la population, les risques et les dangers pour la Suisse n'ont pas radicalement changé au cours des années dernières. Les pénuries d'électricité, les coupures de courant, les pandémies, les canicules et les tremblements de terre comptent toujours parmi les plus grands risques de catastrophes et de situations d'urgence ayant de graves conséquences sur la population et la société. Les grands événements sont rares et la probabilité qu'ils se produisent est moindre, mais ils auraient de lourdes conséquences. Le changement climatique pose de nouveaux défis à la prévention des catastrophes. Selon l'ONU, le nombre de catastrophes liées au climat a doublé au niveau mondial ces 20 dernières années par rapport aux deux décennies précédentes. Il est probable que les événements extrêmes liés au climat (p.ex. vagues de chaleur, sécheresse, précipitations extrêmes, inondations, tempêtes) s'intensifieront et se multiplieront en Suisse dans les prochaines décennies. La sécheresse et les vagues de chaleur de 2015 et 2018 sont des signes concrets de ce changement. Le risque d'éboulements, de glissements de terrain et de feux de forêt augmentera également en raison des changements climatiques. Simultanément, la population augmentera et l'utilisation et l'interconnexion
du cadre d'existence et de l'espace économique vont s'accroître. La numérisation fait naître de nouvelles vulnérabilités et la dépendance à un approvisionnement fonctionnel en électricité ne cesse de croître. À l'avenir, la prévention et la maîtrise de ces catastrophes et situations d'urgence, ainsi que la normalisation après de tels événements seront par conséquent plus complexes et plus exigeants.

Profils de performance de l'armée et de la protection civile À partir des tâches légales et compte tenu de la situation de la menace, un profil de performance a été défini tant pour l'armée que la protection civile.

Avec le développement de l'armée, le profil de performance de l'armée a été revu; il correspond aux menaces et aux dangers décrits dans les rapports sur la politique de sécurité. En cas d'événements non prévisibles, jusqu'à 35 000 militaires doivent pouvoir être engagés en l'espace de dix jours. Les moyens des formations de milice à disponibilité élevée ont été augmentés et le temps de réaction réduit. Toutes les capacités de l'armée, y compris celles relevant de la défense contre une attaque armée, sont constamment développées et alignées sur l'état de la menace.

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En cas de catastrophes ou de situations d'urgence plus importantes, l'armée peut venir en aide aux autorités civiles, par exemple en soutenant le système de santé comme elle l'a fait pendant la pandémie de COVID-19. Les troupes peuvent aussi localiser et secourir des personnes après un tremblement de terre ou être engagées en cas d'inondations. C'est pourquoi la disponibilité, l'alimentation suffisante en effectifs et la capacité à durer de l'armée sont également d'une grande importance pour la protection de la population.

Les nouvelles menaces, comme celles venant du cyberespace, n'annulent pas pour autant les «anciennes» menaces. Elles s'y ajoutent et sont employées dans différentes combinaisons afin d'atteindre des cibles politiques. Si toujours plus de menaces s'ajoutent aux existantes, des capacités supplémentaires doivent être développées et, si nécessaire, priorisées.

À l'avenir, la protection civile devra faire face à davantage d'interventions et donc à une augmentation de la charge de travail pour ses membres. D'une part, en cas d'événements de courte durée (intempéries, tempêtes ou inondations), il doit être possible de mettre sur pied rapidement un nombre suffisant de membres de la protection civile, et ceux-ci doivent être effectivement disponibles. D'autre part, la protection civile doit également être capable de résister à des catastrophes ou à des situations d'urgence de longue durée (par ex. en cas de pandémie ou de panne d'électricité). En outre, lors de situations d'urgence prolongées comme lors d'une pandémie, elle doit disposer de suffisamment de personnel pour pouvoir faire face à des événements supplémentaires comme des catastrophes naturelles ou des incidents techniques. Elle doit également disposer d'effectifs suffisants pour remplir les mandats de prestations des cantons, en coordination avec les autres organisations partenaires de la protection civile. Enfin, l'aide intercantonale doit pouvoir être garantie à tout moment.

Effectifs requis pour l'armée et la protection civile Actuellement, le Conseil fédéral prévoit de maintenir inchangés jusqu'en 2030 l'effectif réglementaire de l'armée et le nombre de corps de troupe qui la composent. Le besoin en cadres reste également inchangé. Une réduction des effectifs de l'armée et de la protection civile entraînerait une diminution
des prestations, ce qui n'est pas opportun au vu de l'évolution de l'état de la menace. Le présent rapport admet également que les effectifs réglementaires resteront les mêmes après 2030, soit 100 000 militaires et 72 000 membres de la protection civile. L'armée et la protection civile doivent disposer d'effectifs permettant, en cas d'engagement et d'intervention, d'aligner simultanément et à tout moment 100 000 militaires et 72 000 membres de la protection civile 14.

14

Les personnes astreintes au service civil ne sont pas prises en compte. Elles peuvent être engagées lors de catastrophes et de situations d'urgence, par exemple pour soutenir la capacité à durer des prestations fournies par la protection civile.

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3

Les effectifs de l'armée

Deux aspects doivent être observés lors de l'analyse des effectifs de l'armée. D'une part, l'armée a besoin d'un nombre suffisant de militaires incorporés dans ses formations afin que l'effectif réglementaire soit atteint en cas de mobilisation et que l'armée puisse fournir les prestations requises. D'autre part, l'effectif en cours de répétition doit être aussi proche que possible de l'effectif réglementaire afin que l'armée puisse instruire les militaires dans des conditions aussi réalistes que possible. L'évolution du nombre de personnes astreintes au service militaire et au service d'instruction est décrite ci-dessous.

3.1

Chiffres-clés de l'armée

Avec le développement de l'armée, les Chambres fédérales ont décidé que l'effectif réglementaire devait être de 100 000 militaires (ordonnance de l'Assemblée fédérale du 18 mars 2016 sur l'organisation de l'armée [OOrgA])15. L'expérience à long terme montre qu'il faut environ 1,4 fois plus de militaires pour atteindre l'effectif réglementaire, parce que les militaires incorporés ne peuvent pas tous entrer en service en cas de mobilisation pour un engagement. Raison pour laquelle la durée d'incorporation a été déterminée de manière à ce qu'un effectif réel d'environ 140 000 militaires soit atteint. Pour ce faire, les conditions de base suivantes doivent être remplies: ­

Les militaires ayant revêtu un grade de la troupe (soldats et appointés) et les sous-officiers restent incorporés dix ans après l'accomplissement de l'école de recrues (sept ans pour les militaires ayant effectué un service long).

­

Les sous-officiers supérieurs et les officiers, indépendamment de leur grade, restent incorporés plus longtemps.

­

En moyenne, au moins 15 900 militaires de chaque classe de recrutement doivent accomplir leurs obligations militaires, c'est-à-dire rester militaires jusqu'à leur licenciement ordinaire.

Les effectifs réglementaire et réel de l'armée sont définis dans l'OOrgA. La LAAM fixe d'autres chiffres-clés concernant le service militaire obligatoire et l'instruction:

15

­

le nombre de jours de service à accomplir (au maximum 280 jours de service d'instruction pour les militaires de la troupe);

­

la durée d'incorporation dans l'armée, c'est-à-dire la durée du service militaire obligatoire (12 ans);

­

la tranche d'âge pour le recrutement (jusqu'à 24 ans révolus);

­

la tranche d'âge pour l'accomplissement de l'école de recrues (jusqu'à 25 ans révolus);

­

la durée de l'école de recrues (18 semaines); RS 513.1: selon l'art. 1, al. 1, OOrgA, art. 1, al. 1, l'armée disposera d'un effectif réglementaire de maximum 100 000 militaires astreints et un effectif réel de 140 000 au plus, au terme des travaux de mise en oeuvre du DEVA.

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­

le nombre de cours de répétition (6);

­

et la durée des cours de répétition (3 semaines) pour les militaires de la troupe.

Le Conseil fédéral peut fixer dans des ordonnances, dans les limites de la loi, des règles qui s'écartent de ces chiffres-clés. Ainsi, dans l'OMi, il fixe le nombre de jours de service à effectuer à 245 (art. 47 OMi) et la durée du service militaire obligatoire à 10 ans après la fin de l'école de recrues (art. 17 OMi). L'adaptation fait partie intégrante de la mise en oeuvre du développement de l'armée, en raison de la réduction de l'effectif réglementaire, du nouveau modèle d'instruction et pour garantir les effectifs des cadres. Simultanément, le rythme est passé à deux écoles de recrues par année, d'une durée réduite et avec un service d'instruction des cadres prolongé. L'objectif était d'améliorer la formation des cadres en permettant l'acquisition précoce d'une expérience pratique de conduite et en augmentant la compatibilité du service militaire avec l'activité civile.

3.2

Développement des effectifs

3.2.1

Conscrits et aptitude

Le nombre de conscrits a légèrement diminué entre 2013 et 2017 (de 40 535 à 36 538)16 en raison des tendances démographiques. Le taux d'aptitude d'environ 65 % est resté relativement constant. En moyenne, environ 24 800 militaires étaient aptes au service militaire chaque année.

En revanche, les chiffres ont chuté en 2018 et 2019: environ 30 700 conscrits seulement se sont présentés au recrutement17, et environ 21 500 ont été déclarés aptes au service militaire18). Cette baisse du nombre de conscrits résulte très vraisemblablement du fait que beaucoup de ceux-ci ont usé de la possibilité de repousser le recrutement jusqu'à leurs 24 ans révolus. En 2023, la première classe d'âge de recrutement sous le régime du développement de l'armée aura atteint 25 ans. Les chiffres devraient en conséquence probablement se stabiliser aux valeurs de 2017. En se fondant sur une étude réalisée par l'Université de Zurich19, il faut toutefois partir du principe que l'aptitude au service militaire diminue avec l'âge.

16 17 18 19

Moyenne des conscrits 2013 ­ 2017: 38 276 militaires.

Moyenne des conscrits 2018 ­ 2019: 30 722.

Moyenne des personnes aptes au service militaire 2018 ­ 2019: 21 558 militaires correspondant à un taux d'aptitude de 70,19 %.

Dr. med. Frank Rühli (et al): Analyse möglicher Ursachen für die kantonalen Unterschiede in den Militärtauglichkeitsraten.

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3.2.2

Effectifs réglementaires et réels

Tableau 1: impacts des entrées et des départs sur les classes d'âge des conscrits

Cependant, les effectifs sont affectés par le problème persistant des départs anticipés du service militaire, comme le montrent les chiffres de la période 2013­2017. Sur l'ensemble de la période de service, une moyenne d'environ 11 800 militaires20 quitte prématurément le service militaire par classe de recrutement, la majorité d'entre eux pour des raisons médicales ou en raison d'un transfert vers le service civil; à celles-ci s'ajoutent dans une bien moindre mesure, d'autres motifs comme un congé, un séjour à l'étranger ou un décès.

Les départs au terme de l'école de recrues sont particulièrement problématiques pour l'armée. Lors de la conception du développement de l'armée, on a supposé qu'environ 2100 militaires quitteraient l'armée au terme de leur école de recrues. En réalité, ces départs sont nettement plus élevés: entre 2013 et 2017, en moyenne environ 4800 militaires ont quitté l'armée21.

Cela signifie que, par classe de recrutement, environ 13 000 militaires seulement accomplissent la totalité de leur service militaire ordinaire, soit environ 2900 militaires de moins par classe de recrutement que ce qui est nécessaire pour maintenir l'effectif réel de 140 000 militaires à long terme.

En 2018 et 2019, en raison de l'assouplissement des conditions de recrutement, le nombre de conscrits s'étant présentés au recrutement et le nombre de départs sont plus faibles. Il s'agit toutefois d'une situation temporaire; les conclusions définitives devraient être disponibles à la fin de la mise en oeuvre du développement de l'armée. Par 20 21

Moyenne des départs 2013 ­ 2017: départs pour raisons médicales: 5453 militaires, départs pour le service civil: 5826 militaires.

Moyenne des départs après le service d'instruction de base 2010 ­ 2017: départs pour raisons médicales: 2549 militaires, départ pour le service civil: 1567 militaires; départs pour d'autres raisons: 758 militaires.

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rapport au nombre de conscrits évalués, les valeurs de 2018 et 2019 correspondent à peu près à celles des années précédentes.

Malgré les départs, qui sont nettement plus nombreux que prévu, l'effectif réel des troupes dépassera la limite légale de 140 000 militaires à la fin de la décennie. Ce dépassement a été pris en compte dans les dispositions transitoires de l'OMi, en ce sens que le Conseil fédéral a fixé la durée du service militaire obligatoire pour les sous-officiers, appointés et soldats ayant commencé leur service militaire avant la mise en oeuvre du DEVA au maximum des 12 ans prévus par la LAAM. Compte tenu des situations particulières, il souhaitait ainsi augmenter l'effectif de deux classes de recrutement supplémentaires et pouvoir mieux échelonner la libération des militaires de leurs obligations militaires pendant la période de transition, dans l'intérêt des cantons. Parmi les militaires concernés par ces dispositions transitoires et dont les obligations militaires durent 12 ans, beaucoup ont déjà accompli leurs services d'instruction obligatoire.

En 2028 et 2029, deux classes de recrutement seront libérées des obligations militaires22 chaque année, à savoir les dernières classes dont les obligations militaires ont été prolongées en vertu des dispositions transitoires du développement de l'armée et deux classes «normales» selon le DEVA. Cela rendra le problème de l'alimentation de l'armée urgent. Si les départs se maintiennent au même niveau que ces dernières années, l'effectif réel passera sous la barre des 120 000 militaires à partir de 2029, en raison du licenciement de quatre classes de recrutement en deux ans. Ce chiffre se situe nettement en dessous de l'effectif réel visé de 1,4 fois l'effectif réglementaire.

En cas de taux de recrutement et de départs constants, l'armée ne sera alors plus en mesure de respecter l'effectif réel de 140 000 militaires à long terme.

3.2.3

Effectifs des cours de répétition

En cas d'engagement, le Conseil fédéral peut convoquer tous les militaires incorporés, même ceux qui ont achevé leurs services d'instruction obligatoire. En revanche, seul le nombre de militaires encore astreints aux services d'instruction est pertinent pour les effectifs des cours de répétition. Ces effectifs dépendent du nombre de recrues formées et de l'effectif de militaires déjà incorporés qui n'ont pas encore accompli tous leurs cours de répétition. Une alimentation insuffisante à partir des écoles de recrues doit être compensée par un plus grand nombre d'incorporations dans les années qui suivent. La possibilité introduite par la réforme en cours d'effectuer les six cours de répétition en neuf ans (six cours de répétition en douze ans dans les dispositions transitoires jusqu'en 2029) signifie qu'il n'est pas nécessaire que tous les militaires astreints aux services d'instruction entrent en cours de répétition chaque année. Ce phénomène est accentué par le fait que de nombreux militaires ne doivent faire en moyenne que cinq cours de répétition au lieu de six, car l'obligation de servir pour les soldats et les sous-officiers a été réduite de 260 à 245 jours de service, et la majorité des militaires actuellement incorporés ont encore accompli une école de recrues de

22

Art. 117, al. 2, OMi.

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21 semaines (aujourd'hui 18 semaines). Par conséquent, un grand nombre de militaires incorporés (état au 1er mars 2020: 43 045 militaires) ont accompli la durée totale de leurs services d'instruction et ne peuvent plus être convoqués que pour des engagements, et non plus pour des cours de répétition.

La situation se trouve encore aggravée par les départs plus nombreux que prévu pendant la période d'incorporation des militaires dans les unités. Ces dernières années, 30 à 45 % des admissions au service civil ont eu lieu entre la fin de l'école de recrues et le terme des services d'instruction obligatoire. Ces départs après la fin de l'école de recrues sont imputés directement aux effectifs des cours de répétition.

Les déplacements de service sont neutres en termes d'effectif et leur nombre n'a que très peu changé ces dernières années. Ils n'ont aucune influence directe sur l'alimentation de l'armée. Ils sont toutefois cités ici, car il est souvent mentionné que les effectifs sont trop bas en raison des déplacements de service. Cependant, cela n'aboutit qu'à ce qu'un tiers des militaires en service de troupe proviennent d'unités étrangères et que la répartition sur l'année n'est pas uniforme23, ce qui entraîne des effectifs plus élevés dans les corps de troupe qui entrent en service au second semestre.

3.2.4

Effectifs spécifiques

3.2.4.1

Effectifs des formations à disponibilité élevée

La probabilité d'une convocation pour un engagement est plus grande pour les formations à disponibilité élevée24 que pour les autres formations, et elles doivent être en mesure de fournir leurs prestations pratiquement au pied levé après avoir été convoquées. Ces formations sont donc délibérément alimentées de manière plus importante que les autres formations lors du recrutement. La proportion de militaires astreints aux services d'instruction est également plus élevée que pour les formations restantes.

Cela a un avantage direct et indirect. L'avantage direct réside dans le fait qu'un plus grand nombre de militaires peuvent être mis sur pied au besoin et que l'on peut donc s'attendre à un effectif plus élevé lors de l'entrée au service. C'est valable pour tout l'effectif, mais en particulier pour les fonctions-clés. L'armée part du principe que l'effectif réglementaire de l'unité concernée, et donc sa pleine capacité, sera atteint de cette manière. L'avantage indirect d'une alimentation plus importante réside dans une meilleure formation. En raison des effectifs plus élevés en service d'instruction, les

23 24

La principale raison de la différence entre les effectifs convoqués et dans les cours de répétition est l'approbation d'en moyenne 23,5 % des déplacements de service.

Les formations de milice à disponibilité élevée peuvent être convoquées et engagées en quelques jours. Si nécessaire, elles complètent les forces déjà engagées et créent les conditions pour la mise sur pied d'encore plus de troupes. Leur matériel est préparé pour être remis et il est stocké dans un endroit verrouillé afin qu'elles puissent s'équiper rapidement. Les formations de milices à disponibilité élevée peuvent être utilisées en particulier pour des missions de sécurité, comme l'aide en cas de catastrophes, pour la défense NBC ainsi que pour le génie, la logistique et le service sanitaire. Une partie des formations renforce la capacité de conduite et fournit un soutien logistique.

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conditions sont réunies pour que l'unité dans son ensemble puisse s'entraîner de manière réaliste25, ce qui a un effet positif sur sa disponibilité.

3.2.4.2

Effectifs des cadres militaires

Actuellement, l'armée est en mesure d'alimenter toutes les fonctions de cadre. Certaines fonctions de sous-officiers supérieurs (fourriers et sergents-majors chefs) sont très bien alimentées alors que les états-majors des corps de troupe présentent des déficits qui restent raisonnables. La réalisation du profil de performance de l'armée n'est actuellement pas menacée par une pénurie de cadres.

3.3

Développement des effectifs féminins dans l'armée

Sur les 143 372 militaires incorporés au 1er mars 2020, 1253 sont des femmes. Cela correspond à une proportion de 0,9 % et à une augmentation proportionnelle de 0,4 % par rapport à 2010.

Le nombre de femmes militaires se compose comme suit: 483 militaires de la troupe (38,5 %), 316 sous-officiers (25,2 %) et 104 sous-officiers supérieurs (8,3 %), 350 officiers (27,9 %) et un officier général (0,1 %). Neuf femmes sur dix entrées à l'école de recrues reçoivent une proposition d'avancement et commencent une école de cadres (école de sous-officiers, stage de formation pour sous-officiers supérieurs, école d'officiers). En conséquence, la part de femmes militaires occupant une fonction de cadre est proportionnellement plus élevée. Cela peut être dû au fait que les femmes accomplissant un service volontaire sont généralement plus motivées et qu'elles sont plus nombreuses à aspirer à une carrière de cadre.

Bien que toutes les fonctions soient ouvertes aux femmes depuis 2004, la proportion de femmes dans l'armée varie entre les différentes armes et fonctions. La majorité des femmes exercent des fonctions dans les troupes d'appui (états-majors de commandement, aide au commandement, logistique, service sanitaire) ou dans les domaines de la formation et du soutien (54,1 %; 48,4 % de femmes et d'hommes dans leur ensemble). Elles sont 17,7 % (31,8 % de femmes et d'hommes dans leur ensemble) à être incorporées dans des formations de combat (infanterie, chars, artillerie, génie), et 10,2 % (9,8 % de femmes et d'hommes dans leur ensemble) dans les Forces aériennes (aviation, défense contre avions). Les autres (18,6 %) se répartissent dans les armes restantes (sauvetage, défense NBC, forces spéciales et services auxiliaires).

25

Dans ce contexte, réaliste signifie en accord avec les procédures d'engagement respectives, les systèmes respectifs (principaux) et la taille pertinente des unités. La taille des unités qui doit servir aux entraînements varie selon l'arme et le niveau de disponibilité à atteindre.

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3.4

Impacts du développement des effectifs

3.4.1

Impacts sur l'instruction et la disponibilité de base

Des effectifs réduits pendant les cours de répétition ont un impact négatif sur la disponibilité de base des formations, car les formations concernées ne peuvent pas entraîner de manière réaliste les prestations qui doivent être réalisées en tant que formation. Cela concerne surtout les procédures et les prestations à partir des échelons de l'unité et du corps de troupe. L'interaction entre les sections et les unités au sein des corps de troupe fait partie de la compétence de base des cadres. Si cela ne peut être maintenu, la disponibilité de base faiblit. Dans l'armée de milice, l'engagement et l'instruction sont basés sur les cadres de milice. Si ces derniers ne peuvent pas suffisamment s'entraîner, l'armée n'est plus en mesure de fournir toutes ses prestations à long terme.

3.4.2

Impacts sur les engagements

Avec l'alimentation actuelle en effectifs, l'armée est en mesure d'effectuer les éventuels engagements planifiés et non planifiés, notamment en appui des autorités civiles.

Afin d'atteindre les effectifs d'engagement requis, il est possible de convoquer des formations taillées sur mesure. Les sous-effectifs ou les fonctions vacantes peuvent être compensés en convoquant d'autres unités, fractions d'unités ou personnes.

Toutefois, des difficultés se présenteraient si toute l'armée devait être mise sur pied ou si une grande partie de l'armée devait être engagée sur une longue période pour des engagements non planifiés. La possibilité de compenser les effectifs ou les fonctions individuelles manquants serait alors fortement limitée. Étant donné l'état de la menace, cela semble peu probable à court terme. Toutefois, l'alimentation doit être alignée sur l'effectif réglementaire qui permet de remplir l'ensemble du profil de prestations conformément à la mission de l'armée.

Les lacunes en matière d'alimentation n'ont jusqu'à présent eu aucun impact sur les engagements de l'armée. Les engagements planifiés (par ex. engagement de l'armée à l'occasion de la réunion annuelle du Forum économique mondial) tiennent compte des effectifs réduits d'astreints aux cours de répétition; si nécessaire, davantage d'unités sont convoquées et engagées en même temps, en déplaçant des dates des cours de répétition.

En cas de mobilisation, contrairement aux cours de répétition, en principe toutes les personnes astreintes au service militaire sont tenues d'entrer en service26. Si l'effectif réel n'est plus atteint à la fin de la décennie, il ne sera plus possible d'atteindre l'effectif réglementaire et de remplir toutes les tâches en cas de mobilisation générale.

26

Les exceptions à cette règle seraient, par exemple, les militaires dispensés pour raisons médicales ou effectuant un séjour à l'étranger.

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3.5

Possibilités de pilotage

Fondamentalement, on dispose de trois possibilités pour piloter l'effectif réel: le recrutement, le nombre de départs anticipés et la durée d'incorporation.

La première possibilité concerne la proportion de personnes astreintes au service militaire par rapport à la population totale. Actuellement, cette proportion est limitée aux hommes suisses, les femmes pouvant accomplir le service militaire sur une base volontaire. Une augmentation de la proportion de personnes astreintes au service militaire (par ex. en adaptant les exigences en matière d'aptitude ou en étendant le service militaire obligatoire à d'autres groupes de personnes) augmenterait le nombre des personnes aptes au service militaire, ce qui améliorerait la situation de l'alimentation aussi bien pour les engagements que pour les cours de répétition.

La deuxième possibilité concerne les départs de l'armée avant la fin de l'obligation de servir. La grande majorité des départs se fait pour des raisons médicales ou de conscience. Une réduction des départs améliorerait la situation de l'alimentation pour les engagements et les cours de répétition.

La troisième possibilité de pilotage de l'effectif réel est la durée d'incorporation. La prolongation d'un an de l'obligation de servir aurait déjà un effet considérable.

Cependant, la marge de manoeuvre pour piloter l'alimentation de l'armée en effectifs est limitée dans le cadre des dispositions légales actuelles. La proportion d'hommes astreints au service militaire est fixée par la Constitution (les hommes suisses sont astreints au service militaire). Les critères de référence des nombres cibles, de l'effectif réel, du nombre et de la durée des cours de répétition, de la durée d'incorporation et du nombre de jours de service d'instruction sont prédéfinis. La seule possibilité dans le cadre légal actuel est d'agir sur les départs anticipés de l'armée.

3.6

Mise en oeuvre des mesures de l'armée

Ces dernières années, l'armée a pris plusieurs mesures afin de rendre le service plus attractif et stimulant pour les militaires. Les mesures dans les domaines de la communication et du recrutement, de la fidélisation et de l'orientation visent ainsi à s'adresser aux jeunes dès l'âge de 14­18 ans et à leur présenter les différents aspects du service militaire. Une réorganisation des journées d'orientation a pour but de fournir aux jeunes adultes de 18 ans des informations sur le service militaire d'une manière adaptée au groupe cible. D'autres mesures visent principalement les personnes déjà en service, dans le but de réduire les licenciements pour raisons médicales et de permettre aux militaires de concilier plus facilement leur vie civile avec le quotidien de la vie militaire. Ainsi, les départs pendant et après la formation de base devraient diminuer.

3.6.1

Affectation différenciée

Avec l'affectation différenciée, il est possible, depuis 2015, d'incorporer dans l'armée également les conscrits soumis à des restrictions médicales, par exemple pour porter, soulever ou marcher. Des commissions de visite sanitaire spéciales évaluent, au cas 22 / 48

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par cas, l'aptitude à la fonction militaire envisagée. Cela permet aux conscrits soumis à des restrictions d'effectuer malgré tout le service militaire, dans la mesure où cela est médicalement justifiable. La priorité absolue dans l'évaluation de l'aptitude au service est, et reste, que les personnes déclarées aptes au service militaire ne mettent pas en danger leur propre santé ou celle de leurs camarades en accomplissant le service prévu.

3.6.2

Réduction du nombre de départs de l'école de recrues pour raisons médicales27

Afin de faciliter l'entrée dans le quotidien de la vie militaire par une période d'acclimatation plus longue, la charge physique est augmentée progressivement (programme sportif plus efficace) et les possibilités de loisirs (sortie dès la première semaine de l'école de recrues, temps libre à disposition pendant la journée, sommeil en suffisance) sont étendues. La sensibilisation et la formation ciblées des cadres et une meilleure information des recrues sur les prestations de l'armée dans le domaine social (aumônerie de l'armée, service psychopédagogique, service social de l'armée) favorisent l'acclimatation. L'amélioration progressive des performances est également due au fait que les licenciements pour raisons médicales pendant l'école de recrues sont en baisse28.

3.6.3

Amélioration de la compatibilité de l'instruction de base et du perfectionnement avec la vie privée

Le début flexible de l'école de recrues introduit avec le développement de l'armée doit permettre une meilleure coordination de la formation et du perfectionnement civils avec l'école de recrues. En outre, à partir du 1er janvier 2020, l'armée a introduit des licenciements réguliers le vendredi pendant l'école de recrues afin d'améliorer la compatibilité entre les obligations civiles et militaires. Pendant le service d'instruction de base, les recrues, les soldats et les cadres peuvent également prendre deux jours de congé individuels, librement choisis et non justifiables, dans le même but (jours dits «joker»).

3.6.4

Amélioration de la coordination du service avec la formation civile

Si les examens finaux tombent au début de l'école de recrues, les recrues concernées peuvent entrer plus tard au service. En cas de raisons personnelles importantes, les 27 28

Cf. recommandation 10 du rapport du groupe de travail consacré au système de l'obligation de servir, p. 171.

En 2009, la proportion de départs de recrues et de candidats cadres qui ont dû être licenciés de la formation de base était de 11,8 % (valeur de référence: effectif lors de l'entrée en service). Entre 2013 et 2016, la valeur était de 10,1 % et 12,6 %. En 2018, elle était de 6,5 %.

23 / 48

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militaires peuvent accomplir leur service d'instruction de manière échelonnée dans le temps. Depuis 2020, le déplacement d'une semaine de l'école de recrues d'été est un compromis entre les besoins propres à la formation professionnelle, aux hautes écoles et à l'armée. Cela devrait permettre de réduire le nombre de demandes de congé pour des examens de maturité ou d'apprentissage en suspens ou à terminer, et de maintenir l'attrait de la formation des cadres grâce à la coordination avec les études qui peut toujours être assurée.

Afin d'améliorer la synchronisation de la carrière de cadre militaire avec une formation civile, les cadres en paiement de galons qui, après le service pratique29, souhaitent commencer directement leurs études peuvent être licenciés quatre semaines avant la fin de l'école de recrues régulière et ainsi payer leurs galons plus tôt30. Ce licenciement anticipé est compensé dans le cadre des cours de répétition. Chaque année, environ 110 militaires sont licenciés prématurément en raison de leurs études. Les cadres reçoivent jusqu'à cinq jours de congé éligibles et individuels pour la préparation aux études.

3.6.5

Renforcement de la collaboration en matière d'instruction et certificat de formation pour les cadres de milice

Afin d'augmenter l'attrait de la formation militaire, la collaboration en matière d'instruction avec des institutions de formation civiles et la reconnaissance des formations militaires par le secteur civil sont renforcées. Depuis 2012, les cadres peuvent faire valider des crédits ECTS des universités et des hautes écoles pour leur formation de cadre militaire. En outre, l'armée et plusieurs hautes écoles ont convenu que le service dans certaines fonctions de l'armée serait validé comme stage. La formation militaire peut également être validée pour certaines fonctions dans les apprentissages professionnels et les cours de formation continue31. Grâce à la validation de la formation militaire pour une formation et un perfectionnement civils, le service militaire peut être un avantage supplémentaire pour les jeunes adultes. L'armée veut s'établir comme centre de formation au sein du paysage de la formation en Suisse.

Avec la création de cours validés par un certificat de formation continue reconnu (formation élémentaire, apprentissage professionnel, formation professionnelle continue) dans le cadre de l'instruction technique de base, l'armée fournit une contribution supplémentaire au développement des compétences individuelles. Pour cela, l'instruction de base à la fonction militaire doit être conçue de manière à ce qu'elle soit également

29 30 31

L'obtention d'un grade est appelée «service pratique».

Au début de l'école de recrues 2/2018, 106 cadres en ont profité. Au début de celle de 2/2019, ils étaient 98.

Reconnaissance du service pratique comme «cours obligatoire pour formateur dans les métiers de l'hôtellerie» par Hotel & Gastro formation Suisse pour les chefs de cuisine.

Reconnaissance des autorisations de conduire des catégories militaires (bateau à moteur), 930 (poids lourds) et 931 (poids lourds jusqu'à 7,5 tonnes) pour l'acquisition de l'équivalent du permis de conduire civil pour les conductrices et conducteurs. Reconnaissance de l'école de recrues et/ou de l'école de cadre comme stage de formation de contremaître.

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utile sur le plan civil. Le meilleur exemple en est le domaine de l'instruction en cybernétique introduit avec le développement de l'armée, qui équivaut à une formation spécialisée reconnue. Des réflexions supplémentaires dans cette direction font l'objet de l'élaboration en cours de la stratégie de formation 2030. Alors que les certificats obtenus dans une école de recrues se concentrent sur l'élargissement des compétences professionnelles acquises, d'autres certificats, tels que le certificat fédéral de capacité, seraient possibles pour les militaires en service long32.

Aujourd'hui déjà, tous les cadres à partir de l'échelon de chef de groupe reçoivent une attestation de formation et de compétences en plus de leur qualification militaire. Cette attestation confirme les compétences que les cadres ont acquises lors de leur formation de base et leur paiement de galons33. Il est prévu que tous les membres de l'armée reçoivent une telle attestation de formation et de compétences à la fin de leur formation de base.

Depuis le 1er mai 2019, les diplômés des écoles d'officiers et des stages de formation pour sous-officiers supérieurs peuvent obtenir gratuitement le certificat de niveau 1 de l'Association suisse des cadres34.

3.6.6

Indemnité de formation

En fonction du grade et de la durée de la formation, les cadres de milice bénéficient d'une indemnité de formation35. Celle-ci peut être utilisée pour financer une formation et un perfectionnement civils. Depuis 2018, au total 936 indemnités de formation ont été versées. Parmi elles, 479 ont été utilisées pour des cursus de bachelor.

3.6.7

Communication et information

L'étude Sécurité 202036 a montré que le grand public suisse ne disposait que de connaissances plutôt faibles de l'armée et de ses tâches. Si l'armée parvenait à atteindre plus de jeunes Suissesses et Suisses via les médias sociaux, à leur transmettre des informations sur l'armée et ses tâches et à éveiller leur intérêt, elle pourrait rencontrer des jeunes mieux informés et plus motivés lors du recrutement. L'Armée suisse développe constamment ses canaux de communication en vue d'informer davantage la population suisse sur ses activités.

32 33 34 35

36

Par exemple, une formation de diagnosticien ou de conducteur de véhicules lourds.

À ce jour, quelque 11 500 attestations de formation et de compétences ont été délivrées à des cadres.

Début de l'école de recrues 1/19. Les chiffres actuels sont livrés avec la sortie de ARMA 2020.

Depuis le 1er janvier 2018: fourrier, sergent-major d'unité, sous-officier poste central de tir (sergent-major), chef de section, commandant d'unité, aide de commandement corps de troupe, officier supérieur. Depuis le xx.xx.201x, également pour les chefs de groupe (sergent).

Sécurité 2020. Aussen-, Sicherheits- und Verteidigungspolitische Meinungsbildung im Trend; éd.: Tibor Szvircsev Tresch, Andreas Wenger; Académie militaire (ACAMIL) à l'EPF de Zurich et Center for Security Studies, EPF Zurich.

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En 2018, le projet «Orientation de carrière» a été lancé. Il doit présenter aux jeunes les chances et les possibilités que l'armée leur offre. Des stands d'information dans les gymnases et les écoles professionnelles ainsi que lors des journées d'information des hautes écoles spécialisées et des universités informent les jeunes sur l'armée sous toutes ses facettes. En outre, l'armée est présente à différents salons des métiers et de la formation. Les organes des différents niveaux d'enseignement sont informés lors des événements annuels de l'armée,37. Ces informations complètent la documentation sur le service militaire que les ressortissants suisses reçoivent des administrations militaires cantonales lorsqu'ils atteignent l'âge de 17 ans.

Au moyen des médias sociaux (Instagram, Facebook, YouTube, etc.) et des clips vidéos tels que Join #teamarmee ou Get ready for #teamarmee, les jeunes sont sensibilisés à l'armée et informés sur les opportunités et les possibilités offertes par l'armée.

L'application «SwissRookie» permet aux conscrits de se préparer de manière optimale au recrutement.

Au printemps 2021, l'Académie militaire à l'EPF de Zurich a publié une étude38 sur la présence de l'armée dans les médias sociaux. Elle conclut que ceux-ci sont actuellement l'instrument de communication des jeunes. Toutefois, seulement 15 % des personnes interrogées connaissent au moins un canal de l'Armée suisse. La présence de cette dernière dans les médias sociaux est généralement perçue de manière positive.

L'étude souligne que la connaissance d'au moins un canal de médias sociaux de l'armée peut entraîner une attitude plus positive envers l'armée, indépendamment de l'opinion générale de la personne. L'étude recommande à l'Armée suisse d'entamer de manière proactive le dialogue avec les citoyens des deux sexes et de tous les âges.

Elle a également démontré que la modération des discussions sur les canaux de médias sociaux de l'armée a augmenté la qualité de celles-ci.

3.6.8

Meilleure utilisation du potentiel des femmes dans l'armée

L'augmentation de la proportion de femmes dans l'armée doit être plutôt considérée comme l'expression de la volonté d'attirer les personnes adéquates pour la sécurité de la Suisse que comme le moyen d'améliorer l'alimentation quantitative. Au coeur de la démarche figure le principe de promotion de l'égalité des chances: «à prestations égales, chances égales».

À cette fin, des mesures ont été prises pour mieux informer les jeunes femmes sur le service militaire. L'armée veut les encourager à réfléchir à la sécurité en général et à l'armée en particulier. Mais elle veut aussi leur montrer les possibilités qui leur sont

37 38

Ces activités ont été renforcées par les cantons fin 2019.

Eva Moehlecke de Baseggio, Olivia Schneider, Tibor Szvircsev Tresch (éd.): Social Media and the Armed Forces. Springer 2020.

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offertes de compléter leurs compétences personnelles et professionnelles par des compétences qu'elles peuvent acquérir à l'armée. Les mesures concrètes sont les suivantes: ­

En collaboration avec les responsables de la formation, le DDPS examine si, à l'avenir, des aspects de la politique de sécurité doivent être inclus dans l'enseignement scolaire. Plus précisément, l'introduction d'une «journée de la sécurité» ou d'une «semaine de la sécurité» dans les gymnases et les écoles professionnelles est envisagée, par analogie avec les semaines économiques qui sont fréquemment organisées dans ces établissements.

­

L'invitation à participer aux journées d'orientation vise à accroître l'intérêt des femmes à se porter volontaires pour le service militaire. Actuellement, la plupart des cantons organisent des journées d'orientation spécialement pour les femmes, lors desquelles elles peuvent poser des questions à d'autres femmes qui accomplissent un service militaire. La journée d'orientation est également une date officielle pour les femmes39. Afin d'éliminer les obstacles qui s'opposent à la participation de nombreuses femmes, le Conseil fédéral a informé les autorités cantonales compétentes ainsi que les associations patronales et unions professionnelles que, selon le code des obligations 40 en vigueur, la couverture du revenu devait également être assurée pour les femmes qui participent volontairement aux journées d'orientation. Le nombre de femmes participant à ces journées a augmenté d'un tiers en 2019 par rapport à 2017. Environ 45 % des participantes se présentent au recrutement et environ 60 % d'entre elles entrent à l'école de recrues. Cela représente plus d'un quart des participantes aux journées d'orientation.

­

L'armée a lancé la campagne d'information «La sécurité est aussi l'affaire des femmes». Cette campagne est destinée explicitement aux jeunes femmes et utilise des formes et des canaux de communication modernes. L'objectif est d'encourager davantage de femmes à s'intéresser au service militaire afin qu'elles se portent volontaires.

Afin d'exploiter le potentiel de la forte proportion de femmes au service de la promotion de la paix, il faut clarifier si les femmes qui en ont effectué un, mais qui n'ont pas terminé l'école de recrues peuvent être incorporées au sein de l'armée, à condition d'être volontaires, ou si elles peuvent commencer directement une formation de cadre militaire. Dans une phase d'essai, les premières femmes militaires de deux contingents de promotion de la paix doivent être incorporées à l'armée en 2021. Les premiers résultats montrent un potentiel considérable: plus d'un tiers des femmes seraient prêtes à être incorporées sur une base volontaire. Dans le service de promotion de la paix, les femmes au bénéfice d'une formation civile deviennent des soldats bien formés et expérimentés sur le plan militaire qui servent dans de nombreuses fonctions.

39

40

La journée d'orientation est officielle, c'est-à-dire que l'on doit se rendre personnellement auprès d'une autorité. On distingue le rendez-vous obligatoire, auquel on doit se rendre en raison d'une obligation légale, du rendez-vous facultatif, auquel on veut se rendre pour des raisons personnelles.

RS 2020

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Le 6 décembre 2019, la cheffe du DDPS a chargé la Révision interne DDPS d'examiner quels organes du DDPS s'occupent de la promotion des femmes au sein de l'armée, du recrutement au licenciement. Les tâches, les compétences et les responsabilités impliquées ainsi que les mesures concrètes entreprises jusqu'à présent doivent être saisies. Sur la base des conclusions du rapport d'examen «Responsabilités en matière de promotion des femmes dans l'armée», l'armée a été chargée d'élaborer une stratégie pour l'égalité des genres. Cette dernière doit comprendre une vision, une stratégie et un plan de mesures concret, et doit être conçue de manière à pouvoir être communiquée à l'interne et à l'externe.

En outre, le DDPS a formé un groupe de travail «Femmes dans l'armée», qui doit examiner toutes les questions concernant la promotion des femmes dans l'armée. Le 8 mars 2020, le DDPS a publié le rapport «Femmes dans l'armée: augmentation de la proportion de femmes dans l'armée» du groupe de travail. Les mesures supplémentaires suivantes, entre autres, ont été proposées et doivent être examinées et, si possible, mises en oeuvre immédiatement: ­

Le groupe de travail a constaté qu'il manquait des bases scientifiques pour une implication plus forte des femmes dans l'armée. À cette fin, une étude doit être commandée pour clarifier, par exemple, l'image que les femmes ont de l'armée, les conditions dans lesquelles elles s'engageraient dans l'armée et les raisons pour lesquelles elles ne veulent pas accomplir de service militaire.

La question du soutien dont bénéficient les femmes à l'armée doit également être poursuivie, ainsi que celles des leurs besoins en service et des obstacles les plus importants à leur développement. Enfin, des recherches doivent être menées sur les difficultés à inclure les femmes au sein de l'armée par les hommes chargés de la conduite et de l'instruction. Cela doit permettre d'évaluer ce qui fonctionne bien, ce qui devrait être changé au plus vite et comment l'armée devrait être organisée à l'avenir.

­

Un organe spécialisé pour les femmes au sein de l'armée doit être mis en place d'ici fin 2021. Il doit orienter les différentes activités de l'armée sur l'objectif d'amener plus de femmes dans l'armée, et être un interlocuteur pour des problèmes systémiques auxquels les femmes sont confrontées au sein de l'armée.

­

Afin que le service militaire puisse être conçu de manière favorable pour les familles, que tous les responsables de leur éducation (mères et pères) puissent observer leur obligation de servir et que l'Armée suisse devienne une institution moderne et adaptée favorablement aux familles, les mesures ci-après doivent être examinées: soutien pour la prise en charge des enfants, davantage de temps partiel pour les militaires de carrière et sensibilisation des supérieurs à la question de la compatibilité avec la famille, l'activité professionnelle et les études.

Les résultats de ces mesures et de ces examens devraient être visibles dans deux ou trois ans, au moins sous forme de tendances. Cette période coïncide avec la fin de la mise en oeuvre de la réforme de l'armée en cours. Il est donc judicieux de procéder à un bilan actualisé de la situation des femmes dans l'armée, notamment dans le cadre du rapport final sur le développement de l'armée, qui doit être soumis aux Chambres fédérales en 2023.

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L'interpellation 19.3626 Eichenberger-Walther «Augmenter la part des femmes dans l'armée en général et aux postes de cadre en particulier!» charge le Conseil fédéral de définir des objectifs et des mesures afin d'augmenter la part des femmes au sein des troupes et des cadres. Le postulat 19.3789 Seiler Graf «Des droits et des opportunités renforcés pour les femmes dans l'armée. L'expérience d'États choisis» charge le Conseil fédéral de clarifier selon quelles modalités des États choisis renforcent les droits et les opportunités des femmes dans l'armée, d'évaluer les méthodes exemplaires à sa propre politique d'égalité entre les hommes et les femmes au sein de l'État et de la société, et de présenter un rapport à ce sujet. L'armée a réalisé ses premières investigations au sein des forces armées autrichiennes, suédoises, finlandaises et estoniennes.

Il s'agit d'une première sélection (qui pourra être élargie ultérieurement) d'États dont le système de service militaire est quelque peu comparable à celui de la Suisse et qui s'efforcent également d'augmenter la proportion de femmes. Avec la stratégie pour l'égalité des genres, qui se fonde également sur des comparaisons avec d'autres pays, et le plan de mesures du DDPS, le Conseil fédéral considère que l'interpellation 19.3626 Eichenberger-Walther et le postulat 19.3789 Seiler Graf ont trouvé une réponse et qu'ils ont été mis en oeuvre.

3.7

Évaluation des effets des mesures

Aujourd'hui, la majorité des mesures énumérées ci-dessus ont été mises en oeuvre.

Les premières conclusions peuvent être tirées et les premières tendances de leur effet établies.

Les mesures dans le domaine du recrutement sont efficaces. L'affectation différenciée permet de recruter environ 5 % de conscrits en plus. Ce succès est un peu relativisé par le fait qu'environ un cinquième des personnes incorporées sur une base différenciée ont déposé une demande d'admission au service civil. Les raisons à cela ne sont pas encore connues. Le développement doit continuer d'être observé.

Les départs de l'école de recrues pour des raisons médicales ont pu être réduits de presque moitié depuis 2011, probablement aussi en raison de l'amélioration progressive des performances. C'est pourquoi cette mesure doit être considérée comme un succès. En 2009, la proportion des départs de la formation de base atteignait 11,8 % (des effectifs lors de l'entrée en service), de 2013 à 2016, entre 10,1 % et 12,6 %, et 6,5 % en 2018.

Même si l'effet des mesures visant à améliorer la compatibilité de la vie civile avec le service militaire apparaîtra plus tard en raison de la pandémie de COVID-19 et que ces mesures sont généralement difficilement mesurables, elles améliorent quand même la compatibilité du service militaire avec la vie civile pour les jeunes militaires et devraient conduire à une plus grande satisfaction et donc à moins de départs.

Les mesures visant à améliorer la compatibilité du service militaire avec une formation civile sont utilisées de différentes manières. Seules quelques recrues ont fait usage de la possibilité de déposer une demande de congé en raison du chevauchement entre les examens de fin d'apprentissage et l'école de recrues. En revanche, la possibilité de raccourcir l'école de recrues de quatre semaines afin de ne pas manquer le début

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du semestre d'automne41 des hautes écoles connaît toujours plus de succès. En 2018, 106 cadres y ont eu recours. En 2019, ils étaient 109 et en 2020, ils étaient 166, ce qui représente 9,4 % de l'effectif des cadres en service d'instruction de base. Il est difficile de chiffrer l'effet de cette mesure sur l'alimentation.

Depuis que les cadres militaires reçoivent une indemnité de formation42 (1er janvier 2018), 1188 demandes ont été déposées et 1088 d'entre elles ont été approuvées.

La majorité des demandes provient de cadres de milice revêtant le grade de lieutenant (70 %). Les indemnités de formation ont principalement été utilisées pour un cursus de bachelor (53 %). Des indemnités de formation à hauteur d'environ 2,1 millions de francs ont été versées à ce jour.

Les mesures concernant la communication et l'information sont efficaces: actuellement, l'armée est plus présente dans les médias sociaux, ce qui a une influence sur sa réputation. Cet impact est encore renforcé lorsqu'une interaction avec l'armée ou avec des collègues a lieu. En renforçant sa présence physique, l'armée a amélioré la qualité de l'information et simplifié l'accès à l'armée. La restructuration des journées d'orientation et la réduction du nombre de fonctions permettent à l'armée de transmettre des informations de manière plus ciblée.

Les mesures prises pour augmenter la proportion de femmes ont été couronnées de succès: le nombre de femmes nouvellement incorporées a plus que triplé.

Le nombre élevé de départs entre la fin de l'école de recrues et la libération des obligations militaires reste problématique.

Dans la plupart des domaines, des mesures conformes aux concepts ont été mises en oeuvre. Les premières tendances positives peuvent être constatées. Il est encore trop tôt pour une analyse approfondie des effets, notamment parce que les données de 2020 ne peuvent pas être prises en compte dans l'évaluation: en raison de la pandémie de COVID-19, les chiffres ne sont pas comparables avec ceux des classes de recrutement précédentes. Une estimation des effets basée sur des valeurs de comparaison empiriques concrètes pourra être faite dans le rapport final sur le développement de l'armée 2023.

3.8

Bilan

D'ici à la fin de la présente décennie, l'armée disposera d'un effectif réel suffisant. En cas d'engagement, suffisamment de militaires peuvent donc entrer en service. Néanmoins, ces derniers doivent accomplir une formation axée sur l'engagement plus longue afin d'atteindre la disponibilité de base complète pour les prestations requises.

41

42

Depuis qu'un accord avec swissuniversities a été passé, il est possible de raccourcir l'école de recrues de quatre semaines. Les jours de service doivent cependant être rattrapés lors des cours de répétition.

Actuellement, les cadres de milice reçoivent le certificat de capacité Leadership reconnu au niveau national, après avoir accompli le service d'avancement et réussi l'examen de conduite. Lorsque de jeunes militaires débutent une carrière de cadre, ils ont droit à une indemnité de formation. Le montant dépend du grade et de la fonction.

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Il est toutefois déjà certain que dès 2030 il manquera environ 20 000 militaires à l'effectif réel visé de 140 000, si les conditions générales restent inchangées (nombre de personnes astreintes au service et nombre de départs de l'armée).

En raison des effectifs réduits, il ne sera pas possible de maintenir l'instruction au niveau souhaité dans les cours de répétition. La disponibilité de base de l'armée et le recrutement des cadres en pâtiront.

Le Conseil fédéral a reconnu ces problèmes fondamentaux, qui sont liés, d'une part, à la conception et aux dispositions transitoires du développement de l'armée et, d'autre part, au nombre trop élevé de départs prématurés de l'armée. Cependant, il considère qu'il n'est pas opportun de prendre aujourd'hui des mesures supplémentaires. La mise en oeuvre du développement de l'armée court jusqu'à fin 2022, et il ne serait pas judicieux de prendre des mesures structurelles pendant cette phase. Des prévisions fiables concernant les chiffres de recrutement annuels ne seront possibles qu'à partir de 2023. Ce n'est qu'à ce moment que l'on saura si l'assouplissement de l'accomplissement de l'école de recrues a permis de réduire le nombre de départs ou si elle a encore réduit les effectifs, étant donné que l'aptitude au service diminue avec l'âge.

Dans le présent rapport, le Conseil fédéral renonce donc à prendre des mesures allant au-delà de celles déjà prises pour améliorer l'alimentation de l'armée. La prise de mesures supplémentaires ne doit être envisagée que dans le cadre du rapport final sur le développement de l'armée, qui doit être publié au milieu de 2023, conformément au controlling politique du Conseil fédéral (art. 149b LAAM. Cela permettra de s'appuyer sur des données plus solides quant aux effectifs du recrutement et aux départs.

En collaboration avec le DEFR, le DDPS élabore une deuxième partie au rapport sur l'alimentation d'ici fin 2021, avec différentes options pour le développement à long terme du système de l'obligation de servir. Ce rapport analysera également un possible recours au modèle «norvégien» en Suisse, lequel prévoit l'extension de l'obligation de servir aux femmes, selon le mandat du Conseil fédéral du 28 juin 2017. Cette deuxième partie doit être transmise aux Chambres fédérales d'ici au début 2022.

4

Les effectifs de la protection civile

En 2004, la réforme de la protection civile prévoyait un effectif réglementaire de 120 000 membres de la protection civile, nécessitant 6000 recrues par année et une durée de l'obligation de servir de 20 ans. Par la suite, les organisations communales de protection civile ont fusionné pour former des organisations régionales. Cela a entraîné des réductions de l'effectif (réglementaire) requis et un taux de recrutement dépassant les besoins jusqu'en 2013. En conséquence, une réserve de personnel considérable a été formée. La stratégie de protection de la population et de protection civile 2015+ devait permettre d'adapter les effectifs de la protection civile aux dangers et risques actuels et futurs, et de les aligner aux besoins des cantons et des communes, et de réduire la réserve de personnel43. Dans ce contexte, mais aussi afin d'ajuster la 43

Cf. rapport du Conseil fédéral du 9 mai 2012 sur la stratégie de la protection de la population et de la protection civile 2015+ (FF 2012 5075).

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durée du service des personnes astreintes à la protection civile à celle des personnes astreintes au service militaire, il a été décidé, dans le cadre de la dernière révision de la LPPCi, de réduire la durée de l'obligation de servir et de supprimer la réserve de personnel.

L'effectif réel à la fin 2020 s'élevait à environ 76 000 membres de la protection civile avant les libérations dues à la réduction de la durée de l'obligation de servir. La réduction de 20 à 12 ans d'incorporation aurait entraîné une réduction massive des effectifs à partir du 1er janvier 2021, car tous les membres de la protection civile à l'échelon de la troupe et des sous-officiers ayant accompli 12 ans de service auraient été libérés immédiatement. Le 11 novembre 2020, à la demande des cantons et en application des possibilités légales44, le Conseil fédéral a fixé l'obligation de servir dans la protection civile à 14 ans dans toute la Suisse afin d'atténuer cette réduction.

4.1

Effectifs et chiffres de recrutement

L'effectif réel d'environ 69 000 membres de la protection civile45 est déjà en dessous de l'effectif réglementaire prévu de 72 000. L'effectif réel est composé de l'effectif d'engagement, des membres de la protection civile nouvellement recrutés et d'une partie des membres de la protection civile incorporés au pool de personnel (la version intercantonale de l'ancienne réserve cantonale de personnel). L'effectif d'engagement comprend les membres de la protection civile instruits et incorporés à une organisation de la protection civile qui sont prêts à l'engagement et peuvent être convoqués. À cela s'ajoutent de nouvelles recrues qui ne sont pas encore formées et qui doivent d'abord accomplir leur instruction de base et être incorporées au sein d'une organisation de la protection civile. Les personnes incorporées au sein du pool de personnel qui sont encore astreintes au moins six ans et qui pourraient être incorporées au sein d'une organisation de la protection civile sont également comptabilisées dans l'effectif réel.

Toutefois, une grande partie d'entre elles devraient d'abord être instruites.

Effectif réel (arrondi à 100)

Effectif d'engagement

60 200

(membres de la protection civile instruits et incorporés) Nouvelles recrues (surtout les classes de recrutement 2019/2020; instruction de base pas encore accomplie et recrues pas encore incorporées)

5 300

Pool de personnel (membres de la protection civile avec encore au moins six ans d'obligation de servir; environ 500 d'entre eux sont instruits)

3 400

Total

44 45

Art. 31, al. 7, let. a, LPPCi.

Après les libérations liées à la réduction de la durée de l'obligation de servir de 20 à 14 ans pour la troupe et les sous-officiers.

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68 900

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De plus, il y a des membres de la protection civile qui sont encore astreints au service en raison de leur âge, mais qui, pour différentes raisons, ne peuvent plus être incorporés et engagés au sein d'une organisation de la protection civile. Cela inclut les personnes incorporées au sein du pool de personnel qui sont astreintes pour une durée inférieure à six ans. Une grande partie d'entre elles n'est pas formée, et les cantons estiment que l'instruction ne vaut plus la peine compte tenu de la durée de l'obligation de servir de cinq ans ou moins. En outre, il y a des membres de la protection civile qui séjournent à l'étranger. À cela s'ajoutent les personnes libérées prématurément en faveur d'une organisation partenaire46, ainsi que les personnes qui ont été exclues de la protection civile en raison de peines privatives de liberté ou de peines pécuniaires 47.

Lors de la détermination de l'effectif réglementaire de 72 000 membres de la protection civile en 2018, le Conseil fédéral est parti du principe que le nombre de 6000 recrues par an pouvait être atteint et qu'une réduction de la durée d'incorporation de 20 à 12 ans était donc défendable. Entre-temps, il est toutefois apparu que, malgré un nombre relativement stable de conscrits et un taux d'aptitude constant, le nombre souhaité de recrues n'était pas atteint, et de loin. C'est pourquoi le Conseil fédéral a prolongé l'obligation de servir dans la protection civile de 12 à 14 ans.

Afin de garantir l'effectif nécessaire de 72 000 personnes avec une durée de service de 14 ans, environ 5200 personnes devraient être recrutées chaque année pour la protection civile. Cependant, le nombre de personnes recrutées est en baisse depuis quelques années. En 2011, le nombre de personnes ayant pu être recrutées a atteint 8350. En 2019, elles n'étaient plus que 3532. Le nombre de conscrits directement affectés à la protection civile lors du recrutement est passé de 6373 en 2011, à 3880 en 2017, à 2908 en 2018, et à 2778 en 2019. La diminution en 2018 et 2019 est en partie due au fait que le moment du recrutement et de l'accomplissement de l'école de recrues peut être choisi de manière flexible depuis 2018. En 2018 et 2019, moins de personnes ont accompli le recrutement. Cette évolution a été parallèle à la diminution du nombre total des conscrits d'environ
40 500 en 2010 à 36 500 en 2017.

En 2018 et 2019, ces chiffres ont encore diminué. Comme le mentionne le ch. 3.2.1, la comparabilité des chiffres des conscrits n'est toutefois possible que jusqu'en 2017.

Entre 2010 et 2017, tandis que le taux de recrutement des personnes aptes au service militaire est passé de 66,1 % à 68,5 % de tous les conscrits, le taux de recrutement des personnes aptes à la protection civile, quant à lui, est tombé de 15,9 % à 10,4 %. Si l'on considère uniquement les conscrits déclarés aptes (au service miliaire ou à la protection civile), la proportion des personnes aptes au service militaire a augmenté, passant de 80,6 % à 86,8 %, alors que celle des personnes aptes à la protection civile a diminué, passant de 19,4 % à 13,2 %. Cette évolution est probablement due à l'adaptation des critères d'aptitude effectuée par l'armée en 2015. Il convient de noter que la proportion des personnes inaptes tant au service militaire qu'à la protection civile

46

47

Art. 37 LPPCi: les cantons peuvent, sur demande, libérer à titre anticipé du service obligatoire dans la protection civile les personnes qui sont nécessaires à une organisation partenaire et qui en font la demande.

Art. 38 LPPCi: les personnes astreintes qui sont condamnées à des peines privatives de liberté ou à des peines pécuniaires d'au moins 30 jours-amende peuvent être exclues de la protection civile.

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n'a baissé que de manière insignifiante depuis 2017; en moyenne, elle est restée à 21 % de tous les conscrits.

Si le taux de recrutement reste constamment faible, le Conseil fédéral doit partir du principe que, pour l'année 2030, l'effectif s'élèvera à seulement 51 000 membres de la protection civile; l'effectif réglementaire prévu de 72 000 ne peut pas être atteint à moyen et long terme. Avec seulement environ 2700 recrues par an (2020) pour la protection civile, la durée de l'obligation de servir de 20 ans devrait être réintroduite afin de maintenir l'effectif réglementaire à plus long terme.

En partant de l'effectif réel de 2021, du nombre de nouvelles recrues attendues par année (supposition: 3000 personnes par année) et des libérations, le pronostic applicable au développement de l'effectif réel jusqu'en 2030 (chiffres arrondis) est le suivant:

Effectif initial Nouvelles recrues Libérations Effectif final Déficit par rapport à l'effectif réglementaire national

Effectif initial Nouvelles recrues Libérations

2021

2022

2023

2024

2025

69 000

67 500

65 700

63 600

61 200

3000

3000

3000

3000

3000

4500

4800

5100

5400

5200

67 500

65 700

63 600

61 200

59 000

4500

6300

8400

10 800

13 000

2026

2027

2028

2029

2030

59 000

57 400

55 800

54 200

52 500

3000

3000

3000

3000

3000

4600

4600

4600

4700

4500

Effectif final

57 400

55 800

54 200

52 500

51 000

Déficit par rapport à l'effectif réglementaire national

14 600

16 200

17 800

19 500

21 000

En outre, à la fin 2025, les membres de la protection civile dont l'obligation de servir a été prolongée sur la base de l'art. 99, al. 3, LPPCi devraient être libérés (voir ch. 4.5).

4.2

Écart entre les effectifs cantonaux réglementaires et réels

Étant donné qu'un membre de la protection civile effectue généralement son service là où il réside, les régions ou les villes plus peuplées et disposant d'une offre élevée de formations et d'emplois sont généralement plus susceptibles de disposer de sureffectifs que les régions aux structures économiques plus faibles. Certaines différences dans les effectifs sont probablement aussi dues au fait que les taux d'aptitude dans les différentes régions de la Suisse divergent considérablement. Dans la pratique, les cantons n'ont utilisé qu'en partie la possibilité de compenser les sureffectifs et les sous-effectifs cantonaux par l'incorporation de membres de la protection civile en 34 / 48

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dehors de leur canton de résidence. Le recours à cette possibilité diverge selon les cantons.

4.3

Causes

La réduction de la durée de l'obligation de servir de 20 à 14 ans décidée lors des révisions de la LPPCi et de l'ordonnance du 11 novembre 2020 sur la protection civile48 a entraîné une réduction globale des effectifs de la protection civile, car tous les membres aux échelons de la troupe et des sous-officiers qui ont déjà accompli 14 ans de service dans la protection civile ont été libérés immédiatement au 1er janvier 2021.

En outre, il y a des changements dans le recrutement: ­

Le nombre de conscrits a diminué. Outre le léger recul de l'évolution démographique, cela est notamment dû au fait que le recrutement et l'école de recrues peuvent être déplacés de cinq ans au maximum, ce qui a, au moins temporairement, un impact négatif sur le recrutement tant pour l'armée que pour la protection civile.

­

Depuis 2015, l'armée recrute des personnes qui, auparavant, étaient inaptes au service militaire, mais aptes à la protection civile. En conséquence, le nombre de personnes aptes à la protection civile diminue. Les chiffres concrets concernant les effets de l'affectation différenciée sur le recrutement pour la protection civile ne sont pas encore disponibles.

­

Enfin, l'évaluation médicale plus approfondie lors du recrutement au cours des dernières années a permis de réduire le nombre de recrues qui abandonnent l'école de recrues pour des raisons médicales et deviennent ensuite aptes à la protection civile. En outre, les recrues sont initiées de manière plus graduelle à l'environnement militaire (amélioration progressive des performances), ce qui conduit à moins d'abandons. De ce fait, il y a moins de passages de l'armée à la protection civile.

4.4

Effets

En raison de la diminution des effectifs, les prestations attendues de la protection civile ne pourront plus être fournies dans leur intégralité à moyen terme. Selon son ampleur, il peut y avoir un manque de personnel dans l'aide à la conduite pour les organes de conduite cantonaux et régionaux ou dans le soutien et la prise en charge de la population touchée. De plus, les performances sont réduites dans les activités qui nécessitent beaucoup de personnel, comme les travaux de remise en état après une catastrophe (p. ex. après une inondation). La capacité de durer dans une situation d'urgence prolongée, telle que la pandémie de COVID-19, est aussi fortement menacée. Par ailleurs, la protection civile fournit actuellement des prestations au profit de la commu-

48

RS 520.11

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nauté, comme lors de manifestations culturelles ou sportives. Compte tenu des problèmes d'effectifs, la mesure dans laquelle ces prestations peuvent continuer à être fournies devrait être reconsidérée.

4.5

Adaptations liées à la révision de la LPPCi

Afin de compenser les départs, la nouvelle mouture de la LPPCi contient une disposition transitoire49 en vertu de laquelle les cantons peuvent ordonner une prolongation de la durée de l'obligation de servir jusqu'à l'âge de 40 ans pour une durée maximale de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur. Compte tenu des sombres perspectives d'effectifs, tous les cantons ont examiné s'ils souhaitaient utiliser cette possibilité; actuellement, 9 cantons en font usage (AI, BL, FR, GL, GR, JU, LU, OW, TI).

Ainsi, ces cantons peuvent, dans une certaine mesure, garantir leurs effectifs jusqu'à fin 2025. Toutefois, à partir de 2026, ces cantons présenteront également des sous-effectifs, car tous les membres de la protection civile concernés par la disposition transitoire devront être libérés. Les 17 cantons restants n'utilisent pas les possibilités découlant de la disposition transitoire, ce qui aggrave parfois leurs sous-effectifs. Le Conseil fédéral n'a pas de moyens juridiques pour inciter les cantons à faire usage de cette disposition potestative. La disposition transitoire n'offre toutefois qu'une solution temporaire, les taux de recrutement trop bas étant le problème de fond. La LPPCi prévoit en outre, à la place de l'ancienne réserve de personnel cantonale, un pool de personnel intercantonal destiné à compenser les sureffectifs et les sous-effectifs. Les cantons avec des sous-effectifs sont tenus d'utiliser le pool de personnel afin d'augmenter leurs effectifs.

De plus, ces cantons doivent examiner à quel point une réactivation des membres de la protection civile jusqu'ici incorporés dans la réserve de personnel est possible et judicieuse. Une partie de la réserve supprimée par la révision de la loi et des membres de la protection civile comptabilisés dans le nouveau pool de personnel intercantonal peut être réactivée afin de combler le manque d'effectif. Ce potentiel est susceptible de varier considérablement d'un canton à l'autre, et d'une région à l'autre, en fonction de la taille du pool de personnel ainsi que de l'âge et du niveau d'instruction de ses membres. Le Conseil fédéral part du principe qu'environ 3400 membres de la protection civile pourraient être réactivés à partir du pool de personnel intercantonal et incorporés à une organisation de la protection civile. Il convient toutefois de
noter qu'une grande partie des membres du pool de personnel ne sont pas instruits. Il faut peser le coût et le bénéfice, d'autant plus que cette mesure ne peut combler le manque d'effectif qu'à très court terme. D'après les cantons, afin qu'une instruction vaille encore la peine, les membres de la protection civile du pool de personnel devraient pouvoir accomplir un service pendant encore au moins six ans. Les cantons n'exploitent donc pas non plus la possibilité que leur offre la loi d'augmenter leurs effectifs au moins à court terme. Le Conseil fédéral n'a toutefois pas de moyens juridiques pour inciter les cantons à en faire usage.

49

Art. 99, al. 3, LPPCi.

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Selon la LPPCi, seules les personnes ayant accompli l'intégralité de l'école de recrues sont exemptées de l'obligation de servir dans la protection civile50. Il s'agit d'un changement par rapport à version précédente de la loi, qui prévoyait une exemption déjà après 50 jours d'école de recrues.

Cependant, ces mesures correctives ne suffiront pas à compenser la baisse d'effectifs, même si les cantons utilisent toutes les possibilités à leur disposition. C'est pourquoi des mesures à moyen et long terme sont indispensables pour garantir les effectifs nécessaires. Elles doivent viser à utiliser le potentiel existant en personnel au-delà du cercle des personnes actuellement tenues de servir dans la protection civile ­ conformément aux bases légales en vigueur ­ ou à élargir ce cercle.

4.6

Bilan

Pour la protection civile, le problème principal n'est pas les départs, mais le taux de recrutement à la baisse. Les effectifs de la protection civile dépendent directement du nombre de conscrits qui peuvent être recrutés pour la protection civile, c'est-à-dire qui sont inaptes au service militaire, mais aptes au service de protection civile. Si les taux de recrutement de l'armée sont augmentés, les taux de recrutement pour la protection civile diminuent dans la même mesure. Avec la révision de la LPPCi, le problème de l'alimentation en effectifs de la protection civile s'est fortement aggravé, et la valeur cible nationale de 72 000 membres de la protection civile n'est déjà plus atteinte depuis début 2021.

La possibilité prévue par la LPPCi de prolonger, pour une période transitoire de cinq ans au maximum, l'obligation de servir dans la protection civile jusqu'à l'âge de 40 ans pour les membres de la protection civile qui sont déjà astreints depuis 14 ans ou ont accompli 245 jours de service ne suffit pas à garantir les effectifs à long terme.

Cette possibilité n'a pas non plus été créée pour compenser la baisse des taux de recrutement, mais plutôt pour compenser temporairement les conséquences de la réduction de l'obligation de servir de la troupe et des sous-officiers de 20 à 14 ans.

Des solutions doivent donc être trouvées plus rapidement pour la protection civile que pour l'armée.

5

Mesures visant à améliorer les effectifs de la protection civile

Des mesures à court et moyen terme visant à améliorer l'alimentation des effectifs de la protection civile sont présentées ci-après. Les mesures à court terme peuvent être prises immédiatement, et certaines d'entre elles demandent de réviser des ordonnances. Pour les mesures à moyen terme, des ordonnances et/ou des lois doivent être adaptées.

50

Art. 29, al. 2, let. b, LPPCi.

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Une partie des mesures vise à augmenter l'effectif des personnes accomplissant le service de protection civile au moyen de personnes effectuant un service civil. Dans ce cas, ils sont engagés à titre subsidiaire, en l'occurrence uniquement lorsque les effectifs cantonaux de la protection civile (y compris le pool de personnel intercantonal) ont déjà été mis sur pied ou lorsque des réserves de personnel supplémentaires sont nécessaires pour renforcer la capacité à durer.

Une deuxième partie des mesures ne concerne pas l'effectif de la protection civile, mais a pour but d'engager des personnes accomplissant un service civil lors de catastrophes ou de situations d'urgence dans le cadre du système actuel.

5.1

Mesures à court terme

Mesure A: module d'instruction obligatoire pour les personnes astreintes au service civil Selon le droit en vigueur, les personnes astreintes au service civil peuvent être engagées lors de catastrophes et de situations d'urgence. Elles pourraient désormais être tenues d'accomplir un module d'instruction «Protection de la population» d'une demi-journée ou d'une journée, sous la conduite du corps d'instruction de la protection civile, imputée sur le service civil.

Cette mesure ne résoudrait pas les problèmes d'effectifs de la protection civile, mais elle pourrait améliorer le soutien apporté par les personnes accomplissant un service civil en cas de catastrophes ou de situations d'urgence, grâce à une meilleure adaptabilité. Pour ce faire, il serait nécessaire de modifier l'ordonnance du 11 septembre 1996 sur le service civil (OSCi)51, en particulier les art. 81 et 81a, voire l'art. 80.

5.2

Mesures à moyen terme

L'objectif principal des mesures ci-dessous est d'améliorer la perméabilité entre l'armée, le service civil et la protection civile et, en particulier, de permettre l'intégration des personnes astreintes au service civil dans la protection civile. Les mesures peuvent être divisées en deux catégories: d'une part, les mesures qui facilitent l'engagement des personnes astreintes au service civil en cas de catastrophes ou de situations d'urgence (D et E) et, d'autre part, les mesures qui améliorent l'alimentation de la protection civile (F, G, H et I). Toutes ces mesures exigent l'adaptation d'au moins une loi fédérale.

Mesure B: suppression aussi large que possible du principe du domicile Les différences cantonales en matière d'effectifs décrites au ch. 4.2 découlent du fait que les personnes astreintes accomplissent en principe leur service dans leur canton de domicile. Un assouplissement du principe du domicile permettrait de réduire les 51

RS 824.01

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différences d'effectifs entre les cantons et d'améliorer la situation des cantons moins peuplés. Il convient d'examiner l'étendue de ce potentiel ainsi que les avantages et les inconvénients d'une telle mesure. L'art. 35 LPPCi devrait être adapté.

Mesure C: adaptation des exigences pour l'aptitude au service de protection civile Une partie des sous-effectifs au sein des organisations de protection civile est liée à l'adaptation des critères d'aptitude de l'armée. Par conséquent, la possibilité d'adapter aussi les exigences de la protection civile pourrait être examinée. L'art. 29 LPPCi devrait être adapté.

Mesure D: obligation faite aux personnes astreintes au service civil qui ont une formation militaire de cadre d'être engagées en tant que chefs de groupe en cas de catastrophes ou de situations d'urgence Les personnes astreintes au service civil qui ont effectué une carrière de cadre militaire avant de passer au service civil pourraient être tenues d'effectuer des engagements avec une fonction de conduite en cas de catastrophes et de situations d'urgence. À cette fin, de nouveaux cahiers des charges pour les chefs de groupes en cas de catastrophes et de situations d'urgence seraient définis.

Cette mesure pourrait améliorer la qualité du soutien apporté par les personnes accomplissant un service civil lors de catastrophes et de situations d'urgence. Pour ce faire, il faudrait créer une base légale dans la LSC pour une obligation spécifique d'engagement en cas de catastrophes ou de situations d'urgence, avec des délais de mutation ou de convocation raccourcis en conséquence. L'inscription dans la LLPCi d'une obligation standard d'effectuer des cours de cadres de la protection civile pourrait aussi être nécessaire.

Mesure E: raccourcissement des délais de convocation pour les personnes astreintes au service civil Les délais de convocation des personnes astreintes au service civil pourraient être raccourcis afin qu'elles puissent être engagées plus rapidement pour la protection civile en cas de catastrophes ou de situations d'urgence. Dans le cas de la protection civile, les formations d'intervention rapide peuvent être mises sur pied en quelques heures, et les autres formations d'intervention en quelques jours. Les délais de convocation pour les personnes astreintes au service civil devraient
être adaptés en conséquence à l'art. 22 LSC.

Cette mesure pourrait rendre plus efficace le soutien apporté par les personnes astreintes au service civil en cas de catastrophes ou de situations d'urgence, car elles seraient disponibles plus rapidement.

Mesure F: élargissement de l'obligation de servir dans la protection civile aux personnes aptes au service militaire qui, en vertu de l'art. 49, al. 2, LAAM, sont libérées de l'obligation d'accomplir le service militaire Selon la LAAM en vigueur, les personnes aptes au service militaire qui ont été recrutées, mais qui n'ont pas accompli l'école de recrues à la fin de l'année au cours de

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laquelle elles atteignent l'âge de 25 ans, sont libérées52. Elles s'acquittent ensuite de la taxe d'exemption de l'obligation de servir pendant 12 ans, sans effectuer de service53. Il serait opportun que ces personnes soient désormais déclarées astreintes au service de protection civile. Pour cela, la LPPCi et la LAAM devraient être adaptées.

Mesure G: obliger les personnes astreintes au service militaire qui deviennent inaptes après avoir accompli l'école de recrues d'effectuer ensuite le service de protection Selon le droit en vigueur, les personnes qui sont déclarées inaptes au service militaire après avoir effectué l'école de recrues ne doivent plus accomplir de service de protection civile par la suite. Les personnes qui quittent le service civil ne sont pas non plus astreintes au service de protection civile si elles ont accompli au moins autant de jours de service que la durée de l'école de recrues. Cette réglementation semble adaptée si l'on considère que les personnes incorporées dès le début au service de protection civile n'accomplissent en moyenne qu'une centaine de jours de service au cours de l'ensemble de leur service. Toutefois, la protection civile est ainsi privée de nombreuses personnes qui seraient capables d'accomplir un service de protection civile.

Il convient d'examiner si, à l'avenir, les jours de service militaire encore dus (au lieu de ceux déjà accomplis) devraient être déterminants jusqu'à l'accomplissement entier des obligations militaires. Il serait imaginable que les personnes (qui ne sont plus aptes au service militaire, mais qui sont aptes au service de protection civile) qui auraient encore au moins 80 jours de service militaire à accomplir doivent effectuer le service de protection civile. L'art. 29, al. 2, LPPCi devrait être modifié à cet effet.

Mesure H: service volontaire de protection civile pour les personnes astreintes au service civil avec incorporation à la protection civile Les personnes astreintes au service civil pourraient se porter volontaires pour servir dans des organisations de la protection civile, ce qui compterait pour leur astreinte au service civil. Elles seraient incorporées en fonction des capacités et des effectifs des cantons. Concrètement, elles accompliraient l'instruction de base de la protection civile, des cours de répétition de
3 à 21 jours chaque année et, en cas de besoin, un nombre illimité d'interventions lors de catastrophes ou de situations d'urgence. Les organes de conduite et d'intervention cantonaux pourraient prévoir des formations supplémentaires ou des formations de cadres. Cette mesure pourrait contribuer à améliorer la situation des effectifs de la protection civile. Toutefois, il est impossible d'estimer combien de personnes astreintes au service civil se porteraient effectivement volontaires. Cette mesure nécessiterait une adaptation de la LPPCi et de la LSC.

Mesure I: reconnaissance des organisations de la protection civile comme établissements d'affectation du service civil Cette mesure obligerait les personnes astreintes au service civil à accomplir une partie de leur service civil au sein d'une organisation de la protection civile durablement en

52 53

Art. 49, al. 2, LAAM.

Art. 13, al. 1, let. a, LAAM.

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sous-effectif. Il serait imaginable d'effectuer par exemple 80 jours de service à l'échelon de la troupe ou 12 ans d'incorporation, et 120 jours de service ou 12 ans d'incorporation à l'échelon des cadres. Les personnes astreintes au service civil seraient incorporées selon leurs aptitudes et les besoins cantonaux au sein d'une section de la protection civile, et affectées à une organisation de la protection civile. Fondamentalement, le principe du domicile s'appliquerait, c'est-à-dire que les personnes accomplissant un service civil seraient incorporées à une organisation de la protection civile dans leur canton ou leur région de résidence. Ces personnes devraient être incorporées dans un autre canton uniquement en cas de besoin. Les personnes astreintes au service civil incorporées dans la protection civile devraient être assimilées aux personnes astreintes à la protection civile en ce qui concerne les prestations. Elles accompliraient l'instruction de base de la protection civile, des cours de répétition de 3 à 21 jours chaque année et un nombre illimité d'interventions lors de catastrophes ou de situations d'urgence. À cela s'ajouteraient, le cas échéant, des formations de spécialiste ou de cadres. Les organes de conduite et d'intervention cantonaux pourraient prévoir des formations supplémentaires ou des formations de cadres. En même temps, les personnes astreintes au service civil continueraient d'accomplir leur service dans les établissements d'affectation traditionnels pour le reste de leur service civil, la priorité étant donnée à l'instruction et aux interventions de la protection civile: les affectations du service civil devraient être interrompues en cas de besoin, notamment lors de catastrophes ou de situations d'urgence. Les jours de service effectués dans le cadre de la protection civile seraient imputés aux personnes accomplissant un service civil sur la durée totale prédéfinie du service.

Les organisations de la protection civile seraient reconnues comme établissements d'affectation pour le service civil. Contrairement aux établissements d'affectation ordinaires, elles ne devraient pas payer de taxe à la Confédération, mais elles devraient prendre en charge la solde, les frais de subsistance et ­ si nécessaire ­ de logement des personnes astreintes au service civil incorporées,
lors des services d'instruction et des interventions. L'attribution et l'incorporation seraient effectuées par un officier de recrutement de la protection civile pour les régions de recrutement correspondantes. Dans l'année qui suit son admission au service civil, la personne astreinte au service civil accomplirait l'instruction de base ordinaire de la protection civile, d'une durée de 10 à 19 jours, et pourrait également être tenue de suivre une formation supplémentaire ou une formation de cadre si nécessaire. La personne astreinte au service civil resterait incorporée pour une durée de 10 ans au sein de l'organisation de la protection civile, ou elle effectuerait 80 jours de service à la protection civile dans le cadre de la durée totale du service qu'elle doit accomplir. En cas d'interventions lors de catastrophes ou de situation d'urgence, elle devrait éventuellement effectuer plus de jours de service si nécessaire. Pour que les organisations de la protection civile puissent toutes être reconnues en une seule fois comme des établissements d'affectation du service civil, les dispositions de la LSC (art. 41 à 43) et de l'OSCi (art. 87 à 92) en matière de reconnaissance doivent être adaptées. Les adaptations exactes qui devront être effectuées dans la législation (LSC et OSCi) pour que les personnes astreintes au service civil puissent être tenues à servir dans la protection civile dépendront de la forme concrète que prendra cette mesure; les besoins normatifs seront examinés et déterminés dans le cadre des travaux liés au projet devant être mis en consultation.

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La LPPCi et la LSC ne prévoient pas que les personnes astreintes au service militaire et au service civil soient également astreintes au service de la protection civile (art. 1 LSC et 29, al. 2, let. a, LPPCi). Toutefois, la Constitution laisse une grande marge de manoeuvre à la législation en matière de service civil et de protection civile. L'obligation, pour les personnes astreintes au service civil, d'accomplir une partie de leur service dans une organisation de la protection civile reconnue comme établissement d'affectation du service civil pourrait être créée par une révision des deux lois. Il conviendrait également de fixer que la somme du service de protection civile et du service civil ne doit pas dépasser la durée totale du service ordinaire au moment de l'admission au service civil, sauf dans le cas d'interventions lors de catastrophes ou de situations d'urgence. Si cette option devait être retenue, il serait opportun de désigner formellement les organisations de la protection civile comme des établissements d'affectation pour le service civil, ce qui nécessiterait également une révision de la LSC et de l'OSCi. Étant donné que la LPPCi et la LSC ainsi que les ordonnances correspondantes doivent être adaptées, il faudrait s'attendre à une période de mise en oeuvre d'environ trois ans.

Cette mesure permettrait d'alléger considérablement le problème de recrutement et d'alimentation en effectifs de la protection civile, car les personnes astreintes au service civil seraient incorporées à une organisation de la protection civile en cas de souseffectifs durables dans un canton ou une région. Il y a suffisamment de personnes astreintes au service civil disponibles pour cela. Comme les personnes astreintes au service civil ne seraient incorporées à la protection civile qu'en cas de sous-effectifs durables dans un canton ou une région, cette mesure n'entraînerait pas de sureffectifs (inutiles).

6

Suite des démarches

6.1

Mesures à court terme

S'agissant du service civil, une révision de l'OSCi doit prévoir, pour les personnes qui y sont astreintes, un module d'instruction obligatoire «Protection de la population» placé sous la direction du corps des instructeurs de la protection civile (mesure A) afin qu'elles puissent fournir un soutien en cas de catastrophes et de situations d'urgence. Le Conseil fédéral considère cette mesure, qui vise à améliorer la qualité de l'aide apportée par le service civil, comme appropriée.

6.2

Mesures à moyen terme

Le Conseil fédéral est d'avis que les mesures à moyen terme B et C sont appropriées.

Afin de mieux tirer parti du potentiel des personnes astreintes à la protection civile, il convient d'examiner si l'attribution peut déroger au principe du domicile. La possibilité d'introduire une aptitude différenciée pour la protection civile doit aussi être analysée.

Le Conseil fédéral est également d'avis que les mesures à moyen terme D et E pour la protection civile sont appropriées. L'engagement rapide des personnes astreintes au 42 / 48

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service civil en cas de catastrophes ou de situations d'urgence est important; l'engagement visant à lutter contre la pandémie de COVID-19 l'a également démontré. C'est pourquoi ces adaptations, qui améliorent l'intégration lors des interventions, devraient être incluses dans la prochaine révision de la LSC.

Trois des mesures à moyen terme conduisant à une amélioration des effectifs de la protection civile (mesures F, G et I) devraient également être mises en oeuvre, selon le Conseil fédéral. Il convient de renoncer à la mesure H, car cette dernière est rendue obsolète par la mesure I.

Concrètement, l'obligation de servir dans la protection civile devrait être étendue aux personnes aptes au service militaire qui sont libérées de l'armée sans avoir terminé l'école de recrues ou qui deviennent inaptes après avoir accompli l'école de recrues.

Cela permettrait de recourir à un pool de personnes potentiellement aptes à la protection civile et inutilisées jusque-là.

En outre, la mesure clé qui doit être mise en oeuvre est l'obligation pour les personnes astreintes au service civil d'effectuer une partie de leur obligation de servir dans une organisation de la protection civile durablement en sous-effectifs. De cette manière, les synergies entre la protection civile et le service civil seront exploitées.

Afin de mettre en oeuvre ces mesures, les dispositions pertinentes doivent être intégrées dans la LAAM, la LPPCi et la LSC, ainsi que dans les ordonnances correspondantes. Toutes les mesures discutées devraient nécessiter des adaptations dans les dispositions cantonales. Il appartient aux cantons de déterminer la forme concrète que doivent revêtir ces modifications et les projets législatifs qui doivent être lancés.

6.3

Prochaines étapes

Le 30 juin 2021, afin de mettre en oeuvre les mesures à court et moyen termes destinées à l'amélioration des effectifs de la protection civile, le Conseil fédéral a chargé le DDPS, en collaboration avec le DEFR, d'élaborer, d'ici l'été 2022, un projet soumis à consultation comportant les adaptations légales nécessaires.

En outre, le Conseil fédéral a chargé le DDPS, en collaboration avec la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurspompiers, d'examiner la possibilité de déroger au principe du domicile pour l'affectation ainsi que l'opportunité de prévoir une aptitude différenciée pour la protection civile.

Comme le Conseil fédéral doit partir du principe que les effectifs de l'armée et de la protection civile ne pourront pas être garantis sur le long terme avec le système de l'obligation de servir actuel si les conditions-cadres restent inchangées, il faut également réfléchir au développement de ce système à long terme. Le 30 juin 2021, le Conseil fédéral a chargé le DDPS, en collaboration avec le DEFR et la Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers, de soumettre une deuxième partie du rapport sur l'alimentation d'ici fin 2021, avec des options pour l'adaptation à long terme du système de l'obligation de servir. Cette partie du rapport sera probablement transmise aux Chambres fédérales au début 2022.

43 / 48

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Une fois la mise en oeuvre de la réforme de l'armée achevée, le Conseil fédéral soumettra aux Chambres fédérales, en été 2023, le prochain rapport prévu à l'article 149b de la LAAM, qui expose les effets des mesures à court terme visant à améliorer les effectifs de l'armée et décrit la concrétisation des options supplémentaires.

7

Enseignements tirés de l'engagement de lutte contre le COVID-19 pour l'alimentation de l'armée et de la protection civile

Lors de la lutte contre la première vague de la pandémie de COVID-19 au printemps 2020, conformément au principe de subsidiarité, les membres de la protection civile ont été engagés en premier, ensuite une partie de l'armée et, pour terminer, les personnes astreintes au service civil. En raison de la pandémie de COVID-19 émergente, dès le début février 2020, des unités de la protection civile ont été mises sur pied en soutien aux institutions du système de santé et aux organes cantonaux de conduite, parfois dans des délais très courts, dans les cantons du Tessin, du Valais, de Vaud, de Genève et des Grisons, puis dans les cantons de Bâle-Campagne, de Berne, de Lucerne et de Neuchâtel. Dès le 22 février 2020, l'armée s'est tenue prête à effectuer des engagements d'appui après des signes évidents que ces derniers pourraient être nécessaires. En raison de l'aggravation de la situation et des premières demandes d'aide des cantons du Tessin, des Grisons, de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne et de Thurgovie, le Conseil fédéral a mobilisé une partie de l'armée. Dès la fin mars 2020, des membres du service civil, coordonnés dans le cadre de la gestion des ressources de la Confédération, ont repris ponctuellement certaines tâches à long terme.

L'incertitude entourant l'évolution de la pandémie a incité les autorités compétentes à faire preuve de prudence dans leur planification et à demander le soutien d'importants contingents de l'armée. Grâce aux mesures décidées par le Conseil fédéral, qui ont conduit à une stabilisation des taux d'infection, le système de santé n'a pas été surchargé dans la mesure redoutée. En conséquence, les besoins réels du système de santé civil étaient en partie inférieurs au nombre de militaires convoqués sur la base des demandes reçues et approuvées. Bien que l'engagement de l'armée ait été reconnu comme nécessaire et apprécié par les personnes concernées, la situation a donné l'impression que l'armée avait été sollicitée avant que d'autres ressources telles que la protection civile, le service civil et les prestataires privés aient été suffisamment pris en compte. Le grand public a également réagi avec incompréhension aux informations selon lesquelles certains hôpitaux bénéficiaient du soutien de l'armée alors que leur personnel régulier était en même temps en chômage partiel. Suite
à cette expérience, la subsidiarité des demandes lors des engagements de maîtrise de la deuxième vague a été examinée par les organes fédéraux selon des critères plus stricts. Pour l'armée, cela signifiait que les autorités requérantes devaient confirmer que les ressources de tous les autres instruments disponibles, comme la protection civile, le service civil et les prestataires privés, avaient été épuisées avant de demander l'appui de l'armée.

Le soutien apporté par la protection civile, l'armée et le service civil aux autorités civiles a été couronné de succès. Les facteurs décisifs ont été, d'une part, la mobilisation très rapide, simple et décentralisée des unités de la protection civile. D'autre part, 44 / 48

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la mobilisation partielle sans heurts de l'armée a permis de faire appel rapidement à un large éventail de prestations fournies avec une grande performance. La condition préalable indispensable à l'accomplissement du mandat des deux organisations, la protection civile et l'armée, était de disposer d'unités entièrement alimentées en personnel, disposant d'une structure d'encadrement de l'équipement nécessaire.

Disponibilité La majorité des membres de la protection civile nécessaires a pu être convoquée en quelques jours et engagée de manière flexible, en fonction des besoins, de la situation et des mandats à remplir, pour quelques jours ou, avec des rotations et des remplacements, plusieurs semaines. Lors de l'engagement de lutte contre le COVID-19, il a été tenu compte des collaborateurs indispensables des entreprises d'importance systémique. Cela a concerné des collaborateurs du système de santé et d'entreprises actives dans les domaines l'approvisionnement de la population ou des transports. À l'inverse, comme la protection civile disposait de collaborateurs concernés par les fermetures temporaires ou le chômage partiel, il était généralement possible de compenser ces absences. Cela signifie qu'il n'y a presque pas eu de manque de personnel.

De manière générale, la mobilisation de l'armée a très bien fonctionné, spécialement en ce qui concerne le nombre de militaires entrés en service. En effet, 91 % des militaires convoqués sont entrés en service. Presque tous ceux qui ne sont pas entrés en service avaient une raison valable pour leur absence ou ont été dispensés par leur commandant. Pour fournir ses prestations, l'armée s'est surtout appuyée sur les formations existantes. Cependant, des militaires en service long ayant déjà effectué la durée totale des services d'instruction ont aussi été convoqués, et des volontaires ont été instruits en vue de l'engagement et intégrés dans les formations. À l'instar de la protection civile, l'armée a également dispensé des militaires travaillant dans la santé publique, pour certains d'entre eux après qu'ils ont apporté un soutien dans le cadre de l'instruction axée sur l'engagement des formations.

En règle générale, le nombre de personnes convoquées pour des engagements d'urgence et des affectations extraordinaires du service civil correspondait aux besoins
concrets prévus par les services cantonaux et fédéraux en matière de soutien par des personnes accomplissant un service civil, au travers du processus de la gestion fédérale des ressources54. Toutes les demandes n'ont pas pu être satisfaites, en particulier lorsque l'absence d'impact sur le marché du travail n'a pas été démontrée.

Appréciation de l'alimentation L'engagement des personnes astreintes à la protection civile a été efficace grâce, d'une part, au système de mise sur pied et d'intervention flexible et axé sur les besoins et, d'autre part, à l'ancrage régional de la protection civile. Seuls les membres de la protection civile dont on avait réellement besoin ont été convoqués et engagés. C'est pourquoi ils ne se trouvaient pas en permanence sur place et n'étaient pas continuellement en intervention. Afin de pouvoir répondre rapidement aux demandes de soutien, certains d'entre eux étaient de piquet. L'ancrage régional s'est avéré être un grand avantage en termes de rapidité des mises sur pied et des interventions: les 54

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membres de la protection civile ont pu être convoqués rapidement de leur vie privée ou de leur lieu de travail pour des interventions plus ou moins longues.

La durée et l'ampleur de l'engagement de lutte contre le COVID-19 ont montré que la protection civile devait être capable de tenir sur plusieurs mois, mais qu'en tant qu'organisation de milice, elle devait en même temps prendre en compte la disponibilité et les besoins de ses membres engagés (absence du travail).

L'engagement de l'armée a également été efficace. Les performances requises ont pu être fournies. Les militaires, correctement instruits et équipés, ont rapidement et adéquatement soulagé le service de santé civil, l'Administration fédérale des douanes, pour le contrôle des frontières, et la protection des ambassades et des résidences. Le niveau actuel de l'alimentation était suffisant pour assurer les postes de l'effectif réglementaire et donc la fourniture des prestations.

Sur le plan quantitatif, les effectifs et le moral observé lors de l'entrée en service sont encourageants, notamment au regard des effectifs réels en forte baisse à partir de 2029.

Toutefois, il n'est pas certain que les effectifs d'entrée en service restent aussi élevés dans d'autres situations. En revanche, les dispenses des militaires travaillant dans le système de santé ont mis en évidence un problème fondamental qui ne se présente pas uniquement en cas de pandémie.

De nombreux militaires engagés avaient déjà terminé la durée totale des services d'instruction, mais ont dû entrer en service pour cet engagement. En outre, de nombreux militaires mobilisés avaient accompli leur dernier cours de répétition il y a un certain temps déjà, en raison des déplacements de service. Comme pour tout engagement, l'armée a donc dû améliorer le niveau de formation à l'aide d'une instruction axée sur l'engagement. Bien que cette dernière ait lieu avant tout engagement, si une proportion élevée de militaires n'est plus astreinte au service d'instruction, cela peut devenir un problème selon l'étendue et le type d'instruction à rattraper. Dans le cas présent, la situation s'est résolue assez rapidement, car les formations sanitaires et d'hôpital, en particulier, ainsi que la police militaire et l'infanterie opéraient dans le cadre de leur tâche militaire principale. Si l'armée
doit fournir des prestations à un niveau de gravité plus élevé, le temps nécessaire pour mettre à disposition des formations prêtes à l'engagement risque d'être considérable. Même si les faibles effectifs des cours de répétition n'ont pas de relation directe avec les effectifs réels de l'armée, il faut tout de même garder à l'esprit la baisse du niveau d'instruction et de disponibilité qui en découle.

L'expérience acquise par les militaires engagés et les formations a été importante.

Cependant, l'engagement a affecté la disponibilité de base des formations engagées.

D'une part, toutes les formations n'ont pas fourni l'ensemble de leur palette de prestations; toutefois, les déficits d'instruction qui en résultent peuvent être partiellement compensés dans les années à venir. D'autre part, les militaires engagés se sont vu imputer plusieurs cours de répétition sur la durée totale de leurs services d'instruction, ce qui entraîne une nouvelle réduction des effectifs des personnes astreintes au service d'instruction. Cet écart ne pourra pas être comblé dans les années à venir en redéfinissant les priorités de l'alimentation. Ni le nombre de places d'instruction et d'instructeurs, ni le nombre de personnes astreintes au service d'instruction disponibles ne

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sont suffisants pour cela. Les lacunes futures en matière d'alimentation auront une incidence directe sur les prestations fournies en cas d'événement.

La première phase de la lutte contre la pandémie de COVID-19 a révélé que l'Office fédéral du service civil, vu sa taille, n'était pas en mesure de gérer simultanément un engagement extraordinaire du service civil avec ses propres ressources, en plus des affectations régulières en cours et des affectations d'urgence supplémentaires. Le service civil n'est pas conçu pour être un organisme de première intervention lors de catastrophes ou de situations d'urgence. Il intervient de manière complémentaire et subsidiaire en coopération avec les autres acteurs de tous les échelons fédéraux et selon les besoins concrets. Pour cette raison, il semble approprié de procéder à des adaptations afin de pouvoir engager un plus grand nombre de membres du service civil pour des affectations d'urgence dans les organisations de la protection civile.

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