15.018 Message concernant une modification de la loi sur le libre passage (Droits en cas de choix de la stratégie de placement par l'assuré) du 11 février 2015

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, un projet de modification de la loi sur le libre passage (droits en cas de stratégie de placement par l'assuré). Simultanément, nous vous proposons de classer l'intervention parlementaire suivante: 2010

M 08.3702

Adaptation de la législation relative au libre passage et au fonds de garantie (N 19.12.08, Stahl; E 3.3.10)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

11 février 2015

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2014-2747

1669

Condensé Les assurés qui peuvent choisir eux-mêmes la stratégie de placement de leur fortune de prévoyance dans le domaine surobligatoire de la prévoyance professionnelle doivent recevoir la valeur effective de l'avoir de prévoyance au moment où ils quittent l'institution de prévoyance, même s'il en résulte une perte.

Contexte Depuis la première révision de la LPP, les institutions de prévoyance qui assurent exclusivement la partie du salaire excédant le domaine de prestations couvert par le fonds de garantie peuvent désormais proposer à leurs assurés le choix entre différentes stratégies de placement à l'intérieur d'un même plan de prévoyance. L'institution doit toutefois servir à l'assuré qui la quitte une prestation de sortie calculée conformément aux dispositions impératives de la loi. Ce système a pour conséquence que le collectif des assurés restants supporte la perte subie par un assuré sortant dont l'avoir s'est dévalorisé à cause de la stratégie de placement qu'il a choisie, alors que ce même assuré pourrait garder pour lui les gains réalisés grâce à cette stratégie.

Contenu du projet Le présent projet prévoit que ces institutions de prévoyance puissent calculer la prestation de sortie de telle façon que l'assuré reçoive la valeur effective de l'avoir de prévoyance au moment de la sortie. Les pertes éventuelles devront par conséquent être supportées par l'assuré lui-même. Afin de garantir une certaine protection des assurés, les institutions de prévoyance devront proposer au minimum une stratégie de placement à faible risque.

Pour sensibiliser les assurés aux risques et aux coûts découlant de leur choix, les institutions de prévoyance seront tenues de les informer de manière adéquate.

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Message 1

Présentation du projet

1.1

Contexte

1.1.1

Réglementation actuelle

Le troisième volet de la première révision de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP)1, entré en vigueur le 1er janvier 2006, a donné à certaines institutions de prévoyance la possibilité de proposer plusieurs stratégies de placement à l'intérieur d'un même plan de prévoyance (cf. art. 1e de l'ordonnance du 18 avril 1984 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité [OPP 2]2). Cette possibilité n'est accordée qu'aux institutions de prévoyance qui pratiquent la prévoyance hors du domaine de prestations couvert par le fonds de garantie et qui ne mélangent pas le domaine garanti et le domaine non garanti; autrement dit, la possibilité de proposer plusieurs stratégies de placement est réservée aux institutions de prévoyance qui assurent uniquement la partie de salaire supérieure à une fois et demie le montant-limite maximal fixé à l'art. 8, al. 1, LPP3.

Les institutions de prévoyance qui proposent plusieurs stratégies de placement doivent, comme toutes les autres institutions de prévoyance, respecter les dispositions des lois et des ordonnances en vigueur dans la prévoyance professionnelle.

Cette règle vaut en particulier pour la sécurité des placements (art. 71 LPP) et pour le calcul de la prestation de sortie (art. 15 et 17 de la loi du 17 décembre 1993 sur le libre passage [LFLP]4). Les assurés ont par exemple droit, lorsqu'ils quittent une institution de prévoyance en primauté des cotisations, à «la somme, augmentée des intérêts, de toutes les cotisations de l'employeur et de l'assuré créditées en vue de l'octroi de prestations de vieillesse, ainsi que des autres versements»5. La loi interdit à l'assuré de renoncer par anticipation au montant minimal.

L'institution de prévoyance est seule responsable de l'activité de placement. Il lui appartient de respecter les prescriptions de placement figurant aux art. 49 à 59 OPP 2. L'assuré peut choisir entre les stratégies de placement offertes, mais il ne peut pas les influencer. Autrement dit, il ne choisit pas lui-même ses propres placements. Il n'est pas non plus possible de morceler l'avoir de prévoyance et de le répartir dans différentes stratégies de placement, car cela reviendrait à une individualisation complète de la stratégie de placement.

Les principes
généraux de la prévoyance professionnelle (art. 1, al. 3, LPP) s'appliquent bien sûr également aux institutions de prévoyance qui proposent plusieurs stratégies de placement.

Ainsi, le principe de la collectivité interdit de proposer un nombre de stratégies si élevé qu'il en résulte de fait une individualisation des avoirs de prévoyance des assurés. Pour respecter l'art. 1e OPP 2, l'offre ne devrait donc pas contenir plus de 1 2 3 4 5

RS 831.40 RS 831.441.1 Cf. art. 56, al. 2, LPP.

RS 831.42 Cf. art. 15, al. 2, LFLP.

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cinq à dix stratégies. Afin d'offrir une palette de stratégies de placement différentes, l'institution de prévoyance peut ainsi proposer jusqu'à cinq stratégies pour un (très) petit nombre de personnes assurées, mais elle ne peut pas en proposer plus de dix si elle a un grand nombre d'assurés.

Par ailleurs, la dernière phrase de l'art. 1d, al. 2, OPP 2, aux termes de laquelle «le montant de la cotisation de l'employeur doit être le même dans chaque plan de prévoyance», s'applique par analogie lorsqu'une institution de prévoyance propose différentes stratégies de placement à l'intérieur d'un même plan. Le choix offert par l'art. 1e OPP 2 a ainsi une influence sur la stratégie de placement, et non sur son financement par l'employeur et l'employé.

L'offre de plusieurs stratégies prévue par l'art. 1e OPP 2 doit également éviter de porter atteinte au principe de l'adéquation. L'adéquation doit être garantie pour chaque stratégie; en outre, il s'agit comme toujours d'un contrôle a priori du modèle et non d'un contrôle a posteriori de chaque situation particulière. Le modèle tiendra compte pour chaque stratégie donnée d'un rendement réaliste au vu de la composition du portefeuille. Si les prestations effectives dépassent les prévisions dans certains cas, cela ne donnera pas lieu à correction.

1.1.2

Motion 08.3702 (CN Stahl)

La motion «Adaptation de la législation relative au libre passage», déposée le 3 octobre 2008 par le conseiller national Jürg Stahl, demande que les dispositions déterminantes de la loi sur le libre passage (art. 15, al. 2, et 17 LFLP) soient adaptées de façon à faciliter l'adoption de stratégies de placement plus flexibles (art. 1, al. 3, LPP en relation avec l'art. 1e OPP 2). Le conseiller national Stahl justifie son intervention en soulignant qu'avec le système actuel, le risque supplémentaire qui résulte de l'adoption d'une stratégie de placement spécifique est à la charge de l'institution de prévoyance proposant plusieurs stratégies de placement. Cette institution est obligée de respecter les dispositions relatives au montant de la prestation de sortie, notamment les dispositions relatives au montant minimal prévu à l'art. 17 LFLP et au taux d'intérêt de sortie prévu à l'art. 6, al. 2, de l'ordonnance du 3 octobre 1994 sur le libre passage6, indépendamment de la valeur du placement au moment de la sortie de l'assuré. L'auteur de la motion en conclut que la marge de manoeuvre des institutions de prévoyance s'en trouve réduite et qu'une correction est par conséquent nécessaire si l'on entend pour flexibiliser le choix des stratégies de placement.

Le 12 décembre 2008, le Conseil fédéral a proposé d'adopter cette motion. Il reconnaissait qu'il est, de fait, difficile de concilier la possibilité d'adopter une stratégie de placement plus risquée conformément à l'art. 1e OPP 2 et l'obligation pour l'institution de prévoyance de garantir un montant minimum en vertu de l'art. 17 LFLP. Le Conseil fédéral juge choquantes les conséquences qui en résultent: il n'est pas admissible que les assurés qui optent pour une stratégie de placement plus risquée profitent à leur sortie, dans le meilleur des cas, d'un rendement supérieur à la moyenne sans avoir à supporter intégralement les conséquences d'un éventuel rendement négatif, parce qu'ils ont droit aux prestations d'entrée qu'ils ont apportées, plus les intérêts. La perte subie en cas de rendement négatif doit alors être 6

RS 831.425

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supportée par l'institution de prévoyance et, en fin de compte, par les autres assurés.

Le Conseil fédéral s'est donc déclaré disposé à mettre en chantier l'adaptation nécessaire de la loi fédérale sur le libre passage.

La motion a été adoptée par le Conseil national le 19 décembre 2008 et par le Conseil des Etats le 3 mars 2010.

1.2

Avis et prises de position lors de la procédure de consultation

La procédure de consultation sur l'avant-projet de modification de la LFLP et de la LPP (garantie moindre lors du choix par l'assuré de certaines stratégies de placement et mesures de garantie de l'avoir de prévoyance en cas de négligence de l'obligation d'entretien) s'est déroulée du 25 octobre 2012 au 11 février 2013. Les cantons, les partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, les associations faîtières nationales des communes, des villes et des régions de montagne, les organisations faîtières de l'économie et les autres milieux intéressés ont été invités à y participer. Tous les cantons, cinq partis politiques et 39 organisations ont envoyé leur prise de position.7 La grande majorité des participants à la consultation a accueilli favorablement le principe d'une modification de la LFLP. Un point non contesté du projet mis en consultation est que c'est l'assuré qui veut prendre plus de risques, et non l'institution de prévoyance et les autres assurés, qui doit en supporter les conséquences lorsque des pertes sont enregistrées.

L'obligation faite aux institutions de prévoyance de proposer au moins une stratégie de placement garantissant la prestation de sortie minimale prévue aux art. 15 et 17 LFLP a été controversée. Les opposants à une telle disposition ont notamment fait valoir que l'éventualité de pertes et d'un découvert dans le plan de prévoyance avec garantie imposerait toujours une obligation d'assainissement et rendrait nécessaire la constitution de réserves de fluctuation de valeur. Le passage depuis ou vers la stratégie avec garantie donnerait encore lieu à des solidarités non désirées entre les assurés: les pertes se reporteraient sur le collectif des assurés, tandis que les possibilités de changement pourraient être exploitées de façon ciblée en fonction de l'évolution des marchés financiers. Le règlement d'une institution de prévoyance deviendrait en outre extrêmement complexe et occasionnerait des charges administratives considérables.

L'obligation pour l'assuré d'obtenir le consentement écrit du conjoint ou du partenaire enregistré s'il opte pour une stratégie de placement sans garantie des prestations minimales a été majoritairement rejetée. L'argument avancé est qu'un changement de la stratégie de placement ou que l'entrée dans une institution de prévoyance proposant
plusieurs stratégies de placement se distingue des autres situations dans lesquelles la législation actuelle requiert le consentement écrit du conjoint ou du partenaire enregistré (versement anticipé pour la propriété du logement, versement de la prestation de vieillesse sous forme de capital, versement en espèces) en ce que l'avoir ne sort pas du circuit de la prévoyance et n'est donc pas 7

www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2012 > Département fédéral de l'intérieur.

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soustrait au conjoint ou au partenaire enregistré. La nécessité d'obtenir la signature du conjoint ou du partenaire enregistré lors de chaque changement représenterait en outre une charge administrative disproportionnée pour les institutions de prévoyance. Elle serait de nature à empêcher ou du moins à compliquer considérablement un changement rapide de la stratégie de placement.

La proposition d'obliger l'institution de prévoyance à informer l'assuré et à obtenir sa confirmation écrite a été approuvée par une majorité des participants, même si l'étendue de cette obligation fait l'objet d'appréciations diverses.

Le présent projet tient compte dans une large mesure des critiques exprimées lors de la procédure de consultation.

1.3

Avis de la Commission fédérale de la prévoyance professionnelle

Organe consultatif de la Confédération pour les questions relatives à l'application et au développement de la prévoyance professionnelle8, la Commission fédérale de la prévoyance professionnelle a pu se prononcer à plusieurs reprises sur la présente révision. Le projet de message lui a été soumis pour audition et plusieurs de ses membres ont pris position sur les modifications proposées. Les représentants des salariés se montrent toujours plutôt critiques à l'égard d'une individualisation de la prévoyance. Ils ne s'opposent cependant pas à la réforme, d'autant que seul le domaine surobligatoire de la prévoyance professionnelle est concerné. Les modifications apportées au projet à la suite de la consultation sont par ailleurs largement acceptées, en particulier la décision d'abandonner la stratégie de placement avec garantie de la prestation de sortie et celle de renoncer à la signature du conjoint ou du partenaire enregistré. Les propositions concrètes concernant le projet ont pour la plupart été prises en compte.

1.4

Grandes lignes de la solution proposée

L'inscription du nouvel art. 19a dans la loi sur le libre passage vise à assouplir l'obligation de fournir une prestation de sortie minimale au sens des art. 15 et 17 LFLP. En substance, les institutions de prévoyance qui assurent exclusivement la partie de salaire supérieure à une fois et demie le montant-limite maximal fixé à l'art. 8, al. 1, LPP et qui proposent plusieurs stratégies de placement au sens de l'art. 1e OPP 2 pourront désormais verser la valeur effective de l'avoir de prévoyance de l'assuré au moment de la sortie. Cet avoir est constitué des cotisations de l'employeur et de l'employé créditées en vue de l'octroi de prestations de vieillesse, des autres versements et du rendement de la fortune, déduction faite des éventuelles pertes encourues. Le risque de perte sera ainsi assumé uniquement par l'assuré sortant et non plus par l'institution de prévoyance ou les autres assurés.

Bien que les institutions de prévoyance qui proposent plusieurs stratégies de placement soient actives exclusivement dans le domaine surobligatoire de la prévoyance professionnelle, une certaine protection doit être garantie aux assurés. La grande 8

Cf. art. 85 LPP.

1674

majorité des participants à la consultation était d'accord sur ce point. Dès lors qu'un employeur propose un tel plan de prévoyance, la participation de tous ses salariés qui remplissent les critères objectifs pour y être admis est obligatoire (conformément au principe de la collectivité, art. 1c OPP 2). En d'autres termes, l'employé ne peut pas décider d'être assuré ou non dans cette institution de prévoyance. Ce fait justifie l'obligation pour toute institution proposant un choix entre plusieurs stratégies de placement d'offrir au moins une stratégie de placement à faible risque.

La notion de «faible risque» est indéterminée et doit donc être définie de manière plus précise. Le Conseil fédéral est chargé de préciser au niveau de l'ordonnance quels placements entrent en ligne de compte pour cette stratégie. Ces précisions garantiront aux personnes qui sont assurées dans une institution de prévoyance de ce type ­ alors qu'elles ne veulent ou ne peuvent pas prendre de risques importants ­ la possibilité de choisir une stratégie de placement dans laquelle leurs risques de perte sont réduits au minimum.

L'institution de prévoyance sera tenue d'informer l'assuré des risques propres à chaque stratégie de placement, de le conseiller sur les différentes possibilités de placement et de le mettre en garde contre toute décision précipitée. Elle devra également assurer la transparence des coûts découlant de la stratégie choisie. L'institution de prévoyance devra en outre tenir compte du niveau de connaissance de l'assuré, de sa tolérance aux risques et de sa capacité à les assumer. L'assuré devra confirmer par écrit que l'institution de prévoyance l'a informé sur tous ces points. Le présent projet reprend ainsi la conception étendue des devoirs d'information des institutions de prévoyance telle qu'elle a été mise en consultation.

La planification et l'adéquation des prestations font partie des principes de base de la prévoyance professionnelle suisse (cf. art. 1, al. 3, LPP). L'adéquation revêt notamment une importance fondamentale pour la reconnaissance de la prévoyance professionnelle à l'étranger9. Les institutions de prévoyance qui proposent plusieurs stratégies de placement doivent respecter ces principes.

Les assurés qui sont prêts à prendre plus de risques dans l'espoir de rendements supérieurs
doivent, en cas de bonne performance des placements, pouvoir bénéficier de prestations plus élevées que les assurés qui prennent moins de risques. C'est le sens et la raison d'être des solutions de prévoyance offrant le choix de la stratégie de placement. Le versement de prestations plus élevées que celles prévues par le plan de prévoyance doit donc être autorisé lorsque cela est imputable à la bonne performance de la stratégie de placement choisie. Le principe d'adéquation des prestations doit néanmoins être respecté. Les prestations doivent en effet rester dans des limites adéquates même lorsque la stratégie de placement s'avère performante à moyen et long terme. Elles ne peuvent s'en affranchir qu'en cas de performance exceptionnelle et inattendue. Le niveau de performance auquel peut s'attendre un assuré en cas d'évolution favorable fait partie des informations qui sont nécessaires au choix de la stratégie de placement. Ces informations existent déjà, car des stratégies comparables sont généralement offertes en dehors du domaine de la prévoyance professionnelle.

9

Voir l'avis du Conseil fédéral du 20.8.2014 sur le rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national concernant l'initiative parlementaire «Permettre aux fonds de bienfaisance de jouer leur rôle», FF 2014 6399, en particulier p. 6404.

1675

Puisque la présente révision de loi accroît la flexibilité dans le choix des stratégies de placement, le Conseil fédéral doit tenir compte des spécificités de cette solution de prévoyance lorsqu'il précise la portée des principes d'adéquation et de planification. La performance des placements a bien plus d'influence sur le niveau des prestations dans de telles solutions de prévoyance que dans celles qui n'offrent pas le choix de la stratégie de placement. Ces dernières solutions utilisent en effet les rendements pour plusieurs finalités collectives, en particulier pour constituer les réserves de fluctuation de valeur qui servent notamment à garantir les prestations minimales définies aux art. 15 et 17 LFLP. Dans les solutions de prévoyance qui proposent le choix d'une stratégie de placement, au contraire, la performance des placements a généralement une influence immédiate sur le montant des prestations.

Le Conseil fédéral précisera donc au niveau de l'ordonnance la signification concrète des principes d'adéquation et de planification pour les institutions de prévoyance qui proposent différentes stratégies de placement. Une base légale existe déjà à cet effet10.

L'obligation pour l'assuré d'obtenir le consentement écrit de son conjoint ou de son partenaire enregistré s'il change de stratégie de placement a été abandonnée vu les critiques qu'elle a recueillies lors de la procédure de consultation. Cela s'avère justifié dans la mesure où l'avoir reste dans le circuit de la prévoyance et que la nécessité d'obtenir la signature du conjoint ou du partenaire enregistré représente une charge administrative considérable.

1.5

Pistes alternatives examinées

Comme piste alternative à une stratégie garantissant une prestation de sortie minimale au sens de la LFLP, de nombreux participants à la consultation ont proposé d'obliger l'institution de prévoyance à offrir au moins une stratégie garantissant la valeur nominale (protection du capital: le montant minimal en cas de sortie correspond à la somme de l'ensemble des versements et des cotisations d'épargne, sans intérêt). Cette solution n'a pas été retenue, car elle ne résoudrait pas les problèmes de mise en oeuvre et ne répondrait pas entièrement aux exigences de la motion. Elle aurait certes pour effet de réduire au minimum le risque de pertes pour l'assuré, mais la garantie qu'elle offrirait (préservation du capital) serait néanmoins de nature à entraîner des pertes pour l'institution de prévoyance et donc pour le collectif des assurés. Le risque de devoir prendre des mesures d'assainissement ne serait pas écarté et il faudrait constituer des réserves de fluctuation de valeur.

Une autre possibilité examinée consistait à offrir aux assurés le choix soit d'entrer dans l'institution de prévoyance proposant différentes stratégies de placement soit de rester, pour l'ensemble du salaire assuré, dans l'institution de prévoyance (enveloppante) qui assure déjà la partie du salaire correspondant à une fois et demie le montant-limite maximal. Une telle solution impliquerait toutefois une redéfinition du principe de la collectivité. En effet, lorsque l'employeur fonde une institution de prévoyance proposant différentes stratégies de placement conformément à l'art. 1e OPP 2 ou lorsqu'il conclut un contrat d'affiliation avec une telle institution, tous les salariés qui remplissent les critères objectifs pour y être admis ­ habituellement un niveau de salaire donné ­ y sont obligatoirement assurés (art. 1c OPP 2). Laisser les 10

Cf. art. 1, al. 3, LPP.

1676

salariés choisir s'ils veulent ou non entrer dans cette institution reviendrait à renoncer au principe de la collectivité pour cette forme de prévoyance. De plus, l'institution de prévoyance enveloppante qui, lorsque l'employeur a fondé une institution de prévoyance pratiquant exclusivement le régime surobligatoire, n'assure habituellement les salaires que jusqu'à concurrence d'un certain montant, serait tenue d'assurer également des salaires plus élevés afin de garantir l'égalité de traitement de tous les employés. Cela irait surtout à l'encontre des intentions de l'employeur lorsqu'il a recours à de tels modèles.

Déjà dans le projet mis en consultation, le Conseil fédéral avait rejeté l'idée d'abroger l'art. 1e OPP 2 et de résoudre de la sorte les problèmes rencontrés dans la mise en oeuvre de la disposition. Les résultats de la consultation ont confirmé le bien-fondé de cette décision, puisque seuls quelques participants ont apporté leur soutien à l'idée d'une abrogation.

Lors de la consultation, les autorités fiscales ont exprimé la crainte que les pertes puissent être rachetées et déduites des impôts en cas de placements très fluctuants.

Elles ont donc proposé de recourir à une analyse pluriannuelle pour prévenir ce risque. Plusieurs spécialistes ont néanmoins critiqué cette solution, qu'ils jugent trop complexe et difficile à mettre en oeuvre. La proposition des autorités fiscales n'a donc pas été retenue. Les précisions apportées au principe d'adéquation devraient permettre de mieux prévenir les éventuels abus.

1.6

Classement d'interventions parlementaires

Le projet retenu permet de classer la motion 08.3702 («Motion Stahl»).

2 Art. 19a

Commentaire Droits en cas de choix de la stratégie de placement par l'assuré

Al. 1: cet alinéa autorise les institutions de prévoyance qui assurent exclusivement la partie de salaire supérieure à une fois et demie le montant-limite maximal fixé à l'art. 8, al. 1, LPP et qui proposent plusieurs stratégies de placement à déroger aux art. 15 et 17 LFLP en ne versant pas le montant minimal de la prestation de libre passage calculé conformément à ces dispositions. Ces institutions peuvent ainsi prévoir de verser aux assurés qui les quittent la valeur effective de leur avoir de prévoyance au moment de la sortie.

Toutes les autres dispositions de la prévoyance professionnelle, en particulier les principes généraux de l'art. 1, al. 3, LPP et les prescriptions de placement (art. 71 LPP et art. 49 ss OPP 2) continuent évidemment de s'appliquer par analogie à ces institutions (voir ch. 1.1.1). Lorsqu'un employeur propose un plan de prévoyance comportant plusieurs stratégies de placement, la participation de tous ses salariés qui remplissent les critères objectifs pour y être admis est obligatoire (principe de la collectivité). Or les salariés ne sont pas tous disposés ou aptes à prendre un risque accru pour le placement de leur avoir de prévoyance. Pour maintenir le risque de perte à un niveau aussi faible que possible pour ces salariés, l'institution de prévoyance est tenue de proposer au moins une stratégie de placement à faible risque.

Cette dernière notion est vague sur le plan juridique et doit être précisée au niveau 1677

de l'ordonnance. La disposition correspondante s'inspirera notamment de l'art. 53, al. 1, let. a et b, OPP 2.

Al. 2: l'institution de prévoyance doit informer l'assuré que, s'il opte pour une stratégie de placement particulière, il s'expose à certains risques financiers. L'institution de prévoyance est à ce titre soumise à un véritable devoir d'information, similaire à celui des banques, qui comporte divers aspects, notamment le devoir de renseignement, de mise en garde, d'avis, de conseil ou de recommandation. A l'instar de la jurisprudence sur le devoir de diligence et de loyauté11, l'institution de prévoyance doit veiller au niveau de connaissance de l'assuré, à sa tolérance aux risques et à sa capacité à les assumer. Elle est donc tenue de l'aviser des risques encourus, de le conseiller sur les différentes possibilités de placement et de le mettre en garde contre toute décision précipitée. Les informations fournies doivent être compréhensibles pour l'assuré étant donné son niveau de connaissances. L'attention de l'assuré doit également être attirée sur les coûts supplémentaires découlant du choix de sa stratégie de placement. C'est pourquoi la disposition exige aussi que l'assuré confirme par écrit avoir reçu les renseignements nécessaires avant de choisir une stratégie de placement ou d'opter pour une autre stratégie. Si l'institution de prévoyance ne doit donner que la valeur effective, il est possible que cela réduise l'avoir de prévoyance de l'assuré. Ce dernier doit en être conscient.

Al. 3: Selon l'art. 2, al. 3, LFLP, la prestation de sortie est exigible lorsque l'assuré quitte l'institution de prévoyance et doit être rémunérée au taux d'intérêt minimal jusqu'à son transfert à la nouvelle institution compétente. Lorsque l'assuré ne lui indique pas à quelle institution elle doit transférer la prestation, l'institution de prévoyance doit attendre au moins six mois avant de pouvoir la verser à l'Institution supplétive (art. 4, al. 2, LFLP). Cela voudrait dire que l'institution de prévoyance serait tenue de réaliser, sur une période déterminée, le taux d'intérêt minimal et de verser le montant correspondant à l'assuré. Or, puisque les institutions de prévoyance qui proposent plusieurs stratégies de placement conformément à l'art 1e OPP 2 ne sont pas soumises à l'obligation de prévoir une
rémunération des intérêts, il serait incohérent de leur appliquer le principe de la rémunération continue et de créer un nouveau risque pour l'institution de prévoyance et pour les assurés restants.

La deuxième phrase de l'art. 2, al. 3, LFLP n'est donc pas applicable à ces institutions de prévoyance. L'art. 2, al. 4, LFLP reste en revanche applicable. Si l'institution de prévoyance transfère la prestation de sortie avec retard alors qu'elle dispose de toutes les indications nécessaires, c'est à elle d'en assumer le risque et de verser un intérêt moratoire.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour les finances et le personnel

La disposition légale proposée n'a pas de conséquences sur les besoins en personnel ni sur les finances de la Confédération et des cantons. Elle entraîne par contre des frais d'administration supplémentaires pour les institutions de prévoyance qui proposent et gèrent différentes stratégies de placement. Outre l'accroissement de la charge de travail et les coûts supplémentaires, il faut également tenir compte de la 11

Arrêt du Tribunal fédéral du 13.6.2008, 4C.68/2007, consid. 7.1.

1678

plus grande complexité du système. C'est toutefois le prix à payer si l'on veut respecter le souhait d'une certaine individualisation de la prévoyance tel que l'a exprimé le Parlement dans le cadre de la première révision de la LPP. Les coûts supplémentaires correspondants doivent être supportés par les assurés ayant opté pour une stratégie de placement individuelle.

3.2

Conséquences économiques

Le projet n'a pas de conséquences prévisibles sur l'économie dans son ensemble.

4

Relation avec le programme de la législature

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 201512 ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de la législature 2011 à 201513. La présente révision a été suscitée essentiellement par la motion Stahl du 3 octobre 2008 (08.3012 «Adaptation de la législation relative au libre passage»).

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Pour la réglementation de cette question spécifique concernant le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, la Confédération se fonde sur l'art. 113 de la Constitution14. La modification de loi proposée est conforme à la Constitution.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales

Le projet est compatible avec les obligations internationales de la Suisse, en particulier avec la directive 98/49/CE du Conseil, du 29 juin 1998, relative à la sauvegarde des droits à pension complémentaire des travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté15. Il sera tenu compte de cette directive à l'annexe II de l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes16.

12 13 14 15 16

FF 2012 349 FF 2012 6667 RS 101 JO L 209 du 25.7.1998, p. 46 RS 0.142.112.681

1679

5.3

Délégation de compétences législatives

Le projet prévoit de déléguer au Conseil fédéral la compétence de définir ce qu'il faut entendre par placements à faible risque (art. 19a, al. 1, P-LFLP). Le droit en vigueur donne déjà au Conseil fédéral le mandat de préciser les principes d'adéquation et de planification (art. 1, al. 3, LPP).

5.4

Conformité à la législation sur la protection des données

La modification proposée ne pose pas de problème en ce qui concerne la protection des données.

1680