11.045 Message concernant la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine 2012­2016 Paix, droits humains, démocratie, politique humanitaire et migration du 29 juin 2011

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous soumettons à votre approbation un projet d'arrêté fédéral relatif à un crédit-cadre destiné à financer la continuation de mesures de promotion de la sécurité humaine.

Nous vous proposons simultanément de classer le postulat suivant: 2009 P 09.3003

Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement (S 2.3.09, Commission de la politique de sécurité du CE)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

29 juin 2011

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Micheline Calmy-Rey La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-1615

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Condensé La promotion de la sécurité humaine (promotion de la paix, droits humains, démocratie, politique humanitaire et migration) constitue un instrument important de la politique étrangère de la Suisse.

Ancrée dans la Constitution fédérale et dans la loi1, la promotion de la sécurité humaine donne lieu à des actions financées depuis le 1er janvier 2004 par un créditcadre ­ une formule qui a fait ses preuves, car elle permet une planification pluriannuelle de l'engagement, garantissant ainsi son efficacité, sa crédibilité et sa durabilité.

Le Conseil fédéral demande l'ouverture d'un nouveau crédit-cadre de 310 millions de francs pour une période minimum de quatre ans à compter du 1er mai 2012. Par rapport aux 260 millions de francs prévus dans le plan financier, le Conseil fédéral demande une augmentation de 50 millions de francs qui sont destinés pour leur plus grande part à un programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient.

Ces moyens supplémentaires seront compensés à l'interne du DFAE.

Le programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient permettra à la Suisse de contribuer à la consolidation des processus de démocratisation en relevant les défis de sécurité humaine qui y sont liés, notamment dans le domaine du pluralisme démocratique, du respect des droits humains et des migrations internationales, suite aux révoltes citoyennes qui ont éclaté en 2011 dans plusieurs pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient.

Raison d'être de la promotion de la sécurité humaine (ch. 1) Nul autre exemple n'illustre mieux la raison d'être de la promotion de la sécurité humaine que la situation en Afrique du Nord et au Moyen-Orient telle qu'elle s'est développée au début de 2011. Aux portes de l'Europe, les révoltes de populations aspirant à plus de dignité et revendiquant la liberté ainsi que la justice sociale ouvrent d'immenses perspectives pour un épanouissement de la démocratie et de l'Etat de droit dans la région. Les défis sont de très grande ampleur. La Suisse se doit d'offrir sa coopération pour qu'une transformation paisible, associant tous les acteurs déterminants, débouche sur de nouvelles structures démocratiques, stables et respectueuses des droits humains. Elle est appelée à faire preuve de solidarité, parce qu'elle se reconnaît dans les droits et les valeurs revendiqués,
mais aussi dans son propre intérêt, eu égard aux conséquences que ces bouleversements pourraient engendrer en termes économiques et politiques, mais aussi pour la sécurité transrégionale et les migrations internationales.

Faire preuve de solidarité avec des populations affectées et des pays moins privilégiés est conforme à la longue tradition humanitaire de la Suisse. Par ailleurs, les bénéfices que notre pays tire de l'économie internationale doivent l'inciter à agir en faveur de la stabilisation des zones de crise, en contribuant solidairement et de 1

Art. 54, al. 2, Cst. (RS 101). Loi fédérale du 19 déc. 2003 sur des mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme (RS 193.9).

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façon adéquate aux efforts internationaux en faveur de la paix, de la promotion des droits humains et de la démocratie, en complémentarité avec d'autres mesures de la Confédération. Cette complémentarité doit avant tout s'effectuer avec l'aide humanitaire de la Confédération ainsi qu'avec la coopération au développement dont l'objectif principal est de contribuer à la réduction de la pauvreté dans le monde. La cohérence et la complémentarité entre ces trois politiques est vitale dans la mesure où seulement dans une société où la sécurité humaine a atteint un certain niveau, les efforts de développement ont une chance d'avoir un effet durable. De même, les efforts de développement réalisés durant des décennies peuvent être bloqués voir anéantis dans des Etats qui se fragilisent suite au démembrement de la structure étatique et à la violence armée. Sans paix ni droits humains, il n'y a pas de sécurité pour les individus; sans sécurité, pas de développement possible. Le constat est plus vrai que jamais, comme l'illlustre le Rapport Mondial sur le Développement 2011.

L'engagement de la Suisse est ainsi, aussi, dans son propre intérêt. En visant à rendre les relations internationales plus stables et le monde plus sûr et plus juste, il contribue à renforcer la sécurité et la prospérité de notre pays. En effet, les rapports d'interdépendance sont devenus si étroits qu'un conflit ou une crise, même lointains, ont souvent des retombées directes pour la Suisse: mise en danger des investissements suisses, des exportations; périls pour nos citoyens. Les Etats fragiles ou en conflit se révèlent être un terreau fertile pour le développement de la criminalité organisée, de la violence armée, de la prolifération d'armes ou de réseaux terroristes transfrontières. Nous subissons les soubresauts de l'économie mondiale très sensible aux menaces sur les flux commerciaux, les transports et les ressources énergétiques et sommes confrontés à la pression migratoire provenant de pays où prévalent l'insécurité, la violation des droits humains, l'absence de perspectives ou la dégradation de l'environnement.

La complexité et la corrélation des changements et des crises qui secouent le monde laissent présager de nouveaux défis. Si certaines évolutions géopolitiques sont riches de potentiels, des zones d'instabilité et de
tension demeurent en Europe, en Afrique, au Proche-Orient et au Moyen-Orient, en Asie et en Amérique latine. Des pans entiers de la population mondiale ont été fragilisés par les crises financières et économiques dont nombre de répercussions sur la sécurité humaine sont encore à venir. Les bouleversements environnementaux planétaires recèlent également un grand potentiel de crises.

L'engagement en faveur de la paix, du respect des droits humains et de la sécurité humaine en général constitue une réponse stratégique à ces défis et à ces risques, comme l'illustre l'emploi du crédit-cadre 2008­2012.

Résultats du crédit-cadre 2008­2012 (ch. 2) Ces dernières années, la Suisse a contribué à la promotion de la paix, des droits humains et de la démocratie ainsi qu'à la politique humanitaire et à la politique extérieure de migration en tant qu'actrice ou co-actrice influente. Tant sur le terrain de conflits particuliers que dans ses relations d'Etat à Etat et dans les enceintes internationales, elle a su se positionner en favorisant le dialogue et la prise en compte des intérêts réciproques. La mise en valeur de son savoir-faire lui a permis

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de rehausser son image dans le monde ainsi que le rayonnement de sa politique étrangère et, de ce fait, de consolider ses relations avec ses partenaires internationaux comme le montrent ci-après quelques exemples choisis. La Suisse s'est engagée dans des régions et sur des thèmes où elle a un intérêt à être active et pour lesquels elle est susceptible de faire la différence.

Dans des pays et des régions prioritaires de la politique extérieure suisse, la Confédération a tenté de répondre aux besoins en matière de sécurité humaine des Etats concernés et des populations locales tout en prenant en compte les intérêts de notre pays. La décision de lancer une activité dans un pays ou dans une région donnée a été prise sur la base d'une réflexion d'ensemble sur l'action de la Confédération.

Ainsi, elle a été présente, notamment, dans les régions suivantes: ­

En Europe du Sud-Est, région proche où elle a des intérêts importants (en termes de prévention des conflits, de sécurité, économique à moyen terme et de gestion des migrations), elle a déployé de nombreuses activités de politique de paix et de droits humains, parallèlement aux programmes de coopération technique et économique. Elle a mis l'accent sur la promotion de la confiance entre différentes communautés et différents Etats, sur le traitement du passé et la justice transitionnelle ainsi que sur la promotion des droits des membres de minorités.

­

En 2009 à Zurich, la médiation suisse entre l'Arménie et la Turquie a abouti à la signature de protocoles d'accords visant à normaliser les relations entre ces deux pays. Ces documents fixent les modalités nécessaires pour la reprise des relations diplomatiques, l'ouverture des frontières ainsi que la constitution d'un organisme pour le développement des relations bilatérales et d'une «commission sur la dimension historique». De hauts représentants des Etats-Unis, de la Fédération de Russie, de la France et de l'Union Européenne étaient présents à la cérémonie de signature pour parrainer ce résultat. La Suisse maintient depuis un contact étroit avec tous ces partenaires en vue de faciliter la mise en oeuvre de ces accords.

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En Asie centrale ­ région émergente, dotée de potentiel économique et de ressources énergétiques et dont la plupart des pays sont membres du groupe de vote helvétique au sein d'institutions financières internationales ­ elle a accordé une attention particulière au Tadjikistan et au Kirghizistan. Dans ce dernier pays, elle joue un rôle de facilitatrice du dialogue national lancé après les violences de 2010.

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Au Proche-Orient, où les intérêts de la Suisse sont multiples, la Confédération a pour priorité de promouvoir la paix ainsi que le respect du droit international public, des droits humains et du droit international humanitaire. Elle s'applique à mettre en oeuvre une stratégie de dialogue avec l'ensemble des acteurs, en s'efforçant de promouvoir les négociations et la recherche de solutions novatrices. Ces efforts sont complémentaires à ceux de l'aide humanitaire et de la coopération au développement, où la Suisse s'investit en priorité dans la protection des droits de la population civile et des groupes vulnérables.

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L'Afrique sub-saharienne dispose de richesses et de potentiels immenses.

Sollicités de toute part pour leurs ressources, les pays africains voient leur influence grandir sur la scène internationale. Un environnement politique stable et paisible à long terme permettrait de développer pleinement ces potentiels. Or les défis sont encore nombreux (fragilité institutionnelle, tensions interethniques, extrême pauvreté générant mouvements migratoires et insécurité). Certains de ces facteurs mettent en danger des décennies d'aide au développement. Pour ces raisons, l'action de sécurité humaine de la Suisse s'est fortement intensifiée ces dernières années de manière complémentaire et coordonnée avec ses efforts dans les domaines du développement et de l'aide humanitaire. Au Burundi et au Soudan, elle a apporté une contribution significative et remarquée aux efforts de paix. En Afrique centrale et de l'Ouest, dotée d'un atout particulier ­ sa culture et ses réseaux francophones ­ elle a renforcé son engagement en matière de paix et de droits humains. Ces activités répondent non seulement à des besoins locaux, mais elles permettent aussi à la Suisse de demeurer un partenaire pour des pays du continent africain, alors même que, du fait de l'entrée en jeu de nouvelles puissances, le poids relatif de l'engagement suisse sur ce continent diminue.

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En Asie ­ outre la Chine, où la Suisse a poursuivi un dialogue sur les droits humains, entamé en 1991 à la demande de Pékin ­ la politique de sécurité humaine est présente dans des pays que le rapport de politique extérieure 2010 a qualifiés de «partenaires de développement». Dans ces pays, où les instruments de développement de la DDC et du SECO sont largement utiliséspour la lutte contre la pauvreté et l'amélioration de la gouvernance, la politique de sécurité humaine soutient et complète ces efforts avec succès.

Elle a ainsi contribué fortement aux efforts de paix au Népal ainsi qu'au processus de réforme en matière de droits humains au Vietnam.

Pays neutre, la Suisse a un intérêt vital à la préservation de la paix, de la sécurité et au respect du droit international. C'est pourquoi, elle attache une grande importance à ce qu'existent, au niveau global, un consensus sur les standards, des garanties pour un respect accru du droit et des mécanismes efficaces de mise en oeuvre qui incluent tous les acteurs déterminants pour la sécurité humaine. La Confédération a ainsi participé au renforcement de la gouvernance mondiale par des initiatives ambitieuses et visibles dans le domaine de la paix, de la sécurité, des droits humains, de la politique humanitaire et de la politique extérieure de migration. Par exemple, sa 2e élection au Conseil des droits de l'homme de l'ONU constitue une reconnaissance de son engagement pour que cet organe ­ dont elle avait initié la création ­ soit solide et efficace. D'autres initiatives suisses ont porté des fruits et se poursuivent: organisation, en 2011, de la deuxième Conférence d'examen de la Déclaration de Genève sur la violence armée et le développement, initiative visant à atteindre d'ici 2015 une réduction quantifiable et mesurable de la violence armée; adoption, par un très grand nombre d'entreprises de sécurité privée du monde entier, d'un code de conduite international les obligeant à respecter les droits humains et le droit international humanitaire; lancement d'un Agenda pour les droits humains à l'occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration univer-

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selle des droits de l'homme en 2008. La Suisse est aussi le premier Etat à s'être doté d'une stratégie sur la protection des civils dans les conflits armés. Par ailleurs, la Confédération a contribué à l'élaboration de nouveaux concepts et instruments pour une gestion internationale améliorée des migrations (partenariats migratoires, protection des réfugiés dans leur région d'origine) et elle a obtenu en 2011 la présidence du Forum Global sur la Migration et le Développement, la plus importante plateforme internationale dans ce domaine.

On peut d'autant plus se féliciter des résultats auxquels la diplomatie suisse a contribué que le climat politique mondial polarisé des dernières années n'a pas toujours été propice à une politique de sécurité humaine constructive. Ces résultats indiquent que notre pays jouit, au plan international, d'une réputation d'impartialité et d'excellence dans le domaine de la promotion de la sécurité humaine. Il est un acteur apprécié et, dans le domaine de la paix, les compétences qu'il possède sont souvent recherchées par les parties en conflit elles-mêmes. Les atouts que possède la Suisse, à travers sa neutralité, sa tradition humanitaire, son absence de passé colonial, ses solides réseaux et la plateforme offerte par la Genève internationale, lui donnent des avantages comparatifs spécifiques. Notre pays a saisi les opportunités politiques qui se sont présentées et n'a pas eu peur de mener avec persévérance des efforts de longue haleine. Il a pu s'adjoindre les capacités de partenaires fiables. En outre, il convient de souligner que les actions suisses ont reposé avant tout sur des personnes ­ médiateurs, experts et conseillers ­ hautement qualifiées qui lui ont permis de jouer un rôle d'actrice. Un pilotage continu, mené sur la base de principes clairement définis et d'indicateurs stratégiques, ont assuré la bonne gestion des ressources allouées.

Promotion de la sécurité humaine 2012­2016 (ch. 3­7) Les résultats obtenus confirment le bien-fondé de la stratégie poursuivie jusqu'ici.

Le Conseil fédéral estime qu'il convient à présent de faire fructifier les atouts et le savoir-faire de la Suisse en consolidant les acquis et en répondant de manière déterminée aux profondes mutations de l'environnement socio-politique international. Il est convaincu que le moment est
venu de faire un saut quantitatif et qualitatif en augmentant substantiellement le financement de la politique de sécurité humaine dont les bénéfices à long terme pour la paix et les droits humains sont de plus en plus reconnus.

Le financement sera consacré à la poursuite de six objectifs: ­

contribuer à la prévention des conflits et à leur résolution en jouant un rôle actif de médiateur ou de facilitateur dans des processus de paix et en offrant son appui à des médiations dans des domaines à haute valeur ajoutée pour la durabilité de la paix;

­

contribuer, sur le terrain, à l'instauration et au maintien d'une paix durable par le déploiement de programmes efficaces de promotion civile de la paix;

­

contribuer au renforcement de la protection des droits humains par une politique des droits humains renforcée et réorientée, accompagnée de projets concrets dans des pays choisis;

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­

appuyer des missions multilatérales de paix, d'observation électorale et des programmes bilatéraux en leur affectant des spécialistes du Pool d'experts suisse pour la promotion civile de la paix (PEP);

­

faire progresser les débats et la définition de politiques globales et régionales à l'ONU et dans d'autres organisations internationales par des initiatives diplomatiques assorties de mesures d'accompagnement;

­

promouvoir la réflexion innovante et la mise en commun des savoirs, des expériences et des capacités opérationnelles grâce aux partenariats que la Suisse entretient avec des organisations internationales, des pays partageant ses vues et des organismes scientifiques, du secteur privé et de la société civile.

Afin d'augmenter l'impact de ses moyens, la Confédération concentrera les fonds du nouveau crédit-cadre sur les régions qu'elle considère d'intérêt stratégique et qui sont particulièrement pertinentes pour la Suisse en termes de stabilité: Méditerranée (Europe du Sud-Est, Proche-Orient, Afrique du Nord), Caucase et Asie centrale, priorités ponctuelles en Afrique sub-saharienne. (ch. 3.1). De plus, elle développera un programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Ce programme de sécurité humaine sera complémentaire aux actions des autres acteurs de la Confédération, notamment dans le domaine humanitaire. Elle gardera cependant une réserve stratégique pour réagir avec rapidité aux opportunités politiques qui se présentent dans d'autres pays et régions.

Elle se concentrera aussi sur six thèmes phares (ch. 3.2.) sur lesquels la Suisse possède une expertise confirmée et reconnue: «Paix et sécurité», «Démocratie, élections et partage du pouvoir», «Traitement du passé et prévention des atrocités», «Promotion et protection des droits humains», «Protection des civils dans les conflits armés», «Migration et lutte contre la traite des êtres humains». Il s'agit de thèmes sur lesquels la Confédération a renforcé son action ses huit dernières années en répondant aux demandes internationales de savoir-faire spécialisé qui lui ont été adressées.En outre, une part du crédit sera consacrée aux initiatives dans le domaine du désarmement, de la maîtrise des armements et de la non-prolifération. Le Conseil fédéral avait indiqué en 2010, dans son Rapport sur la politique extérieure et son Rapport sur la politique de sécurité, que la Suisse comptait s'investir davantage dans ce domaine, qui contribue de manière significative au renforcement de la sécurité humaine.

Par rapport aux années précédentes, la Confédération entend mettre un nouvel accent sur la prévention des conflits (ch. 3.1), plus efficace et beaucoup moins coûteuse d'un point de vue humain, social, économique et politique que la gestion réactive des conflits.

Le message souligne aussi l'importance de renforcer la cohérence de l'action par l'élaboration d'approches suisses intégrées impliquant tous les acteurs pertinents de la Confédération (ch. 3.4). En effet, on observe des résultats efficaces lorsque les différents instruments politiques
de la Confédération ­ tels que la politique de paix, la coopération au développement, l'aide humanitaire, la politique des droits humains (renforcée et réorientée), la politique de sécurité, voire la coopération en

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matière de justice et de police et la politique migratoire ­ sont utilisés de la manière la plus cohérente possible, de façon à se renforcer mutuellement.

Le renforcement de l'engagement suisse devrait permettre d'affermir le profil de la Suisse parmi les pays de l'OCDE qui, dans l'ensemble, entre 2006 et 20092, ont porté les budgets attribués aux activités de sécurité humaine de 1731 millions de dollars US à 2990 millions de dollars US, ce qui correspond à une augmentation de 72 %. Les données de l'OCDE pour la dernière décennie montrent notamment que les pays comparables à la Suisse comme la Norvège, la Finlande et le Danemark ont étoffé leurs budgets et intensifié leurs efforts dans le domaine de la sécurité humaine pour répondre aux besoins internationaux (ch. 4).

Annexes L'annexe 1 à ce message présente un rapport chiffré de l'affectation des fonds du crédit-cadre 2008­2012.

L'annexe 2 offre une vue d'ensemble de la politique de paix et de désarmement de la Confédération. Elle illustre notamment la nécessité d'efforts accrus de cohérence et de complémentarité entre les activités de sécurité humains, de coopération au développement et d'aide humanitaire. Cette annexe entend répondre au postulat 09.3003 du 19 janvier 2009 de la Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats (Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement), qui chargeait le Conseil fédéral «d'élaborer un rapport d'ensemble sur sa stratégie future en matière de promotion de la paix, aussi bien dans les domaines civils que dans les domaines militaires. Il inclura également la politique qu'il entend suivre à l'avenir en matière de désarmement et de maîtrise des armements. Dans cette perspective, il étudiera en particulier l'opportunité de réunir l'ensemble de ces mesures dans un seul crédit-cadre portant sur plusieurs années». Le Conseil fédéral a accepté ce postulat le 25 février 2009 et en propose le classement avec le présent document.

2

Chiffres 2010 pas encore disponibles.

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Table des matières Condensé

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1 Raison d'être de la promotion suisse de la sécurité humaine

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2 L'emploi du crédit-cadre 2008­2012 2.1 Exemples d'engagements et résultats obtenus 2.2 Affectation des fonds du crédit-cadre

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3 Promotion de la sécurité humaine 2012­2016 3.1 Objectifs, principes et indicateurs stratégiques 3.2 Thèmes 3.2.1 Paix et sécurité 3.2.1.1 Architectures internationales et nationales de paix 3.2.1.2 Désarmement et non prolifération pour la paix et la sécurité humaine 3.2.1.3 Genre, paix et sécurité 3.2.1.4 Facteurs religieux, visions du monde et résolution des conflits 3.2.2 Démocratie, élections et partage du pouvoir 3.2.3 Traitement du passé et prévention des atrocités 3.2.4 Promotion et protection des droits humains 3.2.5 Protection des civils dans les conflits armés 3.2.6 Migration et lutte contre la traite des êtres humains 3.3 Instruments 3.3.1 Médiation, facilitation et dialogue politique 3.3.2 Programmes de promotion civile de la paix 3.3.3 Politique des droits humains renforcée 3.3.4 Pool suisse d'experts 3.3.5 Initiatives diplomatiques 3.3.6 Partenariats 3.4 La sécurité humaine dans la politique extérieure suisse 3.4.1 Une tâche de plus grande ampleur, globale et transversale 3.4.2 Cohérence et complémentarité 3.5 Répartition des engagements financés par le crédit-cadre 3.6 Pilotage, gestion des projets, contrôle et assurance de la qualité 3.7 Organisation et personnel

5897 5897 5904 5904 5904

4 Teneur de l'arrêté financier 4.1 Proposition du Conseil fédéral 4.2 Volume du crédit-cadre 4.3 Durée du crédit-cadre

5938 5938 5938 5942

5 Conséquences 5.1 Conséquences pour la Confédération 5.1.1 Conséquences financières 5.1.2 Conséquences en matière de personnel

5942 5942 5942 5942

5905 5907 5908 5908 5909 5910 5914 5915 5917 5917 5919 5923 5924 5927 5929 5931 5931 5931 5933 5935 5937

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5.2 Conséquences pour les cantons et les communes 5.3 Conséquences économiques

5943 5943

6 Programme de législature

5943

7 Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité, conformité aux lois et forme de l'acte à adopter 7.2 Frein aux dépenses

5943 5943 5943

Annexes: 1 Affectation des fonds du crédit-cadre 2008­2012 2 Vue d'ensemble de la politique suisse de paix et de désarmement

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Arrêté fédéral concernant un crédit-cadre destiné à financer la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine (Projet)

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Message 1

Raison d'être de la promotion suisse de la sécurité humaine

La promotion de la sécurité humaine ­ promotion de la paix, droits humains, démocratie, politique humanitaire et migration ­ constitue un volet significatif de la politique étrangère de la Suisse. La Constitution fédérale du 18 avril 1999 assigne notamment comme objectifs à cette dernière de promouvoir la coexistence pacifique des peuples, le respect des droits de l'homme et la démocratie3.

Depuis les années 90, la Suisse s'est dotée de moyens4 et a développé une palette d'instruments spécialisés ainsi que les compétences nécessaires afin de mettre en oeuvre ces objectifs. Elle a fait face ainsi aux défis actuels, aux menaces et aux risques globaux pour la paix et la sécurité humaine et elle a répondu aux demandes croissantes de soutien de pays partenaires et de parties en conflit. Notre pays a ainsi la possibilité d'agir de manière responsable, efficace et crédible sur la scène internationale en tenant compte de son propre intérêt et en mettant en avant ses atouts.

Nul autre exemple n'illustre mieux la raison d'être de la promotion de la sécurité humaine que la situation en Afrique du Nord et au Moyen-Orient telle qu'elle s'est développée au début de 2011. Aux portes de l'Europe, les révoltes de populations aspirant à plus de dignité et revendiquant la liberté ainsi que la justice sociale ouvrent des perspectives inespérées pour un épanouissement de la démocratie et de l'Etat de droit dans la région. Les défis sont de très grande ampleur. La Suisse se doit d'offrir sa coopération pour qu'une transformation paisible et associant tous les acteurs déterminants débouche sur de nouvelles structures démocratiques, stables et respectueuses des droits de l'homme. Elle est appelée à faire preuve de solidarité, parce qu'elle se reconnaît dans les droits et les valeurs revendiqués, mais aussi dans son propre intérêt, eu égard aux conséquences que ces bouleversements pourraient engendrer en termes économiques et politiques, mais aussi pour la sécurité transrégionale et les migrations internationales.

La notion de sécurité humaine Contrairement à la notion traditionnelle de sécurité, axée exclusivement sur la protection de l'Etat, le concept de sécurité humaine est centré sur la protection des individus et de la communauté.

Après la fin de la Guerre froide, le constat a été fait que les conflits internes,
les déplacements forcés, l'arbitraire, la violence politique et criminelle, la pauvreté et la famine constituaient, bien plus que les guerres interétatiques, une menace directe pour la sécurité de l'individu. Conçue dans les années 1990, la notion de sécurité humaine vise à tenir compte de ces menaces.

3 4

Art. 54, al. 2, Cst. (RS 101).

La loi fédérale du 19 déc. 2003 sur des mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme (RS 193.9) explicite les objectifs constitutionnels et prévoit un crédit pluriannuel pour leur mise en oeuvre.

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Dans son acception la plus courante, la sécurité humaine se définit souvent comme la liberté de vivre à l'abri de la peur. Elle est promue par les activités en faveur de la paix, des droits humains, de la démocratie, de la politique humanitaire et de la politique extérieure de migration, qui font l'objet du présent message. Dans une acception plus large, elle inclut également la liberté de vivre à l'abri du besoin, dont la promotion est notamment assurée par les activités de lutte contre la pauvreté déployées dans le cadre de la coopération au développement et de l'aide humanitaire.

La complémentarité entre sécurité humaine au sens étroit d'une part, et lutte contre la pauvreté d'autre part, est particulièrement pertinente dans le contexte d'Etats fragiles ou fragilisés. En effet, ces derniers sont pris dans l'engrenage de l'insécurité et de la pauvreté qui interagissent, dans une spirale pernicieuse de violence et de dénuement. Le rapport de la Banque mondiale 2011 indique qu'aucun Etat à bas revenu fragile ou affecté par un conflit n'a atteint un seul des objectifs du millénaire pour le développement5. Ces situations toujours plus nombreuses ­ des personnes frappées d'extrême pauvreté vivent dans des contextes fragiles ­ nécessitent l'engagement cohérent et complémentaire des instruments de la sécurité humaine, du développement et de l'aide humanitaire. Elles demandent le renforcement des partenariats entre les acteurs de la diplomatie et du développement.

Même si elles sont complémentaires, les tâches qui relèvent de ces deux champs d'action sont malgré tout très différentes. Alors que la coopération au développement met l'accent sur l'aide structurelle à long terme visant à lutter contre la pauvreté et à relever les défis mondiaux, la politique de sécurité humaine a une orientation différente. En effet, elle a pour objet de soutenir les processus et les négociations de paix, de mettre en oeuvre des mesures d'accompagnement et de soutien dans le contexte de négociations politico-diplomatiques et d'apporter expertise et appui sur des questions thématiques, qui sont souvent au coeur du règlement des conflits et pour lesquelles la fourniture de conseils spécialisés revêt une importance décisive. C'est pourquoi la politique de sécurité humaine doit pouvoir réagir plus souplement aux besoins,
et ce dans un horizon temporel plus rapproché et de manière adaptée à une situation donnée. Par ailleurs, elle se concentre sur l'accompagnement et l'encouragement de processus plutôt que sur les structures.

Solidarité et influence Faire preuve de solidarité avec des populations affectées et des pays moins privilégiés est conforme à la tradition humanitaire de la Suisse. Notre pays a non seulement le devoir de respecter ses obligations internationales en matière de droits humains, de droit international humanitaire et de droit des réfugiés, mais sa politique étrangère définit la promotion de ces droits comme l'une de ses cinq priorités6.

Par ailleurs, les bénéfices que notre pays tire de l'économie internationale doivent l'inciter à agir en faveur de la stabilisation des zones de crise, en contribuant solidairement et de façon adéquate aux efforts internationaux en faveur de la paix, de la 5 6

Banque mondiale, Rapport mondial sur le développement 2011 «Conflit, sécurité et développement».

Dans son Rapport sur la politique extérieure 2000, le Conseil fédéral affirmait qu'il «veut fournir une contribution essentielle et bien visible à la prévention de conflits armés», «conduire une politique humanitaire suisse indépendante et disposant d'un profil marqué», et renforcer par des «mesures appropriées ses efforts en vue du respect et de la promotion des droits de l'homme, de la démocratie et des principes de l'Etat de droit».

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promotion des droits humains et de la démocratie, en complémentarité avec d'autres mesures de la Confédération.

L'engagement de la Suisse et la mise en valeur de son savoir-faire permettent en outre de rehausser son image dans le monde ainsi que le rayonnement de sa politique étrangère, et, de ce fait, de consolider ses relations avec ses partenaires internationaux. Grâce à l'action concrète qu'elle déploie dans le domaine de la sécurité humaine, la Suisse tisse des réseaux de relations non seulement avec des acteurs issus des régions en conflit, mais aussi avec d'importants pays et puissances qui, tout en défendant leurs propres intérêts, mènent des activités au service de la stabilité.

Ces relations et ces réseaux revêtent pour la Suisse 'une importance primordiale en lui ouvrant des portes dans des domaines qui ne sont pas directement liés à la sécurité humaine. Les différents engagements assumés dans le Caucase renforcent nos relations avec les pays de la région, mais aussi avec la Russie, les Etats-Unis et les pays européens intéressés. En Europe du Sud-Est, l'engagement de la Suisse s'accompagne d'un développement des relations avec les Etats-Unis et l'UE, qui sont eux-mêmes fortement engagés dans la région. Lorsqu'elle lance des initiatives multilatérales importantes, la Confédération travaille dans la plupart des cas avec des groupes transrégionaux, ce qui a un impact notable sur les contacts et les réseaux bilatéraux tissés avec nos partenaires.

La stature d'un pays sur la scène internationale ne dépend pas uniquement de facteurs traditionnels de puissance et d'influence comme le poids économique et militaire. La capacité à résoudre des problèmes mondiaux joue un rôle décisif. À travers la politique de sécurité humaine et le travail accompli sur certains thèmes, la Suisse contribue à apporter des réponses aux grands défis de la planète et fournit une importante contribution à la stabilité internationale. Sa réputation et sa place dans la politique internationale s'en trouvent renforcées, ce qui facilite la défense des intérêts nationaux. En ce sens, la politique de sécurité humaine est à la fois l'expression de notre solidarité et l'instrument de notre politique de défense des intérêts.

En d'autres termes, la stature et la réputation internationales ont aujourd'hui, plus que jamais,
partie liée avec la crédibilité d'un pays. Est crédible celui qui fait concorder ses paroles avec ses actes: ainsi, qui dit démocratie et droits humains dit aussi promotion de la démocratie et des droits droits humains; qui dit paix dit aussi promotion de la paix; qui dit problèmes dit solutions à apporter; enfin, qui dit solutions, dit aussi partenariats. La stabilité politique et économique de la Suisse, son système politique de démocratie directe, son indépendance, l'universalité de ses relations extérieures et son action solidaire lui valent une haute estime. Gagnante de la mondialisation et considérée à juste titre comme telle, la Suisse a su mieux que d'autres pays créer la stabilité politique sur son territoire. Un engagement plus marqué et la possibilité de répondre mieux et plus rapidement aux besoins renforceront avant tout la crédibilité de notre pays.

Par ce message, le Conseil fédéral entend poursuivre les efforts engagés, tout en se dotant des instruments nécessaires pour pouvoir encore mieux réagir aux demandes et aux besoins, qui sont nombreux.

Faire face aux défis, aux menaces et aux risques en tenant compte de son intérêt L'engagement de la Suisse est aussi dans son propre intérêt. En visant à rendre les relations internationales plus stables et le monde plus sûr et plus juste, il contribue à renforcer la sécurité et la prospérité de notre pays. En effet, les rapports d'interdé5887

pendance sont devenus si étroits dans le monde qu'un conflit ou une crise, même lointains, ont souvent des retombées directes pour la Suisse: mise en danger des investissements suisses, des exportations et des bons résultats de décennies de coopération au développement; montée des prix des matières premières; périls pour nos citoyens, qui peuvent être impliqués dans un conflit ou pris en otages. Les Etats fragiles ou en conflit se révèlent un terreau fertile pour le développement de la criminalité organisée, de la violence armée, de la prolifération d'armes ou de réseaux terroristes transfrontières7. Nous subissons les soubresauts de l'économie mondiale très sensible aux menaces sur les flux commerciaux, les transports et les ressources énergétiques et sommes confrontés à la pression migratoire provenant de pays où prévalent l'insécurité, l'arbitraire, l'absence de perspectives ou la dégradation de l'environnement.

La complexité et la corrélation des changements et des crises qui secouent le monde augurent de nouveaux défis à venir. Si certaines évolutions géopolitiques sont riches de potentialités, des zones d'instabilité et de tension demeurent en Europe, en Afrique, au Proche-Orient et au Moyen-Orient, en Asie et en Amérique latine. Par ailleurs, comme le montrent des rapports alarmants des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, des pans entiers de la population mondiale ont été fragilisés par les crises financières et économiques, dont nombre de répercussions sur l'accès aux droits fondamentaux et sur la stabilité sont encore à venir. Les bouleversements environnementaux planétaires, en particulier les changements climatiques et la désertification, recèlent également un grand potentiel de crises.

L'engagement en faveur de la paix et de la sécurité humaine constitue, en complémentarité avec les autres instruments de sa politique étrangère, une réponse stratégique à ces risques et défis, comme l'illustre l'emploi du crédit-cadre 2008­2012.

2

L'emploi du crédit-cadre 2008­2012

Ces dernières années, la Suisse a contribué à la promotion de la paix, des droits humains et de la démocratie ainsi qu'à la politique humanitaire et à la politique extérieure de migration en tant qu'actrice ou co-actrice influente. Tant sur des terrains de conflits particuliers que dans ses relations d'Etat à Etat et dans les enceintes internationales, la Suisse a su se positionner en favorisant le dialogue et la prise en compte des intérêts réciproques.

Entre 2008 et 2011, elle a consacré 240 millions de francs à ces efforts. La quasitotalité des moyens alloués aux engagements dans ces domaines sont imputés à l'aide publique au développement (APD) selon les critères de l'OCDE (97 % à partir de 2009).

7

Le nombre des Etats fragiles, que l'on estime aujourd'hui à une cinquantaine, va vraisemblablement encore augmenter, notamment en raison de l'aggravation des facteurs de crise économique et sociale (pour consulter la liste des Etats fragiles, v. le Country Policy and Institutional Assessment (CPIA) 2007 de la Banque mondiale, le Brookings Index of State Weakness in the Developing World 2008 et le Carleton University Country Indicators for Foreign Policy (VFIP) 2007 index).

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2.1

Exemples d'engagements et résultats obtenus

La Suisse s'engage dans des régions et sur des thèmes qui présentent un intérêt pour elle et pour lesquels elle est susceptible de faire la différence.

Médiations, dialogues et programmes dans des pays et régions choisis Les activités géographiques de la sécurité humaine s'inscrivent dans les priorités de la politique étrangère suisse, laquelle doit être vue comme un tout. Ces priorités ont été décrites en détail dans le Rapport sur la politique extérieure 2010 du Conseil fédéral8.

La décision de lancer une activité dans un pays ou une région donnée est prise sur la base d'une réflexion d'ensemble sur l'action de la Confédération, réflexion souvent rédigée sous la forme de stratégies pluriannuelles. Il s'agit de répondre aux besoins des pays concernés et des populations locales ­ par exemple en accompagnant une transition démocratique ou en facilitant un processus de paix ­ tout en prenant en compte les intérêts de la Suisse. Les paragraphes qui suivent donnent quelques exemples d'engagements par régions: L'Europe du Sud-Est représente une région prioritaire pour la politique extérieure suisse. Comme le décrit la «Stratégie du Conseil fédéral pour les Balkans occidentaux» de 2005, les intérêts de la Suisse dans ou en relation avec cette région sont pour l'essentiel de quatre ordres différents: premièrement, la stabilité de la région, dans une logique de prévention de conflits qui auraient à nouveau des impacts directs également sur la Suisse; deuxièmement, la sécurité ­ entendue comme celle de l'ensemble du continent européen et celle de la Suisse; troisièmement, l'économie, dans l'idée de tirer le meilleur parti possible du potentiel à moyen terme de la région; et quatrièmement, les migrations. Dans ce contexte, la Confédération a déployé de nombreuses activités de politique de paix et de droits humains parallèlement avec les programmes de coopération technique et économique. Elle a aussi conclu des partenariats migratoires avec la Bosnie et Herzégovine, le Kosovo et la Serbie. Elle a choisi trois axes prioritaires: des activités de «transformation des conflits» et de promotion de la confiance (confidence building) entre différentes communautés ou entre différents Etats; des activités de traitement du passé et de justice transitionnelle; et des activités de promotion des droits des minorités,
afin d'encourager une meilleure participation politique de celles-ci et de favoriser l'établissement d'un cadre constitutionnel, légal et institutionnel à même de garantir la protection et l'égalité sociale des membres de minorités. La Suisse participe en outre aux opérations civiles et militaires de l'OTAN et de l'UE au Kosovo (KFOR/Swisscoy; EULEX; ICO) et en Bosnie et Herzégovine (EUFOR).

Egalement dans un voisinage relativement proche, l'Asie centrale revêt une importance particulière pour la Suisse. Les pays d'Asie centrale ­ région émergente, dotée de potentiel économique et de ressources énergétiques ­ sont membres de l'OSCE et entretiennent des relations tant avec la Russie qu'avec la Chine, l'Inde ou les pays occidentaux. Le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et le Turkménistan appartiennent au groupe de vote de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods (Fonds monétaire international FMI et Banque mondiale), du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et, sauf pour ce qui est du Kazakhstan, de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Or, la paix, la 8

Rapport sur la politique extérieure 2010 du 10 déc. 2010 (FF 2011 961).

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protection des droits humains et l'existence de structures démocratiques sont indispensables pour tirer parti du grand potentiel de la région. En ce sens, les violences contre la population ouzbèke du Sud du Kirghizstan, survenues en juin 2010 dans le contexte de fragilité intérieure consécutif au renversement du président Bakiev en avril et à l'installation d'un gouvernement provisoire, ont constitué une menace grave pour la stabilité de la région. La Suisse a non seulement apporté sa contribution à l'aide humanitaire multilatérale en faveur des populations ouzbèkes déplacées et des réfugiés en Ouzbékistan voisin, mais elle a agi sur place et dans les enceintes internationales pour que soit apportée au nouveau gouvernement kirghize, engagé à rompre avec les pratiques du précédent régime, l'aide nécessaire à la consolidation pacifique de son autorité. En particulier, la Suisse a encouragé l'élaboration d'une nouvelle constitution et elle soutient l'organisation d'élections parlementaires destinées à instaurer une pleine légitimité démocratique au Kirghizistan. Elle soutient également la «Community Securitiy Initiative» de l'OSCE, une initiative dans le domaine policier, qui vise à améliorer la situation des droits humains au sud du pays, à renforcer le professionnalisme de la police communautaire et, à plus long terme, à promouvoir des forces de l'ordre ethniquement mixte. Elle s'est aussi vu attribuer le rôle de facilitatrice du dialogue national lancé début 2011 (v. encadré). La Suisse est également présente au Tadjikistan avec des projets concrets dans le domaine des droits humains et une facilitation dans le domaine de la paix.

Quatre exemples de médiation suisse Médiation entre l'Arménie et la Turquie En 2009 à Zurich, la médiation suisse entre l'Arménie et la Turquie a abouti à la signature de protocoles d'accords visant à normaliser les relations entre ces deux pays. Ces protocoles fixent les modalités nécessaires pour la reprise des relations diplomatiques, l'ouverture des frontières ainsi que la constitution d'un organisme pour le développement des relations bilatérales et d'une «commission sur la dimension historique». De hauts représentants des Etats-Unis, de la Fédération de Russie, de la France et de l'Union Européenne étaient présents à la cérémonie de signature pour parrainer ce
résultat. La Suisse maintient depuis un contact étroit avec tous ces partenaires en vue de faciliter la mise en oeuvre de ces accords.

Médiation entre la Fédération de Russie et la Géorgie La Suisse exerce un mandat de puissance protectrice à la fois pour la Fédération de Russie et pour la Géorgie. Elle représente les intérêts de l'une auprès de l'autre. Dans ce contexte, les deux Etats ont donné leur accord pour une médiation de la Suisse ayant pour objectif de faciliter les négociations d'accession de la Fédération de Russie à l'OMC. La Géorgie s'est opposée à l'accession. Une première réunion entre les deux parties a eu lieu en Suisse en mars 2011. Depuis, d'autres réunions trilatérales ainsi que des consultations en Russie et en Géorgie ont eu lieu. La Suisse cherche une solution qui permettrait l'accession de la Fédération de Russie à l'OMC par consensus.

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Un dialogue entre leaders serbes du Kosovo et de Serbie En coopération avec un partenaire non gouvernemental, la Suisse facilite un dialogue entre leaders serbes du Kosovo et de Serbie. Pour les participants ­ politiciens, experts académiques et membres de la société civile ­ l'objectif est d'influencer les politiques qui ont un impact sur les conditions de vie au Kosovo.

De larges consultations ont permis de préparer des propositions concrètes destinées aux autorités et visant à améliorer le sort des Serbes au Kosovo et à assurer leur avenir. Ce dialogue a donné une plus grande visibilité à ces derniers et contribué à renforcer leur participation aux processus électoraux et aux institutions kosovares. Il a également permis d'encourager les leaders à coopérer entre eux pour mieux défendre leurs intérêts auprès des autorités. Il s'agit de la seule plate-forme de dialogue qui réunisse des leaders serbes de tous horizons politiques. A la demande des participants, la Suisse continuera à faciliter ce dialogue afin de contribuer à une meilleure représentation des intérêts des minorités au Kosovo.

Un dialogue national au Kirghizistan Le coup d'Etat et les violences de juin 2010 à Och et à Djalalabad (sud du Kirghizistan) entre groupes ouzbeks et kirghizes ont fait des morts et des blessés.

Dans ce contexte difficile, l'idée d'entamer un dialogue national pour identifier les problèmes majeurs affectant la situation dans le pays a été lancée. La Suisse a accepté de jouer le rôle de facilitatrice du processus, qui a débuté en 2011, en étroite collaboration avec l'organisation International Alert. Le dialogue, qui vise à associer tous les acteurs déterminants, devra être entièrement pris en charge par les acteurs locaux. A terme, il devrait permettre non seulement d'améliorer la confiance et de renouer les relations, mais aussi de contribuer à renforcer la sécurité humaine et la stabilité au Kirghizistan.

Au Proche-Orient, région proche géographiquement, les intérêts de la Suisse sont multiples. Sur un plan stratégique tout d'abord, il s'agit pour la Suisse, comme pour l'ensemble de la communauté internationale d'ailleurs, d'y assurer une atmosphère de paix et de stabilité. Celle-ci est un élément important de sa propre sécurité, raison pour laquelle la Suisse contribue à l'amélioration des conditions
économiques et du respect des droits de l'homme, de la promotion de la démocratie et de l'instauration d'un climat de paix et de dialogue dans l'ensemble de cette région. La Suisse entretient aussi d'importants liens économiques avec certains pays de la région, que ce soit pour ses exportations (Israël est le troisième partenaire commercial de la Suisse au Proche-Orient) ou pour ses investissements. Les priorités de la Suisse dans cette région sont la promotion de la paix ainsi que le respect du droit international public, des droits humains et du droit international humanitaire. Elles s'inscrivent dans des actions visant en particulier à soutenir les efforts des Etats-Unis et de l'Union européenne dans l'ensemble de la région. Dans ce contexte, les initiatives suisses visent à privilégier la voie diplomatique pour réduire les tensions prévalant dans la région.

La Suisse met ainsi en oeuvre une stratégie de dialogue avec l'ensemble des acteurs, en s'efforçant de promouvoir les négociations et la recherche de solutions. Dans un contexte complexe, la Suisse a pu se positionner grâce à des propositions innovantes et par sa qualité de facilitatrice à l'écoute de toutes les parties que ce soit par exemple dans le cadre du conflit israélo-palestinien ou au Liban. La Suisse soutient aussi 5891

des processus visant à préparer un terrain régional propice au règlement du conflit, notamment sur le thème de la sécurité de l'approvisionnement en eau au MoyenOrient. Ces efforts sont complémentaires à ceux de l'aide humanitaire et de la coopération au développement, où la Suisse s'investit en priorité dans la protection des droits de la population civile et des groupes vulnérables.

L'Afrique sub-saharienne dispose de richesses et de potentiels immenses. Sollicités de toute part par les grandes puissances qui s'intéressent à leurs ressources, les pays africains voient leur influence grandir sur la scène internationale. Un environnement politique stable et paisible à long terme permettrait de développer pleinement ce potentiel. Or, les défis sont encore nombreux: fragilité institutionnelle de certains Etats, faiblesse de l'Etat de droit, violations graves des droits de l'homme et impunité, tensions interethniques, extrême pauvreté et absence de perspectives économiques générant de forts mouvements migratoires dans la région mais aussi vers l'Europe, développement d'associations criminelles ou terroristes. Certains de ces facteurs mettent en danger les résultats de décennies d'aide au développement dans des pays prioritaires de la coopération suisse. L'engagement actif de la Confédération en Afrique subsaharienne lui a permis de développer de bonnes relations avec la majorité des Etats de la région. Entre autres, l'action de sécurité humaine de la Suisse s'est fortement intensifiée ces dernières années de manière complémentaire et coordonnée avec les efforts du développement et de l'aide humanitaire. Ainsi, au Burundi, dans le cadre de la stratégie du DFAE pour la région des Grands Lacs 2009­2012, la Suisse a joué un rôle fondamental dans la transformation du dernier mouvement armé burundais en un parti politique. Une fonction internationale notable lui a été confiée en raison de son engagement: la Suisse préside depuis mi-2009 la configuration pour le Burundi au sein de la Commission de consolidation de la paix des Nations Unies, ce qui lui permet de contribuer à la transition de ce pays vers la paix et le développement durables et lui offre en même temps un accès privilégié au Conseil de sécurité de l'ONU. Au Soudan, la Suisse jouit de la confiance des parties grâce à son engagement de longue
date et au rôle qu'elle a joué dans la négociation de l'Accord de cessez-le-feu dans les Monts Nouba (2002) et de l'Accord de paix global (2005). Au Sud-Soudan, elle a aidé à la préparation de la transition vers l'indépendance, en amont du référendum de janvier 2010. Ses bons offices et son appui dans les domaines de la gouvernance, du fédéralisme et de la décentralisation y sont toujours appréciés. Au Darfour son expertise a plusieurs fois été sollicitée dans le cadre des efforts de médiation de l'Union africaine et de l'ONU. Là aussi, les efforts en faveur de la paix sont complémentaires à l'engagement de l'aide humanitaire suisse sur place. S'y ajoute la présence d'experts civils du DDPS dans le secteur de la sécurité au Sud-Soudan. En Afrique centrale et de l'Ouest, l'une des régions les plus pauvres du monde et où la propagation du terrorisme et du crime organisé s'est ajoutée à l'instabilité politique, la Suisse a renforcé son engagement pour la politique de paix en mettant l'accent sur le Mali, le Niger et le Tchad. Elle apporte son savoir-faire aux institutions nationales et régionales afin de renforcer les compétences locales en matière de résolution des conflits. Par rapport à d'autres acteurs internationaux, la Suisse dispose d'un atout particulier dans la région: sa culture et ses réseaux francophones, notamment avec la présidence de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) en 2011/12. En outre, des experts policiers et douaniers participent à des missions de l'ONU dans le cadre du Pool d'experts pour la promotion civile de la paix, notamment en Côte d'Ivoire (ONUCI), en Guinée Bissau (ONUGBIS) et désormais au Libéria (MINUL). Par ailleurs, le DFAE a ouvert des dialogues réorientés en matière de droits humains 5892

avec le Sénégal et le Nigéria. De plus, le DFJP et le DFAE ont concrétisé un partenariat migratoire avec le Nigéria, qui prend en compte les intérêts migratoires des deux pays (migration et développement). Ces activités répondent non seulement à des besoins locaux et sont appréciées mais elles permettent aussi à la Suisse de demeurer un partenaire pour des pays du continent africain, alors même que, du fait de l'entrée en jeu de nouvelles puissances (telles que la Chine, l'Inde et le Brésil), le poids relatif de l'engagement suisse sur ce continent diminue et, avec lui, la capacité d'influence de notre pays.

En Asie ­ outre la Chine ­ où la Suisse a poursuivi un dialogue sur les droits humain, entamé en 1991 à la demande de Pékin, la politique de sécurité humaine est présente dans des pays que le rapport de politique extérieure 2010 du Conseil fédéral a qualifiés de partenaires de développement. Dans ces pays, où les instruments de développement de la DDC et du SECO sont largement utilisés, de manière ciblée, pour la lutte contre la pauvreté et l'amélioration de la gouvernance, la politique de sécurité humaine soutient et complète ces efforts avec succès. Ainsi, au Népal ­ où une guerre civile avait fait, en 10 ans, 16 000 morts ­ un accord de paix fut signé le 21 novembre 2006. L'engagement suisse dans les domaines de la médiation et de la paix a fortement contribué à ce résultat, des médiateurs suisses ayant accompagné très étroitement et en coulisse le processus débouchant sur cet accord. Le concours de la Suisse a aussi été sollicité pour la phase délicate de mise en oeuvre de l'accord de paix, en particulier pour ce qui est de la création d'une structure étatique fédéraliste, de la réforme du système de sécurité et de la formulation d'une nouvelle constitution. La confiance accordée à la Suisse s'est bâtie sur une longue durée, notamment au cours de 50 ans d'activités de la coopération suisse au développement et un engagement conséquent en faveur des droits humains. Au Vietnam ­ pays dont le potentiel économique est avéré ­ la Suisse participe à la consolidation de l'Etat de droit par le biais d'un dialogue qui lui permet d'aborder des thèmes sensibles comme le droit pénal, les procédures pénales et l'exécution des peines, les droits des minorités et la liberté religieuse ou encore le droit
des femmes et l'égalité entre les sexes.

Une attention particulière est portée à la peine capitale, la torture et la détention administrative. De nombreuses synergies ont pu être exploitées avec les programmes menés sur place dans le domaine de la coopération suisse au développement.

Relancé à la demande des autorités vietnamiennes en 2004, ce dialogue peut être qualifié de fructueux puisque, d'une part, il a réellement contribué au processus de réforme engagé dans le pays et que, d'autre part, les relations entre la Suisse et le Vietnam ont tiré un très grand profit de ce processus.

Initiatives diplomatiques et activités multilatérales Pays neutre, la Suisse a un intérêt vital à la préservation de la paix etde la sécurité et au respect du droit international. C'est pourquoi elle attache une grande importance à l'existence, au niveau global, d'un consensus sur les standards, de garanties pour un respect accru du droit et de mécanismes efficaces de mise en oeuvre, qui incluent tous les acteurs déterminants pour la sécurité humaine.

Ces dernières années, la Confédération a participé au renforcement de la gouvernance mondiale par des initiatives ambitieuses et visibles dans le domaine de la paix, de la sécurité, des droits humains, de la politique humanitaire et de la politique extérieure de migration. Dépositaire des Conventions de Genève, partie aux principaux traités en matière de droits de l'homme, de droit international humanitaire et de droit des réfugiés, elle s'est notamment employée à renforcer la protection de ces droits, 5893

et, en particulier, pour les plus groupes les plus vulnérables de la société. C'est par un effort continu durant plusieurs années et sa collaboration avec des partenaires de pointe qu'elle a obtenu les résultats suivants: ­

La création du Conseil des droits de l'homme, son installation à Genève et l'élection à deux reprises de la Suisse pour y siéger comptent parmi les grands succès de notre pays depuis son adhésion à l'ONU. Lors de son premier mandat (2006­2009), la Suisse s'est engagée pour que le Conseil devienne une institution solide et efficace. Elle s'est également portée volontaire pour figurer parmi les premiers pays soumis à l'Examen périodique universel en 2008. Sa réélection en 2010 lui permet de participer pleinement aux travaux de révision des activités et du fonctionnement du Conseil en 2011, cinq ans après sa création. Par ailleurs, l'intégration dans les procédures de travail du Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU (HCDH) de l'Index Universel des Droits de l'Homme (www.universalhumanrightsindex.org), une base de données en ligne développée par le DFAE en coopération avec l'Université de Berne et offerte au HCDH en 2010, contribue à améliorer le suivi des recommandations internationales, en particulier en vue du second cycle de l'Examen périodique universel, qui a débuté en 2011.

­

La Déclaration de Genève sur la violence armée et le développement, lancée en 2006 par la Suisse, associée au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), avait été signée par 108 Etats en 2010. Son objectif est d'atteindre d'ici 2015 une réduction quantifiable et mesurable de la violence armée. Les besoins sont urgents: la violence armée sous toutes ses formes (criminalité, guerre) constitue un sérieux obstacle aux efforts de développement. Selon le PNUD, le coût de cette violence dépasse le total des dépenses mondiales de l'aide publique dans ce domaine. Une conférence ministérielle d'examen, la deuxième après 2008, fera le point sur la situation fin 2011 à Genève. La Suisse préside un groupe de travail de 14 pays et organisations affiliées, qui sensibilise les gouvernements sur les effets négatifs et les coûts de la violence armée, promeut le développement d'indicateurs et de recherches ainsi que l'intégration de la problématique dans les politiques de coopération au développement. En 2009, le Secrétaire général de l'ONU a consacré un rapport à la thématique, suite à une résolution présentée par la Suisse en 2008. En 2011, c'est au tour de la Banque mondiale de faire des recommandations touchant à ce sujet dans son rapport sur le développement mondial consacré au thème «Conflits, Sécurité et Développement».

­

Des missions sécuritaires sont de plus en plus souvent confiées à des entreprises privées, en particulier dans les zones de conflit. A l'initiative de la Suisse, de très nombreuses entreprises de sécurité privée du monde entier ont adopté, en novembre 2010 à Genève, un code de conduite international les obligeant au respect des droits humains et du droit international humanitaire. Ce code est assorti de normes opérationnelles ainsi que d'un dispositif de vérification et de responsabilité. Il a été préparé avec le concours de l'Académie de droit international humanitaire et des droits humains et celui du Centre pour le contrôle démocratique des forces armées, deux institutions sises à Genève et partenaires de la Confédération. Le processus a reçu

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l'appui déterminant des Etats-Unis et du Royaume-Uni, ainsi que de fédérations professionnelles et d'organisations de la société civile.

­

A l'occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme en 2008, la Suisse a lancé un Agenda pour les droits humains visant à proposer un cadre de réflexion pour l'action de ces dix prochaines années dans ce domaine. Ce chantier a été approfondi en 2009 grâce aux recherches menées par des institutions universitaires de plusieurs pays.

L'initiative se poursuit avec l'appui d'un groupe de pays amis.

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En 2007, le DFAE a lancé le projet Défendre les défenseurs des droits humains, conjointement avec l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Des personnalités suisses offrent un parrainage à des défenseurs des droits humains exposés afin d'attirer l'attention du public sur leur travail et de les protéger. La dernière action en date, une mission dans l'Est de la République démocratique du Congo en mars 2010, a permis de documenter les risques pris par des défenseurs des droits humains ­ en grande partie des femmes ­ dans leurs engagements en faveur des victimes de violences sexuelles.

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Les populations civiles payent un très lourd tribu aux conflits intra-étatiques de ce début du XXIe siècle. Dépositaire des Conventions de Genève, la Suisse est le premier Etat à s'être doté, en 2009, d'une stratégie sur la protection des civils dans les conflits armés. En combinant les instruments de la diplomatie ­ opérationnels et juridiques ­ de la Confédération, il s'agit de relever un double défi: d'une part, d'amener Etats et groupes armés non étatiques à respecter le droit international dans les conflits et les situations de violence armée et, d'autre part, de fournir des réponses opérationnelles adaptées aux besoins des civils sur le terrain. Par le biais de la stratégie, la Suisse a renforcé son action de protection en faveur des catégories les plus vulnérables: déplacés internes, réfugiés, femmes et enfants. Elle a également contribué à la mise à disposition du Secrétaire général des Nations Unies et du Conseil de Sécurité d'un système de surveillance et de rapport sur les contraintes pesant sur l'accès humanitaire. En Colombie et au Soudan, l'engagement de la Suisse a permis de renforcer les capacités de protection des acteurs locaux (leaders traditionnels, associations de victimes, municipalités). Les efforts de la Suisse ont été salués dans le rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur la protection des civils dans les conflits armés (2010).

­

La Suisse, directement concernée par les migrations internationales, a contribué à l'élaboration de nouveaux concepts et de nouveaux instruments pour une gestion internationale améliorée de la migration. Ils prennent en compte aussi bien les défis que les opportunités de la migration et insistent sur la notion de partenariats entre tous les acteurs concernés. Sous l'égide de l'Office fédéral des migrations (ODM) et du Département fédéral des affaires étrangères, la Suisse a conclu des partenariats migratoires avec la Bosnie et Herzégovine, le Kosovo, la Serbie et le Nigéria. Ces partenariats offrent à notre pays une plate-forme de dialogue avec le pays d'origine des migrants sur les défis et les opportunités de la migration. Ils permettent de trouver ensemble des solutions tenant compte des intérêts de tous les partenaires ­ telle que la réadmission, des programmes d'aide au retour volontaire, des mesures de lutte contre la traite des êtres humains, des synergies entre la migration et le développement ou encore des possibilités d'échanges 5895

en matière de formation ou de perfectionnement. Au titre de sa stratégie de protection des réfugiés dans leur région d'origine, la Suisse assiste les pays de premier accueil à renforcer leurs capacités nationales de protection des réfugiés et à mettre en place des solutions locales durables. De concert avec plusieurs offices fédéraux, en particulier la DDC et l'ODM, des projets pilotes ont été réalisés au Yémen ­ pays qui accueille de nombreux réfugiés de la Corne de l'Afrique ­ et en Syrie, où arrivent la plupart des réfugiés d'Irak.

Sur le plan multilatéral, la Direction politique du DFAE en charge de la sécurité humaine travaille depuis plusieurs années en étroite collaboration avec l'ODM et la DDC pour intensifier le dialogue international dans le domaine de la migration. La nomination de la Suisse à la présidence du Forum mondial sur la migration et le développement (FMMD) pour l'année 2011 constitue un succès remarquable. A l'échelle mondiale, le FMMD est le forum le plus important et le plus écouté dans son domaine.

Leçons des résultats On peut d'autant plus se féliciter des succès auxquels la diplomatie suisse a contribué que le climat politique mondial des dernières années n'a pas toujours été propice à une politique de médiation en faveur de la paix ni à une politique de sécurité humaine constructive. Les crises alimentaires, financières et économiques et leurs retombées, la polarisation récurrente des relations entre pays industrialisés et pays en développement ou encore entre Etats occidentaux et Etats aux visions du monde différentes présentent autant de défis à la recherche de solutions globales durables.

Plusieurs facteurs ont permis d'atteindre les résultats décrits. L'expérience démontre que notre pays jouit, au plan international, d'une réputation d'impartialité et d'excellence dans le domaine de la promotion de la sécurité humaine. Il est un acteur apprécié et, dans le domaine de la paix, les compétences qu'il possède sont souvent recherchées par les parties en conflit elles-mêmes Par ailleurs, la Suisse possède des atouts indéniables dans les domaines de la promotion civile de la paix et de la sécurité humaine: n'appartenant à aucune alliance, n'ayant pas le pouvoir d'imposer de solutions, sans passé colonial, elle n'a pas d'intentions cachées. De plus, elle bénéficie d'une
expertise reconnue dans le domaine du fonctionnement démocratique au sein d'un Etat multiculturel, grâce à son histoire, sa culture politique et une longue tradition de bons offices et de dialogues. Les mandats de puissance protectrice qui lui sont attribués, en particulier la représentation des intérêts des Etats-Unis ou de la Russie, témoignent du fait que la Suisse est perçue comme un intermédiaire neutre, digne de confiance et jouissant d'une crédibilité ainsi que d'une indépendance solide dans son action. En outre, elle dispose d'un très bon réseau de partenaires gouvernementaux et non gouvernementaux ainsi que d'une plate-forme internationale et d'un pôle d'excellence unique avec la Genève internationale. Cumulant de tels atouts, notre pays est en mesure d'apporter une plus-value importante dans des domaines clés de la promotion de la paix et de la sécurité humaine. Ces avantages comparatifs spécifiques lui permettent de saisir les opportunités politiques qui se présentent.

En outre, les succès d'une initiative diplomatique, d'un processus de paix ou de la politique des droits humains sont souvent le résultat d'efforts de longue haleine, façonnés avec persévérance et menés avec des partenaires fiables. Car même dans un climat général plutôt favorable, les blocages, les durcissements et des phases de régression ne sont cependant pas rares, particulièrement dans les processus de paix.

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Ensuite on observe que, souvent, on atteint de bons résultats sur le terrain, lorsque les différents instruments politiques de la Confédération ­ tels que la coopération au développement, l'aide humanitaire voire la coopération en matière de justice et de police et la politique migratoire ­ sont utilisés de la manière la plus cohérente possible, de façon à se renforcer mutuellement. En outre, il convient de mentionner le fait que les actions suisses reposent avant tout sur des personnes ­ médiateurs, experts et conseillers ­ hautement qualifiées, qui lui permettent de jouer un rôle d'actrice.

Enfin, un pilotage continu a été mené sur la base de principes clairement définis et d'indicateurs stratégiques, qui assurent la bonne gestion des ressources.

La politique de sécurité humaine ne peut être définie une fois pour toute sur le long terme. La nature actuelle des conflits armés et un environnement international en profonde mutation, rendent indispensable l'adoption de stratégies innovantes et bien pensées, une mise à jour des concepts et des instruments, le renouvellement des partenariats et un renforcement de la coordination entre acteurs. Le présent message s'y emploie.

2.2

Affectation des fonds du crédit-cadre

L'utilisation des ressources financières 2008­2012 a été orientée par des objectifs stratégiques définis par le Conseil fédéral9. Le rapport détaillé et chiffré de l'affectation des fonds du crédit-cadre 2008­2012 pour chacun de ces objectifs figure en annexe 1 de ce message.

3

Promotion de la sécurité humaine 2012­2016

3.1

Objectifs, principes et indicateurs stratégiques

Par les actions concrètes de promotion de la sécurité humaine rendues possibles grâce aux ressources demandées, le Conseil fédéral entend contribuer à la solution de problèmes globaux conformément aux priorités de la politique extérieure suisse.

Par le biais du présent message, le Conseil fédéral vise principalement six objectifs:

9

­

contribuer à la prévention des conflits et à leur résolution en jouant un rôle actif de médiateur ou de facilitateur dans des processus de paix et en offrant son appui à des médiations dans des domaines où son apport a une haute valeur ajoutée;

­

contribuer, sur le terrain, à l'instauration et au maintien d'une paix durable, qui tienne compte des besoins des populations de régions en crise ou en conflit par le déploiement de programmes efficaces de promotion civile de la paix, y compris des mesures de désarmement ciblées;

­

contribuer au renforcement de la protection des droits humains par une politique des droits humains renforcée et réorientée, accompagnée de projets concrets dans des pays choisis; Message du Conseil fédéral du 15 juin 2007 concernant la continuation de mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme (FF 2007 4495) et Rapport du Conseil fédéral du 25 mars 2009 en réponse à la lettre du 3 déc. 2008 de la Commission de gestion du Conseil des Etats (non publié).

5897

­

appuyer des missions multilatérales de paix, d'observation électorale et des programmes bilatéraux en leur affectant des spécialistes du Pool d'experts suisse pour la promotion civile de la paix (PEP);

­

faire progresser les débats et la définition de politiques globales et régionales à l'ONU et dans d'autres organisations internationales sur des thèmes relatifs à la paix, aux droits humains, au désarmement, à l'action humanitaire et aux thématiques migratoires par des initiatives diplomatiques assorties de mesures de mise en oeuvre desdites initiatives;

­

promouvoir la réflexion innovante et la mise en commun des savoirs, des expériences et des capacités opérationnelles grâce aux partenariats que la Suisse entretient avec des organisations internationales, universelles et régionales, des pays partageant ses vues et des organismes scientifiques, économiques et de la société civile. Ces partenariats permettent de démultiplier l'efficacité de ses actions.

La Direction politique du DFAE en charge de la mise en oeuvre de la politique de sécurité humaine fonde la réalisation de ces objectifs sur les neuf principes de conduite stratégique et méthodes de travail décrits ci-dessous. Il se fixe des indicateurs qualitatifs et quantitatifs afin de garantir la pertinence et l'efficacité de l'utilisation de ses ressources.

Principe 1: Centrage thématique Le DFAE concentre son action de sécurité humaine sur six thèmes-phares, qui lui permettent de contribuer de manière crédible et efficace à la réalisation des objectifs décrits ci-dessus. Il convient de ne pas se disperser mais d'intervenir dans un nombre restreint de domaines dans lesquels la Suisse a accumulé ­ parfois depuis un grand nombre d'années ­ un savoir-faire reconnu et recherché et qui confère à son action une valeur ajoutée par rapport à celle d'autres pays ou d'organisations internationales.

Ce sont d'abord quatre thèmes qui sont de nature à prévenir les conflits, assurer la durabilité des processus de paix et protéger les populations civiles: ­

10

Paix et sécurité (ch. 3.2.1) ­ soit, entre autres, les armes dont l'utilisation engendre des conséquences humanitaires graves telles que les mines antipersonnel et les armes nucléaires ainsi que les armes légères et de petit calibre, dont la prolifération entraîne une aggravation de la violence armée; la réforme du secteur de la sécurité; et la réflexion internationale sur les opérations internationales de maintien de la paix. Sur le thème des armes légères, la Suisse avait déjà obtenu un succès diplomatique en 2005 avec l'adoption, par l'Assemblée générale de l'ONU, de l'instrument de traçage, résultat d'une initiative suisse10. Avec le sous-thème, Facteurs religieux, visions du monde et résolution des conflits ­ notre pays apporte à la communauté internationale une expertise unique développée au cours d'un travail de plusieurs années sur des conflits dans lesquels s'entremêlent de manière déterminante ces différents facteurs. La Suisse est aussi très active sur le sous-thème Genre, paix et sécurité ­ notamment parce qu'elle est engagée dans la mise en Instrument international visant à permettre aux Etats de procéder à l'identification et au traçage rapide et fiable des armes légères et de petit calibre illicites, approuvé par l'Assemblée générale de l'ONU le 8 déc. 2005.

5898

oeuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité11 forte de la conviction que la sécurité humaine et la paix durable ne peuvent être envisagées que si les hommes et les femmes sont associés paritairement à tous les processus; ­

Démocratie, élections et partage du pouvoir (ch. 3.2.2) ­ un thème sur lequel notre pays à une grande crédibilité de par son système politique et son histoire;

­

Traitement du passé et prévention des atrocités (ch. 3.2.3) ­ un thème sur lequel la Suisse est engagée depuis de nombreuses années et a obtenu reconnaissance et visibilité sur la scène internationale. Son engagement s'inscrit dans la droite ligne de sa tradition humanitaire, de son engagement contre l'impunité (Cour Pénale Internationale) et de son soutien à la promotion d'une paix durable basée sur la justice;

­

Protection des civils dans les conflits armés (ch. 3.2.5) ­ la double qualité d'Etat dépositaire et de Haute Partie Contractante aux Conventions de Genève donne à la Confédération une autorité et une légitimité particulières dans les activités visant au respect du droit international humanitaire (DIH) par les parties aux conflits armés;

Ce sont ensuite deux thèmes qui permettent de relever des défis globaux actuels et importants, de renforcer la dignité humaine et de prendre en compte le nouveau rôle joué par les acteurs non étatiques, notamment le secteur privé, dans la sécurité humaine: ­

Renforcement de la promotion et de la protection des droits humains (ch. 3.2.4) ­ domaine dans lequel la Suisse a lancé de longue date de nombreuses initiatives de premier plan couronnées de succès et où elle dispose de crédibilité vu son engagement pour le respect de ces droits sur son propre territoire. Elle a acquis une crédibilité particulière suite à des initiatives abouties sur le sous-thème Economie et sécurité humaine. En tant qu'Etat à économie libérale et siège d'importantes sociétés évoluant à l'échelle internationale, elle dispose d'excellents réseaux avec toutes les parties prenantes. En même temps, elle est exposée à de possibles critiques si des entreprises domiciliées en Suisse portent atteinte aux droits humains à l'étranger.

­

Migration et lutte contre la traite des êtres humains (ch. 3.2.6) ­ en effet, la Suisse a un intérêt direct à ce que la migration internationale soit sûre et régulière et qu'elle s'effectue dans le respect des droits des migrants ainsi que des intérêts du pays qu'ils ont quitté, de celui qui les accueille et des pays par lesquels ils transitent;

Ces thèmes sont intégrés dans un grand nombre de projets et de programmes géographiques ou font l'objet d'initiatives diplomatiques suisses. La plupart d'entre eux font l'objet de plans d'action (genre, paix et sécurité) ou de concepts et stratégies pluriannuelles intra- ou interdépartementales (armes légères, lutte contre les mines, traitement du passé, protection des civils etc.). L'expertise thématique a été développée depuis plusieurs années et est continuellement approfondie, au sein de l'administration et en association avec des partenaires extérieurs. Pour des raisons 11

Résolution 1325 du Conseil de sécurité du 31 oct. 2000 appelée aussi «Résolution sur les femmes, la paix et la sécurité», S/RES/1325 (2000).

5899

d'efficacité et de ressources, le DFAE ne cherche en effet pas à se doter de manière exhaustive de toutes les compétences thématiques mais soutient des partenaires disposant de connaissances spécialisées (institutions académiques, organisations internationales, fondations, ONG) qui, dans un domaine précis, peuvent fortifier son expertise.

Principe 2: Concentration géographique Le DFAE concentre et combine ses ressources dans le but d'accroître l'efficacité des mesures prises. Il choisit, pour son engagement en faveur de la paix et des droits humains, les zones de conflits et les régions à faible protection des droits humains et du droit international humanitaire selon les critères suivants: ­

Efficacité: l'engagement de la Suisse a-t-il de bonnes chances de contribuer positivement aux changements et d'avoir une valeur ajoutée en contribuant de manière utile, significative, voire unique, à la promotion de la paix, des droits humains ou du droit international humanitaire?

­

Intérêts de la Confédération: un conflit ou une crise humanitaire ont-ils des répercussions économiques, migratoires, sécuritaires, humanitaires, environnementales sur la Suisse ou sur sa politique de coopération au développement?

­

Pertinence et demande: l'engagement de la Suisse répond-il à des besoins et est-il souhaité par les parties au conflit, ou par la communauté internationale? Pour ce qui est de la coopération dans le domaine des droits humains, le gouvernement du pays partenaire témoigne-t-il d'une volonté de réforme?

­

Point d'insertion et atouts de la Suisse: existe-t-il des liens historiques, politiques ou économiques avec la région choisie? La Suisse possède-t-elle des compétences spécifiques qui se révéleraient particulièrement utiles dans le règlement du conflit ou le renforcement des droits humains et du droit international humanitaire?

­

Synergies: est-il possible d'obtenir des effets de synergie avec d'autres activités de la Confédération, notamment celles qui relèvent de la coopération au développement, de l'aide humanitaire, de la promotion militaire de la paix, de la protection de l'environnement global ou des efforts déployés par des missions internationales?

­

Risque calculé: le risque politique que prend la Suisse est-il proportionné par rapport au bénéfice escompté?

A la lumière de ces critères, la Suisse concentrera encore davantage les moyens du nouveau crédit-cadre sur les régions qu'elle considère d'intérêt stratégique et qui sont particulièrement pertinentes pour elle en termes de stabilité: Méditerranée (Europe du Sud-Est, Moyen-Orient, Afrique du Nord), Caucase et Asie centrale, priorités ponctuelles en Afrique sub-saharienne. A ces pays et régions viennent s'ajouter les pays avec lesquels elle coopère pour promouvoir les droits humains (ch. 3.3.3).

Chaque pays et région prioritaire fera en principe l'objet d'un investissement d'au moins un million de francs par an et bénéficiera d'un conseiller pour la paix, qui renforcera la représentation suisse sur place (ambassade ou bureau de coopération).

Le présent message fixe donc de nouvelles priorités géographiques par rapport au message 2008­2012: outre un programme spécial pour l'Afrique du Nord et le 5900

Moyen-Orient, la Suisse développe un programme de sécurité humaine en Afrique de l'Ouest et centrale, forte de ses réseaux francophones et de l'existence, pour cette région, de programmes humanitaires ou de développement. Par ailleurs, le Sri Lanka ne figure plus parmi les pays prioritaires en raison de la modification de la situation sur place ces dernières années (ch. 3.3.2).

La liste des pays et régions prioritaires sera régulièrement revue et ajustée après une analyse des développements politiques et de la marge de manoeuvre possible. Pour chaque programme, une stratégie de sortie est en effet prévue, sur la base d'évaluations régulières prenant en compte les critères suivants: ­

Pertinence: les critères qui ont conduit à choisir de s'engager dans un contexte particulier sont-ils encore valables?

­

Stabilité et horizon: dans quelle phase de transformation ou de réformes le contexte d'engagement se situe-t-il? La phase post-conflit est-elle suffisamment stable? Le risque de résurgence de la violence est-il élevé?

­

Efficacité: les instruments suisses apportent-ils une contribution significative au changement? Le contexte nécessite-t-il l'engagement d'une large palette d'instruments suisses ou des interventions ponctuelles suffisent-elles? De quelle manière la complémentarité avec les actions d'autres acteurs de la Confédération tels que la DDC peut-elle être assurée au mieux?

­

Durabilité: qu'adviendrait-il des résultats obtenus et des projets suisses en cas de sortie? D'autres partenaires pourraient-ils répondre aux besoins?

­

Impact: l'engagement suisse dans un autre contexte (région, pays) est-il susceptible, à moyen terme, d'avoir un impact plus élevé sur la sécurité humaine?

Hormis le programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient, les engagements géographiques devraient absorber plus de la moitié du budget à disposition (indicateur: 55 %). De cette part, les trois quarts du budget seront destinés aux zones prioritaires. Le quart restant alimentera des programmes pilotes menés dans d'autres régions (ch. 3.3.2) ainsi qu'une réserve stratégique annuelle permettant de réagir à l'évolution de l'actualité et aux opportunités politiques qui se présenteront.

Principe 3: Utilisation en synergie de tous les moyens d'action à disposition Dans ses activités de sécurité humaine, la Confédération peut couvrir tout le spectre de l'action politique: du projet sur le terrain jusqu'à la définition, au niveau multilatéral, de nouvelles politiques et de nouvelles normes, de la création de mécanismes ou d'institutions, en passant par des consultations et des démarches politiques bilatérales, une mise à disposition de conseils, de formation, de produits de la recherche conceptuelle et de détachements d'experts. Suivant la situation, il est possible de recourir à ces moyens d'action en les combinant ou en les échelonnant. Les moyens d'action continueront à être utilisés ensemble dans la conception et la réalisation des programmes et initiatives suisses de sécurité humaine pour accroître les effets de synergies.

Principe 4: Engagement sur plusieurs années Il est impossible de régler durablement les conflits armés actuels en se cantonnant à des mesures ponctuelles, isolées, censées donner des résultats rapides et visibles. Il en va de même de la promotion des droits humains ou encore du lancement d'une 5901

initiative diplomatique thématique. Dans la grande majorité des cas, une politique efficace et crédible demande un engagement à moyen terme, seul à même de créer une base de confiance et de lancer une dynamique de changement constructive.

Néanmoins, il arrive parfois que des événements politiques inopinés ouvrent soudain des espaces d'action prometteurs ou, à l'inverse, qu'ils contraignent à ajuster ou même à interrompre des activités. Le DFAE doit donc être en mesure de planifier l'emploi de ses ressources de manière flexible afin de pouvoir saisir ces opportunités et réagir à ces changements. Le crédit-cadre permet de planifier des activités sur plusieurs années et de recourir de façon souple et efficace à divers instruments. La grande majorité des engagements sont ancrés sur une stratégie à moyen terme fixant le contenu des actions et garantissant leur intégration dans l'ensemble de la politique étrangère de la Confédération (voir aussi ch. 5).

Principe 5: Niveaux supérieurs et moyens d'influence Le DFAE se concentre sur la collaboration avec les acteurs politiques clés. Dans un processus de paix particulier, ses actions s'adressent avant tout aux dirigeants des parties au conflit, que ceux-ci agissent à titre officiel ou de manière plus informelle.

Près des deux tiers des activités développées le sont avec les acteurs politiques clés (trak 1 et 1,5). La collaboration avec des personnalités et des organisations influentes de la société civile n'est cependant pas négligée, car elle offre fréquemment des points d'ancrage alternatifs très prometteurs.

Principe 6: La Suisse dans le rôle d'actrice La Suisse est dite actrice de sa politique lorsqu'elle initie ou met elle-même en oeuvre un projet. Elle est dite co-actrice lorsqu'elle y est engagée de manière décisive, en tant que partenaire. Elle agit enfin en tant que donatrice lorsqu'elle finance une activité sans pour autant participer à sa conduite.

Le crédit-cadre permet à la Suisse d'être d'abord une actrice directe de sa politique de sécurité humaine ou une co-actrice influente. Les deux tiers des engagements financiers de ce crédit-cadre devraient ainsi être consacrés à des projets dans lesquels la Suisse joue le rôle d'actrice ou de co-actrice.

Principe 7: Dimension sexospécifique: rôles impartis aux hommes et aux femmes La conception
et la réalisation des actions de promotion de la sécurité humaine doivent prendre en compte les rôles et les besoins différents des femmes et des hommes et ont pour objectif une participation égale des femmes à la promotion de la paix et de la sécurité humaine. A ce titre, le choix des experts détachés vise aussi à l'équilibre entre les sexes. A l'avenir, environ 60 % des engagements devraient tenir compte, de manière déterminante, de la dimension sexospécifique.

Principe 8: Orientation vers la prévention des conflits armés et de la violence armée Si l'importance de prévenir les conflits armés et d'autres situations de violence plutôt que de réagir lorsqu'il est trop tard paraît à première vue être une évidence, l'existence d'une culture de prévention n'est de loin pas encore une réalité pour la communauté internationale. Pourtant, la prévention est plus efficace et beaucoup moins coûteuse d'un point de vue humain, social, économique et politique que la réaction par l'aide d'urgence, les mesures de maintien de la paix, la reconstruction et la consolidation de la paix.

5902

L'importance de prévenir a pris un nouveau relief durant la dernière décennie, compte tenu des risques que peuvent représenter les Etats en situation de fragilité (p.ex. terreau fertile pour le développement du terrorisme ou la criminalité organisée et risque de débordement des crises sur les Etats voisins) et du coût avéré de l'absence d'actions préventives se traduisant par un impact négatif sur le développement ou la nécessité de multiplier les missions de maintien de la paix. L'apparition de nouveaux facteurs de risque tels que les changements climatiques et la dégradation environnementale rendent encore plus pressants les efforts de prévention des conflits armés et d'autres situations de violence.

La Confédération entend contribuer à renforcer les architectures régionales, nationales et internationales pour la prévention des conflits armés et autres situations de violence. Elle entend intervenir sur trois piliers de la prévention: premièrement, en visant à rendre les structures et les mécanismes internationaux et régionaux de prévention plus efficaces, deuxièmement, en soutenant le développement des mécanismes nationaux et locaux de règlement pacifique des conflits (entre autres par des projets au niveau bilatéral), et, troisièmement, en s'engageant de manière rapide et cohérente en cas de crise (diplomatie préventive). Pour que l'action soit efficace, la recherche de synergies, le développement de stratégies communes et la combinaison des divers instruments au service de la prévention entre tous les acteurs pertinents de la Confédération, notamment dans le domaine de la paix, du développement, de la sécurité et du droit international, sont incontournables. En effet, la prévention requiert à la fois un engagement à long terme, sur les causes profondes des conflits armés, et des réponses à court et moyen terme, pour agir sur la dynamique des conflits armés et de la violence armée.

Concrètement, de la lutte contre la prolifération d'armes aux programmes de promotion civile de la paix, du soutien au renforcement de l'Etat de droit et de la démocratie à la participation aux missions internationales de paix, de la réintégration des anciens combattants à la reconstruction, la Confédération mettra en action ses différents instruments, les combinera entre eux et les adaptera de sorte à contribuer
activement à la prévention de nouveaux conflits armés ou autres situations de violence. Elle entend également continuer à s'engager pour renforcer les capacités et clarifier les responsabilités des différents acteurs étatiques et non étatiques en la matière aux niveaux global, régional, national et local.

Principe 9: Le dialogue pour promouvoir la sécurité humaine Un des atouts historiques de la Suisse est sa capacité de promouvoir le dialogue en tant qu'interlocuteur fiable et crédible. Dans un contexte de tensions internationales, en particulier, il est important de savoir bâtir des ponts entre des positions différentes. Le dialogue a été jusqu'à présent un instrument particulièrement utile de la politique étrangère suisse: il a permis à notre pays d'obtenir des succès remarqués et de se faire ainsi une place au sein de la communauté internationale.

Ces dernières années, la Suisse a promu le dialogue dans les enceintes internationales, dans ses relations avec les Etats et dans le cadre de ses activités sur le terrain, tant pour faire avancer le respect des droits humains que pour promouvoir la paix.

La Suisse entend encore renforcer l'instrument du dialogue à l'avenir.

Outre ces neufs principes, la Suisse ­ qui souscrit aux standards internationaux ­ prendra notamment en compte, dans la réalisation de ses objectifs, les dix Principes d'engagement international dans les Etats fragiles et les situations précaires du

5903

Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, pour autant qu'ils soient applicables à l'action politique et diplomatique.12

3.2

Thèmes

La Suisse se concentre sur six thèmes sur lesquels elle possède une expertise confirmée et reconnue et qui lui confèrent une importante valeur ajoutée en comparaison internationale.

3.2.1

Paix et sécurité

3.2.1.1

Architectures internationales et nationales de paix

La paix, la sécurité, les droits humains et le développement sont indissociables et c'est de plus en plus par une approche holistique que l'ONU, l'UE, l'OSCE, l'OCDE, l'OTAN et d'autres organisations et acteurs abordent les défis dans ces domaines. L'on assiste par exemple à la mise en place d'une véritable architecture institutionnelle pour la consolidation de la paix (peacebuilding architecture), au développement de stratégies intégrées et globales ainsi qu'à d'importants efforts pour réformer les institutions existantes. La Suisse soutient activement cette évolution et oeuvre en particulier dans les domaines suivants: Elle contribue substantiellement aux travaux internationaux relatifs à la consolidation de la paix dans le cadre multilatéral en avançant, à l'ONU et dans d'autres enceintes multilatérales, des propositions sur les questions telles que la cohérence et la coordination de l'effort international et les bonnes pratiques. Tout en suivant une approche intégrée à l'échelle nationale («whole of government approach»), la Suisse s'engage aussi pour trouver des réponses aux défis du maintien de la paix, auxquels la question de la consolidation de la paix est étroitement liée.

La nature des conflits actuels, qui sont le plus souvent intra-étatiques et se déroulent dans des environnements fragiles, rend les missions internationales de maintien de la paix (Peacekeeping Missions) de plus en plus complexes. Ces missions requièrent un travail coordonné et complémentaire de leurs différentes composantes. Ainsi, l'ONU tente de regrouper, dans les situations qui s'y prêtent, les ressources civiles et militaires au sein de missions dites intégrées. L'UE opte également pour une telle 12

Les principes, adoptés en avril 2007 par l'OCDE CAD sont: Principe 1: Prendre le contexte comme point de départ Principe 2: Ne pas nuire Principe 3: Faire du renforcement de l'État l'objectif fondamental Principe 4: Accorder la priorité à la prévention Principe 5: Reconnaître qu'il existe des liens entre les objectifs politiques, sécuritaires et de développement Principe 6: Promouvoir la non-discrimination comme fondement de sociétés stables et sans exclus Principe 7: S'aligner sur les priorités locales d'une manière différente selon le contexte Principe 8: S'accorder sur des mécanismes concrets de coordination de l'action des acteurs internationaux Principe 9: Agir vite... mais rester engagé assez longtemps pour avoir des chances de réussite Principe 10: Éviter de créer des poches d'exclusion

5904

approche. La Suisse continuera à participer aux développements conceptuels et opérationnels dans ce domaine ainsi qu'à des missions particulières sur le terrain.

Ainsi, l'ONU et la Suisse notamment ont mené des réflexions portant sur le regroupement des ressources civiles et militaires au sein de missions dites intégrées.

La thématique de la réforme du système de sécurité (RSS) offre depuis une dizaine d'années un cadre pour mener des réformes dans les secteurs des forces armées, de la police, des douanes, de la justice, du renseignement ainsi que du contrôle de ces institutions par le Parlement et la société civile. Les acteurs internationaux l'ont intégré dans leurs programmes de coopération en matière de paix, de développement et de politique des droits humains. C'est le cas de la Suisse ­ elle-même un exemple particulier de la manière dont peuvent fonctionner des systèmes de sécurité dans un Etat décentralisé. Avec le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées de Genève (DCAF), elle dispose d'un partenaire compétent, expérimenté et mondialement reconnu.

Le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) des anciens combattants est souvent un facteur essentiel de la consolidation de la paix. Ce domaine comprend des volets relevant de la politique de développement, de la politique de sécurité et de la politique humanitaire. La Suisse continuera à promouvoir les bases du DDR dans les négociations de paix et les programmes de consolidation de la paix dans lesquels elle s'engagera.

3.2.1.2

Désarmement et non prolifération pour la paix et la sécurité humaine

Depuis l'entrée en vigueur de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (Convention d'Ottawa) en 1999, des résultats impressionnants ont été atteints mais il reste beaucoup à faire: 39 Etats parties doivent encore nettoyer des zones minées. La Suisse prend part à la destruction des stocks, aux campagnes de déminage, à la sensibilisation sur les dangers des mines et à l'assistance aux victimes. Elle soutient le Centre international de déminage humanitaire ­ Genève (CIDHG) ­ principal centre de compétence en matière de lutte contre les mines, qui héberge l'unité de soutien aux Etats parties à la Convention d'Ottawa. Elle s'emploie à ce que cette Convention soit universellement ratifiée et travaille à faire respecter l'interdiction des mines antipersonnel par les groupes armés non étatiques. La Suisse s'engage pour la résolution de problèmes humanitaires pressants engendrés par d'autres résidus explosifs de guerre, dont les armes à sous-munitions. En 2011, la Convention sur les armes à sous-munitions (Convention d'Oslo) sera soumise au Parlement fédéral pour ratification. Dans l'ensemble, les mesures de mise en oeuvre des Conventions d'Ottawa et d'Oslo sont étroitement liées. Aussi, la Stratégie antimines actuelle de la Confédération suisse sera-t-elle adaptée notamment pour inclure les aspects touchant les résidus explosifs de guerre et la problématique des armes à sous-munitions.

Les armes légères et de petit calibre font des centaines de milliers de morts chaque année. Il est aisé de se les procurer et de les utiliser. La diffusion illicite et l'utilisation abusive de ces armes compromettent gravement la sécurité humaine, prolongent et intensifient des conflits et entravent le progrès social et économique.

Très active dans la lutte contre le commerce illicite et l'utilisation abusive des armes 5905

légères et de petit calibre sur le plan international et dans le cadre onusien depuis la fin des années 90, la Suisse s'appuie depuis 2008 sur une stratégie qui sera adaptée pour la période 2012­2015. Elle soutient le Small Arms Survey (SAS) à Genève, principal centre de compétence en matière d'armes légères et de petit calibre. Elle est à l'origine d'une initiative en faveur de la diminution de la violence armée et de ses conséquences pour le développement socio-économique (voir ch. 3.3.5).

Dans le cadre de l'ONU, la Suisse participe activement aux négociations d'une convention sur le commerce des armes classiques dite traité sur le commerce des armes (TCA). Le TCA établira des normes internationales communes et juridiquement contraignantes pour l'importation, l'exportation et les transferts internationaux de ces armes. Il visera à empêcher leur commerce illégal qui, notamment en Afrique, nourrit les conflits, lesquels engendrent des violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire et font obstacle au développement durable. La Suisse apporte dans ces négociations une profonde expérience puisqu'elle dispose d'une législation et d'une pratique stricte en matière de contrôle des exportations d'armes, d'une longue tradition humanitaire ainsi que d'un savoir-faire concret dans les domaines de la politique de paix et de droits de l'homme.

Dans son rapport sur la politique extérieure 201013 ainsi que dans son rapport sur la politique de sécurité de 201014, le Conseil fédéral a indiqué que la Suisse s'investira davantage dans le domaine du désarmement, de la maîtrise des armements et de la non-prolifération. Le désarmement nucléaire constituera un axe prioritaire (ch. 3.3.5). En effet, une politique de désarmement engagée est le complément naturel d'une politique active de promotion de la paix. Elle sert le même but constitutionnel que la promotion civile de la paix, à savoir la coexistence pacifique des peuples, et contribue de manière significative au renforcement de la sécurité humaine. Aujourd'hui, la thématique du désarmement et de la maîtrise des armements est caractérisée à la fois par des défis complexes et par l'émergence de nouvelles opportunités qu'il faut saisir pour permettre des avancées attendues de longue date.

Or, si la Suisse a été jusqu'ici particulièrement active dans
le domaine du désarmement de certaines armes conventionnelles ayant un impact dévastateur sur les populations civiles (mine, armes légères etc.), tel n'est pas le cas pour le désarmement dans son ensemble (armes de destruction massive, armes classiques lourdes et leur prolifération), où un engagement plus marqué s'avère nécessaire et opportun. La Suisse est particulièrement bien positionnée pour jouer un rôle marqué grâce à sa solide expérience des bons offices et des initiatives diplomatiques. Elle entretient par ailleurs de bonnes relations avec pratiquement tous les pays, y compris les grandes puissances. Sa tradition humanitaire et sa neutralité perpétuelle sont synonymes de non-agression et de non-appartenance à des alliances militaires. Enfin, elle n'est pas dotée d'armes de destruction massive et soutient une doctrine de l'emploi défensif de la force armée. Des moyens substantiels (1 million de francs en 2011) provenant du présent crédit-cadre seront désormais consacrés chaque année à ce domaine. Ce faisant, le Conseil fédéral donne suite au postulat 09.3003 du 19 janvier 2009 de la Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats (Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement), dont le classement est demandé dans le 13 14

Rapport du 10 déc. 2010 sur la politique extérieure 2010 (FF 2011 961).

Rapport du 23 juin 2010 du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la politique de sécurité de la Suisse, FF 2010 4681.

5906

présent message. Le Conseil fédéral a accepté ce postulat le 25 février 2009 (voir annexe 2). Vu les moyens accordés par le présent crédit-cadre, il estime qu'il n'est pas opportun de proposer un nouveau crédit-cadre pour le financement additionnel de l'engagement suisse en matière de désarmement, de maîtrise des armements et de non-prolifération.

3.2.1.3

Genre, paix et sécurité

Deux constats fondamentaux sous-tendent la politique de sécurité humaine de la Suisse: 1. Les conflits armés et la violence armée n'affectent pas les hommes et les femmes de la même manière. 2. La sécurité humaine et la paix durable ne peuvent être envisagées que si les hommes et les femmes sont associés paritairement à tous les processus. Par conséquent, pour être couronnée de succès, la politique de paix doit être définie en tenant compte des rôles et des besoins spécifiques des hommes et des femmes. La résolution du Conseil de sécurité de l'ONU 1325 (S/RES/1325) relative aux femmes, à la paix et à la sécurité du 31 octobre 2000 définit les exigences en la matière. Elle engage les Etats, toutes les parties à un conflit armé et tous les acteurs engagés dans la promotion de la paix, à: ­

encourager la participation accrue des femmes à la promotion de la paix;

­

prévenir la violence sexospécifique ainsi que protéger les besoins et les droits des femmes et des filles pendant et après des conflits armés;

­

intégrer une perspective de genre dans tous les projets et programmes de promotion de la paix.

Ces points ont été récemment approfondis dans plusieurs résolutions subséquentes.

Entre autres, la résolution 1820 du Conseil de sécurité est consacrée à la prévention des actes de violence sexuelle, à la lutte contre l'impunité des auteurs de ces actes et à la protection des droits des femmes et des filles. La résolution 1888 crée notamment un poste de représentant spécial chargé de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés (SRSG).

Pour intégrer systématiquement dans sa politique de promotion de la paix les exigences complexes et transversales formulées dans ces résolutions, la Suisse a été l'un des premiers pays à élaborer en 2007 un plan national d'action (PNA). La deuxième phase de mise en oeuvre (2010­2012) a été lancée en octobre 2010. La mise en oeuvre sera évaluée périodiquement et les résultats seront consignés dans un rapport consacré aux progrès réalisés.

Une mesure concrète mise en place en vue d'attester de la prise en compte de l'approche intégrée sexospécifique (gender mainstreaming) dans les programmes et projets de promotion de la sécurité humaine consiste à utiliser un indicateur «genre» dans les demandes de crédit. Cet indicateur continuera à permettre d'évaluer la dimension «genre» à travers les flux financiers liés aux activités de sécurité humaine (gender responsible budgeting).

5907

3.2.1.4

Facteurs religieux, visions du monde et résolution des conflits

Des facteurs religieux et politiques sont des éléments clés à prendre en compte dans la résolution de nombreux conflits contemporains. Le DFAE travaille avec des partenaires en Suisse et à l'étranger sur des conflits dans lesquels s'entremêlent de manière déterminante ces différents facteurs. Il applique dans ces actions une méthodologie d'approche neutre du point de vue religieux et confessionnel, qui ne met pas ses interlocuteurs sous tutelle en imposant une interprétation de leurs comportements ou de leurs attitudes. Il ne se limite pas aux conflits dans lesquels l'extrémisme islamique est un facteur à considérer, même si ce dernier suscite actuellement une grande attention à travers le monde. Le DFAE aborde aussi des problèmes politiques où les facteurs à prendre en compte sont les visées nationalistes ou radicalisantes de mouvements d'inspiration religieuse.

Parmi d'autres initiatives concrètes visant à la transformation de conflits issus de la rencontre entre divers systèmes de valeurs ou visions du monde continueront notamment à figurer l'engagement au sein de l'Alliance des Civilisations des Nations Unies ainsi que des projets de dialogue sur des thématiques d'intérêt commun et destinés à instaurer la confiance entre des acteurs politiques séculiers et des acteurs politiques émanant de mouvements d'inspiration religieuse ou entre des acteurs politiques d'obédience religieuse différentes.

3.2.2

Démocratie, élections et partage du pouvoir

L'abus de pouvoir et la captation des ressources au sein d'un Etat sont généralement liés à un système politique caractérisé par le manque de séparation des pouvoirs et de contrôle effectif. Rare alternance du pouvoir et processus électoraux inéquitables, répression de l'opposition, discriminations à l'égard des minorités et corruption sont aussi des caractéristiques d'un tel système.

Avec son statut de plus vieille démocratie du monde, la Suisse est bien placée pour apporter son appui au renforcement des structures et des processus démocratiques dans le cadre de sa politique de sécurité humaine et de sa coopération au développement. Pour ce qui est des activités menées au titre de la sécurité humaine, l'accompagnement de manière visible et durable des processus de démocratisation requiert des ressources financières et humaines importantes. Par conséquent, le présent message prévoit d'augmenter les ressources en faveur du soutien à la démocratisation. Elles seront affectées à des activités dans le contexte de processus de paix particuliers ou seront mises au service d'acteurs de la prévention opérationnelle des conflits (à court et moyen terme).

C'est dans ce cadre que la Suisse continuera à l'avenir à appuyer la préparation et la conduite d'élections, à soutenir la prévention des conflits électoraux et l'élaboration de constitutions et à fournir des conseils en matière de fédéralisme et de séparation des pouvoirs. Elle entend mettre davantage en avant sa propre expérience nationale éprouvée en matière de fédéralisme ­ un fédéralisme qui promeut les minorités linguistiques et culturelles. Toutefois, il n'existe pas de recette toute faite pour la mise en place de structures politiques, et l'expertise suisse doit donc être mise en oeuvre avec soin et axée sur les besoins concrets d'une société déterminée.

5908

La prévention des conflits électoraux Si elles sont organisées correctement et en toute transparence, les élections ont un effet stabilisateur. Mais elles peuvent aussi susciter la violence, menaçant ainsi la paix et la démocratie, tout particulièrement dans les Etats fragiles.

Depuis quelques années, la Suisse offre de façon ponctuelle de l'expertise en matière de prévention des conflits électoraux. Elle investit dans l'analyse systématique des facteurs de conflit ayant trait à des élections et participe au débat international sur le développement de mesures de prévention. Des experts suisses provenant des cantons et des communes sont disposés à offrir leur expertise.

Il convient de renforcer les efforts dans ce domaine, notamment en mettant davantage l'accent sur l'amélioration du contexte et de l'organisation des élections, entre autres par les instruments suivants: mise à disposition d'expertise pour des révisions du cadre juridique électoral afin qu'il soit non discriminatoire et dissuade des fraudes, promotion des instruments de transparence qui renforcent la confiance dans le processus électoral et facilitation du dialogue entre les partis politiques et la commission électorale afin de clarifier et de renforcer le respect des règles électorales. Le choix des instruments appropriés dépend cependant toujours des besoins et du contexte. La coordination avec d'autres services et organisations est indispensable pour pouvoir fournir un programme d'assistance aussi complet que nécessaire afin que les élections dans les pays où la Suisse s'engage ne soient pas un facteur déstabilisateur, mais un facteur de promotion de la démocratie, des droits humains et de la paix.

3.2.3

Traitement du passé et prévention des atrocités

Les conflits armés donnent souvent lieu à des violations graves des droits humains et du droit international humanitaire, qui affectent avant tout la population civile. Ces violations laissent des traces profondes dans la société et sont facteur de résurgence des conflits.

Pour continuer à promouvoir la transformation des conflits en paix durable, la Confédération a mis sur pied une task force intradépartementale pour le traitement du passé et la prévention des atrocités. La Suisse s'engagera pour que les Accords de paix incluent systématiquement des mesures de lutte contre l'impunité, de réconciliation et de rétablissement de l'Etat de Droit. Elle soutiendra concrètement les sociétés qui sortent de conflits armés afin qu'une approche holistique du traitement du passé et de la lutte contre l'impunité soit mise en place, combinant des mesures telles que l'institution de commissions d'établissement des faits ou de vérité, la création de tribunaux spécifiques, la mise en place de programmes de réparation et de réhabilitation des victimes ainsi que la réforme des institutions de sécurité afin de renforcer les garanties de non-répétition. La Suisse accompagnera aussi concrètement les efforts des gouvernements et des acteurs des sociétés civiles, de manière sexospécifique, pour retrouver les personnes disparues (exhumations), soutenir les familles de victimes, protéger les archives documentant les violations des droits humains et réintégrer durablement les anciens combattants En ce qui concerne la lutte contre l'impunité, la Suisse se réfèrera dans son action aux principes internationaux en la matière, qui offrent un cadre stratégique de référence pour la prise de 5909

mesures centrées sur les droits des victimes et les devoirs des Etats en matière de vérité, de justice, de réparation et de garanties de non-répétition des violations («Principes Joinet»).

Sur le plan bilatéral, la Suisse continuera à soutenir de nombreuses initiatives, au moyen de conseils, d'accompagnements techniques et de politiques ainsi que de soutiens financiers, notamment au Guatemala (p.ex. Commission Internationale contre l'impunité), en Colombie (Groupe de Mémoire Historique de la Commission Nationale de Réparation et Réconciliation), en Europe du Sud-Est (p.ex. recherche de disparus), dans le Caucase et dans la Région des Grands Lacs.

Le génocide, commis dans l'intention de détruire un groupe national, ethnique, racial ou religieux, est un crime international que la communauté internationale est tenue de prévenir et/ou d'arrêter. Les efforts de la Suisse afin de prévenir les génocides et les atrocités de masse se poursuivront. Entre autres, elle continuera à co-organiser des forums régionaux sur tous les continents visant à créer un vaste réseau de hauts fonctionnaires publics chargés de mettre sur pied, dans leurs pays respectifs, des systèmes d'alerte précoce. Par ailleurs, elle continuera de s'associer aux activités du Forum international sur l'holocauste et elle poursuivra son soutien aux activités du bureau des Représentants spéciaux du Secrétaire général des Nations Unies pour la prévention des génocides et la prévention des atrocités de masse.

3.2.4

Promotion et protection des droits humains

La politique suisse des droits humains suit trois axes thématiques principaux: la protection et la promotion d'un noyau de droits civils et politiques, la protection et la promotion de certains droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que la protection des droits des personnes vulnérables. Cet engagement est accompagné par l'intégration des droits humains dans d'autres domaines politiques (mainstreaming) et par le renforcement des institutions internationales de protection et de promotion des droits humains ainsi que par des initiatives menées avec le secteur privé.

La défense et la promotion des droits civils et politiques Le droit à la vie est le premier des droits humains. La Suisse travaille à l'instauration d'un moratoire mondial sur la peine de mort, en vue de son abolition. Fin 2011, elle accueillera notamment le secrétariat de la nouvelle Commission internationale contre la peine de mort à Genève. En parallèle, elle demande aux pays qui maintiennent toujours ce châtiment de respecter les normes minimales du droit international, notamment l'interdiction d'exécuter certaines catégories de personnes comme les mineurs et les malades mentaux.

L'interdiction de la torture ne peut souffrir aucune dérogation. La lutte contre le terrorisme n'entame en rien la validité de cette interdiction absolue. Dans ses relations bilatérales et multilatérales, la Suisse met l'accent sur la prévention dès les premières heures d'incarcération, ainsi que sur un contrôle régulier des conditions de détention par des observateurs indépendants. Elle encouragera les Etats à adhérer au cadre légal existant et continuera de soutenir le mandat du Rapporteur Spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

5910

La liberté d'expression est une composante essentielle de toute société respectueuse des droits fondamentaux et la pierre angulaire de toute démocratie. La Suisse continuera de s'engager sur ce terrain en s'opposant fermement aux velléités de certains pays de réduire la liberté d'expression et d'opinion, ainsi qu'en soutenant la voix de la société civile là où elle est absente ou réprimée.

La défense et la promotion des droits économiques, sociaux et culturels Les droits économiques, sociaux et culturels méritent d'être développés plus encore au regard du processus de mondialisation et de son impact social de même qu'au regard des conséquences des crises financière et économiques. Ils occupent ainsi une place importante sur l'agenda du Conseil des droits de l'homme et sont au coeur des objectifs du millénaire pour le développement.

La Confédération continuera en particulier de s'engager pour une reconnaissance universelle du droit à l'eau et à l'assainissement au niveau international. En matière de droit à l'alimentation, elle s'engage pour un accès à l'alimentation non discriminatoire, tout particulièrement en faveur des groupes vulnérables, ce qui impliquera notamment de clarifier les questions d'accès à la terre. En matière de droit à la santé, elle continuera d'encourager la prise en compte des facteurs socio-économiques permettant aux individus de vivre en bonne santé, notamment en veillant au respect d'autres droits humains tels que l'accès à l'eau potable et l'interdiction de toute discrimination.

Renforcement des droits humains des groupes vulnérables Les droits des femmes font partie intégrante des droits fondamentaux de la personne.

C'est pourquoi le renforcement de ces droits, et notamment la thématique de l'excision et des mutilations génitales féminines, constitue une priorité de la politique suisse.

Dans le domaine des droits de l'enfant, la Confédération continuera à concentrer son action de sécurité humaine avant tout sur ces droits dans les conflits armés. Elle continuera de soutenir, politiquement et financièrement, le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour les enfants et les conflits armés. Elle apportera par ailleurs son appui à une initiative visant à faire respecter les normes internationales par les groupes armés non étatiques. Elle
participera aussi aux négociations préliminaires sur un Protocole facultatif à la Convention des droits de l'enfant proposant un système de plainte individuelle, tout en portant une attention particulière aux questions de fond, parmi lesquelles celle de savoir qui peut intervenir au nom des enfants victimes de violations de leurs droits.

Les efforts de la Suisse dans le domaine de la protection des membres de minorités reposent sur la conviction que le respect du principe de non-discrimination et d'égalité des droits, la protection et la promotion de l'identité culturelle, religieuse ou linguistique des personnes appartenant à des minorités nationales et leur participation à la vie politique et sociale favorisent la stabilité et la prospérité à l'intérieur d'un Etat et contribuent de façon non négligeable à la prévention des conflits. La Suisse soutient les processus de transformation des conflits dans lesquels se posent par exemple des questions de partage du pouvoir entre majorité et minorité ­ ce tant aux niveaux politique que diplomatique ou de la société civile ­ en apportant des compétences techniques, méthodologiques et financières. Elle poursuivra son engagement en matière de renforcement des standards internationaux qui visent à la protection des minorités.

5911

Les défenseurs des droits humains jouent un rôle crucial dans la promotion et la protection des droits humains. Dans de nombreux pays, leurs activités sont entravées par des restrictions à la liberté d'association, de réunion et d'expression. Il arrive même que leur vie soit menacée. La Suisse oeuvrera notamment en faveur des défenseurs des droits humains en intervenant auprès des pays dont les autorités les harcèlent et proposera à certains défenseurs de se faire parrainer par des personnalités suisses.

Les discriminations auxquelles ont à faire face les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) dans de nombreux pays sont aujourd'hui encore multiples et touchent à plusieurs domaines de la vie. Les LGBT courent le risque d'être emprisonnées, torturées et même, dans certains pays, exécutées. Il s'agit dès lors pour la Suisse de participer au travail de sensibilisation et de discussion qui s'impose afin d'établir des ponts entre conceptions qui s'opposent tout en défendant le principe que les droits humains s'appliquent à toutes et à tous indépendamment de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre.

Mainstreaming ­ intégration des droits humains L'intégration graduelle de la dimension des droits humains (mainstreaming) dans la définition et la mise en oeuvre d'autres politiques contribue à renforcer la cohérence de la politique étrangère suisse. Il s'agira de continuer à former les collaborateurs de l'administration fédérale aux droits humains, de mettre en place des structures institutionnelles de sensibilisation et de formation et de promouvoir une bonne coopération entre offices ainsi qu'une cohérence accrue. La collaboration et le soutien au Centre suisse de compétence pour les droits humains nouvellement créé consolidera ces efforts.

Renforcement institutionnel A ces priorités thématiques s'ajoute le renforcement des institutions nationales et internationales de promotion et de protection des droits humains, traditionnellement un point fort de la politique suisse.

Sur le plan national, le Conseil fédéral a décidé le 1er juillet 2009 de lancer le projet pilote «Achat de services auprès d'un Centre de compétence universitaire dans le domaine des droits humains». La mission de ce Centre de compétence est d'oeuvrer au renforcement des capacités de mise en oeuvre des
droits humains en Suisse. Pour ce faire, il mettra à disposition de ses clients de l'information, des conseils, des outils et des plates-formes de rencontre. Les bénéficiaires seront, d'une part, la Confédération et, d'autre part, les cantons, les communes, les municipalités et les entreprises du secteur privé qui feront appel aux services de ce centre. Le financement de base sera assuré par la Confédération (DFAE: , DFJP: ). Il se montera à un million de francs par an sur cinq ans dès 2011. Le contrôle de l'utilisation de cette contribution sera effectué par un comité de pilotage interdépartemental.

5912

Centre de compétence suisse pour les droits humains Placé sous la direction centrale de l'Université de Berne, le Centre de compétence suisse pour les droits humains est constitué des Universités de Berne, Fribourg, Neuchâtel et Zurich en partenariat avec l'Institut universitaire Kurt Bösch de Sion, la Haute école pédagogique de Suisse centrale de Lucerne et l'association Humanrights.ch (MERS).

L'action du Centre sera structurée autour des thèmes qui font aujourd'hui débat en Suisse et sur lesquels des organes internationaux ont émis des recommandations ces dernières années: «police et justice», «enfance et jeunesse», «migrations», «questions institutionnelles», «politique genre», et «économie et droits humains».

Après quatre ans, le centre fera l'objet d'une évaluation de ses activités et de ses résultats. Cette évaluation donnera au Conseil fédéral les éléments nécessaires pour prendre une décision quant à son avenir.

Aux Nations Unies, la politique suisse des droits humains se fait essentiellement au Conseil des droits de l'homme à Genève, en 3e Commission de l'Assemblée générale à New York ainsi qu'à travers son partenariat avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU. La consolidation du Conseil des droits de l'homme, l'utilisation accrue de ses instruments et le renforcement de la prise en compte de l'expertise à sa disposition constituent les points forts de l'action de la Suisse. Elle mettra l'accent sur le suivi des recommandations de l'Examen périodique universel, la défense de l'indépendance des procédures spéciales et la mise à disposition de moyens adéquats au Bureau du Président du Conseil. Grâce à une approche pragmatique, constructive et ouverte, la Suisse est en mesure de contribuer à l'apaisement des tensions entre groupes politiques et à l'identification de solutions consensuelles au sein du Conseil. Afin que la Suisse puisse continuer à jouer ce rôle à plus long terme, une nouvelle candidature au Conseil pour la période 2013­2016 pourrait être envisagée. Elle entend aussi soutenir la réforme des organes des traités en vue de leur renforcement. Une telle ambition implique des relations suivies avec des institutions universitaires ou para-universitaires, ainsi qu'avec un riche tissu d'ONG nationales et internationales (cf. aussi ch. 3.3.6).

La Suisse s'engage
activement auprès d'organisations régionales. Elle collabore notamment avec le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe ainsi qu'avec plusieurs institutions de l'OSCE, dont le Bureau des institutions démocratiques et de droits de l'homme (BIDDH), la Représentante pour la liberté des médias et le Haut Commissaire pour les minorités nationales. Elle suit par ailleurs de près les développements sur d'autres continents. Elle soutient par exemple les travaux de la Rapporteuse spéciale sur la liberté d'expression de l'Organisation des Etats américains et s'intéresse également au développement de la Commission intergouvernementale de l'Association des Nations de l'Asie du Sud (ASEAN) sur les droits humains. Enfin, la Suisse se tient aux côtés de plusieurs organisations non gouvernementales actives dans le domaine de la formation et de l'éducation aux droits humains, afin de s'assurer que la voix de la société civile est bien entendue dans les enceintes internationales.

5913

Economie et sécurité humaine Du fait notamment de la mondialisation de l'économie, un nombre croissant d'entreprises transnationales s'interrogent sur l'impact social et environnemental de leurs activités dans les pays où elles opèrent, surtout s'il s'agit de pays en développement ou en transition dont les structures étatiques sont faibles ou de pays qui sont en proie à des troubles. La société, mais aussi les investisseurs, les partenaires contractuels et les consommateurs attendent de plus en plus des entreprises qu'elles respectent les droits humains et recourent, dans leur pratique, à des approches dites sensibles aux conflits. D'un autre côté, les entreprises présentent souvent des potentiels inexploités pour la promotion des droits humains ainsi que le soutien à des processus de paix et à la prévention de l'aggravation d'un conflit.

La Suisse, qui accueille de grandes entreprises évoluant au plan international, participe depuis longtemps déjà à la définition des cadres généraux de l'activité économique internationale. Elle encourage la formulation de normes internationales pour une gouvernance d'entreprise responsable, comme elle l'a fait en 2010 par le lancement du code de conduite pour les sociétés de sécurité privées (ch. 2.2) ou par sa participation aux Principes volontaires sur la sécurité et les droits de l'homme, une initiative de l'industrie d'extraction pour le respect de ces droits à laquelle participent également des ONG et des Etats. Le cadre normatif englobe les instruments de l'OIT, de l'OCDE et des banques internationales de développement ainsi que le Pacte mondial des Nations Unies et les normes de l'ONU relatives à la responsabilité des entreprises qui visent à «protéger, respecter et réparer».

Ces prochaines années, en coopération avec la DDC et le SECO, la Direction politique du DFAE continuera à élaborer, en collaboration avec des partenaires internationaux ainsi qu'avec des groupes et entreprises intéressés, des méthodes et des instruments visant à minimiser l'influence négative de l'activité économique sur la jouissance des droits humains, sur l'élimination de la pauvreté structurelle et sur les conflits. Elle encouragera les contributions positives des entreprises privées à la sécurité humaine.

3.2.5

Protection des civils dans les conflits armés

Les populations civiles payent un très lourd tribut aux conflits intra-étatiques de ce début du XXIe siècle. Le défi des acteurs humanitaires est double: amener Etats et groupes armés non étatiques à respecter le droit international dans les conflits et autres situations de violence armée et fournir, sur le terrain, des réponses opérationnelles adaptées aux besoins des civils. La Suisse s'engage activement pour contribuer à les relever. La mise en oeuvre de la Stratégie du DFAE pour la protection des civils dans les conflits armés représente le cadre de référence de son engagement sur les plans normatif, politique et opérationnel. La Direction politique du DFAE y contribue avec les initiatives suivantes: Les règles du droit international garantissent, lors de conflits armés, une protection minimale, laquelle vaut sans distinction notamment pour tous les civils concernés.

La Confédération s'engage pour la clarification, le renforcement et le respect du cadre normatif par toutes les parties au conflit. Par exemple, elle continuera à soutenir le développement d'outils destinés à améliorer l'adhésion aux normes par les acteurs armés non étatiques et à mettre lesdits outils à la disposition de la commu5914

nauté internationale. Elle s'engagera aussi pour un renforcement des mécanismes de mise en oeuvre du droit.

La Confédération s'emploie également à favoriser l'amélioration de la réponse opérationnelle. L'accès aux victimes, la sécurité du personnel humanitaire et la protection des groupes particulièrement vulnérables (femmes, enfants, réfugiés et personnes déplacées) constituent des axes prioritaires de son engagement international. La Suisse contribue de façon non négligeable au développement de la politique internationale humanitaire dans ces domaines, grâce notamment à sa collaboration avec le Program on Humanitarian Policy and Conflict Research at Harvard University (HPCR) et au lancement de dialogues informels entre experts. En outre, en promouvant des projets concrets, elle fera en sorte que les obstacles à l'accès humanitaire soient identifiés et que des solutions soient élaborées.

Afin de mieux protéger les déplacés internes, l'une des catégories de population civile les plus vulnérables, la Confédération apporte son soutien au Rapporteur Spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme des personnes déplacées internes. Elle poursuivra son dialogue avec les gouvernements et renforcera la coopération avec les organisations internationales et les institutions nationales pour que les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays soient mis en oeuvre.

3.2.6

Migration et lutte contre la traite des êtres humains

Environ 200 millions de personnes, soit 3 % de la population mondiale, sont des migrants. Parmi elles, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés (HCR) comptabilisait en 2009 plus de 67 millions de personnes déplacées, dont 15 millions de réfugiés. Les mouvements migratoires concernent un nombre croissant de personnes et de pays. Les migrations n'ont pas lieu seulement en direction des pays industrialisés, mais surtout vers des pays en développement, ce qui peut compliquer davantage des situations déjà problématiques. De plus, le lien entre dégradation environnementale, changements climatiques et migration est aujourd'hui un aspect qui reçoit une attention accrue.

La Suisse s'engage pour que la migration internationale soit sûre et régulière et qu'elle s'effectue dans le respect des droits et des intérêts de toutes les parties concernées. Une politique migratoire efficace et novatrice combat les aspects négatifs de la migration et promeut les opportunités offertes par ce phénomène tout en respectant les standards internationaux de protection. Pour réussir, la gestion de la migration doit se faire de manière coordonnée entre tous les acteurs nationaux et internationaux concernés (pays d'origine, de transit et de destination). Au sein de la Confédération, les acteurs de la sécurité humaine du DFAE continueront à travailler en étroite collaboration avec l'ODM et la DDC.

Au niveau multilatéral, la Suisse continuera à soutenir le dialogue international sur la migration. Ce dialogue, conduit dans les forums multilatéraux, permet à la Suisse d'une part de prendre connaissance des priorités et des intérêts d'autres pays dans le domaine de la migration et, d'autre part, de partager ses expériences. Ces deux aspects jouent un rôle important dans la recherche et dans le développement commun de solutions adaptées aux défis et aux opportunités que présente la migration au niveau tant régional que mondial. Le Forum mondial sur la migration et le dévelop5915

pement, fondé en 2006 sur l'initiative de l'ancien secrétaire général de l'ONU Kofi Annan est une plate-forme importante que la Suisse a eu le privilège de présider en 2011. Ouvert à tous les Etats membres des Nations Unies, il vise à renforcer l'échange informel d'expériences ainsi que la coopération concrète entre les pays d'origine, de transit et d'accueil de migrants. En marge de ce dialogue axé sur les cas pratiques, l'objectif de la Suisse est d'ancrer le thème de la migration au sein de l'ONU en y promouvant le dialogue politique.

La Suisse contribue à l'élaboration de politiques dans de nouveaux domaines tels que les migrations induites par le changement climatique, les mouvements migratoires mixtes (incluant migrants et réfugiés) ou encore les liens entre la prévention des conflits et la migration.

Au niveau bilatéral, les partenariats migratoires, tels qu'ils sont définis dans la loi fédérale sur les étrangers entrée en vigueur en 2008, sont une réponse novatrice au problème toujours plus complexe des migrations internationales et aux intérêts contradictoires des pays concernés. Ils offrent à la Suisse un instrument qui permet de procéder à un arbitrage équitable entre ses intérêts et ceux des pays d'origine ou de transit. Les éléments clés d'un partenariat migratoire sont la réadmission, les programmes d'aide au retour volontaire mais aussi la lutte contre la traite des êtres humains, la migration et le développement ainsi que certaines possibilités de migration régulière (politique en matière de visas, séjours pour formation ou perfectionnement). De premiers partenariats migratoires avec des pays de l'Europe du Sud-Est (Bosnie et Herzégovine, Kosovo et Serbie) et d'Afrique (Nigéria) ont été mis sur pied et les efforts se poursuivront.

La recherche de solutions durables, sur place, pour les réfugiés et les autres personnes bénéficiant d'une protection est l'une des priorités clés de l'action humanitaire de la Suisse. Celle-ci a mis au point une stratégie visant à renforcer la protection des réfugiés dans leur région d'origine («protection dans la région») afin d'accentuer son aide, dans les premiers pays d'accueil, aux réfugiés bénéficiant d'une protection.

Des projets pilotes sont réalisés au Yémen (pour des réfugiés somaliens) et en Syrie (réfugiés en provenance d'Irak).

La traite
des êtres humains est un crime grave ­ souvent le fait de la criminalité organisée ­ et une grave violation des droits humains. Elle affecte plusieurs millions de personnes dans le monde, surtout des femmes et des enfants, et concerne directement la Suisse en tant que pays de destination. La traite prend la forme de l'exploitation sexuelle, du travail forcé, du mariage forcé ou encore du trafic d'organes. La pauvreté, l'absence de perspectives et la dépendance suscitent une intense pression migratoire, dont les trafiquants abusent sans scrupules. La Suisse soutient dans les pays d'origine des projets de protection des victimes, de prévention ainsi que de lutte contre l'impunité. Au niveau bilatéral, elle défend l'idée d'une coopération transnationale renforcée et elle oeuvre, au sein d'organisations internationales au développement et à la diffusion de normes et de standards internationaux de lutte contre la traite des êtres humains.

5916

3.3

Instruments

La Confédération s'engage en faveur de la sécurité humaine par le biais de six instruments qui ont fait la preuve de leur efficacité: médiations et facilitations, programmes de promotion de la paix, politique des droits humains, pool d'experts, initiatives diplomatiques et partenariats.

Les thèmes décrits au ch. 3.2 sont étroitement liés à ces instruments puisqu'ils sont intégrés dans les projets et programmes géographiques ou font l'objet d'initiatives diplomatiques.

3.3.1

Médiation, facilitation et dialogue politique

Un rôle en évolution La Suisse est réputée pour son rôle de médiatrice et sa capacité à offrir ses bons offices, comme l'attestent notamment les récents mandats de puissance protectrice qu'elle exerce pour la Russie et la Géorgie.

Depuis la fin de la guerre froide, la médiation est devenue un instrument primordial, par lequel la communauté internationale participe au règlement de conflits armés.

Cela est dû à plusieurs facteurs.

Aujourd'hui, la plupart des conflits armés ont lieu à l'intérieur d'un Etat. Les affrontements ont essentiellement pour objet le pouvoir politique, l'exploitation de ressources naturelles, davantage d'autonomie ou l'indépendance de minorités ethniques ou encore la justice sociale. Généralement, seules des négociations permettent un règlement durable de ces conflits. Et un bon accord de paix constitue une base solide pour éviter à un pays de retomber dans la violence et le chaos.

C'est dans ce contexte que les bons offices sont sollicités, principalement sous forme de médiation entre un gouvernement et des groupes armés non étatiques. Les négociations de paix sont des processus complexes, car les parties au conflit doivent parvenir à un consensus sur les thèmes les plus divers: démobilisation, désarmement et réintégration de groupes rebelles dans la vie civile ou dans l'armée officielle (DDR); partage du pouvoir politique entre la majorité et la minorité; structures étatiques centralisées, autonomes, fédérales ou sécession; élections; mise en place de nouvelles institutions étatiques; réformes des systèmes de sécurité (RSS); accords sur l'utilisation des revenus issus des ressources naturelles et des impôts; traitement du passé.

Les négociations et leur médiation sont rarement linéaires. La prise de contact avec les parties au conflit, notamment avec les groupes armés non étatiques, et la préparation des négociations de paix peuvent prendre des années. Les revers ne sont pas rares, au cours des négociations ou après la conclusion d'un accord de paix (p.ex.

Nord Ouganda, Népal).

Médiations, facilitations et soutien à la médiation La Suisse dispose de la compétence et de l'expérience requise, raison pour laquelle des parties en conflit lui demandent régulièrement d'intervenir dans des négociations de paix. Ces dix dernières années, elle est intervenue dans une trentaine de processus de paix, soit en tant que médiatrice, soit en jouant un rôle décisif au sein d'équipes internationales.

5917

Compte tenu de l'actualité internationale et sur la base de son expérience, la Suisse se propose d'investir davantage dans le domaine de la médiation. Elle entend demeurer proactive dans son offre de bons offices et de médiation et renforcer son réseau de spécialistes de haut niveau afin de pouvoir détacher davantage d'experts dans des équipes régionales et internationales. Elle investira aussi dans la recherche et l'analyse.

Concrètement, pour mener des médiations et des facilitations dans un rôle d'actrice, la Suisse recourra en premier lieu à son propre personnel (diplomates et experts): Représentants spéciaux avec titre d'ambassadeurs (Proche-Orient, Soudan et Corne de l'Afrique), conseillers suisses pour la paix engagés sur le terrain (Népal, Indonésie, Soudan, Burundi, Afrique de l'Ouest, Tchad, Europe du Sud-Est, Colombie), envoyés spéciaux (Niger, Tchad).

Elle continuera aussi à accueillir sur son territoire différentes négociations de paix, telles que les Geneva Discussions, mises sur pied suite au conflit Géorgie-Russie de 2008.

La Suisse travaillera également de manière intensive avec les organisations internationales et régionales, y inclus avec l'ONU, notamment en mettant des experts et de l'expertise à leur disposition (ex. capacity building workshops). Ainsi, deux experts suisses en médiation apportent leur soutien au médiateur de l'ONU dans le cadre des négociations sur le Sahara occidental entre le Maroc et le Front Polisario. La disponibilité de la Suisse pour contribuer à régler des différends internationaux, territoriaux notamment, continuera à être offerte lorsque les circonstances le permettent.

Par des activités de soutien à la médiation, la Suisse entend accroître l'efficacité de cet instrument. Elle continuera à former son personnel ainsi que des tiers aux processus de médiation et aux thèmes y afférents, soutiendra la recherche appliquée et mettra à la disposition de la communauté internationale des publications axées sur la pratique. Pour atteindre son objectif, la Suisse a nommé un responsable de la médiation et créé le Mediation Support Project (MSP) composé de spécialistes de la fondation Swisspeace et du Centre de recherche sur la politique de sécurité de l'EPF de Zurich.

La Suisse poursuivra en outre sa coopération avec la cellule d'assistance à la médiation
(Mediation Support Unit) de l'ONU. Elle la soutiendra financièrement et poursuivra avec la réflexion sur les directives et les politiques relatives à la médiation ­ puisque l'ONU et ses organisations restent les principaux médiateurs dans les négociations de paix.

La Suisse poursuivra également sa collaboration avec des ONG spécialisées dans la médiation. Une telle collaboration présente un avantage certain dès lors que les efforts portent sur des conflits dans des Etats qui ne tolèrent pas l'intervention d'autres Etats ou d'organisations internationales. Souvent, les ONG sont les seuls acteurs internationaux en mesure de rester en contact avec des groupes armés pendant des années afin de convaincre ces derniers de s'asseoir à la table des négociations.

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Dialogue avec des acteurs non étatiques Si l'un des atouts historiques de la Suisse est sa capacité de promouvoir le dialogue, les opinions diffèrent parfois sur le choix des acteurs avec lesquels dialoguer. Certains gouvernements, personnalités politiques ou groupes armés non étatiques violent parfois gravement le droit international. La Suisse condamne fermement les violations du droit et les actes terroristes. Son expérience lui a cependant appris que seule une implication des principales parties à la résolution d'un conflit permet d'envisager un règlement pacifique véritable et durable. Dialoguer avec des acteurs armés non étatiques ne signifie toutefois pas justifier leurs actions et encore moins promouvoir des amnisties. La Suisse donne clairement à comprendre que, pour elle, la recherche de la paix passe par le respect des normes et des principes du droit international (droits humains, droit international humanitaire et droit pénal international), et que cela n'est pas négociable.

Par ailleurs, elle met à la disposition de la communauté internationale des outils capables d'améliorer l'adhésion aux normes par les acteurs armés non étatiques (ch. 3.3.6). De grands acteurs internationaux envient à la Suisse son approche, qui vise à associer tous les acteurs concernés, sa capacité de dialoguer et ses canaux de dialogue, qui sont une niche de notre diplomatie.

3.3.2

Programmes de promotion civile de la paix

Les acteurs de la Confédération en charge de la sécurité humaine mettent en oeuvre des programmes de promotion civile de la paix dans différentes régions et pays.

Europe du Sud-Est ­ La Confédération entend poursuivre son engagement en Europe du Sud-Est. Sur la base d'un nouveau programme de coopération à moyen terme (2010­2012), elle se concentrera sur la Bosnie et Herzégovine et le Kosovo. Elle soutiendra également des projets visant un impact régional et susceptibles d'améliorer les relations entre Etats et habitants de la région. Du point de vue des thèmes de travail, elle se concentrera sur le traitement du passé, la protection des minorités et la représentation accrue de ces dernières au sein des institutions. Elle s'attachera en outre à promouvoir le dialogue politique et continuera à soutenir le déminage humanitaire. Elle continuera à s'employer résolument à ce que les peuples de la région fassent un travail de mémoire et s'engagent sur la voie de la réconciliation. Pour ce faire, elle accompagnera des initiatives locales par le financement de projets, ou mettra du personnel à la disposition des missions internationales y compris dans le domaine de la justice et des droits humains. L'engagement cohérent de la Suisse dans la région en fait un acteur reconnu et apprécié.

Au Proche-Orient, les activités de sécurité humaine de la Confédération se concentrent sur la promotion des droits humains, du droit international et du droit international humanitaire, par le biais d'une politique au niveau multilatéral et par son soutien à des initiatives émanant d'Etats ainsi que de la société civile et du monde académique locaux. Elle contribue également à la recherche d'une paix durable par le soutien à des réflexions et à des rencontres à l'échelle régionale, en collaboration étroite avec les acteurs étatiques et non étatiques. Elle promeut notamment les propositions de l'initiative de Genève. La Suisse est ainsi activement impliquée dans la recherche de solutions au conflit israélo-palestinien ainsi qu'au Liban, dans le dialo5919

gue intercommunautaire. Enfin, la Confédération soutient un processus régional entre plusieurs Etats concernant la gestion durable de l'eau, comme outil de développement et comme moyen de promotion de la paix.

Région des Grands Lacs ­ Au Burundi, l'action de la Confédération se fonde sur la stratégie 2009­2012 élaborée par le DFAE. En coordination avec la Configuration Burundi de la Commission de Consolidation de la Paix de l'ONU, dont elle assume actuellement la présidence, la Suisse s'engage en faveur d'espaces de dialogue au Burundi afin d'éviter une reprise des hostilités. Elle mettra aussi un accent sur l'avancement du processus de traitement du passé et le renforcement de l'Etat de droit et du respect des droits humains. Les activités de la Suisse dans le domaine du déminage humanitaire et la réforme du secteur de la sécurité continueront à être coordonnées avec le DDPS. La Suisse étudie également les conditions d'une reprise d'un programme de promotion de la paix en République démocratique du Congo, où elle est déjà présente par le biais de la coopération au développement et de l'aide humanitaire.

Afrique de l'Ouest et centrale ­ La Suisse accorde depuis 2006 une attention particulière à l'évolution de la situation dans l'espace sahélo-saharien et a développé un programme de politique de paix en Afrique de l'Ouest et centrale qui fait l'objet d'une stratégie d'action depuis 2009. Déjà présente sur place de longue date par le biais de la coopération au développement ou de l'aide humanitaire, elle se concentre sur le Mali, le Niger et le Tchad. Forte de ses réseaux francophones, elle contribue, en collaboration avec des partenaires africains et internationaux, à développer les capacités nationales, régionales et sous-régionales nécessaires au règlement des conflits et à la consolidation de la paix. Elle promeut aussi un dialogue politique incluant toutes les parties au conflit et met à disposition un savoir spécialisé dans le domaine de la promotion civile de la paix.

Népal ­ Au Népal, la Confédération continuera entre autres d'oeuvrer pour l'application de l'Accord de paix et le renforcement des structures publiques en se fondant sur la stratégie de coopération 2009­2012 élaborée par le DFAE. Elle soutiendra d'une part les réflexions sur le fédéralisme, l'élaboration d'une nouvelle
constitution et la réforme des forces de sécurité et préparera, d'autre part, la mise sur pied d'un programme de traitement du passé. Concrètement, elle continuera par exemple à soutenir des médiateurs locaux ainsi que la réintégration des combattants maoïstes dans la vie civile et l'armée régulière. Elle poursuivra en outre son engagement en faveur du respect des droits humains.

Colombie ­ En Colombie, la Suisse continuera d'oeuvrer pour une paix durable et effective. Soucieuse de faciliter les efforts de paix, elle s'attachera en outre à soutenir des initiatives lancées au sein de la société civile. Elle poursuivra ses activités en faveur du respect des droits des victimes, des droits humains et du droit international humanitaire, ainsi que des normes internationales en matière de lutte contre l'impunité et de traitement du passé. Elle interviendra par ailleurs sur des questions ayant trait à la protection et à la promotion des droits des personnes déplacées. Une stratégie commune (2013­2015) avec la DDC ­ aide humanitaire ­ et le SECO est à l'examen afin de rendre les efforts de la Suisse plus cohérents et de contribuer à renforcer les chances d'une possible transformation du conflit à long terme. Sur la base d'une évaluation de programme prévue en 2011, une nouvelle stratégie à moyen terme sera définie. La Suisse continuera à manifester sa disponibilité pour contribuer à un futur processus de paix et saisira les opportunités pour jouer un rôle de facilitatrice.

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En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, un programme spécial sera par ailleurs développé (v. ci-dessous).

Interventions ponctuelles et projets pilotes La Suisse doit disposer d'une certaine marge de manoeuvre dans le développement de sa politique de promotion de la paix. Il s'avère parfois nécessaire de mettre un terme ­ partiel ou complet ­ à un programme lorsqu'il n'existe plus de potentiel de développement ou que les conditions requises pour sa mise en oeuvre ne sont plus données. Et il est essentiel de pouvoir réagir aux requêtes et d'examiner l'opportunité d'un nouvel engagement lorsque l'intervention de la Suisse est souhaitée.

Ainsi, au Sri Lanka, la situation des droits humains, qui s'est considérablement détériorée au cours des dernières années, se trouve au coeur des activités menées par la Suisse. L'impact de la promotion de la paix demeurera restreint tant que le climat politique ne se sera pas amélioré. La Suisse n'en reste pas moins disposée à intensifier une nouvelle fois son engagement en faveur de la paix.

Par ailleurs, la Confédération lancera de nouveaux engagements dans le Caucase et en Asie centrale, deux régions où elle est déjà présente dans le domaine de la sécurité humaine (Dialogue national au Kirghizistan; Dialogue humanitaire dans le Caucase du Nord) ainsi que par sa coopération au développement ou son aide humanitaire. Par ce fait, elle très bien positionnée pour offrir des contributions décisives dans le domaine de la promotion de la paix et des droits humains. L'expérience a enseigné que ces deux contextes régionaux pourraient demander à terme un important investissement.

Dialogue humanitaire dans le Caucase du Nord Depuis 2005, la Suisse soutient conjointement avec la Suède un «Dialogue humanitaire pour la sécurité humaine dans le Caucase du Nord», qui vise à améliorer la situation de la population civile dans plusieurs républiques nordcaucasiennes de la Fédération de Russie. Des représentants des autorités fédérales, régionales et locales russes ainsi que des représentants de la société civile se rencontrent régulièrement et identifient des mesures destinées à renforcer la sécurité humaine, notamment dans le domaine de la recherche des personnes disparues et de la réhabilitation psychologique des victimes des conflits des années 90.

Des activités sont également
développées sur le terrain. Le Centre for Civil Assistance to Search for missing people créé en 2006 s'occupe ainsi de collecter des données sur les personnes disparues. Il a publié sur Internet une liste d'environ 7000 noms. Des cours de soutien psychosocial sont également offerts aux groupes les plus touchés par les conflits, tels que les déplacés internes et les familles de victimes. Financée et accompagnée par la Confédération, la mise en oeuvre du projet est garantie par deux organisations non gouvernementales russes et par la fondation Swisspeace.

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Programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient Grâce au solide réseau de contacts qu'elle a déjà dans la région ­ notamment de par son travail de résolution et de prévention des conflits ainsi que de promotion des droits humains ­ la Suisse peut mettre rapidement à disposition les instruments de la sécurité humaine que sont la médiation et la facilitation, les programmes civils de promotion de la paix, la politique humanitaire, les projets bilatéraux en matière de droits humains, la mise à disposition d'experts, le partenariat et les initiatives diplomatiques.

En réponse aux demandes qui lui sont faites au niveau bilatéral et multilatéral, la Suisse peut intervenir au moyen de projets sur le terrain, d'actions au niveau multilatéral, de consultations et de démarches politiques ou de conseil et formation, dans les domaines suivants: ­

la mise sur pied et l'accompagnement de processus de transformation politique (période de transition et de consolidation): facilitation du dialogue politique; création d'espaces de médiation neutres du point de vue confessionnel et religieux, permettant l'inclusion de tous les acteurs politiques concernés et prêts au dialogue, appui ciblé et technique auprès des acteurs concernés;

­

le renforcement et la protection des droits humains: partenariat avec le Haut Commissariat aux droits humains, soutien à la société civile et aux capacités nationales, échanges sur des questions de droits humains;

­

les processus de démocratisation, élections et partage du pouvoir: mise à disposition d'expertise visant à développer un cadre pour la transition à la démocratie (processus d'élaboration de constitutions, représentation et système politique, agendas et structures politiques, séquence des élections, renforcement des bases légales pour les élections, soutien à l'organisation et l'observation d'élections), protection des minorités, décentralisation, soutien à la société civile active sur les questions de démocratisation;

­

la migration: protection des personnes migrantes vulnérables et collaboration migratoire au moyen de la valorisation d'instruments existants de la politique migratoire extérieure de la Suisse (protection dans la région, partenariats migratoires);

­

la protection des civils: protection des civils dans les situations de violence et de conflit armé interne et en particulier des catégories les plus vulnérables: personnes déplacées, réfugiés, femmes et enfants ­ promotion du respect et mise en oeuvre du droit international humanitaire; soutien à nos partenaires humanitaires internationaux (Agences onusiennes, CICR, ONG) et nationaux dans des domaines complémentaires aux efforts de l'aide humanitaire de la Confédération;

­

le traitement du passé et la réconciliation: enquêtes sur les violations massives des droits humains et du droit international humanitaire, soutien à la mise en place de stratégies combinant les différents éléments de la lutte contre l'impunité; vérité, justice, réparations et garanties de non-répétition ainsi que des initiatives de réconciliation en accord avec les normes et standards du droit international;

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l'appui aux réformes des systèmes de sécurité: (armée, police, renseignements, justice, système pénitentiaire) notamment par le biais du Centre pour le Contrôle Démocratique des Forces armées (DCAF); appui aux efforts en matière de contrôle d'armes légères et de petit calibre.

Dans chacune de ces composantes, la Confédération tiendra compte, chaque fois que cela est pertinent, des besoins différenciés des femmes et des hommes, dans l'esprit de la résolution 1325 des Nations Unies, «Femmes, paix et sécurité». Elle travaillera aussi dans l'esprit de la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide adoptée par l'OCDE le 2 mars 2005. Elle veillera par ailleurs à la cohérence de l'action: le programme de sécurité humaine sera complémentaire aux activités des autres acteurs de la Confédération, en particulier avec d'éventuelles activités de la DDC. Une coordination réciproque avec tous les services concernés de la Confédération sera assurée dans le cadre de la mise en oeuvre.

L'engagement dessiné ci-dessus se fera à moyen terme et sera compris dans un programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient couvrant plusieurs pays de la région. Ce programme régional veillera également à tenir compte des conséquences des bouleversements en cours sur le processus de paix au ProcheOrient et sur l'Afrique subsaharienne.

3.3.3

Politique des droits humains renforcée

A l'avenir, la question des droits humains ne doit plus être abordée uniquement dans le cadre de «dialogues bilatéraux sur les droits humains» isolés et menés selon des critères stricts avec des partenaires choisis, mais elle doit faire partie intégrante de toutes les consultations politiques de la Suisse au niveau bilatéral et multilatéral.

Afin d'améliorer sa politique des droits humains et de l'adapter à la réalité globalisée, la Suisse doit mettre à profit toutes les plates-formes de ses relations bilatérales et multilatérales pour promouvoir ces droits de manière systématique et cohérente.

Le cadre de sa politique des droits humains devra être élargi et assoupli afin d'aborder les problèmes au regard de la situation d'ensemble et, chaque fois que cela est possible, de viser à un meilleur respect de ces droits. L'instrument du dialogue formel sur les droits humains utilisé jusqu'ici a certes permis d'atteindre des résultats et des progrès particuliers dans certains Etats (tout spécialement au niveau technique); mais il était trop exclusivement axé sur le changement du cadre normatif dans les pays concernés par le biais de la seule discussion. En raison du nombre restreint de critères, ce modèle tenait insuffisamment compte des circonstances réelles prévalent dans le pays partenaire et des développements qui y avaient cours; il comportait le risque de devenir un outil isolé de promotion des droits humains et d'être de ce fait marginalisé. Pour ces raisons, l'instrument du dialogue sur les droits humains au sens entendu par le passé sera réorienté et intégré dans un cadre plus large: la thématique des droits humains sera désormais abordée de manière diversifiée et intégrée dans tous les domaines de la politique extérieure suisse.

La coopération sur des projets concrets et les échanges d'experts avec des pays choisis seront maintenus et renforcés dans le cadre des ressources à disposition. De longues années d'expérience ont montré que ces moyens ont souvent été les meilleurs pour obtenir des améliorations effectives et concrètes dans le domaine des droits humains. Une précondition est que les deux parties soient disposées à un

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échange sérieux, critique et constructif et qu'il existe effectivement un potentiel de changement par le biais d'une coopération au niveau technique.

Il est important d'avoir des priorités claires, de promouvoir les mécanismes internationaux pour une mise en oeuvre renforcée des droits humains, de soutenir les acteurs des droits humains, de prendre en compte la dimension de genre, de garantir la continuité à long terme et la qualité de l'échange au niveau technique, de mettre à profit les partenariats et de prévoir un dispositif d'évaluation de la politique des droits humains ainsi qu'un dispositif d'information du public et de la société civile sur les progrès accomplis et les résultats obtenus. Le recours plus fréquent à d'autres instruments bilatéraux et multilatéraux (démarches, résolutions, prises de position publiques) sera l'une des caractéristique du renforcement voulu de la politique des droits humains. Il est en effet essentiel que les objectifs et intérêts de la politique des droits humains soient pris en compte dans la politique générale, qu'ils soient abordés systématiquement dans les contacts bilatéraux au niveau gouvernemental ainsi que dans les instances multilatérales.

3.3.4

Pool suisse d'experts

Au milieu des années 90, la communauté internationale a fait le constat que l'approche traditionnelle du maintien de la paix ­ qui se limitait principalement à une composante militaire chargée de la supervision de cessez-le-feu ­ s'avérait inadéquate pour relever les défis que représentent les conflits armés contemporains.

L'augmentation du nombre d'opérations de maintien de la paix onusiennes, régionales et sous-régionales et l'accroissement considérable des fonctions et des rôles civils dans les opérations complexes de l'après-guerre froide ont révélé le besoin crucial d'expertise civile dans le domaine du maintien de la paix et de la stabilisation, mais encore plus dans le domaine de la consolidation de la paix et de la reconstruction. Le défi principal a été de trouver du personnel convenablement formé, capable d'agir sur des terrains difficiles, dans des domaines tels que le désarmement des combattants et leur réintégration dans la vie civile, la reconstruction des structures étatiques, l'organisation d'élections ou encore la protection et la promotion des droits humains.

Aujourd'hui, les organisations internationales (ONU, OSCE, UE, Union africaine, etc.) intensifient leurs efforts et leurs stratégies et renforcent leurs capacités et leur personnel dans le domaine de la promotion civile de la paix. Riche de sa longue expérience dans le domaine de l'engagement d'experts civils à l'étranger, la Suisse est bien positionnée pour participer de manière influente au dialogue international sur ces questions et pour contribuer concrètement, sur le terrain, à la sécurité humaine.

Depuis sa création en l'an 2000, le Pool d'experts suisse pour la promotion civile de la paix (le Pool d'experts) forme et met à la disposition des institutions internationales des experts hautement qualifiés. Leur expertise et leur professionnalisme sont très appréciés et assurent durablement la visibilité de l'engagement suisse. Chaque expert suit les formations de base internationalement recommandées voire obligatoires (p.ex. questions de sécurité.) et a la possibilité d'accroître ses connaissances et ses compétences grâce à un programme de formation continue. Les connaissances des différents acteurs (civils, militaires et humanitaires) sur place et leur capacité à

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travailler de concert dans une mission dite intégrée étant indispensables, la formation est assurée en coordination avec le DDPS.

Chaque année, près de 220 experts civils de la promotion civile de la paix et des droits humains effectuent des missions de plus ou moins longue durée dans plus d'une trentaine de pays. En moyenne, ils sont environ 90 à être en mission simultanément. La part des femmes dans le Pool d'experts est de près de 40 %.

Les pays, les organisations et les postes d'affectation continueront à l'avenir à être sélectionnés en fonction des priorités géographiques et thématiques de la promotion suisse de la sécurité humaine (ch. 3.3). Sur le plan thématique, la Suisse continuera à concentrer son engagement sur la médiation et la facilitation d'accords de paix, la mise en place des structures étatiques, l'Etat de droit (justice), les droits humains et le droit humanitaire ainsi que les élections et le traitement du passé.

L'engagement d'experts suisses dans des missions à l'étranger participe de façon conséquente à la mise en oeuvre ciblée et durable de l'engagement de notre pays sur ses thèmes phare et assure sa visibilité. Environ trois quarts des missions seront effectuées au siège d'organisations internationales ou sur le terrain. Les principaux partenaires de la Suisse resteront l'ONU, l'OSCE, l'UE et le Conseil de l'Europe, auxquels s'ajoutent des missions pour des organisations telles que la Présence temporaire internationale à Hébron (Temporary International Presence in the City of Hebron, TIPH), la Commission internationale contre l'impunité au Guatemala (CICIG) ainsi que des commissions d'enquête ad hoc. Environ un quart des missions seront effectuées dans un cadre bilatéral en appui de programmes prioritaires suisses de promotion de la sécurité humaine.

Mission du Pool d'experts en 2010 (% du total des coûts) OSCE / BIDDH / UE Observations électorales 11.6%

Formation 1.9%

Administration 3.7% ONU 22.1%

TIPH 7.3%

OSCE 0.5%

Bilatéral 15.9% UE 17.5%

Organisations internationales diverses 15.4%

Conseil de l'Europe 4.1%

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Des experts suisses au service de commissions d'enquête internationales Des experts suisses assument différentes fonctions au sein de commissions d'enquête internationales. Ce type de mission exigeant des compétences spécialisées de haut niveau, le DFAE collabore étroitement, pour leur recrutement, avec le Ministère public de la Confédération, l'Office fédéral de la police et les services cantonaux concernés. Fin 2009, une experte suisse a ainsi intégré la commission d'enquête de l'ONU chargée par le Conseil de sécurité des Nations Unies de faire la lumière sur les violents affrontements du 28 septembre 2009 à Conakry, en Guinée. Les recommandations de cette commission ont été débattues au sein du Conseil de sécurité et ont eu pour effet la saisine de la Cour pénale internationale de La Haye en vue de l'engagement d'éventuelles poursuites pénales.

Participation à des missions d'observation électorales La participation à des missions d'observation électorales a constitué l'un des volets du soutien à des processus électoraux particuliers. Menées sous l'égide de l'OSCE, de l'UE ou de l'Organisation des Etats américains (OEA), ces missions visent à assurer la tenue d'élections justes, libres, transparentes et démocratiques et, partant, à renforcer les structures et les processus démocratiques, au service de paix durables et socialement équitables. Au-delà de l'observation de la légitimité d'un processus, elles ont aussi permis à la Suisse de montrer l'intérêt qu'elle portait à l'évolution pacifique et démocratique d'un autre pays. Entre 2008 et 2010, 252 experts suisses ont ainsi été associés à l'observation d'élections au sein de 45 missions dans 33 pays15. Une diplomate suisse a par ailleurs été nommée à la tête de la Mission OSCE d'observation des élections en Ukraine. Spécialement formés à ces tâches par un pool d'experts auquel ils appartiennent, les observateurs suisses jouissent d'une excellente réputation auprès des institutions partenaires.

Compte tenu de leur succès, les activités du Pool d'experts vont être approfondies dans les années à venir autour des axes ci-après.

Opérations de maintien de la paix: une part importante des experts seront affectés à des opérations de maintien de la paix dites intégrées menées par l'ONU, l'UE, l'OSCE et d'autres organisations. Pour accroître l'effet durable de ces missions, la Suisse: ­

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consolidera le concept de sélection des postes à pourvoir par du personnel mis à disposition, optimisera l'évaluation de l'impact des engagements et intégrera davantage l'expérience des experts dans la planification; Géorgie, Serbie, Arménie, Monténégro, Népal, Paraguay, Macédoine, Angola, Ruanda, Bélarus, Azerbaïdjan, Bangladesh, Salvador, Bolivie, Moldova, Liban, Albanie, Kirghizistan, Afghanistan, Mozambique, Kosovo, Ukraine, Togo, Tadjikistan, Soudan, Ethiopie, Colombie, Burundi, Guinée Conakry, Bosnie, Tanzanie, Côte d'Ivoire, Haïti notamment.

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renforcera le dialogue avec les organisations internationales et d'autres Etats sur les questions opérationnelles liées aux opérations de maintien de la paix en mettant en relief ses connaissances spécialisées;

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visera une augmentation du nombre de spécialistes suisses occupant des postes de haut rang dans les missions de paix multilatérales afin de rendre la contribution de la Suisse encore plus visible et renforcer l'influence de l'expertise suisse dans les opérations de paix.

Experts en police, gardes-frontière et douanes: la demande d'experts de haut niveau en matière de police, de surveillance des frontières et de douanes dans le cadre d'opérations internationales de maintien de la paix a décuplé en 15 ans. Les experts en mission pour l'ONU, l'UE, l'OSCE ou d'autres organisations conseillent la police locale en matière de mise en place de structures policières, de réformes policières ainsi que de lutte contre le crime organisé, la corruption, le trafic de drogue et le trafic des êtres humains. Ces activités donnent un caractère plus durable à la promotion de la paix et sont dans l'intérêt direct de la Suisse. Depuis 2008, le Pool d'experts affectera chaque année jusqu'à 30 experts à des missions internationales de paix.

Mise en place de l'Etat de droit et missions combinées dans les domaines de la justice et de la sécurité: Les missions combinées employant des conseillers de police et des juristes (juges d'instruction, juges, procureurs généraux, conseillers pour les droits humains) se multiplient. Elles ont pour buts de mener des réformes des systèmes de sécurité et d'appuyer la construction de l'Etat de droit (p.ex. mission EULEX au Kosovo). La Confédération s'efforcera en priorité de trouver des solutions conceptuelles pour pallier la pénurie durable de personnel qualifié pour de telles missions.

Commissions d'enquête: ces dernières années, la communauté internationale a marqué sa volonté de faire la lumière sur plusieurs situations de recours à la violence ­ ce qui a conduit à l'augmentation du nombre de commissions internationales d'enquêtes. Il est prévu de développer encore cette expertise et d'affecter davantage d'experts qualifiés à des commissions d'enquête indépendantes Observation d'élections et monitorage: l'observation d'élections dans le cadre d'une mission internationale, qui fait ses preuves depuis de nombreuses années, sera poursuivie dans le cadre de missions, en tant qu'observateur ou de chef de mission internationale. Les principaux partenaires de la Suisse dans ce domaine resteront l'OSCE (BIDDH), l'UE et l'Organisation des Etats américains (OEA). Une coopération avec d'autres organisations, telle que l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), sera examinée au cas par cas.

3.3.5

Initiatives diplomatiques

Ces prochaines années, le Conseil fédéral entend continuer à contribuer au développement des structures et des standards internationaux de consolidation de la paix et de la sécurité, au renforcement des droits humains et de la protection des civils dans les conflits armés par le biais d'initiatives diplomatiques sur des thèmes de niche.

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Violence armée et développement En 2006, 42 pays adoptaient la «Déclaration de Genève sur la violence armée et le développement», une initiative suisse lancée en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et dont l'objectif est d'atteindre, d'ici à 2015, une réduction quantifiable et mesurable de la violence armée (cf. ch. 2.1).

Suite à une première conférence ministérielle d'examen, qui s'est tenue en 2008, la Suisse et le PNUD convieront les 108 Etats signataires à la deuxième conférence d'examen, qui sera organisée à Genève à l'automne 2011, afin qu'un bilan de mi-parcours soit tiré et que de nouvelles mesures soient définies à l'horizon 2015 et au delà.

Pour poursuivre cette initiative, la Confédération continuera à bénéficier des compétences du Small Arms Survey (SAS), principal institut de recherche dans le domaine des armes légères et de petit calibre à l'échelle internationale, par ailleurs établi à l'Institut de hautes études internationales et du développement à Genève (IHEID).

Le secrétariat de la Déclaration de Genève sur la violence armée et le développement lui est rattaché.

Peine de mort Lors du 4e Congrès mondial sur l'abolition de la peine de mort, qui s'est tenu en 2010 à Genève et à l'organisation duquel la Suisse a activement participé, une nouvelle initiative regroupant d'éminentes personnalités a été lancée ­ la Commission internationale contre la peine de mort. Elle vise à instaurer un moratoire mondial d'ici 2015. La Suisse accueillera le secrétariat de cette Commission à Genève à partir de fin 2011 et travaillera, tant sur le plan bilatéral que multilatéral, à l'instauration de ce moratoire mondial, en vue de l'abolition de la peine de mort (ch. 3.3).

Initiative dans le domaine du désarmement, de la maîtrise des armements et de la non-prolifération La Suisse a été jusqu'ici particulièrement active dans le domaine du désarmement de certaines armes conventionnelles ayant un impact dévastateur sur les populations civiles (mines, armes légères et de petit calibre etc.). Elle dispose dans ce domaine d'une plate-forme importante: la Genève internationale humanitaire, qui est un centre d'initiatives pour le désarmement en relation avec la sécurité humaine. Avec le nouveau crédit cadre, la Suisse veut se donner les moyens d'apporter une
importante contribution à la non-prolifération nucléaire.

Or, la menace nucléaire reste sérieuse et constitue toujours un risque majeur tant pour la paix que pour la sécurité humaine. L'initiative suisse dans ce domaine couvrira entre autres les domaines d'activité suivants: Préparer le terrain pour la prohibition de l'arme nucléaire Contrairement aux autres armes de destruction massive ­ armes chimiques et biologiques ­ les armes nucléaires ne sont pas encore prohibées. Or, leur utilisation n'épargnerait pas la population civile et violerait le droit humanitaire. Le moment pour entamer les négociations sur une convention prohibant l'arme nucléaire ne paraît pas encore venu. Cependant, le terrain peut et doit être préparé pour faciliter de telles négociations. Il s'agit de délégitimer l'utilisation des armes nucléaires en mettant l'accent sur les conséquences humanitaires catastrophiques d'une telle 5928

utilisation et sur les violations du droit humanitaire qui en résulteraient. La Suisse a promu cette approche lors de la 8e Conférence d'examen du Traité sur la nonprolifération des armes nucléaires (TNP) en 2010 et elle renforcera son action dans ce domaine.

«De-Alerting» Un nombre important d'armes nucléaires est maintenu à un niveau d'alerte similaire à celui qui prévalait durant la guerre froide. Des milliers d'ogives nucléaires peuvent ainsi être lancées en quelques minutes sur la seule base d'informations provenant des systèmes d'alerte précoce. Or de fausses alertes se sont produites par le passé.

Particulièrement active depuis 2007 en faveur de la réduction du niveau d'alerte des armes nucléaires ­ résolution déposée à l'Assemblée générale de l'ONU de concert avec le Chili, le Nigéria, la Nouvelle-Zélande et la Malaisie; étude élaborée à l'aide d'experts américains et russes ­ la Suisse entend poursuivre son action.

Réformes institutionnelles dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération La machinerie du désarmement, à commencer par la Conférence du désarmement, est affectée par des blocages depuis de nombreuses années, alors que des institutions dans le domaine de la non-prolifération nucléaire, telles que l'AIEA, voient leurs tâches s'accroître et doivent optimiser l'emploi de leurs ressources. La Suisse s'engagera en faveur d'adaptations pragmatiques des structures et des procédures actuelles afin qu'elles fonctionnent de manière appropriée.

Renforcement de la Genève internationale dans le domaine du désarmement Genève héberge des organes et des processus multilatéraux dans le domaine du désarmement ainsi que des think tanks et des organisations nongouvernementales.

La Suisse a tout intérêt à ce que ces institutions maintiennent voire renforcent leur présence et que d'autres s'établissent à Genève. Elle s'efforcera de faire en sorte que les conditions permettant un tel développement soient réunies.

Renforcement des bons offices La Suisse, qui facilite et héberge de longue date des négociations dans le domaine de la sécurité internationale, continuera d'offrir un soutien renforcé aux pourparlers et négociations sur le désarmement nucléaire.

3.3.6

Partenariats

La promotion de la sécurité humaine est une tâche collective comme l'ont montré les chapitres précédents. La Suisse s'appuie sur un large réseau d'organisations internationales, de pays partageant ses vues, d'entités non gouvernementales et d'organismes scientifiques, qui viennent compléter ses propres capacités et l'aident à faire valoir efficacement ses préoccupations.

Partenariats multilatéraux et bilatéraux L'organisation des Nations Unies est le premier acteur mondial dans le domaine de la paix, des droits humains et de l'action humanitaire. La collaboration avec elle s'effectue de plusieurs manières: en tant qu'Etat membre, la Suisse paie sa quotepart aux missions de paix et au budget régulier. Elle la complète par des contribu5929

tions volontaires qu'elle verse à des organisations spécialisées, des agences, des fonds et des programmes de l'ONU actifs dans des domaines qui l'intéressent particulièrement afin de renforcer l'efficacité de leurs activités. Depuis plusieurs années, elle détache aussi à l'ONU des experts. Enfin, la Suisse contribue à renforcer et à étoffer les structures de l'ONU par diverses initiatives, comme l'ont montré par exemple son intense engagement lors de l'examen du Conseil des droits de l'homme en 2010 et 2011 ou encore ses efforts en vue du renforcement du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme.

Parmi les autres grands partenaires de la sécurité humaine suisse figurent l'OSCE, le Conseil de l'Europe, l'Union européenne et toute une série d'organisations et de programmes régionaux, tels que la Communauté économique des pays d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et l'Organisation des Etats américains (OAS). Par ailleurs, la Suisse entretient des rapports de partenariat étroits avec des pays partageant ses idées sous la forme d'échanges de vues périodiques, de concertations sur des interventions multilatérales, du lancement d'initiatives communes ainsi que de l'exploitation de synergies et de complémentarités dans les actions bilatérales. Des consultations ont régulièrement lieu par exemple avec la Norvège ou avec les membres du Réseau international sur les situations de conflit et de fragilité (INCAF) de l'OCDE. Certaines activités s'appuient par ailleurs sur des coopérations avec des pays tels que la Russie et les Etats-Unis. Par ailleurs, dans le cadre des dialogues politiques que la Suisse entretient avec d'autres importants partenaires de la Suisse (par exemple la Chine et l'Inde), comme dans presque toutes les visites et rencontres bilatérales, les questions de sécurité humaine figurent à l'agenda.

Partenariats avec des entités non gouvernementales et des organismes scientifiques Pour mener avec succès des initiatives diplomatiques internationales, des projets et programmes, voire des médiations, le DFAE s'appuie aussi depuis plusieurs années sur les compétences extérieures d'entités non gouvernementales et d'organismes scientifiques. En particulier, la Direction politique du DFAE a noué des partenariats stratégiques avec quelque
vingt institutions. Elle consacrera environ 14 % de son budget à ces collaborations. Les critères d'un partenariat stratégique sont définis dans une stratégie à moyen terme. En règle générale, le partenaire stratégique reçoit une contribution de base. Les prestations réciproques sont clairement définies et l'institution est régulièrement évaluée. Un partenaire stratégique a pour première mission de créer une importante valeur ajoutée à l'échelon politique supérieur. Il doit par exemple offrir un accès à des acteurs de premier plan, contribuer à la formation d'alliances, procurer des connaissances de première importance, exprimer, tester et diffuser des idées stratégiques cruciales, identifier des éléments de départ pour des actions bilatérales ou multilatérales, mieux faire connaître et développer nos méthodes ou encore, apporter une contribution au renforcement du système multilatéral.

De manière générale, grâce à leur expertise, leur champ d'influence et leur présence sur le terrain, ces partenaires externes complètent les capacités de la Confédération dans le domaine de la sécurité humaine et permettent un effet multiplicateur qui renforce les efforts entamés. Pour cette raison, la Suisse a l'intention de continuer de recourir à leurs compétences.

5930

3.4

La sécurité humaine dans la politique extérieure suisse

3.4.1

Une tâche de plus grande ampleur, globale et transversale

Les mesures de promotion de la sécurité humaine qui font l'objet de la présente demande de crédit constituent un pan important de la politique de la Suisse en matière de paix, de droits humains, de migration ainsi que d'engagement humanitaire. Ces mesures ne prennent cependant tout leur sens que dans le contexte de l'ensemble des activités de la Confédération dans les domaines précités.

La politique de paix de la Confédération englobe en effet toutes les actions entreprises par divers acteurs fédéraux dans le but spécifique d'instaurer ou de consolider la paix16. Ces actions se complètent. En réponse au postulat 09.3003 du 19 janvier 2009 de la Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats (Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement)17, le Conseil fédéral présente en annexe 2 de ce rapport une vue d'ensemble détaillée des activités de l'ensemble de la Confédération dans le domaine de la paix et du désarmement, des synergies qui existent entre elles et de la manière dont la cohérence est assurée.

La politique extérieure de la Confédération en matière de droits humains est, quant à elle, transversale à un grand nombre de domaines, en particulier la diplomatie, le développement, la politique économique extérieure, la promotion de la paix, la politique en matière de migration et les activités de la police et de la justice. Elle pose des défis particuliers en matière de cohérence. A la fin de chaque législature, le Conseil fédéral présente au Parlement un rapport détaillé sur la politique extérieure suisse en matière de droits humains18. Quant à la politique humanitaire et à l'engagement en matière de migration, ils sont également menés par plusieurs acteurs de la Confédération, qui travaillent en étroite coordination.19

3.4.2

Cohérence et complémentarité

La politique suisse de sécurité humaine ne devient véritablement cohérente et effective que lorsque tous les acteurs concernés de l'administration fédérale associent leurs efforts et coordonnent leurs activités (whole-of-government approach). Cette cohérence doit par ailleurs englober les organisations non étatiques ­ tels la société civile et le secteur privé ­ ainsi que les acteurs internationaux étatiques et non étatiques (whole-of-system approach). Il en va de même pour la politique de développement qui ne peut déployer pleinement ses effets sans les instruments de la sécurité

16 17

18 19

Ces acteurs sont principalement des secteurs de la diplomatie, de la sécurité civile et militaire, de la coopération au développement ou encore de la justice.

Ce postulat chargeait le Conseil fédéral «d'élaborer un rapport d'ensemble sur sa stratégie future en matière de promotion de la paix, aussi bien dans les domaines civils que dans les domaines militaires. Il inclura également la politique qu'il entend suivre à l'avenir en matière de désarmement et de maîtrise des armements. Dans cette perspective, il étudiera en particulier l'opportunité de réunir l'ensemble de ces mesures dans un seul crédit-cadre portant sur plusieurs années.».

Rapport sur la politique extérieure de la Suisse en matière de droits de l'homme (2007­2011), FF 2011 1210.

Rapport sur la politique extérieure 2010 (Partie 4.3).

5931

humaine dans le contexte de crises et de fragilité (v. annexe p. 81, 82 et 83 ainsi que p. 88 et 89 pour ce qui est des liens avec l'aide humanitaire).

A l'échelle de la Confédération A l'échelle de la Confédération, la cohérence est assurée par l'échange d'informations, l'élaboration de stratégies communes, la préparation de plans d'action généraux, la coordination opérationnelle de programmes concrets sous la direction du DFAE ainsi que l'arbitrage en cas de conflit d'intérêts.

L'administration fédérale a développé ces dernières années des instruments d'analyse et d'information toujours plus précis afin de suivre la situation dans une région et d'évaluer l'impact d'une activité suisse dans un pays partenaire. Ces instruments permettent à l'administration de se forger une vision commune.

De plus, le Conseil fédéral a mis en place une série de mécanismes internes de consultation et de décision visant à accroître la cohérence entre les activités portant sur la paix et les droits humains et les autres actions politiques. A côté de plusieurs comités et groupes de travail opérationnels géographiques et thématiques interservices, il convient de mentionner les comités de coordination interdépartementaux stratégiques pour la promotion de la paix (Kerngruppe Frieden), la politique internationale des droits humains (Kerngruppe Internationale Menschenrechtspolitik) et la politique migratoire extérieure (Ausschuss für Internationale Migrationszusammenarbeit), dans lesquels sont représentés tous les départements et services fédéraux concernés ou encore le Comité de pilotage DDC-DP IV qui réunit à intervalles réguliers les services du DFAE en charge du développement, de l'aide humanitaire et de la sécurité humaine. Ces instances, bien rodées, servent autant à la coordination opérationnelle d'engagements spécifiques qu'à l'échange d'informations et à la préparation de plans généraux intra ou interdépartementaux. Le Conseil fédéral est convaincu que la voie actuelle tablant sur une utilisation efficace des mécanismes existants de coordination et de consultation est la bonne.

Cependant, la cohérence de la politique de la Suisse en matière de sécurité humaine demeure un défi permanent. A l'avenir, la cohérence sera encore renforcée en mettant l'accent sur l'élaboration d'approches suisses intégrées. Davantage
de stratégies communes, se basant sur des analyses pointues des conflits, ainsi que des outils de planification et de pilotage conjoints aux acteurs de la promotion civile et militaire de la paix, du développement, des droits humains, de la sécurité et de l'engagement humanitaire, du désarmement, de la non-prolifération et de l'environnement seront développées20. Ce faisant, l'on prendra soin de respecter le savoirfaire, le mandat et les responsabilités de chacun. La formation continue du personnel et les échanges d'experts entre offices seront aussi encouragés. La Suisse sera ainsi en mesure de se présenter sur la scène internationale avec un profil encore plus marqué dans le domaine de la politique de sécurité humaine et de renforcer encore l'efficacité de son soutien aux pays et régions où elle s'engage par des projets ou des programmes concrets.

Enfin, lorsque des divergences apparaissent sur le plan politique interne lors de la prise d'une décision particulière, le Conseil fédéral peut être amené à procéder à une pesée des intérêts au cas par cas. Ce faisant, il se réfère au droit international, à la 20

De telles stratégies intégrées existent déjà par exemple dans le domaine des mines, de la protection des civils dans les conflits armés, des armes légères et de petit calibre ainsi que pour certains pays (p.ex. Népal) et régions.

5932

Constitution fédérale et à la législation fédérale. Sur des questions particulièrement controversées touchant à la sécurité humaine, comme les autorisations d'exportation d'armement, l'octroi de l'assurance suisse contre les risques à l'exportation (SERV) ou certains accords de libre-échange, les décisions continueront à s'appuyer sur des procédures institutionnalisées et transparentes impliquant les différents départements et offices concernés.

Pour renforcer la cohérence de sa politique extérieure, le Conseil fédéral a décidé en 1998 d'introduire une conditionnalité politique en faveur de domaines qui, de près ou de loin, touchent la sécurité humaine (droits humains et des minorités, processus de démocratisation, politique de paix et de sécurité, bonne gouvernance, réadmission). En 2003, il a été décidé de remplacer le recours à des clauses de conditionnalité par une pratique différenciée et flexible, qui inclut le recours accru ou nouveau à des instruments décrits dans le présent rmessage.21 A l'échelle internationale A l'échelle internationale, afin de garantir un usage efficient des ressources limitées à disposition, la communauté internationale a reconnu la nécessité de collaborer, de mieux communiquer et d'encourager les initiatives qui se renforcent mutuellement.

A l'initiative de la Suisse, les acteurs de la paix ont manifesté leur volonté d'apporter des réponses encore plus cohérentes, coordonnées et complémentaires22 au défi des conflits et de la fragilité à l'échelon national (whole-of-government approach) et global (whole-of-system approach).23 (cf. ch. 3.2.1) La Suisse continuera à contribuer activement à ce développement. Elle multipliera ses efforts en soignant sa collaboration avec les autres acteurs internationaux et régionaux et en s'attachant à renforcer la cohérence de l'action multilatérale. Elle encouragera le dialogue permanent avec les pays et les communautés affectés par les conflits et la violence armés afin de renforcer l'appropriation (ownership) et les capacités nationales. Par le biais de ses différents instruments de politique étrangère, elle suivra avec une attention particulière et contribuera activement aux processus de réforme des Nations Unies, des Institutions Financières Internationales et aux travaux de l'OCDE relatifs à l'amélioration de l'effectivité de l'aide dans les situations fragiles et touchées par les conflits.

3.5

Répartition des engagements financés par le crédit-cadre

Le crédit-cadre pour la sécurité humaine est affecté aux différentes régions et aux différents thèmes et instruments sur la base des priorités stratégiques exposées dans le présent message. L'affectation précise des moyens sera pilotée au moyen d'indicateurs que le DFAE détaillera dans un document interne de planification. A titre indicatif, sur la base des expériences probantes faites jusqu'en 2010 et des défis présentés dans les chapitres précédents, les moyens seront affectés selon les ventilations suivantes: 21 22 23

Rapport du Conseil fédéral sur la mise en oeuvre de la conditionnalité dans la politique extérieure, 25 août 2010 (réponse au postulat Leuthard 02.3591).

Approche dite «3 C».

voir feuille de route de la Conférence 3 C, 19­20 mars 2009, Genève, www.3c-conference2009.ch.

5933

Ventilation des moyens entre les principaux instruments

Développement de politiques et initiatives diplomatiques 16%

Politique des droits humains 2%

40 % 28 % 14 % 16 % 2%

Partenariats stratégiques 14%

Pool d'experts suisse pour la promotion civile de la paix 28%

Bons offices, médiation et programmes de gestion civile des conflits 40%

Bons offices, médiation et programme de promotion civile de la paix Pool d'experts suisses pour la promotion civile de la paix Partenariats stratégiques Développement de politiques et initiatives diplomatiques Politique des droits humains

La répartition entre les principaux instruments est demeurée relativement stable ces dernières années. Les programmes de gestion civile et de prévention des conflits ainsi que le détachement d'experts suisses absorbent le gros des ressources financières. Les instruments diplomatiques tels que la médiation, la promotion des droits humains et les initiatives diplomatiques nécessitent avant tout des ressources humaines. Sur la base de l'expérience faite, la ventilation du crédit 2012­2016 est la suivante (valeur indicative): par définition, la promotion civile de la paix absorbera le gros des ressources financières (40 %); le détachement d'experts suisses liera une part importante du budget (environ 25 %); le développement de politiques et d'initiatives diplomatiques absorberont environ 16 % du crédit; la coopération avec les partenaires stratégiques devrait absorber au maximum 14 % du budget; pour la politique des droits humains, qui requiert surtout des ressources en personnel, environ 2 % sera investi.

5934

Ventilation des dépenses selon les critères géographiques

Ventilation des dépenses par régions géographiques sans le programme spécial pour l'Afrique du Nord et le MoyenOrient Amérique latine 5%

Europe du Sud-est et Europe/autre 20%

Afrique 30% Asie 25%

Proche-Orient 20%

20 % 30 % 25 % 20 % 5%

Europe et autres régions d'Europe Afrique Asie Proche-Orient (sans le programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient) Amérique latine

La ventilation géographique pour les prochaines années est la suivante (valeur indicative): Les engagements en faveur de la paix en Europe du Sud-Est resteront élevés du fait de l'importance de cette région pour la Suisse (20 %). La plupart des conflits armés actuels se déroulent en Afrique et en Asie, ce qui justifie un engagement conséquent de la Suisse dans ces régions à hauteur de 30 % du budget pour l'Afrique et 25 % pour l'Asie. 20 % du budget sera consacré au Proche-Orient (sans compter le programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient). En Amérique latine la Suisse restera engagée en Colombie et, de façon moindre, dans d'autres pays (Guatemala, Dialogue avec Cuba); elle consacrera environ 5 % du budget à cette région.

Ces chiffres n'ont cependant qu'un caractère indicatif étant donné qu'à l'avenir la Suisse entend continuer à réagir avec rapidité à des évolutions politiques imprévues et à adapter sa planification en conséquence.

3.6

Pilotage, gestion des projets, contrôle et assurance de la qualité

Pilotage stratégique La responsabilité pour la réalisation des actions de promotion civile de la paix et de renforcement des droits humains incombe à la Division politique IV ­ Sécurité humaine, au sein de la Direction politique du DFAE.

5935

La Division politique IV se réfère, dans son action, à la loi fédérale du 19 décembre 2003 sur des mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme24, ainsi qu'aux directives stratégiques émanant du Conseil fédéral et du Parlement (objectifs de la législature, rapports de politique extérieure, objectifs annuels du Conseil fédéral).

Les programmes déployés dans les régions et pays prioritaires ainsi qu'au titre d'initiatives thématiques s'appuient sur des concepts et des stratégies à moyen terme. Ces documents font l'objet de consultations intra voire interdépartementales afin de garantir une approche intégrée à l'échelle nationale (whole-of-government approach) et la cohérence de la politique extérieure de la Suisse.

Chaque action fait l'objet d'un descriptif de projet qui permet son pilotage effectif.

La division approuve les projets jusqu'à 500 000 francs et le directeur de la Direction politique ceux coûtant entre 500 000 et 1 million de francs. La Cheffe du DFAE approuve les projets coûtant entre 1 et 5 millions de francs.

Contrôle stratégique La cohérence stratégique est assurée par une unité de contrôle (controlling stratégique). Cette dernière saisit les informations figurant dans chaque demande de crédit sur la base d'indicateurs qui lui permettent de vérifier si les objectifs figurant dans le présent message sont remplis. Elle prépare un rapport annuel interne et propose, le cas échéant, des mesures d'optimisation. Des informations sont également fournies chaque année au Parlement sous forme de rapports spécifiques ou intégrées dans les rapports de politique extérieure.

Gestion du cycle de projet (PCM) Le suivi financier des engagements est assuré par le mécanisme de gestion du cycle de projet (project cycle management, PCM) qui comprend des instruments de planification, de mise en oeuvre et d'évaluation adaptés à l'environnement spécifique de la promotion de la sécurité humaine.

Assurance de la qualité La qualité est assurée à toutes les étapes de la gestion du cycle de projet grâce aux instruments suivants:

24

­

Contrôle stratégique interne.

­

Planification annuelle interne axée sur des objectifs de résultats.

­

Suivi et contrôle des projets.

­

Formation et perfectionnement du personnel.

­

Evaluation systématique: chaque année, une partie importante des projets, des programmes et des partenariats stratégiques est évaluée par une instance extérieure sur la base des standards d'évaluation de l'OCDE-DAC et de la SEVAL (Société suisse d'évaluation). Les responsables de programmes procèdent également à des auto-évaluations.

RS 193.9

5936

­

3.7

Gestion du savoir: la DP IV, dont le personnel se compose de diplomates qui sont régulièrement transférés ainsi que de collaborateurs scientifiques et de spécialistes de la sécurité humaine non transférables, s'est dotée d'instruments efficaces d'échanges de savoirs.

Organisation et personnel

La Division politique IV-Sécurité humaine du DFAE est composée de cinq sections thématiques (politique de paix, politique de paix multilatérale, politique des droits humains, politique humanitaire et migration), d'une section chargée de l'envoi d'experts sur le terrain, d'un état-major (contrôle stratégique, Policy Unit, point focal pour la dimension genre) et d'une Section de soutien (finances et administration). Quatre ambassadeurs en missions spéciales affectés à des processus de paix et à la politique des droits humains sont subordonnés ou rattachés administrativement à la Division; ils sont nommés selon les besoins par le Conseil fédéral.

L'accroissement du crédit-cadre devant surtout servir à approfondir l'engagement existant de la Suisse, cette organisation demeure pertinente, moyennant un renforcement du personnel, comme l'avait déjà confirmé un audit extérieur début 2007 (non publié).

Ce renforcement par l'engagement de personnel est justifié pour les raisons suivantes: La Suisse a l'ambition de jouer un rôle d'actrice de sa politique. L'efficacité de ses efforts repose par conséquent en grande partie sur des personnes: médiateurs, experts et conseillers engagés dans une médiation ou le développement de normes internationales. Cela vaut tant pour les activités dotées de visibilité que pour celles ­ plus fréquentes ­ menées en coulisse. Le relèvement du montant du crédit-cadre permet la mise à disposition de personnes supplémentaires hautement qualifiées pour mener à bien ces missions et gérer les projets et programmes. Par ailleurs, les actions de promotion de la sécurité humaine se déployant le plus souvent dans des contextes politiques délicats requérant discrétion et confidentialité, leur délégation à des intervenants extérieurs est souvent inopportune. Et même lorsque le DFAE collabore avec des partenaires suisses, locaux ou internationaux reconnus dans une phase donnée d'un processus, il doit impérativement les accompagner et de façon continue, ce qui nécessite des ressources adéquates.

En outre, le DFAE fait face à de nouvelles tâches: initiatives dans le domaine des armes légères, des mines et de l'élaboration de politiques dans le domaine du maintien et de la consolidation de la paix; suivi du Centre de compétence suisse pour les droits humains de 2011 à 2015; mise en oeuvre de
la reprise des tâches du DFJP pour le recrutement de policiers pour les missions internationales de paix; gestion de nouvelles opportunités dans le domaine de la médiation; gestion financière des initiatives dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération; déploiement des activités dans le domaine de la démocratie et des processus électoraux; nouvelles initiatives thématiques telles que partenariats migratoires; renforcement des activités en Afrique du Nord, ainsi qu'au Proche-Orient et au Moyen-Orient. La Division emploie début 2011 70 personnes en permanence, soit un volume de 63,72 postes à temps plein (6372 %), compte tenu du personnel administratif et de secrétariat. Sur ce nombre, 26 postes fixes sont financés sur le crédit-cadre actuel pour un maximum 5937

de 7 % du montant du crédit-cadre. Pour les raisons susmentionnées, il est proposé de renoncer dorénavant à fixer un nombre maximum de postes et de réserver 10 % du crédit-cadre au maximum pour des postes financés par ce crédit. Le crédit-cadre demandé permettra de financer du personnel directement affecté à la mise en oeuvre de la promotion de la sécurité humaine. La durée de ces postes sera limitée à celle de la réalisation des mesures financées par le crédit-cadre. Une tranche d'environ 28 % du crédit-cadre est réservée au détachement d'experts du Pool pour la promotion civile de la paix, dont les trois quarts seront affectés à des missions multilatérales.

4

Teneur de l'arrêté financier

4.1

Proposition du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral demande pour la troisième fois au Parlement un crédit-cadre destiné à financer les mesures de promotion de la sécurité humaine (paix, droits humains, politique humanitaire et migration). La compétence de l'utilisation du crédit reviendra au DFAE (Division politique IV ­ sécurité humaine).

En tant qu'instrument de planification financière, le crédit-cadre permet de garantir la continuité et la pérennité de l'accomplissement des tâches; il facilite une planification à moyen terme et permet au Parlement de vérifier régulièrement le montant des moyens à mettre à disposition et l'orientation stratégique de l'engagement de ces moyens. Conformément à l'art. 21, al. 1, de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances de la Confédération (LFC)25, un crédit d'engagement est nécessaire afin de mener à bien les tâches prévues.

4.2

Volume du crédit-cadre

Le crédit-cadre demandé porte sur 310 millions de francs. Par rapport aux 260 millions de francs prévus dans le plan financier, le Conseil fédéral demande une augmentation de 50 millions de francs qui sont destinés pour leur plus grande part à un programme spécial pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Ces moyens supplémentaires seront compensés à l'interne du DFAE.

La moyenne annuelle est par conséquent de 77,5 millions de francs (si l'on prend en compte le programme spécial destiné à l'Afrique du Nord et au Moyen-Orient). En 2011, le budget de la politique de sécurité humaine se montait à 62,826 millions de francs.

25

RS 611.0

5938

Graphique X Evolution des moyens financiers 2004­2010 (dépenses effectives en millions de francs) 70.0

Moyens financiers

60.0 50.0 40.0

45.9

47.9

50.0

53.2

56.5

59.8

62.8

30.0 20.0 10.0 0.0 2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Budget 2011: 62,826 millions de francs Les moyens demandés sont motivés par les éléments suivants: Priorité de la politique extérieure suisse La Constitution fédérale place la promotion de la paix, de la démocratie et des droits humains au coeur de la politique extérieure de la Suisse. Dans son Rapport de politique extérieure 200026, le Conseil fédéral avait affirmé qu'il voulait désormais «fournir une contribution essentielle et bien visible à la prévention de conflits armés», «conduire une politique humanitaire suisse indépendante et disposant d'un profil marqué», et renforcer par des «mesures appropriées ses efforts en vue du respect et de la promotion des droits de l'homme, de la démocratie et des principes de l'Etat de droit». En approuvant un premier crédit-cadre en 2003 et un second en 2007, le Parlement a donné son aval à cette orientation stratégique et à une croissance régulière du financement de sa mise en oeuvre. Il s'agit de poursuivre sur cette voie.

Les résultats obtenus (ch. 2.1) confirment le bien-fondé de la stratégie poursuivie jusqu'ici. Le Conseil fédéral estime qu'il convient à présent de faire fructifier les atouts et le savoir-faire de la Suisse en consolidant les acquis et en répondant de manière déterminée aux profondes mutations de l'environnement international.

Il est convaincu que le moment est venu de faire un saut quantitatif et qualitatif en augmentant substantiellement le financement de la politique de sécurité humaine. Ce d'autant plus que le DFAE fait face à de nouvelles tâches, tout particulièrement en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, et notamment au lancement d'initiatives dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération.

26

FF 2001 273

5939

Répondre à un besoin global croissant et investir dans la prévention Les besoins internationaux en personnel et en moyens financiers pour la promotion civile de la sécurité humaine sont en croissance.

D'une part, si des conflits ont pris fin ces dernières années, de nombreuses zones d'instabilité et de tension demeurent. Dans des régions proches de la Suisse ou avec lesquelles notre pays a des liens particuliers ­ l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient ainsi que l'Asie centrale ­ de nouveaux problèmes sont apparus, créant ainsi de nouvelles opportunités pour l'action D'autre part, la communauté internationale a pris conscience du fait qu'il était nettement moins onéreux de prévenir la violence armée et de consolider la paixque d'en supporter les retombées financières, économiques, humaines et sociales. Ainsi, une étude cofinancée par la Suisse en 2008 a-t-elle évalué le coût des conflits au Moyen-Orient à 12 000 milliards de dollars américains pour les deux dernières décennies. On estime que la proportion des pertes civiles dans les conflits actuels avoisine 90 % des décès. Il s'agit en majorité de femmes et d'enfants. Compte tenu de ses intérêts et forte de sa longue tradition humanitaire, la Suisse se doit de fournir un apport utile en consolidant et en développant ses activités.

Renforcer la sécurité La promotion de la sécurité humaine constitue une réponse stratégique aux risques sécuritaires contemporains tels que l'effondrement des structures étatiques dans des Etats fragiles, la menace terroriste et l'extrémisme violent, la prolifération d'armes et la criminalité organisée transfrontière. Elle permet d'atténuer les retombées des conflits, de la violence armée et des défaillances de l'Etat de droit sur la stabilité économique, le prix des matières premières, la sécurité des transports aériens ou encore la propagation de maladies. La Suisse prend donc part au règlement de problèmes globaux afin de renforcer sa sécurité et de garantir sa prospérité grâce à des relations internationales rendues plus stables. Elle est aussi solidaire en apportant modestement sa contribution à des pays moins privilégiés.

Gouvernance mondiale des migrations internationales Des dizaines de millions de personnes de par le monde fuient la guerre, la violence, la persécution et la précarité. La promotion de la sécurité
humaine s'attaque aux causes mêmes de la migration forcée et de la traite des êtres humains. Elle englobe également la protection des migrants et de leurs droits. Elle contribue par ailleurs activement à instaurer une gestion internationale des migrations afin que ces dernières soient sûres et régulières et qu'elles aient lieu dans le respect des droits et des intérêts de toutes les personnes concernées.

Bons offices et médiation, une réponse aux attentes envers un Etat neutre comme la Suisse Le savoir-faire suisse dans le domaine des bons offices est de plus en plus souvent sollicité car la Suisse est en effet perçue comme un intermédiaire neutre et digne de confiance et elle jouit de crédibilité ainsi que d'une solide indépendance dans son action. Ce sont des résultats remarquables pour un effort financier relativement limité. Il serait très contreproductif de refuser les sollicitations à l'avenir. Ces efforts représentent une réponse appréciée aux attentes envers un Etat neutre, réponse qui sert également l'image et les intérêts de la Suisse.

5940

Une expertise reconnue et recherchée De par son histoire et sa culture politique, la Suisse possède un réservoir d'expertise reconnue et à haute valeur ajoutée dans des domaines capitaux pour la paix et la sécurité humaine tels que la démocratie, le fédéralisme, le partage du pouvoir, le respect des minorités, le traitement du passé, la promotion du droit international humanitaire et des droits humains. Les efforts de notre pays sont démultipliés par le fait qu'il dispose, avec la Genève internationale, d'un excellent réseau de partenaires intergouvernementaux et non gouvernementaux ainsi que d'une plate-forme internationale et d'un pôle d'excellence unique. La Suisse est, comme d'autres pays, soumise aux sollicitations croissantes de la communauté internationale et de pays en crise. Il serait regrettable de ne pas faire fructifier ces atouts par un engagement adéquat.

Promouvoir la sécurité humaine est efficace Durant la dernière décennie, des processus de médiation ont permis de mettre fin à plusieurs conflits et le nombre de victimes directes de conflits armés, de génocides et de graves violations des droits humains a diminué, tout comme celui des réfugiés de la violence dans l'ensemble du monde. Des études scientifiques expliquent ces améliorations notamment par l'intensification des efforts déployés par la communauté internationale pour endiguer les conflits, promouvoir le droit international humanitaire et protéger les droits humains. Comme le montre l'actualité internationale, les défis sont pourtant encore nombreux et se complexifient considérablement dans le domaine de la violence armée (plus de 50 conflits sont en cours), de la gestion des crises, de la migration et de la protection des droits fondamentaux.

Comparaison avec d'autres pays Le renforcement de l'engagement suisse devrait permettre d'affermir le profil de la Suisse parmi les pays de l'OCDE qui, dans l'ensemble, entre 2006 et 2009, ont augmenté les budgets attribués aux activités de sécurité humaine de 1731 millions de dollars US à 2990 millions de dollars US. Les données de l'OCDE pour la dernière décennie montrent notamment que les pays comparables à la Suisse comme la Norvège, la Finlande et le Danemark ont étoffé leurs budgets et intensifié leurs efforts dans le domaine de la sécurité humaine pour répondre aux besoins
internationaux.

Haut profil de la Suisse L'activité politique menée par la Suisse ces dernières années en matière de promotion de la sécurité humaine a contribué à rehausser son prestige et le rayonnement de sa politique étrangère dans le monde. Son expertise a été sollicitée à maintes reprises et elle a obtenu des résultats notables avec des moyens pourtant limités (ch. 2.1). Ces succès s'inscrivent dans la tradition humanitaire et la politique de bons offices de la Suisse et contribuent de façon notable à projeter une image positive de notre pays.

Ils élargissent la marge de manoeuvre de la politique extérieure et ouvrent des portes, y compris auprès des acteurs internationaux majeurs Effort ciblé et complémentarité Comme le Conseil fédéral l'a exposé dans son rapport du 25 mars 2009 à la Commission de gestion du Conseil des Etats, la Suisse a évalué en 2005 l'efficacité et la pertinence de toutes ses activités de sécurité humaine au regard de la politique extérieure. Elle en a tiré les leçons et a procédé à des concentrations thématiques et 5941

géographiques. Ses engagements géographiques continueront de se concentrer sur des régions prioritaires afin de garantir l'efficacité de l'action. Ces priorités seront réexaminées chaque année. Par ailleurs, les efforts dans le domaine de la sécurité humaine sont complémentaires et se voient renforcées par les autres efforts de la Confédération en faveur de la paix, de la sécurité, du respect du droit international, d'une bonne gestion des migrations internationales et du désarmement.

Efficience et efficacité La Suisse s'est dotée d'instruments efficaces et efficients (médiation et facilitation, programmes de promotion civile de la paix, initiatives diplomatiques, Pool d'experts suisse pour la promotion civile de la paix et partenariats) et/ou s'oriente dans ce sens (politique et coopération concrète dans le domaine des droits humains), auxquels elle pourrait recourir encore mieux et davantage en les finançant à plus haut niveau.

Les moyens demandés dans le présent message lui permettraient de placer davantage de ses ressortissants dans des missions internationales. Une masse critique serait atteinte pour réaliser des actions de paix de plus grande ampleur et réagir plus souplement aux fenêtres d'opportunités.

4.3

Durée du crédit-cadre

La durée du crédit-cadre est de quatre ans (2012 à 2016) et correspond à une législature. Elle garantit que l'engagement de la Confédération sera examiné de manière approfondie par le Parlement au moins une fois durant la législature. Les crédits budgétaires sont sollicités dans le cadre du budget annuel de la Confédération.

5

Conséquences

5.1

Conséquences pour la Confédération

5.1.1

Conséquences financières

Par le présent document, il est demandé aux Chambres fédérales d'accorder un crédit-cadre de 310 millions de francs pour la période de 2012 à 2016 afin de poursuivre les mesures de promotion de la sécurité humaine (cf. ch. 3).

5.1.2

Conséquences en matière de personnel

Le crédit-cadre demandé n'aura pas d'effets sur le personnel de l'administration.

L'engagement, pour une durée déterminée, de personnel nécessaire à la mise en oeuvre des mesures de promotion de la sécurité humaine sera financé par le créditcadre (ch. 3.7).

5942

5.2

Conséquences pour les cantons et les communes

L'application de l'arrêté fédéral proposé, qui incombe exclusivement à la Confédération, n'a pas de conséquences pour les cantons ni pour les communes.

Le soutien de la Confédération aux institutions intergouvernementales et non gouvernementales sises à Genève renforce cependant indirectement la Genève internationale et humanitaire et accroît son attractivité. Des effets positifs sont également à attendre pour le monde académique suisse, notamment du fait de la mise en réseau des connaissances ainsi que de la recherche et de la formation. C'est en particulier le cas pour le subventionnement du Centre de compétence suisse dans le domaine des droits humains nouvellement entré en fonction.

5.3

Conséquences économiques

L'application de l'arrêté fédéral proposé n'aura ­ si ce n'est le renforcement de la Genève internationale et humanitaire ­ pas de conséquences économiques majeures.

6

Programme de législature

Le présent message est annoncé dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201127.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité, conformité aux lois et forme de l'acte à adopter

L'arrêté fédéral proposé repose sur l'art. 167 Cst., qui fonde la compétence budgétaire de l'Assemblée fédérale ainsi que sur l'art. 4 de la loi fédérale du 19 décembre 2003 sur des mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme28 selon lequel les moyens nécessaires au financement des mesures prévues sont accordés sous la forme de crédits-cadre pluriannuels. Attendu qu'il s'agit d'un arrêté financier, il doit, conformément à l'art. 25, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement29, être adopté sous la forme d'un arrêté fédéral simple.

7.2

Frein aux dépenses

Conformément à l'art. 159, al. 3, let. b, Cst.30, l'arrêté fédéral proposé est soumis au frein aux dépenses et doit, par conséquent, être adopté par la majorité des membres des deux Chambres.

27 28 29 30

FF 2008 711 RS 193.9 RS 171.10 RS 101

5943

Annexe 1

Affectation des fonds du crédit-cadre 2008­2012 L'utilisation des ressources financières a été orientée par les objectifs stratégiques définis par le Conseil fédéral31. Ces objectifs étaient accompagnés d'indicateurs stratégiques et de références de contrôle de qualité chiffrées qui ont permis de piloter les activités et de vérifier à intervalles réguliers si les objectifs définis avaient été atteints. Les indicateurs et les références de contrôle ont été affinés au cours de la période sous revue32.

La politique suisse de sécurité humaine 2008­2012 a poursuivi les objectifs stratégiques suivants: ­

La Suisse a concentré son action sur sept pays et régions prioritaires.

­

Elle a concentré ses activités sur des thèmes privilégiés.

­

Elle a agi le plus souvent possible en tant qu'actrice ou co-actrice de sa politique.

­

Elle a travaillé le plus souvent possible avec les acteurs politiques clés (niveaux d'engagement («tracks») dit 1 et 1,5).

­

Elle a collaboré avec des partenaires soigneusement sélectionnés.

­

Elle a intégré systématiquement la dimension sexospécifique dans ses projets et programmes.

­

Elle a évalué régulièrement 20 % de son portefeuille d'activités.

1. Sept pays et régions prioritaires Le DFAE a concentré ses ressources et les a conjuguées sur sept pays et régions prioritaires. En 2010, il s'agissait de l'Europe du Sud-Est, du Proche-Orient, du Népal, du Soudan et de la Corne de l'Afrique, de la région des Grands Lacs, de la Colombie et de l'Afrique de l'Ouest et centrale. Le tableau ci-dessous présente la ventilisation des dépenses géographiques pour les années 2008­2010:

31

32

Message du Conseil fédéral du 15 juin 2007 concernant la continuation de mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme (FF 2007 4495) et Rapport du Conseil fédéral en réponse à la lettre du 3 déc. 2008 de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 25 mars 2009 (non publié).

Ces indicateurs figurent dans le Rapport du Conseil fédéral sur les mesures de promotion civile de la paix et de renforcement des droits de l'homme 2007 rédigé à l'attention des Commissions de politique extérieures (non publié à la FF). Ils ont été affinés dans le document interne du DFAE «La planification à moyen terme (2009­2012): Division politique IV ­ de la phase des pionniers à la consolidation» de juillet 2009.

5944

Graphique 1 Ventilation géographique des dépenses (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010)

Amérique latine 11%

Europe du Sudest et Europe (autres régions) 30%

Afrique 24%

Proche-Orient 20%

Asie 15%

Le tableau ci-après présente la ventilation des dépenses par pays et par région pour la période 2008 à 2010: Ventilation des dépenses par pays et par région en millions de CHF

2008

2009

2010

Europe du Sud-Est et autres régions d'Europe) Asie Proche-Orient Afrique Amérique latine

6,7 3,5 4,6 5,0 2,4

7,0 3,6 5,0 5,2 2,9

7,7 3,8 4,8 7,4 2,7

22,2

23,7

26,4

Total

Environ 80 % des ressources destinées aux activités géographiques ont été affectées aux pays et régions prioritaires, les 20 % restants ont été affectés de manière flexible à d'autres pays et régions en fonction des opportunités politiques qui se sont ouvertes. Les activités géographiques ont absorbé environ 58 % des moyens disponibles, 42 % du budget ayant été consacré aux activités politiques thématiques. Les expériences de ces dernières années montrent une légère tendance à la réaffectation des moyens en faveur des activités dites politiques (initiatives diplomatiques, partenariats) ­ par rapport aux activités dites géographiques (programmes dans une région donnée). Cette tendance reflète la demande croissante de prise de mesures politiques.

5945

2. Des thèmes privilégiés Graphique 2 Promotion civile de la paix, promotion des droits humains, politique humanitaire et migration (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010)

Promotion des droits humains 19%

Politique humanitaire et migration 9% Promotion civile de la paix 72%

72 % du crédit-cadre a été affecté à la promotion civile de la paix (envoi d'experts sur le terrain compris), 19 % aux droits humains et 9 % à la politique humanitaire et à la migration.

Le tableau ci-dessous présente les dépenses par thème des années 2008­2010: Ventilation des dépenses par thème en millions de CHF

2008

2009

2010

Promotion civile de la paix Promotion des droits humains Politique humanitaire et migration

22,2 5,5 3,0

23,2 6,0 2,8

24,6 6,9 3,4

Total

30,7

32,0

34,9

3. La Suisse actrice de sa politique Le crédit-cadre a permis à la Suisse d'être d'abord une actrice directe de sa politique de sécurité humaine ou une co-actrice influente. Durant la période 2008­2010, 61 % des engagements financiers ont ainsi été consacrés à des projets dans lesquels la Suisse a joué le rôle d'actrice ou de co-actrice. Le gros des ressources financières et en personnel a été affecté au déploiement d'experts, aux activités de bons offices et de médiation ainsi qu'aux programmes de promotion civile de la paix. La Suisse a fourni des contributions financières à des projets développés par des tiers lorsqu'elle a jugé qu'une action commune s'avérerait judicieuse.

5946

Il est apparu qu'être acteur exige non seulement une grande expertise et des compétences de manager mais que cela implique aussi des ressources humaines considérables. C'est sur ce point que des limites sont apparues.

Graphique 3 La Suisse actrice, co-actrice et donatrice (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010) Actrice 30%

Donatrice 39%

Co-actrice 31%

Le tableau ci-dessous présente les dépenses par rôle des années 2008­2010: Ventilation des dépenses par rôle en millions de CHF

2008

2009

2010

Actrice Co-actrice Donatrice

18,1 17,8 20,6

18,3 17,5 24,0

16,2 20,8 25,8

Total

56,5

59,8

62,8

4. Ventilation par niveau d'engagement L'analyse des dépenses sur la période considérée montre que les activités financées par le crédit-cadre ont essentiellement consisté en des engagements politiques et diplomatiques de niveaux 1 et 1,5. Elles ont été complétées par des engagements de niveau 2 (société civile) et 3 (populations locales).

70 % des activités ont ainsi été développées avec les acteurs politiques clés (niveau d'engagement 1 et 1,5). Le DFAE s'est par exemple employé à favoriser le dialogue entre un gouvernement en place et les dirigeants d'une rébellion ou à agir dans la perspective d'infléchir une politique gouvernementale. La collaboration systématique avec des personnalités et des organisations influentes de la vie politique, économique et sociale (niveau d'engagement dit «track 2»: 11 %) n'a cependant pas été négligée car une telle collaboration permet de donner une large assise à un processus de paix ou de favoriser le développement de la politique gouvernementale. Le DFAE 5947

a également, dans une moindre mesure, travaillé au niveau dit «track 3» (2 % des engagements), celui de la collectivité. En effet, pour construire une paix durable, il est nécessaire que l'ensemble de la population endosse les développements cruciaux.

Le travail «multitrack»(17 %) a combiné quant à lui différents niveaux d'intervention.

Graphique 4 Ventilation des ressources par niveau d'engagement (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010)

Track 3 2%

Track 1 36%

Multitrack 17%

Track 2 11%

Track 1.5 34%

Le tableau ci-dessous présente les dépenses par track des années 2008­2010: Ventilation des dépenses par niveau d'engagement en millions de CHF

2008

2009

2010

Track 1 Track 1.5 Track 2 Track 3 Multritrack

20,4 18,1 7,4 1,4 9,0

21,2 20,5 6,6 0,7 10,9

22,4 22,0 5,4 2,0 10,9

Total

56,3

59,9

62,7

5948

5. Ventilation des dépenses effectives entre les principaux instruments Les bons offices, les médiations et les programmes de gestion civile des conflits ont constitué le principal poste de dépenses, suivi de l'envoi d'experts à l'étranger.

Graphique 5 Ventilation des dépenses entre les principaux instruments (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010)

Développement de politiques et initiatives diplomatiques 17.7%

Pool d'experts pour la promotion civile de la paix 26.8%

Partenariats stratégiques 15.6%

Dialogues sur les droits humains 1.3%

Bons offices, médiation et programmes de gestion civile des conflits: 38.6%

Le tableau ci-dessous présente le détail des parts en % pour la période 2008­2010 et les dépenses par instrument en 2010: Ventilation des dépenses entre les principaux instruments

2008

2009

2010

Moyenne

Dépenses 2010 en millions de CHF

Pool d'experts pour la promotion civile de la paix Bons offices, médiation et programmes de gestion civile des conflits Dialogues sur les droits humains Développement de politiques et initiatives diplomatiques Partenariats stratégiques

29,0 %

26,0 %

25,5 %

26,8 %

16,0

35,0 %

40,0 %

40,7 %

38,6 %

25,5

2,0 % 17,0 %

1,0 % 18,0 %

1,0 % 18,0 %

1,3 % 17,7 %

0,6

17,0 %

15,0 %

14,8 %

15,6 %

Total

11,3 9,3 62,7

5949

6. Les partenaires du DFAE Le DFAE n'aurait pas été en mesure d'accomplir sa mission sans la collaboration de partenaires spécialisés que ce soitles organisations internationales non gouvernementales (44 %), les organisations gouvernementales et des Nations Unies (37 %) ou des partenaires académiques et privés (12 %). Une longue et fructueuse collaboration a notamment été instaurée avec une vingtaine de partenaires stratégiques.

Graphique 6 Collaboration avec les partenaires du DFAE (moyenne en % des dépenses effectives 2008­2010) Non Centres de répertoriées Genève, (combinaisons) partenaires 7% académiques et privés 12%

ONU, Organisations gouvernement.

37%

Organisations internationales, ONG 44%

Le tableau ci-dessous présente le détail des dépenses par partenaire 2008­2010: Ventilation des dépenses par partenaire en millions de CHF

2008

2009

2010

ONU, autres organisations gouvernementales Organisations non gouvernementales internationales et nationales (ONG) Centres de Genève, partenaires académiques et privés Non répertoriées (combinaisons)

15,8 29,4

25,4 24,9

24,7 24,4

7,9 3,4

7,8 1,7

5,6 8,1

Total

56,5

59,8

62.8

5950

7. Approche intégrée de l'égalité entre les femmes et les hommes La Suisse applique une approche intégrée de l'égalité entre les femmes et les hommes et tient systématiquement compte de la dimension sexospécifique dans ses projets et programmes de promotion de la paix et de sécurité humaine. Une importance croissante a été accordée à la sexospécificité au cours de la période sous revue.

Le DFAE s'est aussi attaché à évaluer de manière réaliste la mise en oeuvre de cette mesure et à améliorer les conditions nécessaires à sa réalisation. La sensibilité au genre a été jugée «marquée», voire «forte» dans 66 % des demandes de financement de projets, Graphique 7 Evaluation de la sensibilité au genre en 2008­2010 Pas applicable 13%

Marquée 14%

Modeste 22%

Forte 52%

Le tableau ci-dessous présente le détail des dépenses par rapport à la période 2008­ 2010: Ventilation des dépenses par rapport à la sensibilité au genre en millions de CHF

Marquée Forte Modeste Pas applicable

2008

2009

2010

6,4 22,0 18,0 6,6

5,4 17,8 9,5 8,0

9,5 41,1 6,6 5,6

5951

Annexe 2

Vue d'ensemble de la politique suisse de paix et de désarmement Les pages qui suivent offrent une vue d'ensemble de la politique de paix et de désarmement de la Confédération. Cette annexe illustre notamment la nécessité d'efforts accrus de cohérence et complémentarité entre les activités de sécurité humaine, de coopération au développement et d'aide humanitaire. Elle répond au postulat 09.3003 du 19 janvier 2009 de la Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats (Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement) qui chargeait le Conseil fédéral «d'élaborer un rapport d'ensemble sur sa stratégie future en matière de promotion de la paix, aussi bien dans les domaines civils que dans les domaines militaires. Il inclura également la politique qu'il entend suivre à l'avenir en matière de désarmement et de maîtrise des armements. Dans cette perspective, il étudiera en particulier l'opportunité de réunir l'ensemble de ces mesures dans un seul crédit-cadre portant sur plusieurs années.». Le Conseil fédéral a proposé l'acceptation de ce postulat le 25 février 2009.

Objectifs et domaines d'action La promotion de la coexistence pacifique des peuples est une tâche multidimensionnelle et transversale. Pour que son action réponde efficacement aux défis contemporains à la paix et à la sécurité, la Confédération vise six objectifs concrets qui se complètent: 1.

promouvoir le règlement pacifique des différends et la consolidation de la paix. Par des interventions sur la dynamique d'un conflit, on cherche à éviter que celui-ci n'éclate, ne s'aggrave ou ne reprenne;

2.

intervenir à la source, sur les causes structurelles des conflits. Il s'agit de réduire les sources de tensions sociales et de renforcer les institutions nationales qui offrent une voie autre que la violence pour gérer les problèmes;

3.

stabiliser pour prévenir l'escalade ou la résurgence d'un conflit et permettre la construction de la paix;

4.

renforcer l'architecture globale de prévention et de réduction de la violence armée par la promotion de normes et de mécanismes internationaux solides;

5.

contribuer activement au désarmement, à la maîtrise des armements et à la non-prolifération, notamment en travaillant au renforcement des accords universels à valeur juridiquement contraignante et en promouvant un désarmement irréversible, transparent et vérifiable;

6.

protéger et assister les personnes et les communautés touchées par les conflits armés.

Pour réaliser ces six objectifs, la Suisse utilise tout le spectre de l'action diplomatique, militaire et du développement à sa disposition, du lancement d'initiatives au niveau multilatéral aux projets sur le terrain.

5952

Objectifs

Domaines d'action

1. promouvoir le règlement pacifique des différends et la consolidation de la paix 2. intervenir à la source, sur les causes structurelles des conflits 3. stabiliser pour prévenir l'escalade ou la résurgence d'un conflit et permettre la construction de la paix 4. renforcer l'architecture globale de prévention de la violence armée

promotion civile de la paix / coopération au développement coopération au développement / promotion civile de la paix promotion militaire de la paix / politique de sécurité

5. contribuer activement au désarmement, à la maîtrise des armements et à la non-prolifération 6. protéger et assister les personnes et les communautés touchées par les conflits armés

droit international public / promotion civile de la paix / coopération au développement / politique dans les organisations internationales politique de sécurité / promotion civile de la paix aide humanitaire; coopération au développement; droit international public; politique humanitaire, politique de sécurité

La Suisse entend ainsi contribuer, par une action cohérente et ciblée, à prévenir les conflits et à promouvoir la paix pour un monde plus stable et sûr.

La notion de paix La paix ne se limite pas à l'absence du recours à la force et à une stabilité à un niveau d'armement le plus bas possible (paix négative). Quand bien même ces facteurs sont d'importance, la paix requiert beaucoup plus. Au-delà de l'arrêt des hostilités la Suisse cherche à façonner une paix fondée sur le développement durable, la justice sociale, le respect des droits de l'homme et de la démocratie (paix positive)33. Elle s'appuie en cela sur les valeurs inscrites dans la Constitution fédérale. Elle postule que la paix, entendue au sens large, constitue une précondition pour que les individus, les communautés, les sociétés et les pays réalisent pleinement leur potentiel.

Concrètement, lorsque nos efforts en vue d'arrêter des hostilités aboutissent à un accord de paix, il est indispensable de penser les prochaines étapes d'un processus de stabilisation (à ce qu'il reste à accomplir). Il faut encore instaurer la sécurité et désarmer, construire des fondations socio-économiques durables, établir le cadre politique d'une paix reposant sur les principes de l'Etat de droit, de la participation des minorités et de la non-discrimination, ou encore faciliter la réconciliation et promouvoir la justice.

33

Paix négative et paix positive sont des concepts fondamentaux de la recherche sur la paix découlant du modèle analytique sur la typologie de la violence développé dès la fin des années 1960 par Johan Galtung et toujours d'actualité. Alors que la paix négative est l'absence de guerre ou de violence directe et physique entre groupes, la paix positive suppose le refus de la violence structurelle.

5953

1. Promouvoir le règlement pacifique des différends et la consolidation de la paix Rôle de la promotion civile de la paix Les instruments politiques de promotion civile de la paix au service de la réalisation de cet objectif ont été décrits dans le message du Conseil fédéral concernant la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine 2012­ 2016 auquel le présent rapport est annexé.

Cohérence et complémentarité Les chapitres suivants consacrés à la mise en oeuvre des autres objectifs du Conseil fédéral au service de la paix et de la sécurité aborderont la question de la cohérence et de la complémentarité entre le domaine de la promotion civile de la paix et les autres domaines d'action de la Confédération.

2. Intervenir à la source, sur les causes structurelles des conflits et de la violence armée Rôle de la coopération au développement La pauvreté, les difficultés d'accès équitable aux ressources accompagnées d'écarts de revenus importants, comptent parmi les causes structurelles les plus importantes des conflits. Les activités de la coopération au développement34 ­ qui vise à réduire la pauvreté ­ peuvent contribuer substantiellement à la prévention des crises, à l'apaisement des tensions et à la promotion des droits humains si elles sont conçues et réalisées de manière à prendre en compte les causes fondamentales des confits affectant les régions où elles sont déployées. Elles peuvent en particulier faciliter la réduction des tensions socioéconomiques, écologiques, politiques, culturelles ou relatives au genre.

C'est pourquoi la prévention des crises et la résolution durable des conflits occupent une place importante dans la Coopération suisse au développement et constituent l'une des priorités stratégiques du Conseil fédéral dans son message concernant la continuation de la coopération technique et de l'aide financière en faveur des pays en développement du printemps 200835. Elle sera aussi un thème prioritaire du prochain message que le Conseil fédéral soumettra au Parlement pour la période 2013­2016.

La Coopération suisse au développement fournit d'importantes contributions dans deux domaines: premièrement, dans la promotion de la stabilité structurelle et de la démocratisation et, deuxièmement, dans le renforcement des compétences et des institutions nationales essentielles pour prévenir la violence et faciliter la transformation pacifique des conflits. Elle encourage l'inclusion dans ces processus des

34

35

Les activités de prévention des conflits par la coopération au développement sont fondées sur la loi fédérale du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationale (RS 974.0) ainsi que sur plusieurs document stratégiques: Message du 14 mars 2008 concernant la continuation de la coopération technique et de l'aide financière en faveur des pays en développement; Lignes directrices Développement de la paix et Stratégie 2010 de la DDC. Ses acteurs sont le DFAE (DDC) et le DFE (SECO), en étroite collaboration avec les acteurs civils et militaires de la promotion de la paix et de la sécurité.

FF 2008 2595

5954

divers acteurs nationaux, notamment de la société civile, y compris les groupes marginalisés tels que les personnes déplacées et les femmes.

Ce faisant, elle s'inspire de ses lignes directrices spécifiques Développement de la paix, qui clarifient les modalités et les principes de l'engagement. Elle s'appuie aussi sur sa méthode de gestion de programme sensible au conflit (CSPM) fondée sur la devise «ne pas nuire», qui montre comment il est possible d'agir sur les causes des conflits voire d'aider à les résoudre. La Suisse est l'un des pays les plus avancés dans ce domaine et elle a formé des acteurs étrangers à cette méthode, en tirant notamment parti de son expérience au Népal.36 En complément, elle prend en compte les Dix principes du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE pour l'engagement international dans les Etats fragiles ainsi que les orientations inscrites dans l'agenda d'action d'Accra adopté en 2008 et consacrées spécifiquement à l'amélioration de l'efficacité de l'aide dans les pays confrontés à la fragilité et aux conflits.

Au plan multilatéral, la Coopération au développement s'efforce de renforcer son réseau de partenaires et son dialogue interinstitutionnel sur les questions de transition post-conflit, dans le but d'améliorer l'efficience de leur réponse individuelle et de leur participation à la coordination du système opérationnel international, notamment avec les Nations Unies, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement.

La création d'un réseau conflits et droits humains au sein de la Direction du développement et de la coopération traduit la volonté d'être encore plus efficace ces prochaines années dans la gestion de programme sensible au conflit (CSPM) sur le terrain et d'assurer une articulation efficace entre les efforts bi- et multilatéraux.

Cohérence et complémentarité A l'avenir, la Coopération au développement devra toujours davantage travailler dans des situations fragiles et conflictuelles, car le risque de voir se multiplier les conflits internes et les conflits violents est particulièrement élevé dans les pays les plus pauvres. Les instruments complémentaires de promotion civile de la paix de la Direction politique du DFAE (ci-dessous) continueront à être mis à contribution de manière à créer et renforcer les structures de transformation
non violente des conflits.

En effet, les activités de coopération au développement de la Direction du développement et de la coopération (DDC) et du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) ont à long terme des effets de prévention des crises, d'apaisement des tensions et de promotion des droits humains. Alors que la promotion civile de la paix permet à la Suisse de travailler sur les situations à haut risque de violence et d'escalade; elle vise à agir sur leur dynamique. Par des moyens diplomatiques, la Suisse soutient les processus orientés vers la prévention d'une aggravation, la restauration de la paix et sa consolidation. Dans un processus de paix particulier, ses actions s'adressent aux acteurs politiques clés, soit les dirigeants des parties au conflit, que ceux-ci agissent à titre officiel ou de manière plus informelle. Il s'agit en général d'engagements à moyen terme, mais parfois aussi de courte durée, lorsqu'une opportunité politique le commande.

36

voir Context-Sensitive Engagement: Lessons Learned from Swiss Experiences in South Asia for Aid Effectiveness in fragile Scenarios, prepared for 3rd High Level Forum on Aid Effectiveness, Accra, Sept. 2008.

5955

Compte tenu des liens étroits entre la paix, la sécurité et le développement, la Suisse entend accentuer son approche intégrée dans les contextes fragiles et en conflit. La promotion de la paix et la coopération au développement doivent obligatoirement suivre des axes stratégiques communs. La Direction politique (DP) et la DDC continueront à définir leurs priorités géographiques et thématiques en étroite consultation.

Les fréquentes réunions de coordination entre elles, de même que le comité de pilotage coordonnant les activités de la Division politique IV (DP IV) et de la DDC, continueront de nourrir la coopération au niveau de la conception des actions comme de leur réalisation. Lorsque la DDC et la DP IV opèrent dans un même pays, leur présence sera coordonnée, en principe dans le cadre d'une stratégie nationale commune.

3. Stabiliser pour prévenir l'escalade ou la résurgence d'un conflit et permettre la construction de la paix Rôle de la promotion militaire de la paix La promotion militaire de la paix, qui est aussi l'une des quatre missions fondamentales de l'armée suisse figurant dans la loi sur l'armée et l'administration militaire (LAAM), représente l'un des domaines les plus mouvants de la gestion internationale des crises. Son dynamisme exprime un processus d'apprentissage permanent de la part de la communauté internationale, qui se voit confrontée depuis la fin de la Guerre froide à la complexité croissante des crises et des conflits.

Du point de vue quantitatif, l'objectif du Conseil fédéral inscrit dans son rapport sur la politique de sécurité 2010 est d'augmenter les capacités destinées à la promotion militaire de la paix. Par ailleurs, le Conseil fédéral prévoit, en ce qui concerne l'envoi de contingents militaires, de concentrer les efforts sur les domaines du transport aérien, des prestations logistiques et de transport terrestres, ainsi que sur les prestations de niche dans les domaines des affaires sanitaires, du renseignement et de la sécurité.

Concernant les militaires à titre individuel et les petits détachements non armés, l'accent sera mis sur une augmentation des envois d'observateurs militaires, d'officiers supérieurs et d'experts du déminage humanitaire. De plus, la mise à disposition d'experts militaires dans le domaine des armes légères et de petit calibre, de
l'élimination des stocks et de la destruction des munitions, de la réforme du secteur de la sécurité ainsi que de la démobilisation et de la réintégration des combattants au sein de la société est envisagée.

Cohérence et complémentarité Du fait des facteurs et des mécanismes de conflit, il est indispensable, de nos jours, de coordonner les instruments civils et militaires de la promotion de la paix.

Souvent, des contributions civiles durables sont quasiment impossibles sans contributions militaires, au moins dans une phase précoce de gestion du conflit et de sortie de conflit.

Cette interface importante entre défense/armée, promotion de la paix et développement doit encore être renforcée dans les quatre années à venir. Il s'agit de développer et d'utiliser l'expertise correspondante ainsi que de soutenir les projets et les acteurs concernés dans le cadre d'une approche coordonnée de la Confédération.

5956

Au DFAE, c'est la Division politique IV de la Direction politique qui conçoit la politique de paix et met en oeuvre les mesures de promotion civile de la paix. Ce travail comprend, en étroite concertation avec le Secrétariat politique (questions de politique de sécurité internationale), avec la Division politique III (coordination ONU), avec la DDC et avec le Bureau de l'intégration (DFAE/DFE), des aspects des opérations de maintien de la paix et de la promotion de la paix dans un cadre multilatéral.

Au DDPS, ce sont le Secrétariat général (politique de sécurité) et l'Etat-major de l'Armée (Unité Relations internationales Défense) qui sont chargés des questions de politique de sécurité et des missions internationales de promotion de la paix mettant en jeu des moyens civils et militaires du DDPS. Ces dernières sont réalisées par le centre de compétence Swissint.

La promotion de la paix civile et militaire de la Suisse s'inscrit dans des programmes multilatéraux et bilatéraux. Il existe donc des interfaces civilo-militaires dans la protection suisse de la paix, d'une part au niveau de la conception, c'est-à-dire du recours aux capacités et aux compétences nécessaires, d'autre part sur le plan opérationnel, lors de la participation à des missions de paix multilatérales.

Les domaines thématiques clés de la promotion de la paix faisant appel à des compétences militaires et civiles sont les suivants: ­

le monitorage des accords de cessez-le-feu et de paix par du personnel civil et/ou militaire;

­

la protection subsidiaire des populations civiles par des composantes militaires et policières de missions internationales de paix;

­

la réforme du système de sécurité (armée, police, surveillance des frontières, services de renseignement) visant à sa mise en conformité avec les principes de la démocratie et de l'Etat de droit;

­

le désarmement, la démobilisation et la réinsertion d'anciens membres de groupements armés;

­

les mécanismes de contrôle des armes légères et de petit calibre (ALPC) ainsi que la destruction des stocks excédentaires et des munitions;

­

le déminage humanitaire;

­

la coopération en vue de garantir la sécurité avant, pendant et après des élections.

Il existe, au sein de l'administration fédérale, et surtout entre le DDPS et le DFAE, des mécanismes de coordination performants dans la coopération civilo-militaire en matière de promotion de la paix. Le comité de coordination interdépartementale pour la promotion de la paix (Kerngruppe Frieden) que dirige la DP IV est un organe de consultation visant à fixer les grands axes ainsi que les questions conceptuelles relevant de toutes les activités de promotion de la paix des deux départements.

D'autres organes de coordination ont des rôles plus spécifiques: ­

le comité de coordination du déminage humanitaire;

­

le groupe de travail interdépartemental sur les armes légères et de petit calibre (IDAG SALW);

­

le groupe interdépartemental pour la réforme du système de la sécurité (IDAG SSR); 5957

­

des groupes de coordination nationale communs s'occupant des actions menées dans certains pays (le Soudan par exemple);

­

un comité de pilotage DDPS-DFAE dont le DFAE à la présidence pour la coordination des contributions de la Suisse aux trois centres de Genève.37

Par ailleurs, les programmes bilatéraux de promotion civile de la paix sont bien coordonnées avec les activités de promotion militaire de la paix que la Confédération entreprend et qui sont mentionnés dans le rapport du Conseil fédéral sur la politique de sécurité de la Suisse, en particulier dans le domaine du déminage humanitaire, de la réforme du secteur de la sécurité, des armes légères et de petit calibre, de l'élimination des stocks et de la destruction des munitions et ­ indirectement ­ de l'envoi des contingents suisses dans les missions de paix mandatées par l'ONU ou l'OSCE.

4. Renforcer l'architecture globale de réduction et de prévention de la violence armée Prévenir efficacement les conflits, contenir la violence armée et consolider la paix exigent, au niveau global, des mécanismes efficaces, un consensus sur les standards et un respect accru du droit international.

Initiatives diplomatiques et engagements multilatéraux dans le domaine de la paix et de la sécurité La Suisse apporte sa contribution à la définition de politiques de paix globales et au renforcement du système international de règlement des conflits et d'application du droit sur ses thèmes forts en matière de paix et de sécurité.

Elle est particulièrement active aux Nations Unies, unique enceinte universelle à même de faire face aux défis globaux. Elle continuera d'y apporter son soutien en lui offrant de l'expertise ainsi que des ressources humaines et financières, par exemple dans le domaine de la médiation. Elle s'emploiera à y faire progresser la réflexion sur la réforme institutionnelle pour la prévention des conflits et le maintien et la consolidation de la paix. Elle aura par exemple l'occasion de partager son expérience au sein de la Commission de consolidation de la paix.

Elle continuera à travailler activement au développement d'initiatives diplomatiques par exemple à l'Assemblée générale de l'ONU ainsi que dans d'autres enceintes multilatérales, notamment le Conseil économique et social, le Conseil de sécurité et les Conseils d'administration des agences partenaires principales, ainsi qu'au sein de l'Alliance des civilisations. Plusieurs initiatives (violence armée et développement; action antimines; réformes du secteur de sécurité; acteurs économiques et sécurité humaine) ont été décrites dans le message du
Conseil fédéral concernant la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine 2012­2016 auquel le présent rapport est annexé (ch. 3.3.5).

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Les aides versées aux trois centres de Genève (Centre de politique de sécurité, Centre pour le contrôle démocratique des forces armées et Centre international de déminage humanitaire) ont été soumises au Parlement en 2010 dans un message distinct (FF 2010 7461). Elles sortent donc du cadre du présent message.

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Parmi les autres engagements importants en faveur de la paix et de la sécurité, on mentionnera: La réforme du Conseil de sécurité de l'ONU: Aux termes de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationale. La Suisse continue à soutenir l'amélioration de ses méthodes de travail. Le dialogue de Sécurité européenne: La Suisse salue les propositions faites pour renouveler les bases de la sécurité européenne. Quant à la substance, il sera important de mettre en oeuvre de manière plus conséquente les instruments destinés à prévenir les conflits et améliorer les instruments de gestion de crise.

Les sanctions ciblées: Les sanctions constituent un important instrument pour faire respecter le droit international et pour maintenir la paix et la sécurité. Imposées ou non en vertu du chap. VII de la Charte des Nations Unies, elles constituent un instrument politique utilisé dans un but politique. Elles doivent donc être temporaires et levées dès que la paix n'est plus menacée. De même, l'aide humanitaire ne saurait être assujettie à des conditions politiques. En tant que membre de l'ONU, la Suisse est obligée de mettre en oeuvre les sanctions décrétées par le Conseil de sécurité. Ces sanctions prennent souvent la forme d'un embargo sur des armes, du gel d'avoirs, de restrictions de voyager ou d'un embargo sur le commerce de certaines ressources naturelles.

Le soutien aux mécanismes internationaux de règlement pacifique des différends: Selon la Charte des Nations Unies, tous les Etats ont l'obligation de régler leurs différends de manière pacifique. La Suisse apporte un ferme soutien aux mécanismes internationaux établis à cette fin, en particulier à la Cour internationale de justice qui est l'organe judiciaire principal de l'ONU. Elle s'emploie à ce qu'un maximum d'Etats reconnaissent sa compétence obligatoire. Elle peut aussi appuyer la Cour dans sa tâche de rendre des avis consultatifs en lui soumettant des avis de droit.

Le soutien à la Cour pénale internationale: La justice pénale internationale, et en particulier la Cour pénale internationale (CPI), peut aussi être considérée comme un instrument de prévention des conflits en ce sens qu'elle permet de poursuivre les crimes les plus graves ­ génocide, crimes de guerre,
crime contre l'humanité ­ qui, s'ils demeurent impunis, forment le terreau de futurs conflits.

La promotion et la protection des droits humains: Les violations systématiques des droits humains sont une cause de conflits et en sont aussi souvent une conséquence.

Les autres instruments ayant une incidence pour la prévention des conflits: Il existe d'autres sources de tensions qui accroissent la vulnérabilité des Etats, des sociétés et de régions tout entières et augmentent les risques de violence et d'instabilité. Pour être combattues efficacement, elles demandent une action au niveau systémique mondial. Outre ses initiatives et actions dans le domaine de la sécurité humaine, de la promotion de la paix et du désarmement, la Suisse participe aux efforts internationaux, notamment en promouvant un développement durable et équitable, une gestion des migrations respectueuse et efficace, en luttant contre le changement climatique et la dégradation de l'environnement ou encore en contribuant à la promotion de la santé et à la lutte contre des pandémies.

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5. Contribuer activement au désarmement, à la maîtrise des armements et à la non-prolifération Rôle de la politique de sécurité La Suisse n'appartenant à aucune alliance militaire ou de défense en raison de sa neutralité permanente, elle doit assurer sa sécurité nationale par sa politique extérieure, au-delà de son dispositif de défense. Compte tenu des défis posés par le contexte géopolitique actuel et des répercussions globales des conflits armés, la politique suisse en matière de désarmement, de maîtrise des armements et de nonprolifération a pour principe directeur la sécurité, la stabilité nationales et internationales et l'instauration d'un climat de confiance à un niveau d'armement le plus bas possible. Elle oeuvre notamment pour le désarmement complet des armes de destruction massive et vise à en empêcher le transfert en mains terroristes. Elle vise également à prévenir l'accumulation déstabilisatrice et le trafic illicite d'armes classiques, à promouvoir la transparence dans le domaine des armes ou à interdire les armes produisant des effets traumatiques excessifs ou frappant sans discrimination.

Les mesures employées par la politique suisse en matière de désarmement, de maîtrise des armements et de non-prolifération sont notamment l'initiative diplomatique, la contribution aux processus multilatéraux de désarmement et de non-prolifération, la contribution financière à la destruction d'armes, l'amélioration de la gestion des stocks d'armes, la mise en oeuvre de mesures contre la prolifération d'armes et de technologies ainsi que la participation aux systèmes de vérification.

Cohérence et complémentarité Au titre de la promotion civile de la paix, la Suisse est engagée dans le domaine du désarmement des armes conventionnelles ayant des effets dévastateurs sur les populations civiles (mines, armes à sous-munition, armes légères et de petit calibre).

Comme il a été exposé dans le message du Conseil fédéral concernant la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine 2012­2016 auquel le présent rapport est annexé (ch. 3.2.1 et 3.3.5), la Suisse s'investira désormais davantage dans le domaine du désarmement, de la maîtrise des armements et de la non-prolifération. Une politique de désarmement engagée est en effet le complément naturel d'une politique active de
promotion de la paix. Elle sert le même but constitutionnel, à savoir la coexistence pacifique des peuples, et contribue de manière significative au renforcement de la sécurité humaine. Une part substantielle du budget attribué à la promotion de la paix et de la sécurité humaine (1 million de francs en 2011) sera consacrée chaque année à ce domaine. Ce faisant, le Conseil fédéral donne suite au postulat 09.3003 du 19 janvier 2009 de la Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats (Stratégie globale de promotion de la paix et du désarmement).

6. Protéger et assister les personnes et les communautés touchées par les conflits armés Rôle de l'aide humanitaire et protection des civils La Confédération protège et assiste les personnes et les communautés affectées par les conflits armés par des actions à différents niveaux grâce à l'Aide humanitaire et aux mesures de protection des civils dans les conflits armés.

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Cet engagement a pour objectif premier de remédier aux effets néfastes et aux souffrances humaines engendrées par les conflits armés. Il ne vise pas directement à promouvoir la coexistence pacifique des peuples, et donc, il n'est pas un instrument de la politique de paix. Cependant, il comporte, avec la promotion civile et militaire de la paix ainsi qu'avec le désarmement, des interfaces qu'il convient d'évoquer.

Le Conseil fédéral a fait part de sa volonté de mettre en oeuvre une politique humanitaire suisse indépendante et possédant un profil marqué, en encourageant les actions humanitaires de la Suisse, en particulier l'aide humanitaire, et le droit international humanitaire, tout particulièrement son ancrage et son développement au niveau mondial.

La Suisse met en oeuvre une politique extérieure basée sur l'universalité, le maintien de bonnes relations avec tous les Etats et le respect des règles de droit, en particulier les règles du droit international humanitaire. L'Aide humanitaire de la Confédération s'est fixé les objectifs suivants: contribuer, avant, pendant et après les événements qui ont des conséquences graves pour la population, à réduire les risques, à prévenir les destructions et la détresse, à protéger et à sauver les vies humaines et à apaiser les souffrances; soutenir les victimes dans leurs efforts de reconstruction et de réconciliation, revendiquer l'application des principes humanitaires aux victimes et les aider à faire entendre leur voix.

L'engagement en faveur de la protection des civils dans les conflits armés est décrit dans le message du Conseil fédéral concernant la continuation de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine 2012­2016 auquel le présent rapport est annexé (ch. 3.2.6). Elle s'exerce en faveur de l'ensemble des victimes des conflits armés et se fonde sur les traités de droit international public. Si les mesures de protection des civils dans les conflits armés ne visent pas en premier lieu à prévenir les conflits et à promouvoir la paix, elles peuvent, selon les circonstances, y contribuer. Par exemple, le respect du droit international humanitaire, des droits de l'homme et du droit des réfugiés par les parties au conflit peut aider à construire la confiance mutuelle et constituer, par ce fait, une base d'une solution politique au différend.
Cohérence et complémentarité La promotion de la sécurité humaine se différencie de l'Aide humanitaire de la Confédération qui a pour but de contribuer, par des mesures de prévention ou de secours, à la sauvegarde de la vie humaine lorsqu'elle est menacée ainsi qu'au soulagement des souffrances. L'Aide humanitaire de la Confédération est destinée aux populations victimes d'une catastrophe naturelle et, le cas échéant, technologique ou d'un conflit armé.

La complexité des situations humanitaires implique un dialogue permanent et une interaction entre tous les différents instruments de la politique étrangère de la Suisse, notamment entre les acteurs du développement, de l'aide humanitaire, de la promotion et du maintien de la paix, de l'économie et de la sécurité, en complément de l'action menée par d'autres départements et offices de l'administration fédérale. De même, sur le plan international, les instruments de la politique étrangère de la Suisse coopèrent avec différents partenaires, gouvernements, acteurs multilatéraux ainsi qu'avec les oeuvres d'entraide. Un défi qui demeurera à l'avenir est celui de l'intégration des acteurs humanitaires dans les opérations de maintien de la paix.

Tout en reconnaissant la spécificité particulière de l'aide humanitaire et l'importance 5961

qu'il y a de respecter l'espace humanitaire, la Suisse considère comme essentielle la coordination entre les différents acteurs pertinents dans des contextes où sont déployées des missions internationales de paix. D'ailleurs, l'Aide humanitaire de la Confédération dispose de principes directeurs pour ce qui est de la coordination des acteurs humanitaires avec les missions de maintien de la paix.

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