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Message à l'appui d'un projet de loi sur les étrangers

du 19 juin 1978

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre ci-joint un projet de loi sur les étrangers en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons en outre de classer -- les interventions parlementaires suivantes : 1971 P 10636 Activité politique des réfugiés d'esprit démocratique (N 17. 3. 71, Götsch) 1972 P 11216 Travailleurs étrangers. Regroupement familial (N 4. 12. 72, Mugny) 1974 P 11879 Politique à l'égard des étrangers (N 14. 3. 74, Grolimund) 1974 M ad 11821 Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LFSEE). Revision (N 14. 3. 74, Commission du Conseil national; E 26. 6. 74) 1976 M 12216 Saisonniers étrangers (N 4. 3. 76, Canonica; E 22. 6. 76) - l'initiative cantonale 75.201 de Genève concernant les saisonniers (N 2. 6. 75, E 2. 6. 75).

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

19 juin 1978

1978 -- 412

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ritschard Le chancelier de la Confédération, Huber

12 Feuille fédérale. 130' année. Vol. II

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Vue d'ensemble La loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE), a été conçue comme une loi cadre. Elle était destinée à remplir une double fonction: d'une part empêcher des éléments «indésirables» de pénétrer et de demeurer en Suisse, d'autre part permettre aux autorités fédérales d'exercer une influence régulatrice sur le marché du travail et de prévenir un excès dépopulation étrangère.

L'évolution qui s'est poursuivie depuis l'unique revision de la loi en 1948 a montré la nécessité de concrétiser dans une loi les principes de notre politique à l'égard des étrangers. En outre, de larges milieux de la population sont de l'avis que les principales questions qui se posent au sujet du statut des étrangers doivent être réglées au niveau de la loi.

Lors des débats parlementaires sur la troisième initiative contre l'emprise étrangère, l'opinion a prévalu qu'une revision de la LSEE permettrait mieux qu'une modification constitutionnelle de tenir compte des diverses conceptions qui se sont fait jour au sujet des objectifs de la politique à suivre à l'égard des étrangers. Par une motion, le Conseil national (14 mars 1974) et le Conseil des Etats (26 juin 1974) ont chargé le Conseil fédéral de présenter au plus tôt aux Chambres un rapport et des propositions relatifs à la politique future concernant les étrangers et, en particulier, à la revision de la LSEE.

Les buts assignés à la nouvelle loi sur les étrangers dont nous vous soumettons le projet sont les suivants: - Adapter le droit en vigueur aux conceptions prévalant actuellement sur le plan national et international // s'agit à cet égard de procéder à une refonte complète du droit en vigueur.

D'une part, il faut restituer au Parlement la compétence législative abandonnée par la LSEE aux pouvoirs exécutifs, lorsqu'une telle délégation de compétence n'est plus guère soutenable. D'autre part, cette refonte doit s'inspirer des normes applicables sur le plan international en matière de séjour et d'établissement des étrangers. En outre, il y a lieu de tenir compte dans toute la mesure du possible des aspects sociaux et humains.

- Créer un cadre juridique pour notre politique à l'égard des étrangers La nouvelle loi doit établir les bases juridiques permettant d'obtenir un rapport équilibré entre le chiffre de la
population suisse et celui de la population étrangère résidante. Tout en visant cet objectif quantitatif de notre politique à l'égard des étrangers, il s'agit de mettre en oeuvre les mesures propres à faciliter l'intégration dans notre communauté nationale des étrangers qui résident durablement en Suisse avec leurs familles ; ces mesures doivent toutefois tenir compte de la nécessité de conserver au marché de l'emploi la souplesse permettant de faire face, selon les circonstances, à l'évolution de la situation économique.

- Définir le statut juridique de l'étranger selon la durée de la présence en Suisse D'étroites relations existent entre l'intégration des étrangers dans notre commu-

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nauté nationale et le statut juridique qu'il convient de leur accorder. Le projet de loi définit le statut personnel, familial et professionnel de l'étranger. II le fait en partant du principe que les étrangers qui résident durablement dans notre pays doivent jouir d'une situation juridique facilitant leur intégration progressive dans notre communauté nationale. Le projet de loi ne se borne pas à définir le statut de l'étranger mais prévoit encore certaines dispositions relatives à sa protection et à son intégration sociales. Enfin, il règle l'activité politique des étrangers.

- Accorder aux étrangers une protection juridique garantissant leur statut Les voies de recours judiciaires prévues par la législation en vigueur seront plus largement ouvertes dans la mesure où le projet de loi étend les droits subjectifs de l'étranger. D'autre part, un certain nombre de droits seront garantis à l'étranger à titre d'exigences minimales posées sur le plan de la procédure des autorités cantonales.

Le canton de Genève a déposé, le 9 avril 1975, une initiative demandant au Conseil fédéral, dans le cadre de la revision en cours de la LSEE, de supprimer le statut actuel des saisonniers en le remplaçant par des dispositions conformes aux droits élémentaires de ta personne humaine, sans que cette mesure ne remette en question la politique de stabilisation et d'intégration préconisée par le Conseil fédéral. Lors de la procédure de consultation, des propositions similaires ont été formulées par plusieurs partis politiques, par les Eglises et par des associations et organisations.

Le projet de loi maintient le statut du saisonnier. Aussi longtemps que, dans une branche économique, l'activité continuera de dépendre du rythme des saisons et que les entreprises de cette branche conserveront un caractère saisonnier, il nous parait justifié de soumettre à ce statut les travailleurs occupant un emploi saisonnier dans ces entreprises. Des considérations d'ordre politique parlent aussi en faveur du maintien du statut du saisonnier. Il n'est pas douteux que son abolition entraînerait inévitablement un accroissement du nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour et remettrait en cause le processus de réduction de la population étrangère résidante déjà eu cours. Toutefois, le projet de loi règle le statut du
saisonnier de manière à éliminer les abus constatés dans le passé et prend en considération, dans la mesure du possible, les aspirations sociales et humaines des travailleurs saisonniers. Dans ce sens, le projet de loi va à la rencontre de l'initiative du canton de Genève.

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Message I

Partie générale

II III

Situation initiale L'évolution de la population étrangère résidante et de la réglementation sur les étrangers jusqu'en 1948

Jusqu'à la première guerre mondiale, les ressortissants d'Etats avec lesquels la Suisse avait conclu des traités d'établissement pouvaient sans restriction s'établir dans notre pays et y exercer l'activité professionnelle de leur choix. Dans la pratique, cette liberté d'établissement était accordée également à des ressortissants d'Etats avec lesquels la Suisse n'avait pas conclu de traités d'établissement.

La police des étrangers relevait alors des cantons. Le séjour ou l'établissement ne pouvait être refusé à un étranger que s'il avait subi une condamnation pénale, s'il risquait de tomber à la charge de la communauté ou s'il paraissait politiquement dangereux. Il n'existait aucune mesure visant à prévenir l'excès de population étrangère dans le cadre d'un régime s'appliquant à l'admission. Cette réglementation favorisa l'immigration des étrangers, qui se développa avec l'industrialisation de notre pays et la construction des chemins de fer. La Suisse a en outre exercé de tout temps une forte attraction sur les étrangers, tant en raison de sa situation géographique qu'à cause de la stabilité de ses institutions politiques et de ses conditions économiques.

En 1910, la population étrangère résidante comprenait 552 011 personnes, ce qui représentait 14,7 pour cent de l'ensemble de la population de résidence.

Lorsqu'éclata la première guerre mondiale, la proportion d'étrangers était évaluée à 15,4 pour cent.

La première guerre mondiale mit un terme à la liberté d'établissement. Se fondant sur les pouvoirs extraordinaires qui lui avaient été conférés, le Conseil fédéral édicta, le 21 novembre 1917, une ordonnance concernant la police à la frontière et le contrôle des étrangers (RO 1917 989). L'entrée et le séjour des étrangers furent ainsi soumis à un contrôle de police des étrangers. Cette ordonnance fut suivie, le 17 novembre 1919, d'une ordonnance sur le contrôle des étrangers (RO 1919 947), qui assouplit les prescriptions sévères s'appliquant jusqu'alors au visa d'entrée et mit principalement l'accent sur le contrôle des étrangers à l'intérieur du pays. A partir de cette époque, les traités d'établissement furent interprétés dans un sens qui laissait aux Etats le pouvoir de décider librement de l'admission des étrangers et des critères sur lesquels elle se fondait. Cette pratique qui restreignait
en fait la portée des traités d'établissement a, par la suite, été admise tacitement ou expressément par les Etats contractants. Les traités d'établissement conclus par la Suisse restent en vigueur; ils ne déploient cependant leurs effets que dans les limites de cette interprétation.

L'ordonnance du Conseil fédéral du 29 novembre 1921 (RO 7927 829) sur le contrôle des étrangers, qui se fondait également sur les pouvoirs extraordinaires conférés au pouvoir exécutif, constitua en matière d'admission un premier pas 168

vers une pratique conforme aux intérêts de notre pays. Pour passer du régime de police des étrangers instauré sous l'empire des pouvoirs extraordinaires à une réglementation fédérale édictée selon les voies normales, il fut nécessaire de créer préalablement une base constitutionnelle adéquate. L'article 69ter de la constitution, adopté en votatîon populaire le 25 octobre 1925, donna à la Confédération la compétence de légiférer sur l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers. La nouvelle disposition constitutionnelle permit d'édicter, le 26 mars 1931, la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE), entrée en vigueur le 1er janvier 1934 (RS 142.20), Cette loi a été conçue comme une loi cadre. Elle était destinée à remplir une double fonction : d'une part empêcher des éléments «indésirables» de pénétrer et de demeurer en Suisse, d'autre part permettre aux autorités fédérales d'exercer une influence régulatrice sur le marché du travail et de prévenir un excès de population étrangère. Pour mener à bien cette double tâche, elle délègue au Conseil fédéral une large compétence en matière législative (art, 25). Aux termes de cette disposition, le Conseil fédéral est en particulier autorisé à régler l'entrée et la sortie des étrangers, le contrôle à la frontière et le petit trafic frontalier.

D'autre part, un pouvoir de légiférer très étendu a été délégué au Conseil fédéral par l'article 16. En vertu de cet article, les autorités chargées de délivrer les autorisations doivent tenir compte, dans leurs décisions, des intérêts moraux et économiques du pays, ainsi que du taux de population étrangère. Les prescriptions les plus importantes de la réglementation sur les étrangers ont été édictées sur cette base par ordonnances du Conseil fédéral ou des départements.

Le mouvement de retour des étrangers dans leur pays, causé par la première guerre mondiale, s'est poursuivi au cours des années suivantes. De plus, le nouveau droit fédéral a permis, durant la crise des années trente, de freiner l'immigration et d'éviter ainsi un chômage plus élevé. II s'ensuivit une forte diminution de l'effectif de la population étrangère résidante, qui ne se montait plus, en 1941, qu'à 223 554 personnes; la proportion d'étrangers dans la population totale atteignit ainsi son niveau le
plus bas depuis 1900, à savoir 5,2 pour cent.

Au cours de la seconde guerre mondiale, diverses questions touchant la police des étrangers durent être réglées selon le droit d'exception. Les dispositions arrêtées à ce sujet furent en partie rassemblées dans l'arrêté du Conseil fédéral du 7 mars 1947 (RO 1947 141) modifiant les prescriptions sur la police des étrangers. La nécessité de remplacer cet arrêté, édicté sous l'empire des pouvoirs extraordinaires, fut à l'origine de la seule revision de la LSEE, en 1948.

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L'évolution de la population étrangère résidante et de la réglementation sur les étrangers depuis 1948

Dans l'après-guerre, un rapide essor économique ne tarda pas à se manifester.

Cette évolution entraîna une augmentation constante des besoins de maind'oeuvre étrangère. L'effectif des étrangers étant alors encore faible et l'opinion prévalant que l'activité économique redeviendrait normale à plus ou moins brève échéance, les autorités suisses suivirent jusqu'en 1963 une politique d'immigration libérale, qui répondait avant tout aux besoins de l'économie.

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Des mesures visant à limiter le nombre des travaüleurs étrangers ont été prises sous la forme de divers arrêtés du Conseil fédéral, édictés entre 1963 et 1970 en vertu de la LSEE. Ces mesurés permirent d'abord de réduire les taux d'accroissement annuels et, par la suite, de stabiliser le nombre des étrangers exerçant une activité lucrative. L'arrêté du Conseil fédéral du 16 mars 1970 (RO 1970 309) supprima le plafonnement par entreprise en vigueur jusqu'alors et le remplaça par un système de limitation globale du nombre des travailleurs étrangers s'appliquant à l'ensemble du pays. Depuis lors, les étrangers ne peuvent être admis à exercer une activité lucrative en Suisse que dans les limites des contingents attribués aux cantons et à la Confédération. Les mesures sévères prises depuis 1970 en vue de limiter l'admission des étrangers ont permis de stabiliser puis, compte tenu du recul du degré de l'emploi dû au fléchissement de l'activité économique, de réduire fortement l'effectif de la population étrangère résidante.

Cet effectif avait passé de 285 000 en 1950 à 1 065 000 en 1974; durant cette période, la part des étrangers dans la population totale s'est élevée de 6,1 à 16,8 pour cent. Par la suite, l'effectif de la population étrangère résidante diminua graduellement; à la fin de 1977, il s'établissait à 932 743 personnes, c'est-à-dire à 14,9 pour cent de la population totale.

Contrairement à ce que l'on s'accordait généralement à penser immédiatemen après la seconde guerre mondiale, la situation économique resta favorable audelà de toute attente et la présence en Suisse d'un nombre élevé d'étrangers prit un caractère durable. La situation juridique et sociale de ces étrangers dut en conséquence être adaptée aux circonstances nouvelles. L'adhésion de la Suisse à la Décision du Conseil de l'OECE des 30 octobre 1953/7 décembre 1956 régissant l'emploi des ressortissants des pays membres (non publiée), qui a été reprise par l'OCDE, constitua un premier pas dans cette direction. Aux termes de cette décision, les autorités de tout pays membre accordent aux travailleurs ressortissants des autres Etats membres régulièrement employés dans le pays depuis cinq ans au moins, les autorisations qui leur permettent de continuer d'être employés soit dans la même profession soit, en cas de chômage particulièrement
important dans cette profession, dans une autre activité professionnelle, à moins que d'impérieuses raisons d'intérêt national ne justifient une exception. Sur le plan bilatéral, l'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0,142.114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse mit ces travailleurs au bénéfice d'un statut juridique plus favorable en ce qui concerne le renouvellement des autorisations après cinq ans de séjour, la mobilité professionnelle, la situation des travailleurs saisonniers et le regroupement familial. En 1967, les avantages accordés aux travailleurs italiens furent étendus, par décision unilatérale, à l'ensemble de la main-d'oeuvre provenant des Etats d'Europe occidentale. Dans notre rapport concernant les Grandes lignes de la politique gouvernementale pendant la législature 1971-1975 (FF 197211064), nous avons enfin exposé que la création d'un marché du travail plus ou moins homogène constitue l'un des objectifs principaux de notre politique à l'égard des étrangers.

Cet objectif a été progressivement atteint dans les ordonnances prises depuis lors par le Conseil fédéral en vue de limiter le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative.

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Considérant qu'en sus de l'amélioration du statut juridique de l'étranger, d'autres mesures sont également nécessaires à l'intégration des étrangers qui résident durablement dans notre pays, nous avons institué en 1970 une commission fédérale consultative pour le problème des étrangers. Cette commission a reçu pour mandat d'examiner la politique d'immigration suivie par la Suisse et de traiter l'ensemble des questions que pose, dans les domaines démographique, social, politique, économique et juridique, la présence dans notre pays d'un nombre considérable d'étrangers. Elle a voué une attention particulière à l'intégration sociale des étrangers et à l'amélioration des rapports entre la population suisse et la population étrangère.

L'accroissement de la population étrangère résidante et les problèmes qui en sont résultés pour la Suisse ont inquiété divers milieux de notre population. Il convient en particulier de rappeler les cinq initiatives populaires contre l'emprise étrangère déposées entre 1965 et 1974. La première a été retirée après que le Parlement en eut débattu; les quatre autres ont été rejetées lors des votations populaires des 7 juin 1970,20 octobre 1974 et 13 mars 1977. Les débats auxquels ont donné lieu ces initiatives ont clairement montré que les problèmes que pose la population étrangère dans notre pays ne sauraient être exclusivement résolus sur le plan quantitatif, mais qu'il est également nécessaire de prendre des mesures propres à faciliter l'intégration des étrangers dans notre communauté nationale.

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Interventions parlementaires

Le problème des étrangers a également fait l'objet, au Parlement, de nombreuses interventions. Nous nous bornerons à mentionner ci-après les interventions parlementaires qui n'ont pas encore été classées.

Le postulat Gotsch (10 636; N 17. 3. 71) invite le Conseil fédéral à modifier l'article 21 du règlement d'exécution de la LSEE, de telle sorte que l'activité des réfugiés politiques favorables à la démocratie ne connaisse d'autres limites que celles qui sont imposées par le maintien de l'ordre et de la tranquillité.

Le postulat Mugny (11 216; N 4.12. 72) se réfère, à propos du regroupement familial, à un problème particulier auquel doivent faire face les étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour à l'année ou d'une autorisation saisonnière, dont l'épouse a également été régulièrement autorisée à prendre un emploi dans notre pays. S'agissant d'un nombre limité de cas, le postulat propose, pour ces couples, que les dispositions fédérales relatives à la réunion des familles soient assouplies. L'allégement de ces dispositions mettrait fin à la situation pénible des enfants séjournant clandestinement ou du moins d'une bonne partie d'entre eux; ces enfants pourraient ainsi bénéficier d'une scolarisation normale et être élevés dans des conditions plus humaines.

Aux termes du postulat Grolimund (11 879; N 14. 3. 74), le Conseil fédéral est invité à examiner s'il n'y aurait pas lieu de préparer un projet de disposition constitutionnelle fixant les buts et les principes fondamentaux d'une politique fédérale à l'égard des étrangers. En élaborant ces principes, il faudrait, selon l'auteur de ce postulat, tenir compte des données politiques, écologiques,

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humanitaires et économiques. La nouvelle disposition de la constitution devrait prévoir notamment des mesures visant à maintenir la proportion de la population résidante étrangère dans des, limites politiquement supportables, à permettre l'emploi, dans les limites fixées par la politique suivie en la matière, d'un nombre convenable de travailleurs étrangers, à donner aux cantons et aux communes la possibilité de procéder à des naturalisations facilitées et à définir les droits et les devoirs des étrangers en Suisse.

Lors des débats parlementaires concernant la troisième initiative contre l'emprise étrangère, l'opinion a prévalu qu'une revision de la LSEE permettrait mieux qu'une modification constitutionnelle de tenir compte des diverses conceptions d'ordre quantitatif et qualitatif qui se sont fait jour quant à la politique à suivre à l'égard des étrangers. Aux termes d'une motion adoptée par le Conseil national le 14 mars 1974 et par le Conseil des Etats le 26 juin 1974, .«le Conseil fédéral est chargé de présenter au plus tôt aux Chambres un rapport et des propositions relatifs à la politique future concernant les étrangers et en particulier à la revision de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers. Cette revision a pour but la stabilisation et par la suite la réduction progressive du nombre des étrangers en Suisse compte tenu de tous les facteurs humains, sociaux, économiques et d'équilibre démographique et de la situation particulière de certains cantons».

Enfin, la motion Canonica (12216; N 4. 3. 76, E 22. 6. 76) invite le Conseil fédéral, en prévision de la prochaine revision de la LSEE et compte tenu des objectifs de la politique à suivre à l'égard des étrangers, à interdire graduellement l'emploi de saisonniers étrangers en dehors des branches de l'économie qui ont un caractère purement saisonnier et à permettre aux saisonniers étrangers de changer d'emploi à l'intérieur de la branche et du canton, à moins qu'un contrat établi pour une durée déterminée n'ait été conclu conformément à l'article 335, lel alinéa, CO.

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Initiative du canton de Genève

Le canton de Genève a déposé, le 9 avril 1975, une initiative tendant à la suppression du statut des saisonniers. Aux termes de cette initiative, «le Grand Conseil genevois, constatant que le statut des saisonniers doit être totalement revu en ce qui concerne les conditions d'emploi, de vie familiale, de logement et de sécurité sociale, demande de supprimer, à l'occasion de la revision en cours de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 26 mars 1931, le statut actuel des saisonniers en le remplaçant par des dispositions conformes aux droits élémentaires de la personne humaine, sans que cette mesure ne remette en question la politique de stabilisation et d'intégration préconisée par le Conseil fédéral».

L'initiative est fondée sur l'argumentation suivante: La suppression du statut actuel du saisonnier est souhaitable, car il comporte des notions intolérables de nos jours. Son remplacement s'impose cependant pour plusieurs raisons : a. Il existe des secteurs économiques qui sont et resteront toujours saisonniers. Dans ces activités, on peut comprendre notamment celle de 172

l'hôtellerie de stations, où la clientèle est représentée par des touristes dépendant de leurs périodes de vacances, ainsi que celle de l'agriculture, dont le besoin en main-d'oeuvre dépend à l'évidence des saisons.

b. De nombreux travailleurs étrangers désirent conserver des permis de travail saisonniers. En effet, malgré un emploi stable dans notre pays, même depuis plusieurs années, un très grand nombre d'étrangers ont conservé une activité dans leur pays d'origine, us n'entendent en aucune manière s'établir dans notre pays, ce qui entraînerait pour eux le déplacement de leur famille et la rupture avec leur milieu social. Il ne faut pas se cacher de mentionner que la majorité des travailleurs étrangers viennent exercer une activité en Suisse dans le dessein unique de gagner de l'argent, puis de s'installer plus aisément dans leur pays.

c. Il est impensable que le Conseil fédéral, au cas où le statut du saisonnier serait aboli sans texte de remplacement, ait la possibilité de stabiliser brusquement un nombre important de saisonniers, non compris leur famille, dans notre pays. Il est relativement aisé de s'imaginer les conséquences déplorables que cette mesure entraînerait sur le plan socio-économique. Par ailleurs, le peuple suisse a marqué sa volonté d'abaisser le nombre d'étrangers résidant en Suisse d'une manière cohérente et humaine en rejetant, le 20 octobre 1974, la troisième initiative de l'Action nationale . . , En faisant état des mesures de contingentement de la main-d'oeuvre étrangère prises par le Conseil fédéral, l'initiative relève qu'il s'agit également de trouver une solution à la question des «faux saisonniers», qui ne bénéficient pas des avantages des travailleurs annuels, mais qui exercent une activité leur permettant de travailler quasiment toute l'année en Suisse. Certaines catégories de métiers comprises dans le statut actuel du saisonnier ne doivent donc désormais plus l'être. D'autres catégories, comprises dans les branches d'activités réellement saisonnières, devraient être soumises à une nouvelle réglementation, dont la teneur répondrait aux exigences posées par l'initiative. Le rapport estime de plus qu'en tout cas pour l'industrie du bâtiment, qui emploie la majorité des saisonniers, l'initiative va dans le sens de l'évolution des techniques qui tendent, tout au
moins dans les régions urbaines, à étaler l'activité des chantiers sur douze mois de l'année et non plus sur neuf mois seulement.

Pour ces diverses raisons, le rapport insiste pour qu'une législation nouvelle entraîne des améliorations dans les domaines suivants: 1. Conditions d'emploi La liberté contractuelle est essentielle. Aussi bien l'employeur que l'employé doivent pouvoir convenir, d'un commun accord, des conditions d'emploi en fonction d'une situation économique déterminée. La date d'entrée en Suisse devrait également pouvoir être fixée d'un commun accord.

2. La vie familiale Le travailleur étranger doit avoir la possibilité d'organiser sa vie familiale selon le mode qui lui convient et qui est possible de réaliser.

3. Les conditions de logement Un effort sensible a été fait sur le plan des conditions de logement. Cet effort devrait être poursuivi. Il sied cependant de relever que le saisonnier recherche très souvent, à juste titre, le logement le meilleur marché possible, au détriment du confort. Très souvent aussi, la population suisse accepte mal le tempérament de ces locataires et nombre de difficultés proviennent de nos concitoyens eux-mêmes. Il convient toutefois de rappeler le succès remporté par des constructions d'immeubles à l'usage des travailleurs étrangers, réalisées par la Société 173

suisse des entrepreneurs (SSE), parfois en collaboration avec la Fédération des syndicats du bois et du bâtiment (FOBB).

4, La sécurité sociale Le travailleur saisonnier cotise obligatoirement à Passurance-invalidité comme il est astreint au paiement de l'AVS, mais ne bénéficie pas, en cas de besoin, des mêmes prestations allouées au personnel suisse. Il paie également ses impôts, retenus à la source, sans pouvoir utiliser totalement les avantages destinés aux citoyens suisses. Il est vrai que certaines mesures ressortissent au droit cantonal uniquement et, d'autres à des traités internationaux concernant la réciprocité des prestations pour des travailleurs suisses à l'étranger.

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Motifs justifiant la revision de la LSEE

De larges milieux de la population tiennent pour peu satisfaisant le fait que les dispositions les plus importantes de la réglementation sur les étrangers sont contenues dans des ordonnances du Conseil fédéral, voire des départements.

C'est aussi l'avis émis par le groupe de travail pour la préparation d'une revision totale de la constitution fédérale, qui fait suivre de la conclusion suivante le passage de son rapport final consacré à la législation sur les étrangers: «Le pouvoir de légiférer très étendu qui a été délégué au Conseil fédéral suivant l'interprétation donnée à la loi, déborde les limites que nous proposons de tracer en matière de délégation législative. Ne serait-ce que pour des motifs d'ordre constitutionnel, nous devons recommander de reviser la loi. C'est à son niveau que doivent être réglées les grandes questions qui se posent au sujet du statut des étrangers» (rap. cit. p. 730). A l'instar de la motion des Chambres fédérales mentionnée sous chiffre 113, ces avis justifient la revision de la loi actuelle.

Cette revision doit permettre de concrétiser au niveau législatif les objectifs que vise la politique suivie à l'égard de la population étrangère tout en adaptant aux exigences nouvelles les dispositions actuelles qui régissent le droit de présence des étrangers dans notre pays. Cela ressort avec toute la netteté désirable des débats parlementaires auxquels a donné lieu la troisième initiative populaire contre l'emprise étrangère, débats à l'occasion desquels les Chambres fédérales ont adopté leur motion. A l'issue de discussions nourries portant sur l'opportunité de présenter un contre-projet à cette initiative au niveau constitutionnel, les conseils législatifs se sont rangés à l'avis du Conseil fédéral selon lequel une revision de la LSEE permettant de dégager les idées directrices d'une politique d'ensemble à l'égard des étrangers offre un cadre mieux approprié pour régler de manière concrète les principes d'une telle politique, comme aussi les droits à accorder aux étrangers, d'autant que la constitution fédérale donne déjà à la Confédération la compétence de légiférer en ces matières.

Le postulat Grolimund, adopté en même temps que la motion susmentionnée, n'a pas manqué de retenir l'attention du Conseil fédéral. Entre-temps, les · Chambres fédérales ont eu une nouvelle
fois à se prononcer, à propos de la quatrième initiative contre l'emprise étrangère, sur l'opportunité d'opposer à cette initiative un contre-projet au niveau constitutionnel, comme le demandait la motion Jaeger-Saint-Gall du 22 mars 1974 transformée en postulat. Elles se sont rangées à l'avis que nous avions déjà émis à propos de l'initiative précédente, à savoir que les principes devant régir notre politique à l'égard des 174

étrangers trouveront plus judicieusement leur place dans la loi (cf. notre message du 8 mars 1976 concernant l'initiative populaire du Parti républicain «pour la protection de la Suisse» FF 1976 I 1343), Le projet de loi que nous vous soumettons tient compte des objectifs et des principes fondamentaux que le postulat Grolimund désirerait voir inscrits dans une nouvelle disposition constitutionnelle relative à la politique à pratiquer à l'égard des étrangers: maintenir la proportion de la population étrangère dans des limites politiquement supportables, prévoir dans ces limites l'emploi d'un nombre adéquat de travailleurs étrangers et définir les droits et les devoirs des étrangers en Suisse.

Quant à accorder aux cantons et aux communes la compétence de procéder à des naturalisations facilitées, il s'agit de la création de nouvelles possibilités dans ce domaine, qui exigerait une modification de la constitution fédérale. Les propositions que contient le postulat Grolimund sont donc, d'une part, prises en considération dans le projet de loi. D'autre part, elles seront examinées dans le cadre de la modification de l'article 44 de la constitution (naturalisations facilitées).

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Travaux préparatoires et procédure de consultation

Après le rejet, le 20 octobre 1974, de la troisième initiative contre l'emprise étrangère, le Département fédéral de justice et police a désigné un groupe d'experts chargé d'assister la Police fédérale des étrangers et les autres services fédéraux intéressés dans l'élaboration du projet de loi. Ce groupe se composait de: - M. Erwin Akeret, conseiller national, rédacteur politique et éditeur, à Winterthour; - M. Guido Casetti, président central de la Confédération des syndicats chrétiens de la Suisse, à Berne; - M. Franz Jaeger, conseiller national, professeur à l'Ecole de hautes études économiques et sociales de Saint-Gall, à Saint-Gall ; - M. Waldemar Jucker, secrétaire de l'Union syndicale suisse, actuellement délégué du Conseil fédéral aux questions conjoncturelles et aux possibilités de travail, à Berne; - M. Augustin Macberet, professeur aux facultés de droit des universités de Fribourg et de Genève, à Praroman; - M. Elmar Maeder, ancien directeur de la Police fédérale des étrangers, à Berne; - M. Francis Noël, secrétaire central de la Société suisse des entrepreneurs, à Zurich; - M. Dieter von Schulthess, avocat, à Zurich; - M. Ernest Schwarb, secrétaire central de l'Union centrale des associations patronales suisses, à Zurich.

Le 3 mai 1976, le Département fédéral de justice et police a soumis le projet de loi aux gouvernements cantonaux, aux partis politiques, au Tribunal fédéral ainsi qu'à 46 organisations et associations. A l'exception de dix associations qui ont renoncé expressément ou tacitement à donner leur avis, toutes les autorités et tous les organismes consultés se sont prononcés sur le projet de loi. En outre,

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25 autres organisations, associations et particuliers ont exprimé leur avis à ce sujet. En tout, 97 autorités, partis, organisations, associations et particuliers ont pris part à la procédure de consultation. Les associations d'étrangers en Suisse n'ont pas été invitées à participer directement à cette procédure. Les principales d'entre elles ont cependant eu l'occasion d'exprimer leur avis par l'intermédiaire de la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers; elles ont fait usage de cette faculté.

Les résultats de la procédure de consultation ont été publiés le 6 juin 1977. Les points les plus controversés du projet de loi sont le maintien du statut du saisonnier, la consolidation du statut de l'étranger selon la durée de sa résidence, la contribution de la Confédération dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales de l'étranger ainsi que la réglementation s'appliquant à l'activité politique des étrangers. Les critiques émises concernaient surtout les solutions retenues dans le projet de loi ainsi que les commentaires concernant les articles y relatifs. Il en a été tenu compte dans toute la mesure où elles étaient compatibles avec les objectifs assignés à la nouvelle loi.

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Conception du projet de loi

Le projet de loi répond aux quatre objectifs suivants : - Adapter le droit en vigueur aux conceptions prévalant actuellement sur le plan national et international ; - Créer un cadre juridique pour notre politique à l'égard des étrangers; - Définir le statut juridique de l'étranger selon la durée de la présence en Suisse; - Accorder aux étrangers une protection juridique garantissant leur statut.

En ce qui concerne le statut juridique de l'étranger, le projet de loi se borne, dans le cadre des articles 69ter et 70 de la constitution, à régler sa situation personnelle, familiale et professionnelle, dans la mesure où elle est liée à son admission et à sa présence en Suisse. La nouvelle loi sur les étrangers formera ainsi le noyau du dispositif juridique auquel sont soumis les étrangers, mais n'en constituera qu'une partie. En effet, dans les domaines non réglés par le projet de loi, le droit constitutionnel et la législation suisses s'appliquent en règle générale aussi bien aux étrangers qu'aux Suisses.

En ce qui concerne le problème des naturalisations, il convient de relever que, s'il existe des rapports étroits entre la politique à l'égard des étrangers et la politique en matière de naturalisation, les questions qui se posent dans ces domaines relèvent de bases constitutionnelles différentes et doivent être réglées dans des lois distinctes. Ainsi, de nouvelles possibilités de naturalisation facilitée s'étendant à l'ensemble de la Suisse ne pourront être introduites, comme nous l'avons déjà mentionné, que par une modification de la constitution fédérale.

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Revision du droit en vigueur

Cette revision des dispositions sur l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers consiste d'une part à restituer au Parlement la compétence législative conférée par la loi en vigueur aux pouvoirs exécutifs, dans la mesure 176

où une telle délégation de compétence n'est plus guère soutenable actuellement.

C'est ainsi que des dispositions importantes, qui figurent soit dans le règlement d'exécution du 1er mars 1949 (RS 142.201) de la LSEE (RSEE), soit dans diverses ordonnances d'application du Conseil fédéral (ACF du 10 avril 1946 concernant l'entrée et la déclaration d'arrivée des étrangers, RS 142.211); ACF du 13 mars 1964 concernant la compétence des autorités de police des étrangers, RS 142.202; ACF du 19 janvier 1965 concernant l'assurance d'autorisation de séjour pour prise d'emploi, RS 142.261 ; ordonnance du 14 août 1968 sur l'internement d'étrangers, RS 142.281; ACF du 20 janvier 1971 concernant la déclaration de départ des étrangers, RS 142.212; ordonnance du 25 septembre 1972 sur le registre central des étrangers, RS 142.215), sont intégrées dans le projet de loi. La revision de la LSEE est d'autre part l'occasion de reconsidérer certaines dispositions. L'ACF du 17 mai 1949 concernant la révocabilité des autorisations de séjour accordées aux travailleurs étrangers (RS 142.263) n'est pas retenu, car il s'agit de tenir compte de nouvelles conceptions relatives à la sécurité de l'emploi des travailleurs étrangers. Cette refonte complète du droit actuel aura pour conséquence que onze ordonnances du Conseil fédéral et un certain nombre d'ordonnances du Département fédéral de justice et police seront abrogées lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et de son ordonnance d'application. Il en résultera une simplification appréciable et une mise au net bienvenue du dispositif juridique réglant cette matière.

D'autre part, une attention particulière a été vouée aux divers textes juridiques élaborés au sein des organisations internationales dans le domaine du séjour et de l'établissement des étrangers ainsi que dans celui de leur statut juridique, dans l'idée que notre réglementation doit se rapprocher le plus possible des normes applicables sur le plan international. Il convient de mentionner notamment la convention n° 143 sur les travailleurs migrants, adoptée en 1975 par l'Organisation internationale du travail, non approuvée par la Suisse (FF 1976 HI 440), la Convention européenne des droits de l'homme (1950) (RS 0.707), la Charte sociale européenne (1961), que la Suisse a signée le 6 mai 1976 sous réserve de
ratification, et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant, ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe le 24 novembre 1977.

132

Ordre juridique régissant notre politique à l'égard des étrangers

La motion des Chambres fédérales a fixé principalement pour objectif à la revision de la LSEE la stabilisation, puis la réduction graduelle du nombre des étrangers en Suisse. Elle a donné ainsi son aval à la politique gouvernementale que nous avions définie dans nos messages concernant les initiatives populaires contre l'emprise étrangère déposées au cours des années 1965 à 1974. Cette politique a été mise en oeuvre dans les ordonnances que nous avons édictées successivement depuis 1963 pour limiter le nombre des étrangers exerçant une activité lucrative. Après avoir obtenu la stabilisation de l'effectif de la maind'oeuvre étrangère, nous avons franchi un nouveau pas vers l'objectif que nous nous sommes fixés, à savoir l'établissement d'un rapport équilibré entre le 177

chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante. Le but politique que notre pays vise à atteindre de la sorte doit être fixé dans la loi.

Les autorités executives de la Confédération et des cantons verront de ce fait leurs moyens d'action nettement renforcés. La nouvelle loi donnera aussi un poids supplémentaire aux mesures prises jusqu'ici par le gouvernement, qui ont été adoptées à titre de solutions de rechange en vue de faire face aux interventions politiques ayant notamment revêtu la forme d'initiatives populaires. De larges milieux de la population trouveront, là aussi, un sujet d'apaisement face à l'inquiétude que suscite chez eux le problème de la pénétration étrangère.

Cet objectif d'ordre quantitatif de la politique suivie à l'égard des étrangers a suscité en règle générale un écho favorable lors de la procédure de consultation.

Seuls le Mouvement républicain suisse et l'Action nationale contre la pénétration étrangère ont demandé que l'on donne un contenu numérique à la notion de rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante.

Comme nous l'avons relevé à propos des diverses initiatives contre l'emprise étrangère, le problème des étrangers ne peut être résolu uniquement par une pratique restrictive en matière d'admission. Il importe plutôt de prendre des mesures en vue de faciliter l'intégration dans notre communauté nationale des étrangers qui résident durablement en Suisse avec leurs familles. Il faut en effet partir de l'idée qu'indépendamment de l'évolution du marché du travail, un nombre important d'étrangers demeurera dans notre pays. Les mesures destinées à faciliter leur intégration sociale constituent un volet essentiel de notre politique à l'égard des étrangers, dont il y a lieu de tenir compte dans le projet de loi. Ces mesures vont de pair avec la mise en oeuvre d'une politique visant à instaurer un marché du travail aussi homogène que possible, c'est-à-dire à supprimer autant que faire se peut les barrières existant sur le marché du travail et à atténuer les différences de traitement entre travailleurs suisses et étrangers.

Cela répond à une nécessité tant sur le plan humanitaire et social que pour des raisons d'ordre économique. Du point de vue économique, le traitement différencié
d'un grand nombre de travailleurs provoque des distorsions graves des structures.

On ne saurait toutefois mettre en oeuvre des mesures facilitant l'intégration dans notre communauté nationale de la main-d'oeuvre étrangère résidant de manière permanente ni instaurer un marché du travail aussi homogène que possible sans assurer au marché de l'emploi la souplesse que l'évolution de la situation économique peut exiger selon les circonstances. Il va de soi que chaque pays tend à réserver en premier lieu, mais non de manière exclusive, à la maind'oeuvre indigène les possibilités d'emploi offertes par son marché du travail. Le conflit qui résulte de cet état de choses ne peut trouver une solution que par l'instauration d'un régime dérogatoire. Ce régime ne sera justifié qu'en cas de perturbation du marché du travail ou de grave fléchissement de l'activité économique et ne pourra être institué que par une décision du Conseil fédéral. Il n'affectera que les étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier. Le caractère exceptionnel de ce régime doit marquer le souci de donner un contenu substantiel à la politique d'intégration suivie par notre pays.

178

Cet objectif d'ordre qualitatif que vise notre politique à l'égard des étrangers a été en général bien accueilli lors de la procédure de consultation. Des réserves ont cependant été émises dans certains milieux au sujet de l'institution du régime dérogatoire.

133 133.1

Statut juridique des étrangers Lacunes de la réglementation actuelle

D'étroites relations existent entre l'intégration sociale des étrangers et leur statut juridique. Il importe de combler, sur ce point aussi, un certain vide juridique pour répondre à l'attente de larges milieux de notre population. Les principales questions qui se posent au sujet du statut de l'étranger, notamment en ce qui concerne son droit de présence et son activité professionnelle, n'ont été réglées jusqu'ici que par des ordonnances du Conseil fédéral ou des départements ainsi que dans certains accords avec l'étranger. Plus encore que dans le domaine de la procédure s'appliquant à l'entrée, à la sortie, au séjour et à l'établissement des étrangers, les inconvénients découlant du système légal actuel, qui confère au Conseil fédéral un pouvoir de légiférer très étendu quant à la condition de l'étranger, ont été mis en évidence non sans raison. La loi actuelle ne règle notamment pas les questions suivantes: combien de temps l'étranger doit-il avoir séjourné en Suisse pour avoir droit à l'établissement? Dans quelles conditions est-il autorisé à faire venir sa famille? Dans quelle mesure bénéficie-til de la faculté de se déplacer librement sur le marché du travail? Les conditions dont dépendent la délivrance des autorisations d'établissement et le regroupement familial sont réglées dans des ordonnances départementales ; la mobilité professionnelle l'est dans une ordonnance du Conseil fédéral. Il importe de relever que, dans ce domaine, il faut aussi tenir compte des accords bilatéraux.

L'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142.114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse a créé un statut particulier pour ces étrangers, qui représentent environ la moitié de la main-d'oeuvre étrangère occupée dans notre pays. Ainsi que le note à ce sujet le rapport final du groupe de travail pour la préparation d'une revision totale de la constitution fédérale, «si l'on considère les choses du point de vue de l'égalité juridique, on doit tenir pour peu satisfaisant le fait que les travailleurs étrangers soient traités différemment suivant leur pays d'origine» (rap, cit. p. 731).

Le projet de loi s'efforce de combler ces lacunes en définissant le statut personnel, familial et professionnel de l'étranger, n le fait en partant du principe que les étrangers qui résident
durablement dans notre pays doivent jouir d'une situation juridique facilitant leur intégration progressive dans notre communauté nationale. L'étranger jouira de droits subjectifs consolidant son statut en ce sens qu'il pourra notamment faire valoir, dans certaines conditions, un droit au renouvellement de son autorisation, au regroupement familial ainsi qu'à la mobilité professionnelle (art. 36 à 43). L'aboutissement du processus juridique d'intégration est l'établissement, notion qui remonte au XIXe siècle. La Suisse s'est efforcée, à cette époque, d'améliorer la situation de ses ressortissants à l'étranger en concluant un grand nombre de traités d'établissement et d'amitié offrant des droits correspondants aux nationaux des Etats contractants. Le 179

projet de loi reste fidèle à cette notion traditionnelle d'essence très libérale qui veut que l'étranger établi ait dans une large mesure les mêmes droits et les mêmes devoirs que le citoyen suisse, exception faite des droits politiques et des obligations militaires. En ce qui concerne plus particulièrement le statut familial de l'étranger, le projet de loi tient en outre largement compte des exigences touchant l'égalité de traitement entre l'homme et la femme. Cela se traduira par une amélioration sensible du statut de l'époux étranger d'une Suissesse, des conditions pour le regroupement familial et du statut des membres de la famille.

133.2

Intégration sociale des étrangers

L'intégration des étrangers dans notre communauté nationale, de même que l'accès aux droits qui leur sont reconnus, ne doivent cependant pas être entravés par l'obstacle que constituent souvent pour eux une connaissance insuffisante de nos langues, une formation de base déficiente ou des différences de caractère socio-culturel entre leur pays d'origine et le nôtre. Des raisons d'ordre humain, social et aussi économique commandent de faciliter et de promouvoir l'intégration des étrangers dans leur milieu de travail et dans notre communauté. Un isolement de la population étrangère au sein de la population autochtone ne peut, à Ja longue, qu'être préjudiciable à l'une et à l'autre. L'intégration des étrangers doit être facilitée. Il importe d'offrir des possibilités de formation linguistique et professionnelle et de faire en sorte qu'elles soient utilisées. Les étrangers doivent aussi bénéficier des appuis leur permettant de faire valoir les droits qui leur sont reconnus par notre ordre juridique notamment dans les domaines du droit du travail et de la sécurité sociale. Les enfants et les jeunes gens doivent pouvoir tirer parti des chances de formation et de développement qui correspondent à leurs aptitudes. Les familles doivent aussi pouvoir bénéficier, en sus de logements convenables, d'aide et de conseils, surtout dans les premiers temps de leur installation, en raison de l'obstacle que constitue souvent la méconnaissance de nos langues et de nos habitudes. Ces tâches, qui incombent aux pays d'accueil, ont été notamment mises en lumière par la Recommandation 151 de TOIT concernant les travailleurs migrants adoptée le 24 juin 1975 lors de la 60e session de la Conférence internationale du travail; le chiffre II, lettre C, traite du rôle que les services sociaux des pays d'immigration sont appelés à jouer dans ce domaine et définit leurs tâches qui peuvent être assumées, selon les conditions et pratiques nationales, par des autorités publiques, par des institutions ou des organismes à fins non lucratives reconnus ou, en coopération, par les uns et les autres. La Charte sociale européenne prévoit un droit des travailleurs migrants et de leurs familles à la protection et à l'assistance (art. 19). De même, la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant dispose qu'à leur
arrivée dans l'Etat d'accueil, les travailleurs migrants et les membres de leurs familles recevront toutes les informations et les conseils appropriés, ainsi que toute l'assistance nécessaire, en vue de leur installation et de leur adaptation (art. 10).

Ces problèmes ont été également examinés de manière approfondie par la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers. Le Département fédéral de justice et police a, par une circulaire du 25 février 1974, attiré 180

l'attention des départements de police des cantons sur les mesures que cette commission a proposées pour l'intégration des étrangers et en matière d'information. L'intégration sociale des étrangers ne peut cependant être réalisée qu'en partie par des décisions des autorités. Le problème essentiel, qui a trait aux aspects humains et sociaux, dépasse le cadre de mesures étatiques. La solution de ce problème doit être recherchée avant tout là où Suisses et étrangers sont appelés à cohabiter, c'est-à-dire dans les entreprises, les lieux d'habitation, les sociétés et les communautés religieuses. Elle dépend pour une bonne part de l'initiative et de l'activité d'organisations et d'institutions privées oeuvrant en étroite collaboration avec les autorités compétentes. Une étroite collaboration entre ces organismes ainsi qu'avec les autorités s'est révélée indispensable. Des communautés de travail ou commissions de coordination ont été créées à cet effet dans divers cantons et villes du pays. Actuellement, quatorze d'entre elles exercent leur activité sur le plan cantonal (Lucerne, Schwyz, Zoug, Soleure, Baie-Ville, Baie-Campagne, Schaffhouse, Saint-Gall, Grisons, Argovie, Tessin, Valais, Neuchâtel et Genève), cinq sur le plan régional (Haut-Valais, Rheintal, Rorschach, Sarganserland et mittleres Toggenburg) et neuf au niveau communal (Zurich, Winterthour, Berne, Thoune, Saint-Gall, Lausanne, Zofingue, Uster et Bolligen). A l'exception de celles des localités de Zurich, Winterthour, Thoune, Lausanne et Bolligen et du canton du Tessin, où elles ont le caractère d'institutions de droit public, ces communautés de travail ont été créées sous la forme d'associations de droit privé. Elles sont, en règle générale, reconnues comme organismes d'utilité publique par les autorités, qui leur accordent un appui financier.

L'aide fournie à l'intégration sociale des étrangers par les organisations privées et celle qu'accordent les autorités se complètent mutuellement. Il en est de même des prestations de la Confédération et des cantons. A cet égard, la réglementation par la Confédération du séjour et de l'établissement des étrangers constitue, dans le cadre de la répartition des tâches entre cantons et Confédération, le moyen le plus important dont celle-ci dispose pour faciliter l'intégration sociale des étrangers. C'est
la raison pour laquelle nous avons opté pour une politique à l'égard des étrangers qui vise à accorder à ceux qui séjournent durablement en Suisse, ainsi qu'à leurs familles, une meilleure situation juridique sur le plan personnel, familial et professionnel, de manière à faciliter progressivement leur intégration dans la communauté helvétique (Rapport concernant les Grandes lignes de la politique gouvernementale pendant la législature 1975-1979; FF 19761 480). Cet objectif figure parmi ceux qui sont assignés au projet de loi et est précisé dans la définition du statut juridique de l'étranger.

Sur le plan de là répartition générale des tâches entre la Confédération et les cantons, c'est à ceux-ci qu'il incombe de mettre en oeuvre les mesures spécifiques propres à assurer la protection et l'intégration sociales des étrangers. Dans le domaine social, les cantons assument notamment celles qui ont trait à l'assistance, à la santé et à la culture.

Nous avons renoncé à inclure dans le projet de loi une disposition allouant aux cantons des subventions fédérales en faveur des communautés de travail qui oeuvrent sur leur territoire. Si nous avons été contraints d'adopter cette solution, 13 Feuille fédérale. 130« année. Vol. n

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c'est à cause de la situation des finances fédérales et de la nécessité de procéder à plus ou moins long terme à une redistribution des moyens et des charges financiers entre la Confédération et les cantons. En outre, il n'est pas possible d'envisager un autre mode de financement consistant dans la perception d'impôts par la Confédération, comme la suggestion en a été faite dans la procédure de consultation. En effet, la base constitutionnelle nécessaire fait défaut. Il appartiendrait aux cantons d'étudier et, le cas échéant, d'adopter une solution de ce genre.

En revanche, dans le cadre des possibilités offertes par notre droit, le projet de loi attribue à la Confédération certaines tâches relatives à l'information des étrangers sur les conditions de vie et de travail en Suisse, le statut juridique des étrangers ainsi que sur les données essentielles de notre ordre juridique et social.

Aux fins d'aider les cantons à mettre en oeuvre de manière rationnelle et efficace les mesures qu'il leur appartient de prendre dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales des étrangers, les dispositions prévues chargent le Conseil fédéral d'établir des directives à ce sujet.

133.3

Droits fondamentaux de l'étranger; activité politique de l'étranger

Le projet de loi tient aussi compte des droits fondamentaux de l'étranger, II prévoit qu'en fixant le statut juridique des étrangers, il importe de sauvegarder les droits fondamentaux dont jouissent les étrangers en vertu du droit constitutionnel suisse et du droit international (art. 3).

Le projet de loi règle aussi l'activité politique des étrangers. Les dispositions prévues sont fondées sur le fait que les étrangers jouissent aussi des droits fondamentaux garantis par la constitution, qui sont en relation avec l'activité politique (liberté d'opinion, liberté de presse, liberté d'association et liberté de réunion). Comme le Suisse, l'étranger ne peut exercer ces droits que dans les limites imparties par l'ordre public et la sûreté de l'Etat. Au-delà de ces limites, les étrangers sont soumis à des restrictions de police plus strictes : l'article 70 de la constitution ne laisse aucun doute sur la légitimité de semblables mesures prises dans l'intérêt de la Confédération. La condition dont dépend l'adoption de ces mesures est toutefois qu'elles reposent sur une base légale, qu'elles soient conformes à l'intérêt public et au principe de la proportionnalité; au surplus, elles doivent respecter le principe de l'égalité juridique et ne pas être contraires au droit public international. L'article 16 de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101) reconnaît expressément aux parties contractantes le droit d'imposer des restrictions à l'activité politique des étrangers.

Le droit en vigueur ne règle pas d'une manière générale l'activité politique des étrangers en Suisse. L'article 21, 3e alinéa, RSEE, interdit en principe aux réfugiés d'exercer une telle activité. Le postulat Götsch, déposé le 23 juin 1970, demande que cette interdiction soit assouplie. Le Conseil d'Etat du canton de Zurich est intervenu dans le même sens. La réglementation en vigueur a, de plus, fait l'objet de diverses critiques dans la presse. Pour l'essentiel, les arguments avancés soulignaient que l'interdiction faite aux réfugiés d'exercer une activité politique était en contradiction avec la politique très libérale suivie par la Suisse

182

en matière d'asile et que la réglementation en vigueur établissait une discrimination entre les réfugiés résidant en Suisse et les autres étrangers. Le Département fédéral de justice et police a chargé une commission d'experts d'examiner cette question; cette commission comprenait, en sas de représentants du département, les chefs des départements de police de quatre cantons, un représentant du groupe parlementaire pour les questions relatives aux réfugiés ainsi qu'un représentant de l'Office central suisse d'aide aux réfugiés. Compte tenu des délibérations du Conseil national sur le postulat Götsch et des avis exprimés par les cantons, cette commission a abouti à la conclusion que la disposition de l'article 21, 3e alinéa, RSEE, devait être biffée et que les réfugiés devaient être mis sur un pied d'égalité avec les autres étrangers. Outre la question de l'activité politique des réfugiés, les discussions qui ont eu lieu au sein du Parlement et dans l'opinion publique ont surtout porté, ces dernières années, sur les bases juridiques et l'application de l'arrêté du Conseil fédéral du 24 février 1948 (RS126) concernant les discours politiques d'étrangers. Lors de sa séance du 4 octobre 1972, le Conseil national a rejeté une motion Ziegler invitant le Conseil fédéral à abroger purement et simplement cet arrêté. Dans notre rapport sur cette motion, nous nous sommes réservé la possibilité de déterminer si la question des discours politiques d'étrangers devait ou non être réglée dans une ordonnance ou dans une loi, ou s'il convenait de renoncer purement et simplement à établir une réglementation dans ce domaine. Le Département fédéral de justice et police a procédé, par la suite, à l'examen des bases juridiques, du contenu et de la forme de l'arrêté concernant les discours politiques d'étrangers et a mis à l'étude, dans le cadre de la revision de la LSEE, les autres questions relatives à l'activité politique des étrangers. Le résultat de ces travaux est consigné dans le projet de loi qui vous est soumis .

133.4

Mesures^d'éloignement

Enfin, le principe consacré par le projet de loi selon lequel le statut de l'étranger est consolidé à raison de la durée de sa présence en Suisse, s'applique également sur le plan des mesures d'éloignement dont l'étranger peut faire l'objet. Ainsi, plus la durée de la résidence de l'étranger en Suisse sera longue, plus les motifs pour lesquels l'étranger pourra être tenu de quitter la Suisse ou empêché d'y pénétrer devront être graves. L'étranger résidant en Suisse depuis cinq ans ou plus ne pourra se voir refuser le renouvellement de son autorisation de séjour que s'il existe un motif de révocation de son autorisation (art. 37, 2e al.).

L'autorisation d'établissement ne pourra être refusée à un étranger résidant en Suisse depuis dix ans que s'il y a un motif d'expulsion (art. 38, 1er al.). A l'exception de la restriction d'entrée (art. 13, 2e al,, LSEE), le projet de loi reprend l'ensemble des mesures d'éloignement prévues par la législation actuelle.

La diversification de ces mesures permettra aux autorités de prendre dans chaque cas d'espèce la décision qui s'impose. Ainsi, l'étranger tenu de quitter la Suisse ne devra r>as. dans tous les cas, se voir interdire le retour dans notre pays.

Les expressions «comportement donnant lieu à des plaintes graves» et «étranger indésirable», utilisées dans le droit actuel, ont été abandonnées; jugées trop

183

imprécises et sujettes à des interprétations arbitraires, elles ont été l'objet de nombreuses critiques dans la procédure de consultation. Le projet de loi recourt à la notion d'«ordre public», à laquelle se réfèrent généralement la jurisprudence du Tribunal fédéral ainsi que divers traités internationaux pour la définition et l'application du droit relatif aux mesures d'éloignement. Cette notion, qui est exprimée dans plusieurs articles du projet de loi, se définit en premier lieu par rapport au droit positif. A cet égard, l'étranger contrevient à l'ordre public lorsqu'il commet un crime ou un délit ou lorsqu'il enfreint gravement ou de manière répétée des prescriptions légales ou des décisions prises en application de ces prescriptions. L'ordre public couvre, en outre, les valeurs sur lesquelles se fonde l'ordre juridique; il inclut également la notion de bonnes moeurs contenue dans certains traités internationaux. L'ordre public se distingue toutefois de la sûreté de l'Etat, notion à laquelle le projet de loi se réfère expressément (voir en particulier art. 48, 2e al.). Au demeurant, la notion d'ordre public est une notion essentiellement évolutive; son contenu ne peut par conséquent être fixé de manière exhaustive.

133.5

Résultats de la procédure de consultation

Les dispositions du projet de loi concernant le statut juridique de l'étranger ont été accueillies de manière favorable, toutefois avec un certain nombre de réserves. Divers milieux estiment qu'il faudrait accorder à l'étranger le droit au renouvellement de son autorisation de séjour dès le début de sa présence dans notre pays, arguant du fait qu'une fois admis en Suisse, il ne doit pas être tributaire de la situation du marché du travail et que seules des mesures restrictives touchant l'immigration de nouveaux travailleurs étrangers doivent être appliquées aux fins de protéger la main-d'oeuvre indigène. Pour ce qui a trait aux dispositions relatives à la protection et à l'intégration sociales des étrangers, les cantons admettent les solutions proposées; certains d'entre eux souhaitent toutefois que leurs obligations soient moins étendues. Quant aux partis politiques et aux associations et organisations, leurs opinions divergent sur la question des responsabilités à prendre dans ce domaine; incombe-t-il aux pouvoirs publics ou ä l'initiative privée d'en assumer la plus grande part? En ce qui concerne l'activité politique des étrangers, les avis exprimés sont en général favorables. A la demande de plusieurs cantons, la notion de sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse a été précisée dans le projet de loi. En revanche, on n'a pas jugé nécessaire de retenir la suggestion, faite par certains d'entre eux, de soumettre les étrangers non domiciliés en Suisse qui désirent prendre la parole sur un sujet politique dans une manifestation publique ou privée, à l'obligation de l'annoncer préalablement au département de police du canton. Le projet de loi tient compte également de critiques exprimées au cours de la procédure de consultation quant à l'obligation faite, dans le projet initial, aux membres des associations qui exercent une activité politique et dont il y a lieu d'admettre qu'elles se composent en majorité d'étrangers, de donner des renseignements véridiques sur l'activité de l'association, sur le nombre et l'identité de ses membres ainsi que sur la provenance des fonds dont elle dispose. Selon le projet, cette obligation n'existera que si l'activité de cette association constitue une 184

menace pour la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou que si la sûreté intérieure d'un canton l'exige. La nouvelle rédaction tient également compte de l'objection selon laquelle l'obligation initialement prescrite n'est pas compatible avec la liberté d'association prévue par l'article 56 de la constitution. Des avis émanant de divers milieux ont, à vrai dire, proposé de supprimer cette disposition.

134

Protection juridique des étrangers

Divers milieux demandent que les étrangers jouissent d'une meilleure protection juridique. Celle-ci a été déjà considérablement améliorée par le développement de la juridiction administrative sur le plan fédéral. Depuis la modification du 20 décembre 1968 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (RS 173.110), de nombreuses décisions des autorités administratives peuvent être soumises à l'examen des autorités judiciaires. Le recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral est recevable en particulier contre des décisions cantonales de dernière instance relatives à l'expulsion, à la révocation et au refus d'une autorisation à laquelle un étranger peut prétendre. Cette voie de recours judiciaire trouvera un champ d'application plus large, le projet de loi accordant à l'étranger davantage de droits que la réglementation actuelle (cf. art. 36 à 43).

De surplus, eu égard à l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101), le projet de loi prévoit que, pour l'exécution du renvoi ou de l'expulsion, l'étranger ne pourra être détenu que sur décision d'une autorité judiciaire cantonale (art. 56, 2e al.), et que les décisions relatives à l'internement pourront faire directement l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art. 80, 4e al.).

Enfin, une amélioration notable de la protection juridique des étrangers réside dans le fait que le projet de loi énumère, à l'article 79, un certain nombre de droits garantis à l'étranger à titre d'exigences minimales à satisfaire dans la procédure des autorités cantonales. Ces droits portent sur la consultation du dossier, le droit d'être entendu, la notification par écrit de la décision, sa motivation, et l'indication des voies de recours ainsi que l'effet suspensif du recours.

La réglementation prévue concernant la protection juridique a reçu, dans le cadre de la procédure de consultation, un accueil généralement favorable.

Certains avis ont suggéré, dans l'intérêt d'une protection juridique accrue de l'étranger, que les cantons soient tenus de désigner des instances de recours indépendantes de l'administration. Cette suggestion n'a pas été retenue (cf.

partie spéciale, art. 80).

14

Statut du saisonnier

Le maintien ou l'abolition du statut du saisonnier est certainement la plus controversée des questions auxquelles le projet de loi doit donner une réponse.

Ainsi qu'en témoigne le résultat de la procédure de consultation, les avis émis 185

diffèrent selon qu'on s'attache à considérer en premier lieu les aspects humains et sociaux de la condition du saisonnier, les répercussions de l'abolition de son statut sur notre politique de stabilisation et de réduction de la population étrangère résidante ou les besoins de personnel des branches économiques dont l'activité dépend, pour une large part, de l'emploi de main-d'oeuvre saisonnière.

L'argumentation sur laquelle se fonde l'initiative du canton de Genève (cf.

en. 114) montre que les problèmes particuliers à cette catégorie de travailleurs étrangers présentent des aspects contradictoires qui rendent malaisé le choix d'une solution. Le dépôt de l'initiative du canton de Genève et l'importance que revêt manifestement cette question justifient que celle-ci soit traitée spécialement ici et de manière approfondie.

141

Résultats de la procédure de consultation

Les avis divergents émis lors de la procédure de consultation sont plus ou moins nuancés selon qu'ils émanent des cantons, des partis politiques, des associations professionnelles ou des autres associations ou organisations.

A l'exception du canton de Genève, les cantons sont favorables au maintien du statut du saisonnier. Les avis des partis politiques sont partagés. Le Parti radical-démocratique suisse, l'Union démocratique du centre et le Mouvement républicain suisse se prononcent pour le maintien du statut du saisonnier, alors que le Parti socialiste suisse, l'Alliance des indépendants et le Parti suisse du travail demandent sa suppression. Le Parti démocrate-chrétien suisse donne sa préférence à une suppression de ce statut dans un délai prévisible.

Des divergences de vues apparaissent également dans les avis exprimés par les associations d'employeurs et de travailleurs. Le Directoire de l'Union suisse du commerce et de l'industrie, l'Union centrale des associations patronales suisses et l'Union suisse des paysans sont favorables au maintien du statut du saisonnier. L'Union suisse des arts et métiers propose non seulement de maintenir ce statut, mais d'en étendre le champ d'application. Partant de l'idée que l'activité de certaines entreprises auxquelles la réglementation en vigueur ne permet pas d'attribuer des travailleurs saisonniers n'en continuera pas moins d'être soumise à des variations saisonnières, cette association suggère d'accorder également à ces entreprises de la main-d'oeuvre saisonnière. L'Union syndicale suisse ne se prononce pas expressément sur le maintien ou la suppression du statut du saisonnier. Elle demande que les autorisations saisonnières soient strictement limitées aux emplois effectivement saisonniers, qu'en plus du registre des branches économiques à caractère saisonnier établi par le Département fédéral de l'économie publique, les cantons dressent une liste des entreprises à caractère saisonnier sises sur leur territoire, que le Conseil fédéral fixe un plafond pluriannuel pour la délivrance d'autorisations saisonnières et qu'il déduise du contingent le nombre des transformations prévisibles d'autorisations saisonnières en autorisations de séjour lorsqu'il fixe les contingents annuels pour la délivrance d'autorisations de séjour initiales. Cette association
recommande également de nous donner la faculté de réduire non seulement le nombre d'années consécutives ouvrant le droit à cette transformation, mais également le nombre de mois pendant lesquels le saisonnier doit avoir travaillé en Suisse au 186

cours d'une année. La Fédération des sociétés suisses d'employés et l'Association suisse des salariés évangéliques se prononcent en principe pour le maintien du statut du saisonnier. La Confédération des syndicats chrétiens de Suisse demande sa supression. L'Union suisse des syndicats autonomes est d'avis que les autorisations saisonnières devraient être strictement limitées aux emplois effectivement saisonniers et que leur durée de validité ne devrait pas excéder six mois.

La question du statut du saisonnier divise également les autres associations et organisations. La Fédération des Eglises protestantes de la Suisse et la Conférence suisse des Evêques rejettent catégoriquement l'idée de son maintien. La Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers se prononce dans sa majorité pour une suppression graduelle du statut actuel du saisonnier.

A cet effet, elle propose une réglementation selon laquelle les travailleurs étrangers admis à exercer en Suisse une activité lucrative dont la durée est supérieure à six mois se verraient accorder une autorisation de séjour dans les limites des contingents fixés par la Confédération pour l'admission de maind'oeuvre étrangère. Les étrangers qui exercent une activité lucrative de nature temporaire, occasionnelle ou effectivement saisonnière n'excédant pas six mois au total dans l'espace de douze mois recevraient, quant à eux, une autorisation de séjour limitée à la durée de l'engagement: ces autorisations ne seraient pas comprises dans la statistique de la population étrangère résidante. La commission fédérale pour les questions féminines se prononce également, dans sa majorité, pour la suppression graduelle du statut du saisonnier. L'Alliance des sociétés féminines suisses admet le statut du saisonnier ; elle préconise cependant une réglementation limitant sensiblement le champ d'application de ce statut et garantissant aux travailleurs saisonniers, dans ces limites, une situation satisfaisante sur le plan juridique et sur le plan humain. La plupart des autres associations féminines se prononcent pour une application très limitative du statut du saisonnier ou proposent sa suppression.

142

Le statut du saisonnier dans le projet de loi

Nous sommes de l'avis qu'il importerait de maintenir le statut du saisonnier pour les raisons et aux conditions suivantes.

142.1

Branches économiques à caractère saisonnier

Dès le début de l'immigration en Suisse, la main-d'oeuvre étrangère a compté dans ses rangs des étrangers exécutant des travaux se répétant périodiquement, principalement dans les secteurs de l'agriculture et de la viticulture. Par la suite, ces étrangers trouvèrent également de l'emploi dans le secteur de la construction, dans lequel les travaux ne pouvaient, pour une bonne part, être exécutés que durant des périodes déterminées de l'année. Le recours à la main-d'oeuvre saisonnière a par ailleurs eu de tout temps une importance particulière dans le domaine de l'hôtellerie.

Dans ces branches économiques, l'activité continue de dépendre du rythme des saisons. On s'accorde à le reconnaître pour l'agriculture, la viticulture, l'hôtel187

lerie et, aussi, pour certains secteurs de l'industrie de l'alimentation (conserves).

Les données récentes dont nous disposons sur l'industrie de la construction (cf. diagramme ci-après) montrent que, dans cette branche économique, l'activité reste en partie sujette à d'importantes fluctuations saisonnières.

En effet, en 1977, le nombre des saisonniers du bâtiment est passé, de janvier à avril, de 819 à 17 034, s'est accru d'avril à septembre jusqu'à 37 908, pour décroître ensuite et s'abaisser à 88 à la fin de décembre. Il est vrai, ainsi que le relève l'initiative du canton de Genève, que l'évolution des techniques tend, tout au moins dans les régions urbaines, à étaler sur les douze mois de l'année l'activité dans les chantiers et non plus sur neuf mois. H est toutefois indéniable que les entreprises ne travaillent qu'au ralenti durant les mois de l'hiver où la main-d'oeuvre indigène et les étrangers occupés à l'année suffisent à satisfaire aux besoins. A cet égard, il importe de relever que, sur 70 000 autorisations saisonnières transformées en autorisations à l'année de 1970 à 1977, 52 000 environ concernaient des travailleurs du bâtiment et du génie civil qui, pour la plupart, continuent à travailler dans cette branche économique. Il ne faut cependant pas exclure la possibilité qu'il se produise encore des évolutions qui enlèveront, du moins partiellement, si ce n'est complètement, le caractère Effectif des travailleurs saisonniers occupés dans l'industrie de la construction de janvier à décembre 1977

188

saisonnier que les emplois ont eu jusqu'ici dans l'industrie du bâtiment. Ce genre de mutation s'est déjà produit par le passé dans certains secteurs, par exemple dans les tuileries et les briqueteries ainsi que dans la construction de tunnels. Les ouvriers étrangers occupés dans ces secteurs reçoivent actuellement des autorisations de séjour à l'année au lieu d'autorisations saisonnières.

Aussi longtemps que, dans une branche économique, l'activité continuera à dépendre du rythme des saisons et que les entreprises de cette branche conserveront un caractère saisonnier, il nous paraît justifié de soumettre le travailleur occupant un emploi saisonnier dans ces entreprises au statut du saisonnier, que le projet de loi définit de manière précise.

142.2

Motifs d'ordre politique justifiant le maintien du statut du saisonnier

A ces considérations qui découlent de la nature même de l'activité saisonnière s'en ajoutent d'autres qui parlent aussi en faveur du maintien du statut du saisonnier. Elles procèdent d'exigences d'ordre politique. L'établissement d'un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante est un objectif prioritaire de notre politique à l'égard des étrangers, objectif que la loi devrait permettre d'atteindre en créant les bases juridiques nécessaires. Il est inévitable que l'abolition du statut du saisonnier entraînerait un accroissement du nombre des étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour et remettrait en cause le processus de réduction de la population étrangère résidante qui est en cours. L'initiative du canton de Genève relève avec pertinence à ce sujet qu'il serait impensable que, si le statut du saisonnier était aboli sans que d'autres dispositions soient adoptées, nous puissions comprendre dans notre politique de stabilisation un nombre important de saisonniers, familles non comprises. En outre, l'initiative précise que le peuple suisse a marqué sa volonté de réduire d'une manière adéquate et humaine le nombre des étrangers résidant en Suisse, en rejetant, le 20 octobre 1974, la troisième initiative de l'Action nationale. Même après la forte diminution du nombre des saisonniers enregistrée depuis 1973, les effets qu'aurait la suppression du statut saisonnier sur l'effectif de la population étrangère résidante seraient loin d'être négligeables. En effet, les branches économiques dont l'existence dépend en partie de la main-d'oeuvre saisonnière ne pourraient pas être privées de cette main-d'oeuvre sans substitution d'une main-d'oeuvre bénéficiant d'autorisations initiales de séjour délivrées pour une durée n'excédant pas une année et renouvelables; or il s'agirait là d'une main-d'oeuvre à laquelle son statut donnerait d'emblée la possibilité de se fixer durablement dans notre pays. Si l'on prend pour référence l'effectif enregistré en août 1977, qui était de 67 000 saisonniers, il faudrait prévoir une augmentation correspondante de la population étrangère résidante active à laquelle s'ajouteraient encore plusieurs dizaines de milliers de membres des familles, dès que ces travailleurs pourraient faire valoir un droit au regroupement
familial après un séjour de douze mois en Suisse. Plus de la moitié des saisonniers occupés dans notre pays sont mariés. Bon nombre d'épouses et d'enfants seraient enclins à rejoindre leur mari et père non seulement pour des raisons personnelles et familiales évidentes, 189

mais aussi pour échapper aux difficultés inhérentes à la situation économique de leur pays et tirer parti des possibilités de travail ou de promotion professionnelle que leur offrent notre législation et notre économie. Une suppression graduelle du statut du saisonnier étalée sur plusieurs années, comme le préconisent certains milieux de notre population, ne modifierait nullement les données du problème.

Rééquilibrer notre situation démographique est un processus qui exige des efforts continus. On ne saurait tabler sur la forte diminution de l'effectif des saisonniers enregistrée à la suite de la récession économique, qui touche plus spécialement l'industrie de la construction, pour s'écarter du choix que nous avons fait de maintenir le statut du saisonnier. Dans la perspective d'une solution à long terme, seule concevable dans le cadre d'une oeuvre législative, on ne peut préjuger de l'évolution des besoins qui se feront sentir dans les branches économiques à caractère saisonnier.

142.3

Conditions auxquelles la réglementation actuelle subordonne la délivrance des autorisations saisonnières

Le choix que nous avons fait est lié, toutefois, à de strictes conditions quant à l'utilisation de la notion d'emploi saisonnier. A cet égard, il importe de tirer la leçon des abus qui se sont produits dans le passé.

Aussi longtemps que les travailleurs saisonniers n'étaient employés que dans des branches économiques et des entreprises à caractère saisonnier, l'application du statut du saisonnier n'a donné lieu à aucune difficulté particulière. Or, les progrès techniques ont permis à un nombre toujours plus élevé de saisonniers de travailler en Suisse plus de neuf mois par année. De plus, des autorisations saisonnières ont également été délivrées à des étrangers qui n'occupaient pas un emploi saisonnier dans une branche économique et une entreprise à caractère saisonnier. De nombreux travailleurs étrangers sont ainsi devenus des faux saisonniers. Comme nous l'avons indiqué dans notre rapport du 13 mars 1972 à l'Assemblée fédérale concernant les «Grandes lignes de la politique gouvernementale pendant la législature 1971-1975»(FF 797211064), il n'est pas possible, à la longue, de refuser à des travailleurs étrangers presque constamment occupés en Suisse la possibilité de changer d'emploi, de profession et de domicile, ou d'avoir une vie de famille normale. Nous recommandions en conséquence de transformer progressivement les autorisations saisonnières accordées à des faux saisonniers en autorisations de séjour à l'année et de prendre les mesures propres à empêcher que des situations artificielles se reproduisent.

142.31

Transformation des autorisations saisonnières en autorisations de séjour

Les mesures prises en vue d'assainir le statut du saisonnier ont permis tout d'abord aux saisonniers qui, durant cinq années consécutives, avaient travaillé 45 mois en Suisse, d'obtenir sur demande la transformation de leur autorisation saisonnière en autorisation de séjour à l'année. Depuis 1976, la transformation est accordée après un séjour en Suisse de 36 mois durant quatre années 190

consécutives. De 1970 à 1977, le nombre des transformations d'autorisations saisonnières en autorisations de séjour à l'année s'est élevé, comme cela a été mentionné ci-dessus, à 70 000, en chiffre rond, donc à plus de 8500 par année.

En outre, comme nous l'avons prescrit dans notre arrêté du 6 juillet 1973 limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative (RO 1973 II1098) ainsi que dans les ordonnances subséquentes, seuls les étrangers qui exercent une véritable activité saisonnière dans une entreprise à caractère saisonnier peuvent recevoir une autorisation saisonnière. Simultanément, nous avons décidé que les autorisations saisonnières ne pouvaient être délivrées et prolongées que pour neuf mois au plus, et que le séjour à l'étranger des travailleurs saisonniers devait durer au moins trois mois au total dans le courant d'une année; des exceptions n'ont été consenties qu'en faveur de saisonniers qui ont travaillé comme tels en Suisse chaque année depuis 1972.

142.4

Définition de l'autorisation saisonnière

La nouvelle loi doit parfaire l'oeuvre de mise au net du statut du saisonnier que nous avons entreprise. A cet effet, elle donne de l'autorisation saisonnière la définition suivante: «L'autorisation saisonnière est destinée à l'étranger qui exerce une activité dans une branche de l'économie et dans une entreprise à caractère saisonnier au sein de laquelle il occupe un emploi saisonnier» (art. 17).

Ainsi se trouvent désignées les principales conditions qui doivent être réunies pour l'octroi de l'autorisation saisonnière: comme jusqu'ici, la durée maximale de l'autorisation saisonnière est de neuf mois, compte tenu du fait que cette durée correspond encore aux conditions d'exploitation particulières à notre pays dans les branches économiques à caractère saisonnier, notamment dans l'industrie de la construction, qui connaît toujours une pointe d'activité marquée durant le printemps, l'été et l'automne ainsi que dans l'hôtellerie, où les saisons d'été et d'hiver additionnées s'étendent sur une période allant jusqu'à neuf mois.

142.41

Suppression des dérogations

Dès l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, il ne sera plus possible de maintenir sous le régime de l'autorisation saisonnière des saisonniers qui, en vertu de la réglementation actuelle, sont admis à travailler plus de neuf mois dans notre pays, s'ils y sont venus régulièrement à cet effet chaque année depuis 1972.

En 1977, leur nombre se montait à 5700 en chiffre rond. Ils seront mis d'office au bénéfice d'une autorisation de séjour et auront la possibilité de se faire rejoindre sans délai par les membres de leurs familles.

142.42

Prévention des abus

Le projet de loi prévoit aussi les garanties qui permettront d'empêcher que les abus commis dans le passé ne se reproduisent. Il contient une disposition prescrivant que le Département fédéral de l'économie publique établit la liste des branches économiques à caractère saisonnier et que les cantons établissent 191

de leur côté, en vertu d'instructions de ce département, celle des entreprises à caractère saisonnier sises sur leur territoire. Enfin, il habilite l'Office fédéral des étrangers à faire déterminer en tout temps, de concert avec l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail, si une entreprise a un caractère saisonnier. Les dispositions susmentionnées tiennent compte de l'exigence de la motion Canonica demandant d'interdire graduellement l'emploi de saisonniers étrangers en dehors des branches de l'économie qui ont un caractère purement saisonnier.

143

Exigences posées par l'initiative du canton de Genève

L'initiative du canton de Genève demande que des améliorations soient apportées en ce qui concerne les conditions d'emploi, la vie familiale, les conditions de logement et la sécurité sociale des étrangers occupés dans des emplois saisonniers. Ces demandes méritent attention.

143.1

Amélioration des conditions d'emploi

Pour ce qui est des conditions d'emploi, il faut relever que la mobilité professionnelle du saisonnier a déjà été considérablement améliorée dans la réglementation actuelle. Celui qui n'a pas conclu un contrat de travail pour plusieurs saisons a le droit de changer d'employeur chaque saison. De plus, il peut être autorisé à changer de place durant la saison dans la mesure où cela est compatible avec ses obligations contractuelles envers son employeur et avec les dispositions du droit suisse relatif au contrat de travail. En outre, il peut être autorisé à changer d'activité professionnelle salariée durant la saison lorsque des raisons personnelles paraissent devoir l'empêcher de poursuivre celle qu'il a exercée jusqu'alors. Les possibilités que le saisonnier a ainsi de se déplacer sur le marché du travail et qui lui sont reconnues depuis plusieurs années dans les limites des ordonnances du Conseil fédéral limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative feront, selon le projet de loi, partie intégrante du statut juridique du saisonnier (art. 43). Sur ce point aussi, le projet tient compte des exigences de la motion Canonica, qui demande que les saisonniers étrangers soient autorisés à changer d'emploi dans les limites de la branche et du canton, à moins qu'un contrat de durée déterminée n'ait été conclu conformément à l'article 335, 1er alinéa, CO.

143.2

Amélioration des conditions familiales

Le caractère temporaire de la présence en Suisse du travailleur saisonnier constitue effectivement un obstacle à l'organisation d'une vie familiale normale. Une première contrainte réside dans le fait qu'il lui est difficile, sinon matériellement impossible, d'avoir, au cours de la même année, une résidence pour sa famille dans deux pays différents. A cela s'ajoutent les difficultés quasi insurmontables d'assurer dans ces conditions la scolarisation des enfants de manière rationnelle.

Enfin, l'absence d'une infrastructure sociale adéquate s'oppose également à l'installation de la famille pendant la durée de la saison. Il en résulte que des 192

aspirations humaines et sociales bien compréhensibles s'en trouvent contrariées.

Cet état de choses appelle sans doute un correctif. En vertu de l'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142,114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse, le saisonnier acquérait, sur demande, le droit d'obtenir la transformation de son autorisation en une autorisation de séjour à l'année lorsqu'il a séjourné régulièrement pendant 45 mois en Suisse durant cinq années consécutives pour y travailler. Depuis le 1er janvier 1976, ces laps de temps ont été ramenés respectivement à 36 mois et quatre ans. L'application de ces dispositions de l'accord conclu avec l'Italie a été étendue de manière autonome aux saisonniers d'autres nationalités. Le projet de loi franchit un pas de plus. Il consacre tout d'abord le droit de tout saisonnier qui en fera la demande d'obtenir la transformation de son autorisation, s'il a travaillé en Suisse pendant 35 mois durant quatre années consécutives. Ensuite, il autorise le Conseil fédéral à réduire le nombre de mois et d'années ouvrant le droit à la transformation, lorsque l'établissement d'un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante n'en est pas affecté (art. 36). Le Conseil fédéral peut ainsi restreindre dans toute la mesure du possible l'application aux travailleurs étrangers du régime du travail saisonnier. La faculté donnée à l'étranger de choisir son statut dans les limites précitées a une grande signification sur le plan humain et social puisque, par la transformation de son permis, l'intéressé acquerra immédiatement le droit de se faire rejoindre par sa famille (art. 41, 3e al.) et obtiendra, en règle générale, l'autorisation d'exercer n'importe quelle activité salariée (art. 43, 2e et 3e al.).

143.3

Amélioration des conditions de logement

Quant aux conditions de logement des saisonniers, c'est un problème qui a suscité de nombreuses critiques, souvent légitimes. Ainsi que le relève l'initiative du canton de Genève, un effort appréciable a été fait dans ce domaine. Il appartient avant tout aux autorités cantonales et communales de prendre les mesures qui s'imposent. Le rôle des organisations d'employeurs et de travailleurs est souvent décisif en ce qui concerne l'amélioration des conditions de logement des saisonniers. Les employeurs assument une responsabilité primordiale à cet égard. Le projet de loi apporte, pour sa part, une contribution importante à la solution de ce problème, en subordonnant la délivrance des autorisations saisonnières à la preuve que le logement mis à leur disposition est convenable (art. 35). L'ordonnance d'exécution précisera que les logements collectifs doivent répondre non seulement aux exigences de la police des constructions, de la police du feu et de la police sanitaire, mais encore aux exigences locales en matière de surface habitable et d'aménagement des dortoirs, des lieux de séjour, des infirmeries, des cuisines, des buanderies et des installations sanitaires.

143.4

Amélioration de la sécurité sociale

Dans le domaine de la sécurité sociale, il y a lieu de relever que la Suisse a conclu avec dix-huit Etats des accords sur la sécurité sociale. Aux termes de ces accords, 193

les étrangers bénéficient dans ce domaine d'une situation juridique qui les place, autant que faire se peut, sur un pied d'égalité avec les Suisses. Cela vaut également pour les saisonniers, qui ne se recrutent pratiquement que dans ces Etats. Comme leurs compatriotes en possession d'une autorisation de séjour à l'année ou d'établissement, qui ont cotisé à l'AVS, les saisonniers peuvent, lorsqu'ils ont atteint l'âge requis, prétendre une rente ordinaire de vieillesse, pour autant qu'ils remplissent les conditions générales posées en l'occurrence; de même, en cas de décès, leurs survivants ont droit à une rente ordinaire de veuve et d'orphelins. Pour pouvoir prétendre une rente ordinaire d'invalidité et des mesures de réadaptation, le requérant doit cependant être assuré au moment où se produit l'invalidité. Quelques accords internationaux exigent en outre que l'assuré soit domicilié en Suisse pour pouvoir bénéficier de ces mesures. Les accords et les accords complémentaires les plus récents prévoient cependant que les travailleurs contraints de cesser leur activité dans notre pays par suite d'accident ou de maladie continuent d'être considérés comme assurés aussi longtemps qu'ils restent en Suisse. Pour leur part, les ordonnances prises par le Conseil fédéral en vue de limiter le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative excluent des mesures de limitation les étrangers devenus invalides en Suisse lorsque la continuation de l'activité qu'ils ont exercée jusqu'alors n'est plus possible ou ne peut être exigée d'eux. Ces réglementations profitent en premier lieu aux travailleurs saisonniers qui, après avoir obtenu une autorisation de séjour à l'année, fondent généralement dans un tel cas, un domicile au sens du droit civil en Suisse. Ils peuvent ainsi remplir les conditions nécessaires à l'acquisition du droit aux prestations lorsque l'exigence du domicile en Suisse est posée. Pour des raisons pratiques, les étrangers devenus invalides ne peuvent cependant bénéficier des mesures de rééducation et de réadaptation professionnelles qu'à l'intérieur du pays. Il s'agit là, au demeurant, d'une condition que prévoient toutes les législations étrangères. De même, les dispositions des accords internationaux et les prescriptions internes selon lesquelles les étrangers ne peuvent bénéficier de
prestations non contributives (par exemple les rentes extraordinaires de l'AVS et de l'Ai et les prestations complémentaires) que s'ils ont séjourné en Suisse durant une période déterminée et s'ils y ont leur domicile pendant qu'ils touchent ces prestations, correspondent aux restrictions imposées dans ce domaine par les autres Etats.

En ce qui concerne Fassurance-accidents obligatoire, les travailleurs étrangers, y compris les saisonniers, sont placés sur pied d'égalité avec les Suisses, non seulement en vertu de la convention internationale du 5 juin 1925 (RS 0.832.27) concernant l'égalité de traitement des travailleurs étrangers et nationaux en matière de réparation des accidents de travail, à laquelle la Suisse a adhéré le 18 janvier 1929, mais aussi en vertu des accords bilatéraux de sécurité sociale susmentionnés, qui couvrent également l'assurance en cas d'accidents non professionnels.

Dans le domaine de Fassurance-maladie, l'employeur est tenu, en vertu de nombreux accords de sécurité sociale, de faire en sorte que le travailleur étranger soit assuré pour les prestations couvrant les frais médicaux et pharmaceutiques au sens de la LAMA.

Selon la loi fédérale du 20 juin 1952 (RS 836.1) fixant le régime des allocations 194

familiales aux travailleurs agricoles et aux petits paysans, les travailleurs saisonniers bénéficient des allocations pour enfants également lorsque leurs enfants résident à l'étranger. Les allocations de ménage, adaptées aux conditions de vie en Suisse, ne peuvent, quant à elles, être versées qu'aux travailleurs agricoles qui résident en Suisse avec leurs familles, compte tenu de leurs modalités et de leur but spécifiques (enrayer l'exode rural en offrant la possibilité aux personnes travaillant dans ce secteur de fonder leur propre ménage). Les allocations pour enfants que peuvent prétendre, en vertu des lois cantonales, les travailleurs qui ne sont pas occupés dans le secteur agricole, sont également versées pour les enfants résidant à l'étranger.

Enfin, dans le domaine de Fassurance-chômage, le régime transitoire entré en vigueur le 1er avril 1977 a pratiquement mis les saisonniers sur un pied d'égalité avec les autres travailleurs. Leur situation a été ainsi considérablement améliorée. En effet, avant l'entrée en vigueur de ce régime, les saisonniers n'étaient pas aptes à être assurés, du fait qu'ils n'ont pas de domicile en Suisse. Actuellement, ils ont droit, en principe, aux mêmes prestations que les autres travailleurs assurés aussi longtemps qu'ils se trouvent en Suisse et que leur autorisation saisonnière n'est pas échue. Ils ne reçoivent plus d'indemnités après leur départ, car ils ne sont plus disponibles sur le marché du travail suisse, et, de ce fait, non aptes au placement; de plus l'exportation de prestations n'est pas possible. Cela vaut également pour les travailleurs étrangers occupés à l'année et même pour les Suisses qui quittent notre pays. En ce qui concerne le droit aux indemnités, les jours de travail effectués au cours de la saison précédente sont pris en compte. Ainsi, seuls les saisonniers qui effectuent leur première saison en Suisse ou qui y reviennent sans y avoir travaillé, la ou les saisons précédentes, ne sont pas couverts par Fassurance-chômage tant qu'ils ne peuvent justifier d'une activité salariée de 150 jours. Les travailleurs étrangers occupés à l'année sont soumis à la même restriction durant la première année de séjour. Il est rare que les saisonniers ne puissent faire valoir un droit aux indemnités pour la raison qu'ils n'ont travaillé en Suisse que trop peu de temps.

144

Conclusions

En conclusion, les dispositions dont il est fait mention ci-dessus amélioreront la condition du saisonnier sur le plan humain et social. Elles tiennent compte de manière non négligeable des griefs faits à son statut actuel. Les problèmes particuliers aux saisonniers sur les plans de l'emploi, de la vie familiale, du logement et de la sécurité sociale sont toutefois inhérents à l'exercice d'une activité limitée dans le temps. La disparité la plus manifeste dans le traitement des saisonniers par rapport aux travailleurs occupés dans des emplois à l'année est que le saisonnier ne peut se faire rejoindre par sa famille.

Ce problème se pose avec acuité au saisonnier faisant régulièrement, année après année, un séjour de neuf mois ou de près de neuf mois. Le droit à la transformation de son autorisation saisonnière en autorisation de séjour aux conditions prévues à l'article 36 du projet de loi, apportera le correctif désiré.

Cette transformation lui permettra au surplus de changer d'activité salariée et, ainsi, d'orienter son activité professionnelle vers des emplois plus stables ou

195

mieux adaptés à son mode de vie. Le nombre des transformations restera dans le cadre fixé par notre politique d'équilibrage de notre situation démographique.

L'amélioration du statut du saisonnier, telle qu'elle est envisagée par le projet de loi, répondra ainsi dans une large mesure aux préoccupations qui sont à l'origine de l'initiative du canton de Genève.

2 201

Partie spéciale: Commentaire du projet de loi Dispositions générales (art. 1 à 3)

Article premier But et objet La constitution attribue à la Confédération la compétence de légiférer sur l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers. Elle fixe ainsi l'objet du projet de loi. Dans le cadre de cette compétence législative, le législateur détermine à l'article 1er les objectifs fondamentaux de notre politique à l'égard des étrangers que doivent viser les autorités executives, tant sur le plan quantitatif que qualitativement. Ces objectifs se trouvent largement concrétisés dans les dispositions du projet de loi réglant divers points particuliers. La disposition relative à la sauvegarde des droits fondamentaux (art. 3) est étroitement liée à un objectif d'ordre qualitatif.

En ce qui concerne plus spécialement l'aspect quantitatif de la nouvelle réglementation, le cadre juridique qui doit permettre de réaliser un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante est tracé par les articles 31 à 35. Les données essentielles d'ordre politique, économique et culturel ainsi que les besoins de la science et de la recherche qui conditionnent les mesures permettant d'atteindre ce but étant soumis à une constante évolution, il n'est pas possible de déterminer a l'avance et une fois pour toutes quel est le niveau auquel il est souhaitable de réaliser l'équilibre recherché, ni quelles sont les mesures adaptées aux circonstances qu'il faut prendre pour y parvenir. Ainsi que le relève le rapport de 1964 de la commission chargée de l'étude du problème de la main-d'oeuvre étrangère, il n'est pas possible d'exprimer en chiffres exacts l'intensité de la pénétration étrangère, ni de déterminer, au moyen de critères précis, la limite à partir de laquelle il y a, à proprement parler, perte de caractères nationaux; cette impossibilité existe même sur le plan purement démographique. L'appréciation du danger d'altération des caractères nationaux est sujette à l'évolution des conceptions politiques et culturelles et se modifie au gré des fluctuations de la conjoncture économique (rap. cit. p. 145). Les mesures que le Conseil fédéral sera amené à prendre selon le projet de loi feront l'objet d'ordonnances émises périodiquement et adaptées aux circonstances à l'instar de ce qui se fait actuellement. Il indiquera dans les Grandes lignes
de la politique gouvernementale (art. 45bls LREC) les buts à atteindre à court et moyen termes en matière de politique à l'égard des étrangers et rendra compte de leur réalisation à la fin de chaque législature (art. 45ter LRJEC). Il serait donc superflu d'insérer dans la loi, comme la proposition en a été faite lors de la procédure de consultation, une disposition obligeant le Conseil fédéral à présenter au Parlement des rapports indiquant dans quelle mesure les objectifs définis à l'article 1er ont été atteints.

196

Article 2 Champ d'application Les réfugiés ne seront soumis à la nouvelle loi sur les étrangers que dans la mesure où les dispositions de la nouvelle loi sur l'asile (FF 7977 lu 113) ne leur seront pas applicables en tant que droit particulier. Les dispositions de la convention du 28 juillet 1951 (RS 0.142.30) relative au statut des réfugiés et celles de la convention du 28 septembre 1954 (RS 0.142.40) relative au statut des apatrides, qui font partie du droit fédéral, sont en outre réservées.

Article 3 Sauvegarde des droits fondamentaux L'article 3 rappelle les droits fondamentaux dont jouissent les étrangers en vertu du droit constitutionnel suisse et du droit international; il marque l'importance qu'il convient de leur accorder pour légiférer et appliquer le droit dans les domaines couverts par le projet de loi. Il s'agit avant tout d'assurer aux étrangers la pleine protection de l'article 4 de la constitution et des droits qui en sont dérivés. Quant au droit international, il convient de relever que plusieurs traités internationaux auxquels notre pays est partie, tels les traités d'établissement, d'amitié et de commerce, prévoient l'égalité de traitement entre nationaux et étrangers pour certains droits fondamentaux spécifiés. De plus, la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101) garantit un certain nombre de droits fondamentaux sans égard à la nationalité.

202

Entrée et sortie (art. 4 à 10)

Article 4 Pièces de légitimation et visas Sous l'empire de la législation actuelle, le Département fédéral de justice et police est compétent pour conclure des accords internationaux sur la suppression de l'obligation du passeport ou du visa dans le mouvement des personnes.

Conformément aux règles qui prévalent actuellement pour des motifs d'ordre constitutionnel, cette compétence est attribuée au Conseil fédéral dans le projet de loi. 11 est cependant prévu que le Conseil fédéral sera autorisé à conclure ces accords de son propre chef. Il en est de même en ce qui concerne le petit trafic frontalier (art. 9) et la prise en charge de personnes à la frontière (art. 58). Il s'agit d'engagements internationaux portant sur des questions de procédure relatives à l'entrée et à la sortie des étrangers, qui doivent pouvoir être conclus sans l'approbation du Parlement, comme c'est le cas actuellement.

Article 5 Assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour La législation actuelle ne fait obligation aux étrangers d'obtenir une assurance d'autorisation de séjour que s'ils entrent en Suisse pour y prendre un emploi. Le projet de loi prévoit que l'étranger qui entrera en Suisse pour y prendre résidence ou y fréquenter une école ainsi que pour y exercer une activité lucrative aura besoin de cette assurance dans la mesure où il devra se procurer l'autorisation nécessaire. Pour l'étranger soumis à l'obligation du visa, le visa tient lieu d'assurance. Cette nouvelle disposition renforcera le contrôle à l'entrée dans notre pays. Elle va de pair avec la limitation de l'admission qu'imposé la nécessité d'équilibrer notre situation démographique.

14 Feuille fédérale. 130« année. Vol. H

197

Article 6 Contrôle à la frontière Le 2e alinéa détermine dans quels cas les organes de contrôle à la frontière peuvent, de leur propre chef, refuser l'entrée à des étrangers et dans quels cas la décision des autorités fédérales est requise à cet effet. Pour les refus fondés sur des raisons de sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse, la compétence appartiendra respectivement au Ministère public de la Confédération (art. 65) et, pour le refus d'entrée pour des raisons d'ordre public, à l'Office fédéral des étrangers (art. 63). Quant au refus pour des motifs de santé publique, il relève de la compétence du service fédéral de l'hygiène publique, en particulier de son service sanitaire de frontière (art. 7 de la loi du 18 décembre 1970 sur les épidémies, RS 818.101 ; art. 2 OCF du 17juin 1974 sur le service sanitaire de frontière, RS 818.125.1).

Article 7 Organes chargés du contrôle à la frontière Actuellement, le contrôle des passeports à tous les points de passage routiers et en partie aux débarcadères et sur les lignes de chemin de fer secondaires servant au trafic local est exclusivement l'affaire des agents de la douane. Le corps de gardes-frontière assume la surveillance de la frontière en dehors des postes ouverts au grand trafic. Les polices cantonales assurent le contrôle des personnes dans les gares internationales et dans nos trois aéroports internationaux.

Sous le régime actuel, le contrôle des personnes par les agents de la douane se fonde sur l'article 59 de la loi fédérale sur les douanes du 1er octobre 1925 « (RS 631.0). Ce contrôle ne s'effectuant plus à titre accessoire seulement dans le cadre du contrôle douanier, cette disposition ne suffit plus à fonder légalement le rôle important actuellement dévolu aux agents de la douane dans le domaine du contrôle des personnes. L'article 7 du projet de loi remédie à cet état de choses.

Tout en respectant le principe voulant que le contrôle des personnes à la frontière est assuré par les cantons frontière, U prévoit que le Conseil fédéral pourra charger l'administration des douanes de tâches relatives au contrôle des personnes à la frontière si le service de garde-frontière et le service de douane le permettent (2e al.).

Article 8 Points de passage Les exceptions visées par le 2e alinéa concernent spécialement le passage de la frontière
en haute montagne.

Article 9 Petit trafic frontalier L'entrée et la sortie des étrangers dans le petit trafic frontalier sont essentiellement réglées par la voie d'accords internationaux. Nous avons conclu dans ce domaine avec la France l'accord du 1er août 1946 relatif à la circulation *>. Lorsque les agents de la douane sont tenus de prêter leur concours à l'exécution de prescriptions fiscales ou de police ou d'autres prescriptions fédérales étrangères aux douanes, ils agissent conformément aux dispositions en vigueur, pour le compte et aux frais de l'administration intéressée.

198

frontalière, l'accord du 24 octobre 1947 relatif à l'octroi de laissez-passer et l'accord du 15 avril 1958 relatif aux travailleurs frontaliers, avec la République fédérale d'Allemagne l'accord du 21 mai 1970 concernant le mouvement des personnes dans le petit trafic frontalier et, avec l'Autriche, l'accord du 13 juin 1973 concernant le mouvement des personnes dans le petit trafic frontalier (tous non publiés). La réglementation du petit trafic frontalier entre la Suisse et l'Italie n'a fait l'objet jusqu'ici que d'arrangements entre autorités des régions frontière.

Article 10 Documents de voyage pour étrangers sans papiers et apatrides Conformément à la convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (RS 0.142.30) et à la convention du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides (RS 0.142.40), les réfugiés et les apatrides reconnus comme tels par la Suisse ont droit à la délivrance d'un document de voyage. Il est opportun de prévoir également ce droit pour les autres étrangers sans pièce de légitimation nationale valable et les apatrides, s'ils sont au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Les étrangers sans papiers et les apatrides qui n'appartiennent pas aux catégories susmentionnées ne bénéficieront pas, en revanche, de ce droit, en raison du caractère encore précaire de leur présence dans notre pays.

203 203.1

Séjour, établissement et réglementation applicable aux frontaliers Régime de l'autorisation et procédure d'autorisation

(art. 11 à 15) Article 11 Principe Le projet de loi s'en tient au principe de la LSEE selon lequel la présence en Suisse de l'étranger est soumise à un régime d'autorisation. Toutefois, comme jusqu'ici, ce régime ne sera pas imposé à l'étranger dès le premier jour. Celui-ci aura le droit de résider en Suisse sans autorisation jusqu'au moment où il sera tenu de déclarer son arrivée s'il est entré légalement dans notre pays; cette déclaration ouvrira la procédure d'autorisation. L'ordonnance d'exécution précisera qu'il conserve ce droit jusqu'à ce que l'autorité statue sur sa demande d'autorisation. Le renvoi est réservé lorsque, par sa présence, l'étranger compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton, ou que sa présence constitue une menace pour l'ordre public (art. 52, 2e al.).

Le régime de l'autorisation est applicable sous réserve des dispositions des traités internationaux auxquels la Suisse est partie (3e al.). Ce sont notamment les conventions de Vienne du 18 avril 1961 (RS Q.191.0Ï) sur les relations diplomatiques, du 24 avril 1963 (RS 0.191.02) sur les relations consulaires et du 8 décembre 1969 (FF 1976 III 309) sur les missions spéciales, ainsi que les accords de siège passés avec l'Organisation des Nations Unies, les institutions spécialisées des Nations Unies et d'autres organisations internationales (RS 0.191.12).

199

Article 12 Déclaration d'arrivée En vertu du droit actuel, l'étranger est tenu de déclarer son arrivée avant de prendre un emploi. Selon le projet de loi, l'étranger qui entre en Suisse en vue d'y exercer une activité lucrative devra être, en règle générale, au bénéfice d'une assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour. Rien ne s'oppose, dans ces conditions, à ce que le délai dans lequel il devra déclarer son arrivée soit porté à huit jours. L'ordonnance d'exécution devra prévoir qu'il pourra commencer à travailler immédiatement après son arrivée en Suisse, Cette réglementation ne sera toutefois pas applicable à l'étranger désireux d'exercer en Suisse une activité lucrative d'une durée inférieure à huit jours dans l'espace de trois mois. Il sera tenu de déclarer son arrivée avant de commencer à travailler.

Cette exigence permet d'éviter qu'un employeur puisse occuper des étrangers pour ladite période de huit jours non soumise à autorisation, ce qui ne serait pas compatible avec les mesures prises à l'égard des travailleurs clandestins.

Le 4e alinéa donne au Conseil fédéral la possibilité de prolonger, dans certains cas, les délais prévus pour la déclaration d'arrivée par les 2e et 3e alinéas. Nous ferons usage de cette possibilité en portant à trois mois le délai pour la déclaration d'arrivée en faveur de certaines catégories d'étrangers exerçant une activité lucrative (journalistes, correspondants de journaux, périodiques et agences de presse et d'information ayant leur siège à l'étranger; voyageurs de commerce en gros pour le compte d'une maison établie à l'étranger; exposants ou collaborateurs d'exposants à une foire ou une exposition de caractère international, national ou régional) à condition qu'ils n'établissent pas leur résidence en Suisse et qu'ils n'y exercent qu'une activité lucrative temporaire.

L'ordonnance d'exécution prévoira aussi que l'étranger qui se rend en Suisse pour affaires devra déclarer son arrivée dans les huit jours, quelle que soit la durée de son séjour.

Le 5e alinéa habilite d'une manière générale le Conseil fédéral à réduire les délais pour la déclaration d'arrivée de tous les étrangers ou de certaines catégories d'entre eux lorsque des circonstances spéciales, c'est-à-dire de graves tensions politiques sur le plan international l'exigent.
Article 13 Obligation de produire une pièce de légitimation Selon le droit en vigueur, les cantons pouvaient demander le dépôt d'une pièce de légitimation après la délivrance d'une autorisation. Le projet de loi renonce à cette réglementation. Afin de ne pas entraver les déplacements à l'étranger, il a fallu, au cours des années, admettre pratiquement pour les étrangers de toutes les nationalités que des documents autres que la pièce de légitimation nationale soient reconnus valables pour le dépôt des papiers auprès des autorités. L'ordonnance d'exécution précisera que, pour fixer la durée de l'autorisation de séjour et la date à laquelle le permis d'établissement sera soumis à un nouveau contrôle, l'autorité doit tenir compte de la durée de validité de la pièce de légitimation. Le registre central des étrangers permet, pour sa part, de contrôler de manière continue l'échéance des livrets pour étranger. Il s'ensuit que le dépôt d'une pièce de légitimation garantissant que l'étranger peut entrer dans l'Etat qui l'a délivrée ne s'impose plus. Il s'agit là d'une simplification administrative et d'un allégement des obligations imposées à l'étranger.

200

Article 14 Obligation de renseigner Le 2e alinéa crée pour les autorités cantonales une obligation de renseigner s'appliquant aux relations entre les autorités à l'intérieur d'un canton et de canton à canton. L'obligation qu'ont les autorités cantonales de renseigner les autorités fédérales est réglée par l'article 265, 1er alinéa, de la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale (RS 312.0).

Article 15 Procédure relative à l'autorisation pour frontalier La procédure de délivrance d'autorisations aux travailleurs frontaliers, réglée jusqu'ici par les cantons, a donné de bons résultats. Le projet de loi s'en tient à la situation actuelle, comme l'ont demandé plusieurs gouvernements cantonaux lors de la procédure de consultation.

203.2

Autorisations (art. 16 à 20)

Article 16 Genres d'autorisations et livret pour étranger Selon la réglementation actuelle, l'autorisation saisonnière est un type particulier d'autorisation de séjour. Quant à l'autorisation pour frontalier, il n'en est fait mention ni dans la loi actuelle ni dans son règlement d'exécution ; elle a été définie pour la première fois dans une ordonnance édictée par le Conseil fédéral en 1973. En raison du nombre important d'étrangers soumis au statut du saisonnier et au statut du frontalier, l'article 16 fait de ces deux autorisations des autorisations sui generis.

Le projet de loi renonce au régime de la tolérance, qui n'était que rarement accordée jusqu'ici. Selon le projet, une autorisation de séjour peut être accordée aux étrangers qui, précédemment, n'ont bénéficié que de la tolérance; l'autorisation de séjour doit être adaptée aux circonstances du cas. La suppression de la tolérance est approuvée par les cantons.

Le droit en vigueur prévoit qu'à la différence de l'autorisation d'établissement, l'autorisation de séjour peut être conditionnelle (art. 5 et 6 LSEE). Le législateur n'entendait pas, par là, se référer en premier lieu à des clauses accessoires de l'autorisation établies sous forme de conditions, mais à certains éléments du contenu principal de celle-ci (p. ex. autorisation limitée à l'exercice d'une activité professionnelle déterminée auprès d'un employeur déterminé). La pratique n'a pas toujours distingué clairement entre le contenu principal d'une autorisation, d'une part, les conditions et les charges auxquelles cette autorisation peut être soumise sous forme de clauses accessoires d'autre part, A cet égard, le projet de loi permet à la fois de clarifier et de simplifier la situation. En définissant les différents genres d'autorisations, il règle dans son principe leur contenu, tant en ce qui concerne le droit de présence que l'activité lucrative. Ce contenu sera concrétisé dans les ordonnances d'exécution et les décisions prises dans les cas particuliers par les autorités. On renonce par ailleurs à la possibilité d'assortir l'autorisation de conditions, posées sous forme de clauses accessoires, dont l'accomplissement entraîne son extinction (conditions résolutoires). Le recours à cette possibilité ne répond pas, dans la pratique, à un besoin car la durée de validité des autorisations saisonnières, des autorisa201

lions de séjour et des autorisations pour frontalier pourra être limitée selon les circonstances. Le projet de loi prévoit en revanche la possibilité d'assortir ces autorisations de charges. La notion de charge ne se substituera toutefois pas à celle de «condition» au sens où l'entend la LSEE. La charge est une obligation imposée à l'étranger par l'autorisation, qui se situe en dehors du contenu principal de celle-ci (p. ex. l'obligation de rembourser des dettes). Il conviendra de faire un usage adéquat de la possibilité de fixer des charges. Celles-ci devront être conformes au but de la loi et satisfaire au principe de la proportionnalité.

L'autorisation pourra être révoquée si la charge qui lui est attachée n'est pas remplie (art. 51, 2e al., let. c, et 3e al., let. d).

Article 17 Autorisation saisonnière Nous nous abstenons de donner ici un commentaire de l'article 17, étant donné que nous avons traité de manière approfondie la question du statut du saisonnier sous chiffre 14.

Article 18 Autorisation de séjour Le projet de loi précise les cas dans lesquels l'autorisation de séjour trouve application. Elle est définie comme l'autorisation destinée à l'étranger qui séjourne temporairement en Suisse ou à celui qui, désirant y établir sa résidence, n'est pas encore admis à y séjourner durablement. Le cas échéant, elle règle l'exercice d'une activité lucrative. Elle aura la fonction d'autorisation ordinaire par rapport, d'une part, à l'autorisation d'établissement, destinée à l'étranger admis à s'établir à demeure en Suisse et, d'autre part, par rapport aux autorisations spécifiques que sont l'autorisation saisonnière et l'autorisation pour frontalier.

A l'instar du droit en vigueur, le projet de loi donne aux autorités cantonales compétentes la faculté de demander à l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour, qui n'a pas de pièce de légitimation nationale reconnue et valable, de déposer des sûretés en garantie de prétentions de droit public. Les réfugiés et les apatrides reconnus comme tels par la Suisse ne sont pas soumis à cette obligation, étant donné qu'en vertu de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (RS 0.142.30) et de la Convention du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides (RS 0.142.40), ces étrangers jouissent du même traitement que les
nationaux, notamment en matière d'assistance et de secours publics. La plupart des cantons sont favorables au maintien de cette réglementation, bien que les cas dans lesquels ils ont eu recours à cette faculté aient été plutôt rares dans un passé récent. Dans ces cas, il s'agit avant tout de réfractaires et de déserteurs ainsi que d'étrangers sans papiers qui ne remplissent par les conditions requises pour bénéficier de l'asile. La garantie est destinée surtout à couvrir des frais d'assistance ainsi qu'à permettre le recouvrement d'impôts, de taxes ou de frais pour les prestations de services publics.

Article 19 Autorisation d'établissement Le projet de loi s'en tient à la réglementation actuelle selon laquelle l'autorisation d'établissement est destinée à l'étranger admis à s'établir à demeure en 202

Suisse. Comme jusqu'ici, l'étranger en possession d'une autorisation d'établissement ne sera soumis, quant à son activité lucrative, à aucune restriction décidée en vertu de la réglementation sur les étrangers. Il pourra exercer sans formalités la profession de son choix, salariée ou indépendante, passer d'une activité salariée à une activité indépendante et vice-versa, changer de place ou de profession, exception faite seulement des professions légalement réservées aux nationaux.

A la différence de la LSEE (art. 6, 2e al.), le projet de loi renonce à envisager la possibilité d'exiger un dépôt de garantie des étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement, qui n'ont pas de pièce de légitimation nationale reconnue et valable. Une disposition de cette nature se concilierait mal avec le statut dont jouissent ces étrangers et avec le fait que, selon le projet de loi, les étrangers qui résident en Suisse depuis dix ans ou plus ne peuvent être rapatriés (art. 57).

Article 20 Autorisation pour frontalier Selon le droit actuel, l'autorisation pour frontalier a essentiellement le caractère d'une autorisation de travail, bien qu'elle soit le plus souvent délivrée par les autorités de police des étrangers. Cela a l'inconvénient de laisser dans l'ombre des problèmes qui relèvent spécifiquement de la police des étrangers, tels que la caducité et la révocation de l'autorisation. On a remédié jusqu'ici à cet état de choses en appliquant par analogie aux frontaliers les dispositions touchant les autres catégories d'étrangers. Pour ces motifs aussi, la création d'une autorisation pour frontalier en tant qu'autorisation autonome s'impose. Quant à son champ d'application à raison du lieu, il sera déterminé par les dispositions de nos accords avec les Etats voisins.

Nous reprendrons, dans l'ordonnance d'exécution, la disposition actuelle aux termes de laquelle seul l'étranger qui réside depuis six mois au moins dans la zone frontalière du pays voisin peut être mis au bénéfice d'une autorisation pour frontalier.

203.3

Activité lucrative et rôle du service public de l'emploi (art. 21 à 26)

Article 21 Activité lucrative Le droit du bénéficiaire d'une autorisation de séjour à exercer une activité lucrative est réglé dans cette autorisation, notre législation ne connaissant pas d'autorisation de travail. Quant à l'autorisation saisonnière et à l'autorisation pour frontalier, elles sont, par définition, destinées à un travailleur et règlent l'exercice de l'activité lucrative. L'employeur est également rendu responsable de l'observation des limites imparties à l'activité lucrative définie dans les autorisations de séjour, les autorisations saisonnières et les autorisations pour frontalier. Il ne pourra occuper un étranger non titulaire d'une autorisation d'établissement que si celui-ci possède l'autorisation nécessaire. Il s'agit ainsi de prévenir les abus auxquels sont exposés les travailleurs étrangers qui sont engagés avec l'assurance que tout a été ou sera réglé et qui encourent ainsi, souvent de bonne foi, le risque de se trouver dans une situation illégale. Cette réglementation 203

ne s'applique pas au bénéficiaire d'une autorisation d'établissement, dès lors qu'il n'est soumis, quant à son activité lucrative, à aucune restriction prise en vertu de la réglementation sur les étrangers.

Selon l'ordonnance d'exécution, l'expression activité lucrative désignera aussi bien l'activité au service d'un employeur résidant en Suisse ou à l'étranger que toute autre activité qui a normalement un but lucratif.

Article 22 Changement de place et de profession L'article 22 fixe le principe que l'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation pour frontalier ne peut changer de place ou de profession durant la validité de son autorisation qu'avec l'autorisation de l'office cantonal des étrangers. L'ordonnance d'exécution fera une exception à ce principe en faveur de l'étranger salarié qui, après la première année de séjour ou de travail en qualité de frontalier, veut exercer dans l'entreprise où il est occupé une activité d'une autre nature que celle que prévoit son autorisation. Il en sera de même pour le saisonnier pendant la saison.

Article 23 Activité lucrative accessoire L'article 23 dérive d'un principe qui va de pair avec celui qui exige que l'activité lucrative soit soumise à un régime spécial d'autorisation tant que l'étranger n'est pas en possession d'une autorisation d'établissement. Cette exigence ne sera pas posée pour l'exercice à titre accessoire d'une activité salariée occasionnelle.

L'article 321a, 3e alinéa, COl), constitue dans ces cas une garantie contre les abus.

Article 24 Décision préalable du service public de l'emploi Selon la réglementation actuelle, la police cantonale des étrangers doit, en règle générale, demander l'avis de l'office du travail avant d'autoriser un étranger à prendre un emploi (art. 7, 2e al., RSEE). Elle se conformera à cet avis et aux propositions qu'il contient si des considérations autres qu'économiques ne justifient pas une décision différente (art. 7, 4e al., RSEE). Quant à l'attribution des unités des contingents mis à disposition des cantons par les ordonnances du Conseil fédéral limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative, les offices cantonaux du travail en décident, au besoin, avec la collaboration de commissions d'experts (art. 6,1er al., OCF du 20
octobre 1976, modifiée le 19 octobre 1977 (RS 823.21; RO 7977II1873) limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative). Cette compétence appartient à l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail pour l'attribution d'unités des contingents dont la gestion est confiée à la Confédération.

Les offices des étrangers et les autorités dont relève le service de l'emploi assument des tâches complémentaires quant à l'admission et au règlement du droit de présence des étrangers qui exercent une activité lucrative. Les autorités dont relève le service de l'emploi ont à se prononcer sur les questions touchant le i> Pendant la durée du contrat, le travailleur ne doit pas accomplir du travail rémunéré pour un tiers dans la mesure où il lèse son devoir de fidélité et, notamment, fait concurrence à l'employeur.

204

marché du travail et la situation économique. Depuis la dernière revision de la LSEE, en 1948, ces questions ont pris une importance considérable. Il y a lieu de rappeler les effets que l'admission d'un nombre extraordinairement élevé de travailleurs étrangers a eus sur la structure de certaines branches économiques et entreprises, le problème de la création d'un marché du travail aussi homogène que possible, le développement inégal de l'économie suivant les régions et les branches économiques, ainsi que les conséquences qu'a eues sur le plan du marché du travail et dans le domaine social, la récession économique de ces dernières années, qui a causé un fléchissement du degré de l'emploi et du chômage.

L'attribution au niveau de la loi d'un pouvoir de décision propre aux autorités dont relève le service de l'emploi répond à l'évolution qui s'est poursuivie depuis 1948. D'une part, il s'agit de créer une base légale précise pour la compétence qu'elles ont déjà de statuer sur l'attribution d'unités des contingents. D'autre part, il importe aussi, pour les raisons exposées ci-dessus, de ne pas limiter désormais aux exigences du contingentement leur pouvoir de décision en matière d'admission de nouveaux travailleurs étrangers. C'est pour répondre à ces préoccupations que l'on institue une décision préalable du service public de l'emploi pour l'engagement d'un étranger, pour l'exécution de travaux ou la prestation de services en Suisse par le personnel étranger d'une maison établie à l'étranger et pour l'exercice d'une activité lucrative indépendante. L'ordonnance d'exécution prévoira comme exception fondée sur l'article 24, 3e alinéa, la dispense de la décision préalable: - pour l'engagement d'étrangers qui ont d'étroites attaches avec la Suisse, comme l'époux étranger d'une Suissesse; - pour l'engagement des réfugiés et des apatrides reconnus comme tels par la Suisse; - pour des étrangers auxquels une autorisation doit être délivrée au titre de la réciprocité ou pour des raisons humanitaires ; - pour des étrangers dont la présence en Suisse ne dépend pas de la situation économique ou de la situation du marché du travail; cette dispense sera notamment accordée pour l'engagement d'étrangers qui, ayant achevé leur formation universitaire, exercent une activité d'enseignement ou de recherche auprès des
hautes écoles ou des institutions scientifiques auxquelles s'applique la loi fédérale du 28 juin 1968 sur l'aide aux universités (RS 414.20); - pour les étrangers qui désirent revenir en Suisse après avoir été envoyés provisoirement à l'étranger par leur employeur ou ont accompli leur service militaire obligatoire.

Le service public de l'emploi pourra faire dépendre sa décision de l'existence de conditions (2e al.). Il pourra prendre en considération certaines exigences du marché du travail, par exemple le maintien par l'employeur de postes de travail à domicile au profit de la main-d'oeuvre disponible sur le marché indigène du travail.

Sur le plan administratif, la décision préalable du service public de l'emploi sera une décision distincte, susceptible de recours, mais attachée à la décision ultérieure concernant l'autorisation destinée à l'étranger. Elle liera l'office des étrangers, à moins que des considérations autres que celles qui ont trait à la 205

Situation économique ou au marché du travail ne justifient une décision différente.

Afin de simplifier la procédure d'autorisation et d'éviter les doubles emplois dans le cadre de la procédure de recours, le projet de loi laisse enfin aux cantons le soin de régler la procédure relative à la décision préalable (6e al.). Cette solution est approuvée par les cantons.

Article 25 Avis du service public de l'emploi II n'est pas indiqué de conférer un pouvoir de décision propre au service public de l'emploi dans les cas énumérés au 1er alinéa, lettres a à d. Grâce à la consolidation de son statut juridique selon la durée de sa présence, l'étranger échappera progressivement aux critères sélectifs qu'imposé l'application du principe de la priorité de l'emploi de la main-d'oeuvre appartenant au marché indigène du travail. Ce n'est que jusqu'à l'accomplissement de la cinquième année de séjour ou de travail en qualité de frontalier que la situation de l'étranger reste dominée par les exigences de l'économie et du marché du travail, outre celles qui ont trait à son aptitude professionnelle et à son comportement. Il suffit que le service de l'emploi donne son avis.

L'étranger au bénéfice d'une autorisation d'établissement et l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour qui peuvent faire valoir un droit à la modification ou au renouvellement de leur autorisation échappent à cette réglementation. Suivant la situation du marché du travail, le Département fédéral de l'économie publique pourra, en outre, prescrire que l'avis du service public de l'emploi n'est pas nécessaire, non plus, dans d'autres cas.

L'office des étrangers s'en tiendra à l'avis du service public de l'emploi, à moins que des considérations autres que celles qui ont trait à la situation économique ou au marché du travail ne justifient une décision différente. Tout recours éventuel sera dirigé contre la décision de l'office des étrangers. Cette solution ne s'écarte pas de la réglementation actuelle et a l'appui des cantons.

Article 26 Contrat de travail L'article 26 généralise l'obligation de produire le contrat de travail lors de la demande d'autorisation initiale. Jusqu'ici, la production d'un contrat de travail a été exigée pour l'engagement de travailleurs originaires de pays éloignés et, en vertu de l'accord entre la Suisse et
l'Espagne du 2 mars 1961 (RS 0.142.113.328) sur l'engagement de travailleurs espagnols en vue de leur emploi en Suisse, pour l'engagement de travailleurs espagnols. La nouvelle disposition est destinée à procurer une assistance sociale et juridique à des personnes qui ont besoin d'être protégées à cause de leur ignorance très fréquente de nos conditions de vie et de travail ainsi que de nos langues nationales. En même temps qu'il leur donnera une sécurité juridique pour leur premier emploi dans notre pays, le contrat sera une source précieuse d'informations, car il contiendra, outre les éléments contractuels usuels, des renseignements sur les droits et obligations essentiels de l'étranger en matière de droit du travail et de sécurité sociale. L'ordonnance d'exécution précisera quelles indications le contrat de travail doit contenir et 206

prescrira que les formules de contrat doivent être rédigées tant dans une des langues officielles que dans une langue que l'étranger peut comprendre.

Relevons au surplus que la convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant prévoit également l'obligation de produire un contrat de travail.

Lorsque les objectifs auxquels répond la production d'un contrat de travail peuvent être atteints par une voie différente ou que les conditions de rémunération et de travail ne sont pas déterminantes pour la délivrance de l'autorisation, l'employeur ou le travailleur sera dispensé de produire un contrat de travail. L'ordonnance d'exécution réglera ces exceptions.

203.4

Validité des autorisations à raison du territoire (art. 27 à 29)

Article 27 Principe Comme jusqu'ici, toutes les autorisations ne seront valables que pour le canton qui les a délivrées ; leur validité s'étend à l'ensemble du territoire de ce canton.

Lors de la procédure de consultation, diverses propositions d'étendre à l'ensemble du territoire suisse la validité de l'autorisation d'établissement ont été faites. Une disposition de cette nature ne serait toutefois pas compatible avec la structure federative de notre pays. En prévoyant que les étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement qui transfèrent leur domicile dans un autre canton auront droit à une nouvelle autorisation d'établissement lorsqu'aucun motif d'expulsion ne s'y oppose (art. 38, 4e al.), le projet de loi accorde à ces étrangers le droit de choisir librement leur résidence sur l'ensemble du territoire suisse.

Article 28 Séjour temporaire et activité lucrative dans un autre canton La validité des autorisations étant limitée au territoire du canton qui les a délivrées, l'étranger qui séjourne temporairement ou qui exerce une activité lucrative dans un autre canton sans y établir sa résidence aura besoin de l'assentiment préalable de ce canton. Cette réglementation est identique à celle de la loi actuelle (art. 8, 2e al., LSEE).

Comme c'est le cas actuellement, l'assentiment ne sera toutefois requis que si le séjour ou l'activité dans un autre canton excède une certaine durée. L'ordonnance d'exécution précisera les cas dans lesquels l'étranger est dispensé de se procurer l'assentiment. Cette dispense s'appliquera aux étrangers titulaires d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement qui séjournent dans un autre canton, pendant des périodes ne dépassant pas trois mois, sans y exercer d'activité lucrative, à condition que la durée globale de leur séjour n'excède pas six mois en tout dans l'espace de douze mois. Il en sera de même pour les étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour ou d'établissement qui fréquentent une école dans un autre canton ou y suivent une cure, lorsque leur séjour n'excède pas six mois dans l'espace de douze mois.

Le délai dans lequel les étrangers au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de 207

séjour ou pour frontalier n'auront pas besoin de l'assentiment pour exercer une activité lucrative dans un autre canton sera porté de huit jours à trois mois lorsque ces étrangers travaillent au service du même employeur. La situation des étrangers occupés dans des entreprises dont l'activité s'étend à plusieurs cantons s'en trouvera notablement simplifiée. Les étrangers qui ne sont pas au bénéfice d'une autorisation d'établissement devront en revanche, comme jusqu'ici, obtenir l'assentiment avant de commencer ä travailler lorsqu'ils prendront un nouvel emploi dans un autre canton. Le titulaire d'une autorisation d'établissement n'aura, pour sa part, pas besoin de l'assentiment pour exercer dans un autre canton une activité lucrative salariée ou indépendante, lorsque cette activité n'excède pas six mois en tout dans l'espace de douze mois. Il en sera dispensé, sans égard à la durée de son activité, s'il regagne quotidiennement son domicile.

Article 29 Changement de canton L'étranger qui veut transférer sa résidence dans un autre canton devra obtenir préalablement une nouvelle autorisation dans ce canton. Quant à l'étranger qui séjourne dans un autre canton pour y fréquenter une école, y recevoir une formation ou y suivre une cure, il ne sera pas réputé y avoir transféré sa résidence; il devra dès lors, au besoin, se procurer l'assentiment selon l'article 28. Cette réglementation permettra d'éliminer les inconvénients auxquels l'étranger se heurte actuellement en matière de naturalisation, en raison des exigences imposées en matière de domicile par les cantons et les communes; il doit en effet, même s'il ne réside que temporairement dans un autre canton, y demander une nouvelle autorisation.

204 204.1

Statut juridique Principe régissant la délivrance et le renouvellement des autorisations (art. 30)

Selon l'article 30, l'autorité statue sur la délivrance et le renouvellement des autorisations dans les limites de la constitution et de la législation ainsi que des traités internationaux auxquels la Suisse est partie. A la différence du droit actuel (art. 4 LSEE), le pouvoir d'appréciation de l'autorité est restreint par le fait que le projet de loi règle lui-même de nombreuses questions relatives au statut juridique de l'étranger.

Lorsque la nouvelle loi continue à. accorder à l'autorité la faculté de faire usage de ce pouvoir, elle en fixe les limites ou indique les critères à respecter (cf. art. 31 et 36), Cette compétence est toutefois subordonnée à l'obligation de respecter les principes constitutionnels (art. 3).

204.2

Admission (art. 31 à 35)

Article 31 Critères s'appliquant à l'admission L'article 31 concrétise l'un des objectifs essentiels que vise le projet de loi, à savoir créer les bases juridiques permettant d'obtenir un rapport équilibré entre 208

le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante. A cet effet, il fixe les critères généraux de notre politique d'admission. Comme nous l'avons déjà mentionné à propos de l'article 1er, la nouvelle réglementation ne saurait avoir recours à des solutions figées dont s'accommoderait mal, à plus ou moins long terme, l'évolution des données politiques, économiques et culturelles jouant un rôle déterminant pour notre politique à l'égard des étrangers, cette évolution échappant pour une bonne part aux prévisions. Il en irait de même pour l'évolution des données relatives aux besoins de la science et de la recherche ayant .une grande importance en l'occurrence. Il s'ensuit que les critères retenus devront être pondérés dans la pratique de manière à réaliser une relation aussi harmonieuse et équilibrée que possible entre les divers intérêts en jeu qui, parfois, peuvent être contradictoires. Il n'en reste pas moins que cet encadrement juridique de la politique suivie par notre pays en matière d'admission assurera à l'avenir plus de continuité dans la mise en oeuvre des composantes essentielles de cette politique, tout en laissant une marge de souplesse suffisante. Sur le plan économique, cela permettra d'atténuer les distorsions affectant le développement structurel de notre économie de même que l'ampleur des fluctuations conjoncturelles. Il convient de relever aussi que l'article 31 aura une grande importance pour l'application du droit dans les cas particuliers.

Les exigences d'ordre politique comprennent aussi bien celles de notre politique extérieure que celles de notre politique intérieure. Dans ce dernier domaine, il s'agit notamment de prendre en considération les intérêts régionaux et les besoins particuliers de certains cantons.

Le critère de la capacité d'accueil du pays se réfère à la notion de surpopulation étrangère1) ou plus précisément d'excès de population étrangère dont se sert la législation actuelle ou à celle de pénétration étrangère utilisée plus communément à l'heure actuelle. Les formes que celle-ci peut revêtir ont trait en premier lieu aux aspects démographiques mais aussi à la pénétration dans l'économie et sur les plans culturel et spirituel. Ces différentes formes de pénétration ont été mises en lumière par le large débat auquel ont donné lieu
les initiatives populaires contre l'emprise étrangère (cf. ch. 112).

Quant au critère relatif à la situation économique et à la situation du marché du travail, il se réfère à la fonction qui est déjà celle de la LSEE et qui consiste à faire de la législation sur les étrangers un moyen de régulariser le marché du travail pour lutter, le cas échéant, contre le chômage ou pour prévenir une demande excessive de main-d'oeuvre étrangère.

Pour ce qui est des besoins de l'enseignement, de la science et de la recherche, il n'est guère contestable que des échanges avec l'étranger libres de toute entrave sont de la plus haute importance pour la Suisse. Nombre de savants étrangers contribuent largement au bon renom dont jouissent notre enseignement supérieur et notre recherche sur le plan mondial. Les hautes écoles et les instituts de recherche suisses sont tributaires de la possibilité de s'attacher les services des spécialistes les plus éminents, sans égard à leur nationalité. En raison des *> Au sujet de la notion de surpopulation étrangère, cf. le rapport de 1964 de la commission chargée de l'étude du problème de la main-d'oeuvre étrangère (p. 135 s.), 209

moyens limités dont elle dispose, la Suisse n'est pas ou n'est que partiellement en mesure de former certains spécialistes, de telle sorte qu'elle doit avoir recours à des étrangers ou à des Suisses spécialement formés à l'étranger. Si nous voulons que notre personnel scientifique et nos enseignants puissent travailler temporairement à l'étranger pour approfondir leurs connaissances, nous devons offrir des possibilités semblables dans notre pays aux spécialistes d'autres Etats. Il s'agit en l'occurrence d'accueillir un nombre restreint d'étrangers, qui n'accomplissent souvent que des séjours de courte durée en Suisse; il s'ensuit que la prise en considération des besoins existant dans ce domaine ne saurait nous empêcher d'atteindre les autres objectifs visés par notre politique à l'égard des étrangers.

L'aptitude des étrangers à s'intégrer à notre ordre social et économique entre en ligne de compte comme autre critère d'admission, eu égard à la politique d'intégration que nous pratiquons envers les étrangers dont la présence dans notre pays a un caractère durable.

Enfin, les attaches personnelles et familiales de l'étranger avec la Suisse sont appelées à jouer un rôle important. Il s'agit là d'un facteur humain et social qui doit nécessairement être pris en considération dans la définition de la politique que suit notre pays en matière d'admission.

Article 32 Mesures limitatives Le Conseil fédéral reçoit le mandat impératif de prendre les mesures propres à réaliser un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante. Il peut fixer des contingents pour l'admission de travailleurs étrangers. Pour ce qui a trait à la main-d'oeuvre étrangère occupée à l'année, ces contingents seront déterminés d'après l'ensemble des facteurs qui conditionnent la réalisation de l'équilibre de notre situation démographique.

Les saisonniers seront soumis à des mesures de contingentement lorsque leur droit à la transformation de leur autorisation en autorisation de séjour est de nature à affecter cet équilibre, compte tenu du nombre de ceux qui pourraient en bénéficier sous un régime de recrutement illimité. Enfin, la faculté est aussi donnée au Conseil fédéral de décréter des mesures de contingentement à l'égard des frontaliers, si leur admission en nombre illimité
devait perturber gravement les structures économiques et sociales dans les régions frontière (voir a ce sujet l'étude d'un groupe de travail de la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers, de juin 1976, intitulée «Les conséquences économiques à court, moyen et long terme de la politique du Conseil fédéral à l'égard des étrangers», p. 27 et 28).

Quant au mode de répartition de ces contingents entre les cantons et la Confédération et aux modalités de leur attribution et de leur gestion, ils sont calqués sur ceux qui sont en vigueur et qui ont donné de bons résultats (OCF du 20 octobre 1976, modifiée le 19 octobre 1977 (RS 823,21; RO 7977 n 1873) limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative).

Article 33 Priorité accordée à la main-d'oeuvre disponible sur le marché indigène du travail En matière d'admission d'étrangers exerçant une activité lucrative, les besoins 210

de l'économie devront être appréciés en relation avec les intérêts généraux du pays. L'application du principe donnant la priorité à la main-d'oeuvre disponible sur le marché indigène du travail, en d'autres termes l'obligation faite aux autorités d'épuiser les ressources de main-d'oeuvre de ce marché avant d'autoriser le recrutement de nouveaux travailleurs étrangers, jouera un rôle important dans l'ensemble des mesures permettant de réaliser un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante.

Dans les cas qui devront être soumis au service public de l'emploi, l'employeur devra prouver qu'aucun ressortissant suisse ou qu'aucun étranger admis à travailler en Suisse - qu'il soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou d'une autre autorisation - n'est disposé et apte à occuper la place offerte aux conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession (1er al.)Le régime exceptionnel prévu au 2e alinéa vise avant tout à satisfaire les besoins de la formation professionnelle ainsi que ceux de l'enseignement et de la recherche.

Article 34 Conditions de rémunération et de travail Cet article consacre le principe de l'égalité absolue de traitement des travailleurs étrangers et des travailleurs du pays en ce qui concerne les conditions de rémunération et de travail. Ce principe, reconnu sans exception en Suisse comme à l'étranger, doit empêcher que l'on porte préjudice aux intérêts de la main-d'oeuvre du pays et que la paix sociale soit ainsi troublée. Il fait l'objet de dispositions expresses dans plusieurs de nos accords bilatéraux: le traité de travail entre la Suisse et la France du 1er août 1946 (RS 0.142.113.494), l'accord entre la Suisse et l'Espagne du 2 mars 1961 (RS 0.142.113.328) sur l'engagement de travailleurs espagnols en vue de leur emploi en Suisse et l'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142.114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse. Ce principe est aussi affirmé dans plusieurs conventions multilatérales, notamment la Charte sociale européenne et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant.

Article 35 Logement Le problème du logement des travailleurs étrangers a toujours été la source de graves tensions sociales
et leurs conditions de logement ont fait l'objet de critiques légitimes. L'article 35, qui subordonne la délivrance d'une autorisation à la preuve que le logement de l'étranger ou de sa famille est convenable, peut contribuer pour une large part à résoudre ce problème (cf. ch. 143.3). Le logement devra aussi être effectivement disponible sur le marché du logement. A cet égard, l'autorité devra tenir compte des droits reconnus aux locataires par l'article 267 CO. Les offices cantonaux des étrangers auront donc à prendre, de concert avec les autorités locales, les dispositions nécessaires pour s'assurer que les conditions de logement auxquelles est soumise la délivrance des autorisations sont remplies.

211

204.3

Droit de présence (art. 36 à 40)

Article 36 Transformation de l'autorisation saisonnière en autorisation de séjour Nous vous renvoyons au chiffre 14 consacré à l'examen de cette question.

Article 37 Renouvellement de l'autorisation de séjour L'article 37 se fonde sur le fait qu'il existe d'étroites relations entre le statut juridique de l'étranger et son intégration dans notre ordre social et économique.

Le statut juridique de l'étranger dépend en général de la durée de sa présence en Suisse (cf. ch. 133). Jusqu'à cinq ans de séjour, la situation du travailleur étranger restera en particulier dominée par les exigences de l'économie et du marché du travail, à côté de celles qui ont trait à son aptitude professionnelle et à son comportement (1er al.). L'ordonnance d'exécution prescrira que l'autorisation de séjour accordée à un étranger exerçant une activité lucrative et résidant en Suisse depuis moins de cinq ans ne sera renouvelée que si aucun ressortissant suisse, aucun étranger bénéficiant d'une autorisation d'établissement ou aucun étranger bénéficiant d'une autorisation de séjour depuis cinq ans ou plus n'est disposé et apte à occuper la place offerte aux conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession. Toutefois, la situation du marché du travail ne sera pas prise en considération lors du renouvellement de l'autorisation de séjour pour les étrangers suivants: - les réfugiés ou les apatrides reconnus comme tels par la Suisse; - les étrangers devenus invalides en Suisse dans la mesure où la continuation de l'activité qu'ils ont exercée jusqu'alors n'est plus possible ou ne peut être exigée d'eux; - les étrangers qui, ayant achevé leur formation universitaire, exercent une activité d'enseignement ou de recherche auprès des hautes écoles ou des institutions scientifiques auxquelles s'applique le loi fédérale du 28 juin 1968 (RS 414,20) sur l'aide aux universités; - les étrangers qui ont obtenu une autorisation pour des raisons humanitaires.

Après un séjour ininterrompu de cinq ans, la situation de l'étranger dont la présence n'a pas, par nature, un caractère temporaire, s'améliorera sensiblement puisqu'il acquerra un droit au renouvellement de son autorisation de séjour lorsqu'aucun motif de révocation ne s'y oppose. Le Conseil fédéral pourra cependant restreindre ce droit en cas de grave
fléchissement de l'activité affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques. Il s'agira de mesures de caractère exceptionnel dictées par des circonstances, elles aussi, exceptionnelles (cf. ch. 132).

Le régime dont bénéficie ainsi l'étranger en possession d'une autorisation de séjour dont la présence n'a pas, par nature, un caractère temporaire, s'inspire de la décision du Conseil de l'OECE du 30 octobre 1953/7 décembre 1956 régissant l'emploi des ressortissants des pays membres (non publiée; cf. ch. 112). Aux termes de cette décision, les ressortissants des pays membres peuvent compter, après cinq ans de présence en Suisse, pouvoir y séjourner à demeure, même si ce n'est pas forcément dans la profession qu'ils préféreraient exercer. Ce régime tient compte aussi de la réglementation similaire prévue par l'article 11 de l'ac212

cord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142,114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse.

Le renouvellement des autorisations de séjour accordées aux étrangers dont la présence en Suisse a un caractère temporaire dépendra de leur comportement et, s'ils exercent une activité lucrative, des exigences de la situation économique ou de la situation du marché du travail, quelle que soit la durée de leur présence en Suisse. Ces étrangers devront quitter notre pays lorsque le but de leur séjour devra être considéré comme atteint, à moins que l'autorité compétente n'en décide autrement dans des cas particuliers. Une telle décision pourra, par exemple, entrer en considération à l'égard d'un étranger ayant achevé ses études et ayant l'intention d'exercer une activité dans le domaine de l'enseignement, de la science et de la recherche (4e al.).

Le 5e alinéa se réfère au principe de l'égalité de traitement des travailleurs étrangers et des travailleurs du pays, principe qui ne souffre pas d'exceptions.

Article 38 Droit à l'autorisation d'établissement L'article 38 fixe la durée du séjour à l'expiration de laquelle l'étranger peut prétendre l'établissement, qui est le dernier degré de son statut juridique. Elle n'était fixée jusqu'ici que pour les ressortissants de certains Etats avec lesquels notre pays a conclu des accords en matière de séjour et d'établissement. Dans les autres cas, c'est la pratique qui a été déterminante. Actuellement, 90 pour cent des étrangers reçoivent une autorisation d'établisssement après un séjour régulier et ininterrompu de dix ans et les autres après un séjour de cinq ans effectué dans les mêmes conditions. On a toujours admis jusqu'ici qu'après dix ans de séjour, les étrangers peuvent être considérés comme étant durablement installés dans notre pays. Il apparaît d'autant moins opportun de s'écarter de ce principe que l'étranger ayant accompli un séjour de cinq ans ou plus bénéficie déjà d'un statut consolidé.

Le Département fédéral de justice et police pourra réduire ou supprimer le délai de dix ans requis pour la délivrance d'une autorisation d'établissement en faveur d'étrangers ayant des attaches particulières avec la Suisse, notamment en raison de liens de parenté ou de séjours antérieurs, ou lorsque des considérations de réciprocité,
d'intérêt national ou d'ordre humanitaire le justifient. La pratique actuelle, selon laquelle les professeurs d'université obtiennent l'autorisation d'établissement dès le début de leur séjour en Suisse, sera maintenue dans les ordonnances d'exécution du département. De même, on reprendra la disposition de l'article 10, 1er alinéa, RSEE, aux termes de laquelle l'étranger qui a précédemment obtenu une autorisation d'établissement pendant plusieurs années et qui a gardé, malgré une absence, d'étroites attaches avec la Suisse peut être mis au bénéfice de l'établissement sans avoir obtenu au préalable une autorisation de séjour. Au demeurant, il sera toujours possible de conclure avec des Etats étrangers des accords dérogeant à la règle générale lorsque des considérations de réciprocité le justifieront.

Pour tes étrangers ayant épousé une Suissesse, le séjour passé en communauté conjugale en Suisse compte actuellement double lorsque le délai leur permettant de parvenir normalement à l'établissement est de dix ans. Selon le projet de loi, 15 Feuille fédérale, 130" année. Vol. Il

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l'époux étranger et les enfants mineurs étrangers d'une Suissesse seront mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement quelle que soit la durée de leur résidence en Suisse. Cette disposition tient compte du principe de l'égalité de traitement entre l'homme et la femme. L'octroi sans délai du permis d'établissement à l'époux étranger d'une Suissesse peut aussi être considéré, dans une certaine mesure, comme le pendant de l'acquisition automatique de la nationalité suisse par l'étrangère qui épouse un Suisse. Enfin, selon la réglementation actuelle, les étrangers qui ont épousé une Suissesse ainsi que les enfants étrangers d'un Suisse ou d'une Suissesse ne sont pas soumis aux mesures de limitation pour l'exercice d'une activité lucrative (art. 2, let. a, OCF du 20 octobre 1976, modifiée le 19 octobre 1977 limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative [RS 823.21; RO 1977 H 1873]). Toutes ces considérations parlent en faveur de la solution prévue par le 3e alinéa. Toutefois, il convient de rappeler que, s'agissant de parer aux abus auxquels pourraient donner lieu des mariages fictifs, le fait que l'étranger épouse une Suissesse sans intention de créer une communauté conjugale constituera un motif de révocation de l'autorisation d'établissement (art. 51, 4e al, let. b). De plus, à la suite des avis en majorité négatifs exprimés dans Je cadre de la revision de l'article 44 de la constitution au sujet de l'opportunité de prévoir l'interdiction d'expulser le conjoint étranger d'une Suissesse, semblable disposition n'a pas été reprise dans le projet de loi. Nous remarquerons néanmoins que, si l'expulsion reste possible dans ce cas, l'article 55, 2e alinéa, prévoyant que l'étranger peut recevoir un avertissement lorsqu'une mesure d'expulsion n'est pas opportune en raison des circonstances, permettra de corriger les rigueurs qui résulteraient pour lui et sa famille de l'application d'une telle mesure.

Enfin, signalons une autre innovation importante. L'étranger en possession d'une autorisation d'établissement qui transfère son domicile dans .un autre canton aura droit à l'autorisation d'établissement dans ce canton, lorsqu'aucun motif d'expulsion ne s'y oppose (4e al.). Jusqu'ici, ce droit n'était reconnu qu'aux ressortissants d'Etats avec lesquels notre pays a conclu un traité
d'établissement (art. 14, 4e al., RSEE).

Article 39 Renouvellement de l'autorisation pour frontalier Le 1er alinéa reprend la pratique actuelle concernant le renouvellement de l'autorisation pour frontalier lorsqu'il s'agit de travailleurs frontaliers ayant moins de cinq ans d'activité en Suisse. Le 2e alinéa accorde aux travailleurs frontaliers, sous certaines conditions, un droit au renouvellement de leur autorisation après cinq ans d'activité salariée ininterrompue en Suisse. Le projet de loi prend ainsi en considération les propositions faites, dans le cadre de la procédure de consultation, par le canton de Saint-Gall, divers partis politiques, des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que d'autres organisations; les avis qu'ils ont exprimés demandent de régler le renouvellement de l'autorisation pour frontalier d'une manière analogue à celle qui est prévue pour l'autorisation de séjour. Ce faisant, le projet de loi va au-delà de la disposition de l'accord du 15 avril 1958 entre la Suisse et la France relatif aux travailleurs frontaliers (non publié), selon laquelle le frontalier ne peut faire valoir un droit au renouvellement de son autorisation qu'après dix ans d'activité.

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Artide 40 Droit à l'assentiment d'un autre canton pour un séjour temporaire ou l'exercice d'une activité lucrative L'article 40 crée un droit à l'assentiment selon l'article 28 en faveur de l'étranger qui bénéficie d'une autorisation d'établissement et de l'étranger en possession d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation pour frontalier qui peut faire valoir un droit au renouvellement de son autorisation. Cette disposition est également fondée sur le principe que le statut de l'étranger est amélioré et consolidé selon la durée de présence en Suisse.

204.4

Regroupement familial (art. 41 et 42)

Article 41 Conditions dont dépend le regroupement familial Le problème du regroupement familial est étroitement lié à celui du droit de présence. L'article 41 fait dépendre le regroupement familial de la condition que la résidence et, le cas échéant, l'activité lucrative du conjoint entré en premier lieu en Suisse puissent être considérées comme suffisamment stables et durables, sous réserve que l'intéressé dispose pour sa famille d'un logement convenable. Il va de soi que l'étranger au bénéfice d'une autorisation d'établissement remplit cette condition (1er al,). Pour l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour, le délai d'attente a été graduellement réduit au cours de ces dernières années; il est actuellement de 15 mois. L'institution d'un délai raisonnable est conciliatale avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.10Ï), qui garantit le droit au respect de la vie familiale (cf. rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 9 décembre 1968 sur là convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (FF 1968 M 1124). La Charte sociale européenne, quant à elle, se borne à prescrire aux Etats contractants l'obligation de faciliter autant que possible le regroupement de la famille du travailleur migrant autorisé à s'établir lui-même sur leur territoire (art. 19, en.

6). Quant à la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant, elle dispose que toute partie contractante peut subordonner la délivrance de l'autorisation de faire venir sa famille à un délai d'attente qui ne peut excéder douze mois (art. 12). Il nous paraît judicieux, du point de vue social et humain, de nous inspirer de cette norme internationale dans le projet de loi et de fixer aussi à douze mois au maximum le délai d'attente. Ce délai suffit pour déterminer si l'intéressé est capable de s'adapter à notre ordre social et économique. La réduction du délai n'aura, du reste, guère d'influence sur le nombre des étrangers admis à résider sur notre territoire, car l'intéressé ne fera en définitive qu'avancer de trois mois la décision qu'il aurait prise de toute façon plus tard.

Nous préciserons dans l'ordonnance d'exécution que le délai d'attente de douze mois pourra être réduit ou supprimé quand la situation personnelle ou professionnelle de
l'étranger permet d'emblée de considérer son séjour et, le cas échéant, son activité lucrative comme suffisamment stables et durables, lorsqu'il a des attaches particulières avec la Suisse, notamment en raison de liens de parenté ou de séjours antérieurs, ou que des considérations d'ordre humanitaire le justifient.

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Au demeurant, l'article 41 n'affectera pas la possibilité d'autoriser un étranger dont le séjour en Suisse a un caractère temporaire à se faire accompagner par les membres de sa famille lorsque des considérations de politique générale ou des raisons humanitaires le justifient (art. 30 et 31). Cela vaudra en particulier pour les étrangers ayant achevé leur formation universitaire et exerçant une activité d'enseignement ou de recherche auprès des hautes écoles ou des institutions scientifiques auxquelles s'applique la loi fédérale du 28 juin 1968 (RS 414.20) sur l'aide aux universités ; ils pourront se faire accompagner par les membres de leur famille dès le début de leur séjour en Suisse.

Il importe de relever que, selon le projet de loi, le principe de l'égalité de traitement entre l'homme et la femme trouve également application dans le domaine du regroupement familial. Alors que jusqu'ici c'était uniquement le mari qui pouvait faire valoir un droit au regroupement familial, la femme venue seule en Suisse sera désormais aussi autorisée à se faire rejoindre par son conjoint et leurs enfants mineurs au terme du délai d'attente.

Le contenu de l'article 41 sera, en outre, précisé sur différents points par l'ordonnance d'exécution, aux fins de tenir compte de situations dans lesquelles parents et enfants ne remplissent pas les conditions légales pour vivre ensemble dans notre pays. C'est ainsi qu'il est envisagé d'insérer dans cette ordonnance une disposition reprenant une instruction en vigueur, selon laquelle l'enfant né en Suisse d'une mère qui possède une autorisation saisonnière est autorisé à séjourner en Suisse jusqu'à l'expiration de l'autorisation de sa mère. On y reprendra également une autre instruction prévoyant que, lorsqu'un couple d'étrangers a des enfants mineurs et que l'un des conjoints réside déjà en Suisse, l'autre conjoint ne peut être autorisé à y séjourner pour exercer une activité lucrative que si les conditions dont dépend le regroupement familial sont remplies. Jointes à celles qui fixent à douze mois au maximum le délai d'attente pour le regroupement familial, ainsi qu'à celles qui visent à empêcher la présence dans notre pays de faux saisonniers et créent dans certaines conditions un droit à la transformation de l'autorisation saisonnière en autorisation de séjour, ces
dispositions répondent aux propositions que contient le postulat Mugny (cf. ch.

113).

Article 42 Statut des membres de la famille En application du principe de l'égalité de traitement entre l'homme et la femme, la situation des membres de la famille ne dépendra plus, comme jusqu'ici, de celle du mari, mais de celle du conjoint résidant déjà en Suisse ou du conjoint ayant le statut le plus favorable. Il sera toutefois exigé que les conjoints et leurs enfants mineurs fassent ménage commun.

Le fait d'accorder aux conjoints et à leurs enfants mineurs le droit au même statut, c'est-à-dire de faire bénéficier les membres de la famille des avantages acquis par celui des conjoints qui réside déjà en Suisse ou qui a le statut le plus favorable revêt, pour les étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour, une importance particulière, notamment au regard du droit à la mobilité professionnelle et au renouvellement de l'autorisation.

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204,5

Mobilité professionnelle (art. 43 et 44)

Article 43 Conditions auxquelles est subordonné le changement de place et de profession Cet article reprend les règles sur le changement de place et de profession applicables depuis 1976 et figurant dans les ordonnances du Conseil fédéral limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative. Les délais donnant droit au changement de place et de profession sont fixés uniformément à un an, ce qui correspond aux engagements que nous avons pris dans le cadre de l'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142.114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse.

Le droit au changement de place et de profession ne sera toutefois pas absolu.

L'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier ne pourra s'en prévaloir que dans le cadre d'un régime d'autorisation. De plus, ce droit sera limité par les réserves mentionnées au 3e alinéa, qui prennent en considération, s'il s'agit d'étrangers ayant une autorisation de séjour ou une autorisation pour frontalier depuis moins de cinq ans, les conditions résultant de perturbations du marché du travail affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques et, pour ceux qui bénéficient de ces autorisations depuis cinq ans ou plus, le cas d'un grave fléchissement de l'activité affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques. Ces réserves pourront donner naissance à un régime dérogatoire dont le sens et la portée ont été exposés sous chiffre 132.

Article 44 Conditions auxquelles est subordonné l'exercice d'une activité lucrative accessoire Les conditions devant être remplies pour qu'un étranger puisse être autorisé à exercer à titre accessoire une activité lucrative sont les mêmes que celles qui régissent l'exercice de l'activité lucrative principale.

204.6

Protection et intégration sociales (art. 45 à 47)

Article 45 Information Le 1er alinéa pose le principe que les étrangers doivent être informés de manière adéquate sur les conditions de vie en Suisse et sur leur statut juridique. Ce principe devra trouver son application, sous une forme appropriée, aux stades de la préparation à l'émigration, de l'installation, de l'adaptation et finalement de l'intégration dans le pays d'accueil. Les tâches qui en découleront pour les autorités fédérales et cantonales sont déterminées par les responsabilités qui sont les leurs à chacune de ces phases. Pour ce qui a plus particulièrement trait à l'intégration sociale, ces responsabilités sont partagées entre les cantons et les organisations d'utilité publique se vouant à cette tâche, en particulier les communautés de travail pour les problèmes qui se posent aux étrangers (cf. ch.

133.2).

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Le 2e alinéa charge le Département fédéral de justice et police d'assurer l'information des étrangers qui ont l'intention de prendre un emploi en Suisse et, à leur arrivée dans notre pays, celle des étrangers admis à y travailler. Dans le premier cas, cette information est conçue comme un complément de celle que le contrat de travail apporte au travailleur étranger (art. 26) ; elle doit lui permettre de prendre en toute connaissance de cause sa décision d'émigrer. Dans le second cas, l'information portera essentiellement sur son statut juridique ainsi que sur tout ce qui peut faciliter son installation et son adaptation dans notre pays.

Dans l'un et l'autre cas, l'information sera donnée dans une langue que l'étranger peut comprendre, si ce n'est dans sa langue maternelle. Ces dispositions sont conformes à celles que prévoit la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant (art. 6 et 10).

Les exceptions prévues au 3e alinéa visent avant tout les diverses catégories d'étrangers dont la présence en Suisse a un caractère temporaire (art. 37, 4e al.) ainsi que les étrangers qui, en raison de leur formation ou de séjours antérieurs, sont réputés avoir une connaissance suffisante de leur statut juridique ainsi que des conditions de vie et de travail en Suisse.

Selon le 4e alinéa, les employeurs peuvent être tenus de contribuer à l'information des travailleurs qu'ils veulent prendre ou qu'ils prennent à leur service.

Cette contribution consistera à remettre aux étrangers qu'ils recrutent, en même temps que le contrat de travail, la documentation prévue au 2e alinéa, lettre a, et à prendre en charge les frais causés par l'établissement de cette documentation et de celle qui est prévue à la lettre b. Actuellement déjà, plusieurs entreprises ont édité à leurs frais des brochures d'information destinées à leur personnel étranger. Cela démontre à l'évidence que les employeurs ont aussi un rôle à jouer en ce qui concerne l'installation de leur personnel étranger et son adaptation à de nouvelles conditions de vie et de travail.

Article 46 Directives Le Conseil fédéral sera chargé d'établir, à l'intention des cantons, des directives sur la protection sociale des étrangers et sur les mesures nécessaires à leur intégration sociale. Le fait que l'application des mesures qui s'imposent
dans ce domaine relève à la fois de l'initiative privée et des autorités cantonales ou locales entraîne des disparités de situations de canton à canton, qui se concilient mal avec les besoins des personnes qu'il s'agit d'aider quel que soit leur lieu de résidence. Il importe de s'efforcer d'étendre à l'ensemble du territoire de la Confédération l'aide que l'on doit apporter à l'intégration sociale des étrangers, que l'on coordonne ces mesures tout en respectant les conditions et les besoins propres à chaque canton, région ou localité et que l'on procède systématiquement et régulièrement à des échanges d'informations dont tous les intéressés pourront tirer profit. Eu égard aux attributions restreintes de la Confédération dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales des étrangers, les directives que le Conseil fédéral devra établir n'auront pas force obligatoire; il s'agira simplement de recommandations. Elles seront destinées aux cantons, à qui il incombera de susciter des initiatives dans ce domaine ou de les stimuler, en favorisant la collaboration d'organisations privées et en encourageant, au besoin, leurs activités.

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Article 47 Commission d'experts L'expérience a montré que la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers a joué un grand rôle sur le plan des efforts entrepris au cours de cette décennie en vue de faciliter l'intégration sociale des étrangers et d'améliorer les relations entre Suisses et étrangers. Le mandat confié à cette commission a consisté à déterminer les causes des tensions entre les deux groupes de population, à analyser le malaise existant au sein de la population suisse et à proposer des moyens permettant de les éliminer. Elle a élaboré une conception des dispositions à prendre pour résoudre le problème des étrangers et entrepris une série d'études dont plusieurs ont été publiées.

D'autres rapports, non publiés, ont été remis à des services de l'administration à l'occasion de travaux législatifs ou de négociations bilatérales. La commission s'est en outre attachée à promouvoir la création de communautés de travail oeuvrant dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales des étrangers sur le plan communal, régional ou cantonal, et à stimuler leurs efforts en facilitant la coordination de leurs activités. Elle a consacré aussi une part importante de son activité à l'information objective de la population en collaboration avec les mass média. Enfin, elle a établi d'utiles contacts avec les représentants des principales associations d'étrangers en Suisse ainsi qu'avec toutes les autres institutions et organisations capables d'aider de façon concrète à résoudre les problèmes sociaux se posant aux étrangers.

L'activité qu'a exercée cette commission a sans doute contribué à rendre plus objective la discussion sur le problème des étrangers. Malgré la diminution de la population étrangère due à la récession, le problème de l'intégration des étrangers dans notre communauté nationale continue à se poser dans son ensemble. Il s'agit là d'un problème dont la solution dépend de la bonne volonté, de la compréhension et du désir de collaboration des autorités et des organisations et institutions privées. La Confédération a un intérêt évident à ce que l'application des mesures requises par la protection et l'intégration sociales des étrangers se généralise sur l'ensemble du territoire. Il serait contraire aux intérêts bien compris de notre pays que la politique
d'intégration pâtisse de disparités de situations d'un canton à l'autre. De telles disparités seraient aussi difficilement conciliables, à la longue, avec la responsabilité qu'a le pays d'accueil de prêter l'aide dont les étrangers ont besoin pour trouver la place qui leur revient dans leur nouveau milieu. Les efforts entrepris dans ce domaine par la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers méritent d'être poursuivis. C'est la raison pour laquelle le projet de loi donne au Conseil fédéral la faculté d'instituer une commission d'experts. L'article 47 doit permettre au Conseil fédéral d'instituer une nouvelle commission qui aurait surtout pour tâche: - d'examiner sur la demande des autorités compétentes les questions touchant la condition de l'étranger en Suisse; - de collaborer à l'information des étrangers et à l'établissement de directives; - de soutenir, en procédant à des recherches et en consignant leurs résultats dans des rapports, les efforts entrepris dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales des étrangers par les autorités cantonales et les organi-

219

sations intéressées, notamment par les communautés de travail s'occupant des problèmes qui se posent aux étrangers.

Cette nouvelle commission perdrait donc en partie le caractère politique qui a marqué la création de la commission actuelle. Son ampleur pouvant être réduite de ce fait, elle se composerait de représentants des cantons et des communes, de ceux d'organisations et d'institutions concernées ainsi que d'experts.

204,7

Activité politique (art. 48)

Le 1er alinéa pose le principe que l'étranger peut exercer une activité politique dans la mesure où il ne compromet pas la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ni la sûreté intérieure d'un canton. L'activité politique que l'étranger peut exercer s'inscrit dans le cadre des droits fondamentaux qui lui sont reconnus.

Elle doit être distinguée de l'exercice des droits politiques (droit de prendre part aux votations et aux élections et celui de signer des demandes de référendum ou des initiatives populaires). En matière fédérale, les droits politiques sont réservés aux Suissesses et aux Suisses; l'article 74, 1er alinéa, de la constitution, ne laisse aucun doute à ce sujet. Il appartient en revanche aux cantons de régler l'exercice des droits politiques en matière cantonale et communale (art. 74,4e al., est.). Le canton de Neuchâtel, par exemple, accorde aux étrangers le droit de vote en matière communale depuis 1849. L'activité politique au sens de l'article 48 n'embrasse pas les droits politiques exercés en Suisse par des étrangers accomplissant leur devoir civique.

En outre, le Conseil fédéral conserve la faculté de prendre les mesures nécessaires à la sauvegarde des intérêts de la Confédération au dehors et de la sûreté extérieure ou intérieure de la Suisse (art. 102, ch. 8 à 10, est).

Selon les propositions faites lors de la procédure de consultation, le 2e alinéa précise la notion de sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse. Cette disposition permettra d'ordonner des mesures à titre préventif à l'égard d'un étranger en particulier ou de groupes d'étrangers.

Le projet de loi établit une distinction entre Je fait de compromettre la sûreté intérieure de la Suisse et celui de compromettre la sûreté intérieure d'un canton.

Il convient de relever à cet égard que, selon notre droit, c'est en premier lieu et principalement aux cantons qu'il incombe de maintenir la «tranquillité et l'ordre» et l'« ordre et la sécurité publique». L'article 16 d'une part, les articles 85, chiffre 7, et 102, chiffre 10, de la constitution, d'autre part, confient toutefois, dans ce domaine, certaines attributions à la Confédération. Ainsi, chaque canton assume au premier chef la responsabilité de la sûreté intérieure sur son territoire; la Confédération est, quant à elle, responsable de la sûreté intérieure
lorsqu'un canton n'est plus en mesure de l'assurer par ses propres moyens ou lorsque la sûreté intérieure de la Suisse est compromise ou troublée.

L'étranger qui compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton pourra faire l'objet d'une interdiction d'entrée, d'un renvoi, d'une expulsion ou d'un internement. Si une telle mesure n'est pas possible ni appropriée aux circonstances, le Ministère public de la Confédé220

ration ou, Je cas échéant, l'autorité cantonale compétente pourra, selon le 3e alinéa, restreindre ou interdire l'activité politique de l'étranger. Cette réglementation permet d'abroger J'arrête du Conseil fédéral du 24 février 1948 (RS126) concernant les discours politiques d'étrangers (cf. en particulier l'art. 2, 1er al.). L'autorité n'en conservera pas moins la possibilité, dans la mesure où les restrictions ou l'interdiction de l'activité politique le justifieront, d'interdire à un étranger de prendre la parole sur un sujet politique au cours d'une manifestation publique. Il est également concevable qu'un étranger particulièrement exposé sur le plan politique puisse, le cas échéant, se voir interdire toute activité politique lorsque celle-ci est, par exemple, de nature à compromettre les bonnes relations de la Suisse avec d'autres Etats. En revanche, il n'apparaît pas nécessaire, à des fins de contrôle, d'exiger que les étrangers domiciliés hors de Suisse annoncent préalablement leur intention de prendre la parole sur un sujet politique au cours d'une manifestation publique organisée dans notre pays (cf.

ch. 133).

Le projet de loi place par conséquent les réfugiés sur un pied d'égalité avec les autres étrangers dans le domaine de l'activité politique; ainsi, le but visé par le postulat Götsch (cf. ch. 113) est atteint.

Les membres des associations qui ont une activité politique (4e al.) peuvent se prévaloir de la liberté d'association prévue par l'article 56 de la constitution. Cet article s'applique aussi bien à la création d'associations qu'à l'activité déployée par celles-ci. Les membres de ces associations, dont il y a lieu d'admettre qu'elles se composent en majorité d'étrangers, pourront être tenus de fournir des renseignements précis sur l'activité de l'association, sur le nombre et l'identité de ses membres ainsi que sur la provenance et l'utilisation des fonds dont elle dispose. Compte tenu des critiques auxquelles a donné lieu cette disposition lors de la procédure de consultation, le projet de loi limite l'obligation de renseigner aux cas dans lesquels la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton le requièrent (cf. ch. 133). Dès lors qu'elle n'est pas inconditionnelle, cette obligation ne porte pas atteinte à la liberté d'association.
Comme les autres libertés fondamentales, la liberté d'association n'est pas garantie de manière absolue, mais seulement dans les limites de l'ordre public.

Dans ces conditions, l'obligation de renseigner incombera également aux Suisses. L'autorité ayant la compétence de soumettre les intéressés à cette obligation est le Ministère public de la Confédération.

205

Interdiction d'entrée, fin dn droit de présence et internement (art. 49 à 62)

Article 49 Interdiction d'entrée La disposition prévue au 1er alinéa, lettre a, établira la compétence du Ministère public de la Confédération de prononcer des interdictions d'entrée; sous le régime en vigueur, cette compétence se fonde sur l'article 19, chiffre 2, de l'arrêté..du Conseil fédéral du 17 novembre 1914 (RS 172.011) donnant aux départements et aux services qui en dépendent la compétence de régler certaines affaires.

221

La réglementation actuelle prévoit, outre la possibilité de prononcer une interdiction d'entrée, celle de frapper d'une restriction d'entrée l'étranger dont l'entrée ou le séjour en Suisse, à des fins déterminées, est indésirable (art. 13, 2e al., LSEE). Cette disposition n'est pas reprise dans le projet de loi; l'obligation faite à l'étranger qui veut exercer une activité lucrative, prendre résidence ou fréquenter une école en Suisse, de se procurer une assurance d'autorisation saisonnière ou de séjour (art. 5) la rend superflue.

Article 50 Caducité des autorisations Cet article distingue entre les cas dans lesquels l'étranger quitte la Suisse (1er al., let. a; 2e al., let. a) et ceux dans lesquels il transfère d'un canton dans un autre sa résidence ou, pour le frontalier, son lieu de travail (1er al., let. b; 2e al., let. b; 3e al., let. a). Dans le premier cas, les autorisations saisonnières, de séjour et d'établissement prendront fin lorsque l'étranger déclarera son départ ou lorsqu'il cessera en fait d'avoir sa résidence en Suisse. Dans le second cas, les autorisations saisonnières, les autorisations de séjour, les autorisations d'établissement et les autorisations pour frontalier ne prendront fin qu'après l'obtention de la nouvelle autorisation.

L'ordonnance d'exécution précisera la durée pendant laquelle l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou d'établissement peut séjourner temporairement à l'étranger sans que son autorisation prenne fin. Nous envisageons d'étendre les délais en vigueur et de les porter de six mois à un an pour les titulaires d'une autorisation de séjour et de deux à trois ans pour les titulaires d'une autorisation d'établissement.

Article 51 Révocation du visa et des autorisations Le projet de loi renonce à la possibilité d'accorder des autorisations de séjour et saisonnières à titre révocable. Selon le droit en vigueur (art. 25, 1er al., let. e, LSEE), le Conseil fédéral peut donner aux autorités de police des étrangers la compétence ou l'instruction «d'accorder à titre révocable l'autorisation de séjour pour les ouvriers ou employés saisonniers. Exceptionnellement, cette compétence s'étend à d'autres travailleurs lorsque la situation du marché du travail est instable et que les autorisations de longue durée doivent cependant pouvoir être accordées». En
ce qui concerne les étrangers séjournant en Suisse depuis cinq ans ou plus, cette disposition n'est plus conciliatale avec la décision du Conseil de l'OECE/OCDE des 30 octobre 1953/7 décembre 1956 régissant l'emploi des ressortissants des pays membres (non publiée), ni avec l'accord entre la Suisse et l'Italie du 10 août 1964 (RS 0.142.114.548) relatif à l'émigration de travailleurs italiens en Suisse. Il importe également de renoncer à la possibilité d'accorder à titre révocable des autorisations de séjour aux étrangers qui séjournent depuis moins de cinq ans dans notre pays. Eu égard au statut juridique qu'il convient, selon les conceptions actuelles, de garantir à l'étranger, il serait en effet difficilement soutenable, des points de vue social et humain, de retirer l'autorisation accordée à un travailleur étranger, notamment s'il réside en Suisse avec sa famille, et de lui enjoindre de quitter notre pays dans l'espace de quelques semaines, le cas échéant avec sa femme et ses enfants. Lorsque la situation du marché du travail est instable, il est toujours possible de limiter la 222

durée de validité des autorisations accordées à des étrangers nouveaux venus et à ceux qui résident dans notre pays depuis moins de cinq ans. Les mêmes considérations valent pour les ouvriers ou employés saisonniers.

Le 4e alinéa, lettre b, introduit un motif nouveau de révocation de l'autorisation d'établissement pour parer aux abus que pourrait commettre un étranger en contractant un mariage fictif aux fins d'obtenir une autorisation d'établissement.

Cette disposition s'inspire de l'article 120, chiffre 4, CC1^ Article 52 Renvoi L'article 52 règle de manière plus stricte que le droit actuel les cas pouvant faire l'objet d'une décision de renvoi et donne, de ce fait, une meilleure sécurité juridique à l'étranger. Selon le 1er alinéa, l'étranger ne pourra être tenu en tout temps de quitter la Suisse que s'il y réside illégalement. Il ne sera possible de renvoyer celui qui y réside sans que son séjour soit soumis à autorisation que s'il compromet par sa présence la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton ou que si sa présence constitue une menace pour l'ordre public (2e al.).

D'autre part, le 4e alinéa précise la compétence de l'Office fédéral des étrangers.

Les décisions cantonales de renvoi ne lui seront plus soumises pour extension à tout le territoire de la Confédération mais pour information. Il lui appartiendra de statuer sur l'opportunité d'éloigner du territoire suisse un étranger renvoyé d'un canton. La décision de cette autorité ne sera plus un acte juridique lié à la décision cantonale; elle subsistera même si la décision cantonale de renvoi est annulée.

Article 53 Expulsion L'article 53 apporte quelques modifications importantes à la réglementation actuelle. Le 1er alinéa règle au niveau de la loi l'expulsion selon l'article 70 de la constitution2). Le champ d'application de cette disposition se limite au domaine de la police politique. Sous le régime actuel, c'est le Conseil fédéral qui a la compétence de prononcer une expulsion pour ce motif. Selon le projet de loi, cette compétence sera attribuée au Département fédéral de justice et police, les décisions d'une importance particulière étant seules réservées au Conseil fédéral.

Autre modification: la maladie mentale et l'indigence (art. 10,1er al., let. c et d, LSEE) ne seront plus considérées
comme motifs d'expulsion. A cet égard, il y a lieu de noter que la Convention européenne d'établissement (art. 3), à laquelle la Suisse n'a pas adhéré, et la Charte sociale européenne (art. 19) disposent que les ressortissants des parties contractantes résidant régulièrement sur le territoire des autres parties ne peuvent être expulsés que s'ils menacent la sécurité de l'Etat ou ont contrevenu à l'ordre public ou aux bonnes moeurs. De même, la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant prévoit que le permis de séjour délivré conformément aux dispositions de la a

> Le mariage est nul lorsque la femme n'entend pas fonder une communauté conjugale mais veut éluder les règles sur la naturalisation.

2 > La Confédération a le droit de renvoyer de son territoire les étrangers qui compromettent la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse.

223

convention pourra être retiré pour les mêmes motifs (art. 5). Selon le projet de loi, le rapatriement pourra, dans certaines conditions, être envisagé en cas d'indigence (art. 57).

.

.

En dehors des cas d'expulsion ressortissant à la sûreté de l'Etat,. l'article 53 énumère de manière exhaustive les motifs d'expulsion (2e al., let. b et c). Il limite cette mesure, en cas de condamnation pénale, à celles qui sont sanctionnées par des peines de réclusion ou d'emprisonnement. D'autre part, l'expulsion ne sera justifiée que si l'étranger a contrevenu gravement et de manière répétée à des prescriptions légales, par exemple aux dispositions de la législation fiscale. Le projet de loi restreint ainsi sensiblement la portée de l'article 10,1er alinéa, lettre b, de la LSEE, aux termes duquel l'étranger peut être expulsé «si sa conduite, dans son ensemble, et ses actes permettent de conclure qu'il ne veut pas s'adapter à l'ordre établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité ou qu'il n'en est pas capable».

Le projet de loi ne prévoit plus la possibilité de limiter l'expulsion au territoire d'un canton. Sa validité s'étendra toujours à l'ensemble du territoire suisse. Une expulsion limitée au territoire d'un canton est pratiquement incontrôlable. De plus, en raison de son caractère de gravité, cette mesure, si elle est fondée, requiert que celui qui en est l'objet soit éloigné de l'ensemble du territoire de la Confédération.

Enfin, l'article 53 ne reprend pas la disposition de la LSEE (art. 11, 2e al.) selon laquelle l'expulsion s'étend, en règle générale, au conjoint de l'expulsé. Il n'est, en effet, pas justifié que le conjoint n'ayant pas à se reprocher les faits qui motivent l'expulsion, tombe obligatoirement sous le coup d'une mesure qui, subjectivement, a un caractère infamant. Comme cela a été relevé dans le cadre de la procédure de consultation, l'expulsion d'un conjoint ne doit pas entraîner pour l'autre conjoint et leurs enfants mineurs la perte de l'autorisation dont ils jouissaient jusqu'alors ni, en règle générale, l'obligation de quitter la Suisse. Par conséquent, le droit de présence des membres de la famille ne sera, selon le projet de loi, pas touché par l'expulsion de l'un des conjoints, Article 54 Restrictions à l'expulsion Selon l'article 55 du code pénal, le juge peut expulser du
territoire suisse pour une durée de 3 à 15 ans tout étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement, l'expulsion pouvant être prononcée à vie en cas de récidive. L'autorité chargée de l'exécution des peines peut, à titre d'essai, suspendre les effets de l'expulsion pendant la durée de la libération conditionnelle. Si le condamné libéré conditionnellement s'est bien conduit jusqu'à la fin du délai d'épreuve, l'expulsion qui avait été différée n'est plus exécutée. Ces dispositions du code pénal suisse se juxtaposent à celles de la LSEE (art, 11, 1er al.), selon lesquelles une expulsion peut être prononcée pour une durée déterminée non inférieure à deux ans ou indéterminée lorsque l'étranger a été condamné par une autorité judiciaire pour crime ou délit.

Dans la pratique, cette dualité de normes et d'attributions a parfois été la cause de décisions contradictoires. Aucune règle du droit actuel n'arbitre les conflits de compétence qui peuvent en résulter. Dans leurs rapports, l'administration et les tribunaux sont régis par le principe qu'aucun organe n'est lié par les actes 224

d'un autre (Grise], Droit administratif suisse, Neuchâtel, 1975, p. 91). Les deux pouvoirs ont sans doute la possibilité de coordonner leur activité. Toutefois, les efforts faits dans ce sens n'écartent pas le risque de se trouver devant des réactions qui divergent.

Lors de la procédure de consultation, divers milieux ont émis l'idée d'instituer un régime de l'expulsion attribuant la compétence à une seule autorité : autorité pénale, autorité administrative, voire juge administratif. De telles propositions soulèvent surtout un problème de coordination, s'agissant de remédier aux inconvénients qui résultent de la dualité susmentionnée. A cet effet, le projet de loi apporte des restrictions à l'expulsion. Aux termes du 1er alinéa, l'autorité cantonale compétente renoncera à prononcer une expulsion selon l'article 53, 2e alinéa, lettre b, lorsque le juge aura déjà prononcé une expulsion ou lorsqu'il aura expressément renoncé à prendre cette mesure à l'égard d'un étranger qui bénéficiait d'une autorisation de séjour ou d'établissement au moment de sa condamnation.

Selon le 2e alinéa, l'étranger condamné par le juge à être expulsé, qui est libéré conditionnellement et dont l'expulsion est différée, recevra une autorisation de séjour pour la période d'essai s'il bénéficiait d'une autorisation de séjour ou d'établissement au moment de sa condamnation. En ce qui concerne les étrangers établis, l'ordonnance d'exécution prévoira que l'étranger libéré conditionnellement, qui était en possession d'une autorisation d'établissement au moment de sa condamnation, sera remis au bénéfice de cette autorisation lorsque son comportement aura donné satisfaction jusqu'à la fin du délai d'épreuve.

Le juge qui prononce une expulsion ou l'autorité chargée de l'exécution des peines qui suspend les effets d'une expulsion judiciaire dans le cadre d'une décision de libération conditionnelle, doit aussi prendre en considération les exigences de l'ordre public (ATF du 9 mars 1977 dans la cause Choon-Hock Low contre le Conseil d'Etat du canton de Zurich). Les restrictions à l'expulsion prévues par l'article 54 accroîtront en conséquence les responsabilités du juge et des autorités chargées de l'exécution des peines à l'égard de la collectivité.

Article 55 Proportionnalité et avertissement Sous le régime actuel, le principe de
la proportionnalité ne trouve expressément application qu'à propos de l'expulsion (art. 11, 3e al., LSEE; art. 16, 3e al., RSEE). Or, il nous paraît judicieux que ce principe soit étendu à toutes les mesures d'éloignement pouvant frapper un étranger (1er al.). Il convient en effet de ne pas perdre de vue que de semblables mesures peuvent avoir de graves effets sur l'existence d'une personne ou d'une famille. Aussi l'autorité peut-elle, selon le 2e alinéa, donner un avertissement sous forme de décision écrite et motivée, susceptible d'être portée devant l'instance de recours lorsqu'il n'est pas opportun, en raison des circonstances, de prononcer une interdiction d'entrée, une révocation ou un renvoi, et non plus seulement une expulsion.

Article 56 Exécution du renvoi et de l'expulsion Le 2e alinéa comble une lacune signalée à maintes reprises par les autorités cantonales. Jusqu'ici, l'étranger qui cherchait à se soustraire à une décision de 225

renvoi ou d'expulsion ne pouvait être détenu qu'en vertu de prescriptions cantonales. Dans nombre de cantons, ce problème n'a pas fait l'objet d'une réglementation spécifique. Le projet de loi prévoit que, s'il y a lieu de présumer qu'il a l'intention de se soustraire à une mesure de renvoi ou d'expulsion, l'étranger peut être détenu pour une durée n'excédant pas 72 heures en vue de son refoulement. Eu égard à l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101), cette détention ne pourra être ordonnée que par une autorité judiciaire cantonale, dont la décision sera définitive.

Article 57 Rapatriement L'article 57 soumet à de nouvelles conditions le rapatriement d'un étranger.

Après dix ans de résidence en Suisse, le rapatriement ne peut plus être ordonné.

Le canton compétent selon l'article 20 de la loi fédérale du 24 juin 1977 sur la compétence en matière d'assistance des personnes dans le besoin (RS 19781221) devra donc désormais assister aussi des étrangers.

Selon le droit en vigueur, un étranger peut en tout temps être rapatrié lorsque lui-même ou une personne aux besoins de laquelle il est tenu de pourvoir, tombe d'une manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique. Bien qu'en droit international public il n'y ait, pour un Etat, aucune obligation d'assister les étrangers en dehors d'engagements conventionnels internationaux, les cantons n'ont que rarement fait usage de cette règle et ont fait bénéficier bénévolement des étrangers de l'assistance publique. De plus, si l'on considère qu'après dix ans de séjour en Suisse, l'étranger peut faire valoir un droit à l'autorisation d'établissement (art. 38,1er al.), il est judicieux de renoncer au rapatriement lorsque l'étranger a résidé en Suisse pendant dix ans; c'est d'autant plus opportun qu'il faut admettre que, durant ce laps de temps, il a en général noué de profondes attaches avec notre pays et que, dans ces conditions, le rapatriement pourrait être ressenti comme une mesure d'une dureté excessive.

Le 2e alinéa réserve les dispositions des traités internationaux auxquels la Suisse est partie. Notre pays a conclu, le 9 septembre 1931, avec la France une convention concernant l'assistance aux indigents (RS 0.854.934.9) et, le 14 juillet 1952, avec la République fédérale d'Allemagne une
convention concernant l'assistance des indigents (RS 0.854.913.6]).

Le conjoint étranger et les enfants mineurs étrangers d'une Suissesse ainsi que l'étrangère qui était suisse avant son mariage, son conjoint et leurs enfants mineurs étrangers, ne pourront faire l'objet d'une mesure de rapatriement (4e al.). Cette disposition peut également être considérée comme le pendant de l'acquisition automatique de la nationalité suisse par l'étrangère qui épouse un Suisse; elle tient aussi compte du principe de l'égalité de traitement entre l'homme et la femme.

Article 58 Prise en charge de personnes à la frontière Nous renvoyons aux commentaires relatifs à l'article 4.

Article 59 Frais d'assistance et frais causés par le départ de Suisse L'article 59 modifie sensiblement la répartition actuelle entre cantons et 226

Confédération des frais d'assistance et des frais causés par le départ de Suisse.

En vertu de l'arrêté fédéral du 15 juin 1909 (RS 142.291) mettant à la charge de la Confédération les frais de renvoi d'étrangers indigents, la Confédération assume actuellement le paiement des frais de transport jusqu'à la frontière suisse. Mettant à exécution cet arrêté (RS 1134), le Conseil fédéral a autorisé, le 23 juin 1909, le Département fédéral de justice et police à adhérer à la convention de la même date relative aux transports de police, qui a été signée par tous les cantons. Par arrêté du Conseil fédéral du 17 décembre 1935 (RS 3 518), ce département a été autorisé à adhérer à la convention modifiée, qui règle la répartition actuelle des frais d'assistance et des frais causés par le départ de Suisse, entre les cantons et la Confédération.

L'arrêté fédéral du 15 juin 1909 susmentionné sera abrogé lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi (art. 89,1er al.). La convention du 23 juin 1909 relative aux transports de police devra être dénoncée. Selon l'article 59, 1er alinéa, la Confédération prendra en charge les frais occasionnés par le départ de Suisse si l'étranger est entré en Suisse illégalement. De plus, elle assumera les frais d'assistance éventuels jusqu'au départ de Suisse, lorsque l'étranger sera entré en Suisse au bénéfice d'un visa délivré au mépris des prescriptions en vigueur, sans qu'il y ait eu faute de sa part. La Confédération ne prendra plus à sa charge les frais causés par le départ de Suisse jusqu'à la frontière suisse, mais les assumera jusqu'à la frontière du pays d'origine ou du pays de destination. Elle ne prendra toutefois à sa charge les frais d'assistance et les frais causés par le départ de Suisse que si l'étranger est dépourvu de moyens suffisants. Pour le reste, l'assistance des étrangers incombe aux cantons selon les dispositions de la loi fédérale du 24 juin 1977 sur la compétence en matière d'assistance des personnes dans le besoin (RS 1978 I 221).

Le 2e alinéa prescrit que l'employeur répond des frais d'assistance et des frais causés par le départ de Suisse de l'étranger qui a été occupé sans y être autorisé.

Lorsqu'elle fait l'avance des frais, l'autorité pourra se retourner contre lui. Une disposition similaire figure dans l'ordonnance du Conseil fédéral du 20
octobre 1976, modifiée le 19 octobre 1977 (RS 823.2J; RO 7977 II 1873) limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative (art. 23, 3e al.).

L'ordonnance d'exécution précisera que les frais d'assistance comprennent également les frais médicaux et pharmaceutiques ainsi que les frais d'hospitalisation. Seront considérés comme frais occasionnés par le départ de Suisse ceux qui sont causés par le voyage volontaire ou forcé de l'étranger vers le pays de destination, y compris, le cas échéant, les frais se rapportant aux personnes qui doivent l'accompagner.

Article 60 Internement Le régime prévu par le projet de loi limite l'internement dans une mesure sensiblement plus forte que la réglementation actuelle. L'internement ne pourra être prononcé que pour une durée de six mois et prolongé que pour des périodes ne dépassant pas six mois, la durée totale de l'internement ne devant pas excéder deux ans. Le projet de loi tient ainsi compte des dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101) qui prévoient à son article 5 que la 227

privation de liberté, dans les cas où elle est licite, ne doit pas se prolonger audelà de ce qui est absolument nécessaire à la sauvegarde de l'ordre public (cf.

rapport du Conseil fédéral du 9 décembre 1968 [FF 1968 II 1100 à 1102] à l'Assemblée fédérale sur la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales). Lorsque l'internement n'est pas opportun ou n'est plus admissible, mais au plus tard à l'échéance de la deuxième année, l'intéressé recevra une autorisation de séjour dans le canton qui a donné en dernier lieu une autorisation à l'étranger ou dans lequel celui-ci séjournait sans autorisation en dernier lieu (4e al.). A l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les décisions d'internement prises selon l'article 27 LSEE deviendront caduques dans la mesure où elles ne seront plus conformes au nouveau droit; dans ces cas, les intéressés seront mis au bénéfice d'une autorisation de séjour.

Article 61 Exécution de l'internement L'exécution de l'internement sera aussi réglée de manière plus précise que sous le régime actuel. Tout d'abord, l'internement sous forme de placement libre (art. 4, 1er al., let. c, OCF du 14 août 1968, RS 142.281 sur l'internement des étrangers) n'est plus prévu. En outre, selon le projet de loi, l'internement sera exécuté en règle générale sous forme de placement de l'étranger dans un home ou dans un établissement ouvert. L'assignation d'un lieu de résidence sera considérée comme un mode adouci d'internement, lorsque le placement dans un établissement ou un home ne conviendra pas pour des raisons d'âge ou de maladie ou en raison de circonstances spéciales. Enfin, le placement dans un établissement fermé ne sera possible que si, par sa présence, l'étranger compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton, ou si sa présence en Suisse constitue une menace grave pour l'ordre public.

Article 62 Frais d'internement L'interné disposant de ressources supportera les frais de son internement. La Confédération prendra en charge les frais d'internement dans les autres cas. Il en sera de même pour les frais causés par le départ de Suisse, lorsque l'étranger peut être refoulé durant ou immédiatement après l'internement.

206

Autorités (art. 63 à 69)

Les articles 63 à 69 règlent la compétence des autorités fédérales et cantonales plus spécialement chargées de l'application de la loi. La compétence des autres autorités est fixée dans chacune des dispositions concernées. Ainsi, le texte du projet de loi s'en trouve nettement allégé.

A l'instar du droit actuel, le projet de loi attribue une compétence générale à une autorité déterminée, tant sur le plan fédéral que sur le plan cantonal. L'Office fédéral des étrangers assumera ainsi toutes les tâches confiées à la Confédération qui ne sont pas dévolues à une autre autorité fédérale (art. 63,1er al.). Les tâches particulières qui lui incomberont ne sont mentionnées que dans la mesure où sa compétence doit être délimitée par rapport à celle d'autres autorités (art. 63, 2e al.). L'office cantonal des étrangers assumera, pour sa part, toutes les tâches 228

conférées aux cantons, en tant que la législation fédérale ou cantonale ne les attribue pas à l'autorité cantonale dont relève le service de l'emploi (office cantonal du travail) ou à une autre autorité (art. 67,1er al.). Les cantons auront ainsi la possibilité, dans le cadre de leur législation sur l'organisation administrative, de fixer dans des ordonnances cantonales d'exécution les tâches dévolues aux différentes autorités. Selon l'article 67, 4e alinéa, la compétence de délivrer ou de renouveler les autorisations saisonnières, de séjour ou d'établissement, de révoquer ces autorisations ou de prononcer une expulsion selon l'article 53, 2e alinéa, devra cependant être attribuée à l'office cantonal des étrangers ou à une autorité dont il relève. Exceptionnellement, avec l'assentiment du Conseil fédéral, des autorités subalternes pourront être appelées à statuer sur la délivrance, la prolongation ou le renouvellement des autorisations saisonnières et de séjour. Par ailleurs, l'article 67,1er alinéa, est formulé de manière à laisser aux ·cantons la faculté soit de conserver la dénomination de «police cantonale des étrangers», soit d'adopter la dénomination d'« office cantonal des étrangers», compte tenu de l'extension des tâches qui seront confiées à cette autorité par la future loi. Cela correspond aux avis exprimés par les gouvernements cantonaux lors de la procédure de consultation.

Les dispositions en vigueur concernant la procédure d'approbation sont pour l'essentiel reprises et complétées en fonction des attributions nouvelles dévolues aux autorités dont relève le service de l'emploi (art. 68 et 69). Les cantons approuvent cette réglementation.

207

Annonce de l'arrivée et da départ, registre central des étrangers et émoluments (art. 70 à 77)

Les articles 70 à 74 reprennent des dispositions qui figuraient jusqu'ici dans diverses ordonnances et qui ont donné de bons résultats. Etant donné qu'elles imposent de nouvelles obligations aux étrangers, aux employeurs et aux logeurs, ces dispositions ont leur place à l'échelon de la loi. Selon le voeu exprimé par plusieurs cantons, les prescriptions cantonales plus sévères sont réservées pour les annonces prévues aux articles 70, 72 et 73 (art. 74).

L'article 76 fixe à l'échelon de la loi les buts assignés au registre central des étrangers et établit les principes de son utilisation. D'une part, la mise en oeuvre et le contrôle des mesures prises en vue de stabiliser et de réduire l'effectif de la population étrangère résidante exigent que l'on dispose d'une statistique des étrangers fiable et complète. En permettant d'obtenir rapidement des données exactes sur l'évolution et la structure de l'effectif des étrangers, le registre central des étrangers répond à cette exigence. Les données qu'il fournit donnent notamment la possibilité d'établir une statistique des étrangers non seulement pour l'ensemble du pays, mais également pour les cantons et les communes.

D'autre part, le registre central des étrangers a pour but de mettre les autorités de police des étrangers en mesure d'assumer les tâches de contrôle qui leur sont dévolues, par exemple le contrôle de l'expiration des autorisations et la vérification des numéros d'AVS qui servent à l'identification des étrangers enregistrés. Enfin, le registre central des étrangers contribue à rationnaliser l'exécution des travaux administratifs qui incombent à l'Office fédéral des étrangers et aux offices cantonaux et communaux des étrangers.

16 Feuille feditale. 130« année. VoL n

229

Une attention particulière doit être vouée, lors de l'établissement d'une banque de données, à la protection et à la sécurité de ces données. Diverses interventions parlementaires demandent que l'on crée une législation dans ce domaine; des travaux sont en cours à ce sujet. Il importe, à notre avis, d'édicter, du moins à titre provisoire, une réglementation sur la protection et la sécurité des données qui s'applique spécialement au registre central des étrangers. La loi chargera le Conseil fédéral de cette tâche. Nous arrêterons, par voie d'ordonnance, des prescriptions visant à empêcher que des personnes non autorisées aient accès à ces données et à garantir aux intéressés la protection de leur personnalité.

L'article 77 fournit la base légale pour la perception d'émoluments.

208

Protection juridique (art. 78 à 81)

Article 79 Procédure des autorités cantonales Nous avons déjà fait état sous chiffre 134 des principales améliorations que le projet de loi apporte dans ce domaine. Il convient de relever que l'article 79, 3e alinéa, précise les cas dans lesquels il est possible de renoncer à appliquer le 2e alinéa, qui garantit pour le moins certains droits à l'étranger. Cette disposition s'inspire de l'article 3, lettre f, de la loi fédérale du 20 décembre 1968 (RS 172.021) sur la procédure administrative applicable aux décisions du ressort des autorités fédérales".

Article 80 Autorités de recours L'article 80 énumère les diverses voies de droit à la disposition des étrangers.

Cette énumération, qui n'est, sur certains points, qu'un rappel de dispositions existantes, vise à mieux informer l'étranger.

Actuellement, les décisions sur recours du Département fédéral de l'économie publique contre les décisions de l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail sont susceptibles de recours auprès du Conseil fédéral (art. 72, let.

a, PA). En revanche, les décisions sur recours du Département fédéral de justice et police contre les décisions de la Police fédérale des étrangers sont définitives en tant que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral n'est pas ouvert (art. 20, 3e al., LSEE). Il est judicieux d'adopter pour le recours contre les décisions de l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail les règles qui s'appliquent actuellement au recours contre les décisions de la Police fédérale des étrangers, lesquelles ont donné satisfaction. C'est ce que dispose le 3e alinéa, qui prévoit que les décisions des autorités de recours de la Confédération seront définitives en tant que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral ou le recours au Conseil fédéral n'est pas recevable.

Autre innovation: actuellement, les décisions d'internement sont susceptibles de recours auprès du Département fédéral de justice et police et en deuxième instance seulement auprès du Tribunal fédéral. Le 4e alinéa prévoit que ces 11

Ne sont pas régies par la présente loi: f. La procédure de première instance dans d'autres affaires administratives dont la nature exige qu'elles soient tranchées sur le champ par décision immédiatement exécutoire,

230

décisions seront portées directement devant le Tribunal fédéral, quel que soit le mode d'exécution de l'internement. La nouvelle réglementation tient compte de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (RS 0.101).

Selon l'article 102, chiffres 9 et 10, de la constitution, le Conseil fédéral est responsable de la sûreté intérieure et extérieure de la Suisse. Le 5e alinéa, lettre a, prévoit en conséquence que les décisions prises sur recours par le Département fédéral de justice et police ou les autorités cantonales de recours statuant en dernière instance, qui concernent les restrictions ou l'interdiction de l'activité politique, pourront faire l'objet d'un recours au Conseil fédéral, et non au Tribunal fédéral, comme l'ont proposé divers milieux lors de la procédure de consultation. En outre, à la différence de la réglementation actuelle, la compétence de prononcer une expulsion en vertu de l'article 70 de la constitution n'appartiendra plus exclusivement au Conseil fédéral. Le 5e alinéa, lettre b, prévoit en conséquence que le recours au Conseil fédéral sera recevable contre les décisions d'expulsion prises par le Département fédéral de justice et police selon l'article 53, 1er alinéa.

Enfin, l'article 80 permettra de tenir compte, sur le plan des dispositions d'exécution que seront amenés à prendre les cantons, de la proposition faite dans la procédure de consultation de désigner des autorités de recours indépendantes de l'administration. Parallèlement à l'extension de la juridiction administrative sur le plan fédéral, plusieurs cantons ont déjà entrepris des réformes dans ce sens. L'insertion dans le projet d'une disposition prévoyant expressément l'obligation pour les cantons de créer de telles autorités de recours déborderait toutefois le cadre de la loi sur les étrangers. Il s'agit en l'occurrence d'un problème ayant une portée générale, qui ne saurait trouver une solution partielle, adoptée en faveur d'une seule catégorie de personnes. La question de la création au niveau cantonal d'instances de recours indépendantes de l'administration pour l'exécution des dispositions du droit fédéral est examinée dans le cadre des travaux préparatoires concernant la revision de la loi fédérale d'organisation judiciaire.

209

Dispositions pénales et sanctions administratives

(art. 82 à 87) Article 82 Contrefaçon, falsification et usage abusif de pièces de légitimation d'étrangers Eu égard à l'arrêt de la Cour de cassation du Tribunal fédéral du 5 octobre 1973 dans l'affaire Irving (ATF 99IV 125 s.), le champ d'application de l'article 82 est délimité par rapport à celui de l'article 252 CP de manière que cette disposition ne soit applicable que si le délinquant enfreint la loi sur les étrangers.

Article 83 Entrée et séjour illégaux L'article 83 définit plus clairement que la LSEE (art. 23, 1er al.) les éléments constitutifs de l'infraction. Il convient de relever que le fait de prêter assistance à un étranger qui entre ou séjourne illégalement en Suisse constituera, selon le chiffre 1, 4e alinéa, un délit sui generis. Si ce comportement délictueux vise à permettre à un étranger d'exercer une activité lucrative, le délit qualifié de 231

l'article 84, 1er alinéa, lettre a, se trouvera réalisé et le délinquant tombera sous le coup de cette disposition.

La disposition actuelle selon laquelle celui qui se réfugie en Suisse n'est pas punissable si le genre et la gravité des poursuites auxquelles il est exposé justifient le passage illégal de la frontière (art. 23, 2e al., LSEE), n'est pas reprise dans le projet de loi. L'article 34 CP concernant l'état de nécessité suffit à couvrir ces cas. L'article 86,2e alinéa, se réfère à la partie générale du code pénal suisse. Il s'ensuit que les dispositions pénales spécifiques du projet de loi n'ont pas à régler les cas dans lesquels la peine peut être atténuée ou supprimée.

Le fait que le chiffre 1 réserve l'article 291 CP aura pour conséquence que la contravention à une décision d'expulsion sera punissable selon le code pénal suisse.

Article 84 Emploi d'étrangers n'ayant pas d'autorisation Cette disposition permettra de lutter plus efficacement contre le marché noir du travail. Le 1er alinéa vise les intermédiaires, c'est-à-dire les personnes qui prêtent leur concours à l'engagement d'étrangers dépourvus d'autorisation en facilitant leur entrée illégale ou leur séjour illégal, en contribuant à préparer cette entrée ou ce séjour, ou en leur procurant un emploi.

Les 2e et 3e alinéas concernent les employeurs. Compte tenu du fait que l'engagement de travailleurs étrangers dépourvus d'autorisation est un facteur de désorganisation du marché du travail et la source de sérieux préjudices pour ces travailleurs, il importe qu'il ne soit pas traité comme une contravention de peu de gravité. Pour cette raison, le montant minimum de l'amende est fixé à 500 francs. En cas de récidive, une peine privative de liberté sera prononcée en sus de l'amende. Cette aggravation des dispositions pénales est conforme à l'article 6 de la Convention n° 143 de TOIT sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l'égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants; cet article exige en effet que des dispositions soient notamment prises aux fins de lutter contre l'emploi illégal de travailleurs migrants par des sanctions administratives, civiles et pénales allant jusqu'à l'emprisonnement, Article 85 Autres infractions Sont aussi considérées comme infractions toutes les autres
contraventions à la législation sur les étrangers. Il s'agit là d'une clause générale qui complète les dispositions pénales applicables en cette matière.

La réserve de l'article 292 CP en cas d'insoumission à une décision particulière de l'autorité, prévue au 3e alinéa, trouvera notamment application lorsque des membres d'une association refuseront de donner des renseignements ou donneront des renseignements non véridiques en violation de l'obligation prévue à l'article 48, 4e alinéa.

Article 86 Poursuite pénale II convient de relever que la rupture de ban selon l'article 291 CP et l'insoumission à une décision de l'autorité selon l'article 292 CP relèvent de la juridiction fédérale lorsque la décision a été prise par une autorité fédérale.

232

Artide 87 Sanctions administratives L'article 87 reprend une disposition des ordonnances du Conseil fédéral limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative. Son contenu tient compte du statut juridique que la loi, dont le projet vous est soumis, accorde aux étrangers. Cet article prend aussi en considération les dispositions de la Convention n° 143 de TOIT sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l'égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants.

210

Dispositions finales (art. 88 à 91)

Selon l'article 25, 2e alinéa, LSEE, le Conseil fédéral peut édicter, sur l'établissement, des dispositions dérogeant aux prescriptions de la loi pour les ressortissants d'Etat qui traitent les ressortissants suisses d'une manière moins favorable que la Suisse ne traite les leurs. Le projet renonce à cette disposition. En effet, les étrangers ne peuvent être rendus responsables du fait que leur pays d'origine applique aux Suisses un traitement moins favorable. En outre, une différence de traitement de cette nature ne serait pas compatible avec la conception du projet de loi, qui s'inspire du principe de l'égalité juridique entre étrangers de nationalité différente. A cet égard, il a été tenu compte des remarques faites lors de la procédure de consultation.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

31

Conséquences financières pour la Confédération, les cantons et les communes

311

Les émoluments perçus actuellement par les autorités fédérales pour la délivrance des visas, l'approbation des autorisations accordées par les cantons et les mesures d'éloignement prononcées par elles seront maintenus dans le régime d'application de la nouvelle loi. S'y ajouteront les émoluments pour les décisions préalables prises selon l'article 24 par l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail, ainsi que, pour les approbations par cette autorité, conformément à l'article 69, des décisions préalables des offices cantonaux du travail. Les recettes supplémentaires qui en résulteront seront de l'ordre de 60 000 francs par année, si l'on table sur les nouvelles entrées de travailleurs étrangers enregistrées en 1977 et sur le tarif en vigueur pour les décisions similaires prises par les autorités de police des étrangers.

L'établissement et la diffusion de la documentation prévue au 2e alinéa de l'article 45 entraîneront des charges financières pour la Confédération dans la mesure où les frais qui en découleront ne seront pas mis à la charge des employeurs selon le 4e alinéa de cet article. Cette éventualité doit être retenue dès lors qu'il importera, au moment de l'entrée en vigueur de la loi, de fournir aux étrangers séjournant depuis peu de temps en Suisse et ayant encore des difficultés d'adaptation, notamment en raison de la méconnaissance de nos langues, une information identique à celle qui est prévue pour les nouveaux travailleurs étrangers. Il s'agira d'une opération unique, limitée aux étrangers 233

qui séjournent en Suisse depuis moins de cinq ans. Son coût sera de l'ordre de 100 000 francs. Cette dépense sera en partie compensée par les économies que permettra de réaliser la suppression des feuilles d'information éditées par plusieurs autorités fédérales, dont l'impression reviendrait, selon les coûts actuels, à quelque 30 000 francs.

Si le Conseil fédéral fait usage de la faculté d'instituer la commission d'experts prévue à l'article 47, celle-ci remplacera l'actuelle commission fédérale consultative pour le problème des étrangers. Etant donné que la composition de la commission d'experts serait plus restreinte que celle de la commission existante, les dépenses qui en résulteraient seraient réduites d'autant.

Les frais d'assistance et les frais causés à la Confédération par le départ de Suisse, ainsi que les frais d'internement, se sont élevés au total à 163 000 francs en 1977. Selon le projet de loi, ils seront répartis de manière différente entre la Confédération et les cantons, mais sans que les montants à leur charge ne subissent de modification sensible. L'abrogation de l'arrêté fédéral du 15 juin 1909 (RS 142.291) mettant à la charge de la Confédération les frais de renvoi d'étrangers indigents, en vertu duquel la Confédération rembourse aux cantons les frais de transport d'étrangers indigents renvoyés à la frontière par mesure de police, allégera ses dépenses. D'autre part, la Confédération assumera entièrement les frais d'assistance et les frais causés par le départ de Suisse des étrangers dans les conditions prévues à l'article 59,1er alinéa, lettres a et b. Par ailleurs, la suppression des internements sous forme de placements libres (art. 4, 1er al., let. c, OCF du 14 août 1968 sur l'internement des étrangers; RS 142.281) aura également pour effet d'alléger dans une certaine mesure la charge financière assumée par la Confédération. En revanche, la réglementation selon laquelle la Confédération supportera les frais occasionnés par le départ de Suisse des internés démunis de ressources dans les conditions prévues à l'article 62, 2e alinéa, lettre b, entraînera un léger accroissement des dépenses.

Dans l'ensemble, la Confédération n'assumera guère de nouvelles charges. Les dépenses liées au projet de loi n'ont en conséquence pas été mentionnées dans le plan financier revisé du 9 février 1977 (FF 79771 908).

312

Les émoluments actuellement perçus par les cantons pour la délivrance des autorisations et les mesures d'éloignement prononcées par eux seront également maintenus dans le cadre de l'application de la nouvelle loi. Les décisions préalables prises par les offices cantonaux du travail en vertu de l'article 24 entraîneront aussi le prélèvement d'émoluments. Les recettes supplémentaires qui en résulteront pour les cantons s'élèveront à environ 1 700 000 francs par an si l'on table aussi sur les nouvelles entrées de travailleurs étrangers enregistrées en 1977 et sur le tarif en vigueur pour les décisions similaires prises par les autorités de police des étrangers.

La réduction du délai pendant lequel l'étranger qui réside en Suisse peut être rapatrié (art. 57) entraînera un certain accroissement des charges financières des cantons. L'ampleur de ces frais d'assistance supplémentaires est toutefois difficile à estimer car il n'est pas possible de prévoir l'évolution qui se poursuivra 234

dans ce domaine. Il y a Heu de relever cependant que, maintenant déjà, les cantons prennent en charge les frais d'assistance en faveur d'étrangers.

313

Les communes continueront à recevoir de la Confédération une indemnité pour les annonces qu'elles sont tenues de faire au registre central des étrangers. Pour le reste, la nouvelle loi n'aura pas de conséquences financières pour elles.

32 321

Effets sur l'état du personnel

L'exécution de la nouvelle loi n'exigera pas d'augmentation du personnel de la Confédération. Les tâches nouvelles, qui seront assumées pour l'essentiel par l'Office fédéral des étrangers en collaboration, le cas échéant, avec la commission d'experts prévue à l'article 47, pourront être menées à chef sans augmentation de l'effectif actuel du personnel de cet office et de celui du secrétariat delà Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers. Le surcroît de travail auquel devraient faire face les autres offices fédéraux n'aura également pas d'effets sur l'état de leur personnel.

322 Le surcroît de travail dû à la diversité des tâches qui seront assumées par les cantons et, le cas échéant, par les communes, sera compensé par une diminution du volume de travail due au fait que l'immigration n'aura plus, à l'avenir, l'ampleur qu'elle a connue antérieurement.

33

Charges que l'exécution de la loi imposerait aux cantons et aux communes

L'exécution de la législation sur les étrangers par les cantons et, le cas échéant, par les communes, pourra être assurée par les services administratifs existants.

34

Grandes lignes de la politique gouvernementale

Nous avons annoncé la revision de la LSEE dans les Grandes lignes de la politique gouvernementale pendant la législature 1975-1979 du 28 janvier 1976 (FF 7976 1413; cf. ch, 351).

4

Constitutionnalité

Les dispositions du projet de loi se fondent sur les articles 69ter et 70 de la constitution (cf. ch. 13, en particulier ch. 133).

Selon l'article 69ter, la Confédération a le droit de légiférer sur l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers. Il s'agit d'une compétence concurrente en matière législative. Le projet de loi épuise en principe cette compétence et respecte la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons.

24766

235

Loi sur les étrangers (LEtr)

Projet

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 69ter et 70 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 19 juin 19781', arrête: Chapitre premier: Dispositions générales Art. 1 But et objet La présente loi: a. Règle l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers; b. Crée les bases juridiques permettant d'obtenir un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante, compte tenu des intérêts politiques, économiques, démographiques, sociaux, culturels et scientifiques du pays; c. Assure aux étrangers un statut juridique propre à faciliter, selon la durée de leur résidence, leur intégration dans la communauté nationale; d. Accorde aux étrangers une protection juridique garantissant leur statut.

Art. 2 Champ d'application 1 Est réputé étranger toute personne qui n'est pas de nationalité suisse.

a La présente loi s'applique aux réfugiés et aux apatrides dans la mesure où leur admission et leur statut juridique ne sont pas régis par d'autres dispositions du droit fédéral.

Art. 3 Sauvegarde des droits fondamentaux En définissant le statut juridique des étrangers, il importe de sauvegarder les droits fondamentaux dont jouissent les étrangers en vertu du droit constitutionnel suisse et du droit international.

Chapitre 2: Entrée et sortie Art. 4 Pièces de légitimation et visas 1 Pour entrer en Suisse, l'étranger doit être porteur d'un passeport national valable ainsi que d'un visa suisse en cours de validité.

D FF 1978 II165

236

Loi sur les étrangers 3

Le Département fédéral de justice et police détermine les exceptions.

Le Conseil fédéral peut, de son propre chef, conclure des accords internationaux sur la suppression, dans le mouvement des personnes, de l'obligation d'être en possession d'un passeport ou d'un visa.

3

Art. 5

Assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour

1

Outre les pièces de légitimation requises, l'étranger qui veut prendre résidence ou fréquenter une école, ou celui qui veut exercer une activité lucrative et dont le séjour est soumis à autorisation a besoin, pour entrer en Suisse, d'une assurance valable d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour. Lorsque l'étranger est soumis à l'obligation de requérir le visa, celui-ci tient lieu d'assurance.

2

Le Département fédéral de justice et police détermine les exceptions.

Art. 6 Contrôle-frontière 1 L'étranger est soumis au contrôle-frontière lors de son entrée en Suisse et de sa sortie de Suisse.

2

Les organes chargés du contrôle à la frontière n'autorisent pas à entrer en Suisse l'étranger : a. Qui ne possède pas les documents requis pour l'entrée en Suisse; b. Qui est sous le coup d'une interdiction d'entrée ou d'une expulsion administrative ou judiciaire; c. Dont la sortie de Suisse n'est pas assurée; d. Auquel les autorités fédérales refusent l'autorisation d'entrer en Suisse pour des raisons de sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse, d'ordre public ou de santé publique.

Art. 7

Organes chargés du contrôle à la frontière

1

Les cantons frontière assurent le contrôle des personnes à la frontière.

A la demande des cantons frontière, le Conseil fédéral peut charger l'administration des douanes de tâches relatives au contrôle des personnes à la frontière si le service de garde-frontière et le service de douane le permettent.

2

Art. 8

Points de passage

1

Pour l'entrée en Suisse et la sortie de Suisse, les étrangers doivent utiliser les routes douanières, les aérodromes et les débarcadères douaniers désignés à cet effet par la Direction générale des douanes, ainsi que les lignes de chemin de fer servant au trafic public.

2

Le Conseil fédéral détermine les exceptions après avoir entendu les cantons frontière.

237

Loi sur les étrangers Art. 9 Petit trafic frontalier Le Conseil fédéral règle l'entrée et la sortie des étrangers dans le petit trafic frontalier et détermine les zones frontalières. Après avoir entendu les cantons frontière, il peut conclure de son propre chef des accords internationaux en la matière.

Art. 10 Documents de voyage pour étrangers sans papiers et apatrides 1 Des documents de voyage peuvent être établis en faveur des étrangers dépourvus de pièce de légitimation nationale valable.

2 Ont droit à la délivrance d'un document de voyage: a. Les réfugiés et les apatrides reconnus comme tels par la Suisse; b. Les étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement.

3 Le Conseil fédéral établit les types de documents de voyage, règle leur délivrance et leur retrait et fixe les conditions dans lesquelles leurs titulaires peuvent rentrer en Suisse.

Chapitre 3: Séjour, établissement et réglementation applicable aux frontaliers Section 1 : Régime de l'autorisation et procédure d'autorisation Art. 11 Principe 1 Pour résider en Suisse, l'étranger doit être en possession d'une autorisation. Il est dispensé de cette obligation jusqu'à l'expiration du délai dans lequel il doit déclarer son arrivée.

2 L'étranger qui veut exercer en Suisse une activité lucrative en qualité de frontalier a également besoin d'une autorisation.

3 Les dispositions des traités internationaux auxquels la Suisse est partie sont réservées.

Art. 12 Déclaration d'arrivée 1 L'étranger doit, aux fins de requérir une autorisation, déclarer son arrivée dans les trois mois qui suivent son entrée en Suisse à l'autorité compétente à raison de son lieu de résidence.

2 L'étranger qui veut prendre résidence, fréquenter une école ou exercer une activité lucrative en Suisse doit déclarer son arrivée dans les huit jours.

3 L'étranger qui veut exercer une activité lucrative en Suisse moins de huit jours dans l'espace de trois mois doit déclarer son arrivée avant de commencer à travailler.

4 Le Conseil fédéral peut, dans certains cas, prolonger les délais prévus aux 2e et 3e alinéas.

238

Loi sur les étrangers 5

Lorsque des circonstances spéciales l'exigent, le Conseil fédéral peut réduire les délais s'appliquant à la déclaration d'arrivée de tous les étrangers ou de certaines catégories d'entre eux.

Art. 13 Obligation de produire une pièce de légitimation 1 En déclarant son arrivée, l'étranger doit produire une pièce de légitimation.

2 Le Conseil fédéral désigne les pièces de légitimation reconnues.

Art. 14 Obligation de renseigner 1 L'étranger et son employeur doivent renseigner de manière véridique l'autorité sur tout ce qui est de nature à déterminer sa décision quant à la présence en Suisse de l'étranger.

2 Les autorités de police et les autorités judiciaires des cantons sont tenues de signaler aux offices cantonaux des étrangers les faits qui s'opposent à la présence d'un étranger.

Art. 15 Procédure relative à l'autorisation pour frontalier Les cantons règlent la procédure de délivrance d'autorisations aux travailleurs frontaliers.

Section 2: Autorisations Art. 16 Genres d'autorisations et livret 1 Les autorisations destinées aux étrangers sont les suivantes: a. L'autorisation saisonnière; b. L'autorisation de séjour; c. L'autorisation d'établissement; d. L'autorisation pour frontalier.

2 L'étranger ne peut avoir en même temps une autorisation dans plusieurs cantons.

3 L'étranger reçoit un livret pour étranger où est consignée l'autorisation qui lui a été délivrée. Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

Art. 17 Autorisation saisonnière 1 L'autorisation saisonnière est destinée à l'étranger qui exerce une activité dans une branche de l'économie et dans une entreprise à caractère saisonnier au sein de laquelle il occupe un emploi saisonnier.

2 L'autorisation saisonnière n'est accordée que pour la durée de la saison; elle n'est délivrée que pour neuf mois au plus et ne peut être prolongée au-delà de ce 239

Loi sur les étrangers terme. Le travailleur saisonnier doit séjourner au moins trois mois à l'étranger dans l'espace de douze mois.

3 L'autorisation saisonnière peut être assortie de charges.

4

Le Département fédéral de l'économie publique établit la liste des branches à caractère saisonnier.

5

Les cantons établissent, conformément aux instructions du Département fédéral de l'économie publique, la liste des entreprises à caractère saisonnier sises sur leur territoire. L'Office fédéral des étrangers peut, après entente avec l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail, faire déterminer en tout temps si une entreprise a un caractère saisonnier.

Art 18 Autorisation de séjour 1

L'autorisation de séjour est destinée à l'étranger qui séjourne temporairement en Suisse ou à celui qui, désirant y établir sa résidence, n'est pas encore admis à y séjourner durablement.

2 Elle règle, le cas échéant, l'exercice d'une activité lucrative.

3

L'autorisation de séjour est délivrée pour une durée limitée, la première fois pour une année au plus, 4

Elle peut être assortie de charges.

5

L'autorité cantonale peut exiger de l'étranger sans pièce de légitimation nationale reconnue et valable, le dépôt de sûretés en garantie de prétentions de droit public; cette disposition ne s'applique pas au réfugié ou à l'apatride reconnu comme tel par la Suisse.

Art. 19 Autorisation d'établissement 1 L'autorisation d'établissement est destinée à l'étranger admis à s'établir à demeure en Suisse, 2

L'étranger en possession d'une autorisation d'établissement n'est soumis, quant à son activité lucrative, à aucune restriction fondée sur la présente loi.

3 L'autorisation d'établissement est de durée indéterminée.

4 Elle ne peut être assortie d'aucune charge.

Art. 20 Autorisation pour frontalier 1 L'autorisation pour frontalier est destinée à l'étranger domicilié dans la zone frontalière du pays voisin, qui exerce une activité lucrative dans la zone frontalière suisse et qui regagne quotidiennement son domicile.

2 Elle règle l'exercice d'une activité lucrative.

240

Loi sur les étrangers 3

Elle est de durée limitée.

Elle peut être assortie de charges.

5 Le Conseil fédéral peut soumettre la délivrance de l'autorisation pour frontalier à la condition que le requérant réside depuis plusieurs mois dans la zone frontalière du pays voisin.

4

Section 3: Activité lucrative et rôle du service public de l'emploi Art. 21 Activité lucrative 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier ne peut exercer une activité lucrative que dans les limites fixées par l'autorisation.

2 L'employeur ne peut occuper un étranger que si celui-ci est en possession de l'autorisation requise.

Art. 22 Changement de place et de profession 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier ne peut changer de place ou de profession qu'avec l'autorisation de l'office cantonal des étrangers ; il en est de même s'il entend passer d'une activité lucrative salariée à une activité lucrative indépendante.

2 Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

Art. 23 Activité lucrative accessoire L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier ne peut exercer à titre accessoire une activité salariée régulière ou une activité lucrative indépendante qu'avec l'autorisation de l'office cantonal des étrangers.

Art. 24 Décision préalable du service public de l'emploi 1 Avant que l'étranger n'obtienne de l'office cantonal des étrangers une autorisation initiale lui permettant d'exercer une activité lucrative, le service public de l'emploi décide, compte tenu du cas: a. Si la situation économique et la situation du marché du travail justifient l'engagement d'un étranger; b. Si la situation économique et la situation du marché du travail permettent qu'une maison établie à l'étranger fasse exécuter des travaux et fournisse des prestations de service en Suisse par son personnel étranger; c. Si l'exercice d'une activité lucrative indépendante se justifie du point de vue économique.

241

Loi sur les étrangers 2

Le service public de l'emploi peut faire dépendre sa décision de l'existence de conditions.

3

Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

4

La décision préalable lie l'office des étrangers, à moins que des considérations autres que celles qui ont trait à la situation économique ou au marché du travail ne justifient une décision différente.

6

La décision préalable cesse d'être valable si l'autorisation correspondante n'est pas demandée dans un délai de trois mois.

6

Les cantons règlent la procédure. Ils peuvent instituer des commissions appelées à exprimer un avis d'ordre économique dans les cas visés au 1er alinéa.

Art. 25

Avis du service public de l'emploi

1

L'office cantonal des étrangers demande l'avis de l'office cantonal du travail avant : a. D'autoriser un étranger à changer de place ou de profession; b. De renouveler l'autorisation lui permettant d'exercer une activité lucrative; c. De l'autoriser à exercer à titre accessoire une activité salariée régulière ou une activité lucrative indépendante; d. De délivrer l'assentiment pour l'exercice d'une activité lucrative (art. 28).

2 Cet avis n'est pas nécessaire lorsque l'étranger peut faire valoir un droit. Le Département fédéral de l'économie publique peut prévoir d'autres exceptions.

3 Les cas présentant un intérêt de caractère national doivent être soumis pour avis à l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail. Le Département fédéral de l'économie publique détermine ces cas.

4 L'office cantonal des étrangers est tenu de se conformer à l'avis du service public de l'emploi, à moins que des considérations autres que celles qui ont trait à la situation économique ou au marché du travail ne justifient une décision différente.

Art. 26

Contrat de travail

1

Un contrat de travail doit être joint à la demande d'autorisation initiale. Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

2 Le contrat de travail contiendra, outre les clauses usuelles, des renseignements sur les principaux droits et obligations de l'étranger en matière de droit du travail et de sécurité sociale.

3 L'employeur est tenu d'utiliser les formules de contrat de travail prescrites par le Département fédéral de l'économie publique.

4

Le Département fédéral de l'économie publique établit les formules après avoir entendu les cantons et les organisations professionnelles.

242

Loi sur les étrangers Section 4: Validité des autorisations à raison du territoire Art 27 Principes 1 Les autorisations saisonnières, de séjour et d'établissement sont valables pour le canton qui les a délivrées ; leur validité s'étend à l'ensemble du territoire de ce canton.

2 L'autorisation pour frontalier est valable pour la zone frontalière du canton qui l'a délivrée.

Art. 28 Séjour temporaire et activité lucrative dans un autre canton 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement, qui veut résider temporairement dans un autre canton ou y exercer une activité lucrative sans y établir sa résidence, doit requérir préalablement l'assentiment de ce canton.

2 L'étranger au bénéfice d'une autorisation pour frontalier qui veut exercer une activité lucrative temporaire dans la zone frontalière d'un autre canton doit requérir préalablement l'assentiment de ce canton.

3 Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

Art. 29 Changement de canton 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement, qui veut transférer sa résidence dans un autre canton, doit obtenir préalablement une nouvelle autorisation dans ce canton.

2 L'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou d'établissement, qui séjourne dans un autre canton pour y fréquenter une école, y recevoir une formation ou y suivre une cure, n'est pas réputé y avoir transféré sa résidence.

Chapitre 4: Statut juridique Section 1: Principe régissant la délivrance et ^renouvellement des autorisations

Art. 30 L'autorité statue sur la délivrance et le renouvellement des autorisations dans le cadre de la constitution et de la législation, ainsi que des traités internationaux auxquels la Suisse est partie.

Section 2: Admission Art. 31 Critères s'appliquant à l'admission En statuant sur l'admission d'un étranger, l'autorité tient compte des exigences d'ordre politique, de la capacité d'accueil du pays, de la situation économique et 243

Loi sur les étrangers de la situation du marché du travail, des besoins de l'enseignement, de la science et de la recherche, ainsi que de l'aptitude de l'étranger à s'intégrer et de ses attaches avec la Suisse.

Art. 32 Mesures limitatives 1 Le Conseil fédéral prend les mesures propres à réaliser un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante. A cet effet, il peut limiter le nombre des autorisations de séjour initiales à délivrer aux étrangers exerçant une activité lucrative.

2 II limite le nombre des autorisations saisonnières quand la transformation d'autorisations saisonnières en autorisations de séjour est de nature à empêcher qu'un rapport équilibré s'établisse entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante.

3 II peut limiter le nombre des autorisations frontalières lorsque l'admission en nombre illimité de travailleurs frontaliers est de nature à perturber gravement les structures économiques et sociales dans les régions frontalières du pays.

4 II peut renoncer à soumettre certaines catégories d'étrangers aux mesures limitatives.

5 II fixe les contingents d'autorisations après avoir entendu les cantons.

0 Le Conseil fédéral répartit les contingents entre les cantons. H peut édicter des prescriptions sur l'attribution d'unités prélevées sur ces contingents.

7 Aux fins de sauvegarder les intérêts généraux du pays ou d'améliorer la structure de l'économie et du marché du travail, le Conseil fédéral peut fixer des contingents qu'il met à la disposition de la Confédération.

Art. 33 Priorité accordée à la main-d'oeuvre disponible sur le marché indigène du travail 1 La décision préalable du service public de l'emploi selon l'article 24,1er alinéa, lettres a et b, ne peut être favorable que si l'employeur ne trouve aucun ressortissant suisse ou aucun étranger admis à travailler en Suisse qui soit disposé et apte à occuper la place offerte aux conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession.

2 Le Conseil fédéral peut déroger à cette prescription pour faciliter, dans l'intérêt du pays, les échanges avec l'étranger dans les domaines de l'économie, de la science et des activités culturelles.

Art. 34 Conditions de rémunération et de travail L'autorisation
saisonnière et l'autorisation initiale de séjour ou pour frontalier, ne sont accordées à l'étranger que s'il est mis au bénéfice des conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession.

244

Loi sur les étrangers Art. 35 Logement L'autorisation saisonnière et l'autorisation de séjour initiale ne sont accordées que si l'étranger dispose d'un logement convenable.

Section 3: Droit de présence Art. 36

Transformation de l'autorisation saisonnière en autorisation de séjour 1 L'étranger en possession d'une autorisation saisonnière a, sur demande, droit à l'autorisation de séjour lorsqu'il a travaillé en Suisse 35 mois en tout durant quatre années consécutives.

2

Le Conseil fédéral peut réduire le nombre d'années et de mois ouvrant le droit à la transformation de l'autorisation lorsque l'établissement d'un rapport équilibré entre le chiffre de la population suisse et celui de la population étrangère résidante n'en est pas affecté.

3

Les mois de travail que l'étranger a accomplis en Suisse en qualité de saisonnier et qui lui ont ouvert le droit à la transformation de son autorisation comptent pour le calcul du temps permettant d'être mis au bénéfice d'avantages en matière de séjour et d'établissement.

Art. 37

Renouvellement de l'autorisation de séjour

1

L'autorisation de séjour accordée à l'étranger qui réside en Suisse depuis moins de cinq ans peut être renouvelée lorsqu'il n'a pas contrevenu à l'ordre public. S'il exerce une activité lucrative, le renouvellement de son autorisation dépend, en outre, de la situation économique ou de la situation du marché du travail. Le Conseil fédéral détermine les exceptions.

2 L'étranger qui justifie d'une résidence régulière et ininterrompue de cinq ans ou plus en Suisse a droit au renouvellement de son autorisation de séjour lorsqu'aucun motif de révocation ne s'y oppose.

3 Le Conseil fédéral peut restreindre ce droit en cas de grave fléchissement de l'activité affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques.

4 L'autorisation de séjour accordée à l'étranger dont la présence en Suisse a, par nature, un caractère temporaire, ne peut être renouvelée qu'aux conditions prévues au 1er alinéa, quelle que soit la durée de son séjour. Lorsque le but de son séjour doit être considéré comme atteint, l'étranger est tenu de quitter la Suisse; les autorités peuvent faire des exceptions dans des cas particuliers.

5

L'autorisation de séjour accordée à l'étranger qui exerce une activité lucrative n'est renouvelée que s'il bénéficie des conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession.

17 Feuille fédérale. 130' année. Vol. il

245

Loi sur les étrangers Art. 38 Droit à l'autorisation d'établissement 1 L'étranger qui réside régulièrement en Suisse de manière ininterrompue depuis dix ans a droit à l'autorisation d'établissement lorsqu'aucun motif d'expulsion ne s'y oppose. Le Département fédéral de justice et police peut réduire ou suprimer ce délai lorsque l'étranger a des attaches particulières avec la Suisse, notamment en raison de liens de parenté ou de séjours antérieurs, ou lorsqu'un régime de réciprocité, l'intérêt national ou des considérations d'ordre humanitaire le justifient.

2 Les séjours ayant un caractère temporaire ne sont pas pris en considération pour la délivrance de l'autorisation d'établissement.

3 L'époux étranger et les enfants mineurs étrangers d'une Suissesse ont droit à l'autorisation d'établissement quelle que soit la durée de leur résidence en Suisse.

4 L'étranger en possession d'une autorisation d'établissement qui transfère son domicile dans un autre canton a droit à l'autorisation d'établissement dans ce canton, lorsqu'aucun motif d'expulsion ne s'y oppose, Art. 39 Renouvellement de l'autorisation pour frontalier 1 L'autorisation pour frontalier accordée à un étranger peut être renouvelée lorsque la situation de l'emploi dans sa profession et la région de son lieu de travail le pennet et qu'il n'a pas contrevenu à l'ordre public.

2 Le frontalier qui exerce depuis cinq ans ou plus une activité salariée de manière ininterrompue a droit au renouvellement de son autorisation lorsqu'aucun motif de révocation ne s'y oppose.

3 Le Conseil fédéral peut restreindre ce droit en cas de grave perturbation du marché du travail.

4 L'autorisation pour frontalier n'est renouvelée que si l'étranger bénéficie des conditions de rémunération et de travail usuelles dans la localité et la profession.

Art. 40 Droit à l'assentiment d'un autre canton pour un séjour temporaire ou l'exercice d'une activité lucrative Ont droit à l'assentiment selon l'article 28 : a. L'étranger au bénéfice d'une autorisation d'établissement; b. L'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier, qui peut prétendre le renouvellement de son autorisation.

Section 4: Regroupement familial Art. 41 Conditions dont dépend le regroupement familial 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation d'établissement peut en tout temps faire venir en Suisse le conjoint et les enfants mineurs s'il dispose pour sa famille d'un logement convenable.

246

Loi sur les étrangers 2 L'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour sera autorisé à faire venir en Suisse le conjoint et les enfants mineurs au plus tard douze mois après son entrée en Suisse: a. Lorsque son séjour et, le cas échéant, son activité lucrative peuvent être considérés comme suffisamment stables et durables; b. S'il dispose pour sa famille d'un logement convenable.

3 En cas de transformation de l'autorisation saisonnière en autorisation de séjour, le regroupement familial sera autorisé sans délai.

Art. 42 Statut des membres de la famille 1 En cas de regroupement familial, le conjoint et les enfants mineurs ont droit au même statut que le conjoint se trouvant déjà en Suisse, lorsqu'ils font ménage commun avec lui.

2 En cas de mariage entre étrangers, les conjoints et leurs enfants mineurs faisant ménage commun ont droit au même statut que celui des conjoints qui a le statut le plus favorable.

3 L'enfant dont la mère n'est pas mariée avec le père, bénéficie dès sa naissance du même statut que sa mère.

Section 5: Mobilité professionnelle Art. 43

Conditions auxquelles est subordonné le changement de place et de profession 1 Pendant la première année, l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier qui exerce une activité salariée et, pendant la saison, l'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, peuvent être autorisés à changer de place ou de profession lorsque : a. L'étranger en possession d'une autorisation de séjour ou pour frontalier a conclu un contrat de travail pour une brève durée ou qu'il ressort de la nature des rapports de travail que la durée de son engagement doit être brève; b. Le changement de place est compatible avec les obligations contractuelles qui lient le saisonnier à l'employeur, ainsi qu'avec les dispositions du droit suisse régissant le contrat de travail ; c. L'employeur et le travailleur ont résilié le contrat de travail d'un commun accord; d. L'étranger a reçu son congé pour des motifs qui ne sont pas inhérents à sa personne; e. Le contrat de travail a été résilié pour de justes motifs en vertu de l'article 337 du code des obligations1>.

D RS 220 247

Loi sur les étrangers 2

Après la première année, l'étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier, qui exerce une activité salariée a droit, sous réserve de l'article 87, à l'autorisation de changer de place ou de profession lorsque : a. Les rapports de travail ont régulièrement pris fin; b. L'étranger a résilié son contrat de travail pour de justes motifs en vertu de l'article 337 du code des obligations V.

3 Le Conseil fédéral peut restreindre le droit à l'autorisation de changer de place et de profession s'il s'agit: a. D'étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier depuis moins de cinq ans, lorsque le marché du travail subit des perturbations affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques ; b. D'étrangers au bénéfice d'une autorisation de séjour ou pour frontalier depuis cinq ans ou plus, lorsque l'activité accuse un grave fléchissement affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques.

4 En statuant sur le passage d'une activité salariée à une activité indépendante, l'autorité tient compte de la situation économique de la région et dans la branche.

Art. 44

Conditions auxquelles est subordonné l'exercice d'une activité lucrative accessoire 1 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier peut être autorisé à exercer à titre accessoire une activité salariée régulière lorsque la situation du marché du travail le permet.

2 Les étrangers qui sont au bénéfice d'une autorisation de séjour et dont la présence en Suisse n'a pas, par nature, un caractère temporaire, ainsi que les étrangers au bénéfice d'une autorisation pour frontalier ont droit à l'autorisation d'exercer à titre accessoire une activité salariée régulière s'ils sont en possession de leur autorisation depuis cinq ans ou plus. Le Conseil fédéral peut restreindre ce droit en cas de grave fléchissement de l'activité affectant l'ensemble du pays, certaines régions ou certaines branches économiques.

3 L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier ne peut être autorisé à exercer à titre accessoire une activité lucrative indépendante que si la situation économique de la région ou dans la branche le permet.

Section 6: Protection et intégration sociales Art. 45 Information 1 Les étrangers sont informés de manière adéquate sur les conditions de vie en Suisse et sur leur statut juridique.

» RS 220 248

Loi sur les étrangers 2

Le Département fédéral de justice et police fait en sorte que: a. Les étrangers ayant l'intention de prendre un emploi en Suisse soient renseignés sur les conditions de vie et de travail en Suisse qui sont de nature à déterminer leur décision d'émigrer; b. Les étrangers admis à travailler en Suisse soient renseignés à leur arrivée sur leur statut juridique ainsi que sur tout ce qui peut faciliter leur installation et leur adaptation.

3

II détermine les exceptions.

L'employeur peut être tenu de remettre aux étrangers qu'il engage la documentation établie conformément au 2e alinéa et de prendre à sa charge les frais causés par l'établissement de cette documentation.

4

Art. 46 Directives Le Conseil fédéral établit des directives à l'intention des cantons sur la protection sociale des étrangers et sur les mesures propres à assurer leur intégration sociale.

Art. 47

Commission d'experts

Le Conseil fédéral peut instituer une commission d'experts chargée : a. D'examiner, à la demande des autorités compétentes, des questions touchant la condition de l'étranger en Suisse ; b. De collaborer à l'information des étrangers (art. 45) et à l'établissement de directives (art. 46); c. De soutenir, en procédant à des études et en établissant des rapports, les efforts entrepris dans le domaine de la protection et de l'intégration sociales des étrangers par les autorités cantonales et les organisations intéressées, notamment par les communautés de travail s'occupant des problèmes qui se posent aux étrangers.

Section 7: Activité politique

Art. 48 1 L'étranger peut exercer une activité politique dans la mesure où il ne compromet pas la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ni la sûreté intérieure d'un canton.

2

La sûreté intérieure ou extérieure est réputée compromise quand la tranquillité et l'ordre, la formation de la volonté politique, les institutions démocratiques, la défense nationale, l'approvisionnement du pays, les relations avec l'étranger ou d'autres intérêts essentiels de la Confédération ou des cantons sont affectés de manière importante ou lorsqu'il faut s'attendre à ce qu'ils le soient.

249

Loi sur les étrangers 8

Lorsque l'étranger compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse et qu'une mesure d'interdiction d'entrée (art. 49), de renvoi (art. 52), d'expulsion (art. 53) ou d'internement (art, 60 à 62) ne peut être prise ou n'est pas adaptée aux circonstances, le Ministère public de la Confédération peut restreindre ou interdire son activité politique; cette compétence appartient à l'autorité cantonale compétente lorsque l'étranger compromet la sûreté intérieure du canton.

* Lorsque la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton le requiert, le Ministère public de la Confédération peut obliger les membres des associations qui ont une activité politique et dont il y a lieu d'admettre qu'elles se composent en majorité d'étrangers, de donner des renseignements véridiques sur l'activité de l'association, sur le nombre et l'identité de ses membres, ainsi que sur la provenance et l'utilisation des fonds dont eue dispose.

Chapitre 5: Interdiction d'entrée, fin du droit de présence et internement Art. 49 1

Interdiction d'entrée

L'autorité fédérale compétente peut interdire l'entrée en Suisse: a. A l'étranger qui, par sa présence, compromettrait la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse; b. A l'étranger dont la présence constituerait une menace pour l'ordre public.

2

L'interdiction d'entrée peut être prononcée pour une durée déterminée ou indéterminée.

3

L'étranger qui est sous le coup d'une interdiction d'entrée ne peut pénétrer en Suisse qu'avec l'autorisation de l'autorité qui a prononcé cette interdiction.

Art. 50

Caducité des autorisations

1

Les autorisations saisonnières et de séjour prennent fin: a. Lorsque l'étranger déclare son départ en vue du transfert de sa résidence à l'étranger ou lorsqu'il cesse effectivement de résider en Suisse; b. Lorsque l'étranger obtient une nouvelle autorisation dans un autre canton; c. Lorsque leur durée de validité arrive à leur terme sans qu'elles aient été prolongées ; d. Par suite d'expulsion; e. Par suite de rapatriement.

2

L'autorisation d'établissement prend fin: a. Lorsque l'étranger déclare son départ en vue du tranfert de sa résidence à l'étranger ou lorsqu'il cesse effectivement de résider en Suisse; b. Lorsque l'étranger obtient une nouvelle autorisation dans un autre canton; c. Par suite d'expulsion; d. Par suite de rapatriement.

250

Loi sur les étrangers 3

L'autorisation pour frontalier prend fin: a. Lorsque l'étranger obtient une nouvelle autorisation dans un autre canton; b. Lorsque sa durée de validité arrive à son terme sans qu'elle ait été prolongée; c. Par suite d'expulsion.

Art. 51 Révocation du visa et des autorisations 1 L'autorité fédérale ou cantonale compétente peut révoquer le visa ou l'assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour: a. Lorsque l'étranger a obtenu le visa ou l'assurance d'autorisation en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels ; b. Si l'étranger devait, par sa présence, compromettre la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse; c. Si la présence en Suisse de l'étranger devait constituer une menace pour l'ordre public.

2 L'autorité cantonale compétente peut révoquer l'autorisation saisonnière, de séjour ou pour frontalier: a. Lorsque l'étranger l'a obtenue en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels ; b. Lorsqu'il a contrevenu à l'ordre public; c. Lorsqu'il n'assume pas une charge attachée à l'autorisation.

3 L'autorité cantonale compétente ne peut révoquer l'autorisation de séjour ou pour frontalier accordée à l'étranger qui peut faire valoir un droit au renouvellement de son autorisation que: a. Lorsque l'étranger l'a obtenue en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels; b. Lorsqu'il y a un motif d'expulsion; c. Lorsque l'étranger a contrevenu gravement ou de manière répétée à des prescriptions de la législation sur les étrangers ; d. Lorsqu'il n'assume pas une charge attachée à l'autorisation.

4 L'autorité cantonale compétente peut révoquer l'autorisation d'établissement: a. Lorsque l'étranger l'a obtenue en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels ; b. Lorsqu'il l'a obtenue par mariage (art. 38, 3e al. ; art. 42, 2e al.) et que celuici a été contracté sans intention de créer une communauté conjugale.

5 L'autorité fédérale ou cantonale compétente peut révoquer la décision préalable selon l'article 24 lorsque le requérant l'a obtenue en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels.

8 L'Office fédéral des étrangers peut révoquer l'approbation d'une autorisation cantonale (art, 68, 2e al.) dans les mêmes conditions que l'office cantonal des étrangers peut révoquer l'autorisation.

7 L'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail peut révoquer l'approbation de la décision préalable de l'office cantonal du travail (art. 69, 251

Loi sur les étrangers 1er al.) dans les mêmes conditions que celui-ci peut révoquer la décision préalable.

Art. 52 Renvoi 1 L'étranger dont le séjour est soumis à autorisation peut être tenu en tout temps de quitter la Suisse s'il n'est pas au bénéfice d'une autorisation.

2 L'étranger dont le séjour n'est pas soumis à autorisation peut être tenu de quitter la Suisse lorsque, par sa présence, il compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton ou que sa présence constitue une menace pour l'ordre public.

3 L'étranger est tenu de quitter le territoire du canton lorsqu'une autorisation lui est refusée ou lorsqu'elle est révoquée ou n'est pas renouvelée. L'autorité cantonale compétente lui impartit un délai de départ.

4 L'Office fédéral des étrangers peut impartir à l'étranger renvoyé d'un canton un délai pour quitter la Suisse.

Art. 53 Expulsion 1 Le Département fédéral de justice et police peut expulser de Suisse un étranger qui compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse; la compétence du Conseil fédéral est réservée s'il s'agit de décisions d'une importance particulière.

2 L'autorité cantonale compétente ne peut expulser de Suisse un étranger que: a. S'il compromet la sûreté intérieure du canton ; b. S'il a été condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement ; c. S'il a contrevenu gravement et de manière répétée à des prescriptions légales.

3 L'expulsion peut être prononcée pour une durée déterminée ou indéterminée.

4 L'étranger est tenu de quitter la Suisse avant l'expiration du délai de départ indiqué dans la décision d'expulsion et ne peut pénétrer en Suisse qu'avec l'autorisation de l'autorité qui a prononcé l'expulsion.

Art. 54 Restrictions à l'expulsion 1 L'autorité cantonale compétente renonce à prononcer l'expulsion selon l'article 53, 2e alinéa, lettre b, lorsque le juge: a. A déjà prononcé l'expulsion; b. A expressément renoncé à prendre cette mesure à l'égard d'un étranger qui bénéficiait d'une autorisation de séjour ou d'établissement au moment de sa condamnation.

3 L'étranger condamné par le juge à être expulsé, qui est libéré conditionnellement et dont l'expulsion est différée à titre d'essai, reçoit une autorisation de séjour pour la période d'essai, s'il bénéficiait d'une autorisation de séjour ou d'établissement au moment de sa condamnation.

252

Loi sur les étrangers Art 55 Proportionnalité et avertissement 1 L'autorité qui statue sur l'interdiction d'entrée, la révocation, le renvoi et l'expulsion tient notamment compte de la gravité de la faute commise par l'étranger, de la durée de son séjour et du préjudice que cette mesure pourrait lui faire subir, ainsi qu'à sa famile, en particulier lorsque sa femme est suisse.

2 Lorsqu'il n'est pas opportun de prendre une telle mesure en raison des circonstances, un avertissement pourra être adressé à l'étranger.

Art. 56 Exécution du renvoi et de l'expulsion 1 L'étranger qui ne donne pas suite à un ordre de départ est refoulé sur décision de l'autorité cantonale compétente.

2 S'il y a lieu de présumer qu'il a l'intention de se soustraire à cette mesure, l'étranger peut, sur décision d'une autorité judiciaire cantonale, être détenu pour une durée n'excédant pas 72 heures en vue de son refoulement; la décision de cette autorité est définitive.

Art. 57 Rapatriement 1 L'autorité cantonale compétente peut rapatrier l'étranger qui réside en Suisse depuis moins de dix ans lorsque lui-même ou une personne aux besoins de laquelle il est tenu de pourvoir tombe d'une manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique et que son retour dans son pays d'origine est possible et peut être exigé de lui.

2 Les dispositions des traités internationaux auxquels la Suisse est partie sont réservées.

3 Le conjoint et les enfants mineurs de l'étranger qui bénéficie de l'assistance publique peuvent être rapatriés lorsque l'ensemble des circonstances fait apparaître que cette mesure est opportune.

4 Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de rapatriement: a. Le conjoint étranger et les enfants mineurs étrangers d'une Suissesse; b. L'étrangère qui était suisse avant son mariage, son conjoint et leurs enfants mineurs étrangers.

Art. 58 Prise en charge de personnes à la frontière Le Conseil fédéral peut conclure de son propre chef des accords internationaux concernant la prise en charge de personnes à la frontière.

Art. 59 Frais d'assistance et frais causés par le départ de Suisse 1 La Confédération prend en charge: a. Les frais d'assistance et les frais causés par le départ de l'étranger dépourvu 253

Loi sur les étrangers de moyens suffisants lorsqu'il est entré en Suisse au bénéfice d'un visa délivré au mépris des prescriptions en vigueur, sans qu'il y ait eu faute de sa part.

b. Les frais causés par le départ de l'étranger dépourvu de moyens suffisants s'il est entré en Suisse illégalement.

3 L'employeur répond des frais quand l'étranger qui a été occupé sans y être autorisé, est dépourvu de moyens suffisants. Lorsqu'elle fait l'avance des frais, l'autorité peut se retourner contre lui.

Art. 60 Internement 1 Lorsqu'il n'est pas possible d'exécuter le renvoi ou l'expulsion, l'étranger peut être interné.

3 L'internement peut être prononcé pour une durée de six mois et être prolongé pour des périodes ne dépassant pas six mois. Sa durée ne doit pas excéder deux ans en tout.

3 L'internement doit être levé lorsque l'étranger peut quitter légalement la Suisse.

4 Lorsque l'internement n'est pas opportun ou n'est plus admissible, le canton qui a délivré en dernier lieu une autorisation à l'étranger ou dans lequel celui-ci séjournait sans autorisation en dernier lieu lui accorde une autorisation de séjour.

Art. 61 Exécution de l'internement 1 L'étranger est interné dans un home ou dans établissement ouvert, à moins qu'il ne soit indiqué, pour des raisons d'âge ou de maladie ou à cause d'autres circonstances spéciales, de lui assigner un lieu de résidence.

2 II ne peut être interné dans un établissement fermé que: a. Si, par sa présence, il compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton; b. Si sa présence en Suisse constitue une menace grave pour l'ordre public.

Art. 62 Frais d'internement 1 L'interné disposant de ressources supporte les frais de son internement; une garantie peut être exigée à cet effet.

2 Lorsque l'étranger est sans ressources, la Confédération prend en charge: a. Les frais d'internement; b. Les frais causés par le départ de Suisse, s'il peut être refoulé durant ou immédiatement après l'internement.

254

Loi sur les étrangers Chapitre 6: Autorités Art. 63 Office fédéral des étrangers 1 L'Office fédéral des étrangers assume toutes les tâches conférées à la Confédération par la présente loi, qui ne sont pas dévolues à une autre autorité fédérale.

8 II est notamment compétent pour: a. Prononcer l'interdiction d'entrée (art. 49, 1er al., let. b); b. Révoquer le visa et l'assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour (art. 51,1er al., let, a et c) dans les cas soumis à son approbation; c. Prononcer le renvoi (art. 52,1er et 2e al.) sous réserve de la compétence du Ministère public de la Confédération (art. 65, let. d).

Art. 64 Office fédéral de la police L'Office fédéral de la police est compétent pour: a. Etablir les documents de voyage pour les étrangers sans papiers et les apatrides (art. 10); b. Assurer l'exécution des accords relatifs à la prise en charge de personnes à la frontière (art. 58) ; c. Régler les frais d'assistance et les frais causés par le départ de Suisse à la charge de la Confédération (art. 59) ; d. Prononcer l'internement (art. 60 à 62) sous réserve de la compétence du Ministère public de la Confédération (art. 65, let. e).

Art. 65 Ministère public de la Confédération Lorsque, par sa présence, l'étranger compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse, le Ministère public de la Confédération est compétent pour: a. Refuser l'entrée en Suisse (art. 6, 2e al., let. d) ; b. Prononcer l'interdiction d'entrée (art. 49, 1er al., let. a); c. Révoquer le visa et l'assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour (art. 51, 1er al., let b); d. Prononcer le renvoi (art. 52, 1CI et 2e al.); e. Prononcer l'internement (art. 60 à 62).

Art. 66 Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail L'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail est compétent pour: a. Prendre des décisions préalables (art. 24) lorsqu'il s'agit d'attribuer des unités de contingents mis à la disposition de la Confédération (art. 32, 7e al.); b. Révoquer ces décisions préalables (art. 51, 5e al.); c. Révoquer l'approbation de la décision préalable de l'office cantonal du travail (art. 51, 7e al.); 255

Loi sur les étrangers d. Approuver les décisions préalables des offices cantonaux du travail (art. 69).

Art. 67 Autorités cantonales 1 Chaque canton désigne une autorité (office cantonal des étrangers) qui assume toutes les tâches conférées aux cantons par la présente loi, en tant que la législation fédérale ou cantonale ne les attribue pas à l'autorité cantonale dont relève le service de l'emploi (office cantonal du travail) ou à une autre autorité.

8 L'office cantonal des étrangers est notamment compétent pour : a. Révoquer le visa et l'assurance d'autorisation saisonnière ou d'autorisation de séjour (art. 51,1er al., let. a et c) dans les cas non soumis à l'approbation de l'Office fédéral des étrangers; b. Prononcer le renvoi (art. 52,1er et 2e al.), sous réserve de la compétence du Ministère public de la Confédération (art. 65, let. d).

3 L'office cantonal du travail est notamment compétent pour: a. Prendre des décisions préalables (art. 24) lorsqu'il s'agit d'attribuer des unités de contingents mis à la dispositions des cantons (art. 32, 6e al.) ; b. Révoquer ces décisions préalables (art. 51, 5e al.).

4 La compétence de délivrer ou de renouveler les autorisations saisonnières, celles de séjour ou celles d'établissement, de les révoquer et de prononcer une expulsion (art. 53, 2e al.) doit être conférée à l'office cantonal des étrangers ou à une autorité dont il relève. Exceptionnellement, avec l'assentiment du Conseil fédéral, des autorités subalternes peuvent être appelées à statuer sur la délivrance, la prolongation ou le renouvellement des autorisations saisonnières et des autorisations de séjour.

Art. 68 Approbation des autorisations 1 L'autorité cantonale compétente a le droit d'accorder de son propre chef: a. Les autorisations saisonnières; b. Les autorisations de séjour aux étrangers qui n'exercent pas d'activité lucratives, s'il est certain, au vu de leurs intentions et des circonstances, que leur séjour en Suisse sera de durée limitée; c. Les autorisations de séjour aux écoliers pendant la durée de leurs classes et aux étudiants jusqu'à la fin de leurs études; d. Les autorisations de séjour aux étrangers hospitalisés jusqu'à leur sortie de l'établissement hospitalier; e. Les autorisations d'établissement selon les articles 38, 3e alinéa, et 42; f. Les autorisations pour frontalier.
3 Toutes les autres autorisations sont soumises à l'approbation de l'Office fédéral des étrangers.

3 Le Conseil fédéral peut restreindre ou étendre la compétence des cantons lorsque des intérêts de caractère national le justifient.

256

Loi sur les étrangers 4

L'Office fédéral des étrangers peut refuser d'approuver l'autorisation cantonale, en restreindre la portée ou approuver d'avance une autorisation plus étendue.

Art. 69 Approbation des décisions préalables ^de l'office cantonal du travail 1 Dans les cas présentant un intérêt de caractère national, les décisions préalables de l'office cantonal du travail doivent être soumises pour approbation à l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail. Le Département fédéral de l'économie publique désigne ces cas.

2 L'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail peut refuser d'approuver la décision préalable du canton ou en restreindre la portée.

Chapitre 7: Annonce de l'arrivée et du départ, registre central des étrangers et émoluments Art. 70 Annonce de l'arrivée par le logeur 1 Celui qui loge un étranger contre rémunération doit l'annoncer immédiatement à l'autorité compétente.

2 Celui qui loge gratuitement un étranger ne doit l'annoncer qu'après une résidence d'un mois; il en est dispensé lorsque l'étranger est au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement.

3 Le Conseil fédéral peut édicter des prescriptions plus sévères pour celui qui loge gratuitement un étranger lorsque des circonstances spéciales l'exigent.

Art. 71 Déclaration de départ de l'étranger L'étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement doit déclarer son départ à l'autorité compétente à raison de son lieu de résidence lorsqu'il transfère sa résidence dans une autre commune ou à l'étranger.

Art. 72 Annonce du départ par le logeur Le logeur doit annoncer dans les huit jours à l'autorité compétente le départ d'un étranger au bénéfice d'une autorisation saisonnière, de séjour ou d'établissement qui transfère sa résidence dans une autre commune ou à l'étranger.

Art. 73 Annonce du départ par l'employeur 1 L'employeur doit annoncer dans les huit jours la fin des rapports de travail de l'étranger qui quitte son service à l'autorité compétente à raison du lieu de résidence de l'étranger ou, s'il s'agit d'un frontalier, à l'autorité compétente à raison du lieu de travail.

257

Loi sur les étrangers a

Lorsque l'employeur est en même temps le logeur, l'annonce de la fin des rapports de travail suffit, Art. 74 Réserve des prescriptions cantonales 1 Les cantons peuvent régler de manière plus stricte l'obligation d'annoncer prévue aux articles 70, 72 et 73.

2 Les prescriptions cantonales sur le contrôle des habitants sont réservées.

Art. 75 Statistiques L'Office fédéral des étrangers dresse la statistique des étrangers.

Art. 76 1

L'Office fédéral des étrangers tient, avec la collaboration des services fédéraux intéressés, le registre central des étrangers.

2 Ce registre doit permettre d'établir la statistique des étrangers, de tenir les contrôles exigés par la présente loi et de rationnaliser l'exécution des travaux.

3 Les autorités fédérales ainsi que les autorités cantonales et communales fournissent les données statistiques nécessaires.

4 Les cantons fournissent ces données gratuitement. Une indemnité fixée par le Conseil fédéral peut être versée aux communes.

s Le Conseil fédéral édicté les prescriptions relatives à la protection et à la sécurité des données.

Art. 77 Emoluments 1 Les décisions prises et les actes administratifs accomplis en application de la présente loi donnent droit à la perception d'émoluments.

2 Le Conseil fédéral fixe les émoluments fédéraux et le montant maximum des émoluments cantonaux.

3 Les tarifs cantonaux des émoluments sont soumis à l'approbation du Conseil fédéral.

Chapitre 8: Protection juridique Art. 78 Procédure des autorités fédérales La procédure des autorités fédérales est régie par la loi sur la procédure administrative1' et la loi fédérale d'organisation judiciaire2'.

» RS 172.021 a > RS 173.110

258

Loi sur les étrangers Art. 79 Procédure des autorités cantonales 1 La procédure des autorités cantonales est régie par le droit cantonal.

* Les droits suivants sont pour le moins garantis à l'étranger: a. Il peut consulter le dossier, à moins que des intérêts publics ou privés importants ou l'intérêt d'une enquête officielle non encore close ne s'y opposent.

b. Il est entendu avant que ne soient prises des décisions finales ou, dans une procédure en cours, des décisions incidentes qui peuvent lui causer un préjudice irréparable.

c. Les décisions lui sont notifiées par écrit ; celles qui ne lui sont pas favorables doivent être motivées et indiquer les voies de droit. En indiquant les voies de droit, il y a lieu de mentionner le moyen de droit ordinaire qui est ouvert, ainsi que l'autorité et le délai de recours.

d. Son recours a un effet suspensif, à moins que l'autorité de décision ou l'autorité de recours n'en décident autrement. L'autorité de recours peut restituer l'effet suspensif à un recours auquel l'autorité inférieure l'avait retiré; la demande de restitution de l'effet suspensif est traitée sans délai.

3 Le 2e alinéa ne s'applique pas aux décisions prises dans une affaire qui exige une décision immédiatement exécutoire, notamment lorsque l'étranger se voit refuser l'entrée à la frontière ou lorsqu'il est renvoyé en vertu de l'article 52, 1er ou 2e alinéa.

Art. 80 Autorités de recours 1 Les cantons désignent une ou plusieurs autorités de recours pour les décisions des autorités cantonales.

2 Les autorités de recours de la Confédération sont: a. Le Département fédéral de justice et police pour les décisions de l'Office fédéral des étrangers, de l'Office fédéral de la police et du Ministère public de la Confédération; b. Le Département fédéral de l'économie publique pour les décisions de l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail.

3 Les décisions des autorités cantonales de recours statuant en dernière instance et des autorités de recours de la Confédération sont définitives en tant que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral ou le recours au Conseil fédéral n'est pas recevable. Le recours de droit public au Tribunal fédéral contre les décisions définitives prises par les autorités cantonales est réservé.

4 La loi fédérale d'organisation judiciaire1)
(art. 100, let. a et b) détermine les cas dans lesquels le recours de droit administratif au Tribunal fédéral n'est pas recevable; le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est directement recevable contre les décisions d'internement prononcées par l'Office fédéral de la police ou par le Ministère public de la Confédération.

l

> RS 173.110

259

Loi sur les étrangers 5

Le recours au Conseil fédéral n'est recevable que contre: a. Les décisions sur recours du Département fédéral de justice et police et les décisions des autorités cantonales de recours statuant en dernière instance, qui concernent les restrictions ou l'interdiction de l'activité politique selon l'article 48, 3e alinéa; b. Les décisions d'expulsion prises par le Département fédéral de justice et police selon l'article 53, 1er alinéa; c. Les décisions des autorités cantonales de recours statuant en dernière instance selon l'article 73, 1er alinéa, lettre b, de la loi sur la procédure administrative1^, lorsque le recours de droit administratif au Tribunal fédéral n'est pas recevable selon le 2e alinéa, lettre c.

Art. 81 Qualité pour recourir Outre l'étranger, ont qualité pour recourir l'employeur ou d'autres personnes qui ont un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit annulée ou modifiée.

Chapitre 9: Dispositions pénales et sanctions administratives Art. 82

Contrefaçon, falsification et usage abusif de pièces de légitimation d'étrangers Celui qui, enfreignant la présente loi, a. Aura contrefait ou falsifié en Suisse ou à l'étranger des pièces de légitimation d'étrangers; b. Aura fait usage d'une pièce de légitimation fausse ou falsifiée; c. Aura abusé de pièces de légitimation authentiques qui ne lui sont pas destinées; d. Aura cédé, en vue de leur utilisation, des pièces de légitimation authentiques à des personnes n'y ayant pas droit; e. Aura cédé, en vue de leur utilisation, des pièces de légitimation fausses ou falsifiées à des tiers, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende. Celui qui aura agi par métier sera puni de l'emprisonnement pour un mois au moins et de l'amende.

Art. 83 Entrée et séjour illégaux 1. Celui qui aura enfreint les prescriptions sur l'entrée en Suisse, notamment lorsqu'il sera entré en Suisse en dépit d'une interdiction d'entrée, celui qui aura séjourné illégalement en Suisse, notamment après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation ou du séjour autorisé,.

celui qui aura exercé illégalement une activité lucrative, « RS 172.021

260

Loi sur les étrangers celui qui aura prêté assistance à un étranger qui entre ou séjourne illégalement en Suisse, notamment en le logeant, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende; l'article 291 du code pénal suisse1* est réservé.

2. Celui qui aura agi par négligence sera puni de l'amende.

3. En cas de renvoi immédiat de l'étranger, il sera possible de renoncer à toute peine pour entrée illégale.

Art. 84 Emploi d'étrangers n'ayant pas d'autorisation 1 Celui qui, en Suisse ou à l'étranger, a. Aura facilité ou aidé à préparer l'entrée illégale ou le séjour illégal en Suisse d'un étranger pour lui permettre d'exercer une activité lucrative ; b. Aura procuré un emploi à un étranger non autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse, sera puni de l'emprisonnement et de l'amende.

2

Celui qui, intentionnellement, aura occupé des étrangers dépourvus d'autorisation sera puni, pour chaque cas d'étranger employé illégalement, d'une amende de 500 à 5000 francs.

3 Celui qui aura déjà fait l'objet d'un jugement exécutoire selon le 2e alinéa et qui, dans l'espace de cinq ans, occupera intentionnellement de nouveau un étranger dépourvu d'autorisation sera puni, en plus de l'amende, des arrêts ou de l'emprisonnement.

Art. 85 Autres infractions 1 Celui qui, intentionnellement ou par négligence, aura contrevenu à une prescription de la présente loi ou à une ordonnance ou décision prise en application de cette prescription, sera puni de l'amende, lorsqu'aucun des faits sur lesquels se fondent les articles 82 à 84 n'est retenu contre lui.

2 Les infractions de peu d'importance peuvent être punies d'une réprimande; celle-ci peut être assortie du paiement des frais.

3 La répression pour insoumission à une décision particulière de l'autorité, assortie de la menace d'une peine selon l'article 292 du code pénal suisse1), est réservée.

Art. 86 Poursuite pénale 1

La poursuite pénale incombe aux cantons. La juridiction fédérale en cas d'infraction contre l'autorité fédérale (art. 340 CP) est réservée.

« RS 311.0 18 Feuille fédérale. 130» année. Vol. H

261

Loi sur les étrangers 2

La partie générale du code pénal suisse1) et les articles 6 et 7 de la loi fédérale sur le droit pénal administratif2) sont applicables.

Art. 87 Sanctions administratives 1 Les demandes d'admission en faveur de travailleurs étrangers qui ne peuvent prétendre une autorisation d'établissement seront rejetées ou ne seront que partiellement acceptées lorsqu'elles auront été présentées par un employeur qui a enfreint à plusieurs reprises ou gravement la réglementation sur les étrangers.

2 Les demandes de changement de place présentées pour des étrangers désirant entrer au service de cet employeur, ainsi que les demandes de renouvellement d'autorisations délivrées à son personnel étranger qui n'a pas droit à ce renouvellement, seront rejetées.

Chapitre 10 : Dispositions finales Art. 88 Exécution 1 Le Conseil fédéral exerce la surveillance sur l'application de la présente loi. Il édicté les dispositions d'exécution.

2 Les cantons désignent les autorités compétentes et édictent les dispositions d'exécution; celles-ci sont soumises à l'approbation du Conseil fédéral.

Art. 89 Abrogation et modification de dispositions 1 La loi fédérale du 26 mars 193l3) sur le séjour et l'établissement des étrangers et l'arrêté fédéral du 15 juin 19094' mettant à la charge de la Confédération les frais de renvoi d'étrangers indigents, sont abrogés.

2 La loi fédérale d'organisation judiciaire5) est modifiée comme il suit: Art. 100, let. b, ch. 1 En outre, le recours n'est pas recevable contre: b. En matière de police des étrangers : 1. Le refus et l'interdiction d'entrée;

Art. 90 Dispositions transitoires 1 Le nouveau droit s'applique aux procédures en cours lors de l'entrée en vigueur de la présente loi. L'autorité compétente en vertu de l'ancien droit achève les procédures en cours.

» RS 311.0 a > RS 313.0 3

>RS1113;RO1933279 >RS1 133;R01909571 « RS 173.110 4

262

Loi sur les étrangers 2

Les dispositions pénales de la présente loi s'appliquent aux infractions commises avant son entrée en vigueur lorsqu'elles sont plus favorables à leur auteur que les anciennes.

Art. 91 Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est soumise au référendum facultatif.

2 Le Conseil fédéral fixe la date d'entrée en vigueur.

24766

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Message à l'appui d'un projet de loi sur les étrangers du 19 juin 1978

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1978

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

34

Cahier Numero Geschäftsnummer

78.044

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

22.08.1978

Date Data Seite

165-263

Page Pagina Ref. No

10 102 231

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