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Mise en oeuvre à la frontière des mesures liées au coronavirus Rapport de la Commission de gestion du Conseil des États du 22 juin 2021

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L'essentiel en bref Dans le cadre de la gestion de la pandémie de coronavirus durant le printemps 2020, le Conseil fédéral a réduit le nombre de passages aux frontières au moyen de diverses mesures. Celles-ci ont été mises en oeuvre par l'Administration fédérale des douanes (AFD), en collaboration avec les autorités de sécurité cantonales. Pour la première fois depuis l'adhésion de la Suisse à l'espace Schengen, des contrôles ont systématiquement été effectués aux frontières pendant plusieurs mois, mettant ainsi les autorités face à d'importants défis opérationnels.

La Commission de gestion du Conseil des États (CdG-E) s'est penchée spécifiquement sur la mise en oeuvre des mesures Covid-19 instaurées à la frontière durant la période allant du 13 mars 2020 au 15 juin 2020. L'inspection s'est concentrée sur la manière dont l'AFD a été impliquée dans ces décisions, la façon dont elle a appliqué ces mesures et les décisions de mise en oeuvre qu'elle a prises; elle ne portait pas sur les décisions de fermeture des frontières ou de limitation du trafic frontalier.

Dans le présent rapport, la CdG-E fait part des principaux éléments portés à sa connaissance, revenant en particulier sur l'interdiction du tourisme d'achat et sur les amendes qui ont été infligées dans ce cadre. Sur cette base, elle formule cinq recommandations du point de vue de la haute surveillance parlementaire. Dans le respect des compétences que la loi lui confère, la commission a examiné la légalité, l'opportunité et l'efficacité des mesures susmentionnées. Elle souligne néanmoins qu'il s'agit d'une appréciation menée a posteriori des décisions et des mesures que l'administration fédérale a dû prendre dans des délais très courts et sur la base d'informations incertaines. Compte tenu de ce qui précède et du fait que les plaintes et griefs aient été relativement rares, la CdG-E estime que les autorités douanières et le personnel a fourni un bon travail.

Organisation de crise et implication de l'AFD Dès le 3 février 2020, l'AFD a mis en place un État-major de conduite de crise (EMC) interne, qu'elle a chargé de préparer de manière anticipée la mise en oeuvre des différentes mesures possibles à la frontière. Cela a permis de faciliter l'application des mesures ultérieures. Dès le 26 février 2020, une éventuelle fermeture des frontières
a été planifiée avec les partenaires concernés. Une fois que la fermeture a été effective, l'EMC a été en contact régulier avec le chef du Département fédéral des finances (DFF), le directeur de l'AFD, les régions et les partenaires sociaux. En outre, l'AFD était représentée au sein de l'État-major fédéral Protection de la population, conformément à l'ordonnance idoine; au besoin, elle était informée des décisions prises par l'État-major chargé de gérer la crise du coronavirus.

Légalité de l'interdiction du tourisme d'achat À partir du 23 mars 2020, l'AFD a réagi à l'augmentation inattendue du trafic ­ constatée en dépit des restrictions mises en place à la frontière ­ en infligeant des amendes sur la base de la loi sur les douanes. À partir du 2 avril 2020, les amendes pour non-respect des mesures de canalisation du trafic frontalier ont été infligées sur

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la base de l'ordonnance 2 Covid-19 et, à partir du 17 avril 2020, l'ordonnance précitée prévoyait des amendes d'ordre pour infraction à l'interdiction du tourisme d'achat.

S'agissant de la légalité des amendes fondées sur la loi sur les douanes qui ont été infligées respectivement jusqu'au 2 avril et au 17 avril 2020, les avis divergent au sein de l'administration. L'Office fédéral de la justice (OFJ) estime que la base légale est insuffisante et doute de la proportionnalité des mesures, alors que l'AFD ­ soutenue par le DFF ­ est convaincue de leur légalité et de leur nécessité. Du point de vue juridique, la CdG-E estime positif que l'interdiction du tourisme d'achat ait été inscrite dans l'ordonnance 2 Covid-19 avec effet au 17 avril. Sans vouloir préjuger du résultat de procédures judiciaires, force est de constater qu'aucune base légale explicite n'existait jusqu'au 17 avril 2020. La CdG-E estime ainsi que la base légale était insuffisante.

La commission recommande au Conseil fédéral de faire en sorte que les compétences juridiques de l'OFJ soient à l'avenir mises à profit suffisamment tôt dans le cas de décisions s'accompagnant d'une atteinte importante aux droits fondamentaux. Elle lui recommande également de clarifier la portée de l'art. 127, al. 2, de la loi sur les douanes, étant donné que cet article ne contient qu'une norme pénale générale.

Opportunité et efficacité des mesures La CdG-E constate que la coordination entre différentes unités administratives était insuffisante et que l'AFD, en tant qu'organe d'exécution compétent, aurait dû s'atteler plus rapidement à coordonner ses travaux avec ses partenaires afin de parvenir dès le départ à une solution plus proportionnée. En ce qui concerne le comportement du personnel douanier, la commission ne relève aucun problème majeur: par rapport au nombre élevé de passages et de contrôles aux frontières, un nombre relativement faible d'incidents ont donné lieu à des critiques.

Par ailleurs, la CdG-E s'est informée de la collaboration de l'AFD avec les différents départements et unités administratives ainsi qu'avec les cantons frontaliers. Sur la base des renseignements qu'elle a reçus, elle recommande au Conseil fédéral de tenir compte, lors de la planification de la gestion des pandémies, des expériences réalisées à la frontière suisse. Elle
l'invite également à tirer, avec les cantons frontaliers, un bilan de la collaboration au sujet des mesures à la frontière et du flux d'information en la matière.

La CdG-E considère que les mesures d'accompagnement prises par l'AFD ont été efficaces. Toutefois, au début de la crise, le nombre de renvois effectués à la frontière était très élevé. De plus, le flux d'information entre les unités administratives était, selon elle, insuffisant. Par conséquent, la commission recommande au Conseil fédéral d'améliorer la communication interne et externe et le flux d'information entre les unités administratives relatifs aux décisions et aux mesures ayant des répercussions importantes sur la population. Pour ce faire, le gouvernement devra améliorer la coordination entre les organes responsables des décisions et les organes responsables de la mise en oeuvre.

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Table des matières L'essentiel en bref

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Introduction

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Contexte de la prise de décision

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Contexte 3.1 Cadre normatif 3.2 Mesures à la frontière pour lutter contre la propagation du coronavirus 3.3 Engagement de l'armée

7 7 8 10

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Organisation de crise de l'AFD

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Décision de l'AFD d'interdire le tourisme d'achat 5.1 Proposition au Conseil fédéral du 1er avril 2020

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5.2 5.3 6

Proposition au Conseil fédéral du 16 avril 2020 Types d'amendes prononcées par l'AFD

14 16 17

Légalité de l'interdiction du tourisme d'achat 6.1 Appréciations juridiques divergentes concernant la légalité des amendes 6.1.1 Position de l'OFJ 6.1.2 Position de l'AFD 6.2 Appréciation de la CdG-E

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7

Opportunité des mesures 7.1 Collaboration entre les unités administratives 7.1.1 Échanges entre AFD, SEM et OFJ 7.1.2 Proportionnalité de l'interdiction du tourisme d'achat 7.1.3 Proportionnalité de l'application de l'interdiction 7.2 Autres formes de coordination et de collaboration 7.3 Collaboration avec les cantons 7.4 Relations internationales 7.5 Appréciation de la CdG-E

22 22 22 23 23 24 25 25 26

8

Efficacité des mesures 8.1 Effet escompté des mesures atteint 8.2 Communication concernant les mesures prises à la frontière 8.2.1 Communication interne 8.2.2 Communication externe 8.3 Appréciation de la CdG-E

27 27 29 29 29 31

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Suite des travaux

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Liste des abréviations

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Rapport 1

Introduction

Réunies le 18 mai 2020, les CdG ont décidé d'ouvrir une inspection sur les mesures prises par le Conseil fédéral et par l'administration fédérale pour faire face à la pandémie de coronavirus. Dans ce cadre, elles ont chargé leurs sous-commissions de déterminer les domaines qui devraient être approfondis et de mener à bien les travaux d'enquête. Cette approche doit permettre aux CdG de tenir dûment compte de l'évolution de la pandémie de Covid-19 toujours présente, de son impact et de l'ampleur de cette thématique.

Sur mandat de la Commission de gestion du Conseil des États (CdG-E), sa sous-commission DFF/DEFR a alors lancé ses travaux relatifs à la mise en oeuvre à la frontière des mesures liées au coronavirus, notamment suite à la réception de différentes requêtes de la part de particuliers au courant du mois d'avril 2020.

Au mois de mars 2020, le Conseil fédéral a donné mandat à l'Administration fédérale des douanes (AFD) de mettre en oeuvre les mesures aux frontières terrestres, en collaboration avec les autorités cantonales de sécurité1. Dans le cadre de la présente inspection, la CdG-E n'a pas examiné, par exemple, les décisions de fermeture des frontières ou de limitation du trafic frontalier, mais seulement la manière dont l'AFD a été impliquée dans ces décisions, la manière dont elle a appliqué ces mesures et quelles décisions de mise en oeuvre elle a prises. Elle a entre autres étudié la question des amendes prononcées par l'AFD durant le printemps 2020 et leur légalité. L'efficacité et l'opportunité de la mise en oeuvre ont également été analysées. La Commission a décidé de limiter son enquête à la période allant du 13 mars 2020, date de réintroduction des contrôles à la frontière pour les voyageurs en provenance d'Italie, au 15 juin 2020, date à laquelle les contrôles systématiques aux frontières avec l'Allemagne, l'Autriche et la France ont été levés.

Les premiers chapitres traitent du contexte du printemps 2020 (ch. 2 et 3), les chapitres suivants concernent la mesure de l'interdiction du tourisme d'achat et la manière dont elle a été élaborée ainsi que, en marge, d'autres mesures prises (ch. 5). Les chapitres suivant présentent les appréciations de la CdG-E sous l'angle de la légalité, de l'opportunité et de l'efficacité (ch. 6, 7 et 8). La CdG-E analyse dans ce rapport un ensemble
de mesures, mais elle s'attarde principalement sur la question de l'interdiction du tourisme d'achat et tire ses principales conclusions de cette mesure spécifique.

Le présent rapport se base notamment sur un rapport2 que l'AFD a établi à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E, sur des réponses écrites à des questions ainsi que sur les auditions menées. La sous-commission s'est fait informer par 1

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Décision du Conseil fédéral du 13 mars 2020, ch. 6: «Die Kantone, in Zusammenarbeit mit dem EFD, sorgen für die Umsetzung an den Binnen- und Aussengrenzen der Flugplätze und Flughäfen.» Mise en oeuvre à la frontière des mesures liées à la Covid-19 par l'Administration fédérale des douanes. Rapport de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 2 octobre 2020, non publié (ci-après Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020).

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l'AFD à plusieurs reprises et a pris connaissance de documents internes à l'AFD. Elle s'est renseignée sur la chronologie des événements et également sur les décisions prises à plusieurs niveaux au sein de l'AFD et en collaboration avec d'autres unités administratives et autorités. Elle a également reçu quatre requêtes. La sous-commission a en outre auditionné l'Office fédéral de la justice (OFJ) sur les questions de légalité et de proportionnalité des mesures et a pris connaissance d'un avis de droit3 de cette entité sur la question de la légalité des mesures. Elle a également entendu à ce sujet le Chef du DFF, responsable de l'AFD. La CdG-E a également pris connaissance de l'Analyse après action (After Action Review, AAR) de l'AFD4. Cette autoévaluation de l'AFD revient sur un certain nombre d'expériences positives et négatives de l'AFD durant la première vague de coronavirus.

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Contexte de la prise de décision

La situation liée à la crise du coronavirus à laquelle les autorités fédérales ont fait face durant l'année 2020 était exceptionnelle à différents égards. Selon l'AFD, le scénario de «fermeture» de facto de l'Espace Schengen paraissait encore totalement inenvisageable quelques semaines avant l'apparition du nouveau coronavirus en Europe. Une telle réintroduction des contrôles Schengen systématiques aux frontières pendant plusieurs mois n'avait alors jamais encore été réalisée en Suisse. Au niveau opérationnel également, les conséquences de ces décisions et de leur mise en oeuvre en terme de besoins en personnels, de canalisation du trafic, de difficultés d'approvisionnement du pays et de communication à la population n'avait donc quant à elles encore jamais été constatées sur le terrain par l'AFD.

Les décisions ont parfois dû être prise extrêmement rapidement et dans une situation où les informations liées au nouveau coronavirus étaient peu consolidées. En effet, les procédures de consultation ont été fortement limitées, certaines décisions ont dû être prises sans consultation des offices, ou avec une procédure de co-rapport raccourcie, des informations ont dû être échangées à un rythme très rapide entre différents échelons hiérarchiques, offices, départements et autorités. Selon l'AFD, certaines décisions prises par le Conseil fédéral ont par ailleurs dû être mises en oeuvre en l'espace de quelques heures par les autorités d'exécution.

L'incertitude liée à la crise fait qu'une information donnée par une unité administrative à un instant précis peut ne plus être exacte voire fausse quelques jours plus tard, en fonction des nouvelles connaissances acquises ou de l'évolution de la situation, raison pour laquelle les entités et unités administratives ont parfois renoncé à documenter de manière complète et uniforme les processus et discussions dans ce contexte de gestion de crise. Dans le cas de l'AFD, des notes relatives aux séances internes ont été prises en direct à l'aide d'un logiciel et la communication avec d'autres entités a 3

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Appréciation juridique de la mise en oeuvre des mesures COVID-19 à la frontière par 1'Administration fédérale des douanes. Avis de droit de l'OFJ du 2 octobre 2020 à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E (ci-après: lettre de l'OFJ du 2 octobre 2020).

Covid-19 Einsatzauswertung (AAR) 1. Welle. Rapport de l'AFD du 1er février 2021 (non publié; ci-après: Analyse après action du 1er février 2021).

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régulièrement eu lieu par téléphone durant cette période. L'AFD a déclaré que cette manière de faire n'était pas idéale, mais avait été dictée par la situation de crise et la nécessité de prendre des décisions rapidement.

La CdG-E souhaite ainsi mettre en perspective les appréciations qu'elle porte dans ce rapport. Les appréciations portées le sont a posteriori, sur un temps relativement long et avec un recul au moins partiel sur certains événements, alors que les décisions prises au sein de l'administration fédérale l'ont alors été sur un laps de temps très court. Il convient également de tenir compte du fait que les contrôles liés aux franchissements de frontière constituent des opérations de masse, mais que chaque personne qui est contrôlée, renvoyée ou même amendée a l'impression que l'on porte atteinte à ses droits individuels. Les 8848 amendes prononcées au total ne représentent qu'une infime partie des centaines de milliers de franchissements de frontière quotidiens (même durant la période de fermeture des frontières au printemps 2020, entre 200 000 et 400 000 passages de frontière quotidiens avaient lieu). Par comparaison, les cas ayant entraîné des réclamations ou même des plaintes des personnes concernées sont très peu nombreux. Le nombre relativement faible de plaintes formelles ne doit cependant pas occulter le fait que l'édiction de mesures concernant les frontières, ainsi que leur communication et leur mise en oeuvre, soulèvent des questions fondamentales, qui justifient un examen approfondi par les organes de surveillance, ainsi que l'élaboration d'un certain nombre de recommandations.

Compte tenu de ce qui précède et du fait que les plaintes et griefs aient été relativement rares, la CdG-E estime que les autorités douanières et le personnel a fourni un bon travail.

3

Contexte

3.1

Cadre normatif

L'AFD met en oeuvre un grand nombre d'actes normatifs. Elle se base d'une part sur la Loi sur les douanes (LD)5, 6 et les ordonnances correspondantes qui règlent notamment la surveillance et le contrôle de la circulation des personnes et des marchandises à travers la frontière douanière. Les contrôles à la frontière sont également basés sur

5 6

Loi du 18 mars 2005 sur les douanes (LD; RS 631.0).

Art. 127, Inobservation des prescriptions d'ordre (LD; État le 15 septembre 2018).

1 En tant que le fait constitutif d'une infraction douanière n'est pas réalisé, est puni de l'amende jusqu'à 5000 francs quiconque contrevient intentionnellement ou par négligence grave: a. à une disposition de la législation douanière ou d'un traité international ou à une de leurs dispositions d'exécution, si la violation de ces dispositions est déclarée punissable par un acte législatif, ou b. à une décision rendue à son endroit et signifiée sous menace de la peine prévue au présent article.

2 Quiconque contrevient aux injonctions verbales du personnel de l'AFD ou aux ordres donnés sous forme de signaux ou de tableaux encourt une amende pouvant atteindre 2000 francs. La menace de la peine prévue au présent article n'est pas nécessaire.

3 Le renvoi devant le juge de l'auteur d'une infraction à l'art. 285 ou 286 du code pénal est réservé.

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des actes non douaniers comme la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI)7, mise au point par le Secrétariat d'État aux migrations (SEM)8.

En situation particulière au sens de l'art. 6 de la loi sur les épidémies (LEp)9, le Conseil fédéral peut ordonner des mesures visant la population. Si une situation extraordinaire au sens de l'art. 7 LEp l'exige, le Conseil fédéral peut ordonner les mesures nécessaires pour tout ou partie du pays. Dans ces cas-ci, l'art. 41 LEp s'applique et le Conseil fédéral édicte des dispositions concernant le transport international des personnes afin d'empêcher la propagation transfrontière de maladies transmissibles.

L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) peut alors imposer aux personnes qui entrent en Suisse des mesures de surveillance, de quarantaine et d'isolement notamment (art. 33 à 38 LEp). Si nécessaire, le Conseil fédéral peut provisoirement étendre ces mesures à toutes les personnes en provenance d'une zone à risque. L'OFSP peut également provisoirement refuser la sortie du pays à des personnes malades, présumées malades, infectées, présumées infectées ou qui excrètent des agents pathogènes, si cela est nécessaire pour empêcher la propagation d'une maladie transmissible.

D'autres mesures d'urgence à la frontière peuvent être prises par le Conseil fédéral en situation extraordinaire sous la forme d'une ordonnance basée directement sur l'art 184, al. 3, et l'art 185, al. 3, de la Constitution fédérale (Cst.)10.

3.2

Mesures à la frontière pour lutter contre la propagation du coronavirus

Dans le cadre de la lutte contre le nouveau coronavirus SRAS-CoV-2, les autorités fédérales ont pris un certain nombre de mesures à la frontière afin de limiter sa propagation.

Sur mandat du Conseil fédéral, un système de contrôle pour monitorer la situation à la frontière a été mis en place par l'AFD depuis le 8 mars 2020, suite aux décrets italiens des 8 et 9 mars 202011. Afin de permettre ce monitoring, l'AFD a pris la décision le 11 mars 202012 de canaliser au Tessin le trafic frontalier en provenance d'Italie vers les grands passages frontières.

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12

Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20).

Art. 12, al. 2, litt. c de l'ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police (Org DFJP; RS 172.213.1).

Loi fédérale du 28 septembre 2012 sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme (Loi sur les épidémies, LEp; RS 818.101).

Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.; RS 101) Decreto del Presidente del Consiglio dei ministri del 9 marzo 2020. Ulteriori disposizioni attuative del decreto-legge 23 febbraio 2020, n. 6, recante misure urgenti in materia di contenimento e gestione dell'emergenza epidemiologica da COVID-19, applicabili sull'intero territorio nazionale (20A01558) (GU n.62 del 9-3-2020); Decreto del Presidente del Consiglio dei ministri del 8 marzo 2020. Ulteriori disposizioni attuative del decreto-legge 23 febbraio 2020, n. 6, recante misure urgenti in materia di contenimento e gestione dell'emergenza epidemiologica da COVID-19 (20A01522) (GU Serie Generale n.59 del 08-03-2020).

Communiqué de presse de l'AFD du 11 mars 2020: «Canalisation du trafic frontalier au Tessin vers les grands passages frontières».

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L'AFD a informé le Conseil fédéral sur ses constats le 12 mars 2020. Il est apparu que des personnes domiciliées en Italie et n'exerçant aucune activité lucrative en Suisse continuaient de tenter d'entrer en Suisse, en dépit de l'interdiction de voyage édictée par l'Italie. Ce faisant, elles auraient contourné les mesures ordonnées par le Conseil fédéral pour limiter la propagation du nouveau coronavirus13. Une partie de ces voyageurs étaient même soupçonnés de vouloir se rendre en Suisse pour se faire soigner dans un hôpital suisse. En raison de la surcharge du système de santé italien qui se profilait, il n'était pas exclu que des personnes se tournassent vers les établissements de santé situés dans la région frontalière suisse. Cela aurait pu conduire à une surcharge d'un système de santé déjà fortement sollicité, en particulier au Tessin. En raison de ce risque d'afflux de personnes depuis l'Italie, le Conseil fédéral a décidé le 13 mars 2020 de refuser l'entrée en Suisse à toute personne en provenance d'un pays à risque ou d'une région à risque14, à l'exception des personnes remplissant les conditions énumérées à l'art. 3 de l'ordonnance 2 COVID-1915, en se basant sur l'art. 41 de la LEp. À cette date, le Conseil fédéral a réintroduit, avec effet immédiat, les contrôles aux frontières avec l'Italie16, en application des articles 25 et suivants et notamment de l'article 28 du Code frontières Schengen17 et de l'article 30, alinéa 2, de l'Ordonnance sur l'entrée et la délivrance des visas18.

Le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a décrété la situation extraordinaire au sens de la loi sur les épidémies19 et réintroduit des contrôles Schengen aux frontières avec la totalité des États voisins20. L'entrée depuis les pays voisins n'était dès lors autorisée que pour les citoyens suisses, les personnes titulaires d'un titre de séjour en Suisse et les personnes qui devaient se rendre en Suisse pour des raisons professionnelles21. Le trafic de transit ainsi que la circulation des marchandises étaient autorisés.

Le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral des finances (DFF) et plus précisément l'AFD de mettre en oeuvre les différentes dispositions de l'ordonnance 2 COVID-19 aux frontières terrestres, conformément à l'article 98 LD, en collaboration

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Décision du Conseil fédéral du 13 mars 2020.

En date du 13 mars 2020, il ne s'agissait alors que de l'Italie.

Ordonnance 2 du 13 mars 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19) (Ordonnance 2 COVID-19; [RS 818.101.24] RO 2020 773) (État au 13 mars 2020).

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 13 mars 2020: «Le Conseil fédéral renforce les mesures contre le coronavirus pour protéger la santé de la population et soutient les secteurs touchés».

Règlement (UE) no 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2020 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes; SBC.

Ordonnance du 15 août 2018 sur l'entrée et l'octroi de visas (OEV; RS 142.204).

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 16 mars 2020: «Coronavirus: le Conseil fédéral qualifie la situation de «situation extraordinaire» et renforce les mesures»; Communiqué de presse de l'AFD du 16 mars 2020: «La canalisation du trafic frontalier est élargie à toute la Suisse».

Pour la France, l'Allemagne et l'Autriche, car ces pays sont été placés sur la liste des pays et régions à risques le 16 mars 2020 également.

Art. 3 de l'Ordonnance 2 du 13 mars 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19) (Ordonnance 2 COVID-19; RS 818.101.24; RO 2020 773).

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avec les autorités cantonales de sécurité22. C'est dans ce cadre que le Conseil fédéral a autorisé l'AFD à fermer des points de passage afin de canaliser le trafic frontalier23.

3.3

Engagement de l'armée24

Le 6 mars 2020, le Conseil fédéral a habilité le DDPS à engager un effectif maximal de 800 militaires en service d'appui, jusqu'au 27 mars 2020, afin de soulager le système de santé des cantons. Le Conseil fédéral a ensuite élargi l'engagement de l'armée jusqu'à 8000 militaires25. Fin mars, au vu du nombre encore élevé de passage aux frontières, l'AFD a demandé un soutien subsidiaire de l'armée, afin d'affecter ses ressources de manière plus flexible et d'augmenter sa capacité opérationnelle. Depuis le vendredi 27 mars 2020, l'AFD était donc appuyée par l'armée avec 50 membres de la police militaire et un bataillon de milice26. Les militaires avaient reçu au préalable une formation portant notamment sur des règles d'engagement et de comportement clairement définies ainsi que sur des compétences détaillées. Le mandat confié à l'armée repose sur l'ordonnance du 3 septembre 1997 sur le recours à la troupe pour assurer le service de police frontière27 et comprend, entre autres, des tâches de sécurité dans le domaine du transport de personnes ainsi que des prestations de soutien dans la canalisation du trafic et dans la surveillance de postes de douane et de la frontière verte.

Dans ce cadre, la troupe n'a aucun pouvoir de décision en matière d'application de la législation sur la police douanière, l'asile et la police des étrangers, mais peut soutenir le corps des gardes-frontière.

Étant donné que la mise sur pied concernait plus de 2000 militaires et durait plus de trois semaines28, le Conseil fédéral a présenté un message29 à ce sujet au Parlement, qui l'a accepté lors de la session spéciale de mai 2020.30

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Décision du Conseil fédéral du 13 mars 2020, ch. 5, p. 1.

Décision du Conseil fédéral du 13 mars 2020.

L'engagement de l'armée n'a été évoqué en marge de cette enquête et n'a pas fait l'objet d'une appréciation spécifique, raison pour laquelle ces aspects sont mentionnés dans la partie consacrée au contexte.

Coronavirus: le Conseil fédéral qualifie la situation de «situation extraordinaire» et renforce les mesures. Communiqué de presse du Conseil fédéral du 16 mars 2020.

COVID-19: l'armée appuie l'Administration fédérale des douanes. Communiqué de presse du Conseil fédéral du 27 mars 2020.

Ordonnance du 3 septembre 1997 sur le recours à la troupe pour assurer le service de police frontière (OSPF; RS 513.72).

Selon l'article 70 de la Loi fédérale du 3 février 1995 sur l'armée et l'administration militaire (Loi sur l'armée, LAAM; RS 510.10), le Conseil fédéral est compétent pour une mise sur pied jusqu'à 2000 militaires ou de moins trois semaines. Passé ce nombre ou cette durée, l'approbation de l'Assemblée fédérale est requise.

Message du Conseil fédéral du 22 avril 2020 concernant l'arrêté fédéral sur le service d'appui de l'armée en faveur des autorités civiles dans le cadre des mesures destinées à lutter contre la pandémie de COVID-19 (FF 2020 3343).

Arrêté fédéral du 5 mai 2020 sur le service d'appui de l'armée en faveur des autorités civiles dans le cadre des mesures destinées à lutter contre la pandémie de COVID-19 (FF 2020 4555).

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Le Conseil fédéral détaille l'engagement de l'armée en faveur de l'AFD dans son message31. De l'avis de l'AFD, un recours à la protection civile aurait été exclu à la frontière car des situations parfois dangereuses nécessitent un personnel armé et formé en la matière.

Les Forces aériennes ont intensifié leurs vols en faveur de l'AFD, engageant des EC-635 ou parfois un Super Puma équipé du système FLIR. En situation ordinaire, les Forces aériennes soutiennent déjà régulièrement l'AFD en surveillant les frontières avec leurs drones et leurs hélicoptères. Durant le printemps 2020, des vols en hélicoptère ont servi à la surveillance du dispositif mis en place pour maintenir et surveiller la fermeture de nombreux points de frontière et de la frontière verte, à contrôler le trafic frontalier ainsi que les randonneurs, les cyclistes, les cavaliers et les détenteurs de chien aux postes-frontière éloignés, non surveillés. Les drones n'étant alors pas opérationnels, des hélicoptères ont dû être utilisés. Les vols ont été effectués en fonction de la situation et les surveillances et vues aériennes ont permis, selon l'AFD32, de mettre en lumière beaucoup d'infractions, notamment de contournements du dispositif de blocage, et de l'adapter en conséquence.

4

Organisation de crise de l'AFD

L'AFD estime qu'elle dispose de processus bien définis et fonctionnels en ce qui concerne l'évaluation de situation33. Elle peut établir au besoin un état-major, respectivement une organisation de crise si la situation le requiert. L'AFD crée alors une équipe de collaborateurs (membres de la direction et experts, au niveau central comme décentralisé dans les régions34) qui reçoit le mandat d'organiser, coordonner et gérer ladite situation. Sur la base d'expériences concrètes (Euro 08, crise migratoire 2015/16, attaques terroristes à l'étranger) ou des exercices à grande échelle qui ont été conduits dans les dernières années, dont certains avaient testé le scénario de fermeture des frontières (Exercice de conduite stratégique [ECS], Exercice du Réseau national de sécurité [ERNS], etc), l'AFD a estimé qu'elle pouvait compter sur de solides expériences.

Néanmoins, chaque nouvelle situation demande des mesures et une organisation adaptées et dynamiques. L'AFD estime donc être en mesure de réagir aux défis qu'elle rencontre de manière rapide et flexible, selon la situation.

L'implication des partenaires pour la mise en place du dispositif de l'AFD (matériel de l'Office fédéral des routes (OFROU) et engagement de l'Armée) a été planifiée avec les offices concernés, dès que le scénario de fermeture des frontières a été évalué 31

32 33 34

Message du Conseil fédéral du 22 avril 2020 concernant l'arrêté fédéral sur le service d'appui de l'armée en faveur des autorités civiles dans le cadre des mesures destinées à lutter contre la pandémie de COVID-19, ch. 2.3.2 (FF 2020 3343 3349).

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 3.

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 1.

L'AFD est organisée en 6 régions, placées chacune sous la responsabilité de chefs des niveaux régionaux qui dirigent simultanément, dans leur territoire respectif, le Corps des gardes-frontière et la douane; Nouvelle structure régionale, communiqué de presse de l'AFD du 5 février 2020.

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comme étant probable le 26 février 2020. Ce scénario s'est effectivement concrétisé par la suite. La mise en oeuvre de ces soutiens a donc pu être effective très rapidement, dès que la décision correspondante a été prise par le Conseil fédéral. En ce qui concerne le déploiement de l'armée, l'AFD pouvait compter sur des travaux préparatoires datant de 2016 et 2017.

En l'occurrence, l'AFD a mis en place un État-major de conduite de crise (EMC) interne rapidement, dès le 3 février 2020. Il a été chargé d'évaluer et de préparer de manière anticipée la mise en oeuvre hypothétique des différentes mesures possibles à la frontière dès que celles-ci étaient évoquées. De cette manière, l'application des mesures était ensuite facilitée lorsque les décisions étaient arrêtées par le Conseil fédéral.

L'EMC a ensuite été en contact permanent avec les partenaires sociaux et avec les régions pour coordonner le dispositif opérationnel sur le terrain. Des conférences téléphoniques journalières avec les régions, tous les domaines de direction de l'AFD et des contacts hebdomadaires avec tous les partenaires sociaux (Garanto, Transfair, l'Association du personnel de la Confédération, l'Association des Cadres de la Confédération) ont été planifiées pour faire le point sur la situation en terme de personnel, de trafic et sur les problèmes rencontrés dans la mise en oeuvre des mesures. Les éventuelles demandes d'adaptation de l'ordre d'engagement avancées par les régions étaient alors ensuite traitées par l'EMC dans une réunion hebdomadaire ou dans une réunion ad hoc d'urgence, lorsque cela était nécessaire. Le Directeur de l'AFD et le Chef de l'EMC ont conduit des points de situation trois fois par jour pendant de nombreuses semaines. Enfin, le Chef du DFF était informé et consulté chaque semaine lors d'un rapport de situation par le Directeur de l'AFD.

L'AFD est représentée au sein de l'État-major fédéral Protection de la population (EMFP), conformément à l'ordonnance idoine35. L'AFD a systématiquement participé aux séances de cet organe. Elle n'était en revanche pas représentée dans l'Étatmajor chargé de gérer la crise du coronavirus (EMCC)36, mais le Secrétariat général du DFF l'était et le flux d'information a pu être assuré par ce biais en cas de nécessité.

Le Directeur de l'AFD a d'ailleurs participé directement à une ou deux séances de l'EMCC.

5

Décision de l'AFD d'interdire le tourisme d'achat

Entre le 16 et le 18 mars, l'AFD a constaté, aux frontières nord et nord-est de la Suisse, qu'une augmentation du trafic inattendue s'est produite. La raison pour cela serait que certaines catégories de magasins du côté allemand de la frontière étaient en partie ouvertes alors qu'elles étaient fermées en Suisse. Cela a engendré un trafic encore plus dense dans cette région que lors de la période qui précédait la crise et un tourisme d'achat massif a alors été constaté (augmentation d'environ 20 % du trafic total selon les estimations de l'AFD37).

35 36 37

Ordonnance du 2 mars 2018 sur l'État-major fédéral Protection de la population (OEMFP; RS 520.17).

Voir les Instructions concernant la gestion des crises dans l'administration fédérale du 21 juin 2019 (FF 2019 4415).

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, p. 5.

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Cette situation représentait d'une part une réaction contraire de la population aux effets visés par le Conseil fédéral, mais elle posait également un problème opérationnel à l'AFD qui était chargée de contrôler systématiquement toutes ces personnes et dont les ressources étaient fortement sollicitées. De plus, l'AFD a également constaté, dans toute la Suisse, que certaines personnes ne respectaient pas les mesures de canalisation du trafic, traversaient ou se transmettaient des marchandises à des points de frontière fermés ou contournaient des barrages routiers à travers les champs.

Les régions ont émis la demande à l'EMC à Berne, lors d'une conférence téléphonique journalière le 18 mars 2020, de leur fournir des solutions, d'une part pour lutter contre ce tourisme d'achat massif vers l'Allemagne et d'autre part pour prendre des mesures contre les personnes contrevenant aux mesures de canalisation du trafic et aux fermetures des points de frontières.

Un officier de liaison de l'AFD avec le SEM s'est renseigné par téléphone auprès d'une personne de contact au SEM le 18 mars 2020 pour savoir ce que l'AFD devait entreprendre contre le grand nombre de ces citoyens allemands se rendant de l'autre côté de la frontière. D'après l'AFD, l'information reçue était que les citoyens allemands qui ont un permis de séjour en Suisse et qui veulent se rendre en Allemagne uniquement pour faire des achats doivent en être empêchés en raison de l'égalité de traitement avec les citoyens suisses38.

Le Domaine de Direction poursuites pénales de l'AFD a également développé un document destiné aux collaborateurs en première ligne39, afin de présenter les possibilités de sanction en cas de violation de la canalisation du trafic frontalier. La fermeture des points de frontière à l'aide de barrières ou de blocs en bétons constituant d'après elle des «signaux» clairs au sens de l'article 127, alinéa 2 LD, l'AFD a décidé que les collaborateurs pouvaient, dans certains cas, amender les personnes à hauteur de 100 francs à partir du 23 mars 2020 sur la base de cette disposition. Cet article permet en effet à l'AFD de prononcer envers «quiconque contrevient aux injonctions verbales du personnel de l'AFD ou aux ordres donnés sous forme de signaux ou de tableaux [...] une amende pouvant atteindre 2000 francs». Il est également
précisé dans cet article qu'une menace préalable de la peine prévue n'est pas nécessaire.

En parallèle, entre le 19 et le 20 mars 2020, des panneaux ont été installés à certains postes frontière mentionnant que le tourisme d'achat était désormais interdit. Il n'a été constaté aucun changement au niveau du comportement de la population. Le 20 mars le Directeur de l'AFD a informé le Chef du DFF du problème opérationnel rencontré avec le tourisme d'achat. Ce dernier a alors soutenu les démarches de l'AFD pour

38

39

Dans le cadre de la consultation de l'administration, le SEM a précisé que l'échange téléphonique en question a porté sur un renseignement ponctuel d'ordre technique.

Celui-ci ne constituait ni une prise de position consolidée du SEM ni un avis officiel de la direction de l'office. Les consultations dans ce type d'affaires se déroulent habituellement par écrit. Aujourd'hui, il n'est plus possible de restituer le cadre et le contexte dans lequel le sujet a été discuté entre l'AFD et le SEM. Toujours est-il que le renseignement fourni ne saurait être considéré, d'après le SEM, comme cautionnant l'application de la pratique en matière d'amendes telle qu'elle est définie à l'art. 127 LD.

Note interne de l'AFD du 20 mars 2020: «Sanktionsmöglichkeiten bei Verletzung der Kanalisierungsmassnahmen betr. dem Grenzverkehr - Gültig ab 23. März 2020».

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empêcher cette pratique. L'AFD a également entrepris de ne plus accepter de retours sur le sol suisse de personnes avec des marchandises achetées en Allemagne40.

L'AFD a donc ensuite décidé de se baser sur l'article 127, alinéa 2 LD pour prononcer des sanctions, pour autant que les injonctions verbales données par le personnel de l'AFD ou alternativement les ordres donnés à l'aide de signaux ou de panneaux soient clairs pour la population. Ce type de sanction peut faire l'objet d'une procédure pénale administrative41 et fait partie des instruments ordinaires de l'AFD. Le 27 mars 2020, le Directeur de l'AFD a présenté cette solution au Chef du DFF, qui l'a soutenue. Le Chef de Département a informé la CdG-E que la légalité de cette décision avait alors fait l'objet d'un examen par le service juridique du secrétariat général du DFF42.

D'après l'AFD, l'objectif de l'interdiction du tourisme d'achat était de diminuer le trafic à la frontière afin d'éviter une surcharge de l'AFD, d'assurer les contrôles systématiques décidés le 13 mars 2020 par le Conseil fédéral et de garantir la continuité en matière d'approvisionnement du pays en marchandises et en travailleurs frontaliers pour les milieux essentiels

5.1

Proposition au Conseil fédéral du 1er avril 2020

Ces problèmes à la frontière nord-est et les solutions possibles ont été discutés dans le cadre de la réunion hebdomadaire de l'EMC, puisque la Région Nord avait déposé la demande de pouvoir prendre les mêmes mesures que la Région Nord-Est. Au terme de la séance de l'EMC du 24 mars 2020, l'AFD a décidé d'élaborer un projet de proposition au Conseil fédéral prévoyant une concrétisation des compétences de l'AFD à la frontière43. Les premières discussions avec le SEM et l'OFJ dans le cadre de la consultation des offices du 25 mars 2020 ont fait apparaître qu'une interdiction du tourisme d'achat n'était à ce moment-là pas souhaitable dans l'ordonnance. L'OFJ a en effet demandé que la norme proposée soit biffée, car il estimait que l'entrée en Suisse était déjà implicitement restreinte aux raisons professionnelles dans l'ordonnance 2 COVID-19 et jugeait qu'une précision explicite était inutile. L'AFD a donc renoncé à cette partie de la proposition. Le DFF a donc ainsi seulement informé le Conseil fédéral, dans sa séance du 1er avril 2020, sur la situation à la frontière et sur les nombreux contournements des mesures et l'a rendu attentif au fait que «[le tourisme d'achat ou d'autres activités de loisirs] demeure[nt] problématique[s] dans le cadre de la situation exceptionnelle actuelle [et qu'il] serait opportun que cette question des activités transfrontalières privées soit également examinée.»44

40 41 42 43

44

Selon les indications de l'AFD, la marchandise devait être retournée et aucune amende n'était prononcée.

Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.0).

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 10 décembre 2020, audition du chef du DFF et de l'AFD.

L'AFD avait originellement prévu de faire une proposition au Conseil fédéral pour sa séance du 27 mars, mais en raison de la complexité du dossier, il a été convenu avec le SEM et l'OFJ d'organiser une consultation des offices plus large.

Décision du Conseil fédéral du 1er avril 2020, p. 2.

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Suite aux constations et aux expériences faites par l'AFD lors des premières semaines d'application des mesures, le DFF a néanmoins demandé une modification de l'Ordonnance 2 COVID-1945 «afin de régler des situations constatées sur le terrain qui ne sont pas encore adressées et compliquent passablement le travail des collaborateurs de l'AFD»46. Le département souhaitait «pour des raisons opérationnelles que les collaborateurs de l'AFD puissent se référer explicitement à l'ordonnance lorsqu'un refus d'entrée malgré la présence d'un permis de frontalier est prononcé.»47.

Un certain nombre de mesures ont donc été prises le 1er avril 2020 par le Conseil fédéral48, telles que la compétence pour l'AFD de fermer de petits points de frontière secondaires, de régler l'utilisation des green lanes49. Il a également été clarifié dans l'ordonnance que des personnes au profit d'un permis de frontalier ne devaient pas traverser la frontière pour des raisons autres que professionnelles50, bien que cette condition était déjà implicite dans l'ordonnance selon l'OFJ51. La possibilité pour l'AFD de prononcer des amendes d'ordre en cas d'infraction aux restrictions en matière de circulation transfrontalière des personnes aux postes frontières visées à l'art. 4, al. 4 a été inscrite dans l'ordonnance 2 COVID-19.

À partir du 2 avril 2020, les personnes commettant des infractions contre les mesures de canalisation encouraient ainsi une amende d'ordre selon l'Ordonnance 2 COVID-19 et les personnes s'engageant dans des activités de tourisme d'achat ou de loisirs, encouraient une amende douanière pour non-respect des prescriptions d'ordre (soit le non-respect des injonctions verbales du personnel de l'AFD ou des ordres donnés sous forme de signaux), sur la base de l'article 127, alinéa 2 LD. Selon l'annexe à l'ordre d'engagement de l'AFD52, les personnes résidant en Suisse et travaillant à l'étranger n'étaient pas amendées, si elles revenaient sur le territoire avec des achats normaux faits au retour de leur journée de travail. De même, aucune personne remplissant les conditions d'entrée énoncées dans l'Ordonnance 2 COVID-19 ne se voyait refuser l'entrée sur le territoire suisse53.

45 46 47 48

49

50 51 52 53

Ordonnance 2 du 13 mars 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19) (Ordonnance 2 COVID-19; RS 818.101.24).

Décision du Conseil fédéral du 1er avril 2020, p. 4.

Décision du Conseil fédéral du 1er avril 2020, p. 5.

Introduit par la modification de l'ordonnance du 1er avril 2020 (Canalisation du trafic frontalier) (RO 2020 1137). Abrogé par la modification de l'ordonnance du 12 juin 2020 (Entrée des personnes bénéficiant de la libre circulation), avec effet au 15 juin 2020 (RO 2020 2099).

Voies prioritaires aménagées pour des biens importants pour le maintien de l'approvisionnement du pays ainsi que pour des personnes appartenant à des groupes professionnels prioritaires, notamment pour des personnes actives dans le domaine de la santé (Art. 4, al. 5 de l'Ordonnance 2 COVID-19. Introduit par la modification de l'ordonnance du 1er avril 2020 [Canalisation du trafic frontalier] [RO 2020 1137]).

Voir l'art. 3, al. 3 de l'Ordonnance 2 COVID-19. Nouvelle teneur selon la modification de l'ordonnance du 18 mars 2020, en vigueur depuis le 19 mars 2020 (RO 2020 841).

Décision du Conseil fédéral du 1er avril 2020, p. 5.

Annexe à l'ordre d'engagement COVID-19 de l'EMC du 30 mars 2020.

Mise en oeuvre à la frontière des mesures liées à la Covid-19 par l'Administration fédérale des douanes. Rapport de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 2 octobre 2020 (ci-après Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020).

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5.2

Proposition au Conseil fédéral du 16 avril 2020

Le 6 avril 2020, des contacts téléphoniques ainsi que par email ont eu lieu entre le Directeur de l'AFD et le secrétaire d'État aux migrations, en raison de la grande quantité de demandes et questions adressées au SEM via leur centrale de renseignement, concernant la pratique des amendes contre le tourisme d'achat et les activités de loisirs. Le SEM a alors exprimé à l'AFD que selon son interprétation et celle de l'OFJ, aucune base légale existante ne permettait de telles amendes, pas même la loi sur les douanes, et qu'il convenait donc d'ajouter une nouvelle disposition à l'ordonnance 2 COVID-19, afin de régulariser cette pratique.

L'AFD a donc rédigé une proposition au Conseil fédéral et a organisé une pré-consultation avec le SEM et l'OFJ le 7 avril 2020. L'AFD entendait alors compléter l'ordonnance par un nouvel art. 3a «Reisebeschränkungen», qui interdisait les déplacements transfrontaliers ayant pour but les activités de loisirs, les visites et les achats dans les pays et les régions à risque. II était également prévu que les déplacements transfrontaliers ayant pour but l'assistance ou les soins à un parent proche soient subordonnés à la production d'un certificat médical. L'importation de marchandises lors d'un franchissement de la frontière interdit ou en dehors des points de passage autorisés aurait été prohibée et le passage des marchandises saisies aurait été refusé, ou bien elles auraient dû être détruites54.

Une prise de position négative de l'OFJ est parvenue à l'AFD, lui demandant de renoncer à la proposition en évoquant l'argument de la proportionnalité et de la restriction grave des droits fondamentaux. Le Directeur de l'AFD a alors sollicité une conférence téléphonique au niveau des directeurs le Vendredi Saint 10 avril 2020 en matinée, au vu d'une volonté politique claire du Chef du DFF de régler cette question.

Lors de cet appel téléphonique il a finalement été convenu que l'AFD ne proposerait plus que la modification quant à l'interdiction du tourisme d'achat, sous peine d'une amende d'ordre. Il a notamment aussi pu être conclu que ce seraient «les voyages uniquement à des fins de tourisme d'achat» qui seraient amendés, afin de préserver l'exception déjà appliquée sur le terrain par l'AFD pour les personnes qui rentraient avec des achats après une journée de travail à
l'étranger. Par ailleurs, il a été décidé que l'AFD ne demanderait pas l'interdiction du tourisme transfrontalier à des fins d'autres activités de loisirs transfrontalières comme les balades à vélos ou la course à pied, car elles étaient moins problématiques, n'empêchaient pas les contrôles efficaces aux frontières dans la même mesure que le tourisme d'achat et que leur interdiction revenait aux États voisins55.

Suite à une nouvelle pré-consultation entre les trois offices puis une consultation des offices officielle urgente le mardi 14 avril 2020, le Conseil fédéral a approuvé la proposition du DFF lors de sa séance du 16 avril 202056. Les voyages ayant pour unique but le tourisme d'achat ont donc été interdits dans l'Ordonnance 2 Covid-19 sous

54 55 56

Lettre de l'OFJ du 2 octobre 2020, ch. 3.3.1, p. 8.

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 2.4, p. 9.

Modification de l'Ordonnance 2 COVID-19 du 16 avril 2020 (Limitation de l'importation et de l'exportation des marchandises), en vigueur depuis le 17 avril 2020 (RO 2020 1245).

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peine d'une amende d'ordre d'une valeur réduite de 100 francs57 entre le 17 avril 2020 et le 15 juin 2020.

5.3

Types d'amendes prononcées par l'AFD

Jusqu'au 2 avril 2020, les amendes prononcées par l'AFD l'ont donc été sur la base de l'article 127, alinéa 2 LD, qu'il s'agisse d'une part d'une sanction pour contournement des mesures de canalisation du trafic frontalier (fermeture de points de passage notamment) ou d'autre part, de sanctions liées à l'interdiction du tourisme d'achat. En l'occurrence, comme l'a expliqué l'AFD, ce n'était pas la violation du tourisme d'achat en soi qui était sanctionnée, mais le non-respect des injonctions verbales du personnel de l'AFD ou des ordres donnés sous forme de signaux.

Ces amendes en vertu de la loi sur les douanes ont été infligées sur la base de la loi fédérale sur le droit pénal administratif (DPA), selon laquelle un procès-verbal de sanction pouvait être établi en procédure simplifiée avec le consentement de la personne accusée. Ce mandat de répression devenait alors immédiatement juridiquement contraignant (art. 65, al. 2 DPA) et aucun recours ultérieur n'est prévu pour ces cas.

Dans les cas où aucun consentement à la procédure simplifiée n'était donné, une procédure douanière ou pénale administrative ordinaire était ouverte et si le soupçon d'infraction était confirmé, une amende était alors imposée au moyen d'un avis de sanction (art. 64 DPA). Dans le cas où la sanction est confirmée, la personne accusée a le droit de faire appel devant un tribunal en vertu de l'article 67 DPA.

Dès le 2 avril, des amendes d'ordre ont été prononcées contre les infractions aux restrictions en matière de circulation transfrontalière des personnes aux postes frontière sur la base de l'ordonnance 2 COVID-19. Les amendes d'ordre devaient en principe être payées immédiatement sur place. Elles devenaient alors juridiquement contraignantes dès leur paiement (art. 11 LAO58). Cette procédure est usuelle et couramment utilisée en cas d'infractions dans le domaine de la circulation routière et découle de la LAO. Aucun recours ultérieur n'est possible dans ces cas-là. Le contournement de l'interdiction du tourisme d'achat était cependant toujours sanctionné sur la base de l'article 127, alinéa 2 LD.

C'est seulement suite à la décision du Conseil fédéral du 16 avril et l'introduction d'une disposition spécifique dans l'ordonnance 2 COVID-19 (voir ch. 5.2) que des amendes d'ordre ont été prononcées par l'AFD sur cette base.
L'AFD a informé la CdG-E que dans neuf cas d'infraction à l'interdiction du tourisme d'achat, une amende d'ordre a été prononcée à tort. Ces neuf amendes d'ordre ont été retirées sans remboursement et transformées en procédures pénales administratives ordinaires conformément à l'article 64 LDPA59. Quatre des neuf personnes concernées ont renoncé à une évaluation dans le cadre d'une procédure douanière ou admi-

57 58 59

Le DFF avait initialement proposé au Conseil fédéral une amende de 200 francs.

Loi du 18 mars 2016 sur les amendes d'ordre (LAO; RS 314.1).

Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.0).

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nistrative pénale ordinaire et ont accepté l'amende matériellement correcte mais formellement incorrecte et cinq cas sont actuellement examinés plus en détail dans le cadre de la procédure ordinaire60.

Sur la base d'un monitorage réalisé à la frontière par les différentes régions, l'AFD a été en mesure d'indiquer que sur l'ensemble des quelques 8850 amendes distribuées entre mars et juin 2020, environ 2460 concernaient du tourisme d'achat61. Sur ces 2460 amendes pour du tourisme d'achat, environ 1140 amendes ont été distribuées entre le 30 mars et le 16 avril 2020 sur la base de l'article 127 de la loi sur les douanes et environ 1320 amendes sur la base de l'Ordonnance 2 COVID-19 dès le 17 avril 2020. Il convient néanmoins de souligner qu'il s'agit de statistiques approximatives.

L'AFD a également informé la CdG-E qu'un certain nombre d'amendes a été annulé dans des cas où les personnes concernées ont pu prouver que l'amende était indue 62.

Cela concerne 17 cas d'amendes d'ordre en lien avec les mesures de canalisation du trafic. Concernant l'interdiction du tourisme d'achat, des amendes ont été annulées et remboursées dans 45 cas en procédure accélérée63 et neuf en procédure ordinaire.

D'autres infractions (par exemple à la LEI, au code pénal, etc) ont été signalées par l'AFD aux autorités de poursuite compétentes lors de leur constatation. Elles ne font pas l'objet du présent rapport.

Durée de validité

Infractions

Types de sanctions

Le tableau ci-dessous64 présente un aperçu des différents types d'amende prononcées par l'AFD et leurs conditions d'application:

60 61 62 63 64

Amendes d'ordre au sens de l'ordonnance 2 Covid-19

Amendes pour inobservation des prescriptions d'ordre basée sur l'art 127, al. 2, LD

Autres constatations (soupçon de comportement contraire au droit)

Infraction aux restrictions du trafic transfrontalier des biens et des personnes aux postes frontière (mesures de canalisation)

Infraction à l'interdiction du tourisme d'achat

Infraction aux prescriptions d'ordre de l'AFD

Infraction au droit pénal et au droit pénal accessoire (par ex.

code pénal, loi sur la circulation routière, loi sur les étrangers et l'intégration)

du 2 avril au 15 juin 2020

du 17 avril au 15 juin 2020

jusqu'au 17 avril 2020

illimitée, indépendante de la crise due au nouveau coronavirus

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 3.3, p. 13.

E-Mail de l'AFD à l'attention du secrétariat des CdG du 21 octobre 2020.

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, annexe B.

Art. 65 LDPA.

D'après l'annexe B au rapport de l'AFD du 2.10.2020.

18 / 34

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6

Légalité de l'interdiction du tourisme d'achat

6.1

Appréciations juridiques divergentes concernant la légalité des amendes

La question de la légalité des amendes a fait l'objet d'un certain nombre d'articles de presse dans le courant du printemps 2020. Suite à cela, quatre requêtes de surveillance ont été adressées à la CdG-E. Elle a entendu les appréciations juridiques de l'OFJ et de l'AFD en la matière et prié l'OFJ de lui adresser un rapport65 sur la question.

6.1.1

Position de l'OFJ

Du point de vue de l'OFJ66, le tourisme d'achat ne peut être sanctionné sur la base de l'art. 127, al. 2, LD. Conformément à 1'art. 1 du code pénal67, une peine ou une mesure ne peut être prononcée qu'en raison d'un acte expressément réprimé par la loi.

Ce principe vaut également pour le droit pénal accessoire68, c'est-à-dire pour le droit pénal hors du code pénal. Selon l'OFJ, cette disposition ne peut pas servir de base légale pour imposer de nouvelles conditions matérielles au franchissement des frontières. En effet, les conditions régissant l'entrée ou de l'interdiction de 1'entrée en Suisse sont définies par le droit matériel et étaient fixées, à ce moment-là, par l'ordonnance 2 COVID-19. Celle-ci ne contenant aucune interdiction du tourisme d'achat susceptible de donner lieu à une sanction avant le 17 avril 2020. L'OFJ estime donc que l'art. 127, al. 2, LD n'était pas une base légale suffisante.

En revanche, l'OFJ estime que l'ordonnance 2 COVID-19, dès le 17 avril 2020, représente une base légale suffisante pour sanctionner la violation du tourisme d'achat, même si une base légale formelle est d'ordinaire nécessaire pour des restrictions graves de droits fondamentaux. Le critère de l'urgence selon l'art. 36, al.1, Cst. entre ici en compte.

L'OFJ a également exprimé de grosses réserves et des doutes importants par rapport au respect des droits fondamentaux. La limitation des déplacements proposée constituerait, selon l'OFJ, une restriction à la liberté de circulation et à la liberté de quitter son propre pays garanties par la Constitution et par le droit international (art. 10, al. 2 et art. 24, al. 2, Cst.; art. 12, al. 1 et 2 du Pacte II de l'ONU69). Outre les conditions de légalité et de respect de l'essence des droits fondamentaux posées par l'art. 36 Cst., la question de la proportionnalité se pose. Des mesures aussi invasives devraient s'inscrire dans la lutte contre l'épidémie en cours afin de protéger la santé publique et c'est uniquement en ce cas qu'elles se justifieraient par un intérêt public suffisant au regard de la Constitution et du droit international (voir art. 36, al. 2, Cst.22; art. 12, al. 3, du Pacte II de l'ONU).

65 66 67 68 69

Lettre de l'OFJ du 2 octobre 2020.

Lettre de l'OFJ du 2 octobre 2020, p. 2.

Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP; RS 311.0).

Art. 333, al. 1, CP.

Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (Pacte ONU II; RS 0.103.2)

19 / 34

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Du point de vue de l'OFJ, il n'était pas possible d'invoquer la protection de la santé publique, car on ne voit pas en quoi le fait d'interdire les sorties du territoire national indistinctement pour tout le monde aurait pu concourir à lutter efficacement contre le COVID-19. Cette disposition avait en effet un autre but, qui était de garantir le bon déroulement des procédures aux points de passage de la frontière. Les personnes vulnérables n'étaient d'ailleurs pas spécifiquement visées, ce qui aurait éventuellement pu cadrer avec un objectif de santé publique.

6.1.2

Position de l'AFD

L'AFD, soutenue par le DFF, estime qu'elle a agi de manière adéquate en décidant d'interdire le tourisme d'achat. Elle estime que les amendes prononcées sur la base de l'article 127 LD respectaient le principe de légalité. L'AFD estime que ces décisions ­ qu'elle reconnaît être pour parties des restrictions graves de droits fondamentaux et plus particulièrement de la liberté personnelle de certaines personnes dans des situations extrêmes ­ étaient nécessaires pour atteindre les objectifs visés par le Conseil fédéral dans les ordonnances urgentes qu'il a édictées et ainsi pour remplir le mandat de mise en oeuvre donné à l'AFD.

D'après l'AFD, la loi sur les douanes lui donne en effet une certaine marge de manoeuvre pour sanctionner le non-respect des injonctions verbales du personnel de l'AFD ou des ordres donnés sous forme de signaux (Inobservation des prescriptions d'ordre), afin de réagir en cas de crise70.

De manière générale, l'AFD estime que toute décision prise dans le cadre de la lutte contre la COVID-19 l'a été de manière transparente sur la base des informations disponibles et d'une base légale suffisante71, prenant en compte le temps à disposition, la disponibilité des ressources, la situation à la frontière mais également les avis des offices partenaires et du Chef du DFF.

D'après l'AFD, un tribunal d'arrondissement s'est prononcé dans une affaire sur une telle amende et a indirectement soutenu la pratique de l'AFD.

6.2

Appréciation de la CdG-E

Au printemps 2020, l'AFD a pris un certain nombre de mesures, dont celle d'interdiction du tourisme d'achat, face à une situation qui évoluait rapidement et vis-à-vis de comportements qui contrevenaient aux objectifs des décisions prises par le Conseil fédéral.

La CdG-E estime positif que l'interdiction du tourisme d'achat ait été inscrite dans l'ordonnance 2 COVID-19, créant ainsi une base légale explicite en vigueur dès 70 71

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 10 décembre 2020, audition du chef du DFF et de l'AFD.

Voir également la réponse du Conseil fédéral à l'interpellation Dandrès «Franchissement des frontières durant les mesures pour lutter contre la pandémie de Covid-19» du 19 juin 2020 (20.3884).

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le 17 avril 2020 pour amender de tels comportements. Selon elle, la légalité des amendes prononcées après le 17 avril 2020 ne pose pas problème. Elle reste néanmoins plus sceptique en ce qui concerne la période entre fin mars et le 16 avril 2020.

La question de la légalité des amendes basées sur la LD pourrait faire l'objet d'un recours dans le cadre d'une procédure douanière ou d'une procédure pénale administrative ordinaire72. Sans présupposer d'éventuelles décisions judiciaires, force est de constater qu'aucune base légale explicite n'existait jusqu'au 17 avril 2020. La CdG-E estime ainsi que la base légale était insuffisante.

Elle constate également que l'interdiction du tourisme d'achat, tant qu'elle n'a pas été inscrite dans l'ordonnance 2 COVID-19, a été fortement contestée au sein de l'administration fédérale (voir ch. 5.2). Elle estime ainsi que la question de la portée de l'art. 127, al. 2, LD doit être clarifiée pour le futur.

La CdG-E relève que le Tribunal pénal fédéral s'est également prononcé, en marge de son arrêt SK.2020.43 du 5 novembre 2020, sur la légalité des amendes et a estimé que la décision d'interdire le tourisme d'achat n'avait pas été codifiée et qu'une amende prononcée sur cette base contrevient au principe de légalité en droit pénal (art. 1 CP).

Cette appréciation ne fait cependant pas formellement partie du jugement (obiter dictum). L'AFD a déclaré à la CdG-E qu'elle ne recourrait plus, si une telle situation devait se reproduire et au vu de la controverse que cela a suscité, à la loi sur les douanes pour sanctionner une telle interdiction73. La CdG-E salue cette position de l'AFD. La protection des droits fondamentaux doit, même en situation extraordinaire, être dûment respectée.

Recommandation 1

Consultation de l'OFJ en cas de décision de grande portée dans les cas d'application de droit impliquant des restrictions de droits fondamentaux

La CdG-E invite le Conseil fédéral à s'assurer que les unités administratives compétentes recourent aux compétences juridiques de l'OFJ dans les cas d'application du droit où des questions relatives à des restrictions de droits fondamentaux de grande portée se posent, et ce suffisamment tôt dans le processus décisionnel. Le Conseil fédéral, respectivement les unités administratives compétentes doivent en effet effectuer toutes les clarifications nécessaires afin de s'assurer de la légalité des mesures prises, d'autant plus s'il s'agit de restrictions de droits fondamentaux.

Recommandation 2

Clarification de la portée de l'article 127, al. 2, de la loi sur les douanes (LD)

La CdG-E invite le Conseil fédéral à clarifier la portée de l'article 127, al. 2, de loi sur les douanes.

72 73

Voir articles 64 et 67 DPA.

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 10 décembre 2020, audition du chef du DFF et de l'AFD, p. 6.

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7

Opportunité des mesures

7.1

Collaboration entre les unités administratives

L'AFD est un organe d'exécution qui applique, outre la législation sur les douanes, d'autres actes normatifs. Ainsi, en matière de mesures pour faire face à crise du coronavirus, le DFI (OFSP) ainsi que le DFJP (SEM) étaient souvent à l'origine des décisions. À titre d'exemple, la LEI est appliquée par l'AFD à la frontière, alors que c'est le SEM qui est l'unité administrative responsable des critères de franchissement de la frontière et des aspects liés à l'immigration.

En ce qui concerne la responsabilité en matière de légalité des mesures, les offices compétents sont eux-mêmes responsables de l'exécution des tâches qui leur sont dévolues. Il est de leur responsabilité d'impliquer un office transversal tel que l'OFJ si nécessaire. Ce dernier est l'organe responsable du contrôle préventif de la conformité au droit et ainsi, il est chargé de veiller à la légalité des actes législatifs, des arrêtés et des décisions des autorités fédérales74. Corollairement, il ne participe pas à la mise en oeuvre d'actes, mais seulement à leur élaboration. Ce n'est qu'à titre exceptionnel, à la demande d'autres offices, qu'il prend position sur des questions d'exécution, notamment lorsque des questions juridiques de principe y sont liées. Toutefois, sa participation reste alors générale et abstraite75.

7.1.1

Échanges entre AFD, SEM et OFJ

Les décisions prises par le Conseil fédéral les 1er avril et 16 avril 2020 l'ont été sur proposition du DFF (AFD) et visaient à remédier aux problèmes observés dans la mise en oeuvre des mesures. Pour ces mesures proposées au Conseil fédéral, des travaux et discussions préparatoires ont eu lieu, de même qu'une courte consultation des offices conformément à l'art. 4 de l'Ordonnance sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA)76. La proposition au Conseil fédéral visant à interdire le tourisme d'achat a pu être traitée au sein du Conseil fédéral le 16 avril 2020 après de nombreuses discussions entre l'AFD, l'OFJ et le SEM. Cette question a été abordée lors de travaux préliminaires en vue de la proposition au Conseil fédéral finalement faite le 1er avril 2020 (voir ch. 5.1). Après plusieurs tentatives infructueuses d'introduire une interdiction du tourisme d'achat dans l'ordonnance 2 COVID-19, une solution de compromis a pu être trouvée entre les différentes unités et c'est cette solution que le Conseil fédéral a adopté le 16 avril 202077. Cette disposition avait la teneur

74 75 76 77

Art. 6, al. 2 de l'Ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police (Org DFJP; RS 172.213.1).

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 12 octobre 2020, audition de l'OFJ.

Ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA; RS 172.010.1).

Modification de l'Ordonnance 2 COVID-19 du 16 avril 2020 (Limitation de l'importation et de l'exportation des marchandises), en vigueur depuis le 17 avril 2020 (RO 2020 1245).

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suivante: «L'importation, par un poste frontière terrestre, de marchandises en provenance d'un pays voisin qui est un pays à risque est interdite, si elles ont été acquises au cours d'un voyage servant exclusivement au tourisme d'achat.»

7.1.2

Proportionnalité de l'interdiction du tourisme d'achat

Cette solution finale a été perçue dans la discussion entre l'AFD, le SEM et l'OFJ comme moins problématique, car elle n'empêchait pas les contrôles efficaces aux frontières dans la même mesure que le tourisme d'achat et que l'interdiction des activités de loisir notamment revenait plutôt aux États voisins.

Ainsi, il se pose la question de savoir si la variante finale proposée le 16 avril 2020 au Conseil fédéral n'interdisant pas les autres activités de loisirs transfrontalières comme les balades à vélos ou la course à pied aurait été une solution plus proportionnée à appliquer par l'AFD avant le 17 avril 2020, si les différents offices avaient cherché le dialogue plus en amont.

Il convient néanmoins de préciser que, selon l'AFD78, le déploiement de l'armée en soutien à l'AFD à partir du 30 mars 2020 a permis un dispositif de surveillance des points de frontières fermés et de la frontière verte beaucoup plus important que lors des premières semaines d'application des mesures, ce qui a donc, au fil du temps, relativisé le problème posé par les autres activités de loisirs. L'utilité de l'interdiction des activités de loisirs est ainsi devenue moindre durant le mois d'avril.

La CdG-E relève en revanche que la coordination n'a pas été suffisante, d'autant plus que les mesures visées relevaient d'une restriction de droits fondamentaux. Cette coordination aurait dû être initiée par l'AFD, organe d'application en l'occurrence.

Une intégration plus avant de l'OFJ par l'AFD aurait également été adéquate. Il est clair pour la sous-commission que les mesures ont dû être prises très rapidement, mais elle estime que la coordination entre direction d'office aurait été nécessaire pour une telle mesure et que la question aurait aussi pu être mise à l'ordre du jour d'une séance du Conseil fédéral. La CdG-E s'étonne d'ailleurs du fait que les possibilités de sanction liées aux mesures à la frontière n'aient pas été étudiées plus tôt, dans le cadre de la planification de la gestion de pandémies79.

7.1.3

Proportionnalité de l'application de l'interdiction

Dans des requêtes, des critiques sporadiques ont été formulées concernant le comportement du personnel douanier, jugé trop sévère et non approprié par les personnes concernées. Interrogée à ce sujet, la direction de l'AFD ne conteste pas qu'il y ait pu

78 79

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 2.4, p. 9.

Plan suisse de pandémie Influenza 2018. Stratégies et mesures pour la préparation à une pandémie d'Influenza, OFSP, www.ofsp.admin.ch > Publications > Brochures et affiches > Publications sur les maladies transmissibles > Plan Suisse de pandémie Influenza 2018.

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y avoir des erreurs dans certains cas. Elle estime néanmoins qu'elles étaient inévitables eu égard au nombre élevé de cas traités. Toutefois, d'après l'expérience de l'AFD, les cas d'abus de pouvoir effectifs sont restés rares, voire inexistants80. L'AFD a expliqué comment les incidents étaient traités, en précisant qu'une solution était recherchée avec les personnes concernées, et que cette démarche aboutissait généralement. Elle a expliqué que, si aucune solution n'était trouvée, le collaborateur concerné était invité à prendre position sur l'incident et que, sur la base de cette prise de position, il était décidé de la suite à donner à l'affaire: classement sans suite, excuses à la personne concernée, procédure formelle (procédure disciplinaire, poursuites pénales).

La CdG-E relève que, compte tenu du volume de contrôles et de formalités douanières effectués, le nombre d'incidents pour lesquels le comportement du personnel douanier a été critiqué était extrêmement faible. Il n'y a donc pas de problème de nature systémique et, par conséquent, de plus amples investigations ne sont pas nécessaires.

L'AFD reconnaît que des erreurs ont pu être commises dans certains cas. Elle dispose toutefois d'une procédure interne pour traiter ces erreurs.

7.2

Autres formes de coordination et de collaboration

Dès le début de la crise, l'AFD a mis en oeuvre le respect des règles d'hygiène et de comportement communiqués par l'OFSP. L'AFD a rédigé et constamment actualisé des concepts de protection en collaboration avec l'OFSP, notamment le port du masque selon les différentes situations de contrôle et d'engagement. Pendant longtemps, la règle qui prévalait était que le masque devait être porté seulement en cas de contact prolongé de plus de 15 minutes pour lequel la distance de 2 mètres ne pouvait pas être respectée. Les contrôles en bord de route par exemple, étaient donc effectués sans le masque mais simplement avec une distance de recul face à l'automobiliste lors du contrôle de ses papiers. En ce qui concerne les mesures sanitaires, la divergence entre les directives sanitaires de l'OFSP (p. ex. obligation de porter un masque) et des cantons a représenté un défi pour l'AFD en tant qu'organe fédéral. Cette situation a pu être difficile à justifier à la population, car certaines réglementations nationales étaient différentes de celles des cantons; certains corps de police cantonaux devaient porter le masque alors que cela n'était pas prévu dans les directives de la Confédération. L'AFD a fait part de ce problème à plusieurs reprises au sein de l'EMFP.

Concernant la mise en oeuvre des restrictions liées au trafic frontalier, l'AFD a étroitement collaboré avec différents départements et unités administratives. Il y a d'une part l'engagement de l'armée en faveur de l'AFD, mais également la mise à disposition de matériel par l'OFROU, notamment des barrières métalliques pour fermer les routes. Cette implication des partenaires pour la mise en place du dispositif a été planifiée avec les offices concernés dès que le scénario de fermeture des frontières a été évalué comme étant probable, d'après l'AFD81. La mise en oeuvre de ces soutiens a 80 81

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 10 décembre 2020, audition du chef du DFF et de l'AFD.

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 2.

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donc pu être effective très rapidement, dès que la décision correspondante fut prise par le Conseil fédéral.

Des échanges bilatéraux avec d'autres offices fédéraux (SEM, OFSP, OFROU, Armée, etc.) ont eu lieu de manière ponctuelle selon les besoins. De manière générale, l'AFD estime que la collaboration a bien fonctionné82. L'AFD a cependant reconnu qu'à l'avenir, il faudra accorder plus d'attention à ces échanges à un stade plus précoce et prévoir une régularité des échanges dès le début de la crise. À titre d'exemple, les centrales d'information auraient pu être gérées conjointement par l'OFSP, le SEM, l'AFD et éventuellement d'autres offices.

7.3

Collaboration avec les cantons

L'AFD était en contact régulier avec les autorités cantonales, qu'il s'agisse de problèmes spécifiques à certains lieux ou d'échanges plus généraux. D'après l'AFD83, ces contacts étaient d'intensité et de teneur différents selon les cantons; certains cantons ont par exemple pris contact avec l'AFD en raison de décisions qui n'étaient pas de la responsabilité de la Confédération, mais bien d'autorités étrangères. Concernant la fermeture des frontières, les cantons frontaliers n'ont cependant pas pu être consultés en raison de la rapidité de la décision. En raison du mandat de contrôle de l'AFD et des ressources disponibles, il n'a pas toujours été possible d'impliquer de manière optimale les cantons frontaliers et, selon l'AFD, il aurait été impossible d'établir une coordination plus étroite avec les cantons pendant cette période.

Selon l'AFD84, la collaboration avec les corps de police cantonaux est de manière générale toujours intense, mais la gestion de la crise du coronavirus l'a encore renforcée davantage dans certaines régions (notamment Genève, Jura et Tessin), où les polices cantonales ont par exemple tenu certains points de frontière, effectué des contrôles et également mis en oeuvre la fermeture de postes frontière.

L'AFD était directement représentée dans les organisations cantonales de gestion de crise, y compris au sein de l'état-major de crise de la police. Elle a expliqué qu'ainsi, les besoins des cantons et ceux de l'AFD, pouvaient être discutés directement au niveau régional et qu'un dispositif optimal et adapté pouvait ainsi être déployé.

7.4

Relations internationales

Les mesures sanitaires de frontière sont de la responsabilité des ministres de la santé et une coordination au niveau ministériel a eu lieu au cours du printemps 202085.

82 83 84 85

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 4.

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 12 octobre 2020, audition de l'OFJ.

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 3.

Nouveau coronavirus COVID-19: premier cas confirmé en Suisse. Communiqué de presse de l'OFSP du 25 février 2020.

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D'après la cheffe du DFJP86, auditionnée par une autre sous-commission des CdG, une coordination a eu lieu avec les autres pays en ce qui concerne les fermetures de frontières, en particulier avec les pays voisins, dès que cela était possible. L'objectif était d'assurer la réciprocité des mesures, en particulier dans l'espace Schengen.

D'après l'AFD, il n'y a pas eu de coordination internationale concernant la fermeture de postes frontière. À titre d'exemple, l'AFD n'a pratiquement fermé aucun passage avec l'Allemagne et l'Autriche, car ces pays ont procédé eux-mêmes à des fermetures.

Cela engendrait une fermeture de facto du côté suisse. Pour la frontière avec la France, c'est l'AFD qui a elle-même dû fermer beaucoup de passages. La communication et la coordination bilatérale avec les pays voisins concernant la mise en oeuvre des mesures à la frontière a néanmoins été ponctuelle sur des questions spécifiques et locales.

Le rôle du DFAE n'a en revanche pas été examiné par la sous-commission. Certains aspects liés aux relations internationales sont d'ailleurs étudiés par les CdG dans le cadre d'autres inspections87.

7.5

Appréciation de la CdG-E

Comme la CdG-E l'a relevé dans le chapitre 6, l'OFJ n'a pas été consulté dans le cas de la décision autonome de l'AFD d'interdire le tourisme d'achat. L'OFJ n'a été consulté que lorsque l'AFD a souhaité proposer au Conseil fédéral d'inscrire cette interdiction dans l'ordonnance 2 COVID-19. Comme relevé plus haut et formulé dans la recommandation 1, la CdG-E estime que, dans des cas de restrictions de droit fondamentaux, l'autorité d'exécution devrait consulter l'OFJ plus systématiquement, même en cas d'application du droit et d'autant plus si ces restrictions sont graves.

L'AFD a, pour sa part, souhaité proposer relativement tôt des dispositions relatives au tourisme d'achat au Conseil fédéral, mais cette volonté s'est heurtée au refus de l'OFJ et du SEM. Or, au vu de l'importance de cette décision pour la mise en oeuvre efficace des mesures à la frontière d'une part, mais surtout pour assurer l'efficacité des mesures prises par le Conseil fédéral de manière plus générale, la CdG-E estime que cette question ­ et des problèmes de mise en oeuvre des mesures en général ­ aurait dû faire l'objet d'une meilleure coordination des différentes unités administratives en vue de trouver une solution de mise en oeuvre adéquate, notamment dans le cadre de la consultation de l'administration du 25 mars 2020.. Des alternatives auraient dû être étudiées et les problèmes concrets de l'AFD mieux pris en compte dans les prises de position des différents offices. Ce sujet aurait pu être discuté entre directions d'unités administratives plus tôt dans le processus, afin de trouver une solution intermédiaire et juridiquement correcte plus rapidement.

86 87

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFJP/ChF de la CdG-N du 5 octobre 2020, audition de la cheffe du DFJP.

Voir notamment le rapport annuel 2020 des CdG et de la Délégation des Commissions de gestion des Chambres fédérales, ch. 4.7.1 (fermeture des frontières).

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Pour la CdG-E, il n'est pas compréhensible que la décision de l'AFD n'ait pas été thématisée dans le cadre d'une séance d'un organe de crise88. La CdG-E se demande également pourquoi cette divergence de points de vue n'a pas été mise à l'ordre du jour d'une séance du Conseil fédéral par le Chef du DFF, dans la mesure où les mesures discutées étaient importantes du point de vue de la mise en oeuvre.

Une coordination plus rapide aurait d'ailleurs peut-être pu permettre une mesure d'emblée plus proportionnée. Cela étant dit, la situation entre fin mars et mi-avril 2020 changeait rapidement et la proportionnalité des mesures prises évoluait de jour en jour.

S'agissant des critiques sporadiques concernant le comportement du personnel douanier à l'égard des frontaliers, la CdG-E a constaté que des erreurs pouvaient se produire vu le nombre de franchissements de frontière et de contrôles ainsi que la difficulté des circonstances. Elle n'a cependant pas décelé de problème général. De plus, elle a noté que l'AFD suivait une procédure clairement définie pour le traitement des incidents et des erreurs. Par conséquent, aucune mesure ne s'impose du point de vue de la haute surveillance.

Recommandation 3

Tenir compte des expériences à la frontière suisse lors de la planification de la gestion de pandémies

La CdG-E invite le Conseil fédéral à tenir compte des expériences de l'AFD à la frontière suisse lors de la planification de la gestion de pandémies (éventuelles modifications législatives, adaptation du Plan suisse de pandémie, etc.).

Recommandation 4

Collaboration avec les cantons frontaliers

La CdG-E invite le Conseil fédéral à tirer, avec les cantons frontaliers, un bilan de la collaboration au sujet des mesures à la frontière et du flux d'information en la matière.

8

Efficacité des mesures

8.1

Effet escompté des mesures atteint

L'objectif de l'interdiction du tourisme d'achat était, comme mentionné au chiffre 5, de diminuer le trafic à la frontière afin d'éviter une surcharge de l'AFD, d'assurer les contrôles systématiques décidés le 13 mars 2020 par le Conseil fédéral et de garantir la continuité en matière d'approvisionnement du pays en marchandises et en travailleurs frontaliers pour les milieux essentiels89.

L'AFD, en tant qu'organe d'exécution, ne se prononce pas de manière générale sur l'efficacité des décisions prises par le Conseil fédéral. Elle estime cependant que les mesures d'accompagnement à la fermeture des frontières et à la réintroduction des 88 89

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 12 octobre 2020, audition de l'AFD.

Voir ch. 3.1; Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 2.1, p. 4.

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contrôles systématiques, comme par exemple la possibilité de canaliser le trafic terrestre et aérien, d'introduire des voies prioritaires pour les marchandises et les personnes essentielles ou l'interdiction du tourisme d'achat, ont eu l'effet escompté; l'AFD a pu non seulement maintenir son dispositif, mais également garantir un trafic fluide dans l'ensemble90.

De nombreuses tentatives de contournement des conditions à remplir qui permettaient une entrée en Suisse (112 000 renvois) et de l'interdiction du tourisme d'achat ou des mesures de canalisation (8848 amendes au total) ont été relevées.

L'AFD a souligné devant les CdG que la fermeture de la frontière a montré, outre les tentatives de contournement des mesures, que la mobilité transfrontalière de la population est aujourd'hui très élevée. La nombre des personnes touchées par l'interdiction de franchir la frontière (famille, travail, soins aux proches, achats, soins aux animaux, soins aux biens, etc.) était étonnamment grand et montre à quel point cette fermeture a été une mesure drastique. L'AFD reconnaît qu'il n'a pas été possible de trouver des solutions satisfaisantes et contrôlables pour tous ces besoins, même si elle estime avoir privilégié la recherche de solutions au niveau local91.

On remarque bien, dans le graphique suivant (Graphique 1), la chute du trafic transfrontalier entre mars et juin 2020 et ainsi l'impact des mesures prises.

Nombre de passage de frontière

Graphique 1: Nombre de passage de frontière entre février et juin 2020, par région. Présentation de l'AFD lors de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 29 juin 2020.

On remarque cependant qu'en début de crise et jusqu'à mi-avril, le nombre de renvois était très élevé (Graphique 2). Cela est dû, selon la CdG-E, au moins en partie à la communication suboptimale des autorités suisses (voir ch. 8.2). La question de l'opportunité des mesures est d'ailleurs plus généralement à mettre en lien avec la question de la communication, étudiée dans le chapitre suivant.

90 91

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 3.1, p. 4.

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 4.

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Renvois

Date

Graphique 2: Nombre de renvoi à la frontière entre le 15 mars 2020 et le 10 juin 2020, Dashboard de l'AFD du 10.6.2020.

8.2

Communication concernant les mesures prises à la frontière

8.2.1

Communication interne

Selon l'AFD92, le flux d'information entre l'état-major de crise et le reste de l'unité administrative pourrait être encore davantage optimisé. L'échange régulier d'informations entre les membres du Comité de direction de l'AFD et les régions a néanmoins été particulièrement apprécié et sera transposé dans les nouveaux processus liés au développement de l'AFD de manière générale. Le Comité de direction, ainsi régulièrement informé des développements sur le terrain, pourra donc être réactif face au développement d'une nouvelle situation de crise et mandater la création d'un étatmajor rapidement.

8.2.2

Communication externe

La réintroduction des contrôles à la frontière décidée par le Conseil fédéral le 13 mars 2020 pour l'Italie et le 16 mars 2020 avec l'Allemagne, l'Autriche et la France l'a été sur proposition du DFI respectivement du DFJP. En ce qui concerne ces 92

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 2.

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décisions, la responsabilité en matière de communication est auprès des départements et unités administratives responsables. L'AFD n'a ici qu'un rôle de mise en oeuvre.

Selon elle, chaque office communiquait lorsqu'il avait la responsabilité principale dans la mise en oeuvre d'une mesure définie, mais en consultation étroite avec les partenaires93.

L'AFD estime que toutes les mesures prises dans son champ de compétence ont été communiquées, soit lors des points de presse, lors d'une conférence de presse ou par le moyen d'un communiqué de presse. Elle estime également que la décision prise d'interdire le tourisme d'achat et les activités de loisirs sur la base de l'article 127, alinéa 2, a été communiquée à l'aide des panneaux mis en place, des injonctions verbales répétées de ses collaborateurs et des centrales de renseignement, mais également des informations présentes et actualisées en tout temps sur son site internet94. Le Directeur de l'AFD avait également exprimé lors de la conférence de presse du 28 mars 2020 que les activités de loisirs et de tourisme d'achat étaient à proscrire et que des amendes pourraient être prononcées par l'AFD. Le 4 avril 2020, l'AFD a fait mention de cette interdiction dans un communiqué de presse régional qui n'existe qu'en allemand95. L'AFD a cependant déclaré qu'elle s'assurera, à l'avenir, d'utiliser une liste de destinataires complète et dans toutes les régions linguistiques pour ce genre de communication. Le site internet de l'AFD contenait également une information sur cette interdiction96: «Lors du franchissement de la frontière, il est tenu compte en particulier du motif du voyage; quiconque viole intentionnellement les conditions, par exemple pour des activités de loisirs ou pour faire des achats, est sanctionné d'une amende ou dénoncé.» L'AFD estime rétrospectivement que la communication vis-à-vis de la population générale était adéquate, mais qu'elle aurait pu être plus active et à plus large-échelle sur certains points97. Elle est critique spécifiquement sur le point de l'interdiction du tourisme d'achat98. Elle a cependant informé la CdG-E que la Chancellerie fédérale, responsable de la communication dans son ensemble, avait alors une pratique plus restrictive qu'à l'accoutumée en termes de communiqué de presse, raison pour laquelle l'AFD avait alors
jugé une couverture extensive du sujet disproportionnée. D'après la Chancellerie fédérale, la responsabilité en termes de communication est toujours restée auprès des unités administratives et elle n'a pas donné d'instructions en la matière ni adopté de pratique plus restrictive.

93 94 95

96 97 98

Lettre de l'AFD à l'attention de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 4 août 2020, p. 5.

Rapport de l'AFD du 2 octobre 2020, ch. 4.2, p. 14.

COVID-19: Vorübergehende Schliessung des Grenzübergangs Biel-Benken wird aufgehoben. Communiqué de presse régional de l'AFD du 4 avril 2020, www.douane.admin.ch > Aktuell > Medieninformationen > Regionale Medienmitteilungen.

www.douane.admin.ch > Informations concernant le coronavirus > Postes frontières ouverts (État au 4 avril 2020).

Procès-verbal de la séance de la sous-commission DFF/DEFR de la CdG-E du 12 octobre 2020, audition de l'AFD.

Analyse après action du 1er février 2021, p. 3.

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8.3

Appréciation de la CdG-E

La CdG-E estime que les mesures prises par l'AFD ont montré leur efficacité. Un certain nombre d'incertitudes a eu pour conséquence de relativiser l'efficacité des mesures en début de crise, mais les différentes unités responsables ont pu réagir et proposer au Conseil fédéral les modifications nécessaires. Dès le 17 avril 2020, date d'entrée en vigueur de l'interdiction du tourisme d'achat au niveau de l'ordonnance, la situation était plus claire et la communication plus large et directe99.

La CdG-E estime en revanche que la communication durant la phase allant de fin mars à mi-avril aurait pu être plus intense à l'égard de la population de manière générale.

La CdG-E estime que l'importance de la décision de l'AFD aurait nécessité une communication explicite large en plus des indications de l'AFD présentes aux postes frontière. La CdG-E peine à suivre l'argumentation de l'AFD sur ce point. D'ailleurs, lorsque l'ordonnance 2 COVID-19 a été adaptée le 16 avril 2020, un communiqué de presse spécifique a été publié avec pour titre: «Coronavirus: le tourisme d'achat reste interdit». Elle estime qu'un communiqué de presse spécifique pour la décision de l'AFD aurait été nécessaire. Une information à l'aide de panneaux ne permet en effet pas aux personnes concernées d'adapter leur comportement suffisamment à l'avance.

L'information présente sur le site web n'était que peu mise en avant, alors qu'elle aurait dû être présentée sur la page d'accueil et visible rapidement.

Le fait que la direction du SEM n'était pas au courant de la décision de l'AFD concernant l'interdiction du tourisme d'achat début avril100 est un signe clair, d'après la CdG-E, que ni le flux d'information entre unités administratives ni la communication externe n'était suffisant.

Dans son rapport101 d'évaluation de la gestion de crise pendant la pandémie de COVID-19, la Chancellerie fédérale déclare que la «communication externe a été jugée très bonne, voire excellente», mais que la «communication interne, au sein de l'administration fédérale, fait l'objet de critiques bien qu'elle ait globalement bien fonctionné. [...] [Il] n'en demeure pas moins qu'elle a parfois semblé fortuite et que l'information a circulé de manière informelle». Les constats de la CdG-E sur cet exemple précis tendent à confirmer les constats de la Chancellerie
fédérale au sujet de la communication interne, mais la CdG-E estime que la communication externe elle aussi n'a pas fonctionné sans accroc dans tous les domaines. De plus, les flux d'informations entre unités administratives également semblent n'avoir pas toujours fonctionné de manière optimale. En l'occurrence, la CdG-E estime que des mesures doivent être prises pour améliorer la coordination entre organes responsables des décisions et ceux responsables de la mise en oeuvre. Concernant la communication au sujet de décisions importantes touchant largement la population, en l'occurrence prise par une unité administrative, les processus de communication doivent être mieux définis.

99

Coronavirus: le tourisme d'achat reste interdit. Communiqué de presse du Conseil fédéral du 16 avril 2020.

100 Voir ch. 5.2.

101 Rapport de la Chancellerie fédérale concernant l'évaluation de la gestion de crise pendant la pandémie de COVID-19 (1re phase / février ­ août 2020) du 11 décembre 2020, ch. 2.6, p. 25.

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Recommandation 5

Améliorer la communication interne et externe et le flux d'information entre unités administratives

La CdG-E prie le Conseil fédéral d'améliorer la communication interne et externe et le flux d'information entre unités administratives relatifs aux décisions et aux mesures qui ont des conséquences importantes sur la population. Il devra notamment prendre des mesures visant à une meilleure coordination entre les organes responsables des décisions et les organes responsables de la mise en oeuvre.

9

Suite des travaux

La CdG-E invite le Conseil fédéral à prendre position sur le présent rapport d'ici au 24 septembre 2021. Elle le prie également d'indiquer au moyen de quelles mesures et dans quels délais il envisage de mettre en oeuvre les recommandations de la commission.

22 juin 2021

Pour la Commission de gestion du Conseil des États La présidente: Maya Graf La secrétaire: Beatrice Meli Andres Le président de la sous-commission DFF/DEFR: Matthias Michel Le secrétaire de la sous-commission DFF/DEFR: Pierre-Alain Jaquet

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Liste des abréviations AAR AFD CdG CdG-E CdG-N COVID-19 Cst.

DDPS DEFR DFAE DFF DFI DFJP DPA ECS EMC EMCC EMFP ERNS FF FLIR LAAM LAO LD LEI LEp OEMFP OFJ OFROU OFSP OLOGA

After Action Review; analyse après action Administration fédérale des douanes Commissions de gestion des Chambres fédérales Commission de gestion du Conseil des États Commission de gestion du Conseil national Coronavirus disease 2019; maladie à coronavirus 2019 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101) Département de la défense, de la protection de la population et des sports Département de l'économie, de la formation et de la recherche Département des affaires étrangères Département des finances Département de l'intérieur Département de justice et police Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.0) Exercice de conduite stratégique État-major de conduite de crise (de l'AFD) État-major du Conseil fédéral chargé de gérer la crise du coronavirus État-major fédéral Protection de la population Exercice du Réseau national de sécurité Feuille fédérale Forward Looking Infrared Loi fédérale du 3 février 1995 sur l'armée et l'administration militaire (Loi sur l'armée, LAAM; RS 510.10) Loi du 18 mars 2016 sur les amendes d'ordre (LAO; RS 314.1).

Loi du 18 mars 2005 sur les douanes (LD; RS 631.0) Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20) Loi fédérale du 28 septembre 2012 sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme (Loi sur les épidémies, LEp; RS 818.101) Ordonnance du 2 mars 2018 sur l'État-major fédéral Protection de la population (OEMFP; RS 520.17) Office fédéral de la justice Office fédéral des routes Office fédéral de la santé publique Ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA; RS 172.010.1) 33 / 34

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Org DFJP

Ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police (Org DFJP; RS 172.213.1) OSPF Ordonnance du 3 septembre 1997 sur le recours à la troupe pour assurer le service de police frontière (OSPF; RS 513.72) RO Recueil officiel du droit fédéral suisse RS Recueil systématique du droit fédéral suisse SEM Secrétariat d'État aux migrations SRAS-CoV-2 Coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère

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